Démocratie et lobbying : le nécessaire équilibre à
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Démocratie et lobbying : le nécessaire équilibre à
Démocratie et lobbying : le nécessaire équilibre à trouver entre intérêt général et intérêts particuliers Monsieur le Recteur, Monsieur le vice-Recteur, Chers Etudiants, Mesdames et Messieurs, C’est un très grand honneur pour moi d’avoir été invité à prononcer ici ce soir la leçon inaugurale de la nouvelle année de l’Université Catholique de Louvain. Pour le représentant que je suis d’une organisation fondée il y a à peine plus de deux ans, parler aux acteurs qui perpétuent une tradition et un enseignement académique au plus haut niveau qui remonte au XVème siècle est évidemment impressionnant. Je vais aborder ce soir les questions de la démocratie et de la confrontation entre l’intérêt général et les intérêts particuliers. Parlant dans une enceinte universitaire aussi prestigieuse, je ne me hasarderai pas à des développements théoriques sur ces questions mais plutôt, et je suppose que c’est la raison pour laquelle vous m’avez invité à prononcer cette leçon inaugurale, j’essaierai d’apporter la vision et l’analyse « vécues », si j’ose dire, du praticien des affaires publiques que je suis. La question que j’aimerais traiter avec vous ce soir est donc celle du nécessaire équilibre à trouver entre intérêt général et intérêts particuliers dans le processus d’élaboration des lois de nos sociétés démocratiques. Le contexte, bien sûr, est celui que nous connaissons où ce processus est fortement influencé par le plaidoyer omniprésent d’une multitude de lobbys privés défendant des intérêts particuliers. Afin d’aborder cette question avec autant de rigueur que possible, il me semble important de poser quelques définitions opérationnelles. Et tout d’abord, qu’est-ce que la démocratie ? Je vois trois niveaux importants au phénomène démocratique : - Celui des élections libres et au suffrage universel des responsables politiques. Ce niveau communément admis, évidemment indispensable, n’est pas suffisant pour garantir la dimension démocratique de la société : on sait que nombre de régimes dictatoriaux, et parmi les plus effroyables que l’Histoire ait connu, furent le résultat d’élections libres. - Celui de l’état de droit : les règles du jeu social doivent être clairement établies et s’appliquer de façon égale à tous les acteurs. C’est la question de l’égalité devant la loi. - Enfin, celui du processus d’élaboration des règles (des lois) qui organisent notre société et qui doivent, en démocratie, avoir comme objectif la promotion de l’intérêt général. Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] Regardons maintenant, une définition du lobbying qui va nous permettre d’analyser ensuite l’interaction entre démocratie et lobbying. Sur le terrain, le lobbying se caractérise par une expression organisée d’intérêts économiques particuliers qui visent à influencer en leur faveur le contenu des règles élaborées par les législateurs et les régulateurs. Avant de laisser les définitions de la démocratie et du lobbying interagir, et peutêtre s’affronter, une expression supplémentaire doit être clarifiée, celle de l’intérêt général. L‘intérêt général, de notre point de vue de praticiens de la chose publique, est un concept qui emprunte à la notion économique de bien public sans néanmoins la recouper totalement. Il existe des approches différentes de la notion d’intérêt général mais j’aimerais défendre ici ce soir le fait que l’intérêt général est un état d’organisation de la société dont les caractéristiques sont similaires à celles que les économistes attribuent aux biens publics. Un bien public, on le sait, est un bien dont l’utilisation est non rivale et non exclusive. La non-rivalité signifie que lorsqu’un bien a été produit, sa consommation par un agent particulier (par un citoyen) ne réduit pas sa consommation par un autre agent (un autre citoyen). La non-exclusivité signifie qu’une fois que le bien a été produit tout le monde peut en profiter. Sur le sujet dont s’occupe Finance Watch, on peut montrer qu’une « finance au service de la société » comme le dit notre devise n’est ni rivale ni exclusive, d’où mon utilisation du concept de bien public pour spécifier le sens de l’intérêt général . Définir la recherche de l‘intérêt général comme l’activité consistant à développer des biens publics a, il me semble, des conséquences importantes : la première, la plus importante incontestablement, est que l’intérêt général n’est pas, ne saurait être, la sommes des intérêts particuliers, fussent-ils nationaux. La deuxième, presqu’aussi importante, consiste à prendre conscience du fait que la recherche de l’intérêt général peut heurter des intérêts particuliers. Cette deuxième proposition ne signifie pas que les intérêts particuliers ne sont pas normaux, légitimes et même indispensables pour le bon fonctionnement d’un système économique. Elle ne signifie pas non plus que les intérêts privés en question ne devraient pas s’organiser pour se protéger, ce qui est précisément l’objet du lobbying. Elle signifie simplement qu’il est normal que la confrontation entre intérêt général et intérêts particuliers apparaisse dans le débat public à un certain moment, qu’une tension se cristallise sur cette question, et que les responsables de la démocratie et de l’intérêt général que sont les élus et les fonctionnaires se doivent d’aborder ce point avec la conviction que l’intérêt général n’est pas égal à la somme des intérêts particuliers. Ils doivent également être préparés au fait que le statut de valeur suprême que revêt l’intérêt général en démocratie va créer des situations où certains intérêts particuliers pourront ou devront être heurtés. Deux exemples tirés du travail sur la réglementation financière réalisé par Finance Watch peuvent illustrer ce propos : Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] - Premier exemple : les banques les plus grosses, baptisées dans le jargon de banques systémiques, sont comme on le sait considérées comme « trop importantes pour faire faillite » (« too big to fail »). De cette constatation dérive le fait qu’elles sont soutenues par la collectivité et bénéficie d’une garantie publique sur la continuité de leur activité, ce qui crée un système dit d’aléa moral qui voit les bénéfices des établissements bancaires aller aux apporteurs de capitaux de ces établissements mais les pertes, en tous cas celles qui sont importantes, aller aux contribuables. Cette situation extrêmement favorable pour les intérêts particuliers des apporteurs de capitaux bancaires est, évidemment, inversement défavorable pour l’intérêt général non seulement du fait du risque qu’elle crée pour les budgets publics en cas de défaut bancaire (comme on le sait, ce risque est bien réel puisque quelque 1 600 milliards d’Euros de garanties publiques en faveur des banques ont été émises par les Etats membres de l’Union depuis le début de la crise et quelque 400 milliards ont été effectivement déboursés) mais également, et surtout, parce qu’elle crée une incitation pour les plus grosses banques à développer sur une échelle toujours plus grande la fraction de leurs activités les moins utiles à l‘économie et à la société. - Deuxième exemple : le trading à haute fréquence, technique permettant d’acheter et de vendre des valeurs mobilières en Bourse plusieurs milliers de fois le temps d’un clignement d’œil, repose sur la capacité technologique de certains opérateurs leur permettant de tirer avantage des meilleurs prix sur les marchés financiers en passant devant les investisseurs traditionnels quand ceux-ci exécutent leurs transactions. Ces transactions à haute fréquence représentent près de la moitié des échanges sur les Bourses européennes et environ les deux tiers sur celles d’Amérique du Nord. Malgré son caractère légal, l’effet net de cette activité est de vider les Bourses de leur raison d’être économique qui consiste à être le lieu où se rencontrent l’offre et la demande véritable de capital et de chasser les vrais investisseurs, lassés de se faire jouer à chaque transaction, vers des lieux de transaction hors Bourse dénués de transparence. Les questions de l’aléa moral bancaire et du trading à haute fréquence illustrent bien le dilemme intérêt général / intérêts particuliers dont nous traitons ici : dans les deux cas une situation bénéficie à des intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général ; dans les deux cas, la disparition de ces situations créerait un bien ni rival ni exclusif pour l’ensemble de la société ; dans les deux cas les intérêts privés en jeu sont considérables ; dans les deux cas, la rhétorique développée par ces intérêts particuliers pour s’auto-justifier consiste à combiner un argumentaire mêlant une vulgate de main invisible d’Adam Smith (« si ça gagne de l’argent, c’est bon pour la société ») avec des arguments techniquement infondés mais suffisamment complexes pour provoquer un réflexe de peur chez des responsable politiques par essence non spécialistes de ces questions. Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] Nous savons vous et moi qu’Adam Smith, professeur de philosophie morale à l’Université de Glasgow, n’a jamais conçu son idée de « main invisible » (au demeurant fort discrète à l’aune de son œuvre) comme l’alpha et l’oméga de l’organisation sociale. Adam Smith fut de fait l’avocat d’une régulation stricte puisqu’il alla jusqu’à dire dans « La Richesse des Nations » que la réglementation, malgré son caractère de contrainte à l’égard de la liberté naturelle qui est le propre des affaires, est nécessaire pour la « sécurité de l’ensemble de la société » quand la liberté naturelle de quelques-uns met en danger cette sécurité et l’équilibre de la société. Mais l’histoire des idées et des débats publics est faite de holdups intellectuels et Adam Smith qui fut le chantre d’un équilibre harmonieux à trouver entre intérêt général et intérêts particuliers fut érigé par les apôtres d’un laisserfaire méprisant la notion même d’intérêt général en prophète de la somme des égoïsmes se transformant miraculeusement en intérêt général grâce à une main invisible que certains n’hésiteront pas, notamment dans la sphère financière, à faire l’égal de Dieu lui-même. On voit que les responsables politiques, s’ils veulent aborder ces questions avec la détermination qui convient, doivent non seulement être convaincus que l’intérêt général n’est pas la somme des intérêts particuliers mais également avoir la lucidité et le courage de remettre en cause des intérêts particuliers lorsque ces derniers s’exercent au détriment de la collectivité. Ils doivent pour cela commencer par s’armer d’un arsenal conceptuel leur rappelant que l’initiative économique privée, pour indispensable et légitime qu’elle soit, ne saurait constituer le seul moteur d’organisation de la société car sa tendance naturelle lorsqu’elle n’est pas contrôlée est, toujours et partout, de devenir hégémonique en plaidant soit pour l’absence de règles au nom de la liberté soit pour des règles générales rédigées à son avantage. On se souvient de la citation d’Henri Lacordaire « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ». La pratique du processus d’élaboration des lois qui amène à constater de nombreux cas de capture de l’intérêt général par les intérêts particuliers donne malheureusement souvent envie de compléter cette belle phrase de Lacordaire par l’ajout d’un conditionnel sur le verbe « affranchir » (« c’est la loi qui devrait affranchir »). Telle est en tous cas l’expérience que mes amis et collègues de Finance Watch et moi-même avons au quotidien. Revenons à présent aux définitions de la démocratie et du lobbying données en introduction de cette intervention et tentons de les faire interagir: d’un côté la promotion de l’intérêt général et la défense de l’état de droit ; de l’autre la promotion d’intérêts particuliers. Et au milieu, la tension entre ces deux familles d’objectifs arbitrée par les responsables élus ou fonctionnaires. La pratique des affaires publiques montre que deux tendances se dégagent dans cette interaction : la première, déjà évoquée, consiste pour les intérêts privés à s’affubler de façon indue du costume de l’intérêt général (on a ainsi vu au cours de l’année 2011 le lobby des produits dérivés expliquer que la spéculation sur la dette Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] des pays européens en difficulté permettait d’abaisser le coût de financement des Etats membres de l’Union) ; la deuxième, plus subtile et plus perverse, consiste pour ces intérêts à développer des situations leur permettant de se mettre au-dessus des lois, autrement dit de s’abstraire de l’état de droit. Bien sûr, dans la réalité les deux tendances se nourrissent mutuellement et il est d’autant plus difficile pour les responsables politiques de décrypter des arguments aussi touffus que techniques que le jeu des rapports de force joue en leur défaveur lorsque les intérêts privés en présence deviennent tels qu’ils se retrouvent en position de dominer la puissance publique. La déclaration récente de Eric Holder, Attorney General des Etats Unis, devant la Commission bancaire du Sénat américain illustre ce dernier point: interrogé sur sa capacité à poursuivre en justice certains établissements bancaires pour des actes répréhensibles qu’ils avaient commis, Eric Holder répondit en mars 2013 que certaines institutions financières sont devenues tellement importantes, tant dans l’absolu qu’en relatif par rapport au reste de l’économie, que toute action à leur encontre pourrait nuire à l’ensemble de l’économie nationale et même mondiale. Cette déclaration d’Eric Holder, souvent résumée depuis par l’expression du « too big to jail » par référence au fameux « too big to fail », revient à reconnaître que les institutions privées (en l’occurrence financières) les plus puissantes se placent aujourd’hui au-dessus des lois. Mutatis mutandis, on détecte des situations similaires en Europe. Par exemple, le texte de la loi dite de séparation des activités bancaires présentée au Parlement français au début de l’année 2013 stipule dans son étude d’impact, et en violation de la loi française régissant ces études (loi organique du 15 avril 2009), qu’« il est malheureusement impossible, compte tenu du très petit nombre de banques concernées et pour des raisons de confidentialité et de respect du secret des affaires, d’exposer les ordres de grandeur correspondant à la [séparation des activités bancaires] ». On a dans ce cas une loi ordinaire affirmant qu’il est souhaitable de ne pas respecter une loi d’ordre supérieure (loi organique d’ordre constitutionnel) afin de préserver des intérêts privés devenus trop importants. Le législateur, français en l’occurrence, affirme par là sans sourciller la nécessité de s’abstraire de l’état de droit. On pourrait commenter longuement mais on voit en tous cas que, des deux côtés de l’Atlantique, certains intérêts privés, en l’occurrence financiers, sont devenus tellement puissants qu’ils arrivent à se placer, parfois ouvertement parfois sans le dire, au-dessus des lois. Les conséquences de cette situation sur les questions de l’égalité devant la loi et de la primauté supposée de l’intérêt général sur les intérêts particuliers sont considérables. Le lobbying qui est par nature promotion d’intérêts particuliers fait partie intégrante de note processus législatif. Mais lorsque sa tendance naturelle qui est de faire passer ses intérêts particuliers pour de l’intérêt général se combine avec un Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] phénomène « d’inflation de puissance » des intérêts privés représentés, le danger pour l’état de droit et la démocratie devient évident. Avant de conclure, j’aimerais mettre en exergue une problématique liée, également fort importante de mon point de vue. Il s’agit du fait que la tension entre intérêt général et intérêts particuliers n’est pas toujours une tension entre l’intérêt général et des intérêts privés mais bien souvent entre l’intérêt général et des intérêts nationaux. Dans notre monde économiquement globalisé, cette question est d’autant plus importante qu’il n’existe pas de responsable global de l’intérêt général et que les autorités publiques nationales ou régionales ont toutes un double mandat de promotion de l’intérêt de la zone juridico-politique qu’elles représentent et de l’intérêt général, ce qui crée bien sûr en permanence des conflits d’intérêt ou, pire, rend l’accomplissement de leur mission impossible. Ainsi, au niveau de l’Union européenne, on sait que certains Etats membres sont plus égaux que d’autres, ce qui confère de facto à leurs dirigeants le statut de leaders de l’Union européenne malgré le fait que ces dirigeants soient élus dans leur pays d’origine avec comme mandat de défendre les intérêts de leur pays d’origine. Le conflit entre l’intérêt général de l’Union européenne et les intérêts nationaux en question est patent. Au niveau mondial, une situation comparable se retrouve notamment pour les questions économiques et monétaires dans la dominance des Etats Unis et, dans une moindre mesure, de l’Union européenne: ces deux zones se trouvent en effet dans la position d’arbitres des questions concernant l’intérêt général de la planète alors que les intérêts qu’ils défendent sont évidemment nationaux ou régionaux, qu’ils représentent une minorité seulement de la population mondiale et qu’ils sont globalement débiteurs vis-à-vis du reste de la planète. Et si l’on veut illustrer ce propos à un niveau plus local, on peut prendre l’exemple des autorités de supervision financière nationales qui, toutes, ont le double mandat de défense de l’intérêt général et des intérêts de leur place financière (traduire « des institutions financières de leur pays »). La question qui se pose à leur propos est, évidemment, celle de l’attitude qu’elles doivent adopter lorsque la pratique de l’un de leurs « champions nationaux » qu’elles ont également comme mission de défendre va à l’encontre de l’intérêt général. La question n’est pas simple et on perçoit que la question de l’équilibre entre intérêt général et intérêts particuliers est également une question de gouvernance. Pour conclure, je vous propose de nous poser la question de ce qu’il est possible de faire face à la situation que nous avons évoqué ce soir. Il ne s’agit, à mon avis, pas d’interdire le lobbying car cela n’est simplement pas réaliste et probablement pas souhaitable. Il ne s’agit pas non plus de seulement l’encadrer et de se contenter de le rendre transparent, même si cela est indispensable et si les efforts en la matière doivent toujours être renforcés. Il s’agit, si l’on veut que le nécessaire équilibre entre intérêt général et intérêts particuliers soit trouvé, de promouvoir vis-à-vis du lobbying les trois niveaux d’intervention suivants : Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] - - - Un niveau conceptuel tout d’abord: il est fondamental qu’une réflexion théorique riche soit développée sur ce sujet car cette réflexion fondera le terrain conceptuel sur lequel les responsables politiques et administratifs pourront s’appuyer dans le cadre de leur action. On l’a vu en évoquant, trop rapidement, l’exemple de l’œuvre d’Adam Smith : un ancrage théorique solide est le fondement indispensable d’une action publique cohérente. A cet égard, l’opportunité qui m’est donnée ce soir de prononcer cette leçon inaugurale devant vous ne constitue pas simplement un grand honneur mais représente le signe que la réflexion académique, en tous cas dans ce lieu d’excellence qu’est l’Université catholique de Louvain, considère l’importance de ces sujets et entend jouer son rôle essentiel de réflexion, d’analyse et de développement de concepts pouvant être les piliers de l’action. C’est pour moi un signe des plus positifs. Un niveau d’engagement sociétal ensuite: la société civile, dans toutes ses composantes, doit s’emparer de ces sujets. C’est, bien sûr, la raison d’être de Finance Watch sur les sujets financiers car Finance Watch, organisation comptant à ce jour 74 membres dont 40 organisations représentant elles-mêmes de très nombreux citoyens européens, a comme vocation de travailler avec ses Membres afin que chacun d’entre eux puisse développer son propre plaidoyer. Mais ce doit être également la mission d’un nombre croissant d’organisations car l’équilibre des débats nécessite l’intervention d’une pluralité d’acteurs intervenant chacun avec leur mission et la grille d’analyse correspondant à leur environnement conceptuel. La tâche est immense, nous n’en sommes qu’aux balbutiements et bien évidemment, les sujets financiers dont s’occupe Finance Watch sont loin d‘être les seuls qui comptent. Un niveau de mobilisation citoyenne enfin: toute démocratie part des citoyens et se doit d’avoir le service des citoyens comme objectif. Dans le combat, parfois titanesque, entre intérêt général et intérêts particuliers, la mobilisation citoyenne est indispensable car elle seule peut permettre aux élus détenteurs de la représentation démocratique et ayant comme mandat le développement de l’intérêt général de développer le rapport de forces suffisant pour dialoguer de façon équilibrée avec des intérêts économiques particuliers surpuissants. Cette mobilisation citoyenne est, à titre d’illustration, l’objectif de la campagne « Changer la finance » lancée par Finance Watch le 15 septembre dernier, jour anniversaire de la chute de Lehman Brothers (http://www.financewatch.org/informer/campagne-changer-la-finance ). Si les trois niveaux de la recherche académique, du travail de la société civile et de la mobilisation citoyenne se mettent en marche simultanément, alors nous auront une chance de faire regagner à la démocratie une partie au moins du terrain qu’elle a aujourd’hui perdu vis-à-vis de la dictature des intérêts particuliers qui tendent à piloter toujours plus nos sociétés. Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected] Ce combat, certes difficile, n’est pas perdu d’avance. J’en ai l’intime conviction. Mais si nous ne le menons pas, les politiques, même parmi les plus sincères, les plus honnêtes et les plus convaincus, n’arriveront pas à rétablir l’équilibre. Il est trop facile de toujours accuser les politiques de ne pas être assez forts, assez clairvoyants ou assez courageux. Nous sommes tous responsables et il nous appartient à tous, citoyens, chercheurs, enseignants, étudiants et société civile confondus de nous mobiliser et d’agir afin que les valeurs de démocratie et d’état de droit auxquelles nous tenons regagnent le terrain qu’elles ont aujourd’hui perdu. Je vous remercie. Finance Watch – AISBL – Square de Meeûs 38/40, 1000 Brussels - www.finance-watch.org Tel: +32 (0)2 401 87 07 – [email protected]