Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique
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Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique
1 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 2 SOMMAIRE Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 3 Introduction LE CORPS - L'ESPACE Le corps Le souffle L’espace vide Le public L’apprentissage UNE HISTOIRE DU THEATRE TOTAL SALLES ET FORMATION Un lieu de potentiels à réaliser. Offre de salles de spectacle Offre de formation dans le canton LE SITE “collage city” Situation géographique Description du site Situation «politique» actuelle. HISTORIQUE PLANS EXISTANTS PROGRAMMES Perspectives pour le conservatoire Perspectives pour le théâtre ETUDE DE CAS CONCLUSION REFERENCES Bibliographie Sites internet ANNEXES Interview avec Denis Mattenet Interview de M. Jean-Claude Reber Interview Dominique Würsten 4 5 6 8 9 11 12 13 28 31 32 34 36 37 40 41 42 47 55 59 66 67 68 76 78 79 80 82 83 85 87 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Introduction 4 La notion de corps dans l’espace s’est imposée pour comprendre ce qui lie les arts de la scène. Le corps comme outil de base pour l’expression/ création d’une œuvre et l’espace comme le lieu de cette expression face à un public. Les moyens d’expression de chacun des arts sont différents, le fait de poser cette définition permet de les rapprocher les uns des autres et de faire de la scène un lieu commun. Le croisement des disciplines est intimement lié aux origines et à l’histoire du théâtre et aujourd’hui encore on assiste à des recherches allant dans ce sens. Il existe un phénomène actuel d’interpénétration des compétences. Notamment au niveau des interprètes. Ceux-ci sont de plus en plus amenés à utiliser des notions venant des autres arts sur l’impulsion des metteurs en scène/ chorégraphes. Sur la même base, l’espace théâtral est aujourd’hui dans une situation de questionnement permanent. Il est constamment manipulé et détourné, l’acte théâtral se passe ainsi souvent dans un autre lieu que le théâtre même. La motivation de trouver un lieu qui fasse sens est à l’origine de ces contre-pieds. Dans ces conditions, l’espace théâtral idéal ou total, n’existe pas. La question des formations interdisciplinaires en Suisse commence doucement à faire son chemin au niveau des écoles professionnelles. Mais les différents métiers du spectacle ne sont de loin pas tous logés à la même enseigne et de grandes différences de traitements résident entre les cursus. Les réunir pourrait permettre de faire avancer les causes des uns et des autres. La volonté du diplôme est d’utiliser une situation politique réelle dans la ville de Montreux pour y intégrer un centre des arts vivants. Lieu de formation et de représentation des trois arts de la scène, offrant des locaux adaptés à la pratique des différents arts et permettant des échanges et collaborations entre eux, notamment sur scène. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 5 LE CORPS - L'ESPACE Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Le corps 6 Le corps est à la base de tout spectacle vivant. Avant d’être un musicien, un acteur ou un danseur, l’interprète est un corps. Sur une scène, avant toute action, c’est un corps qui est vu. Posé de cette manière, cette définition permet de mettre tous les arts sur un pied d’égalité. Artaud dit : « Je suis une masse, un volume ». Le corps est à comprendre comme une forme. photo tirée du DVD du spectacle “shazam !”, Cie DCA, 2002 Il est important de comprendre que l’apprentissage se fait à travers l’usage du corps. La conscience de l’espace et de son propre corps est permise par l’expérimentation de celui-ci dans l’espace. Le mouvement de mon corps participe à l’élaboration de la forme. De la même manière qu’un peintre utilise tout son corps pour peindre. A l’instar de Jackson Pollock qui a fait du mouvement un processus de création. On peut opposer cela à l’usage de l’ordinateur. Devant un ordinateur, le lien entre mon cerveau et la représentation de mon corps dans l’espace est coupé. Et cette conscience du corps nécessite une répétition, afin de pouvoir élaborer des formes plus précises. Faire et refaire. Le corps de l’interprète est un instrument de mesure. Tout d’abord aux autres, à leur positionnement et leur volume, mais surtout aux mesures cachées. Ce que Edward T. Hall nomme “la dimension cachée”. Les dimensions culturelles de la représentation du corps. Avoir un corps libéré des questions de normes est important pour être sur scène pleinement. Le travail sur un centre des arts vivants questionne également cette dimension du corps. De sa dimension physique, mais également sociale. Et l’apprentissage des arts de la scène implique la prise de conscience de ces normes, de ces limites, mais également des propres limites de celui qui le pratique. Car les arts de la scène sont des arts de la transgression. Ceux-ci impliquent de savoir où se situe la limite pour être conscient de la franchir. Le terme de transgression est à comprendre, non pas dans le sens de choquer, mais de lever les voiles que les habitudes laissent devant les yeux. Cette libération des normes est importante dans les arts eux-mêmes. Les normes sont aussi présentes sur la scène. Le corps des danseurs a longtemps dû ressembler à un modèle unique. Une conception Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 7 photo tirée de la vidéo codex, chorégraphie codex 4 ”, Cie DCA et Canal+, 1986. source : http://fr.youtube. com/ séparatrice des arts ne permet pas de remettre en cause ces manières de penser ou alors très lentement. De plus, le personnage social et les blocages de l’interprète ne doivent pas interférer sur scène. Le corps ne peut être bloqué et pris en otage dans sa forme. Chaque société contraint le corps à sa manière. A cet égard le rapport au corps en Occident a été longtemps problématique. Ce que les mouvements sociaux des années 60 ont cherché à briser. Les arts corporels à cette époque montrent un besoin de cette libération du corps. Comme nous le verrons plus loin, les travaux d’Artaud, par sa recherche d’un nouveau corps, permettent de comprendre cette genèse dans les années 40. Grotowski a mené une recherche théâtrale qui impliquait la libération du corps des comédiens. Ceci nécessitait un long travail pour qu’ils sortent de la maîtrise rationnelle d’eux-même. Il fatiguait littéralement leur corps pour les aider à « lâcher » l’interprétation juste. Les comédiens, à bout de force, finissaient par abandonner la maîtrise d’eux-mêmes. Pour favoriser ce résultat, il travaillait avec peu de comédiens à l’écart du monde pour les couper de leurs repères. « La danse est une arme ! Si c’est une arme, c’est pour faire sauter les cadres autoritaires qui empêchent la vie ! [...] Cependant lorsque l’on parle de faire sauter les cadres, on parle souvent des cadres extérieurs, politiques et sociaux, là où la danse est peu efficace, on parle plus rarement de ces cadres intimes, souvent les plus contraignants de tous, que chacun s’impose à soi-même, ou ceux que l’on impose à la danse. ». 1) Laisser le corps exprimer sa vie intérieure et laisser aller sa raison. Dans cette optique, l’interprète est une sorte de prêtre, un exorciste, prenant à sa charge de vivre une expérience et de la livrer au public. 1) interview de Michel Hallet-Eghayan tiré de : « Où va la danse ? L’aventure de la danse par ceux qui l’ont vécu », Paris, Editions du seuil/ Archimbaud, 2005, p. 102 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Le souffle « Le souffle, c’est la vie par la respiration » Claude Régy 2) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964. La respiration est compréhensible comme une activité purement biologique lorsque le danseur est en mouvement et doit reprendre son souffle. Mais il est également compréhensible comme le rythme de l’oeuvre, ce moment d’arrêt où l’action laisse place à la suspension, à l’attente. Ainsi, alors même que la scène est pleine, le vide s’invite. Un de mes anciens professeurs, Anne Theurillat, disait que la pause permet au public d’imaginer. Dans le théâtre un flot de parole tient en haleine le public, mais il est contraint de suivre l’action et ne respire pas dans son imaginaire. Le moment de la respiration est une respiration mentale pour lui. 8 L’intervalle. Ce qui est entre. Un tiers de plein, deux tiers de vide. Il est dit que c’est par le vide que le souffle agit. Le vide est le lieu de l’intériorité et, par le vide, des entités opposées peuvent se rejoindre. Et c’est souvent, dans la peinture chinoise, la montagne et l’eau. Par le vide, l’eau est potentiellement montagne et peut s’ériger en pic, et la montagne est potentiellement eau, roc liquide. Que soit possible cette transmutation de la matière culbute la pensée. ». 3) Cet ensemble vie souffle/respiration est le cœur même d’une interprétation scénique juste, c’est-à-dire vivante. Celle qui est recherchée par tous les théoriciens. Celle-ci est l’élément unitaire, l’élément rythmique qui permet au corps d’exprimer le plus justement sa vie intérieure. Un corps qui respire mal ne peut être vivant. « Connaître le secret du temps des passions, de cette espèce de tempo musical qui en réglemente le battement harmonique, […]. ». 2) Cette vie est pourtant paradoxale puisqu’une œuvre scénique est une création 100% artificielle, codifiée. Certains cherchaient jusqu’à une recherche de distanciation avec le public. La vie n’est pas à comprendre comme une illusion de la réalité. La vie est cette justesse organique de l’œuvre. Le corps en est le coeur et la mesure. Celle-ci doit respirer en fonction de ce corps. Il y a donc toujours un élément « naturel », un corps, respirant le même air que le public. L’abstraction d’une œuvre sur scène est toujours entachée de cette «imperfection» qui énervait tant Carl Gordon Craig. Néanmoins, c’est peut-être à cause de cette imperfection que la scène attire toujours. Cette imperfection de la non reproductibilité totalement synthétique que le cinéma nous offre et qui n’est pas la vie. 3) Claude Régy, “les états latents”. tiré de : “Le corps le sens”, Paris, Editions du Seuil, 2007, p. 191 Comment rendre une œuvre morte vivante. Les grecs parlent du souffle comme de l’acte de « relever le texte ». Car le public européen vient chercher l’épaisseur de la chair dans les œuvres figées. Une chaire qui donne des signes et qui respire presque bibliquement. « Dans la peinture chinoise, il y a le vide. L’espace intervallaire. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 L’espace vide 4) Peter Brook, « L’espace vide. Ecrits sur le théâtre », Paris, Editions du seuil, 1977 « Je peux prendre n’importe quel espace vide et l’appeler une scène. Quelqu’un traverse cet espace vide pendant que quelqu’un d’autre l’observe, et c’est suffisant pour que l’acte théâtral soit amorcé. » 4) Cette définition de l’espace théâtral désamorce totalement tout historicisme ou nostalgie qui peut exister pour ce lieu. L’imaginaire collectif a souvent associé le lieu au théâtre bourgeois avec sa pompe, son velours, ses dorures et son rideau rouge. Au lieu de réduire le théâtre à sa surface, à son vernis, Brook pose les bases fondamentales de tout acte théâtral. L’espace vide n’est pas n’importe quel espace. C’est celui qui n’a encore aucune qualité, un espace potentiel. Claude Régy parle du théâtre comme étant un lieu du possible et cet espace vide est une condition pour que ce champ des possibles soit ouvert. Il trace un parallèle avec la physique quantique. Celle-ci ne peut que travailler sur la base de probabilités, le vide est alors considéré non pas comme un vide, mais comme une force potentielle. Il y a dans cet espace potentiel la désignation d’une scène. La scène, ce n’est pas seulement le plateau, cet échafaudage construit plus ou moins en pente et en hauteur. La scène est avant tout un espace, celui du jeu. L’endroit de focalisation du regard du public. Il observe. Dans le verbe « observer », il y a une dimension d’attente. 5) Claude Régy, “les états latents”. tiré de : “Le corps le sens”, Paris, Editions du Seuil, 2007, p. 164 6) Préface de Guy dumur à, Peter Brook, « L’espace vide. Ecrits sur le théâtre », Paris, Editions du seuil, 1977 7) Christian Godin, “La totalité, volume 4, la totalité réalisée, les arts et la littérature”, Seyssel, Edition Champ Vallon, 1998, p. 572 Claude Régy en parle en disant : « Héraclite dit : « « S’il n’attend pas, il ne découvrira pas le hors d’attente qui est chose introuvable et vers quoi il n’y a pas de passage.» Ca, j’aimerais que le public l’entende, J’aimerais que les metteurs en scène et les acteurs l’entendent. Parce qu’en général, on n’attend pas, on agit. Si on n’attend pas, on ne découvre pas ce qui est hors de notre attente, ce qui dépasse notre attente, ce qui est hors de toute attente. Ce qui n’est pas attendu ne peut être connu. […] Il s’agit de travailler sur un matériau introuvable – il ne faut pas se décourager pour autant – et aussi sur un matériau pour lequel, en principe, il n’y a pas d’accès – ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas tenter de passer. C’est le mouvement qui nous occupe, pas le résultat ». 5) Ceci veut dire que le théâtre est un lieu de dévoilement ou qui tente de dévoiler quelque chose d’introuvable. Etre dans cet état de recherche permet de l’effleurer. 9 Il existe ainsi le potentiel que quelque chose à un temps donné se passe, un mouvement, une action. Et c’est à ce moment là que le théâtre existe. De l’unification dans un même espace de ce que Guy Dumur appelle : « un faisceau de désirs qui concourent à l’émotion collective et, si possible, à l’éveil des consciences ».6) Les dessins d’Adolphe Appia (p.16), bien que représentant déjà une scénographie, tendent vers cette quête du vide. Ils exemplifient cette idée de lieu où l’on attend qu’il advienne quelque chose. La scène reste un élément inachevé sans la présence d’un corps. « Il est à cet égard significatif que le courant minimaliste s’est appuyé sur la psychologie de la Gestalt pour illustrer cette « loi » selon laquelle la force d’une expérience perceptive est inversement proportionnelle à la complexité du phénomène qui lui est sert de substrat. ». 7) Ainsi l’espace vide est ce lieu où la perception de son propre corps est la plus forte, où chacun de ses gestes prennent toutes leurs importance. La sensation de l’espace est également la plus forte, ses limites, sa forme, sa matière, sa lumière. Le caractère du vide est de laisser passer la lumière. Il s’agit donc d’un état de transparence (vue et lumière). Dans ces conditions la lumière ne révèle que ce qui coupe sa trajectoire. Le vide attend la lumière pour révéler sa matière. En retour, celle-ci est dépendante de la matière pour être révélée. Dans l’espace, le mur (matière) est à comprendre comme la surface révélatrice. L’espace vide est donc cet endroit où la lumière vient contre les murs pour en révéler les contours, dans l’attente d’un événement qui trouble cet équilibre. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 10 James Turrell Virga 1974 tiré de : “James Turrel, the other horizon”, sous la direction de Peter Noever, Vienne, Hatje Cantz. Les travaux de James Turrell font parties de ces espaces vides bien qu’ils ne soient pas des scènes de théâtre. Ces espaces ont cette capacité de mettre dans un état d’attente par la manipulation de la perception. Le vide est sculpté par la lumière et prend une valeur supérieure. Et le sujet attendu de l’action n’est autre que le corps qui expérimente cet espace. Ces travaux sont des expérimentations méthodiques de la matérialité de la lumière et de sa capacité à transformer la perception de l’espace. Il y travail grâce à une lumière dessinée précisément et qui a une intensité beaucoup plus forte que l’espace lui-même. “Our ancient fables taught us that the power of the void is a simplicity made of violent risks and subtle balances: a simplicity which is constructed, given rhythm and elaborated. The deserted place is not simply a place with nothing at all. To yield the visual clarity of absence, it requires the minimum of a symbolic alliance, of its fiction (which, in a sense, is the same). To visualize the unlimited requires a minimum of architecture, that is, the art of joints, of partitions and edges.“. 8) « L’espace n'est pas un concept extérieur au cerveau de l'homme, il est perçu et il est vécu. » Berthoz. 8) Georges Didi-Hübermann dans, “James Turrell, the other horizon”, MAK, Vienne, catalogue d’exposision, Vienne, Hatje Cantz Verlag, 2002, p. 47 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Le public 9) citation de Heiner Müller par Claude Régy dans “les états latents”. tiré de : “Le corps le sens”, Paris, Editions du Seuil, 2007, p. 186 11 Il s’agit de proposer un spectacle sonore ou/et visuel. Un artifice pour communiquer une idée au monde par le biais du public. Et c’est lui, principalement, qui rassemble les différents arts. A tel point que Meyerhold le qualifiait de quatrième créateur au même titre que l’auteur, le metteur en scène et l’acteur. Le public vient chercher une expérience en direct que les médias de masse ne peuvent lui proposer. Il leur manquera toujours l’occupation de l’espace et la proximité. Le danger qui émane de tout spectacle direct. Et le public donne au spectacle et à ses interprètes une responsabilité sociale. L’art de la scène ne peut être nombriliste. «L’art est une pratique aveugle. Je vois là une possibilité. Utiliser le théâtre pour de tout petits groupes […] afin de produire des espaces d’imagination, des lieux de liberté pour l’imagination, contre cet impérialisme d’invasion et d’assassinat de l’imagination par les clichés et les standards préfabriqués des médias. Je pense que c’est une tâche politique de première importance, même si les contenus n’ont absolument rien à voir avec des données politiques. ». 9) « Le théâtre comme la peste est une crise qui se dénoue par la mort ou par la guérison. Et la peste est un mal supérieur parce qu’elle est une crise complète après laquelle il ne reste rien que la mort ou qu’une extrême purification. De même le théâtre est un mal parce qu’il est l’équilibre suprême qui ne s’acquiert pas sans destruction. Il invite l’esprit à un délire qui exalte ses énergies ; et l’on peut voir pour finir que du point de vue humain, l’action du théâtre comme celle de la peste, est bienfaisante, car poussant les hommes à se voir tels qu’ils sont, elle fait tomber le masque, elle découvre le mensonge, la veulerie, la bassesse, la tartuferie ; elle secoue l’inertie asphyxiante de la matière qui gagne jusqu’aux données les plus claires des sens ; et révélant à des collectivités leur puissance sombre, leur force cachée, elle les invite à prendre en face du destin une attitude héroïque et supérieure qu’elles n’auraient jamais eue sans cela. ». 10) 10) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 46 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 L’apprentissage 12 Apprendre un métier de la scène est une tâche complexe, demandant du temps et un questionnement permanent. Une reconstruction constante de sa propre perception. Avoir l’expérience de soi. Cette expérience, l’interprète la met au service d’une œuvre, d’un metteur en scène, d’un chorégraphe, d’un projet. Pouvoir reconstruire également sa manière d’aborder un rôle, une partition, un mouvement retranscrit, en fonction des demandes extérieures. Il doit acquérir une plasticité d’âme et de corps. Et cette « plasticité », on doit la mettre devant un œil. Cette condition est permanente, devant son œil intérieur, puis devant l’œil du public. Car il faut être sûr de pouvoir être à la hauteur. Comme le dit Isabelle Chladek dans l’interview qu’elle m’a consacrée : « il faut être sacrément gonflé et avoir quelque chose à dire d’intéressant pour se mettre devant un public ». Ainsi, l’apprentissage est fait de travail personnel que l’on présente ensuite à un professeur qui jouera le premier œil. Cette contrainte de l’œil extérieur, on doit l’avoir tout au long de son apprentissage, même si de temps en temps il faut s’en dégager pour expérimenter et chercher en liberté. C’est une condition primordiale pour vouloir en faire un métier. Si on le fait pour soi, le théâtre, la danse et la musique deviennent une thérapie. La finalité du travail d’interprétation est de montrer une parcelle de la vérité de ce monde à quelqu’un, apprendre à être en scène. Apprendre cela est certainement le plus difficile. Pour y arriver, un long apprentissage de son humanité est nécessaire, un long apprentissage de son instrument (même pour le musicien instrumentiste, son premier instrument est son corps). Le rendre capable de réaliser cette vie. Ce souffle, à travers l’espace, le son, le geste, le verbe, le mouvement, qui parle autant à l’âme qu’au cœur. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 13 UNE HISTOIRE DU THEATRE TOTAL Cette partie cherche à trouver des éléments pour exemplifier et légitimer par l’histoire ce que le projet tente de proposer. Comment la vision du corps et de l’espace ont évolué et ont permis d’aboutir à notre théâtre actuel ? (Cette partie est fortement inspirée de l’ouvrage collectif «l’œuvre d’art total», sous la direction de Denis Bablet, Paris, CNRS Editions, 2002.) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 14 Wagner 11) Denis Bablet dans “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002, p.20 Depuis Wagner, la scène peut-être perçue comme le lieu de rassemblement de toutes les compétences. Ceci dans le but de produire un spectacle qui imprime une marque à l’esprit des spectateurs. « Dans l’art théâtral s’unissent, dans une plus ou moins grande mesure, tous les arts, pour une impression immédiate sur le public, telle qu’aucun de ces arts ne peut à lui seul en procurer. ». 11). Il désire rénover l’art de l’Opéra qui n’est qu’un collage de différents arts sans liaison organique entre eux. Pour palier à cet éparpillement des arts, Wagner crée non seulement la musique, mais également l’histoire avec les didascalies permettant de réaliser les décors. Wagner voit dans le modèle grec antique un idéal à retrouver et à faire renaître. Ce théâtre avec son chœur, ses acteurs et ses danseurs. Lieux de culte intermédiaire entre les dieux et les hommes. «L’œuvre d’art total est perçu comme un moyen de libérer « l’homme artiste ». L’homme ne se réalise que par le groupe, la collectivité des artistes. « L’œuvre d’art de l’avenir est une œuvre collective, et ne peut naître que d’un désir collectif. Ce désir que nous n’avons dépeint jusqu’ici, en théorie, que comme nécessairement propre au caractère des différents arts isolés, n’est possible en pratique que dans l’association de tous les artistes ; et la réunion de tous les artistes en un même lieu, en un même temps et pour un but commun, forme cette association. Ce but déterminé est le drame, pour la production duquel tous se réunissent, chacun déployant dans la collaboration de sa création, son genre d’art particulier dans sa plus grande richesse, s’imprégnant tous réciproquement , en commun, et pour produire justement, comme fruit de cette pénétration, le drame vivant, perceptible aux sens. ». 12) Idée qui peut-être tempérée par le fait que tout se trouvait pour finir noté par Wagner, des déplacements des acteurs au rythme de leurs mouvements, etc. 12) R. Wagner, « l’œuvre d’art de l’avenir, op. cit. pp. 232-233, tiré de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002, p. 27 Dans cette conception, le corps n’a pas une importance particulière à part comme partie prenante d’un tableau, d’un ensemble plus grand qui le dépasse. La musique est en fait le principal acteur du drame Wagnérien. Par exemple avec le leitmotiv, ce thème musical qui apparaît à plusieurs Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 15 13) R. Wagner, « l’œuvre d’art de l’avenir, op. cit. pp. 225-226, tiré de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002, p. 26 reprise sans être répétitif. Il peut être attaché à un personnage ou à une idée. Changer de rythme, d’intensité ou d’instruments. « L’Orchestre est, pour ainsi dire, le domaine du sentiment infini, universel, sur lequel peut grandir le sentiment individuel de chaque acteur dans sa plus grande perfection : il résout pour ainsi dire le sol aride, immuable, de la scène réelle en une surface meuble, souple, malléable, éthérée, dont le fond insondable est la mer du sentiment lui-même. ». 13) La musique englobe donc le tout, c’est elle qui permet à tous les arts de tenir ensemble. Plan du Festspielhaus de Bayreuth. tiré de : G. C. Izenour, “Theater Design”, New York, Mc Graw-hill Book Company, 1977. Ces considérations ont eu des implications formelles sur l’espace de représentation dont le Festspielhaus de Bayreuth est l’incarnation. Pour Wagner, la scène et la salle forment deux mondes différents qu’il s’agit de séparer le plus possible. L’un est réel, l’autre est idéal. De plus, le public doit pouvoir voir ce monde idéal avec aisance où qu’il se trouve et sans obstacle visuel. Il choisit la solution l’amphithéâtre dont les points porteurs sont placés sur les côtés, une concentration et l’utilisation de pièges à son. L’orchestre se trouve dans une fosse profonde et qui n’est pas visible de la salle. Ceci permet d’avoir une musique venant de l’espace luimême et d’agrandir la distance entre le fond de scène et le public. Dernière grande réforme, la salle est plongée dans le noir durant le spectacle. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 16 Etienne Jacques Dalcroze et d’Adolphe Appia Les premiers pas vers une prise de conscience du corps sont initiés plus tard avec les travaux de Etienne Jacques Dalcroze et d’Adolphe Appia. Le parcours d’Appia est intéressant dans l’évolution de sa pensée par rapport à l’interprète et l’espace. A. Appia, espace rythmique, “L’ombre du cyprès”, 1909. tiré du catalogue d’exposition : “Adolphe Appia, 1862-1928, actor-space-light”, sous la direction de Denis Bablet, Londres, John Clader publisher, 1982. Au début de sa carrière, Appia se propose de travailler sur l’espace de la scène dans le cadre de l’œuvre de Wagner. Pour lui, le problème vient d’une scénographie qui ne correspond pas avec l’esprit poétique de l’œuvre. Appia reproche à Wagner sa description réaliste des lieux de l’action. La musique, l’acteur, l’espace et la lumière. Voici en quelques mots la pensée d’Appia sur l’oeuvre d’art total. L’acteur est le support de la musique. L’espace est au service de l’acteur et lui donne un support de jeu. La musique, par le rythme, donne un système de proportions qui permet de définir les mouvements de l’acteur mathématiquement. Il mettra au point un système de notation pour fixer la chorégraphie de l’acteur. Il veut un vrai travail de sensibilisation de ce dernier à la musique. Une nouvelle évolution apparaît lorsqu’il décide de s’éloigner de la musique grandiose de Wagner qui, selon lui, écrase l’ensemble. Il veut une réduction dans l’expression musicale. Le rythme devient alors un élément pour servir le corps. On assiste ainsi à un changement de perception du corps de l’artiste qui devient central dans l’action dramatique. « L’acteur devient le principe régulateur de la synthèse ». Il épure également l’espace en utilisant plus que la lumière et des éléments volumétriques. A l’inverse de Wagner, Appia établit sa synthèse par épuration. Ne reste plus que la musique, l’acteur, l’espace et la lumière. La « rythmique » de Etienne Jacques Dalcroze lui apporte le liant qu’il recherche entre le corps et l’oeuvre musicale. C’est une méthode à destination des élèves musiciens pour apprendre le rythme à travers le corps. Il est persuadé qu’ils proviennent tous du corps humain. « Tous les éléments rythmiques de la musique ont été primitivement Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 17 l’auditorium de l’institut Dalcroze à Hellerau, tiré du catalogue d’exposition : “Adolphe Appia, 1862-1928, actor-space-light”, sous la direction de Denis Bablet, Londres, John Clader publisher, 1982. empruntés aux rythmes du corps humain. Mais à travers les siècles, la musique en varia et multiplia les types et les combinaisons jusqu’à les spiritualiser entièrement et à en oublier l’origine musculaire. » 13a) Chez Dalcroze, l’espace est neutre et les corps répondent naturellement aux impulsions de la musique. Une invitation à une séance de travail de rythmique ouvre également les yeux d’Appia sur une autre question. Le lien entre spectateur et acteur. Il est immergé dans l’action car il se trouve sur scène. Ainsi, il n’existe plus de séparation entre scène et salle. L’espace englobe les deux et il comprend que l’union des arts se fait également par le rapport au public. Grâce à la suppression de la séparation scène/ salle. Puis, il met au point l’idée d’ « œuvre d’art vivant ». Il fait entrer la vie dans le rapport existant entre rythme, système nerveux et le besoin d’expression de l’homme. Le mouvement est l’expression de la vie intérieure. Il va au-delà d’une mécanique. L’imaginaire intérieur dicte ainsi tel ou tel mouvement. 13a) E. J. Dalcroze, «Le Rythme, la Musique, et l’Education», Lausanne, Foetisch Frères, 1965, p. 136 tiré de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002, p. 96 « Ce n’est pas mécaniquement que nous possédons l’Espace et en sommes le centre : c’est parce que nous sommes vivants ; […]. Les battements de notre cœur on mesuré nos gestes […]. Pour mesurer l’Espace, notre corps a besoin du Temps ! La durée de nos mouvements a donc mesuré leur étendue. Notre vie crée l’Espace et le Temps, l’un par l’autre. Notre corps vivant est l’Expression de l’Espace pendant le Temps, et du Temps dans l’Espace. » 14) Le rythme permet d’unifier le corps l’espace et la musique. Pour Appia, l’expérience intérieure du temps et de l’espace en soit permet d’atteindre la transcendance. Ainsi, on revient à des notions très humanistes de l’homme comme mesure de toute chose. L’œuvre chez Appia est unifiée dans le corps. Celui-ci est créateur dans l’espace de sa vie intérieure. 14) A. Appia, « l’œuvre d’art vivant », Genève Paris, Atar, 1921, pp. 70-72. tiré de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002, p. 101 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 18 Meyerhold « Je ne conçois pas un comédien qui ne soit pas un musicien.» Sur ce schéma pour l’étude du spectacle, un de ceux qui ont été réalisés par les étudiants de Meyerhold au KOURMASTSEP (1918-1919), le décorateur et le metteur en scène fusionnent en une seule personne : Le “maître des représentations scéniques” Le spectacle naît de la perception du public. tirée de “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 148 15) Béatrice Picon-Vallin dans “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 130 16) Béatrice Picon-Vallin “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 131 Chercheur infatigable, Meyerhold était le modèle de l’homme qui cherche avec les autres. Il réunissait autour de lui des artistes amis avec lesquels il expérimentait sur toutes les formes théâtrales. Son travail principal porte sur la rénovation de l’opéra. Pour Meyerhold, le véritable élément qui unifie est le public. C’est le 4ème créateur. Il vient s’ajouter aux trois autres que sont, l’auteur, le metteur en scène, l’acteur. L’idée de synthèse des arts se fait par le biais du « théâtre de la convention » (un théâtre codifié assumant sa théâtralité à l’opposé de la forme naturaliste de son ami et adversaire Stanislawski) et sur le renouveau de l’opéra. Ainsi, il fait entrer des notions musicales dans le théâtre et des éléments de dramatisation dans l’opéra. La musique reste pourtant centrale. Meyerhold vient lui-même de cet univers où il a travaillé en orchestre et peut lire à vue n’importe quelle partition. Comme pour Appia, le rythme est l’élément structurant toute l’œuvre. « (Meyerhold) pose le rythme comme force universelle dans la vie et dans les arts. Son intérêt pour la musique comme forme d’art suprême se double d’une conception du théâtre, berceau de tous les arts selon le modèle antique, et temple où un peuple tout entier peut communier dans des rituels de participation inspirés des mystères grecs ». 15) La musique est réellement utilisée pour intensifier le jeu scénique en mettant en évidence des sons, des rythmes ou la dimension musicale du texte. Le corps de l’acteur est soumis à une rigueur dans le jeu. Le corps est très contrôlé : « Profil exigé, expressivité des mains, graphisme de chaque pose. Diction sobre, froide, précise, sans trémolo sentimental. Tempo artificiel reposant sur une alternance : pose sur fon de texte parlé/ gestuelle sur fond de silence. ». 16) Il va jusqu’à établir une partition rythmique pour l’acteur, afin de Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 19 pallier aux différences entre répétitions. Au niveau pédagogique, Meyerhold, travail avec des acteurs formés à la gymnastique rythmique, afin de pouvoir lier le geste à la parole rythmée. De plus, dans sa synthèse auteur - metteur en scène – acteur – public. Le rôle du metteur en scène est rendu plus important. M. Gnessine, exemple de lecture rythmique. Extrait du rôle de Créon dans Antigone de Sophocle. tiré de “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 148 Le metteur en scène a un statut de créateur aussi important que l’auteur. Il s’inspire de la vision de Craig : « (dans le metteur en scène) s’opère la synthèse de l’auteur, du metteur en scène, du peintre et du musicien. Il est seul capable de trouver sur scène l’harmonie des lignes et des couleurs, la rigueur des proportions et les diverses parties » « lui seul est capable de soumettre à la toute puissante loi du rythme l’ensemble des créateurs qui font sur scène œuvre collective ». 17) Pour Meyerhold, le metteur en scène allie les compétences du sculpteur, l’architecte et le dessinateur. Il veut que chaque artiste ait la même démarche. Aller chercher ailleurs des compétences qui nourrissent son art. Ainsi l’acteur doit-il devenir une synthèse des différents moyens d’expression : sculpture vivante, danseur, mime, chanteur et acteur. 17) citation de Craig dans V. Meyerhold, “Ecrits, I, p. 148 tirée de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 138 « Comme le décor qui lui est co-harmonique, comme la musique qui lui est co-rythmique, l’homme devient lui-même œuvre d’art » . 18) « Le lieu concret de la synthèse est le corps de l’acteur dont la polyvalence qui est exigée de lui comme des autres créateurs requiert l’élévation du niveau de sa qualification » 19) 18) V. Meyerhold, “Ecrits, I, p. 130 tirée de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 140 19) Béatrice Picon-Vallin, “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 140 Au final, Meyerhold veut trouver une harmonie entre le geste et la musique. La synthèse des arts doit permettre aux spectateurs de voir librement les éléments de mise en scène sans s’attarder sur des détails. L’imagination du spectateur est le point de départ de l’action. Il veut s’adresser aussi bien à son intellect qu’à son cœur, à son inconscience et à sa conscience. L’acte théâtral doit avoir une puissance évocatrice plutôt que démonstrative. Il épure ainsi chacun des arts convoqués sur scène. Il désire un public distancié : « S’il y a « symphonisme » dans la composition d’ensemble, le principe du montage demeure destiné à susciter des « émotions actives. Il n’y a pas désir d’envoûtement. Lors de la tournée en France (1930), les Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 20 20) Béatrice Picon-Vallin, “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 151 critiques remarquent que le théâtre de Meyerhold ne cherche pas à plaire, à séduire. Le théâtrologue soviétique A. Gvozdiev souligne Il ne nous laisse pas admirer jusqu’au bout, mais instaure une attitude critique. La dramaturgie spécifiquement meyerholdienne est tragi-comique, centrée sur le thème de l’imposture, du masque, du dévoilement. Il s’agit donc, si l’on entraîne le spectateur (par la force de la musique ou la beauté de la composition visuelle), de le faire retomber de haut, pour lui faire prendre conscience, pour démasquer. » 20). Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 21 Artaud A. Artaud. 1940-1946 Autoportrait, tiré de : http://www. evene.fr/livres/actualite/ antonin-artaud-bnf-paristheatre-615.php Qui suis-je? d’où je viens? je suis Antonin Artaud Et que je le dise comme je sais le dire immédiatement vous verrez mon corps actuel voler en éclats et se ramasser sous dix mille aspects notoires un corps neuf où vous ne pourrez plus jamais m’oublier. Cette citation suffirait presque à décrire la vie d’Antonin Artaud et la quête qu’il a fait autour de la question de la libération du corps. Figure emblématique de la pensée sur le théâtre contemporain, son travail se mêle étroitement avec sa vie que l’on peut qualifier de quête. Très tôt, il souffre dans sa chair de troubles d’origine nerveuse qui l’obligeront à faire de longs séjours en maison de santé. Il y prendra pour la première fois de l’opium sous prescription médicale, afin d’apaiser ses douleurs physiques. Ce qui créera une dépendance aux drogues qui le poursuivra. Pourtant, toute sa vie, il souffrira de ces troubles et d’un sentiment d’enfermement dans son corps. Son œuvre est totalement liée à son corps et à son rapport conflictuel avec celui-ci. Il ne peut en détacher sa pensée. “Je suis homme par mes mains et mes pieds, mon ventre, mon cœur de viande, mon estomac dont les nœuds me rejoignent à la putréfaction de la vie.” Dans les années 30, après avoir fait du cinéma et adhéré au mouvement surréaliste, il aboutit à la période du “théâtre de la cruauté” dont les écrits sont contenus dans « le théâtre et son double ». Il y dénonce le théâtre de texte et psychologique. Il prophétise un retour à un théâtre où tout participe à l’ébranlement physique et sensitif du spectateur. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 22 21) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 179 Afin que le théâtre reprenne son rôle central comme lieu « rituel » où le corps est l’élément porteur du sens, quitte à s’affranchir de la parole. Son texte est une pierre angulaire dans l’histoire du théâtre et de la vision du corps. Il n’est pas en lien avec une recherche sur Wagner, mais comme lui, il cherche à remonter à la source unitaire du théâtre. Sa quête est métaphysique et son but est de redonner au théâtre cette position dominante au milieu de la société comme révélateur du caché et créateur de mythes. 22) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, O.C., Paris, Editions Gallimard, 1964, t. IV, p. 151. tirée de : “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002 p. 222 « Si l’époque se détourne et se désintéresse du théâtre, c’est que le théâtre a cessé de la représenter. Elle n’espère plus qu’il lui fournisse des Mythes sur lesquels elle pourrait s’appuyer ». 21) La manière d’y arriver est de remplir l’espace par tous les moyens : « Pas de répit, ni de place inoccupée dans l’espace […] pas de répit, ni de place vide dans l’esprit ou la sensibilité du spectateur ». 22) « Ce qui importe, c’est que, par des moyens sûrs, la sensibilité soit mise en état de perception plus approfondie et plus fine, et c’est là l’objet de la magie et des rites, dont le théâtre n’est qu’un reflet ». 23) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 141 24) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 164 23) Pour lui, le théâtre est une Peste qui a le même effet sur la population que la maladie. Il a cette puissance pour désorganiser la société et, comme dans les moments de crise, montrer le vrai cœur de l’homme. C’est là le côté cruel de son théâtre, le côté implacable, inéluctable que peut avoir la Peste. Il veut donc un théâtre dégagé du théâtre psychologique et de texte. « c’est que le théâtre, art indépendant et autonome, se doit pour ressusciter, ou simplement vivre, de bien marquer ce qui le différencie d’avec le texte, d’avec la parole pure, d’avec la littérature, et tous les autres moyens écrits et fixés ». 24). Il y développe une idée d’un théâtre devant surtout trouver ses moyens d’expression sur scène. C’est ainsi le rôle de metteur en scène qu’il tente de mettre en avant. Il le considère comme le véritable créateur de l’espace scénique. Mais ce n’est pas à comprendre comme une éviction de l’acte d’écrire. Le Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 23 25) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 174 26) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 152 reproche d’Artaud concerne la scission qui s’opère entre l’auteur de l’écrit et l’auteur sur scène. La scène devant être le véritable lieu de création du texte. « Ce qui appartient à la mise en scène, doit être repris par l’auteur, et ce qui appartient à l’auteur doit être rendu également à l’auteur, mais devenu lui aussi metteur en scène de manière à faire cesser cette absurde dualité qui existe entre le metteur en scène et l’auteur. » 25). Il cherche à élaborer une théorie basée sur l’utilisation du corps comme un instrument. « L’acteur est à la fois un élément de première importance, puisque c’est de l’efficacité de son jeu que dépend la réussite du spectacle, et une sorte d’élément passif, puisque toute initiative personnelle lui est rigoureusement refusée ». 26) Il pose également que le spectacle sera un langage, totalement codé et retranscrit. « C’est ainsi qu’il n’y aura pas de mouvement perdu, que tous les mouvements obéiront à un rythme ». 27). danseur balinais, photo de P Mariottini tiré de : http://dp.mariottini. free.fr/carnets/carnet/bali/ photos/1-theatre.htm 27) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 152 28) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 185 “Le théâtre oriental a su conserver aux mots une certaine valeur expansive, puisque dans le mot le sens clair n’est pas tout, mais la musique de la parole, qui parle directement à l’inconscient. Et c’est ainsi que dans le théâtre oriental, il n’y a pas de langage de la parole, mais un langage de gestes, d’attitudes, de signes, qui au point de vue de la pensée en action a autant de valeur expansive et révélatrice que l’autre. Et qu’en Orient on met ce langage de signes au-dessus de l’autre, on lui attribue des pouvoirs magiques immédiats. On l’invite à s’adresser non seulement à l’esprit mais aux sens, et par les sens, à atteindre des régions encore plus riches et fécondes de la sensibilité en plein mouvement.” 28). Il s’attache au théâtre balinais comme étant une source dont il faut s’inspirer. L’utilisation du corps est totalement codé et ne parle que par gestes, appuyé par une musique hypnotique. Le texte y est alors absent et l’espace de la scène est le lieu de la création sans être dépendant d’un auteur. Les images crées sont directement issues de la scène et doivent permettre de parler aux sens. Le corps de l’acteur doit travailler à une gymnastique de l’âme, Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 24 29) Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964, p. 148 qu’il nomme « l’athlétisme affectif ». Le comédien est un athlète du cœur et le monde affectif est sa spécialité. Mais Artaud précise que l’ancrage de celui-ci est physique, il est guidé par la notion de souffle. Ce dernier lui permet de faire une analogie avec la musique, le souffle étant le tempo de l’oeuvre. Ces écrits abordent également la réforme du rapport au public. L’espace de la scène devient un lieu d’expérimentations. « Nous détruisons la scène et la salle qui sont remplacées par une sorte de lieu unique, sans cloisonnement, ni barrière d’aucune sorte, et qui deviendra le théâtre même de l’action. Une communication directe sera établie entre le spectateur et le spectacle, entre l’acteur et le spectateur, du fait que le spectateur placé au milieu de l’action est enveloppé et sillonné par elle ». 29). Il préconise l’investissement de lieux non théâtraux comme des hangars. Le public se trouve donc dans un grand espace sans ornements, sur des sièges mobiles. L’action est répartie autour et au-dessus de lui grâce la présence de galeries en hauteur. Il y a une diffusion de l’action dans l’espace. Les éclairages également font parties des éléments qui mettent le public dans l’action. Après cette période commence une recherche mystique. A partir de 1935, il commence une période de quête au Mexique et en Irlande qui le conduira pour finir en asile psychiatrique. Toujours guidé par une volonté de s’affranchir des limites dues à sa souffrance physique, il se lance dans une quête, qui l’aménera à chercher les limites de la perception, la limite du corps dans sa perception. Il a recours aux rites initiatiques basé sur l’utilisation du Peyotl chez les indiens Tarahumaras (« D’un voyage au pays des Tarahumaras »). Suit une période mystique, faite de cures de désintoxication qui aboutit aux « Nouvelles Révélations de l’Etre ». de son émission radiophonique interdite « Pour en finir avec le jugement de Dieu » laisse entrevoir l’utilisation très particulière qu’il en fait. Mais également la fragilité de son état. Sa recherche l’amène à poursuivre dans la direction d’une destruction de l’espace théâtral. Celui-ci devant entrer totalement dans la vie et ne pas être séparé d’elle. Il organise des événements autour des ses écrits qu’il ne fait qu’une fois et qui annoncent les « happenings » et autres performances des décennies à venir. Son œuvre a connu une grande période de « gloire » durant les années 60 et 70. « Très vite, en France et bien au-delà, Artaud (1896-1948) prit le visage du rénovateur du théâtre contemporain : “ der Vater des modernes Theaters “, disait-on en Allemagne. Durant toute une décennie, ce fut une véritable folie d’Artaud : chacun se réclamait de lui, et une “ cruauté “ le plus souvent mal comprise était mise à toutes les sauces. Comme toutes les modes, celle-ci finit par refluer. Non sans inspirer un vif soulagement à ceux que cette frénésie avait consternés. Car elle était largement mystificatrice, et un certain culte aveugle avait tendu à occulter, par ses excès bruyants et réducteurs, la richesse d’une parole que l’on commençait à peine d’approcher. Il arrive que le reflux d’une mode s’accompagne d’un détournement radical de ce qui en a été l’objet et que l’on aille jusqu’à brûler ce qu’on avait adoré. Rien de tel ici : ce qui a disparu, c’est l’écume, le fracas. Mais l’intérêt profond pour Artaud n’a pas décru. Le prouvent les numéros spéciaux de revues qu’on continue de lui consacrer, à intervalles quasi réguliers, tandis que se poursuit méthodiquement le lent dévoilement des Oeuvres complètes. ». 30) En hôpital il subit le traitement par électrochocs. En 1946, il en sort, prématurément vieilli et édenté. Pourtant âgé de 50 ans, il a déjà l’air d’un vieillard. 30) Alain et Odette Virmaux,In Antonin Artaud, La Manufacture éd. Cette période d’enfermement physique dans l’espace et par les hommes le conduit à se réapproprier patiemment son corps, mais aussi à reconquérir l’instrument du verbe, de la langue. L’écoute Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 25 Après Artaud Merce Cunningham - John Cage - Nam June Paik Variation V, 1965 tiré du catalogue d’exposition “l’Art au Corps, le corps exposé de Man Ray à nos jours”, sous la direction de Philippe Vergne, Marseille, Musées de Marseille, 1996 La personnalité d’Artaud est spéciale dans cette petite histoire, car on a l’impression qu’il termine une période commencée un siècle plus tôt et qui nous lie à une pensée humaniste de recherche d’unité et qu’il commence la période contemporaine. Une période bien plus difficile à classer. Le corps y gagne une nouvelle place, plus centrale, plus individualiste, mais est également mis constamment en crise, depuis les actionnistes Viennois jusqu’aux artistes cybernétiques. Le corps est traqué, désenchanté, déconstruit et reconstruit. Ceci à mesure que la société se désagrège. Cela fait penser aux débuts du déconstructivisme de Coop Himmelblau entre autre. « […] Nous voulons une architecture qui donne plus, qui saigne, qui épuise, qui se torde et, pourquoi pas, qui casse. Une architecture qui brille, qui pique, qui se brise et se déchire lorsqu’elle s’étire. L’architecture doit être abyssale, embrasée, lisse, dure, angulaire, brutale, ronde, tendre, colorée, obscène, lascive, rêveuse, attirante, repoussante, mouillée, sèche et palpitante. Vivante ou morte Si elle est froide, alors froide comme un bloc de glace. Si elle est chaude, alors brûlante comme une aile enflammée. ». 31). Merce Cunningham, John Cage Mais la quête d’œuvre d’art total ne s’arrête pas, Le projet multimédia de John Cage, Nam June Paik et Merce Cunningham à Black Mountain, en 1952, en est un exemple. Ici, l’œuvre ne cherche pas à édifier le spectateur. De but, il n’y en a pas, sinon de donner l’impression que la performance peut continuer encore et encore. Comme si l’art était la vie et était un paysage. Sans autre but que d’être d’exister. il s’agit d’utiliser tous les phénomènes perceptibles de l’environnement. La seule volonté des artistes étant de rendre sensible les événements de la vie. 31) Coop Himmelblau, “Construire le ciel”, Centre Georges Pompidou, Paris, catalogue d’exposition, Paris, Centre Georges Pompidou, 1993. Merce Cunningham, libère également le corps de la musique, en travaillant sur des systèmes mathématiques pour créer ses chorégraphies. Faisant entrer l’aléatoire dans celles-ci. Les corps ne bougeant plus en groupe mais indépendamment les uns des autres. Le mouvement devenant ainsi indépendant de la musique et du groupe. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 26 danse simultanée entre vidéo et réalité. photo tirée du DVD du spectacle “shazam !”, Cie DCA, 2002 Philippe Découflé Le spectacle multimédia continue également avec un élève de Cunningham, Philippe Découflé. Ses recherches l’ont poussé vers des questions plus ludiques et théâtrales. Il continue à utiliser la vidéo. Sa réflexion porte beaucoup sur le reflet, le dédoublement de soi, sur la possibilité de la danse de devenir un langage théâtral et non plus abstrait comme le pouvaient être les chorégraphies de Cunningham. Son utilisation de la vidéo est aussi vieille que la création de sa compagnie. Celle-ci lui permet des essais sur le temps, en faisant dérouler plus ou moins vite le film de ses danses ou de travailler sur l’espace lui-même. Ceci est visible dans le spectacle “Shazam !” qui est un hommage au corps et aux premiers films de Méliès. L’emploi de la vidéo y est central. Le spectacle est filmé par une trentaine de caméras sous plusieurs angles. Durant le spectacle, des écrans sur scène permettent réaliser des croisements. Soit avec des films précédents de Découflé, soit avec des points de vue en direct. La transdisciplinarité des danseurs est assumée, car on y trouve certains qui parlent, jouent de la musique et accessoirement dansent. Dans ces spectacles on a l’impression d’atteindre ce que cherchait Artaud. Dans cette possibilité de créer des images qui parlent à l’inconscient du public. L’espace devenant ce lieu d’émergence d’un autre monde. photo tirée du DVD du spectacle “shazam !”, Cie DCA, 2002 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 27 La pensée sur le corps, nous l’avons vu, a évolué, réformant profondément sa place dans l’espace scénique et l’espace scénique luimême. Certains metteurs en scène, en s’intéressant aux croisements, aux rencontres éventuelles entre les différents arts de la scène, ont permis d’en faire émerger les parallèles. Il en ressort des liens forts. La musique permet d’ouvrir sur des notions de rythme et de structure pour le corps et le texte, le mouvement permet d’ouvrir à la dimension corporelle de l’apprentissage par la rythmique par exemple. Mais plus généralement, il en ressort l’importance d’avoir une formation ouverte aux autres arts. Wagner, Appia, mais surtout Meyerhold sont des chercheurs dont la puissance oblige tous les arts à se regarder. L’espace aussi est abordé et nous pouvons comprendre le sens de tel ou tel type de salle. Au lieu de croire que l’espace du théâtre est toujours identique. Un centre de formation, aujourd’hui, se doit d’être à la rencontre de ses différents moyens d’expression. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 28 SALLES ET FORMATION Situation dans l'est Vaudois Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Les préoccupations pédagogiques du centre. 32) Alain Crombecque in « regards d’écoles, nouveaux créateurs », Atlante, 1993. Une définition semble nécessaire, pourquoi « arts vivants » ? Dans l’acceptation générale, il s’agit des arts de la scène. Théâtre, danse, musique. Toutes les formes d’expression qui se basent sur l’utilisation du corps en direct, et qui, de fait, sont vivantes. Les définitions de base de la danse, du théâtre et de la musique semblent de plus en plus ténues et les interprètes ne peuvent souvent plus se borner à la seule connaissance de leur art. Ainsi, on demande de plus en plus au danseur d’interpréter des rôles, au comédien de maîtriser le chant ou son corps, au musicien de pouvoir interagir avec le public. Ainsi, la danse n’est plus le seul art du mouvement, le théâtre l’art du texte et la musique l’art du son et du rythme. Le but du centre est de proposer une formation pré professionnelle pour chacun des arts de la scène, danse, musique, théâtre, mais également des post-formations et des lieux de rencontre pour des praticiens expérimentés. Toutefois, une formation pré professionnelle pose quelques limitations à la transdisciplinarité, notamment en raison des différences d’âge auxquelles on commence la formation de ces arts. Souvent, à 16 ans un danseur est proche d’un niveau professionnel, alors que le comédien ne fait que commencer sa formation. Le lieu propose ainsi une formation de base spécifique à chaque art et la possibilité de choisir un cour dans un autre domaine. Ceci, afin d’assurer une formation de base solide. Une Référence existe à Berne avec la HKB (die Hochschule des Künste Bern). Les autorités ont décidé de regrouper toutes les écoles d’art de la ville sous cette organisation. Le but est de pouvoir permettre aux étudiants de chacune d’entre elles de choisir en complément de son cursus quelques cours dans d’autres écoles. En plus, afin que le centre ne soit pas qu’une étape dans la formation de base, il s’agit de proposer des post-formations et des workshops de recherche à destination des professionnels et des élèves avancés. 33) Claude Régy, “les états latents”. tiré de : “Le corps le sens”, Paris, Editions du Seuil, 2007, p. 164 Le lieu permet également de réaliser des spectacles en y intégrant les élèves en croisant plus ou moins les compétences. « La circulation transversale entre tous les métiers du théâtre me paraît essentielle dans le processus d’apprentissage. En fait, ce qui m’a le plus impressionné, c’est mon expérience à Nanterre avec Patrice 29 Chéreau, c’est-à-dire la cohabitation d’une activité pédagogique de formation avec le travail de création et de production, à l’intérieur d’un grand théâtre. Cette présence permanente de l’école, de ces gens de moins de vingt ans en face de metteurs en scène, d’acteurs, de techniciens chevronnés, cet échange quotidien étaient les meilleures conditions possibles de travail pour les élèves. Mais il y avait, de plus, un effet de retour. Les « maîtres » apprenaient aussi, confrontés qu’ils étaient à une demande et à un regard d’une autre nature que ceux du public, toujours plus ou moins consommateur. ». 32). La sensibilité au corps est particulière à chaque art. L’intérêt d’un centre des arts vivants est de permettre à chacun de prendre conscience d’une autre dimension expressive de son corps (par exemple le mouvement lent pour le danseur, la chorégraphie dans le théâtre, le corps comme base rythmique). D’autre part, le but est de rendre sensible au corps comme forme occupant un espace, ainsi que l’influence de ce dernier. Expérimenter l’espace comme partenaire de jeu. Comprendre le potentiel d’un espace avant l’intervention de la scénographie qui elle-même est la création d’un nouvel espace de jeu. Pouvoir expérimenter son corps, sa musique, son mouvement dans des espaces différents, peutêtre inadaptés, mais qui ont peut-être des qualités qu’il s’agit de découvrir. En dernier lieu, la définition la plus importante de l’espace est son rapport à un public. Le rapport perceptif qui se crée à ce moment là est l’essence même de la représentation des arts de la scène. L’espace est à voir comme cet élément qui conditionne notre rapport au public et sa perception du spectacle. Un lieu d’apprentissage est un lieu où ce rapport peut être questionné et expérimenté. Le rapport au public change et n’est pas figé dans une norme. Claude Régy le dit lui-même : « le théâtre fait que les lois, au théâtre, crient du désir d’être transgressées ». 33) De cette manière tout est possible en manière d’espace théâtral. De la scène isolée du public, proposant un tableau et une réalité à part entière, jusqu’à l’alcove où un seul comédien peut jouer pour un seul spectateur dans un espace réduit. L’espace devient un outil supplémentaire pour avoir un impact sur le public. Les metteurs en Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 30 34) Fabrice Dugied tiré de : « Où va la danse ? L’aventure de la danse par ceux qui l’ont vécu », Paris, Editions du seuil/ Archimbaud, 2005, p. 86. scène rivalisent d’ingéniosité pour investir les lieux qui leur semblent corrects pour leur pièce. La question du lieu, donc, est constamment remise en cause. Même dans un cursus amateur, on peut être amené à expérimenter des espaces totalement différents, des places de village, un refuge en montagne, de petites salles ou de grands auditoires. Pouvoir permettre à l’étudiant de comprendre que des questions simples de distances orientent le sens d’un spectacle. La distance entre les artistes, leur positionnement dans l’espace et leur distance au public est aussi importante que de devenir un bon technicien de son art. L’espace d’enseignement doit être un élément qui interroge l’élève. De la même manière que le public, celui-ci doit être dérangé. Un bon apprentissage est fait de déconstruction et de reconstruction de son propre savoir. « Je voudrais dire aussi que, pour moi, la danse a été faite de la curiosité que je portais à celle des autres, et que, si je n’avais pas été spectateur assidu pendant de nombreuses années, je ne serai sûrement pas devenu danseur. » . 34). Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Un lieu de potentiels à réaliser. Je vois un lieu où l’espace est un potentiel de découvertes et d’expérimentations permanentes. Un élément de jeu pour l’étudiant. Au contraire d’une approche fonctionnaliste où chaque chose doit se trouver à sa place, bien rangées dans des cases, j’imagine un lieu de croisements et de rencontres. Où la nécessité de jouer oblige à aller à la découverte de celui-ci. La nécessité, implique peut-être un certain inconfort. Comme le dit Peter Brook par rapport à la nécessité de jouer pendant la seconde guerre mondiale. Les caves, les greniers servaient de lieux de représentation. Mais c’est là qu’il a vu les spectacles qui l’ont marqués. 31 dans une pièce de 20 m3 avec des rideau ou dans une cathédrale, le mouvement d’un danseur n’est pas identique dans une boîte, sur une surface en pente ou dans un couloir dont la direction détermine ses mouvements. Enfin, cet espace détermine la perception de cette action par le public, un espace sombre, froid donnera moins envie à un public de rire à une comédie qu’un espace chaleureux. Une école des arts vivants doit prioritairement faire comprendre cela, par tous les moyens de sa pédagogie, donc également par l’espace d’enseignement. Un lieu de potentiels, implique une indécision dans la programmation de certains espaces. Ce que je nommerais une délocalisation de la fonction. Pourquoi certains espaces ne pourraient pas croiser plusieurs fonctions ? Ceci, afin d’en faire des espaces de rencontre. Bien entendu, certaines parties du programme nécessitent des espaces précis, avec des conditions assurées pour un certain travail. Je pense par exemple à une salle de danse qui doit avoir une géométrie, une taille et un confort adaptés au mouvement des corps dans l’espace. Une salle de théâtre est également un lieu dont la fonction nécessite un certain confort pour le public (vision, son, confort) et pour les intervenants du spectacle (coulisses suffisamment grandes, régie bien placée, scène fonctionnelle, etc.…). Mais d’autres, permettent un flou plus grand, il s’agit de toutes les parties de circulation, de rencontre. Bâtiment compris dans le processus de formation. Le bâtiment est à voir comme une aide à un processus de formation. D’une part dans sa programmation multiple. D’autre part dans les potentiels spatiaux qu’il propose. Des espaces pour expérimenter, afin de comprendre que tout lieu est un lieu de spectacle. Si on reprend la citation de Peter Brook par rapport à l’espace vide, elle suffit à poser la primauté du corps sur toutes les autres conceptions. C’est la présence du corps, de l’action et du public qui déterminent réellement l’acte. Même si l’espace n’est pas directement concerné, il n’est pas à considérer comme secondaire. Celui-ci détermine le rapport entre le corps et le public, Bayreuth, n’est pas le schauspielhaus de Berlin. Il détermine également le rapport entre l’action et le corps, un comédien ne joue pas de la même manière sur un plateau de 20 mètres d’ouverture ou dans une cave, l’acoustique n’est pas semblable Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Offre de salles de spectacle 32 Le cas de l’est vaudois La grande majorité des salles se concentrent à Lausanne, la riviera a également dans un faible périmètre une concentration de salles. Les autres sont disséminées sur le territoire. La grande majorité des lieux sont construit pour des représentations de théâtre. La musique a également quelques lieux dédiés. La danse fait figure d’enfant pauvre à ce niveau là. La grande majorité des salles programment du théâtre, la musique étant moins représentée et la danse n’apparaissant quasiment pas. location de locaux supplémentaires (halles de construction de décor, dépôts de costumes, salle de répétition, etc…), de l’immobilisation d’un plateau s’il n’y a pas de salle de répétition et du risque plus important si le spectacle est un fiasco (sa programmation étant plus longue que pour un spectacle de tournée). Prenant également le rôle de centre secondaire par rapport à Lausanne ou Genève. La population de la riviera toutes communes confondues s’élève pourtant à 70’000 habitants sans compter le tourisme, ce qui en fait une région d’une taille équivalente à Lausanne. Sur cette base, la création d’une autre salle de spectacle est tout à fait justifiée. Celle-ci est également justifiée dans le type d’offre qui existe. Le théâtre de Vevey fait principalement de l’accueil avec des spectacles importants qui ont déjà connu un succès ailleurs, grâce à une capacité d’accueil qui permet de vite rentabiliser des spectacles onéreux. Le théâtre de l’Oriental base sa programmation sur une offre de spectacles plus pointus et confidentiels dont plusieurs sont des créations. Le théâtre de Montreux s’est quant à lui spécialisé dans le théâtre de comédie et de création. Toutefois, celui-ci est le moins bien lotis des théâtres officiels de la région avec une trop faible capacité pour être rentable. Raison pour laquelle une nouvelle salle serait nécessaire. Enfin, le centre des congrès de Montreux permet d’accueillir des manifestations d’envergure internationale, comme le festival de Jazz, ou l’accueil d’orchestres philarmoniques. Il faut distinguer les théâtres d’accueil et les théâtres de création. Les contraintes économiques, de surface à disposition en changent totalement l’exploitation. Un théâtre d’accueil doit avoir une capacité de salle suffisante pour pouvoir rentrer dans ses frais. Ils accueillent principalement des spectacles de tournée qui ont été crées ailleurs et qui ne restent à l’affiche que quelques jours (suivant la capacité de la salle à être remplie). Ce sont des théâtres qui peuvent espérer être quasiment indépendants financièrement à l’instar du théâtre des balladins à Savièse. Au contraire, un théâtre d’accueil fait face à des frais de fonctionnement plus important, du fait de l’entretien d’une équipe technique, de la Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 33 LAUSANNE - PULLY : population 120’000 hab. places disponibles : 300 pl. 600 pl. 100 pl. 120 pl. 1850 pl. 1100 pl. 300 pl. 40 pl. 70 pl. 1000 pl. 200 pl. 100 pl. 455 pl. théâtres professionnels en activités : - Kleber-Meleau, lausanne : - Vidy, Lausanne : - Pois-chiche, Lausanne : - Arsenic, Lausanne : - Beaulieu, Lausanne : - Métropole, Lausanne : - CPO, Lausanne : - Vide-Poche, Lausanne : - Boulimie, Lausanne : - Opéra, Lausanne : - 2.21 et pulloff, Lausanne : - TPE, Lausanne : - Octogone, Pully : Total : 120’000 hab. 7465 pl. Rapport nb d’hab / nb de places : 40’000 / 650 19 personnes/pl. = 70’000 hab. VEVEY-MONTREUX ET ENVIRONS : population 70’000 hab. théâtres professionnels en activités : - de Vevey : - Grenette : - Oriental : - auditorium Stravinsky : - T.M.R : places disponibles : 750 pl. 70 pl. 120 pl. 1800 pl. 110 pl. Total : 2850 pl. Rapport nb d’hab / nb de places : 70’000 / 2850 = 24 personnes/pl. CHABLAIS : population 40’000 hab. théâtres professionnels en activités : - Crochetan : - du Moulin-Neuf places disponibles : 650 pl. 100 pl. Total : 40’000 hab. 750 pl. Rapport nb d’hab / nb de places : 40’000 / 750 = 61 personnes/pl. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Offre de formation dans le canton Il faut distinguer les différents niveaux de formation universitaires/ hautes écoles, cours préparatoires, cours privés, troupes amateurs. Il faut également distinguer cette offre par rapport aux différents arts concernés. Formation pour la musique C’est la formation la plus reconnue et ayant le plus de débouchés stables. En effet, la musique entre dans le cursus de l’école obligatoire de l’Etat de Vaud. La formation professionnelle des enseignants entre donc dans sa politique scolaire, afin de fournir un nombre d’enseignants pour ces écoles. C’est le département de l’éducation et de la formation de l’Etat de Vaud qui la finance. Les débouchés peuvent également être les grands orchestres publics, comme l’opéra. Ensuite, il y a encore les débouchés dans l’enseignement et la production dans le privé. La formation professionnelle est fournie dans le canton par le conservatoire de Lausanne pour la musique classique. Ensuite des conservatoires de région préparent à l’entrée dans les écoles professionnelles ou fournissent une formation de base. C’est le rôle du conservatoire de musique classique et de Jazz de VeveyMontreux. Ensuite, les cours privés viennent compléter l’offre. La formation chez un maître en musique est encore considérée comme un plus pour un musicien professionnel. Une autre forme d’enseignement basée sur la pratique est très répandue dans les communes par les big bands et autres orchestres de gugglemusik, musique traditionnelle et fanfare. Le rôle de ses associations qui jouent plus un rôle social qu’artistique n’est pas à négliger. Formation pour le théâtre A la différence de la musique, le statut de comédien est quelque peu différent et les débouchés sont moins assurés et passent essentiellement dans des projets théâtraux ou la mise en place de cours privés. A la différence de la France qui soutient de grands théâtres avec leurs troupes intégrées et qui introduit d’avantage le théâtre dans la formation scolaire. 34 La formation professionnelle est fournie par la HETSR (Haute Ecole de Théâtre de Suisse Romande). Elle est l’unique école proposant une formation professionnelle en romandie. Ensuite, les cantons mettent en place des cours préparatoires dont le but est de préparer les étudiants au concours d’entrée de cette haute école. Dans le canton de Vaud, l’état ne cherche pas à créer des structures de conservatoires, mais à soutenir des cours qui préparent pour cette école. L’est vaudois n’a pour l’instant pas encore cette structure à disposition. La majorité de la formation de base est soutenue par des cours privés ou l’appartenance à des troupes amateurs qui est d’ailleurs la forme la plus répandue de cette formation. formation pour la danse Il n’existe pas de formation de danse au niveau fédéral en Suisse et par conséquent pas de profession de danseur, officiellement du moins. Ceci va bientôt changer: Un projet pilote prévoit d’introduire pour 2008 deux filières à Zurich et à Lausanne, permettant d’obtenir un certificat fédéral de capacité avec une maturité professionnelle. Le statut de danseur est donc, pour l’instant, le plus précaire des arts de la scène en Suisse romande. Malgré la présence de Béjart, le métier souffre d’une non reconnaissance par l’Etat. L’essentiel de la formation est d’ordre privé, Il existe quand même des associations faîtières qui permettent de légitimer la valeur de ces cours. Les compagnies permettent également de trouver du travail, mais les traitements sont très différents de l’une à l’autre. La grande majorité des personnes cherchant à devenir professionnelle s’expatrient ailleurs en Europe, où la situation et l’actualité de la danse est bien meilleure. Selon Denis Mattenet (directeur du centre de danse de Montreux), la Suisse est très en retard par rapport à la situation en Europe. La France étant très bien placée grâce à ses diplômes d’Etat et ses grands ballets. comme pour le théâtre les formations sont privées sur la riviera. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 35 LE SITE échelle urbaine Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 “collage city” Le premier caractère qui ressort du site est l’impression de «collage» qui s’en dégage. Non seulement dans la construction même, mais également dans sa programmation. L’impression d’un agrégat sans vision d’ensemble que les histoires successives ont créées. Cette impression se dégage également de la ville. Dont la seule cohérence réside dans l’alignement à la rue. A l’échelle de Montreux, le village passe de centre à celui de périphérie. Le centre s’étant déplacé le long du lac durant le boom immobilier et touristique du 19ème siècle. Le fait que le village ne soit plus un centre est visible dans le site. Au début du 19ème, le village a une auberge emblématique (la maison Visinand) et un bâtiment qui accueil le premier casino. A la fin du 19ème, l’auberge est une école et les nouvelles constructions, sont des entrepôts. Le village est alors une zone artisanale au service de la ville basse et de ses hôtels. Le village est pourtant resté un « centre » pour les Montreusiens de souche. Et cette « centralité » est visible aujourd’hui, car celui-ci regroupe des activités culturelles à l’échelle de la région. Ainsi, celuici s’est peu à peu transformé en centre culturel de la ville. Ceci n’est pourtant le cas que du point de vue programmatique. De ce point de vue, il s’agit également d’un collage issu de volontés diverses et non gouvernées au gré des occasions. Le caractère du village n’a pas été modifié par cela et les différents programmes sont tous inscrits dans un bâti existant. Ceci étant exemplaire de la politique des petits pas au niveau urbain adoptée par la commune. Laissant une grande marge de manœuvre à l’initiative privée ou associative et cherchant à réemployer l’existant plutôt qu’à construire du neuf. Le site même du projet est représentatif de ce « collage » programmatique n’ayant que peu d’influence sur le bâti et de visibilité dans la ville. Historiquement donc, l’urbain rejoint peu à peu le village (la ville de Montreux n’existe pas encore et les constructions phagocytent les différentes communes qui étaient séparées les unes des autres jusque là).Cependant, celui-ci garde son caractère. Ceci peut-être expliqué par la présence de la pente et des voies de chemin de fer qui sépare le haut du bas de Montreux sur la ligne de cassure de pente. La ville s’est d’abord développée le long du lac. De plus, la ville ne s’est jamais remise de la première guerre mondiale qui a mis fin aux grandes fortunes princières (la principale clientèle). Le développement 36 urbain, s’est donc ralenti fortement et la ville n’a pas beaucoup évolué depuis. De plus, Elle n’a pas su s’adapter à l’émergence du tourisme de masse. Un dernier élément permet d’expliquer cette préservation. Durant les années 70, la ville recommence à se transformer, mais cette fois, sur elle-même. Ainsi on commence à détruire les bâtiments belle époque, la tour d’ivoire en est le plus visible des symboles. Ceci occasionnera petit à petit une levée de bouclier pour la protection du patrimoine historique. Ainsi, le village des Planches garde-t-il cette cohérence urbaine d’un village se développant le long des « Chables », ces chemins agricoles permettant de remonter du lac à la montagne. Les bâtiments s’agrégent les uns aux autres le long du chemin, en remplissant la parcelle jusqu’à sa saturation. Lorsque celle-ci est trop profonde, un « creux » est réalisé dans la masse pour accéder au fond de celleci. Phénomène qui existe ailleurs à Montreux. On a dans ces cas un étagement des constructions et un collage stylistique de bâtiments différents. Le site est donc représentatif de cette suite de collages et de saturation. Ainsi, à cet endroit, on peut noter une coupure de la continuité bâtie. Il y a un « creux » dans la masse bâtie. Il est également un agglomérat dont la seule règle est de remplir les « vides » sans recherche de cohésion apparente. Ce phénomène est intéressant à plus d’un titre. Chacune des parcelles connaît se phénomène d’agglomérat conduisant à la recherche d’une continuité spatiale à l’intérieur de celui-ci. Ainsi, les différents volumes ne constituent pour finir qu’un seul et même bâtiment. L’espace lui-même est continu à travers les différents volumes d’une même parcelle. L’extérieur lui-même devenant un intérieur dans le plan. La maison Visinand, l’ensemble des bâtiments de la parcelle 41, ceux de la parcelle 42, proposent ce cas de continuité spatiale. La complexité qui s’en dégage est appréhendable par l’ouvrage de Colin Rowe sur la « collage city ». On a l’impression d’être en face d’un des « cadavres exquis » qu’il s’amusait à faire avec ses collègues. Dans notre cas pourtant, il n’y a pas de bâtiment exemplaire de l’histoire de l’architecture. Cette complexité spatiale est intéressante pour le projet et sa poétique. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 37 Rome les forums impériaux tiré de : Colin Rowe, Fred Koetter, “Collage City”, Goillon, InFolio éditions, 2002. En effet, l’amalgame programmatique de différents arts de la scène semble parler du site lui-même. Mettre des programmes dépassant la capacité d’accueil d’un seul bâtiment qui pousse à saturer le site et rechercher une continuité spatiale à travers les différentes structures. L’espace unifie les différents bâtiments. Cette recherche d’unité spatiale à travers le bâti apparait comme un enjeu du projet. Les exemples de Colin Rowe démontrent également un autre enjeu. Ainsi, dans les plans de son livre, on voit l’opposition entre la figure «indéformable» d’un programme dominant et le travail de remplissage réalisé tant bien que mal dans l’entre-deux à la recherche d’une continuité spatiale entre le dehors du bâti et le programme dominant. Le programme est soumis à la même réalité. La construction d’une salle de spectacle et de salles de cours nécessitant des conditions bien précises. Paris, hôtel de Beauvais, plan. tiré de : Colin Rowe, Fred Koetter, “Collage City”, Goillon, InFolio éditions, 2002. Cette recherche de continuité spatiale est également un enjeu pour la ville. Le programme est public et ici la masse bâtie creusée devra être accessible pour la ville. Ce qui lui donne une possibilité de s’étendre dans le creux du bâti. La masse bâtie pouvant être vue comme une « grotte ». Dans laquelle on peut découvrir différents espaces en parcourant dans une continuité spatiale différents bâtiments qui sont autant de volumes prédéterminés. Les « raccords » étant autant d’accidents de l’histoire du plan et devenant des espaces potentiels. Cet entre-deux entre le contenant et contenu cherchera à établir une unité spatial au site et sera l’un des enjeux du projet. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 38 le site : représentation de l’espace public en noir. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Situation géographique 39 Le site se trouve à Montreux, dans le quartier des «Planches» (ancienne commune indépendante) centre historique de Montreux et au-dessus du centre touristique qui s’étend le long du lac. C’est un ancien village vigneron dont les constructions peuvent être antérieures au 15ème siècle. Le village est alors séparé du lac et des communes alentours par des vignes et des terres agricoles. C’est avec l’augmentation du tourisme dans la région encouragé par l’arrivée du chemin de fer en 1861 que celui-ci est peu à peu rejoint par une urbanisation galopante. D’une population de 3’181 habitants en 1851, La région qui deviendra la ville de Montreux passe à 15’866 habitants en 1900. Le village est fusionné avec la commune du Châtelard en 1961 lors de la création de la commune de Montreux. Celui-ci garde encore aujourd’hui son caractère villageois au niveau du bâti. Il est environné dans sa partie supérieure par des constructions des années 70 et l’autoroute un peu plus haut. Une rivière, la baie de Montreux, le traverse et le sépare en deux. Ce quartier compte également dans un faible périmètre de nombreux programmes à vocation culturelle ou publique : L’école secondaire de Montreux, le NED (salle de concert), l’ASSIR (skatepark), le musée de Montreux, Le conservatoire de musique classique de Montreux, Le théâtre Montreux-Riviera. Il compte également quelques cafésrestaurants et quelques activités secondaires et tertiaire. situation Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Description du site 40 Le site est composé de plusieurs lôts de bâtiments hétéroclites appartenant à trois propriétaires : 1) Linsig, entreprise de ferblanterie couverture. (à titre indicatif car certains bâtiments touchent les constructions qui nous intéressent). 2) Commune de Montreux. 3) Commune de Montreux. Dans ce petit périmètre, on trouve des entrepôts, des administrations, des logements, un local pompier, une salle d’exposition, un conservatoire de musique, un théâtre, des ateliers. Le caractère architectural est très disparate et représentatif de cette mixité. Toutefois, le site se trouve en zone village, ce qui implique des restrictions au niveau des constructions. 1)2) 3) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Situation «politique» actuelle. 41 A l’heure actuelle, le conservatoire de musique classique ainsi que le théâtre se trouvent dans la «Maison Visinand». Celle-ci est une bâtisse protégée appartenant à la commune et qui fait office de centre culturel (n°3). Le théâtre a également des locaux dans un groupe de bâtiments à côté (n° 2, parcelles 41 et 42). L’intérêt du diplôme s’est porté sur un projet soutenu par le théâtre et le conservatoire. Ils ont fait racheter par la commune le lôt n°2 pour y placer le conservatoire de Jazz qui se trouve actuellement ailleurs à Montreux et permettre au théâtre d’avoir une salle de cours et de conserver ses locaux (une halle de construction et stockage de décors et son administration). Ils ont proposé ce rachat pour plusieurs raisons : - Eviter qu’un autre propriétaire ne fasse l’achat du bâtiment et n’expulse le théâtre. - faire de ce lieu un véritable centre culturel pour Montreux et ses habitants. Actuellement une commission de la commune travaille sur l’élaboration d’une proposition de programmation du site. Cette phase en est encore au stade de propositions et la réponse finale se basera sur le prix de l’intervention. 2) 1) 3) La commission se penche également sur la construction d’un centre de jour et d’une cantine pour le collège de Montreux situé en contrebas. La cantine actuelle étant débordée par le nombre de repas à servir. Elle aimerait également garder les logements présents et l’entreprise. Comme la commission tente de ménager la chèvre et le chou, le résultat risque d’être la perte d’une grande partie des ateliers du théâtre, car c’est l’une des seule surface facilement exploitable. La volonté est de garder le gabarit existant. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 La commune et les nouvelles constructions 42 La ville de Montreux souffre actuellement de la politique de construction qu’elle a menée dans la période des années 70 à 90. Surfant sur le boom de l’immobilier et voulant refaire de Montreux une station touristique importante, la commune à favorisé les nouvelles constructions. Durant ces années, de nombreuses constructions datant de la belle époque furent détruites et des constructions pour le moins problématiques aux yeux des Montreusiens sont apparues, par exemple la tour d’ivoire. Depuis, plusieurs personnalités dont Franz Carl Weber, se sont élevées pour sauvegarder le patrimoine de Montreux. Ainsi, toute nouvelle construction proposée par la municipalité est remise en question. Le refus par la population de la construction d’un nouveau bâtiment pour centraliser toute l’administration de la commune en est le plus récent exemple. Actuellement l’optique de la commune est de privilégier les projets s’inscrivant dans l’existant, avec le moins de répercussions sur l’état extérieur du bâtiment. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 43 Deux accès principaux au site A pied depuis le lac 2) 1) 3) 4) En voiture depuis la gare, le bâtiment rue du pont 34bis est déjà présent. 5) 5) 3) 4) 2) 1) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 44 Côté Linsig Vue panoramique depuis l’école secondaire... au fond, l’entrepôt B 1) Jusqu’aux bâtiments de Linsig le bâtiment rue du pont 34bis émerge 1) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 45 les bâtiments rue du pont 36 derrière, le bâtiment rue du pont 34bis. au fond on aperçoit l’entrepôt A 1) 2) Côté maison Visinand La maison Visinand 3) 1) 2) 3) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 46 HISTORIQUE 1500-2007 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 47 La Maison Visinand a une importance particulière pour le village des Planches. Le bâtiment est mentionné dès 1582 dans les archives, en tant que «Maison de la commune». C’est alors l’auberge du village (à l’époque bernoise, un seul débit de boisson est autorisé par commune). Le bâtiment contient également une salle de commune pour la municipalité et une cave contenant les archives. La maison joue donc un rôle central pour le village. Une petite place s’ouvre devant elle durant de longues années avant que la voiture et des constructions ne viennent la détruire. C’est donc une maison au caractère officiel, par son rôle politique ainsi que par son rôle d’auberge. A partir de 1806, des salles de classes sont ouvertes dans le bâtiment ainsi qu’un appartement de fonction pour le professeur. En 1830, Eugène Rambert, fils de l’instituteur de l’époque, naît dans cette maison. Il deviendra l’un des écrivains suisse le plus connu de son époque, alors que Montreux rayonne au niveau international grâce à l’essor de son tourisme. En 1964, le théâtre du Vieux Quartier (aujourd’hui Théâtre Montreux Riviera) s’installe dans la cave. A la fin des années 70, encouragé par cet exemple et après rachat du bâtiment par la commune, il est décidé d’en faire un centre culturel accueillant la bibliothèque de Montreux, le conservatoire de musique classique, une salle d’exposition et des salles à usage collective, ainsi que des locaux pour le théâtre. les travaux ont lieu en 1977. Le déménagement de la bibliothèque a permis d’installer un auditoire pour le conservatoire pour certains de ses récitals. plan 1982. niv -1 de la maison Visinand Archives de Montreux (AM), Visinand, 351/28. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 48 plan de situation 1895. Archives de Montreux (AM), Visinand, GE 1032. 41 Les parcelles n° 41 et n° 42 ont d’abord appartenu à la famille Visinand, famille fortunée active dans le marché de grains. En 1894, des constructions sont déjà présentes sous la forme de hangars sur la parcelle n°42 qui se trouve la plus au nord. Il s’agissait de constructions rudimentaires dans le souvenir de M. Ducret. 42 plan d’hôtel et de maison particulière 1895. Archives de Montreux (AM), Visinand, GE 1032. A cette époque, les propriétaires cherchent à construire la parcelle. Deux projets avortés sont là pour en témoigner. Tout d’abord un hôtel puis une maison. La maison sera construite en face de la maison Visinand où s’élève actuellement un immeuble d’habitation appartenant à la Poste. plan de situation 1908. Archives de Montreux (AM), Visinand, GE 1033. Entre 1895 et 1908, un premier hangar de la taille de l’entrepôt A est construit au nord de la parcelle. élévation 1908. Archives de Montreux (AM), Visinand, GE 1033. En 1908, le bâtiment principal qui se trouve à la rue du pont 34bis est construit. Les plans indiquent une programmation comme lieu de stockage. Il était certainement destiné au commerce des Visinand. Il est à noter qu’à l’origine la toiture est plate. Le rez est une « remise » et le 1er et le 2ème étage sont des dépôts. En 1918, on y ajoute une petite annexe au sud-est avec un guichet et un bureau. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 49 élévation 1908. Archives de Montreux (AM), Visinand, GE 1033. en 1918, construction d’un petit annexe avec un bureau et un guichet. élévation 1918. Archives de Montreux (AM), Visinand, GE 1039. Le bâtiment devient propriété de la PAX assurance et se transforme alors en garde-meuble. Selon M. Ducret, le propriétaire fera construire un monte-charge. C’est une interprétation qui peut être corroboré par le fait que celui-ci n’apparaît que dans des plans plus tardifs. Ces plans concernent une deuxième transformation qui a lieu en 1929, les 1er et 2ème étages sont transformés en logements. Le bâtiment contient alors 6 appartements. Apparemment l’ancien monte-charge a été utilisé comme puit de lumière, mais de nouveau, M. Ducret ajoute que le toit n’est pas ouvert. Il s’agit donc d’un vide qui traverse le bâtiment, mais sans lien avec l’extérieur. La construction du toit a lieu entre 1929 et 1953, peut-être à l’occasion de la transformation des étages en appartements. coupes et élévation 1953. Archives de Montreux (AM), Ducret, 1178 En 1953, l’établissement Ducret, tenu à l’époque par Louis Ducret, rachète la parcelle pour y implanter son entreprise d’eaux minérales (la 3ème de suisse romande à l’époque d’après M. Ducret). Celle-ci se trouve alors au 27 de la rue du Pont et s’y trouve trop à l’étroit. L’entreprise familiale exploite l’eau de la source du Maralet (propriété des villages de Chêne – Sâle et Crin). Une fontaine est encore présente comme souvenir de cette exploitation. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 50 extrait de coupes et élévation 1953. Archives de Montreux (AM), Ducret, 1178 Le rez est transformé en fabrique d’eau gazeuse et l’annexe d’un étage situé au sud-est construit. Il s’agit alors d’un couvert pour les expéditions. On détruit également l’ancien « casino » comme signalé plus bas. Ceci, afin de laisser un accès plus conséquent pour les livraisons par camion. plan 1953. Archives de Montreux (AM), Ducret, 437. C’est également à cette époque que l’on construit le hangar A. Prenant la place des anciens entrepôts . plan rez 1958. Archives de Montreux (AM), Ducret, 1589. Ensuite, l’entreprise prenant de l’ampleur, la construction d’un 2ème hangar est prévue en 1958. Grâce à un échange de parcelle avec Linsig, le hangar B voit le jour. plan rez 1984. Archives de Montreux (AM), Ducret, e_4514. En 1972, la fabrication d’eau est abandonnée et l’entreprise prend le nom de Boissons Riviera SA. Elle ensuite rachetée par Arkina. Celleci déménage en 1984. A cette époque une menuiserie s’installe au rez du bâtiment principal et dans l’annexe sud. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 51 Actuellement le rez-de-chaussée est pratiquement désaffecté et utilisé par les pompiers pour y stocker du vieux matériel. Une P.M.E : « Grand Multiservices » occupe l’annexe. Les ateliers de construction de décor, ainsi que le stockage de décor, de costumes et d’accessoires trouvent place dans les hangars A et B. extrait de plan de situation 1930. Archives de Montreux (AM), Millasson, D1-11b. Sur la parcelle n°41 qui se trouve au sud le long de la rue, il y a deux constructions. L’une est un bâtiment d’habitation en L et, selon M. Ducret, l’autre serait le premier lieu où se serait installé le casino de Montreux. Hypothèse étayée par une gravure du 19ème où la maison Visinand est liée à cette construction par un petit pont. extrait de plan de situation 1958. Archives de Montreux (AM), Ducret 1589. Ce bâtiment sera détruit lors de l’arrivée de l’établissement Ducret, afin de libérer l’accès. A une date indéterminée entre 1953 et 1958, le bâtiment en L perd son aile perpendiculaire à la rue. On construit à la place une surface commerciale avec vitrine. La COOP y installera l’un de ses premiers magasins à Montreux. Actuellement, l’administration du théâtre occupe les lieux. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 52 1500 1953 1600 1958 1894 1970 Nous avons ainsi récapitulé l’arrivée des constructions successives dans la reconstitution en 3 dimension suivante. Nous avons également intégré les bâtiments de la parcelle LINSIG, car ceux-ci sont contigus à notre parcelle et interrogent la manière dont les bâtiments s’appuient les uns sur les autres. 1898 1908 1952 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 53 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 54 PLANS EXISTANTS échelle 1/500 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 D E C 55 B B E D A C A plan d’ensemble niveau 0 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 56 coupe AA échelle 1/500 coupe BB échelle 1/500 coupe CC échelle 1/500 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 57 coupe DD échelle 1/500 coupe EE échelle 1/500 élévation sud échelle 1/500 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 58 L’analyse des différents programmes vise à établir une liste de l’utilisation des différents corps de bâtiments. En effet, il est possible de qualifier de patchwork programmatique l’organisation des différents plans successifs. En savoir plus sur cette organisation permet d’en tirer des conclusions quant à la réaffectation possible des différents espaces. En effet il est par exemple plus facile d’installer un espace destiné à des réunions publiques dans une ancienne salle industrielle car les sols sont probablement déjà prêts à accepter une charge plus importante. Cette analyse prend d’autant plus d’importance que les bâtiments analysés dans ce mémoire sont comme collés les uns aux autres, offrant une multitude d’espaces et de sous-espaces dont les fonctions sont très variées. PROGRAMMES organisation Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 coupe AA échelle 1/1000 59 Le niveau -1 se résume essentiellement à quelques espaces de soussol isolés les uns des autres. Le niveau 0 devient nettement plus intéressant sur la question de la mixité programmatique. En effet, le principe de collage constitue l’essence de l’organisation du plan. De plus petites entités trouvent aussi leur place en marge des plus grands programmes, ce qui constituerait une richesse à exploiter lors d’une possible réaffectation des lieux. A noter l’emplacement des deux grands espaces de stockage à l’arrière de la parcelle, là où d’autres programmes pourraient prendre place en étant au plus calme, en étant isolés de la route et de la façade principale du bâtiment. technique dépôt atelier coupe CC échelle 1/1000 théâtre bureau conservatoire loc. usage commun salles d’exposition logement coupe EE échelle 1/1000 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 60 technique dépôt atelier théâtre bureau conservatoire loc. usage commun salles d’exposition logement niveau -1 echelle 1/1000 niveau 0 echelle 1/1000 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 coupe AA échelle 1/1000 61 L’articulation programmatique de la maison Visinand est un peu complexe. Des programmes identiques prennent place sur plusieurs étages. Toutefois il faudrait faire attention à certains problèmes de promiscuité. Beaucoup de choses s’agglomèrent sans forcément être bien distribuées. technique dépôt atelier coupe CC échelle 1/1000 théâtre bureau conservatoire loc. usage commun salles d’exposition logement coupe EE échelle 1/1000 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 62 technique dépôt atelier théâtre bureau conservatoire loc. usage commun salles d’exposition logement CONSERVATOIRE niveau 1 echelle 1/1000 niveau 2 echelle 1/1000 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 coupe AA échelle 1/1000 63 Le niveau 3 montre clairement l’importance de la surface des combles. Le volume qui leur est accordé illustre leur possible développement en coupe. La structure et la géométrie qui les caractérisent offrent des possibilités d’implantation de programmes qui pourraient profiter des espaces générés. La relation espace-structure-programme deviendrait primordiale si l’on voulait par exemple installer un espace de foyer ou encore de réunion sous les toits. Des redéfinitions partielles de certaines géométries structurelles pourraient probablement s’effectuer si les besoins programmatiques se font sentir. technique dépôt atelier coupe CC échelle 1/1000 théâtre bureau conservatoire loc. usage commun salles d’exposition logement coupe EE échelle 1/1000 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 64 technique dépôt atelier théâtre bureau conservatoire loc. usage commun salles d’exposition logement niveau 3 echelle 1/1000 niveau 4 echelle 1/1000 Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Perspectives pour le conservatoire 65 Bref historique Le conservatoire est créé à la fin des années 70. Il tisse par la suite des liens avec celui de Vevey. Le conservatoire de Jazz est crée en 1982 puis devient école professionnelle, statut qu’il perdra voici quelques années. Les locaux Pratiquement toute l’aile nord de la maison Visinand est consacrée au conservatoire de musique classique. L’entretien avec le directeur a fait ressortir les problèmes liés aux locaux. Constructivement, les studios de répétitions ne sont pas assez isolés et se parasitent entre eux. Globalement, il propose suffisamment de locaux, bien que la direction envisage de se pourvoir de studios supplémentaires. Les problèmes sont les suivants, premièrement, il y a un manque de surfaces publiques et de réunion, comme une cafétéria et un auditoire de plus grande capacité pour les grandes manifestations. Deuxièmement, la séparation de l’école de Jazz et de musique classique complique les éventuelles rencontres. Troisièmement, le lieu propose trop peu d’espaces publics et sa construction est vétuste. Possibilités futures Le rachat par la municipalité du site, permet au conservatoire de proposer le rapatriement de l’école de Jazz sur place et ainsi d’unifier son enseignement dans un même lieu. Ce rapatriement nécessiterait de créer des studios pour musique amplifiée et donc de travailler fortement les détails constructifs entre studios. Une partie très spécifique nécessite un placement très étudié, il s’agit du studio de percussion/batterie qui doit être placé contre terre. Cela permettrait en outre de créer un lieu commun de cafétéria pour pouvoir se retrouver. Le regroupement présente l’avantage de permettre des économies, car les locaux actuels du conservatoire sont loués à un privé. (pour plus d’infomation, voir le résumé de l’interview en annexe) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Perspectives pour le théâtre Brève histoire La salle est liée à la création à Montreux d’une troupe de théâtre amateur dans les années 60. Celle-ci a décidé de créer une structure professionnelle avec un théâtre fixe. Au fil des années, le théâtre s’est spécialisé dans la création de comédies. 66 ne proposant qu’un bar, privant ainsi le théâtre d’entrée possible d’argent et d’une vitrine accueillante. On le voit, les parties qui ne fonctionnent pas sont les parties dédiées au public. Structure de financement. Le théâtre, malgré une configuration peu fonctionnelle et une taille de salle trop petite pour être rentable, a réussi à perdurer jusqu’à aujourd’hui. Notamment en rayonnant à Paris, grâce à des contacts avec les grands noms de la comédie en France. Ainsi, la salle peut se targuer d’avoir accueilli Roland Giraud, Michel Galabru, ou encore Peter Ustinov, dans ses créations, jusqu’à avoir reçu un Molière pour une coproduction avec un théâtre parisien mettant en scène Annie Girardot. Economiquement, le théâtre est du coup obligé de pratiquer des prix qui rebutent une partie de la population. Avec une capacité de 110 places, le théâtre vend sa place entre 40 et 50 francs. En moyenne, le prix de revient par place pour le théâtre est de 150 francs. Il lui reste ensuite à faire appel à la bonne volonté de la ville et des subventionneurs pour combler le manque à gagner. Fonctionnement actuel Aujourd’hui, le théâtre a changé de directeur et cherche par le biais du projet de la commune à gagner en surfaces utile. Notamment en salle de répétition pour la raison évoquée plus haut et surtout être assuré de ne pas être mis à la porte par le nouveau propriétaire. La démarche actuelle du directeur est d’essayer de rentabiliser le théâtre par le biais de son atelier de décors en louant ses services à d’autres théâtres. Un autre but, serait de pouvoir agrandir un peu le foyer, mais d’après le directeur, celui-ci ne serait de toute façon pas très rentable dans cette configuration. D’après lui, un moyen de rendre le théâtre plus rentable serait de construire une salle de spectacle d’une capacité de 300 à 400 places pour faire de l’accueil de tournées et conserver l’ancienne salle en abaissant le nombre de spectateurs en dessous de 60 personnes pour pouvoir expérimenter plus de types de spectacles. Il cite notamment l’exemple de la salle des balladins à Savièse qui est pratiquement autofinancée. La présence de cette nouvelle salle à Montreux n’entrerait pas en concurrence avec le centre des congrès et permettrait d’être également utilisée par les sociétés locales, comme le conservatoire de musique, pour des spectacles de fin d’année. Le centre des congrès étant trop grand et trop cher, pour l’instant, celui-ci loue le théâtre de Vevey pour ses manifestations. Le théâtre entretient deux postes fixes à l’administration, un poste de régisseur en chef, un poste de régisseur plateau, un poste d’homme à tout faire (régie, jeu) ainsi qu’un poste d’habilleuse. Les emplois sont peu payés et le fonctionnement du théâtre est essentiellement basé sur l’esprit de famille et l’entraide. Des postes exceptionnelles liés à chaque production sont également ajoutés pour pouvoir palier au manques dans la production (couturière, menuisier, etc…). Après entretien avec le directeur voici les points qui resssortent de l’état actuel : La partie de régie est très performante et permet de créer de vrais décors de bonne qualité. Ceux-ci sont souvent pris pour des spectacles qui montent à Paris après avoir été joués ici. Le grand défaut du site est le morcellement des fonctions, notamment au niveau du contact avec l’administration. Le grand problème, reste la salle de spectacle en elle-même qui n’est pas du tout fonctionnelle et ne permet pas beaucoup de variantes de scènographie. De plus, le théâtre n’a pas de salle de répétition ce qui l’oblige à immobiliser la scène lors de création au moins durant un mois avant le début du spectacle. Pour des cas très spéciaux (montage du décor dans la salle), les répétitions peuvent prendre place dans les combles de la maison Visinand. L’autre défaut est un foyer de très petite taille ne permettant d’accueillir au maximum qu’une trentaine de personnes debout et Développements futurs (pour plus d’infomation, voir le résumé de l’interview en annexe) Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 67 ETUDE DE CAS insertion de différents théâtres sur le site Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 RPF RPF 68 Théâtre de Vevey Vevey env. 700 m2 (salle et scène) 731 places RPF Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 RPF RPF RPF 69 Théâtre de Vidy salle aquarium Lausanne env. 250 m2 (salle et scène) 100 places (salle de répétition). Théâtre de Vidy salle Charles Apothéloz Lausanne env. 560 m2 (salle et scène) 387 places Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 RPF RPF RPF 70 Théâtre du Moulin-Neuf Aigle env. 130 m2 (salle et scène) 80 places Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 RPF RPF 71 Théâtre 2.21 salle 1 Lausanne env. 130 m2 (salle et scène) 50 places Théâtre 2.21 salle 2 Lausanne env. 170 m2 (salle et scène) 45 places Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 RPF RPF 72 Théâtre Arsenic salle 1 Lausanne env. 250 m2 (salle et scène) 104 places Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 RPF 73 Théâtre de l’Oriental Vevey env. 300 m2 (salle et scène) 330 places Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 74 Une première confrontation avec le site permet de comprendre que l’existant n’est pas complétement adapté pour insérer ce nouveau programme, en particulier la grande salle de spectacle. L’enjeu du projet se situera dans l’utilisation de la verticalité pour permettre de palier au manque de surface, ainsi que dans la destruction de certains bâtiments (le hangar, les bâtiments le long de la rue) et enfin proposer une circulation qui unifie le tout. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 75 CONCLUSION Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 76 Cette étude a tenté de répondre à ce qui est l’essence des arts de la scène pour comprendre quelle architecture leur serait la plus adaptée. A force de parler du corps est apparue la nécessité de le mettre également au centre de l’architecture. Il en ressort un relatif effacement de l’architecture, du contenant au profit du contenu. Le potentiel du site à intégrer cette volonté sera le travail du second semestre. Il portera sur la préservation et la réinvention d’un lieu pour donner naissance à une scène et un lieu d’apprentissage, de la même manière qu’Antonin Artaud voulait reconstruire son corps pour renaître sous une nouvelle lumière. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 77 REFERENCES bibliographie, sites internet, vidéos, remerciements Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Bibliographie - Peter Brook, « L’espace vide. Ecrits sur le théâtre », Paris, Editions du seuil, 1977 - Antonin Artaud, “Le Théâtre et son double”, Paris, Editions Gallimard, 1964. - Sous la direction de Amélie Grand et Philippe Verrièle, « Où va la danse ? L’aventure de la danse par ceux qui l’ont vécu », Paris, Editions du seuil/Archimbaud, 2005. - Jacques Roubine, « Introduction aux grandes théories du théâtre “, Paris, Bordas, 1990 - Sous la direction de Denis Bablet, “L’oeuvre d’Art Total”, Paris, Editions du CNRS, 2002. - “Adolpe Appia, 1862-1928, Actor - space - light”, exposition produite par Pro Helvetia, catalogue d’exposition, Londres, John Calder (Publishers) Ltd, 1982. - Françoise Héritier, Jean-Luc Nancy, André Green, Claude Régy, Jean-Claude Ameisen, “Le corps le sens”, Paris, Editions du Seuil, 2007. - “L’Art au Corps, le corps exosé de Man Ray à nos jours”, Mac, Marseille, catalogue d’exposition, Marseille, Musées de Marseille, 1996. - Constantin Stanislawski, « La formation de l’acteur», Paris, Petite bibliothèque Payot, 1963 - Colin Rowe, Fred Koetter, “Collage City”, Gollion, Editions InFolio, 2002. 78 1993. - Rosine Margat, « Je serai comédien », Paris, Editions de la Martinière, 2006. - Joëlle Neunschwander Feihl, « Inventaire Suisse d’Architecture 1850-1920, Montreux », Sté d’histoire de l’Art en Suisse, Berne, 2000. - Christian Schuetz, « L’épaisseur d’une réalité, Un lieu de création et de représentation pour la danse : usine Held, esplanade de la gare de Montreux », énoncé théorique EPFL, 2005. - Dominique Rouillard, « architectures contemporaines et monuments historiques. Guides des réalisations en France depuis 1980. », le moniteur, 2006. - Christian Godin, “La totalité, volume 4, la totalité réalisée, les arts et la littérature”, Seyssel, Edition Champ Vallon, 1998. - George C. Izenour, « Theater Design », New-York, The Mac GrawHill Book Company, 1977 Plans d’Archives : - Archives de Montreux (AM), Broyon GE 1042, Ducret 437, ducret 1178, ducret 1589, ducret e_4514, linsig GE 1003, linsig GE 988, Visinand 351_28, Visinand, e_3144, Millasson D1_11b, Vautier GE 1000, Visinand GE 1030, Visinand GE 1032, Visinand GE 1033, Visinand GE 1039, Visinand GE 1040. - Sous la direction de Richard Edwards, “Nouveaux créateurs, regards d’écoles. Théâtres”, Paris, Atlante et CNAP, 1993. - “James Turrell, the other horizon”, MAK, Vienne, catalogue d’exposision, Vienne, Hatje Cantz Verlag, 2002 - Coop Himmelblau, “Construire le ciel”, Centre Georges Pompidou, Paris, catalogue d’exposition, Paris, Centre Georges Pompidou, Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Sites internet 79 Sur la danse en Suisse : http://dansesuisse.ch/index.html http://www.avdc.ch/avdc.htm Sur Artaud : -http://www.heimdallr.ch/Art/artaudfr.html -http://www.evene.fr/livres/actualite/antonin-artaud-bnf-paristheatre-615.php -http://poezibao.typepad.com/poezibao/2007/03/dossier_antonin. html Sur Claude Régy : -http://www.sprechgesang.net/litterature/regy.htm différentes vidéos de chorégraphies : -http://www.youtube.com/ Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 80 Remerciements Je ne dirai jamais assez merci à Val, Perrine et Elie pour leur aide précieuse. Merci pour leur collaboration à mes interviews à Benoît Blampain, Isabelle Chladek, Dominique Würsten, Jean-Claude Reber, Denis Mattenet, Sébastien Duperret, Caroline Neligan, Sophie Sciboz et Pierre-Henri Ducret, Merci à la ville de Montreux et à son municipal chargé de la culture, M. Laurent Wehrli, Merci au service de l’urbanisme de la ville de Montreux, Merci aux archives de la ville de Montreux et à sa directrice. Mme Evelyne Lüthi. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 81 ANNEXES Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Interview DE Denis Mattenet 82 directeur du centre de danse de Montreux Le centre de danse ne fait pas partie du projet de la commune. Néanmoins, comme le projet développé pour l’EPFL incorpore une école de danse, une rencontre avec tous les acteurs susceptibles d’être intéressés par le projet m’a paru nécessaire. devient un bien marchand, comme une voiture qu’il faut « tuner » pour le rendre meilleur. Un contre-exemple, dans le domaine du marketing par la marque de savons Dove qui « milite » pour un retour au corps naturel. L’entretien a surtout mis l’accent sur : l’utilité de la danse et le rapport au corps du danseur le centre de danse, son fonctionnement. La danse et le danseur M. Mattenet commence à parler du corps du danseur(ses). Pour lui, les danseurs sont également victimes d’une normalisation du corps, la sélection des gabarits se faisant très tôt et poussant le corps des danseurs à ne pas se développer de manière naturelle. Il stigmatise une démarche dominante et anti-naturelle qu’il a pu connaître jeune, dont la danse classique semble être l’incarnation. L’utilité de la danse et le rapport au corps du danseur : L’importance de l’os, comme l’architecture structurelle. Le corps est bien sûr central dans la danse. C’est l’outil avec lequel celle-ci travail. Mais avant d’être un art que l’on pourrait réduire à de l’esthétisme, Denis Mattenet tient avant toute chose à souligner l’importance sociale de la danse, qu’elle soit folklorique ou contemporaine. L’effet de décharge qu’elle permet, le mouvement comme moyen de décharger une tension. Il prend pour exemple le phénomène des TOC, le mouvement compulsif dans ce cas est là pour décharger une tension. La danse est vue ainsi non pas seulement comme un moyen d’expression artistique, mais également comme une valeur de l’équilibre social. Il tient ensuite à parler du lien qui existe entre le corps et l’espace et donne l’exemple d’une banque dans laquelle il avait donné un cours d’entreprise. Les employés ne se sentaient pas à l’aise à l’intérieur. Denis Mattenet ressenti en expérimentant l’espace que le plafond était trop bas. Un effet d’écrasement se faisait sentir. Pour lui, la normalisation des espaces tue le corps. Hors pour lui, le rapport du corps à l’espace est fondamentale. Les efforts pour trouver des standards de dimension dans l’architecture moderne a conduit à un manque de souplesse des espaces proposés actuellement. Et cette normalisation de ces espaces, c’est accompagnée d’une normalisation des corps. La publicité actuelle en est un criant exemple. Le corps se virtualise, ne serait-ce que par des campagnes de pub sur lesquelles les corps sont plus que parfaits. Se rapprochant pour finir d’expérimentation d’artistes sur les limites de leurs corps. Sauf qu’ici, la finalité est de pousser la consommation. Le corps Dans sa pédagogie et sa recherche, il encourage au contraire le respect des formes naturelles de chacun. Sensibilité qui commence à se développer dans la danse contemporaine. Lui-même l’a acquise au contact de Jean-Louis Barrault en tant que chorégraphe. Une des grandes avancée également de la danse contemporaine est de commencer à travailler par thématique, au lieu d’être le support d’une histoire concrète avec une gestuelle classique, celle-ci avec le travail d’abstraction des années 60-70 (Merce Cunningham), celle-ci c’est libérée du classicisme et a atteint un nouveau stade d’expression, réinventant le métier de danseur. Celui-ci devant également s’ouvrir aux autres arts, devant quelques fois utiliser le verbe ou des sons. Le travail du rythme devenant plus complexe également. Bien que la forme de la danse soit un langage abstrait, la gestuelle d’une danse folklorique reste imagée. Historiquement, elles étaient des représentations d’événements de la vie de tous les jours ou de grands récits épiques. L’abstraction est très occidentale. De nouveau, la virtualisation du rapport au corps dans sa représentation, mais également dans l’utilisation de plus en plus rare de celui-ci, nous isole de lui, tient-il à rajouter. Il existe un réel besoin de se le réapproprier. La danse est un de ces moyens. Le centre de danse, son fonctionnement. Le centre propose des cours pour tous les âges. Ceux-ci se déroulent de manière collective. Le Centre propose également un spectacle par année pour que les danseurs s’impliquent dans la création d’un Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 83 spectacle. Il compte actuellement un peu moins de 200 élèves. Lors de la création du centre, l’intérêt du directeur était d’avoir une face de représentation publique et une partie accessible seulement par les élèves. Ceci, afin que les parents ne cherchent pas à s’immiscer dans la pédagogie délivrée par M. Mattenet. Les enfants étant déposés à l’accueil, ceux-ci se dirige le long d’un couloir dans les vestiaires sans leurs parents. Ceci permet de couper le contact entre parents et enfants, sans que le professeur soit présent. Ici, la transparence n’existe pas et le lieux est très fermé au-delà de l’accueil, qui lui est totalement ouvert sur la galerie commerciale qui l’accueil. Le centre propose les locaux suivants pour mener à bien son travail. Celui-ci contient : un accueil une grande armoire à costumes des grands vestiaires fille un petit vestiaire pour garçon un autre petit vestiaire pour le professeur un bureau Un grand studio de danse de 140 m2 Le centre propose également de s’ouvrir à d’autres formes d’art, notamment en cherchant à croiser des expériences avec des spectacles de théâtre ou en menant des ateliers avec des musiciens. Une salle d’exposition permet à des artistes d’exposer leurs œuvres sans débourser de loyers. Ceci afin, de faire pénétrer d’autres formes d’expression dans le lieu. Une anecdote sur le lien entre danse et musique est issue de ces stages musique et danse. Le but de ces stages est de créer une chorégraphie et une musique en même temps. Ainsi, lors d’un de ces stage, une proposition fut faite aux musiciens de participer à des exercices d’improvisation de danse. Ceux-ci se sont trouvés bien entendu incapables de faire quoi que ce soit. Mais cette histoire, a permis à M. Mattenet de se demander si les musiciens ne devaient pas également travailler sur la maîtrise de leurs corps. Pour produire un son de qualité, tout le corps doit travailler avec l’instrument. De la même manière que les peintres travaillent avec le geste pour produire leurs toiles. Jackson Pollock en ayant fait le processus de création de ses toiles. La danse De base, la danse est une recherche formelle. La chorégraphie classique cherche à produire des lignes. Le premier ballet considéré comme se suffisant à lui-même est le ballet GISEL, il y a un peu plus de 100 ans, la danse accède au rang d’œuvre d’art. Avant, la danse était considérée comme un divertissement, la comédie musicale est d’ailleurs un exemple de cette manière de voir. Cette recherche formelle de lignes et une épuration de la réalité. Comme un sculpteur les recherches pour trouver l’expression la plus performante. C’est une manière de voir la danse qui est assez classique. Ce que Denis Mattenet a appris au contact de Jean-Louis Barrault, c’est l’importance du verbe, mais aussi du geste. Et le rapport entre les deux est difficile. La gesticulation tuant le verbe. Pour introduire la notion de la situation de la danse, il introduit la notion « la culture précède la science ». La matière culturelle est centrale dans le tissu social et économique. Où il y a richesse et activité économique, la vie sociale a besoin d’une richesse culturelle. La danse en suisse n’a pratiquement aucun statut. A l’origine il existait une demi-fondation reconnue par la confédération et qui était rattachée à l’association pour les danses folkloriques. Aujourd’hui, il existe trois associations : Danse Suisse Danse contemporaine Fédération de danse suisse Mais malgré une lente reconnaissance, le métier de danseur n’existe pas. Ainsi, le chômage n’entre-t-il pas en matière pour rémunérer les danseurs. De plus, il n’y a pas de diplôme reconnu en suisse pour enseigner la danse. Ainsi, n’importe qui peut ouvrir une école. La reconnaissance par l’une des trois associations précédentes permet toutefois de faire un premier tri. Rien qu’entre Villeneuve et Vevey, il existe environ 15 écoles de danses. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Interview de M. Jean-Claude Reber 84 directeur du conservatoire L’entretien a abordé surtout des questions liées à : situation actuelle des deux conservatoires et fonctionnement actuel besoins pour le jazz Structure de financement - l’école prépare également les concours d’entrée dans les hautes écoles. 1 à 2 ans de formation. Situation et fonctionnement actuels des deux conservatoires A Montreux, les conservatoires de Jazz et de musique classique ne se trouvent pas sur le même site. La musique classique se trouve dans une des ailes de la maison Visinand, le jazz loue des locaux à la rue de l’Eglise Catholique. La structure actuelle est née de la fusion, en 2002, des conservatoires de musique classique de Vevey (fondé en 1915) et de Montreux (fondé en 1964), ainsi que de la section Jazz créée en 1982. Le conservatoire de musique de Vevey-Montreux est le plus grand du canton en terme d’élèves inscrits (hormis Lausanne ??). Sa section classique compte environ 1300 élèves (400 à Montreux et 900 à Vevey) et sa section jazz environ 200. A titre de comparaison l’EJMA de Lausanne compte 700 élèves. Structure d’études et niveau d’étude proposée (issu de brochure de présentation) Les cours sont séparés entre : - cours instrumentaux individuels - cours de théorie - cours de solfège - cours instrumentaux d’ensemble (les plus grands comptent 25 à 30 élèves, les chœurs peuvent monter jusqu’à 60 élèves). Les conservatoires de musique classique délivrent : - Du degré élémentaire au degré secondaire supérieur : 7 à 12 ans d’études. Certificat de fin d’études secondaires. - Classe de certificat : de 1 à 2 ans. Certificat de fin d’études non professionnelles de l’AVCEM - Classe de certificat supérieur : quatre ans (admission sur examen d’entrée). Certificat supérieur. Le conservatoire de Jazz délivre : - un certificat de fin d’étude AVCEM. 8 à 9 ans pour les enfants, quatre à cinq pour les adolescents/adultes. situation actuelle des deux conservatoires et fonctionnement actuel Les critiques principales soulevées par M. Reber sont de plusieurs ordres : Musique classique : la taille actuelle est suffisante pour le fonctionnement du conservatoire. De plus, celui-ci pense être arrivé à sa taille d’équilibre et ne connaîtra pas de nette augmentation ou diminution de ses inscriptions. Néanmoins, un ou deux studios supplémentaires pourraient être envisageables. Les studios actuels ne sont pas performants au niveau de l’isolation acoustique. La rénovation des années 80 n’a pas été assez poussée au niveau du détail. Une autre critique réside dans le manque de locaux communs, par exemple une cafétéria. A l’heure actuelle les élèves peuvent venir au cours sans jamais croiser leurs camarades ou pouvoir échanger. Besoin d’un auditoire plus grand. Actuellement celui-ci a été étudié par un acousticien pour pouvoir y faire de la musique de chambre ou amplifiée. Musique jazz : Les locaux actuels ne sont pas du tout adaptés. Il s’agit d’un étage complet d’un immeuble dans lequel il y a des logements et des bureaux. La nécessité de nouveaux locaux devient pressante. De plus, la taille des locaux est trop faible pour bien accueillir tous les élèves. Apparemment la taille actuelle de la section jazz arrive à son équilibre et le conservatoire ne va pas connaître de changement dans sa taille significatif. But actuel du conservatoire, faire venir le conservatoire de jazz à côté de la maison Visinand. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 85 Besoins pour le jazz Au niveau constructif, les meilleures salles de répétition sont des salles isolées de la structure et autres pièces avoisinantes. Il s’agit en terme de simple de construire une pièce dans la pièce. Le prix bien entendu est bien supérieur à la normale. Une autre contrainte réside dans la construction du studio de batterie. Il faut éviter de le construire à l’étage. Le meilleure et de le construire en pleine terre et pousser le détail pour éviter toute résonance. D’une manière générale la conception des salles de jazz doit être poussée pour éviter les résonances. A la différence de la musique classique qui tolère une petite résonance. On parle de son sec pour le jazz, car celle-ci est amplifiée. En règle général et dans le meilleur des mondes, chaque salle devrait être étudiée et construite en fonction du type d’instrument qui y joue. Au niveau spatial, une attention particulière doit être portée au rapport hauteur sur surface, afin de maîtriser la résonance de celle-ci. L’auditoire actuel, est à se point de vue pas du tout adaptée. Ce n’est qu’avec le travail d’un acousticien que celle-ci a pu être utilisée. Les nouveaux locaux devraient contenir idéalement : 3 grands studios de 40 à 60 m2 4 à 5 salles plus petites de 25 a 30 m2 pour des répétitions individuelles ou des cours théoriques. 1 cafétéria 1 ou 2 bureaux pour l’administration Structure financement Le département de la formation et de la jeunesse soutien les conservatoires, ainsi que les communes. De plus, la structure actuelle du conservatoire Vevey-Montreux peut être considérée comme pérenne, car la commune ne discute plus le budget d’année en année comme cela était le cas jusqu’à récemment. Actuellement, un projet de loi existe pour permettre une égalité de traitement entre tous les conservatoires du canton. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 Interview DE Dominique Würsten 86 directeur du T.M.R. Il en ressort plusieurs thèmes concernant : les problèmes auxquels se confronte le TMR La solution proposée, la construction d’une nouvelle scène Les grandes structures de financement du théâtre Projet de formation en apprentissage pour le théâtre Les problèmes auxquels se confronte le TMR Le principal problème du théâtre sont les finances. Le théâtre ne fait que de la création ce qui implique une perte d’argent. Le but du théâtre est de multiplier les sources d’autofinancement et être moins dépendant des collectivités publiques. Par exemple : La place est vendue 50 francs, mais revient à 150 francs au théâtre. Ainsi, 2/3 du financement doit être trouvé ailleurs que dans la billeterie. Avec une capacité de 110 places et afin d’arriver à rentabiliser au 1/3 le spectacle, la durée moyenne d’un spectacle est de 3 semaines, durant lesquelles et si on remplit, on arrive à faire venir 2000 spectateurs. Dans le meilleur des cas on peut espérer réaliser une recette de billetterie de 100’000 francs. Un spectacle coûtant en général 3 fois plus. Cette prise de position est issue du trend politique actuel, dont le manifeste de la culture de l’UDC est le parfait exemple. La culture est l’affaire de la culture, sous-entendu que la culture doit trouver ellemême son financement sans aide extérieure. Dans ces conditions, il y a la possibilité de revenir au théâtre bourgeois et faire monter les places à 200 francs. Ceci n’étant bien entendu pas la volonté des théâtres. Immobilisation du plateau. Le manque de locaux de répétitions, et pour cause il n’y en a pas, oblige le théâtre a utiliser la scène pour la plupart de ses répétitions, l’immobilisant pour de possibles représentations. Ainsi, le théâtre ne peut proposer que 120 à 150 dates de spectacle par année en création. Ce qui donne que pour 1 semaine de spectacle il en coûte 2 semaines de préparation. Dans cette optique de rentabilisation, l’atelier de décors est certainement sous-utilisé. L’espace à disposition permettrait de proposer la vente de ses services pour d’autres théâtres. De la même manière, comment trouver des surfaces utiles au théâtre et qui soit des rentrées d’argent. Exemple, le café de l’opéra à Lausanne qui appartient à l’Opéra, mais est un restaurant ouvert durant la journée. La solution proposée, la construction d’une nouvelle scène Cette solution permettrait d’avoir deux salles de taille totalement différentes et de pouvoir proposer une programmation autre dans les deux. La plus grande pourrait ainsi faire de l’accueil, c’est-à-dire des spectacles achetés et montés ailleurs. La plus petite pourrait continuer à proposer des créations. Le but étant de permettre de réaliser une marge sur la vente des billets de la grande salle et de soutenir les productions de la plus petite. La capacité pour être bénéficiaire se situe entre 300 et 400 places. Cette taille, avec le bassin de population de la région ne permet pas de faire de la création. Un spectacle que l’on crée a besoin d’au moins 3 semaines pour se mettre en place malgré les répétition et pour que le bouche à oreille fonctionne. Une telle salle serait donc mal dimensionnée pour servir de lieu de création. De plus, il serait difficile de le remplir durant plusieurs semaines. A la longue cela se révélerait être peu profitable pour la diversité des pièces jouables et pour la qualité du spectacle. En effet, il faudrait ne monter que des succès, ce qui scléroserait les choix artistiques du théâtre (situation dans laquelle il se trouve actuellement). Jouer la carte de l’accueil comporte ainsi de nombreux avantages avec une salle de cette capacité et dans la région. Elle pourrait attirer des spectacles qui ont déjà connu un succès, permettant de faire venir dans la région des têtes d’affiches. De telles spectacles coûtent entre 15’000 et 20’000 francs avec des personnalités comme Isabelle Carré ou Michel Galabru. Par exemple : le théâtre des balladins à Savièse. C’est un théâtre de 400 places situé dans les hauts de Sion. Celui-ci est pratiquement indépendant financièrement. Sa politique est de proposer 1 pièce par semaine sur 2 jours. Les spectacles qui viennent sont ceux qui sont montés à Paris et qui connaissent du succès. Jouant la carte de la Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 87 rareté, les prix s’étagent de 50 à 90 francs le billet. Avec le tarif que pratique le théâtre actuellement, une soirée à 50 francs la place pour une salle de 400 places permet de rentabiliser l’achat de la pièce en une soirée. De plus, la seule salle de cette capacité dans la région, se trouve à Vevey. Il s’agit de la salle de l’Oriental. Mais celle-ci est orientée dans une direction de théâtre de recherche et choisi de limiter sa capacité de salle à 100 personnes par représentations. Le théâtre de Vevey et dans la gamme au-dessus avec 800 places et l’auditorium Stravinsky avec 1800 places et dimensionné pour des événements internationaux. Une salle de cette taille permettrait également d’accueillir des manifestations d’associations locales, comme les concerts de fin d’année du conservatoire par exemple, qui ne peuvent louer l’auditorium mais qui auraient besoin de pouvoir accueillir moins de 500 personnes.. Actuellement ce genre d’association est obligé d’aller au théâtre de Vevey dont la capacité de près de 800 places peut faire peur. L’autre solution réside dans la location de salle communale, mais la qualité n’est souvent pas au rendez-vous. Celle-ci serait donc également utile à la communauté à l’échelle de la riviera. Le type de rapport au public pour la grande salle semble être celui du plan incliné. Une salle modulable est une solution artistique intéressante, mais réduit le confort des usagers et occasionne des frais pour chaque changement. De l’ordre de 3’000 francs par démontage remontage. Conserver l’ancienne salle en abaissant le nombre de spectateur à 60, permettrait de retravailler l’espace scénique et offrirait ainsi plus de possibilités de jeux. Si cette salle devait être abandonnée, une salle de répétition de la même taille que la scène s’avérerait par contre indispensable, afin de pouvoir réduire le temps d’utilisation du plateau. La petite salle pourrait tout à fait être contenue dans les dimensions de la salle du 2.21 à lausanne. Permettant de faire à peu près tout. Ici une salle modulable est tout à fait envisageable. Les grandes structures de financement du théâtre La structure classique de financement d’un théâtre public est explicable par la règle des 1/3. 1/3 d’auto-financement. 1/3 de mécénat 1/3 de subventions publiques (commune et canton et Pro Helvetia). La politique du canton de Vaud peut s’expliquer comme suit. C’est le département de la culture et des sports qui en est chargé. Celui-ci favorise 3 axes de financement : Les lieux qui font de la création Maximum 100’000 francs/an (ici 7 à 8 % du budget du TMR, l’Oriental reçoit par exemple 50’000 francs/an) Les compagnies non liées à un lieu Le financement est ici totalement variable (pour exemple, certaines compagnies reçoivent 100’000 francs pour monter 1 spectacle, le TMR en reçoit autant pour monter 5 spectacles) Financement à la formation culturelle Tout lieu qui offre une formation. (Les conservatoires n’entrent pas dans cette catégorie, car ils sont soutenu par le Dpt de la formation et de la jeunesse) Ces financements ne concernent que la création du spectacle. Tous les frais de fonctionnement du théâtre n’entrent pas dans ces prix. Projet de formation en apprentissage pour le théâtre Concernant les aide à la formation, les cantons sont obligés de fournir un cours préparatoire à la manufacture (HETSR). A Genève, c’est l’ESAD qui s’en charge, en Valais, c’est une école de théâtre privé qui s’en charge : l’école de théâtre de Martigny, dans le Jura Bernois, c’est une option théâtre au gymnase qui est censée y préparer… Le canton est plus flou, celui-ci ne veut pas créer de structure de conservatoire mais valide des structures existantes, comme le TJP à Pully. M. Würsten explique cette différence de traitement entre musique et théâtre par les décisions de l’Eglise. Celle-ci considérant la musique comme un art du vrai et le théâtre comme un art du faux. Les structures de financement et de soutient actuels sont en général Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08 88 encore influencé par ces considérations d’un autre âge. A titre d’exemple, dans le canton de Vaud, il n’existait de soutien qu’à la musique, car le conservatoire est censé former les professeurs qui enseignent par la suite à l’école obligatoire. Le théâtre n’étant pas une branche enseignable…la seule manière d’avoir un conservatoire de théâtre a été d’en faire une section… du conservatoire de musique. Actuellement, il faut être détenteur d’un maturité pour pouvoir espérer se présenter au concours d’entrée de la Manufacture. Pour Dominique Würsten, c’est une erreuret il manque selon lui un stade formation intermédiaire. De plus, la formation de maturité n’offre aucune introduction au métier du comédien. La formation de la manufacture est un papier universitaire, mais selon lui, une maturité n’est pas une préparation suffisante pour ce que se propose de faire cette école. Cette formation intermédiaire ressemble à celle d’un CFC de comédien. Pour comprendre ce point de vue, il faut introduire ici la démarche pédagogique que M. Würsten poursuit avec un atelierthéâtre à Vevey. Il s’agit de l’atelier-théâtre des ¾. Cette structure gratuite propose une introduction au théâtre pour les 16-25 ans. Les élèves comédiens sont amenés à se familiariser avec les bases du jeu théâtral par le biais d’exercices et par la participation de 2 à 4 pièces de théâtre par année. L’intérêt est de permettre aux jeunes élèves à se familiariser avec toutes les phases de montage d’une pièce, du jeux à proprement parler, mais aussi par la création d’une affiche, la recherche de sponsor ou la création de décors. Le but étant de pouvoir sortir de là en étant autonome et avoir envie d’apprendre ailleurs. C’est une thèse qui ressemble à celle de François Rochaix, directeur du théâtre de Carouge, qui défend l’idée d’un Conservatoire lié à un lieu de représentation. Par exemple le conservatoire national supérieur de Strasbourg ou de St-Etienne. En somme la formation d’un comédien n’est pas obligatoirement une formation universitaire et les compétences émotionnelles et physiques sont tout autant importante que les facultés intellectuelles. Cette formation professionnelle est là pour faire comprendre au comédien de la personne pour qui il joue. Pour sortir aussi de cet écueil qui menace tout comédien, c’est-à-dire le nombrilisme. « j’aimerais voir de jeunes comédiens qui jouent dans des spectacles pros, qui jouent des scènes d’interprétation qui apprennent et montent des projets et les confrontent au public » Un problème réside dans le fait que le théâtre amateur est mal vu dans le milieu professionnel. Mais si l’on s’inspirait de cette dimension d’approche faite d’amour de la chose et de découverte, hors des contingences de salaire. Le théâtre professionnel pourrait peut-être gagner en humanité. Deux conceptions dominent dans la formation et sont issues de la théologie : Saint Thomas d’Aquin : Je dois comprendre pour aimer Saint Augustin : Parce que j’aime, j’ai envie de comprendre Grâce à la structure du TMR, le directeur aimerait à long terme créer une structure de formation couplée avec le théâtre. Les élèves pourraient ainsi profiter de la structure du théâtre pour être en contact avec des professionnelles de tout les domaines de la création. Rencontrer les comédiens professionnels. Cette formation pourrait ainsi se faire à 100% avec les cours théoriques qui existent en école, mais aussi en pouvant être engagé peu à peu sur des spectacles professionnels et en assumant des rôles de plus en plus conséquents. Des échanges en entreprise sont également possible dans une telle structure, ce qui permet aux élèves de multiplier les expériences. Un Centre des Arts Vivants à Montreux- énoncé théorique - Julien Cochard - Professeur Dieter Dietz - Christian Gilot - Julien Fornet - Benoît Blampain - diplôme EPFL 07-08