Le Chrétien : un Homme debout Se tenir debout est l`attitude

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Le Chrétien : un Homme debout Se tenir debout est l`attitude
Le Chrétien : un Homme debout
Se tenir debout est l’attitude fondamentale du croyant, tant dans le judaïsme
que dans le christianisme. Dans le premier Testament les Israélites écoutait debout
le Seigneur qui leur parlait : voyez par exemple le prophète Néhémie (8, 5). C’est
l’attitude du ministre qui officie à l’autel. C’est l’attitude des fidèles qui marquent
leur respect à l’égard du célébrant, de l’Evangile que l’on écoute… Plus encore
qu’une attitude de respect, la station debout est l’attitude normale de la prière
pour le juif comme pour le chrétien. L’Evangile de Mc 11, 25 est significatif : « Et
lorsque vous êtes debout pour prier, remettez si vous avez quelque chose contre
quelqu’un ». Dans l’Eglise naissante nous avons un bon témoignage avec la
première Apologie de St Justin de Rome (+ 165) : « Quand le lecteur a fini, celui
qui préside fait un discours pour nous avertir et nous exhorter à mettre en
pratique ces beaux enseignements. Ensuite, nous nous levons tous et nous faisons
ensemble des prières ».
Pour l’ensemble des Pères de l’Eglise, cette attitude exprime ce que le Christ
nous a offert par le mystère pascal et qui peut se résumer en une seule expression
« Il s’est relevé »1. Ainsi vivons-nous la sainte liberté des enfants de Dieu, acquise
au Baptême. Le Christ nous a relevés et, par sa grâce, Il nous a délivrés du péché
et de la mort ; aussi nous ne nous tenons plus devant Dieu remplis de honte, mais,
pleins de respect et confiants ; nous ne sommes plus des esclaves mais des fils de
Dieu. Ainsi Basile de Césarée2 « C’est donc pour nous préparer à la vie de
ressuscité que le Seigneur nous propose de vivre selon l’Evangile, lorsqu’il nous
prescrit de renoncer à la colère, de supporter le mal avec patience, de nous
détacher des plaisirs, de ne pas désirer la richesse. Ainsi nous fait-il suivre la voie
droite, lorsque nous adoptons à l’avance, par libre choix (par le baptême), ce que
nous posséderons comme naturellement dans cette vie future »
1
2
Lc 24 , 34
Traité du Saint Esprit SC 322-328
Cette station debout a aussi une signification eschatologique. Elle manifeste
l’attente pleine d’espérance de la Parousie, c'est-à-dire du second Avènement du
Christ : en face du Fils de l’homme, seuls demeureront debout ceux qui n’ont rien
à redouter de sa justice. Ainsi lisons-nous dans Malachie : « Et qui soutiendra le
jour de sa venue ? Qui restera debout quand il apparaîtra ? »3
C’est enfin l’attitude de l’action de grâce des élus dans le ciel. En
Apocalypse 7, 9 nous voyons avec l’Apôtre Jean « une foule immense de toutes
nations, races, peuples et langues, qui se tenaient debout devant le trône et devant
l’Agneau ».
D’où cette tradition spirituelle dont nous parle le Pape Benoit XVI dans une
de ses homélies : « Dans la tradition du monachisme syriaque, les moines étaient
qualifiés comme "ceux qui sont debout"; être debout était l'expression de la
vigilance. Dans ce qui était ici considéré comme le devoir des moines, nous
pouvons avec raison voir également l'expression de la mission sacerdotale et la
juste interprétation de la parole du Deutéronome (18, 5.7)4: le prêtre doit être
quelqu'un qui veille. Il doit être vigilant face aux pouvoirs menaçants du mal. Il
doit garder le monde en éveil pour Dieu. Il doit être quelqu'un qui reste
debout: droit face au courant du temps, droit dans la vérité, droit dans
l'engagement au service du bien. Se tenir devant le Seigneur doit toujours,
également, signifier profondément une prise en charge des hommes auprès du
Seigneur qui, à son tour, nous prend tous en charge auprès du Père. » 5
Cette dimension eschatologique rassemble et complète toutes les autres. En
effet le Christ s’est réellement relevé d’entre les morts et par le baptême nous
aussi nous sommes morts et ressuscités en Lui et par Lui. Mais, nous dit Saint
Paul, si c’est déjà réalisé, ce n’est pas encore accompli : « Nous savons en effet que
jusqu’à maintenant, toute la Création gémit dans les douleurs de l’enfantement.
Elle n’est pas la seule. Nous aussi qui possédons les prémices de l’Esprit, nous
3
Mal 3, 2
« Car c’est lui (le prêtre –lévite) qu’à choisi le Seigneur ton Dieu, d’entre toutes les tribus, pour se tenir devant le Seigneur
ton Dieu, pour assurer le service au nom du Seigneur, lui et ses fils, tous les jours. … il assurera le service au nom du seigneur
son Dieu, comme tous ses frères , les lévites qui se tiennent là devant le Seigneur »
5
Jeudi Saint 2008
4
gémissons en nous-mêmes dans l’attente du rachat de notre corps. Car c’est en
espérance que nous avons été sauvés. Or voir ce qu’on espère ce n’est plus
espérer : ce que l’on voit comment l’espérer encore. Mais si nous espérons ce que
nous ne voyons pas, nous l’attendons avec constance »6. Et donc, cette station
debout est moins une attitude physique qu’une disposition intérieure qui ne peut
en aucun cas être un absolu car nous sommes sauvés, mais c’est en espérance ;
nous constatons que, tant que nous sommes sur cette terre, nous restons de
pauvres pêcheurs et enfin pour reprendre Saint Paul, « c’est par la grâce que vous
êtes sauvés, à cause de votre foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu! »7
D’où cette parole très forte de Saint Léon le Grand « Chrétien devient ce que
tu es ». Et celle toute aussi importante de Benoit XVI : « Le Seigneur nous donne
sa main, il nous relève et nous guérit. Et il le fait à toutes les époques; il nous
prend par la main avec sa parole, et il dissipe ainsi les brumes des idéologies, des
idolâtries. Il prend notre main dans les sacrements, il nous guérit de la fièvre de
nos passions et de nos péchés à travers l'absolution dans le sacrement de la
réconciliation. Il nous donne la capacité de nous lever, de nous tenir debout
devant Dieu et devant les hommes »8
6
Rom 8, 22-25
Ephésiens. 2, 8-9
8
Homélie Paroisse Sainte Anne 5 février 2006
7