Définitions et déterminations de « l`axe lent » d`une lame quart d`onde
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Définitions et déterminations de « l`axe lent » d`une lame quart d`onde
BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 985 Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde par Luc DETTWILLER Lycée Blaise Pascal - 63037 Clermont-Ferrand Cedex [email protected] RÉSUMÉ Après avoir passé en revue les différents types de lames quart d’onde et le vocabulaire servant à les caractériser, on recense différentes techniques permettant de repérer leur axe lent en l’absence de lame étalon. La méthode la plus générale et la plus sûre, que nous proposons, utilise un interféromètre de MACH-ZEHNDER à lames séparatrices réversibles, ce qui n’est malheureusement pas courant. Une méthode voisine a été proposée par WOOD avec un interféromètre de MICHELSON, mais elle est rendue très incertaine par la dispersion des milieux pouvant constituer la lame. En conclusion, nous donnons un protocole visant à caractériser, le plus complètement possible, les lames non composites formées d’un milieu biréfringent de dispersion négligeable. INTRODUCTION Quand on veut déterminer les caractéristiques d’une lame retardatrice (de déphasage quelconque {), il est très facile de trouver les directions de ses axes : il suffit de la placer entre polariseur et analyseur croisés, et de lui faire décrire un tour complet autour de la direction de propagation du faisceau quasimonochromatique incident normalement ; on constate alors qu’il se produit quatre extinctions successives de la lumière émergente, et qu’on passe de l’une à la suivante en tournant la lame de 90° ; lors de ces extinctions, les axes de la lame retardatrice sont parallèles à ceux du polariseur et de l’analyseur, qui sont orthogonaux entre eux puisqu’ils sont croisés. Dans le cas où la lame est « demi-onde » pour le faisceau considéré, la connaissance de ses axes suffit à décrire son action sur la polarisation du faisceau, sans qu’il soit nécessaire de les distinguer car ces axes sont équivalents. Il n’en est pas de même pour les autres lames, en particulier les « quart d’onde » pour lesquelles on distingue un axe rapide et un axe lent. Il est facile de reconnaître ces différents axes, si on dispose (pour la même longueur d’onde m0) d’une lame quart d’onde dont les axes rapide et lent sont déjà connus, et qui sert de lame étalon… La réalisation d’une telle lame étalon est plus compliquée. On peut bien sûr partir d’un matériau biréfringent, de dimensions suffisantes pour qu’on puisse déterminer ses Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 986 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS axes électriques et mesurer leurs indices par une méthode géométrique : celle utilisant un réfractomètre ([1] p. 551-553) ou un prisme ([1] p. 522-524), celle du Duc DE CHAULNES [2], ou celle utilisant les liqueurs d’indice bien connues des minéralogistes ; il faut ensuite calculer l’épaisseur et l’orientation d’une lame à tailler dans ce matériau pour qu’elle soit quart d’onde avec un axe lent d’orientation déduite de ces calculs… On peut aussi utiliser comme étalon un parallélépipède de FRESNEL ([1] p. 399, [3]) – son axe lent (au sens retenu à la fin du paragraphe 1.2) est perpendiculaire au plan de section principale (voir [1], l’indication de [3] à ce sujet étant erronée) ; mais ce dispositif comporte quelques inconvénients techniques, et, surtout, il est peu répandu… Dans la pratique, on rencontre souvent le problème suivant : on veut distinguer les axes rapide et lent d’une lame quart d’onde, sans fabriquer ni utiliser de lame étalon (et donc sans parallélépipède de FRESNEL) – soit parce qu’on n’en dispose pas, soit parce qu’on doute de sa technique de fabrication ou de son étalonnage. Le but principal de cet article est d’étudier quelques-unes des rares réponses à cette délicate question (on discutera aussi de la réponse supplémentaire donnée au § 2 de la référence [4]). Sa difficulté se trouve aggravée par le fait que des termes du vocabulaire classique en ce domaine, comme « biréfringence », « lame quart d’onde » ou « axe lent », prennent des significations différentes selon les auteurs ; aussi commencerons nous par discuter les différentes définitions possibles, et préciser celles que nous retiendrons ici. Au passage, les méthodes proposées donneront l’occasion de montrer des études d’interférences en lumière polarisée beaucoup plus générales que celles considérées usuellement – qui sont restrictives car elles se ramènent seulement à celles de FRESNEL et ARAGO. Au terme de cette étude, nous verrons se dégager un protocole expérimental permettant de caractériser, le plus complètement possible, les lames usuelles formées d’un milieu biréfringent de dispersion négligeable. 1. POSITION DU PROBLÈME, DÉFINITIONS ET RAPPELS Les méthodes permettant de résoudre le problème posé dépendent de la structure de la lame retardatrice considérée. C’est pourquoi nous commencerons par indiquer les différents types possibles de ces lames. Notons que toutes les lames que nous considérerons ici sont prévues pour être utilisées avec un faisceau collimaté, d’incidence normale ; sinon, les directions des vibrations propres du champ électrique E (i.e. des axes de la lame) ne sont plus forcément orthogonales entre elles ([1] p. 519-520, [5]) ! Distinction entre les axes et les lignes neutres L’explication de ce comportement méconnu tient en deux définitions et deux propriétés. Pour des ondes incidentes ayant un vecteur d’onde fixé, on appelle « directions des axes de la lame (ou des vibrations propres de E) » celles du champ électrique de l’onde incidente telles que les polarisations des ondes incidente et émergente soient identiques. Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 987 En incidence oblique sur un milieu biréfringent, les deux directions des normales aux ondes (i.e. des vecteurs d’onde) réfractées sont a priori différentes. Pour une normale aux ondes donnée dans un milieu biréfringent, seules deux polarisations sont invariantes sur l’espace : elles sont rectilignes, et les deux déplacements électriques correspondants Dl et D m, appelés « lignes neutres », forment avec la normale aux ondes une base orthogonale. Pour une onde de polarisation quelconque incidente sur la lame, on trouve ainsi quatre lignes neutres qui lui sont associées dans la lame, mais pour chaque normale aux ondes réfractée une des lignes neutres trouvée doit être éliminée car son indice ne correspond pas à celui de la normale ; donc il ne reste effectivement dans la lame qu’une ligne neutre par normale. En général, ces deux lignes neutres restantes ne sont pas orthogonales (car elles correspondent à des normales différentes) ; aussi, les champs électriques des ondes incidentes correspondantes ne sont pas perpendiculaires. 1.1. Différents types de lames retardatrices Dans le cas d’une couche unique d’un matériau biréfringent à faces parallèles (cas i-iii ci-dessous), si on l’utilise en incidence normale comme prévu, les axes de la lame sont confondus avec les lignes neutres associées à une normale aux ondes perpendiculaire aux faces (car les normales aux ondes réfractées sont, comme la normale aux ondes incidente, orthogonales aux faces). i) La lame la plus simple est celle constituée d’un matériau biréfringent uniaxe formant une couche unique, à faces parallèles, d’épaisseur a, taillée parallèlement à son axe optique. Alors l’une des lignes neutres est tangente à la lame et orthogonale à l’axe optique, et l’indice pour l’onde correspondante est l’indice ordinaire no du matériau ; l’autre ligne neutre est parallèle à l’axe optique, et l’indice correspondant est l’indice extraordinaire ne du matériau. Le déphasage retard de la deuxième onde par rapport à la première, dû à la traversée de la lame, est { = 2r (ne - no) a ; m désigne la longueur m d’onde dans l’air, et tous les indices considérés ici seront définis par rapport à l’air. ii) Si l’axe optique du matériau n’est plus parallèle aux faces de la couche, mais fait avec elles un angle a ≠ r / 2, seul change l’indice de la deuxième ligne neutre : 1 J 2 N- 2 2 n m= KK cos2 a + sin 2 a OO ; n no L e P celle-ci est tangente à la lame et parallèle à son plan de section principale – i.e. un plan parallèle à l’axe optique et à une normale aux deux faces de la couche. Quant à la première ligne neutre, sa direction peut encore se déterminer comme dans le cas i ; elle est normale au plan de section principale, et son indice est toujours nl= no. L’expression de { est modifiée : { = 2r (n m- nl) a ; il est non nul si a est différent de 90°. Dans le cas m Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 988 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS d’un matériau uniaxe, ne et no dépendent forcément de m (donc nl et n m aussi), mais pas la direction de l’axe optique (voir [1] p. 467-468, [6] p. 678-679), donc a est constant et les directions des deux lignes neutres aussi. iii) Si on prend maintenant une couche d’un matériau biaxe, celui-ci est décrit par ses trois axes électriques (orthogonaux entre eux) et leurs trois indices (principaux) n1, n2 et n3 (classés par ordre décroissant) : un exemple est le mica. Les directions des deux lignes neutres restent tangentes à la lame, mais dépendent de façon compliquée de n1, n2, n3 et des orientations des axes électriques – idem pour { = 2r (n m- nl) a . De plus, les m trois indices n1, n2 et n3, et dans certains cas même un ou plusieurs axes électriques, varient avec m [ibidem]. Le mica cristallisant dans le système monoclinique, il a un axe électrique non dispersif (l’axe de symétrie d’ordre 2), qui est ici l’axe Oy d’indice principal intermédiaire n2 ; comme les axes optiques sont perpendiculaires à Oy, ils restent dans un plan indépendant de m mais leur angle varie avec m. De toutes façons les deux axes optiques et les lignes neutres de la lame dépendent a priori de m. ATTENTION : certains auteurs anglo-saxons appellent no et ne ce que nous appelons ici nl et n m… iv) Lames composites En superposant judicieusement au moins trois lames du type de celles décrites précédemment, il est possible de réaliser un système qui a, pour un faisceau en incidence normale et de longueur d’onde appropriée, la même action sur la polarisation qu’une lame unique donnant un déphasage {. L’intérêt éventuel de ce système composite est que la dépendance de ces propriétés par rapport à la longueur d’onde peut être moins forte que pour la lame unique ; cela donne un moyen de fabriquer des lames quart d’onde relativement achromatiques ([7] p. 10-116 et p. 10-129). Les fabricants FICHOU et MELLESGRIOT, par exemple, font des lames quart d’onde en « croisant » une lame demi-onde avec une « trois quart d’onde » (voir § 1.2.). v) Le parallélépipède de FRESNEL, utilisant les différences de déphasage à la réflexion totale à 54,7° pour les composantes S et P de E respectivement perpendiculaire et parallèle au plan d’incidence, peut aussi être considéré comme une lame quart d’onde car les deux réflexions produisent ensemble un déphasage retard { = 3r / 2 modulo 2r de P par rapport à S ; un avantage est son faible chromatisme, dû à la dispersion modérée du verre ordinaire (faisant que { varie de 1 % de 0,4 à 0,8 µm – [7] p. 10-121), un inconvénient est le décalage transversal qu’il provoque pour le faisceau émergent. Le parallélépipède d’OXLEY, formé de deux parallélépipèdes du type de FRESNEL collés tête-bêche et utilisant quatre réflexions totales à 74,3°, est relativement moins chromatique, et en plus le faisceau émergent n’est pas décalé par rapport au faisceau incident ([7] p. 10-124). Les problèmes d’utilisation de ces parallélépipèdes viennent de leur encombrement, de leur faible acceptance angulaire, et de l’importante aberration sphérique affectant les images que l’on voudrait observer à travers eux. Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 989 1.2. Définitions d’une lame quart d’onde et de son axe lent Nous appellerons « biréfringence » d’un milieu uniaxe la valeur de ne - no ; le matériau est dit « positif » si ne - no > 0 (ex. : le quartz, ne - no , 0, 01), « négatif » dans le cas contraire (ex. : le spath, ne - no , - 0,17). ATTENTION : certains auteurs anglo-saxons appellent « biréfringence d’une lame » n m- nl, même lorsque celle-ci est taillée dans un matériau biaxe… Historiquement, une lame quart d’onde est une lame des types i à iii, telle que { = r / 2. Même pour le mica qui se clive facilement et donne des feuilles très fines, malgré la très faible valeur de n m- nl en incidence normale (de l’ordre de 5.10- 3), l’épaisseur que devraient prendre ces lames reste très petite. On sait cependant obtenir de telles lames de mica, d’épaisseur finement ajustable (avec une précision de l’ordre de m) valant typiquement 36 µm, et on les colle sur du verre pour les protéger ; cela donne { = r / 2 (avec une précision relative voisine de 1 %) pour la longueur d’onde m0 , 0, 69 µm typiquement ; ces valeurs peuvent être différentes d’un échantillon à l’autre, notamment à cause du très grand nombre de variétés de mica. Mais pour les lames de quartz taillées parallèles à l’axe optique, n m – nl est deux fois plus grand car il vaut ne - n0 , 0, 01, et il faudrait des lames deux fois plus fines… La fabrication de telles lames, quoique très difficile et onéreuse, est néanmoins possible ; même collées sur du verre, elles restent très fragiles. Pour toutes ces raisons, elles ne sont normalement pas commercialisées. Pour les séries courantes, on fabrique donc des lames plus épaisses, telles que { = (4m + s) r / 2 avec m ! N et s = ! 1. Les lames comme celles-ci mais avec s = - 1 sont appelées « lames trois quart d’onde » par certains auteurs (car { = 3r / 2 si m = 1 et s = - 1) ; ils appellent « lames quart d’onde » celles telles que s = 1, et nomment dans tous les cas « axe lent » (resp. « axe rapide ») celui parallèle à D correspondant à l’indice le plus élevé (resp. le plus faible) parmi nl et n m. D’autres appellent indistinctement « lames quart d’onde » toutes celles telles que s = ! 1, et nomment « axe lent » celui tel que la traversée de la lame provoque un déphasage retard de r / 2 modulo 2r pour la composante du champ électrique sur cet axe lent par rapport à la composante sur l’axe qui lui est perpendiculaire (appelé alors « axe rapide ») ; notons qu’avec cette définition l’axe lent d’une lame de type i ou ii dépend du signe de la biréfringence. Dans le cadre du premier jeu de définitions mentionnées à l’instant, la connaissance de l’axe lent ne suffit pas à caractériser l’action de ces lames sur la polarisation de la lumière : il faut aussi savoir si la lame est quart d’onde ou trois quart d’onde (ce qui complique la caractérisation des lames étalons, et la discussion de la plupart des expériences – en particulier celles que nous envisagerons) ; de plus, ces définitions ne peuvent s’appliquer telles quelles aux lames composites ou aux parallélépipèdes. Aussi adopterons nous Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 990 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS systématiquement le second jeu de définitions, qui est utilisable dans tous les cas i-v, et avec lequel la connaissance de l’axe lent suffit à caractériser l’action des lames quart d’onde sur la polarisation ; par exemple, une polarisation incidente rectiligne orientée à 45° des axes de la lame donne une polarisation émergente circulaire, de sens conforme à la règle de FRESNEL dans tous les cas : elle tourne dans le sens dans lequel il faut tourner de moins de 90° la direction de la polarisation incidente pour la confondre avec la direction de l’axe lent. Cependant, les caractéristiques thermodynamiques de ces lames, comme leur sensibilité à la température et la pression, augmentent d’habitude avec m… 1.3. Quelques tests expérimentaux mentionnés dans la littérature 1.3.1. Pour les lames de mica clivé On sait que le mica, biaxe, se clive perpendiculairement à l’axe électrique d’indice n3 , 1, 5601 pour m , 0, 5893 µm – donc perpendiculairement à la bissectrice intérieure de ses axes optiques car les deux autres indices principaux sont n1 , 1, 5977 et n2 , 1, 5936 . Pour les lames de mica clivé, la ligne neutre d’indice le plus grand est donc celle qui est coplanaire avec les axes optiques, donc elle ne varie pas avec m et se détermine facilement par l’observation de la figure d’interférences en lumière polarisée convergente (voir [1] p. 532-535). Le même principe est utilisé par le test de TUTTON [8], qui consiste à observer l’effet d’une variation d’incidence d’un faisceau parallèle de lumière blanche sur une lame de mica entre polariseur et analyseur croisés – l’incidence étant initialement normale, et les lignes neutres correspondantes à 45° des axes du polariseur et de l’analyseur, la couleur de la lumière émergente est grise pour une lame de 36 µm d’épaisseur. Si on fait pivoter la lame autour de sa ligne neutre d’indice le plus grand (n1), la couleur de la lumière émergente vire au blanc puis au jaune et aux teintes de NEWTON d’ordre supérieur ; si on fait pivoter la lame autour de sa ligne neutre d’indice le plus petit (n2), cette couleur vire au gris-bleu puis au gris de fer et au noir (lorsque la normale aux ondes qui se propagent dans la lame est parallèle à l’un des axes optiques du mica, ce qui se produit au bout d’un pivotement d’une trentaine de degrés). Si en plus on connaît l’épaisseur de la lame (d’après la couleur initiale dans l’échelle des teintes de NEWTON à centre noir), on peut en déduire quelle ligne neutre est l’axe lent – au deuxième sens du terme. Avec m0 , 0, 69 µm, pour une lame de mica de 36 µm d’épaisseur, on a m = 0 et s = 1, donc la ligne neutre d’indice le plus grand est l’axe lent ; mais avec une épaisseur ou une longueur d’onde différente, si on avait s = - 1 (et alors m ≥ 1) ce serait le contraire ! La couleur initiale peut donc être une indication intéressante : elle est jaune orangé si pour m0 = 0, 69 µm on a m = 1 et s = - 1, bleu-vert si m = 1 et s = 1, etc. 1.3.2. Pour les lames quart d’onde de type quelconque Une autre manipulation, récemment décrite [4], permet de déterminer l’axe lent Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 991 d’une lame quart d’onde, quel que soit son type. Elle utilise le principe de l’expérience de FRESNEL et ARAGO, mais dans une version plus simple à réaliser, grâce à une lentille et un prisme de WOLLASTON (au lieu des fentes d’YOUNG) éclairés directement par un faisceau laser – pour lequel la lame est quart d’onde. Observant les franges d’interférences (d’interfrange i) obtenues, on place celle-ci juste avant le prisme, de façon qu’elle soit éclairée en incidence normale et que ses axes soient quasiment parallèles aux deux directions de polarisation des faisceaux peu divergents qui sortent du prisme ; cela déplace les franges d’interférences de ! i / 4 modulo i, et le signe devant i / 4 permet de déterminer l’axe lent de la lame. Il existe des variantes [9] de cette expérience, où le prisme de WOLLASTON est remplacé par un autre composant : par exemple, une lame de spath de quelques millimètres d’épaisseur, obtenue par clivage, ou bien un polariscope de SAVART (pour une description de ce composant, voir [6] p. 700-701). Ces expériences ont plusieurs points communs : la lumière quasimonochromatique est polarisée rectilignement, puis séparée en deux faisceaux polarisés orthogonalement, qui traversent alors tous les deux la lame quart d’onde – dont les axes sont parallèles aux directions de polarisation des deux faisceaux ; après recombinaison ceux-ci traversent un analyseur, et on observe l’effet de la lame sur les franges d’interférences. Sachant que l’interfrange est typiquement de l’ordre du millimètre, il faudra agrandir fortement les franges en les projetant à l’aide d’un objectif de microscope par exemple, ou bien effectuer un pointé précis à l’aide d’un oculaire micrométrique éventuellement… Pour remédier à cela, nous allons maintenant examiner deux autres propositions de détermination de l’axe lent, utilisant des franges d’interférences qui peuvent être tout de suite nettement plus grandes. La première est proposée par nous ; la deuxième est tirée des écrits de WOOD [10]. 2. UTILISATION D’UN INTERFÉROMÈTRE DE MACH-ZEHNDER A cause de la grande souplesse de l’interféromètre de MACH-ZEHNDER, qui présente deux voies (1) et (2) spatialement séparées sur lesquelles la lumière ne fait pas d’allerretour (comme dans l’expérience de FRESNEL et ARAGO), cette méthode semble être a priori l’une des réponses les plus simples au problème posé. 2.1. Principe de la méthode en lumière monochromatique On règle l’interféromètre en coin d’air de petit angle a, et on l’éclaire par un faisceau collimaté de largeur spectrale négligeable ([6] p. 313), de longueur d’onde moyenne m0 dans l’air : on obtient des franges équidistantes planes non localisées. Puis on place sur la voie (1) la lame (L) étudiée, quart d’onde pour m0, de façon qu’elle reçoive sous incidence normale le faisceau collimaté qui se propage sur cette voie. Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 992 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS Une différence importante avec les expériences décrites au paragraphe 1.3.2. est la suivante : dans notre expérience la lame toute entière se trouve maintenant sur l’une des voies ; dans celles du paragraphe 1.3.2. chaque voie transporte un faisceau polarisé rectilignement parallèlement à l’un des axes propres de la lame. Dans le faisceau éclairant l’interféromètre de MACH-ZEHNDER (cf. figure 1), on met un polariseur rectiligne (P), d’axe P orientable dans le plan Oxy, initialement parallèle à l’axe rapide Ox de la lame. Pour éviter de faire apparaître d’autres modifications de la polarisation – par réflexion ou transmission par les lames séparatrices – on veille à tourner la lame de façon que ses axes Ox et Oy soient respectivement parallèle et perpendiculaire aux plans d’incidence des rayons sur les lames séparatrices. Figure 1 : Schéma du montage utilisant un interféromètre de MACH-ZEHNDER (l’angle a est très grossi) ; les faces qui portent un traitement semi-réfléchissant sur les lames séparatrices ont été hachurées ; la double flèche indique le sens de translation de M1 qui augmente le chemin optique sur la voie (1) Désignons par XX l un axe parallèle à la bissectrice extérieure des directions de propagation des deux faisceaux émergents d’un coin d’air équivalent à l’interféromètre. Si la direction de propagation du faisceau incident est normale à l’arête du coin d’air, en l’absence de lame la différence de marche d (de la voie (2) par rapport à la voie (1)) en un point M du champ d’interférences, de coordonnée X l sur XX l, s’écrit : d = 2 ( sin a) X l, 2a X l ; donc l’interfrange est i (m0) , m0 / 2a (mais sur M1, X l ≠ X : cf. figure 1). Si les déphasages à la transmission et à la réflexion du faisceau par les lames sépaDéfinitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 993 ratrices ne se compensent pas entre les deux voies de l’interféromètre, l’origine X n’est pas en général sur la frange contenant l’arête du coin d’air considéré [11-13]. Dans le cas de l’interféromètre de MACH-ZEHNDER, il y a deux entrées et deux sorties possibles pour la lumière, les directions des faisceaux y étant presque orthogonales entre elles (cf. figure 1). Considérons ici que les lames séparatrices de l’interféromètre sont rigoureusement identiques, quasiment parallèles entre elles et aux miroirs. Quelle que soit la sortie de l’interféromètre utilisée, les épaisseurs de verre des lames séparatrices traversées par la lumière sont identiques sur chacune des voies. Pour la sortie où le faisceau est quasiment parallèle au faisceau incident (cf. figure 1), les déphasages dus à la réflexion par les lames séparatrices sont identiques sur chaque voie ; afin que les déphasages dus à la transmission par les lames séparatrices soient identiques aussi, on prendra des séparatrices réversibles pour les déphasages ([11] p. 2504-2505) ; alors la frange contenant l’arête du coin d’air sera claire – quelle que soit la polarisation du faisceau incident sur l’interféromètre. On pose z0 = 2rd / m0. L’« intensité » lumineuse dans le faisceau global considéré sur une sortie de l’interféromètre sans la lame (L) s’écrit : I = 2 I 0 (1 + cos z0) 2 en supposant que les intensités sont égales (à I 0 = K E0 ) sur les deux faisceaux qui interfèrent ; dans ce cas, la visibilité (ou le contraste) des franges d’interférences est V0 = 1, quelle que soit la polarisation du faisceau incident sur l’interféromètre. En présence de (L), avec l’axe P du polariseur initialement parallèle à l’axe rapide Ox de (L), on observe des franges similaires à celles vues sans (L), à un décalage près. Si on place maintenant P parallèle à l’axe lent Oy de (L), les franges sont décalées en plus de i/4 modulo i dans le sens qui correspond à une augmentation du chemin optique sur la voie comportant (L). Le sens de ce décalage supplémentaire permet de distinguer l’axe lent de l’axe rapide. 2.2. Calcul de l’intensité en présence de la lame et pour une orientation quelconque du polariseur On considère le cas où P appartient au plan Oxy, et fait un angle i avec Ox. En utilisant la représentation complexe du champ électrique dans le champ d’interférences, exprimée dans la base orthonormée (ux, uy) associée au repère Oxy, l’intensité en M s’écrit : I = K E0 = K E0 2 cos i a e 2 cos i a1 + e k ux + sin i a e + e k uy jz x +e jz jz0 k ux + sin i a e j{ jz y +e jz jz0 k uy 2 2 (1) où z = z0 - zx désigne le déphasage retard en M de l’onde E x provenant de la voie (2) par rapport à celle provenant de la voie (1) où se trouve (L), zx et zy les déphasages uniVol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 994 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS formes dus à la traversée de (L) pour les composantes du champ électrique sur ux et uy respectivement, et { = zy - zx = r / 2 modulo 2r car (L) est quart d’onde d’axe lent Oy. On trouve : I = 2I 0 91 + _ cos2 i + cos { sin2 i i cos z + _ sin { sin2 i i sin z C = 2I 0 71 + cos2 i cos z + sin2 i sin z A (2) donc la visibilité des franges est : V = _ cos2 i + cos { sin2 i i + _ sin { sin2 i i 2 = 1 - sin2 et l’intensité s’écrit encore : { 2 sin 2i = 1 - 1 sin2 2i 2 2 I = 2I 0 71 + V cos (z - }) A où sin} est du signe de sin {, donc positif ici, et : sin { tan } = = tan2 i cos { + cotan2 i 2 (3) (4) (5) (sous réserve de définition, mais avec les prolongements évidents pour i = 0 et r / 2). Quand on tourne l’axe P du polariseur de 90° de Ox vers Oy, quel que soit le sens, { 2 i varie de 0 à r / 2, donc V décroît de 1 à son minimum Vm = cos = (atteint pour 2 2 i = r / 4) puis croît symétriquement jusqu’à 1 pour i = r / 2 ; pendant ce temps, les } i (cf. figure 2 ci-contre) dans le sens qui correspond à un allonfranges se décalent de 2r gement du chemin optique sur la voie comportant (L), et comme prévu ce décalage atteint i/4 pour i = r / 2. Le sens de déplacement des franges s’inverse lorsque i traverse (modulo 2r) les valeurs 0, r / 2, r et 3r / 2. Remarque Depuis quelques années, une nouvelle présentation globale de la théorie de la cohérence de polarisation a été formulée [14-15] ; elle permet de traiter rapidement un grand nombre de situations relativement générales. Pour le montage qui nous intéresse, il découle immédiatement de cette formulation le résultat suivant : si on éclaire l’interféromètre par une lumière de polarisation quelconque (et non plus rectiligne), s1 étant le premier paramètre de STOKES réduit (voir [6] p. 554-555) de cette polarisation dans la base 2 2 1 + s1 1 - s1 1 + s12 1 - s1 +f = (ux, uy), on a V = f et tan } = . Dans le cas de notre p p 2 2 2 1 + s1 polarisation rectiligne, on a s1 = cos 2i ; on vérifie sans peine qu’on retrouve les résultats (3) et (5). Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 995 Figure 2 : Graphe de } ! 7 0, r 7 en fonction de i dans le cas { = r / 2 ; comme pour i l = r - i 2 on obtient } l = r - }, le point de coordonnées _ r / 4, r / 4 i est centre de symétrie. 2 2.3. Réalisation pratique L’expérience est donc très simple à réaliser dans son principe. Le seul point théoriquement important est de repérer le sens de déplacement des franges qui correspond à un allongement du chemin optique sur la voie (1) comportant (L) ; il suffit pour cela de translater le miroir M1 dans le sens qui augmente ce chemin optique (cf. figure 1). Par précaution, il serait bon de vérifier qu’en l’absence de (L) le passage de i = 0 à r / 2 n’engendre aucun déplacement des franges d’interférences – donc que la réversibilité des traitements semi-réfléchissants des lames séparatrices est correcte… Le gros avantage de cette méthode est qu’elle s’applique à tous les types de lames, y compris les lames composites ! Par contre, un inconvénient matériel est la rareté des interféromètres de MACH-ZEHNDER dans les collections de matériel d’optique ; d’où l’intérêt d’examiner maintenant la méthode proposée par WOOD, qui utilise un appareil nettement plus répandu : un interféromètre de MICHELSON. 3. MÉTHODE DE WOOD 3.1. Comparaison avec la méthode précédente Si on veut reproduire l’expérience précédente avec un interféromètre de MICHELSON au lieu de celui de MACH-ZEHNDER, le problème posé par l’utilisation de celui-là est que la lumière effectue un aller-retour sur chaque voie… Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 996 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS Ainsi, mettre une lame quart d’onde sur l’un des bras de l’interféromètre de MICHELSON revient à mettre une lame demi-onde sur l’un des bras de l’interféromètre de MACH-ZEHNDER. Or la description de l’action d’une lame demi-onde sur la polarisation traite ses deux axes Ox et Oy de façon équivalente. Lorsqu’on tourne l’axe P du polariseur de Ox vers Oy, quel que soit le sens, les franges d’interférences ne peuvent se déplacer ni dans un sens ni dans l’autre à cause de cette équivalence : seule la visibilité des franges peut varier. D’ailleurs, les franges correspondant aux cas i = r / 2 auront seulement leur contraste inversé par rapport à celles du cas i = 0. Le calcul de l’intensité le confirme : c’est le même que celui du paragraphe 2.2., à condition de changer { = r / 2 en { = r, ce qui donne : I = 2I 0 91 + _ cos2 i - sin2 i i cos z C = 2I 0 71 + cos 2i cos z A (6) et } = 0 si 2i ! 7 - r / 2, r / 2 A modulo 2r, } = r modulo 2r sinon. La visibilité dépend bien de i, car V = cos 2i ; quand i varie les franges restent sur place, sauf lors des inversions de contraste qui se produisent pour i = r / 4 modulo r / 2. Cependant, contrairement à l’interféromètre de MACH-ZEHNDER, celui de MICHELSON présente un inconvénient dû au fait que pour les deux voies le champ électrique des composantes S et P (voir § 1.1.) n’est pas transmis ou réfléchi dans le même sens sur son unique lame séparatrice : entre les deux voies, les déphasages dus à la réflexion et à la transmission par la lame séparatrice sont donc différents, et leurs expressions ne sont pas simples à cause du traitement semi-réfléchissant. Ces différences de déphasages entre les deux voies influent donc sur la position de l’origine de XX , qui n’est pas simple à calculer. De plus, elle est différente pour les composantes S et P ! Pour simplifier l’expérience, il serait bon de faire que i = 0 ou r / 2 corresponde aux cas S ou P pour le faisceau éclairant l’interféromètre… Nous omettions cet effet lorsque nous écrivions, juste au-dessus, que les franges restent sur place quand i varie. En conséquence, avec l’interféromètre de MICHELSON, dans la pratique expérimentale on ne sait pas avec précision où doivent se trouver les franges claires et les franges sombres si i = 0 ; on ne pourra donc pas déterminer concrètement l’axe lent de la lame. Pour obtenir un changement plus exploitable entre les cas i = 0 ou r / 2, on remplace la lumière incidente de largeur spectrale négligeable par de la lumière blanche : c’est la méthode de WOOD. Dans son traité d’optique instrumentale [10], il la décrit seulement ainsi : « If the plate is mounted with its principal directions vertical and horizontal respectively, in front of one of the silvered mirrors of a MICHELSON interferometer and the fringes found with white light, it is not difficult to determine the direction corresponding to the faster propagation. The central black fringe is brought upon the cross hair of the telescope in which the fringes are viewed, and the light passed through a Nicol before it reaches the instrument. It will be found that a shift of 1/2 a fringe width occurs when the vibration plane is changed from horizontal to vertical. If this shift is in the same direction as the shift originally produced by introduction of the mica plate, it means that Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 997 the retardation has been increased by changing the direction of the vibration from horizontal to vertical, consequently the vertical direction in the plate is the direction in which the slower component vibrates… ». Il nous semble que cette brève description conduit à une prédiction erronée (le décalage de la frange centrale de i/2) : en effet, la dispersion de la biréfringence (que WOOD passe sous silence) fait qu’en général il n’existe plus de frange centrale par rapport à laquelle les autres sont symétriques, et que le décalage exploitable sera celui d’une frange achromatique – donc différent de i/2. La variation de biréfringence ne - no n’est pas négligeable pour des petits déplacements de franges : dans le cas du quartz, du rouge au violet elle est de l’ordre de 7 %. C’est pourquoi nous allons maintenant étudier, grâce à un modèle simple, l’influence de la dispersion des indices sur ces interférences en lumière blanche. 3.2. Étude des interférences en lumière blanche pour une lame simple On considère que la lame est assez simple (par exemple du type i-iii) pour que les expressions de zx et zy en fonction de m se mettent approximativement sous la forme classique inspirée des formules de dispersion de CAUCHY : R V R V By W B S zx , 2r 2a S` Ax - 1j + 2x W et zy , 2r 2a S a Ay - 1k + 2 W (7) S m m W m m W S T X T X où Ax, Bx, Ay et By sont des constantes. R V By - Bx W S Comme { = zy - zx , 2r 2a S a Ay - Ax k + dépend de m et n’est pas égal à m m2 WW S T X r modulo 2r quel que soit m, on pourra (1) observer des interférences colorées, mais leurs teintes ne seront pas celles de NEWTON – comme le montre l’expression de leur spectre. Cas où l’orientation du polariseur est quelconque En un point donné du champ d’interférences, z0 est fixé et le spectre de la lumière en ce point est proportionnel à 1 + V (m) cos 7 z (m) - } (m) A, où V (m) et z (m) - } (m) sont donnés par les expressions (3) et (5) : si cos 7 z (m) - } (m) A varie nettement plus vite que V (m), il s’agit d’un spectre cannelé, le contraste des cannelures étant V (m) qui évolue avec la longueur d’onde. Dans le cas où on vient de se placer, la condition approximative d’achromatisme (1) Il faudra régler l’interféromètre de façon que le spectre de la lumière émergente ne comporte pas trop de cannelures. Si les termes aBx / m3 et aBy / m3 sont trop grands, un tel réglage n’existera pas : dans le champ d’interférences on aura toujours du blanc « d’ordre supérieur », sans aucune frange colorée – et donc sans frange achromatique ! Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 998 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 2z 2} (m ) (m ) , 0, où m M , 555 nm (8) 2m M 2m M est la longueur d’onde du maximum de sensibilité de l’œil. Cette équation donne la position approximative de la frange achromatique, sous réserve d’existence – pour cela le spectre ne doit pas comporter un grand nombre de cannelures dans le domaine visible, i.e. la variation de z (m) - } (m) sur le visible ne doit pas excéder une dizaine de fois r radians. s’écrit : Cas où l’axe du polariseur est parallèle à l’un des axes de la lame Pour i = 0 ou r / 2, V (m) = 1 donc le contraste ne varie pas ; il n’est plus nécessaire de poser une hypothèse sur sa variation comparée à celle de z (m) - } (m) = 2r 2aX l- zx - } m Pour i = 0, avec (2)-(4) on trouve } = 0 modulo 2r, donc l’équation de la frange achromatique déduite de (8) est : R V 3Bx W S a X l= X la (0) , a S (Ax - 1) + 2 W ; (9) mM W S T X pour i = r / 2, (2)-(4) donnent alors } = { (≠ r / 2 a priori) modulo 2r, d’où l’équation évidente de la frange achromatique déduite de (8) : R V 3By W S a X l= X la (r / 2) , a S (Ay - 1) + 2 W. (10) mM W S T X Si la lame est quart d’onde pour la longueur d’onde m0, R V By - Bx W { (m0) S r r 2 a = (4m + s) , (A - Ax) + (11) 2 2 m0 SS y m20 WW T X avec m ! Z et s = + 1 si Ox est l’axe rapide, s = - 1 si Ox est l’axe lent ; donc le déplacement de la frange achromatique lors de la variation de i de 0 à r / 2 vaut DX la = X la (r / 2) - X la (0), i.e. R R V J N VW By - Bx W S S a s a 2 3 1 K DX la , a S (Ay - Ax) + 3 , i (m0 ) S c 2m + m + (B - Bx) 2 - 2 OW Km 2 m0 y m0 OW S m2M WW S L M PX T X T By - Bx (12) (Ay - Ax) + 3 m2M s , c 2m + m i (m0) By - Bx 2 (Ay - Ax) + m20 dans le sens qui correspond à une augmentation du chemin optique sur la voie comportant (L). Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 999 Si on avait Bx , By , 0 (ce qui est très peu probable), ces deux franges achromatiques seraient des franges d’ordre zéro. Au lieu de cela, si on avait seulement Bx - By , 0 (ce qui est moins improbable), on pourrait procéder ainsi : mesurer le déplacement DX la de la frange achromatique en lumière blanche (ce qui ne présente plus d’indétermination modulo i grâce aux franges colorées qui encadrent la frange achromatique), puis remplacer le faisceau incident de lumière blanche par un faisceau de longueur d’onde m0, et mesurer le nombre d’interfranges i (m0) correspondant à DX la. Cette méthode permettrait non seulement de déterminer s, donc l’axe lent de la lame, mais encore de trouver la valeur de m ! Z. Application numérique Considérons une lame de type i et posons ici, par convention, que pour l’incidence normale Ox est parallèle à la ligne neutre d’indice ordinaire no, Oy parallèle à la ligne neutre d’indice extraordinaire ne. A partir de valeurs tabulées [16] de no et ne en fonction de la longueur d’onde dans l’air normal, une régression linéaire sur 6 ou 7 valeurs prises dans le domaine visible donne, avec un coefficient de corrélation t : ♦ pour le quartz : Ax , 1, 53233, Ay , 1, 54102, Bx , 4, 081.10- 3 µm2, By , 4, 221.10- 3 µm2, t > 0, 99977, et donc Ay - Ax , 0, 00869, By - Bx , 0,140.10- 3 µm2 ♦ pour le spath : Ax , 1, 63772, Ay , 1, 47704, Bx , 7,140.10- 3 µm2, By , 3, 258.10- 3 µm2, t > 0, 99996, et donc Ay - Ax , - 0,16068, By - Bx , - 3, 882.10- 3 µm2 Nota : pour l’apophyllite (matériau rare, dont les caractéristiques tabulées sont peu publiées, à part les mesures classiques de ne - no faites par FRANÇON pour cinq raies [7] p. 10-107), Ay - Ax , 0, 0036, By - Bx , - 0, 341.10- 3 µm2, t , - 0, 9960 ; l’intérêt de ce milieu réside dans la différence de signe entre Ay - Ax et By - Bx, faisant que la variation n -n de e o sur le visible vaut 10- 1 seulement, ce qui permet de réaliser des lames retarm datrices relativement achromatiques ! Pour une lame quart d’onde en quartz d’épaisseur a , 0,15 mm, taillée parallèlement à l’axe optique et telle que (ne - no) a = c m + s m avec m = 2 et s = + 1 pour m0 , 0, 6 µm, 4 le déplacement de la frange achromatique (dans le sens qui correspond à une augmentation du chemin optique sur la voie comportant cette lame) vaut : i (m0) DX la , 2 c 9 + 0, 24 m i (m0) , 10 ; 4 2 ici donc la dispersion empêche la détermination de l’axe lent si on la néglige, car on aurait alors dû trouver pour DX la un nombre impair de demi-interfranges !! Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 1000 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS Le fabricant MELLES-GRIOT fournit couramment aussi des lames quart d’onde en quartz telles que m = 1 et s = + 1 ; la réduction de m + s abaisse a et donc diminue l’effet 4 m0 J N gênant de la dispersion, caractérisé par le terme 2a (By - Bx) K 32 - 12 O dans (12). Km m0 m0 O L M P Cependant, il faudrait aussi tenir compte de l’effet déjà mentionné quand i passe de 0 à r / 2 : le changement de différence de déphasage entre les deux voies dû à la lame séparatrice, qui modifie encore le déplacement de la frange achromatique… à moins que celle-ci ait une structure particulière qui la rende « réversible » pour les déphasages ([11] p. 2504-2505). CONCLUSION Si on ne dispose pas du matériel nécessaire à la réalisation des expériences décrites aux paragraphes 1.3.2. et 2., la détermination de l’axe lent d’une lame quart d’onde de type quelconque sans recourir à une lame étalon reste donc un problème délicat. Toutes les autres méthodes présentées font appel à des hypothèses simplificatrices sur la dispersion des matériaux constituant la lame, et pour vérifier facilement ces hypothèses il faut que sa structure soit assez simple. Si on veut caractériser plus précisément une lame quart d’onde de type i-iii, mais aussi une lame composite formée de plusieurs couches biréfringentes dont les axes sont superposés, dans le cas où la dispersion des axes électriques et des indices principaux est négligeable on peut suivre le protocole suivant. ♦ Réaliser l’une des expériences décrites aux paragraphes 1.3.2. ou 2. : cela permet de déterminer l’axe lent de la lame quart d’onde pour la longueur d’onde m0 - c’est Oy si s = 1, Ox si s = - 1, avec (ny - nx ) a = c m + s m m0 et m ! Z, nx et ny désignant les 4 deux indices associés aux axes Ox et Oy respectivement. ♦ Éclairer la lame par un faisceau de lumière blanche en incidence normale, entre polariseur et analyseur d’axes P et A parallèles, les axes de la lame étant à 45° de P et A. Si on parvient à identifier la couleur de la lumière émergente dans la liste des teintes de NEWTON à centre blanc, on en déduit la valeur absolue de la différence de marche l (ny - nx) a = c ml+ s m m0 avec sl= ! 1 et ml ! N ; pour confirmer cette valeur, on peut 4 observer la couleur obtenue après remplacement de l’analyseur par un miroir plan renvoyant le faisceau sur lui-même, et on doit trouver une différence de marche double de la précédente. Si on ne voit aucune couleur mais du blanc d’ordre supérieur, on formera son spectre cannelé, ce qui permet de déduire ml et sl (de deux façons pour ce dernier) [17]. Si s et sl sont de même signe, alors ny > nx (et si s = sl = - 1, Oy n’est pas l’axe lent...) ; si s et sl sont de signe opposé, alors ny < nx (et si s = - sl = 1, Ox n’est pas l’axe lent...). Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS 1001 ♦ Si la lame est de type i, il sera intéressant de la faire pivoter autour de ses axes Ox et Oy à tour de rôle, et d’observer le changement de couleur de la lumière émergente ou le déplacement des cannelures de son spectre, qui sont inverses pour Ox et Oy. Quand ce pivotement augmente l’incidence, si la suite des couleurs observées correspond – d’après la liste des teintes de NEWTON – à une croissance de la valeur absolue de la différence de marche, ou si les cannelures se déplacent vers le rouge, alors l’axe de pivotement est l’axe optique du milieu uniaxe [18]. D’ailleurs pour une lame de type i, les franges d’interférences en lumière (blanche) polarisée convergente sont quasiment des hyperboles équilatères (voir [1] p. 529-532) ; l’une des deux bissectrices de leurs asymptotes est parallèle à l’axe optique : il s’agit de celle où les teintes de NEWTON, quand on s’éloigne du centre, correspondent à une valeur absolue décroissante de la différence de marche. L’ensemble de ces manipulations permet de dire si le milieu uniaxe, constituant une lame de type i, est positif ou négatif. REMERCIEMENTS En discutant avec moi de ce sujet, Monsieur Michel HENRY a recherché plusieurs renseignements pratiques sur la fabrication des lames quart d’onde, et Monsieur Raymond PELLETIER m’a procuré des extraits de livres que je lui ai mentionnés ; qu’ils trouvent ici l’expression de ma gratitude. BIBLIOGRAPHIE [1] BRUHAT G. Cours de physique générale – Optique. Paris : Masson, 1992. [2] DESHPANDE L. V., JOSHI M. B. et MISHRA R. B. 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La lumière du laser – Guide d’expériences. 2e édition, Paris : Masson, 1994 : p. 216-217 ; pour savoir comment agir facilement sur les Vol. 95 - Juin 2001 Luc DETTWILLER 1002 BULLETIN DE L’UNION DES PHYSICIENS sources secondaires indépendamment, tout en gardant un interfrange élevé, on pourra s’inspirer des montages décrits par HENRY M., Interférences à deux ondes – expériences de démonstration. Bull. Un. Phys., février 1981, vol. 75, n° 632, p. 799803. [10] WOOD R. W. Physical optics. 3e édition, New York : MacMillan, 1934 : p. 352-353 ; une édition de ce livre a été publiée en français par Gauthier-Villars (Paris) en 1914. [11] FYMAT A. L. Jones’s Matrix Representation of Optical Instruments. 1 : Beam Splitters. Appl. Opt., 1971, vol. 10, p. 2499-2505. [12] FYMAT A. L. Jones’s Matrix Representation of Optical Instruments. 2 : Fourier Interferometers (Spectrometers and Spectropolarimeters). Appl. Opt., 1971, vol. 10, p. 2711-2716. [13] FYMAT A. L. Polarization Effects in Fourier Spectroscopy. 1 : Coherency Matrix Representation. Appl. Opt., 1972, vol. 11, p. 160-173. [14] DETTWILLER L. Théorie de la cohérence de polarisation avec les matrices de Jones et la sphère de Poincaré – Applications. Ann. Phys. Fr., 1999, vol. 24, p. 51-84. [15] DETTWILLER L. Interférences d’états de polarisation : étude générale. Pure Appl. Opt., 1997, vol. 6, p. 41-53. [16] ABRAHAM H. et SACERDOTE P. Recueil de constantes physiques. Paris : Gauthier-Villars, 1913, p. 462. [17] PELLETIER R. Sur quelques expériences d’optique – Fiche 10 : e pur si muove… mais dans quel sens ?. Bull. Un. Phys., juin 2001 (dans ce numéro), vol. 95, n° 835, p. 1051-1071. [18] PELLETIER R. Sur quelques expériences d’optique – Fiche 5 : quelques expériences de polarisation. Bull. Un. Phys., février 2001, vol. 95, n° 831, p. 372-376. Définitions et déterminations de « l’axe lent » d’une lame quart d’onde BUP no 835