Revue de presse A Love Supreme

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Revue de presse A Love Supreme
- REVUE DE PRESSE A LOVE SUPREME
in memoriam John Coltrane
adaptation et mise en scène de Luc Clémentin
d!après la nouvelle éponyme d!Emmanuel Dongala
Partenariats
- TSF Jazz
- Africulture
- Afriscope
- Afrik.com
Emissions radio
TSF JAZZ - 89.9 - Coup de projecteur de la rédaction
Rediffusion de l’interview de Luc CLEMENTIN réalisé en 2006 par Laurent SAPIR.
RFI - 89 - Plein sud - Amobé MEVEGUE
Interview de Luc CLEMENTIN
RFI - 89 - Culture vive - Sophie EKOUE
Interview de Luc CLEMENTIN mardi 6 janvier.
TSF JAZZ - 89.9 - Les matins du jazz - Laure ALBERNHE
Matinale consacrée au spectacle avec interview de Sébastien JARROUSSE.
ALIGRE FM - 93.1 - Résonance africaine - Laure MALECOT
Interviews de Luc CLEMENTIN et d’Adama ADEPOJU.
RFI - 89 - L'épopée des musiques noires - Joe FARMER
Interviews de Luc CLEMENTIN et Sébastien JARROUSSE.
RFI - 89 - Plein sud - Amobé MEVEGUE
Reportage au Grand Parquet de Nzunba NISSA.
SORTIR
Publié le 08/01/2010 à 16:14 Le Point.fr - Culture
THÉÂTRE / PARIS
Au suprême Coltrane...
Par Valérie Marin La Meslée
Un monologue balancé et poignant © DR Nelly Santos
La pièce a fait les beaux jours du Tarmac de la Villette en 2006 et tourne
partout dans le monde depuis. Vraiment, si les amateurs de jazz et de
littérature l'ont ratée, qu'ils profitent de sa reprise actuellement au
Grand Parquet ! À l'origine de ce monologue balancé et poignant se
trouve une nouvelle de l'auteur congolais Emmanuel Dongala, à
retrouver dans son recueil Jazz et vin de palme, qui retrace la rencontre
(réelle) entre l'écrivain et le musicien John Coltrane. Le décor est celui
d'un bar derrière lequel va et vient l'excellent Adama Adepoju. Nous
sommes en 1967. Coltrane vient de disparaître. Le barman, qui lui vouait
un véritable culte, commence à raconter. Se souvenant, il fait naître,
comme un magicien convoque une présence, la silhouette de Coltrane,
que l'on va suivre irrésistiblement dans les étapes de sa carrière,
parcours difficile, engagé dans les combats pour les droits civiques,
solitaire dans ses visions d'avant-garde qui l'ont amené au free-jazz ;
autour du barman conteur, un trio de musiciens jouent, bien, et au
moment exact. A Love Supreme est le titre d'une chanson de Coltrane
et, dans ce moment de théâtre, il y a quelque chose qui permet
réellement de "faire sentir l'amour du monde, un amour suprême".
**"A love supreme", adaptation et mise en scène de Luc Clémentin d'après
Emmanuel Dongala. Avec Adama Adepoju. Jusqu'au 24 janvier. Le Grand
Parquet. Du mercredi au samedi à 20 h 30, dimanche à 18 heures (durée 1 h
15). 20 bis rue du département. Paris 18.Tel 01.40.05.01.50. Plein tarif 13 €.
Dimanche 10 janvier 2010
« A Love Supreme (in memoriam John Coltrane) », d’après une nouvelle d’Emmanuel
Dongala (critique de Fabrice Chêne), Le Grand Parquet à Paris
Coltrane, musicien suprême
« A Love Supreme », d’après le disque de John Coltrane du même nom,
s’installe au Grand Parquet, après plus de cent représentations en France et à
l’étranger. Très bel hommage rendu à l’un des plus grands jazzmen modernes,
ce spectacle mêle harmonieusement les notes du musicien aux mots de
l’écrivain congolais Emmanuel Dongala.
Dans la boîte de jazz, les bouteilles brillent sous le feu
des projecteurs. Le décor est planté : un trio de jazz
(basse, batterie, saxophone) et l’hôte de ces lieux qui
nous raconte sa propre histoire, celle d’un Africain
exilé à New York. Nous sommes en juillet 1967, John
Coltrane vient de mourir. Le narrateur se souvient de
sa rencontre, à l’orée de ces années soixante pleines
de tumulte, avec celui qu’il nomme plaisamment JC.
Entre ivresse et luttes politiques, il a partagé
l’intimité de ce grand créateur, qui, du hard bop au
free jazz, inventa la musique de ces temps troublés.
Le propos du spectacle, c’est la passion de la musique
(« Je buvais cette musique »). Son originalité et sa
force viennent du dialogue qui s’instaure entre les
mots et les sons, de l’osmose que Luc Clémentin, le
metteur en scène, a su créer entre le comédien et les
musiciens. Les phrases d’Adama Adepoju sont
souvent ponctuées par les cymbales ou le sax, ou
accompagnées par les cordes de la contrebasse
frottées à l’archet. La musique ne se contente pas
d’illustrer, elle s’insinue entre les mots, puis à
d’autres moments se laisse écouter pour elle-même.
C’est alors un vrai plaisir d’entendre la musique de
Coltrane jouée en direct par un trio d’excellents
jazzmen.
Portait d’un artiste exemplaire
C’est un voyage musical du meilleur cru, donc, mais aussi, non sans un certain
didactisme, le portrait d’un artiste exemplaire, adulé par les uns, incompris par
beaucoup d’autres. Dongala nous fait sentir l’ambition démesurée de Coltrane,
« l’homme qui a tiré tout ce qu’on peut tirer d’un saxophone ténor », explorateur
infatigable de nouvelles sonorités. Il insiste sur son absolue sincérité (« un créateur
doit donner ce qu’il ressent vraiment »), sur son intransigeance et son intégrité, qui
parfois le conduisaient à dérouter son auditoire. Il montre aussi le « mysticisme »
de celui pour qui la musique a toujours été un peu plus que la musique, qui voulait à
travers elle faire sentir au public « l’amour du monde, un amour suprême ».
Pourtant surnommé « le Malcolm X du jazz », Coltrane n’était pas un artiste
engagé, et ne vivait que pour son art. Dongala exploite bien cette contradiction, en
la replaçant dans son contexte : celui de la lutte des Afro-Américains pour les droits
civiques et de la répression dont ils furent victimes. Un artiste est toujours
indissociable de son époque. C’est justement par sa totale liberté de création que ce
musicien porté aux expérimentations extrêmes, et prenant à chaque instant le
risque de l’isolement, rejoignait les aspirations et les luttes des Noirs américains.
Un peu trop sage ?
Les néophytes comme les fans apprécieront le talent très réel des musiciens, qui
revisitent brillamment quelques-uns des standards du maître, Crescent, Naima ou
Alabama. Le frisson passe lorsque retentissent les fameuses notes de contrebasse
qui servent d’introduction à A Love Supreme. Peut-on reprocher à ce trio de n’avoir
ni la puissance ni l’intensité du légendaire quartet de Coltrane ? Évidemment pas.
Tout au plus peut-on regretter que le cadre imposé par le spectacle l’incite à une
certaine retenue, l’oblige à rester un peu trop « sage ». Même s’il lui manque peutêtre un grain de folie, A Love Supreme constitue une excellente initiation à l’univers
du musicien, et parvient, c’est l’essentiel, à nous transmettre l’amour de Coltrane.¶
Fabrice Chêne - Les Trois Coups
Jeudi 31 décembre 2009
Quand le théâtre rencontre le jazz
Ceux qui n'avaient pas pu assister à une représentation de A Love Supreme au
Tarmac de la Villette en 2006 peuvent dès à présent courir voir ce formidable
spectacle, à l’affiche du Grand Parquet à Paris du 7 au 24 janvier.
Le texte de Dongala (lire aussi Jazz et Vin de Palme) est remarquablement
servi par le comédien Adama Adepoju et est soutenu par un superbe trio
coltranien composé de Sébastien Jarrousse, Jean-Daniel Botta et Olivier Robin.
Un texte déchiré dit avec la conviction du jazz chevillée au corps. Une musique
qui brasse Coltrane avec une réelle incandescence. L'esprit et l'âme du
musicien planent sur la représentation.
A la création, nous étions sortis de ce spectacle en espérant une
programmation prolongée car, vous l'avez compris, nous avions eu un vrai coup
de cœur.
Gageons qu'en ce début d'année vous le partagerez tous avec nous.
La tribune d’Alger – 24 février 2010
«Nous étions la musique et cette musique
était J.C.»
24-02-2010
Par Sihem Ammour
Lundi dernier, le Centre culturel français d’Alger a convié les mélomanes et les amateurs de
théâtre à une soirée exceptionnelle où la magie du 4ème art a fusionné avec la puissance
enivrante du jazz pour offrir un spectacle envoûtant : A Love supreme In memoriam John
Coltrane, sur une scénographie, une adaptation et une mise en scène de Luc Clémentin,
d’après la nouvelle éponyme d’Emmanuel Dongala publiée dans les années 1980 dans le
recueil Jazz et vins de palme. En entrant dans la salle de spectacle du CCF où le décor est
planté, les spectateurs sont plongés dans l’ambiance d’une boîte de jazz. D’un côté, un
imposant bar avec son mur empli de bouteilles scintillantes sous les lumières des spots. De
l’autre côté de la scène trônent en maîtres des lieux une batterie, une contrebasse et un
saxophone alto, l’instrument fétiche d’un des plus grands maîtres du jazz contemporain.Vers
19 heures, dans une salle archicomble, les musiciens entrent sur scène et les premières notes
jazzy de Crescent crescent, l’une des compositions du «sorcier du jazz», emplissent les airs.
Sébastien Jarousse au saxophone alto, Olivier Robin à la batterie et Jean-Daniel Botta à la
contrebasse donnent le ton de la soirée en hommage à John Coltrane que l’on surnommait
également «le Malcom X du jazz». Après cette mise en bouche alléchante, le comédien
Adama Adepoju, interprétant le rôle du barman, entre et partage avec le public ses souvenirs
nostalgiques de sa rencontre et de son amitié avec celui qu’il surnommait affectueusement
«J.C.». Il se souvient de cette chaleur suffocante, en cette journée de juillet 1967, où il a
appris la funeste nouvelle de la mort de J. C. Virtuose du saxophone alto, John Coltrane
avait quitté le quintette de Miles Davis pour explorer sa propre voie et «faire sentir l’amour
du monde, un amour suprême». Ainsi, durant plus d’une heure, on suivra le parcours de
celui qui excellait dans le hard bop avant de devenir la référence en free jazz. Un parcours
qui emporte le public au cœur de Harlem de ces années soixante, avec les «éternelles soirées
dans des boîtes enfumées où les notes de jazz étaient entremêlées aux parfums des femmes
fatales et aux relents éthyliques». Mais c’est aussi, le temps où il ne faisait pas bon d’être
Noir. Le temps des luttes politiques. Harlem s’enflamme dans des émeutes antiracistes
sanglantes et le mouvement des Blacks Panthères s’affirme. C’est aussi le temps des crimes
racistes les plus abjects, à l’instar de cet incendie d’une église afro-américaine où quatre
petites filles périrent, et que Coltrane immortalisa dans sa composition Alabama. Au milieu
du tumulte de cette vie new-yorkaise, incompris, après avoir essuyé plusieurs échecs,
Coltrane confiera alors au narrateur : «Le but de ma méditation à travers la musique est de
m’ouvrir à Dieu, c’est-à-dire à tout, à l’amour du monde, des hommes, m’ouvrir au soleil,
aux vibrations, à l’énergie cosmique. Cela me permettra alors d’élever les gens, de les
inspirer pour qu’ils puissent atteindre leur capacité de vivre une vie ayant un sens, car,
voyez-vous, il y a certainement un sens à la vie !» Puisant dans l’ancestrale technique du
griot africain, Adama Adepoju, par ses talents de conteur, emporte les spectateurs sur des
rivages irréels où déferlent les notes des talentueux musiciens présents qui l’accompagnent
avec les plus belles créations de J.C.L’un des moments fort de la soirée est l’appel du tamtam exécuté magistralement par le batteur Olivier Robin, qui, après un crescendo, le clôture
dans un soupir subjuguant les mélomanes qui le gratifièrent d’une retentissante ovation. Le
metteur en scène Luc Clémentin a réussi à relever le défi de créer une véritable symbiose
entre les musiciens, le comédien et le public. La pertinence de la mise en scène n’a négligé
aucun détail. Il a su donner corps à l’émouvant texte de Dongala et à la puissance musicale
du rebelle du jazz. A la fin du spectacle, le public a certainement saisi le sens profond d’une
des répliques du comédien : «Nous écoutions. Nous écoutions ? Non, nous étions la
musique et cette musique était J.C.»
Sapho chante Léo Ferré
A LOVE SUPREME
Le Grand Parquet (Paris) janvier 2010
Spectacle musical conçu et mis en scène par Luc
Clémentin d'après un roman de Emmanuel Dongala, avec
Adama Adepoju, Sébastien Jarousse, Olivier Robin et
Jean-Daniel Botta.
"A love supreme" est un spectacle hommage qui conduit le
public sur les traces de John Coltrane. Il se joue au Grand
Parquet, scène chapiteau posée dans un no man's land entre
les métros Stalingrad et Porte de la Chapelle. Là, se recrée
l'esprit des clubs de jazz de l'Amérique des années 60.
Rappelez-vous qu'au dehors c'était la lutte des Noirs pour la revendications des
mêmes droits civils que les Blancs : Black Power, Black Panthers.
A l'intérieur du chapiteau, notre narrateur (Adama Adepoju) parle de ses
rencontres et de son amitié pour "J.C" (John Coltrane), tandis que le trio Sébastien
Jarrousse, Jean-Daniel Botta, Olivier Robin complète musicalement l'évocation
du musicien.
Approché par petites touches, à travers la nouvelle "A love Supreme in memoriam
John Coltrane" d'Emmanuel Dongala, J.C reste mystérieux et insaisissable,
s'incarnant dans la musique, en quête d'une synthèse absolue entre sa musique et
son être. L’attention est portée sur les émotions de ses amis, comme si la musique
était venue les chavirer et les transformer. Une musique qui est aussi un combat et
qui dépasse toujours l'anecdote. Dans le spectacle, Coltrane semble motivé par une
démarche individualiste qui touche au mystique. Perfectionniste et solitaire, il place
sa musique sur un plan quasi religieux, bouleversant les règles ou les habitudes, et
invite le public dans la transe.
Spectacle magistral, la mise en scène privilégie le naturel et offre toute liberté au
comédien. Adama Adepoju est un conteur exceptionnel, convaincu et captivant. Il
initie un dialogue riche avec le trio des musiciens, qui parfaitement en place,
répondent et argumentent au travers de leurs instruments.
"A love supreme" est un spectacle réjouissant, à ne pas manquer en ce début
d'année.
Sandrine Gaillard
www.froggydelight.com
Un Soir Ou Un Autre
dimanche, 10 janvier 2010
John Coltrane est vivant
Guy DEGEORGES
Dans cette baraque près des voies de la Gare du Nord, on pourrait se
croire dans un club de jazz à New-York. Sur la scène des spectateurs attablés,
le brouhaha des conversations, un barman qui nous réchauffe d'un ballon de
rouge, avant de se révéler en comédien aux premières mesures jouées par le
trio sans piano. Dans son regard doux et triste affluent les souvenirs de ce jour
de juillet 1967, lorsqu'il apprit la mort de J.C.. Il se saoule, se balance, danse,
rie et conte, ramène Coltrane en direction de l'Afrique, à force d'emphase,
de bonhomie, de générosité.
Photo par Nelly Santos
Ses mots seuls ne sont rien, belles anecdotes, hommages fervents, justes
reflets impuissants de mélodies insaisissables et d'envies d'infinis. Mais c'est
l'équilibre entre le récit et la musique qui est remarquable ici, sans jamais que
l'un ne gêne l'écoute de l'autre. Les quatre jouent, chantent ensemble, se
soutiennent et se consolent. La voix du témoin est portée par les
trois instruments, jusqu'à s'élever en chant. Mais souvent, elle choisit sagement
de se taire, laisse parler le saxophone une fois dite quelle douleur inspira
Alabama, ou une fois annoncée la soif d'amour universel qui porte A love
Supreme. Le saxophoniste, alors, de tenter de s'emporter jusqu'à s'effacer luimême, faire oublier l'instrument pour faire entrevoir des éclats du tout et des
fulgurances de beauté. Sans imiter John Coltrane, note pour note, son pour
son. Que peut dire le conteur après ? Encore révéler ses doutes, les
incompréhensions, les embûches rencontrées par Coltrane sur son chemin, à
chaque étape de cette quête sans fin. Rappeler la condition des noirs
américains, tandis qu'un chorus de batterie prend des accents de rébellion.
Évoquer la vocation de J.C., s'interroger sur celle de l'artiste tout court, passeur
vers l'absolu et inspirateur de vie. Coltrane s'estompe dans le continent oublié
des sixties. Ce monde est mort sans doute, disparu dans la lassitude ou la
confusion. Mais la musique survit, une flamme est ranimée.
Kourandart
Le webmag qui fait grand K de la culture
http://kourandartavignon.unblog.fr/2010/01/19/a-love-supreme-in-memoriam-john-coltrane-au-grand-parquet-par-angeliquelagarde/#more-781
A Love Supreme In Memoriam John Coltrane au
Grand Parquet par Angélique Lagarde
Posté par angelique lagarde le 19 janvier 2010
© Nelly Santos
A Love Supreme
In Memoriam John Coltrane
D’après la nouvelle d'Emmanuel Dongala
Mise en scène de Luc Clémentin
Avec le comédien Adama Adepoju, Sébastien Jarousse (saxophone ténor), Mauro
Gargano ou Jean-Daniel Botta (contrebasse) et Olivier Robin (batterie)
40 ans après JC
Ce très beau spectacle alliant musique en live et théâtre a été créé au TARMAC de la
Villette durant la saison 2006-2007, en hommage au quarantième anniversaire de la
disparition de John Coltrane. Novice ou esthète, la dimension sacrée que ce
saxophoniste de génie a apportée au jazz ne pourra vous échapper.
La pièce s'ouvre sur le morceau Crescent qui nous plonge immédiatement dans cette fin
des années 60 au fond d'une boîte de jazz dont le propriétaire va nous narrer la rencontre
qui a changé sa vie avec JC, le messie de la “black music”. Love supreme d'Emmanuel
Dongala fait partie du recueil de nouvelles Jazz et vin de palme qui connut un immense
succès en Afrique francophone et qui est encore aujourd'hui intégré aux programmes de
nombre de lycées.
Nous sommes en 1967, notre hôte vient d'apprendre la mort de son idole. A la description
du choc de sa compagne Nancy, nous comprenons l'importance du lien entre les deux
hommes. La longue introduction en musique fait écho aux mots du comédien, Adama
Adepoju, lorsqu'il évoque les heures difficiles où John Coltrane avait du mal à trouver son
public à cause de ses trop longs préambules et conclusions… Le saxophoniste prend alors
un peu de recul et après une longue pause, revient là où le succès l'attendait. De la même
façon, le second morceau joué lors de cette représentation reçoit notre enthousiasme, les
musiciens parviennent à « faire entendre à l’auditoire l’amour du monde, l’amour suprême
».
Le succès au rendez-vous, mais JC reste fidèle à ses amis. S'il devient le porte drapeau de
la lutte des noirs américains pour leurs droits civiques, il n'appartient pas pour autant
officiellement au Black Panther Party. Il accepte néanmoins que son message d'amour,
apolitique à l'origine, puisse aider à une forme de justice. Il devient ainsi « le Malcom X du
Jazz ». Lorsqu'un peuple est sourd au discours, il ne peut fermer les oreilles à la pureté
d'un chant sacré, à un hallelujah : « la sincérité n’est pas conseillée à qui veut devenir
riche ou puissant, alors il reste l’Art».
La mise en scène de Luc Clémentin propose une alternance entre le récit et la musique. Le
patron de boîte accoudé à son zinc s'adresse à ses clients confortablement installés à des
petites tables de bistrot tandis que les standards du jazz viennent ponctuer ses mots. Il faut
saluer la performance des trois musiciens Sébastien Jarousse (saxophone ténor), Mauro
Gargano (contrebasse) et Olivier Robin (batterie) qui jouent dans une parfaite écoute les
uns des autres. Encore une fois, esthète ou novice, l'auditoire appréciera la juste reprise
des fabuleux morceaux de John Coltrane notamment Alabama composé en réaction à
l'assassinat de deux petites filles noires dans une explosion, « 2 minutes 20 de colère
dominée » et bien entendu Love Supreme. Remercions chaque protagoniste pour ce joli
moment qui célèbre le triomphe de l'artiste sur le politique en nous offrant ces quelques
notes d’absolu.
Angélique Lagarde
Théâtre Posté par gee wee le 2010-01-16
Luc Clémentin - "A love Supreme : in memoriam
John Coltrane" au Grand Parquet (8/01-24/01)
A Love Supreme offre un hommage magnifique à John Coltrane. "JC is
dead" nous dit le personnage au début. "JC is still alive" nous dit le
spectacle tout entier.
C'est avec ravissement que je suis venu m'installer dans la salle chaleureuse du
Grand Parquet, organisée pour l'occasion en club avec son bar, ses tables et
chaises, quelques photos de Charlie Parker ou Miles Davis. Un lieu où l’on
converse et où l’on mange, donc. Sur la droite, la scène est agrémentée des
instruments du trio. Mais les enceintes diffusent déjà du jazz.
En fait, nous entrons dans l'espace scénique, au cœur d'un lieu déjà vivant où
les musiciens déambulent et où l'acteur sert des verres derrière le bar.
D’emblée, ce prolongement de la scène donne la tonalité d'un spectacle humble
et sensible qui traduit une réelle tendresse pour John Coltrane et sa musique.
Le spectacle commence sans coupure : les mouvements devant le bar
s'estompent, les musiciens prennent place et commencent à jouer...
Il est plaisant de noter que les arrangements des morceaux de Coltrane (ou
qu'il a joué) ne "singent" pas le jeu de Coltrane, n'en reprennent ni les
inflexions, ni le rythme, ni le timbre (ici plus feutré et moins chargé en son et
en tension). D’ailleurs, les musiciens (et le spectacle en entier) ne prétendent
pas reconstituer le jeu de Coltrane. Impossible, bien entendu, quand on pense
à son génie ! En plus nous avons ici un trio, formation non représentée dans la
discographie de Coltrane. Au contraire, les musiciens réinvestissent donc le jeu
de Coltrane dans des espaces multiples (musical par les morceaux, mais
également narratif et littéraire, voire philosophique).
Après une longue et prenante introduction musicale, le barman intervient et se
rappelle : « juillet 1967. JC est mort. » Il retrace alors, par anecdotes, la quête
musicale de John Coltrane et l'impact qu'elle a pu avoir dans sa propre vie.
Le ton est immédiatement complice. Le barman nous raconte, comme à des
amis ou à des frères. Et sa sincérité, sa simplicité, son authenticité, s'accordent
bien avec la musique de John Coltrane, sa densité, sa profondeur. C'est JC
remémoré, réinvesti d'une façon personnelle, intime.
L'interprétation d'Adama Adepoju est excellente et réellement habitée par la
musique. Il vibre. La nouvelle d'Emmanuel Dongala (à lire de toute urgence),
adaptée par Luc Clémentin, est fine et pertinente. L’auteur parvient, en
quelques anecdotes à évoquer, avec sensibilité, tout le cosmos musical du
saxophoniste. La quête musicale de Coltrane, son refus de la facilité et du
commercial. Aussi, son militantisme et son mysticisme. Dongala exprime en
effet très bien le désir de Coltrane de vibrer. Autrement dit, sa tension à
devenir soi-même la musique. JC voulait accéder à une profondeur de l'être et
à une ouverture au monde, à une élévation. Cette quête, cette dynamique, font
de JC un repère pour les gens. En tout cas, sa musique a donné un sens à
l’existence de ce barman incarné ici par le comédien.
Je ne connais pas le texte d'Emmanuel Dongala (publié dans le recueil Jazz et
vin de palme), mais son adaptation semble en respecter tout l'aspect littéraire
et poétique. D’abord, on y entend de très belles évocations du jeu de Coltrane.
Ensuite, le dispositif narratif, s'il n'est pas original, est néanmoins très équilibré
entre théâtre et jazz. Le trio, composé de Sébastien Jarrousse (sax), JeanDaniel Botta (ctbasse) et Olivier Robin (batt), ménage les transitions, illustre et
accompagne le texte. Les moments sont toujours bien choisis. La musique
souligne quelques dialogues, sans excès. La mise en scène joue des
interactions entre le groupe et le barman. Belle complicité entre eux !
Les photos sont de Nelly Santos
ArtyficiElles
Le blog de deux copines qui aiment voir, écouter et sortir
20 janvier 2010
« A love supreme » : le poids des mots, le choc de Coltrane
C’est dans une roulotte du fin fond du 18ème arrondissement que j’ai
vécu l’une de mes plus belles émotions de ces derniers temps. Je ne
parle pas de l’année – ce serait tricher – mais vraiment, depuis
longtemps.
« A love supreme », c’est la mise en musique de Coltrane par
Coltrane. Ou plutôt, l’interprétation contée d’une nouvelle sur le jazzman
entrecoupée de morceaux de musique live. Dès les premières minutes,
on est dans le New York des années 60, dans un bar sombre et enfumé,
à boire du whisky en écoutant un musicien encore inconnu joué du jazz,
son jazz.
L’émotion de cette performance repose sur la puissance de la musique
de Coltrane, tout comme sur la profondeur du texte d’Emmanuel
Dongala, dont la beauté sourd de tous les mots. A la fois nouvelle
politique sur la lutte des noirs pour les droits civiques et histoire d’une
amitié empreinte d’admiration entre le narrateur et « JC » (le nom de
Coltrane n’est jamais cité), A love Supreme nous fait voyager dans le
temps, dans l’espace, mais surtout dans le jazz. Et pose sans cesse la
question du rapport entre musique et littérature.
Ce dialogue entre mots est musique est très bien retranscrit sur scène :
l’interprétation du texte par le conteur ivoirien Adama Adepoju est
entrecoupée de morceaux live de Coltrane. Ou bien est-ce la musique qui
est entrecoupée de texte ? On ne sait plus très bien car dans A love
Supreme, les mots chantent et la musique parle.
Agence de presse GHM – France Antilles
Samedi 9 janvier 2010
Dépêche et Interview de Luc Clémentin par François-Xavier Guillerm
A love Supreme au Grand Parquet
A love Supreme
JC d’abord (on dira plutôt Jessie) !
Le copain Spleevy et la copine
Nancy évoqués, le patron de la boite
de jazz : Adama Adepoju, comédien
narrateur (amateur de Whiskey), et
le trio de musiciens (amateurs de
Habana club 7 ans d’âge), Sébastien
Jarousse
(saxo),
Olivier
Robin
(batterie), et Jean-Daniel Bota
(contrebasse).
JC
pour
John
Coltrane dont le nom ne sera jamais
prononcé… Deux lettres jamais
traduites si ce n’est pour dire que ce
JC n’est autre que le Malcolm X du
jazz. Le narrateur proclame juste la
« supériorité de l’artiste sur le
politique qui veut faire le bonheur
des gens contre eux… » En un mot
comme en cent, la négritude est
aussi New Yorkaise ! A voir et à
écouter au Grand Parquet, du jeudi
au dimanche, à 20 h 30, du 7 au 24
janvier, 20 rue du Département,
Paris 18
ITW Luc Clémentin
« La Rage de Vivre aux Antilles »
Ultima
Chamada,
compagnie
théâtromusicale dirigée par Luc Clémentin s’était
rendue en Guadeloupe et Martinique en 2007
pour
présenter
A
Love
Supreme,
In
memoriam John Coltrane, une pièce écrite
par le Congolais Emmanuel Dongala, qui,
étudiant en chimie à New York, avait eu
l’occasion
de
rencontrer
le
célèbre
saxophoniste au moment où il composa A
Love Supreme. Après une tournée en Afrique, au
Liban, en Italie, en Irlande, en Belgique, la pièce
se joue à Paris. Avant de poursuivre en Algérie,
France-Antilles a rencontré Luc Clémentin,
metteur en scène, porteur d’un projet dont la
compagnie est à l'origine, aux côtés de la Ville de
Fort-de-France
Comment est né ce projet ?
Il est né à la suite de notre tournée aux Antilles et
aux rencontres que nous y avons faites. Le
comédien de A Love Supreme, Adama Adepoju
avait déjà été invité en Martinique pour animer des
ateliers. Pour la compagnie Ultima Chamada,
comme pour moi, c’était la première fois. L'accueil
avait été chaleureux et j'ai encore le souvenir de
groupes de spectateurs engagés dans des
discussions animées, devant le théâtre, après le
spectacle. Mon projet d'adaptation de la fameuse
biographie du musicien américain Mezz Mezzrow,
La Rage de Vivre, m'a semblé tout a fait d'actualité
dans la complexe réalité antillaise.
Qui est Mezzrow ?
Un clarinettiste juif américain proche de Sydney
Bechet et plus encore de Louis Armstrong. Il a été
un des premiers musiciens blancs qui a poussé loin
l’idée des orchestres mixtes aux Etats-Unis dans
les années 1930. J’ai trouvé intéressant de faire
entendre ce texte des dizaines d'années après, de
montrer l'exemple de cet artiste qui, envers et
contre tout, a voulu contribuer, à sa manière, à la
construction du "vivre ensemble". Bien sûr,
aujourd'hui, les choses ont évolué, mais
régulièrement l'actualité nous rappelle qu'il y a
encore beaucoup de chemin à faire...
Votre compagnie a entrepris ce travail en 2000 avec Inconnu à cette
adresse, une confrontation entre un Juif américain et un Allemand,
poursuivi avec A Love supreme…
Oui, on s’aperçoit, après coup, que l'on ne choisit jamais les textes par hasard !
L'injustice, l'inhumanité sont des questions qui ne nous laissent pas
tranquilles... Mettre en scène ce texte de Mezzrow est une façon d’illustrer la
possibilité du « mieux vivre ensemble », pour reprendre cette belle devise
pleine d'espoir de l'alter mondialisme. Ce texte vient naturellement après
Inconnu et A Love Supreme. Sur ce projet Interreg Caraïbes, Adama Adepoju
proposera une création sur le thème de la rumeur avec un collectage auprès de
la population, puis une mise en forme de ce matériau avec des acteurs
caribéens. Quant à Sébastien Jarrousse, le saxophoniste de A Love Supreme, il
proposera un tentet, le "Jazz Caraïbe Ensemble" avec des musiciens de la
Caraïbe et de la Métropole.
C’est pour quand ?
Le projet, à mon grand regret, semble assez complexe à mettre en œuvre et
nous en sommes encore au stade des discussions. Le député-maire, Monsieur
Serge Létchimy, que nous avons rencontré, serait sensible à ce projet car il
pourrait servir de "poisson-pilote" pour d'autres demandes de financements
européens à venir, avec la mise en place d'une structure, financée par le
Secrétariat Technique Commun, destinée à aider et accompagner les porteurs
de projets de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane.
Proposer et travailler ensemble… on est au cœur de la question ! L'avenir dira
s’il est raisonnable de continuer à croire que cela est possible.
Propos recueillis par François-Xavier Guillerm
agence de presse GHM
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