Rapport sur la solidarité et protection sociale complémentaire

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Rapport sur la solidarité et protection sociale complémentaire
ÉCLAIRAGE
RAPPORT SUR LA SOLIDARITÉ
ET LA PROTECTION SOCIALE
COMPLÉMENTAIRE COLLECTIVE
La mission confiée en 2015 par Marisol Touraine à Dominique Libault s’inscrit
dans un contexte à la fois de généralisation de la complémentaire santé
et de remise en cause des clauses de désignation. La Ministre souhaite donc
des propositions pour ne pas fragiliser la mutualisation, permettre
une organisation de la protection sociale complémentaire collective qui
préserve un haut degré de solidarité. Elle souhaite également une équité
et une continuité de la protection sociale entre les salariés et anciens salariés,
ainsi que l’équilibre des comptes publics.
Après avoir réalisé 40 auditions des partenaires sociaux, d’organismes
assureurs des 3 familles, de branches professionnelles, d’avocats et d’experts,
il a réalisé un état des lieux de la situation. Nous partageons en partie
le constat et les problématiques.
Il note que si la généralisation de la complémentaire santé est bénéfique
pour les salariés, elle peut avoir des effets négatifs pour les personnes en
dehors de l’emploi, notamment sur le renchérissement de la cotisation.
Il estime qu’il n’y a pas de solution unique pour concilier la liberté
contractuelle de l’entreprise et l’effectivité des droits pour les salariés.
Donc parmi ses onze recommandations, Dominique Libault envisage huit
propositions rapides à mettre en œuvre et les autres à plus longue échéances
après une phase d’observation qui ferait apparaitre ou non la réalisation
d’un risque identifié.
CFDT.FR
1RE RECOMMANDATION
Véhicule : Les partenaires sociaux et la voie réglementaire
METTRE EN PLACE DES OUTILS DE MESURE D’IMPACT
POUR AVOIR DES DONNÉES SUR :
•
•
l’évolution des tarifs des assurances, en isolant systématiquement les frais de gestion ;
l’évolution du niveau des garanties proposé par les contrats, en isolants systématiquement
les contrats garanties minimales ;
• l’évolution du contenu et des montants consacrés aux dispositifs de solidarité ;
• l’évolution de nombres de sur complémentaires et du contenu des garanties proposées
dans les contrats.
Pour chaque item distinction entre les contrats collectifs et individuels, au sein des contrats
collectifs distinction entre contrats de branche et contrats d’entreprise.
Compte tenu de la diversité des organismes ayant des données sur la protection sociale
(DRESS, PSCE, IRDES, APCR, SRCV, DARES) dans une périodicité de diffusion différente,
Dominique Libault propose la désignation d’un chef de file rassemblant les sources statistique
complémentaire santé et prévoyance. Les données doivent aussi être complétées
par les mesures de solidarités notamment pour les publics fragilisés que les acteurs de la prote
ction sociale ont mis en place.
COMMENTAIRES CFDT
Pour satisfaire ce besoin de données, les partenaires sociaux au sein d’un groupe de travail
ont, en septembres 2015, réalisés un cahier des charges avec notamment les item ci-dessus
et à ciblé les organismes susceptibles de pouvoir répondre à ce besoin de données.
Ce travail a été transmis au ministère de la santé en début 2016.
D’autre part, en application du décret 2015-752 du 24 juin 2015, chaque année les assureurs
doivent faire parvenir un rapport au ministère de la santé sur les éléments financiers,
sociologique et de solidarité de chaque branche. À la demande de la CFDT, ce rapport
est remis à la branche sur sa demande.
2E RECOMMANDATION
Véhicule : voie réglementaire
METTRE EN PLACE UNE MÉDIATION RENFORCÉE :
« un médiateur de la protection sociale complémentaire » coordonnerait l’action des
médiateurs présents dans les organismes et veillerait à la bonne mise en œuvre de la
généralisation de la protection sociale complémentaire.
Afin de veiller à la bonne mise en place de la généralisation de la complémentaire santé,
les médiateurs présents dans les trois familles d’assureurs seraient mobilisés. Ils auraient pour
mission la veille, l’alerte des pouvoir publics sur les difficultés rencontrées dans la mise en place
de la complémentaire santé collective. Ils leur seraient demandés un rapport annuel envoyé
à un médiateur national. Ces médiateurs doivent être indépendants.
COMMENTAIRE CFDT
Il faut en effet que les médiateurs des assureurs soient indépendants pour que la collecte
des difficultés soit le plus exhaustive possible afin d’alimenter les éventuelles évolutions
de textes (accord interprofessionnel et/ou texte législatif). Des médiateurs existent dans
les trois familles d’assureurs. Leur statut (indépendant) ne nous est pas connu, il n’y a pas
pour le moment un médiateur national qui aurait pour mission de coordonner
les médiateurs des assureurs. D’autre part, la direction de la sécurité sociale a mis en place
un comité de suivi réunissant les partenaires sociaux, les assureurs et les services
du ministère pour faire le point sur la mise en place de la complémentaire santé, soumettre
les projets de décrets et les productions de la DSS (guide, formulaire..) aux membres
de ce comité.
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3E RECOMMANDATION
Véhicule : Voie réglementaire
COMPLÉTER LE DISPOSITIF DE RECOMMANDATION AFIN D’EN
FAIRE UN OUTIL PERTINENT PERMETTANT DE CONCILIER
CONCURRENCE ET SOLIDARITÉ
Cette recommandation est dans le rapport celle où les arguments sont les plus développés :
LA RECOMMANDATION ET LE HAUT DEGRÉ DE SOLIDARITÉ SONT LIÉS et imposent
un financement d’au moins 2 % du montant de la cotisation sur des actions de solidarité
au regard de salariés fragiles et sur des thèmes comme la prévention professionnelle.
LA RECOMMANDATION DOIT RESPECTER DES PROCÉDURES DE TRANSPARENCES
dans la mise en concurrence des organismes d’assurance faite d’impartialité et d’égalité
de traitement des organismes concourants.
L’ADHÉSION DES ENTREPRISES À L’ORGANISME RECOMMANDÉ EST LIBRE MAIS CELUI-CI
NE PEUT REFUSER L’ADHÉSION D’UNE ENTREPRISE RELEVANT DU CHAMP D’APPLICATION
DE L’ACCORD. si la recommandation confère, selon Dominique Libault, aux partenaires sociaux
de la branche un rôle « d’éclaireur et de facilitateur » pour les entreprises qui n’ont pas
la capacité d’expertise. Il n’en est pas moins sûr que le système actuelle de recommandation
comporte des faiblesses notamment une asymétrie entre les organismes recommandés et ceux
qui ne le sont pas. Les premiers sont obligés d’accepter toutes les entreprises de la branche
quel que soit le degré de charge que cela entraine pour le régime. L’organisme non
recommandé peut, lui, choisir « les bons profit de risque », par exemple des entreprises
composées de jeunes en bonne santé. Ainsi, le régime de branche peut être constitué
d’entreprises qui choisissent l’uns des assureurs recommandés, car ils n’ont pas trouvé
une couverture pour leurs salariés âgés et avec des problèmes de santé, avec le déséquilibre
financier que cela peut causer. Cette situation est encore plus importante en prévoyance.
Dominique Libault pense que l’absence d’adhésion des entreprises à un régime de branche
imposera des frais d’acquisition dans le contrat d’assurance pour recueillir ou maintenir
l’adhésion des entreprises. Cela peut augmenter les frais de gestion.
OFFRIR AUX BRANCHES LA POSSIBILITÉ DE METTRE EN PLACE LE FONDS DE SOLIDARITÉ
PRÉVU PAR LA LOI
Dominique Libault estime que le déploiement de fonds de solidarité de branche doit être
conforté par une base juridique. Il proposait également de définir une fourchette de cotisation.
Les prestations qui émargeraient dans ce fonds sont celles qui entrent dans « le droit non
contributif la prévention, l’action sociale.
Dominique Libault propose également de financer, par l’intermédiaire de ce fonds, la cotisation
du contrat court pour assurer une couverture de salariés relevant d’une pluralité d’employeur
dans les branches et qui n’ont pas un assureur unique. Ce fonds serait soit géré par l’organisme
recommandé, soit par un fonds ad hoc géré directement ou indirectement par les partenaires
sociaux.
Le décret 2015-1883 du 30 décembre 2015 prévoit un chèque santé versé par l’employeur
au salarié dont le contrat de travail est inférieur ou égale à 3 mois ou dont le contrat de travail
prévoit une durée de travail inférieure ou égal à 15 heures par semaines. La contribution
de l’employeur est basée sur le temps de travail ou la rémunération.
REMÉDIER AUX EFFETS D’ANTI SÉLECTION
Afin d’éviter que des entreprises rejoignent tardivement le dispositif de recommandation
de la branche ou soient nomades en fonction de l’évolution de leur profil de risque, Dominique
Libault fait deux propositions :
•
•
les branches seraient autorisées à fixer des pénalités encadrées cela nécessite
une adaptation des différents codes concernés ;
au tarif de cotisation unique serait substituer un tarif maximal permettent au assureur
de fidéliser les bons profils de risques et limiter la démutualisation.
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Le rapporteur donne la priorité à la première proposition car la deuxième instaure une inégalité
tarifaire entre les entreprises. Il préfère envisager la deuxième proposition après une phase
d’observation et dans l’hypothèse où le déploiement de la recommandation ne serait
pas satisfaisant.
COMMENTAIRES CFDT
L’objectif est de rendre effective la solidarité par la mutualisation de moyens financiers dans
un dispositif de recommandation par des actions de prévention, d’actions sociales
et de droit non contributif. Ces actions permettent la mise en œuvre du degré élevé
de solidarité (décret 20141498 du décembre 2014) et d’avoir la possibilité d’aller plus loin
en utilisant les propositions 6, 9, 10 en conformité avec les dispositions de la Cour de justice
de l’union européenne (CJUE). Un autre décret doit paraître dans le courant 2016 pour
préciser les actions de solidarité. Mais de la voix même du directeur de la DSS ce décret
ne sera pas très innovant.
Sur question de la CFDT, la DSS précise que les différents termes utilisés pour le choix
des assureurs (labellisation, référencement….) sont considérés comme
des recommandations. En conséquence, la contribution de 2 % minimum de degré élevé
de solidarité et l’obligation de transparence (appel à concurrence) dans le choix
des organismes d’assurance s’appliquent à ces accords.
4E RECOMMANDATION
Véhicule : Partenaire sociaux et voie règlementaire
RENFORCER LA GOUVERNANCE DE LA PROTECTION SOCIALE
DANS LES BRANCHES
Dominique Libault fait le constat qu’avec la recommandation, les acteurs de branche sont
« en première ligne » pour préparer les appels à concurrence, négocier la couverture, le tarif
et le suivi du régime. Une asymétrie d’information existe entre eux et les organismes assureurs.
Il propose de renforcer considérablement la gouvernance par les éléments suivants :
•
éfinition des missions et des responsabilités des acteurs de branche, en particulier
d
des membres de la commission paritaire ;
• déontologie, transparence ;
• formation des membres de la commission paritaire ;
• diffusion des bonnes pratiques : accompagnement par des experts indépendants, pilotage
effectif de l’organisme assureur retenu (gestions des réserves, sanction en cas de non
atteinte des objectifs) ;
• amélioration des procédures d’appel à la concurrence.
Ces axes seraient abordés dans un groupe de travail initié par les pouvoirs publics. Celui-ci
donnerait lieu à l’élaboration d’une charte et/ou un guide des bonnes pratiques (en cours de
réalisation). Certaines mesures pourraient être reprises dans le corpus réglementaire.
COMMENTAIRE CFDT
Les partenaires sociaux doivent reprendre la main sur les dispositifs de protection santé
des salariés. Donc ces propositions nous conviennent. D’autre part, les réserves financières,
pour nous, appartiennent au moins en partie à la branche et doivent donc pouvoir être
transférées d’un assureur que l’accord ne recommande plus vers un nouveau. Mais le
dispositif légal reste à créer et à prévoir dans le cahier des charges.
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5E RECOMMANDATION
Véhicule : voie législative
RENFORCER LES DISPOSITIFS PROPOSÉS OU MIS EN PLACE
PAR LES ORGANISMES ASSUREURS POUR LIMITER LA SÉLECTION
DES RISQUES EN LEUR DONNANT UNE TRADUCTION LÉGISLATIVE
Afin de garantir l’égalité de traitement des entreprises, quelles que soient leurs caractéristiques
et le profit de leurs salariés, Dominique Libault propose de traduire l’engagement de la FFSA
sur la non sélection des accords de branche en dispositif législatif.
Cependant le rapporteur est conscient que cet objectif n’est pas facile, car les assureurs
pratiquent une sélection pour « assurer leur rentabilité », notamment dans les PME TPE.
Pour les entreprises « non assurables » il faut trouver des solutions de marchés pertinentes
avec l’appui des pouvoirs publics, par exemple, sur le modèle des emprunts immobiliers pour
les emprunteurs à risque.
COMMENTAIRES CFDT
Les assureurs privés ne manquent pas d’audace, il dénonce les clauses désignation au nom
de la libre concurrence et de l’ouverture du marché des entreprises, fragilisant ainsi
les accords de branche. D’un autre coté, ils s’engagent à ne pas pratiquer la sélection sur
l’état de santé des salariés pour les entreprises qui sont soumis à des accords de branche.
La valeur de cet engagement est légère et invérifiable. Il suffit de ne pas répondre
à une demande de couverture, quand l’assurance sait que la branche comporte
de nombreuses entreprises en mauvais risque (puisque si l’assurance porte sa candidature
et est recommandée, elle ne pourra pas légalement procéder à une sélection). Les assureurs
continueront à procéder une sélection d’entreprise, quand cette dernière n’applique pas
un accord de branche.
6E RECOMMANDATION
Véhicule : voie Législative
AUTORISER, PAR DÉROGATION, LA DÉSIGNATION D’UN ASSUREUR
UNIQUE DANS LES SECTEURS MULTI EMPLOYEUR, AFIN D’ÉVITER
LES TROUS DE COUVERTURE QUI RÉSULTERAIENT
D’UNE PLURALITÉ D’ASSUREURS.
Dans des cas jugés très restreints par Dominique Libault, où les salariés ont des relations très
courtes avec plusieurs employeurs, deux scénarios sont constatées qui appellent
des traitements différents :
Pour les salariés titulaires de contrats courts aux seins de branches précisément identifiées (par
exemple, les intermittents) Dominique Ribault propose de recourir à l’assureur unique chargé
de centralisé les contributions des entreprises au prorata des heures effectuées par le salarié.
Pour les titulaires d’un contrat court au sein de branche dans lesquelles la possibilité
d’un assureur unique n’aurait pas été retenue, il est proposé de mobiliser le fonds de solidarité
prévu par l’article L912-1 paragraphe IV.
COMMENTAIRE CFDT
L’objectif de couverture de salariés titulaire de contrat atypique est positif avec des mesures
différentes en fonction de l’organisation de la branche. Le ministère ne s’ est pas encore
prononcé sur le sujet de ce type de désignation. Echaudé qu’il était des différentes
propositions qu’il avait faites sur la désignation en 2013. Il a toutefois prévu un dispositif
de chèque santé (voir proposition 3) pour les salariés précaires.
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7E RECOMMANDATION
Véhicule : Voie législative
CONFIER À UN FONDS UNIQUE LE FINANCEMENT DE LA PART
EMPLOYEUR DES SALARIÉS RELEVANT DE PLUSIEURS
BRANCHES OU SECTEURS PROFESSIONNELS
Pour les salariés titulaires de contrat multi branches ou appartenant à des branches qui n’ont
pas choisies la mise en place de fonds de solidarité, Dominique Libault propose en priorité
une solution transversale reposant sur un fonds unique qui pourrait être le fonds CMU.
Il permettrait de financer à hauteur de 50 %, soit par appel d’offre dans le cadre d’une solution
mutualisé type ACS, soit en dernier recours par chèque santé.
COMMENTAIRE CFDT
Il semblerait que le gouvernement souhaite évaluer, dans un premier temps les dispositifs
d’exonération de charges sociales et fiscales de complémentaire santé et, pour cela,
il missionnerait M. Boissier, chef de l’IGAS. Dans un deuxième temps l’évaluation serait
effectuée sur les évolutions « récentes ou à venir » des dispositions CMU, ACS.
À cette heure, nous n’avons pas d’information sur l’avancée de cette mission.
8E RECOMMANDATION
Véhicule : Voie législative
ENCOURAGER LES COTISATIONS PRENANT EN COMPTE
LE REVENU ET LES MESURES FAVORABLES AUX RETRAITÉS
GRÂCE À DES MÉCANISMES D’INCITATION FISCALES
Dominique Libault fait le parallèle avec les régimes de prévoyance qui sont le plus souvent
financés par une cotisation proportionnelle au salaire pour proposer le même dispositif pour
la complémentaire santé. Cela permet de couvrir le salarié à temps partiel, car si la cotisation
est forfaitaire et représente 10 % du salaire mensuel, elle dispense le salarié d’adhérer
au régime. Le rapporteur propose une exonération en tout ou partie de la cotisation patronale
pour le contrat prévoyant la proportionnalité. Le rapporteur ajoute une condition
supplémentaire qui serait de prévoir des conditions favorables aux retraités par une forte
obligation de mutualisation envers les seniors.
COMMENTAIRE CFDT
Une cotisation en fonction des revenus est un objectif de la CFDT. Cela permet notamment
d’intégrer dans un régime de branche et d’entreprise des salariés à faible revenu. Par contre,
limiter les mesures favorables aux seuls retraités va à l’encontre de l’objectif CFDT qui est
de couvrir tous les personnes en dehors de l’emploi par des mesures égalitaires.
9E RECOMMANDATION
Véhicule : à déterminer loi/règlement
ENCADRER LE RECOURS À LA CO-DÉSIGNATION, AFIN D’EN
FAIRE UN LEVIER DE SOLIDARITÉ RESPECTUEUX DES EXIGENCES
POSÉES PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET L’AUTORITÉ
DE LA CONCURRENCE
Selon Dominique Libault la Co-désignation peut se justifier pour des branches qui démontrent
qu’un trop grand nombre d’organismes assureurs est susceptible de porter atteinte à l’objectif
de solidarité. Si la co-désignation ne devient pas la norme, Dominique Libault pense qu’elle est
envisageable par l’autorité de la concurrence, « sans obérer la liberté de l’employeur ». Ainsi si
un socle de garantie (dit contrat de référence) peut être défini, il doit permettre aux assureurs
de proposer d’autres garanties et services et laisser ainsi une liberté de choix aux entreprises.
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Afin de remplir l’objectif de degré élevé de solidarité, la co-désignation doit se traduire par
une gestion commune du risque. Cette dernière est possible par un « traité de coassurance »
(prévu dans la loi du 13 juillet 2014 sur l’économie sociale et solidaire) avec la répartition
de la charge en fonction d’une quote-part.
COMMENTAIRE CFDT
Afin de mettre en œuvre la solidarité, la désignation est le moyen le plus efficace.
La décision du Conseil constitutionnel laisse entendre que la close de désignation,
additionnée d’une clause de migration, d’une couverture définie avec une cotisation elle
aussi définie est contraire à la liberté contractuelle et de négociation des entreprises.
Le Conseil constitutionnel laisser une liberté de choix de l’entreprise tout en reconnaissant
que la désignation agit pour la mutualisation et la solidarité. Là aussi, Dominique Libault
estime que la désignation est possible si l’entreprise a un espace de liberté de négociation,
de service annexe, de garanties optionnelles.
10E RECOMMANDATION
Véhicule : voie réglementaire
PRENDRE EN COMPTE LA DIFFÉRENCE DE NATURE QUI
CARACTÉRISE LE COUVERTURE PRÉVOYANCE EN METTANT
EN PLACE UNE GESTION MUTUALISÉE DU RISQUE AU NIVEAU
DE LA BRANCHE
Cette recommandation ne s’applique qu’au régime de prévoyance lourde. Les décisions
du Conseil constitutionnel sur les close de désignation ont impactées la prévoyance
(incapacité, invalidité, décès). Mais Dominique Libault discerne des différences dans
l’argumentation que développe le conseil constitutionnel entre la complémentaire santé
et la prévoyance. En effet, le conseil juge disproportionné et menaçant la liberté contractuelle
et de négociation le cumul des mesures prises dans certaines branches en complémentaire
santé avec la désignation d’un assureur (voir commentaire CFDT de la proposition 9),
l’obligation d’appliquer une couverture totalement définie, et la fixation d’un montant
de cotisation. Par contre, le risque élevé en coût de la couverture prévoyance autorise, selon
Dominique Libault, la désignation d’un assureur sous peine de voir dans un même secteur
d’activité une inégalité dans les cotisations et plus grave, l’impossibilité d’avoir un contrat
de prévoyance pour les entreprises dont la sinistralité est élevée. Ce dernier constat est
partagé par les assureurs. C’est pourquoi Dominique Libault propose un assureur unique pour
préserver un tarif unique. Ceci dit, il suggère d’observer l’état du marché de la prévoyance
au cours de l’année 2016 afin d’agir ensuite en conséquence.
COMMENTAIRE CFDT
La priorité est de préserver les accords sur la prévoyance lourde, et de construire pour ceux
qui n’ont pas des accords solides pour une protection optimum des salariés.
Une désignation d’un seul assureur est positive si elle s’accompagne d’un appel
à concurrence transparent.
11E RECOMMANDATION
Véhicule : négociation des partenaires sociaux, voie législative
DANS LA PERSPECTIVE D’UN RENFORCEMENT SUBSTANTIEL
DES ÉLÉMENTS DE SOLIDARITÉ, PRÉVOIR LA POSSIBILITÉ
DE CONVENTIONS COLLECTIVES DE SÉCURITÉ SOCIALE
Dominique Libault fait le constat qu’un certain nombre de branches n’ont pas mis en place
des mesures de solidarité dans leur accord, qui justifieraient une atteinte à la liberté
de la concurrence.
Dominique Libault propose de constituer un « régime additionnel de sécurité sociale »
qui répondrait à un cahier des charges strict, allant au-delà d’une simple mutualisation,
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pour se conformer aux critères de la CJUE de degré élevé de solidarité. Cela se traduirait
par une dépense du régime d’au moins 10 % sur la prévention, l’action sociale et le droit non
contributif (ex : prise en charge de la cotisation de personne en situation de fragilité).
L’extension de ces conventions collectives de sécurité sociale devrait correspondre au cahier
des charges élaboré par une commission ad hoc dépendant du ministère des Affaires sociales
et de la santé.
Ce qui permettrait une minoration du forfait social ou conditionnerait les exonérations
patronales actuelles aux complémentaires santé.
La gestion des garanties serait confiée à un ou plusieurs assureurs sélectionnés de façon
transparente. Dominique Libault fait le lien avec le rapport Combrexelle sur l’objectif
de redonner de la vitalité au dialogue social.
COMMENTAIRE CFDT
Nous faisons le constat que les accords de branche n’ont pas ou peu développé le degré
élevé de solidarité. Cela influe négativement sur la possibilité de désigner
ou de co-désigner comme le permet la Cour de justice de l’Union de européenne, possibilité
reprise et développée dans les propositions 3, 6, 9, 10 du rapport. Cela risque aussi d’influer
à l’avenir sur les exonérations fiscales et sociales.
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