Le vendeur de faux sacs-poubelle taxés pourrait être rapidement

Transcription

Le vendeur de faux sacs-poubelle taxés pourrait être rapidement
Suisse
10
Le Matin Dimanche | 30 novembre 2014
Le vendeur de faux sacs-poubelle taxés
pourrait être rapidement identifié
Enquête L’individu qui a fait fabriquer environ 10 000 faux sacs-poubelle et qui a essayé de les écouler
dans le canton de Neuchâtel a pu réaliser un bénéfice de près de 20 000 francs.
«L’imagination
Fabiano Citroni
des gens
est sans limites»
[email protected]
Responsable politique de la voirie de La Chaux-de-Fonds, Pierre-André Monnard a manqué
tomber de sa chaise en apprenant que de faux sacs-poubelle
taxés circulaient dans sa commune. «L’imagination des gens
est sans limites», relève l’élu
PLR, déterminé à mettre la
main sur l’individu qui a monté
ce business pour s’enrichir. En
début de semaine passée, il a
déposé une plainte pénale.
Commercialiser de faux sacs
peut être lucratif. En 2009, un
épicier en a écoulé 13 000 à Zurich avant d’être arrêté. Les sacs
étaient fabriqués en Serbie, il
avait réalisé un bénéfice de plus
de 20 000 francs. En avril de
cette année, la police belge a interpellé une dizaine de personnes vendant de faux sacs. Lors
des perquisitions, les enquêteurs
ont saisi plusieurs palettes de
rouleaux de sacs, mais aussi
vingt armes à feu, des kilos de
cannabis, des véhicules volés et
des dizaines de milliers d’euros.
10 000 faux sacs fabriqués
Quel a pu être le bénéfice du
faussaire de La Chaux-deFonds? De source sûre, environ
10 000 faux sacs ont été fabriqués. A 2 francs le sac, cela représente une rentrée d’argent de
20 000 francs au maximum. Il
faut retrancher à cette somme
le coût de fabrication. Il est
de 20 centimes par sac
(2000 francs pour 10 000 sacs),
selon Rudolf Brändli, représentant de l’entreprise Petroplast Vinora, leader sur le marché suisse
des sacs-poubelle. Le faussaire
peut donc tabler sur un bénéfice
de 18 000 francs s’il a eu un contact direct avec le fabriquant et
s’il écoule tout son stock. S’il doit
passer par un intermédiaire pour
la fabrication, il devra faire une
croix sur 10 centimes par sac et
«se contenter» d’un bénéfice de
17 000 francs.
Qui a voulu empocher cette
somme rondelette à Neuchâtel,
un canton qui a introduit la taxe
au sac en janvier 2012? Vanessa
Guizzetti, procureure en charge
de l’enquête, répond que la
plainte pénale a été déposée il y a
Pierre-André Monnard,
responsable politique de la voirie,
à La Chaux-de-Fonds
C’est lors d’un contrôle de routine que la Brigade des incivilités de La Chaux-de-Fonds a constaté que des faux sacs-poubelle taxés
avaient été écoulés. Ils étaient légèrement différents du sac officiel (petite photo). Photos: Christian Galley, DR
seulement dix jours et que des
actes d’instruction sont en cours.
La magistrate pourra s’appuyer sur l’enquête préliminaire
effectuée par la commune de La
Chaux-de-Fonds. Elle a débuté
le 23 octobre. Ce jour-là, la Brigade des incivilités de la voirie
(voir encadré) sillonne la ville et
tombe sur des sacs-poubelle
suspects. Ils ont tout du sac-poubelle officiel, à un détail près. La
commune ne tient pas à le dévoiler. Selon nos sources, il est
tout bête. Le sac-poubelle offi-
ciel a un lien coulissant orange
(notre illustration), la contrefaçon un vert.
La brigade prend un sac suspect et le montre à Bekir Omerovic, responsable de la déchetterie intercommunale. Ni une ni
deux, le cadre de la voirie téléphone à Emmanuel Maître, directeur de Vadec SA, chargée de
la gestion globale des déchets
dans le centre de l’arc jurassien
suisse. Cette entreprise chapeaute la production et la distribution des sacs-poubelle taxés
dans le canton de Neuchâtel. Le
directeur de Vadec SA demande
à voir le sac incriminé. A peine
reçu, il le transmet à la société
Petroplast. Elle fabrique et distribue les «vrais» sacs-poubelle
taxés vendus à La Chaux-deFonds.
Le verdict des dirigeants de
Petroplast est clair, ils n’ont pas
fabriqué le sac au lien coulissant
vert. Ils mènent leur propre enquête. Selon nos informations,
ils découvrent que la contrefaçon est l’œuvre de leur princi-
La Brigade des incivilités ne laisse rien passer
$C’est la Brigade des incivilités
de La Chaux-de-Fonds qui a repéré les sacs-poubelle suspects.
Composée de six employés de
la voirie assermentés, cette brigade a principalement pour
mission de traquer les citoyens
qui violent la loi concernant le
traitement des déchets. Chaque
jour, deux équipes sillonnent la
ville à pied ou en voiture et regardent si des infractions ont eu
lieu. Exemple: la brigade remarque que des sacs noirs (et
non des sacs officiels gris) ont
été déposés sur le trottoir. Elle
prend des photos du sac avant
de l’ouvrir pour essayer de trouver des éléments permettant de
confondre son propriétaire. Si
elle trouve une enveloppe contenant le nom d’une personne,
elle la prend en photo avant de
rentrer au bureau pour remplir
un rapport de dénonciation
destiné à l’administration des
travaux publics. «Les membres
de la brigade ont l’œil aguerri»,
prévient Joseph Mucaria, numéro un de la voirie. C’est ainsi
que le 23 octobre, lors d’un contrôle de routine, ils ont remarqué que le lien coulissant d’un
sac gris était vert et non orange.
C’était le début de l’affaire des
faux sacs taxés. U
Jean-Marie Cleusix est très pointilleux
sur les impôts… des autres
Cocasse Dans un courrier
adressé dernièrement à un
instituteur jubilaire, le chef de
l’Enseignement valaisan empêtré dans ses affaires fiscales
fait preuve d’un zèle risible.
«Félicitations pour vos 35 ans de
service.» C’est le début d’un
courrier adressé cet automne à
un instituteur haut-valaisan pour
le féliciter de son engagement au
sein de l’école du canton.
Sur une quinzaine de lignes
en allemand, le chef du Service
Contrôle qualité
de l’enseignement valaisan,
Jean-Marie Cleusix, en consacre
une bonne dizaine, et tout
autant de poésie administrative,
à citer des articles de loi qui expliquent que l’ayant droit se voit
gratifier d’une prime de
500 francs pour ses bons et
loyaux services. Au-delà de la
somme – un peu chiche pour tant
de temps passé à faire l’éducation des petits Valaisans – c’est
un court passage signé par le
haut fonctionnaire qui a fait
doucement rigoler les quelques
personnes qui ont eu vent de cette lettre et qui l’ont fait parvenir
au «Matin Dimanche». En effet,
Jean-Marie Cleusix, empêtré
dans des irrégularités fiscales
depuis de longs mois, se permet
sans fausse honte de préciser
dans la missive: «Nous vous rendons attentif que cette prime est
soumise aux impôts et aux retenues d’usage.» Une preuve, s’il
en faut, que Jean-Marie Cleusix
se montre très pointilleux lorsqu’il s’agit des impôts… des
autres. Stéphanie Germanier
pal concurrent, l’entreprise
Schlatter Plastic, basée dans le
canton de Saint-Gall.
Robert Scherrer, le directeur
de cette société, nous confirme
par courriel avoir fabriqué 1000
rouleaux de 10 sacs de 35 l. Il dit
avoir honoré une commande et
n’avoir jamais eu l’intention de
tromper qui que ce soit.
Un proche du dossier se
montre sceptique. «Schlatter
Plastic sait que son concurrent
Petroplast jouit d’un contrat
d’exclusivité avec le canton de
Neuchâtel pour la fabrication de
Qui est le mandant?
L’entreprise lucernoise devra
sortir de son mutisme lorsque la
procureure Vanessa Guizzetti
lui demandera des comptes.
Flexopac devra donner le nom
de son mandant, pour peu qu’il y
en ait un. Apprendra-t-on qu’il
s’agit d’un des responsables des
quelque cinquante commerces
chaux-de-fonniers
(Migros,
Coop, Denner, Jumbo, PAM,
Landi, La Poste, kiosques, épiceries, quincailleries, stations essence, petits magasins d’alimentation) autorisés à vendre les sacs-poubelle
taxés officiels? Ou un commerçant établi dans une autre commune du canton?
Difficile de le savoir. Mais
l’étau se resserre autour du fraudeur qui a passé commande en
été 2013 et qui semble avoir attendu un an pour écouler son stock.
Depuis la médiatisation, lundi, de
la plainte pénale déposée par la
commune, plusieurs Chaux-defonniers ont en effet remarqué
qu’ils avaient acheté à leur insu,
semble-t-il, de faux sacs-poubelle. Ils se sont manifestés auprès
de la voirie et de la police. U
Le nombre de réfugiés
va exploser en 2015
Asile La Confédération estime
Jean-Marie Cleusix,
chef de l’Enseignement
en Valais. Olivier Mairek/Keystone
sacs taxés. Lorsqu’il a reçu cette
commande, cela aurait dû lui
mettre la puce à l’oreille.»
Dans son courriel, Schlatter
Plastic assure n’avoir rien à se
reprocher. Indirectement, elle
pointe donc du doigt l’entreprise lucernoise qui lui a commandé ces 1000 rouleaux. Selon nos
sources, il s’agit de Flexopac, active dans le marché des déchets
depuis sa création, il y a 17 ans.
Cette société était-elle consciente qu’elle commandait de
faux sacs-poubelle? Qui lui a demandé de trouver un fabriquant
pour ces 1000 rouleaux? Un
particulier ou un commerce
neuchâtelois? Contactée par téléphone et par courriel, Flexopac n’a pas souhaité répondre à
nos questions.
que les demandeurs d’asile vont
déferler sur la Suisse. Selon les
prévisions de l’Office fédéral
des migrations (ODM), il y aura
l’an prochain près de 31 000
nouveaux requérants, soit 30%
de plus que cette année. Autrement dit, autant qu’en 1999,
pendant la crise kosovare. La
porte-parole de l’ODM Gaby
Szöllösy ajoute: «La plupart des
arrivants seront des personnes
nécessitant protection.» Les experts en migration estiment en
effet que la situation chaotique
en Libye va permettre aux passeurs d’amener encore plus de
réfugiés originaires d’Afrique en
Europe. Les cantons s’inquiètent et craignent de «graves problèmes» d’hébergement. Le
système en place a déjà atteint
ses limites, pourtant l’ODM calcule que les capacités d’accueil
doivent être nettement augmentées. «Il faudra plusieurs
milliers de lits en plus que cette
année», précise Gaby Szöllösy.
Fabian Eberhard