Le regard des estrangers

Transcription

Le regard des estrangers
GRATUIT N°24
UNE à NÎMES
I Le e -magazine des gens qui aiment leur ville I Juin 2012 I
Le regard des
estrangers
NOU
VEA
s
un ite
U
ea
(DE nimes
)CL
.
IQU fr
E!
Le tournage des
Mistons en 58
Le portrait du serveur du 421
Janet Vidal, étudiante cubaine en Erasmus
www.uneanimes.fr
sa S
vi éb
e a
en st
Poien
lo et
gn
Pascal Andréani
e
Le commerce du
son: 340 MS
Le paquito chocolatero
a réuni 2 100 personnes le
dimanche de la Féria
S
O
M
M
A
I
R
E
A la Une:
Quel regard portent les étrangers sur Nîmes ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . pages 4/5
Chronique d'une Nîmoise
Miss Blablabla a son coeur qui balance entre ligne et courbes . . . . . . . . . . . . . . . . page 6
Le film de Truffaut:
"Les mistons" tourné en 1958, secrets de tournage par Thibault Loucheux . . . . page 7
Découverte d'un commerce mythique: les murs du son avec 340 MS . . . . . . . . pages 8/9
Pascal Andréani portrait du serveur du bar le 421 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . page 11
Sébastien expatrié à Varsovie qui accueille l'Euro de football . . . . . . . . . . . . . . . . page 12
Reg'art sur les sculptures d'Alain Taligrot . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . page 14
Un mois, un mot nîmois...
Trimard:
Une personne nîmoise attardée..."tu es vraiment
un gros trimard" dixit Pierre-Edouard Thibaud qui
explique plusieurs fois quelque chose à l'un de
ses amis.
2 UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012
UNE à NÎMES
Directeur de la publication : Jérôme Puech. Rédacteurs:
Miss Blablabla, Aurélia Dubuc, Georges Mathon, Thibault
Loucheux et Jérôme Puech. Photographes: Alain Bérard
et la rédaction. Webmaster: Tommy Desimone. Maquette:
Agence Binome. Relecture: Aurélia Dubuc. Nous écrire:
[email protected]. Site : www.uneanimes.com.
Retrouvez tous les n°. Mensuel et gratuit. Dépôt légal numérique BNF. Diffusion: 11 000 destinataires mail.
Régie publicitaire: Esprit Média: 04 66 29 75 19.
« Aux pieds des Nîmoises»
D
ans ce monde d’automobiles, de bus, de trains et d’avions, la marche réaffirme
notre liberté de mouvement, notre droit d’aller et venir. Et la chaussure, souvent considérée comme accessoire, devient le pivot de cette souveraine exploration du monde.
Située entre le sol et le pied, elle est ce qui l’empêche d’être blessé et ce qui permet
d’avancer. La chaussure est donc le symbole de notre présence active dans le monde
qui s’élève au-dessus de la simple animalité, pour tendre vers le désir et l’esprit.
Olivier Lange travaille
au Sud Liban pour
l'ambassade de
France. Nîmois, Olivier
revient souvent à
Nîmes pour se
ressourcer. Il écrit
régulièrement des
éditoriaux pour Une à
Nîmes
Cette enveloppe est à la fois une protection et notre propre empreinte. Et l’été venu,
les pas qui se déposent dans les rues de Nîmes composent une symphonie où chacun
exprime un peu de soi-même et de ses rêves.
Ainsi, dans les jardins de la Fontaine, on rencontrera des mères élégantes qui promènent leurs enfants en salomé, cette chaussure à talon, dotée d’une bride centrale
dans laquelle on passe la lanière de fermeture et dont les couleurs peuvent évoluer du
beige le plus sage au bleu le plus électrique.
Elles croiseront forcément ces touristes, souvent venues de loin, qui recherchent le
confort dans des sandales formées d’une simple semelle retenues par des lanières. De
plus en plus, les femmes compensent cette allure sportive, qui semble ne pas se soucier de l’esthétique, par un soin tout particulier apporté à leur pieds par, notamment,
la pose d’un verni coloré sur leurs ongles ; suscitant ainsi un dialogue équivoque entre
la forme rudimentaire de la chausse et le raffinement du corps.
En descendant le Victor Hugo, nous abordons à un environnement de commerces et
de bureaux, où les femmes actives s’élèveront sur des escarpins ouverts, ces souliers
à talons hauts laissant paraître, aux beaux jours, l’avant ou l’arrière du pied. Bien souvent, ils arrêtent le regard car, à cacher et révéler à la fois, ils intriguent et suscitent
des réactions complexes.
Dans ce flot de talons décolletés, on distinguera parfois ces ballerines légères et plates qu’arborent pudiquement les étudiantes, dont les rêves dansent en elles.
Les soirs d’été ou de Féria arrivés, l’Espagne enserrant Nîmes encore un peu plus de
son étreinte, se donneront à admirer celles dont on prononce le nom en joignant les
lèvres, à savoir les mules. Ces chaussures qui, le plus souvent, sont rehaussées, offrent entièrement le talon aux regards. Elles sont, dans l’espace public, comme la furtive apparition d’un lieu plus intime et privé, le début d’un abandon qui s’interrompt,
laissant dans son sillage la nostalgie d’une sensualité sans contraintes.
Enfin la nuit venue, avant de rentrer chez vous ou de continuer votre route, vous
pourrez passer par la place d’Assas où, sur la fontaine centrale, deux jeunes dieux
portent aux nues une étoile. Votre regard descendant du ciel pourra se faire plus
attentif, et vous apercevrez alors que la petite fille porte à ses pieds des « méduses » ; ces fameuses sandalettes de plastique que l’on revêt pour se baigner
sans danger.
C’est sans doute là un clin d’œil de Martial Raysse, l’artiste qui a dessiné cette
place, à nos ancêtres romains qui, dans les fondations de leurs monuments, cachaient une tête de méduse en guise de porte-bonheur… Et après tout, pourquoi
ne pas considérer que l’accord entre un pied et sa chausse, c’est-à-dire la démarche, est toujours une chance, un début d’espoir, comme si toutes les Nîmoises
portaient des méduses à leurs pieds.
Olivier Lange
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 3
la Une à Nîmes
Quel est le regard des estrangers ?
Janet Vidal, étudiante cubaine en Erasmus
Grâce au concours de l’association « Rencontres internationales » qui donne des cours de français, Une à Nîmes
a donné la parole aux étrangers (lire « les estrangers ») qui vivent à Nîmes ou dans sa région. Une belle occasion
de saisir les regards sur notre cité qui s’offre de plus en plus belle aux touristes à l’approche de l’été.
Le poids de l’histoire
Le caractère hispanique
Je suis très impressionné par
les monuments historiques
que vous avez en centre-ville
» indique l’étudiant Mexicain de
23 ans, Daniel. C’est le premier
regard qui se pose sur notre
ville. Un regard sur les 2 000
ans d’histoire dont les Arènes, la
Maison Carrée et la Tour Magne
sont les principaux témoins. Nul
doute que ce regard rompt avec
les décors en pâte à mâcher des
sites touristiques américains.
Nîmes plaît particulièrement aux
étrangers hispaniques. Ainsi l’on
retrouve Monica, la colombienne,
ou encore Sébastian, l’argentin
aux commandes du Petit Mas, le
restaurant de la rue de la
«
Les Nîmois mesurent-ils cette
chance ?
4 UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012
Madeleine. « Ca ressemble
beaucoup à l’Espagne, il y a
beaucoup de vie, de soleil, la mer
à quelques kilomètres », indique
Alba,
infirmière
espagnole
qui travaille à la polyclinique.
«Infirmière est un métier qui paie
mieux en Espagne qu’en France
mais je ne trouve plus du travail
dans mon pays, c’est la crise !»
Nîmes s’envisage comme une
solution pour trouver un emploi.
Janet, une jolie cubaine de 25
ans, est saisonnière dans un
restaurant. « Je repars ensuite
sur Paris pour poursuivre mes
études en Erasmus », précise
avec un accent marqué celle
qui a servi des Mojitos toute la
dernière féria.
la Une à Nîmes
Nîmes, un carrefour
et un village
Les aspects négatifs
Nîmes semble convenir car la
ville est « près de tout » lance
Jorgiane, une brésilienne de 39
ans qui accompagne la vie de
son mari légionnaire. « J’ai fait
Madrid et Rome en voiture. J’ai
pris le TGV pour aller à Paris
et même l’avion pour aller à
Londres », continue t-elle. La
ville lui permet d’être facilement
mobile même si elle regrette qu’il
n’y ait pas assez de magasins
ou de fêtes nocturnes comme à
Montpellier.
Une
ville
humaine
à
échelle
La dimension à échelle humaine
est également appréciée de
Romy, une Suisse de 58 ans qui
a ouvert des chambres d’hôtes à
Saint Etienne d’Escattes (Gard).
« Les gens sont gais, sympas et
respectueux », s’accorde à dire
Kei, une Japonaise de 31 ans
installée ici suite à une rencontre
amoureuse. « C’est une petite
ville où il y a tout », tient à
préciser cette responsable de
l’exportation au Domaine des
Tuileries.
Mais Nîmes fait aussi l’objet
de remarques négatives. La
comparaison avec Montpellier
est souvent faite en sa défaveur
lorsqu’il s’agit d’évoquer les
sorties, les magasins ou les
offres
d’emploi.
Etonnante
remarque de Daniel, le mexicain
qui ne comprend pas pourquoi «
la ville va dépenser 80 millions
d’euros pour 4 lignes de bus ».
D’ailleurs, il a posé la question
à la Maison des Grands travaux.
Réponse « vous les Mexicains
vous
polluez
beaucoup
alors vous ne pouvez pas
comprendre…». Bienvenue dans
la ville des clichés. Le regard des
étrangers sur Nîmes en souligne
les nôtres!
Jérôme Puech n
Cinq regards...
Jorgiane
Brésil
Romy
Suisse
Mexique
Nîmes
me
permet
d’être très mobile et
d’aller ainsi partout en
France et en Europe. Je
déplore le manque de
magasins ou de sorties
en comparaison avec
Montpellier.
Nîmes est une ville très
charmante, tranquille
et petite. Le centre
est homogène et il y a
beaucoup d’activités.
Le poids de l’histoire
est fort. Ils essaient de
faire passer le message
de ce point de vue.
Mon pays n’a pas l’histoire comme la vôtre. Il n’est pas aussi
vieux. Je suis très impressionné par les monuments en centreville. C’est la première
chose qui m’a frappée
en venant ici.
Daniel
Alba
Kei
Japon
Espagne
Très jolie ville. Plus belle
que Nice d’où je viens.
Je n’ai jamais de problèmes à Nîmes. Les gens
sont très respectueux
et très gais. Il y a tout
dans cette petite ville.
Cela ressemble beaucoup à l’Espagne car
il y a beaucoup de
vie, il y a la mer et le
soleil. J’aime sortir et
je trouve qu’il n’y pas
assez de fêtes la nuit.
J’avais imaginé cela
alors je ne suis pas
trop déçue.
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 5
Chronique de Miss Blablabla
eur
o
c
e
r
t
o
n
et
Quand
e
n
g
i
l
e
r
t
balance en
courbes
L
e mois de juin. Ou le mois
schizophrène pour toute femme
normalement constituée : d’un
côté, nous commençons à profiter du
soleil, des terrasses et une certaine
fébrilité s’empare de nous au moment
d’enfin dégainer nos jolies petites
robes légères.
Et d’un autre côté… Hé bien d’un autre
côté, re-voilà notre face obscure qui
s’éveille, avec ses interrogations et ses
angoisses : vais-je être présentable en
maillot de bain cet été ?
(c’est que la gente féminine se
pose des vraies questions de fond,
on ne cessera de vous le répéter,
Messieurs)
De façon assez fourbe,
chaque
année
les
magazines féminins nous
sortent leurs marronniers,
mettant ainsi le ver dans
la pomme : « Comment
perdre les kilos superflus
pris cet hiver ? » « Etre
belle et ronde : l’utopie éternelle »…
Nous avons beau nous défendre de lire
de telles sottises, nous ne parvenons
pas à rester insensibles aux titres nous
promettant une silhouette de rêve
sans privation (le mensonge le plus
vieux de tous les temps).
De notre manque de volonté de
démarrer le programme de relance
du cuissot, pourtant fortement
motivé à coups de « le changement
c’est maintenant » annoncé le poing
levé à notre moitié qui, comme
chaque année, est spectateur de ce
pathétique manège qu’il se contente
de commenter d’un « pfffff… » en
quittant la pièce (et évitant ainsi
toute discussion vaine).
(Bon sang que cette phrase était
longue)
Nous finissons toutefois par acheter
ces fichues piles AAA, les mettre à
l’emplacement réservé, et vérifier
le bon état de fonctionnement de
l’ensemble en montant
fièrement
sur
la
balance.
Et là c'est
le drame !
Et chaque année, nous décidons de
nous remettre au sport et afin de
rester vigilantes sur l’évolution de
notre poids, nous rachetons des piles
pour le pèse-personne resté planqué
sous le meuble de notre salle de bain
depuis l’été dernier.
Je passe sur les oublis répétitifs
au moment de faire les courses,
d’acheter enfin ces maudites piles…
Oublis qui commencent, à force de
répétition, à s’apparenter à une sorte
de truc inconscient mais totalement
révélateur de notre déni… Ou pire !
6 UNEÀNÎMES N°24I juin 2012
Et là, c’est le drame.
Prise d’un syndrome
de la Tourette, nous
crachons les pires insultes et
autres noms d’oiseaux qui pourraient
faire rougir un camionneur aguerri.
Cette salope de balance n’est rien
qu’une menteuse. Et tout cela se
finit en pleurs. Fatalement.
Alors Messieurs, pardonnez-nous
d’avance pour cet horrible spectacle
que nous nous apprêtons à vous offrir
et prenez les devants : jetez le pèse
personne par la fenêtre et n’oubliez
jamais l’essentiel.A la question «
Tu me trouves grosse ? », un seul
moyen de s’en sortir : répondre
immédiatement « NON », sans
l’ombre ni une seconde d’hésitation.
Il en va de la santé mentale de votre
douce. Et de la vôtre, aussi.
Retrouvez Miss Blablabla:
http://blog.missblablabla.com
Dans le Rétro
Le tournage du film de François Truffaut en 1958
Les Mistons de Bernadette
L
e
film
raconte
une
histoire d'amour entre
Gérard
(Gérard
Blain)
et
Bernadette
(Bernadette
Lafont) dans le Sud de la France.
Des gamins jaloux vivant aux
alentours de Nîmes perturbent
le couple.
En 1958, François Truffaut est
déjà une personnalité du paysage
cinématographique français. Il
est connu comme polémiste
aux côtés de futurs cinéastes
comme Claude Chabrol, JeanLuc Godard ou encore Jacques
Rivette. Mais c'est bien Truffaut
le plus virulent. Il est adoré par
certains, détesté par d'autres.
Mais l'important n'est pas de
plaire ou de déplaire, l’essentiel
est de ne pas laisser indifférent.
Après avoir lancé la politique des
auteurs et acquis une culture
cinématographique
solide,
il
décide de se lancer dans la
réalisation. Il considère que son
œuvre débute en 1958 avec
son film Les Mistons. Pourtant,
Truffaut était déjà passé derrière
la caméra quatre ans auparavant
avec l'aide de Rohmer. Mais
c'est bien son deuxième film qui
marque le début de sa carrière
de cinéaste.
Le choix de Lafont
Au début de l'année 1957,
François Truffaut tombe sur
une nouvelle écrite par un de
ses collègues de la revue Arts,
Maurice Pons. Elle s'intitule Les
Mistons et raconte l'histoire
de Yvette et Étienne, un jeune
couple qui se voit rendre la vie
impossible par une bande de
gamins jaloux. L'écrit tape dans
l'œil du critique et il décide de
l'adapter
en
court-métrage.
Pour le rôle d'Étienne, François
Truffaut pense à Gérard Blain.
Quant à celui de Yvette, il
voudrait le confier à Bernadette
Lafont, la femme de Blain, à qui
il propose le rôle lors du Festival
de Cannes 1957.
Le tournage a lieu à Nîmes
durant l'été 1957. Truffaut a
découvert cette région avec
des amis et il en est tombé
amoureux. Il abandonne son idée
première qui était de tourner à
Strasbourg et pose sa caméra
dans le Gard. C'est ici qu'il
transpose la nouvelle de Maurice
Pons. Bernadette Lafont raconte
ses début de comédienne et son
expérience dans Les Mistons:
« On s'est retrouvé à Nîmes,
dans les Cévennes... que des
coins que je connaissais (…)
Truffaut m'a dit qu'il sentait que
j'avais autant envie de faire du
cinéma que lui (…) Ce film avait
beaucoup de sens, beaucoup
d'allure et énormément de chic
quelque part »1.
Une balade à vélo
L'actrice gardoise ouvre le
film. Elle remonte le Boulevard
Victor Hugo en vélo alors que
la caméra lui fait face. C'est
avec ce véhicule que Bernadette
nous fait une visite guidée du
Département. Nous la suivons
jusqu'au Pont du Gard qu'elle
traverse robe et cheveux au
vent. La suite de l'histoire
nous amène dans le lieu le plus
emblématique de la ville de Nîmes:
l'amphithéâtre. Dans la scène
qui se déroule à l'intérieur de ce
dernier, les gamins sont comme
des taureaux lâchés dans les
arènes. Ils tentent d'importuner
la balade romantique de Gérard
et Bernadette. Leurs bêtises ne
sont pas sans laisser penser au
personnage d'Antoine Doinel
dans Les Quatre cents coups. En
effet, on retrouve le thème de la
jeunesse, qui est récurent dans
ce courant cinématographique
qu'est la Nouvelle Vague. Les
péripéties des « Mistons »
continuent dans les Jardin de la
Fontaine. Ils y écrivent à la craie
des « inscriptions vengeresses » à
l'adresse du jeune couple. Après
que le personnage de Gérard
se soit tué dans un accident de
montagne, les Mistons revirent
Bernadette sur les quais de la
Fontaine, marchand devant la
caméra avec une jupe désormais
noire. Tout le long du film,
Truffaut tente de filmer la ville
comme il filmerait une femme.
A l'instar de Bernadette pour
les enfants, cette ville est
retranscrite par le cinéaste de
manière à livrer au spectateur «
une sensualité lumineuse ».
Thibault Loucheux n
www.cinephiletv.com/
1Entretien
accordé
à
ARTE:
http://
videos.arte.tv/en/videos/premiere_fois_
bernadette_laffont-3631130.html
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 7
Franchir les murs du SON !
Alexandre et Fabien en haut
8 UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012
340 MS, le disquaire indépendant de la rue Auguste Pelet résiste depuis 1980 à la FNAC et aux téléchargements illégaux. Alexandre et Fabien ont
repris les murs du son depuis un an suite au départ
du fameux Jean-Marie. Ce sont plus de 4 000 produits proposés du vinyle au CD. Retour aux sources.
« Je vois des jeunes prendre des notes et repartir
sans rien acheter » lance Fabien avec un certain
désenchantement. L’époque est ainsi faite : les
jeunes téléchargent leur musique sur Internet sans
passer par une belle discussion avec un disquaire.
Celui de la rue Pelet est un lieu devenu mythique
pour beaucoup de Nîmois amateurs de musique.
Leur créneau est celui d’une génération, les quadras. Cette génération aime venir fouiner, discuter, échanger, écouter pour ensuite craquer sur
tel vinyle ou tel CD de rock, de jazz, de pop ou de
folk. Jean-Marie, l’ancien responsable, a su dans
les années 80 instaurer un rapport différent entre
la musique et ses clients. Il avait son caractère, sa
gouille, sa voix grave…
La relève
Cependant la figure de la musique indépendante a
décidé un beau jour de laisser Alexandre, son plus
fidèle collaborateur et Fabien, ancien responsable
d’une boutique de skate, reprendre la boutique.
Alexandre se charge de la gestion des commandes. Il a cohabité durant de longues années avec
le prophète. Fabien fait bénéficier de son réseau
personnel et de son goût pour l’aménagement.
L’ancien skateur de rue connaît bien la musique.
Il est batteur dans le groupe Harold Martinez, un
groupe folk rock.
Une référence en résistance
Lorsque l’on interroge le duo sur les difficultés du
marché de la musique, ils restent souriants malgré un contexte défavorable. Il se murmure même
que la FNAC envisagerai de partir de la Coupole
des Halles. C’est dire. « Mathieu, le vendeur Rock
de la FNAC est très bon d’ailleurs il vient souvent
acheter ces CD chez nous » raconte goguenards
les deux passionnés. 340 MS tente de se démarquer en proposant des expositions de photos,
des shows case originaux ou encore des liens très
forts avec le tissu associatif local. Ils font la part
belle aux labels et groupes locaux. Alexandre joue
la carte de la fidélité et de la proximité. Tout en répondant à mes questions, il sert un client. Il semble les connaître eux et leur goût sur le bout des
doigts.
Think différent
« A Nîmes, il n’y a pas que la brandade et la féria»
aime à dire Fabien avec son côté rebelle. A vingt
ans, il avait donné quelques soucis à la municipalité qui voulait régler le problème du skate en centre ville. Aujourd’hui, plus mesuré, Fabien fourmille
d’idées pour attirer ses clients avec des façons de
penser différente. Il veut croire à d’autres manières d’apprécier la ville et ses musiques variées et
actuelles. « La Scène de Musiques Actuelles qui
doit ouvrir en septembre est une bonne chose.
Pourvu que cela créé une bonne dynamique » enchaine t-il. Au rayon des clients décalés, ils se souviennent d’avoir discuté une journée entière dans
la boutique avec Moustik, l’animateur de Groland
venu mixer dans une bodega lors d’une féria précédente. Ensemble, ils ont du franchir le mur du
con.
Jérôme Puech
340 MS – Alexandre et Fabien
2, rue Auguste Pelet
http://www.340ms-disquaire.com/
(bientôt en ligne cet été)
Sur Facebook
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 9
Plaisirs de voir
Les étoiles de la nuit
France Bleu
Antoine Maestracci, directeur de la radio France Bleu
Gard Lozère, a levé le voile de l’affiche du concert
gratuit des arènes du 29 juin : Aubert, Lenorman,
Chimène Badi et la comédie musicale 1789.
Voilà 9 ans déjà que la radio « des plus belles chansons
françaises » propose un concert gratuit pour ses
auditeurs et pour les gardois dans le plus bel endroit
du monde, les Arènes de Nîmes. Ce sont donc 12 500
spectateurs attendus pour une nouvelle édition « plus
resserrée » avec seulement quatre têtes d’affiches
annoncées.
Comment se procurer des places ?
Chaque année c’est la course au fameux sésame. La
radio prévoit de faire une tournée dans les villes du
Gard afin de récompenser ses plus fidèles auditeurs.
Pour les Nîmois, plusieurs rendez-vous sont proposés:
le 6 juin à 11h dans les jardins de l’Imperator, le 14 juin
à 14h dans la Coupole et le 20 juin à la radio située
boulevard des Arènes. Il sera également possible de
gagner des places à l’antenne et via Facebook.
Olivier Devic et Thierry Garcia animeront la soirée
Le bon dé(clic)
pour Nîmes !
Nouveau site:
www.uneanimes.fr
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 10
Rencontre nîmoise
Les dés
sont jetés
Pascal Andréani
Le petit questionnaire
Serveur du
421
Un Nîmois :
Simon Casas, le
directeur des arènes
des Nîmes. On le
voit à la TV espagnole et il cite souvent Nîmes. C’est
un client régulier.
Un événement :
Les 2 férias car
elles sont un appel
incroyable pour le
tourisme de la ville.
C’est un véritable
PLUS pour les commerçants.
Un lieu:
Le 421 bien sûr parce que j’y travaille
et que je connais
tous les clients. Que
du bonheur.
A
37 ans, ce jeune Nîmois est le barman
du 421, un café très proche de l’identité
nîmoise. Il est au cœur du centre-ville et
des rencontres authentiques.
« Le comptoir d’un café est le parlement du
peuple », écrivait Balzac. Alors imaginez le
fameux bar 421 niché dans la rue Fresque en
période d’élections présidentielles et législatives
! « J’ai beaucoup rigolé durant cette période
», avance sourire en coin Pascal Andréani, l’
incontournable serveur de ce lieu symbolique. Les
phrases cultes, les disputes, la montée du FN, les
échanges pagnolesques…Pascal est le spectateur
privilégié de cette vie. Une vie marquée par
l’identité espagnole de la ville. Les murs, la TV,
les discussions tournent essentiellement autour
de la corrida.
La vie en bus
Pascal ouvre la boutique à 10 heures tous les
matins. Il file à 18h pour laisser le zinc à d’autres
mains. « Un fonctionnaire » de café en quelque
sorte. Ayant eu quelques difficultés avec les
bleus, il a dû expérimenter le déplacement en bus.
Même après avoir retrouvé son passeport rose,
il avoue venir travailler depuis Caveirac en bus.
« C’est vraiment bien le Tango. Je ne me soucie
pas de mon trajet ni de mon parking ». Et si Pascal
avait raison avant tout le monde ?
Le parcours
Avant de travailler au bar 421, Pascal a eu un
parcours à l’image de son père commerçant
qui tenait la fameuse pizzéria Cerrutti, place
Montcalm. Pascal fait des études chez les Jésuites
à Montpellier. Il déboule à Nîmes en 1994 et
rejoint son père nîmois. Il commence par travailler
dans un restaurant de la rue de l’étoile, « le fou
du roi». Jef est alors son patron, une figure des
nuits nîmoises.
En 2002, il sert au Café latin au pied de la superbe
Maison Carrée. Puis, il prend une affaire à Saint
Hippolyte du Fort. L’aventure est difficile. Elle
dure 4 ans. Retour à Nîmes. C’est Olivier Ferrari
qui lui tend la main et lui ouvre la porte du « New’s
café » sur le boulevard Gambetta.
Son sens du relationnel
Le sens du commerce est un atavisme mais pas
que. Pascal est doué pour instaurer la convivialité
entre les clients. Il est facilement taquin, jovial,
souriant, joueur…bref des qualités adaptées à
son rôle de barman. Sa principale qualité : un sens
du relationnel inné. François, le patron, est de la
même veine. Il s’est sans doute vu en lui tel un
effet de miroir. « C’est un très bon patron de bar
qui connaît beaucoup de monde. Il tient bien sa
boutique », indique Pascal, sans trop en faire, de
François.
Des clients appréciés
Pascal sert à boire à des habitués : des
commerçants, des touristes, des clients de
passage et des Nîmois. « C’est agréable d’avoir
à faire à une clientèle très fidèle pour le café
ou le petit déjeuner ». Ainsi , il est heureux de
pouvoir servir Denis 22, sculpteur, Olivier Ginac,
antiquaire réputé, Jean-Pierre Formica, l’artiste
de l’affiche de la féria ou encore Simon Casas, le
passionné directeur des arènes. Pascal s’implique
pleinement durant les férias. Enfin Pascal amuse
la galerie lorsqu’il défie les clients lors d’un jet de
dés, un 421 bien sûr !
Jérôme Puech
11 UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012
Les Nîmoiseries du monde
Séb
Une rubrique pour les nîmois
loin de leur terre natale
Chaque mois, Une à Nîmes donne
la parole à un de nos concitoyens
expatriés plus ou moins loin de sa
Tour Magne natale. Tous nous ont,
jusqu’à présent, conté des mondes
forts différents de notre cité des
Antonins. Alors après Strasbourg,
Montpellier , New-York , Séville, le
Liban, le Japon, Paris, Milan, Londres,
le Canada, le Turkménistan le
Mexique, Sydney, Miami, Prague et
Marie Galante, nous voici à Varsovie
en Pologne.
12 I UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012
Le journaliste Polac
A
lors que l’Euro de football s’apprête à commencer en
Ukraine et en Pologne, Sébastien, Nîmois expatrié depuis plus de dix ans en Europe Centrale, nous fait part
de son expérience à Varsovie. La capitale polonaise, a su le
captiver car elle a tant à offrir.
Les Nîmoiseries du Monde
L' I N T E R V I E W À D I S TA N C E . . .
peu excentrée. C’est en fait
une ville de contraste qui reste
malgré tout très verte dans son
ensemble avec de nombreux
parcs. Elle est également très
étirée et coupée en deux par
la Vistule.
Quels conseils donner à une
personne qui viendrait en visite
chez toi ?
Dis nous ce que tu fais ?
Je partage ma vie entre deux
villes et deux occupations. Je
suis journaliste en Pologne où je
m’occupe de politique étrangère
pour plusieurs titres nationaux
et
j’enseigne
les
relations
internationales et les sciences
politiques à Prague, en République
Tchèque.
Dans quelle ville es-tu ?
Je
vis
principalement
à
Varsovie, capitale de la Pologne,
agglomération
de
plus
de
2,5milions d’habitants.
Peux tu décrire cette ville ?
C’est une ville assez difficile à
décrire… Elle a été durement
marquée par la seconde guerre
mondiale, et a été détruite à plus
de 80 pourcent. Ce que l’on a
reconstruit de Varsovie est très
éloigné de ce qu’était la ville
d’avant guerre, le style soviétique
prévaut avec ces grandes avenues
bétonnées interminables et cet
immense palais de la culture qui
estomaque les visiteurs au sortir
de la gare centrale. Ce blockhaus
de 230 mètres de haut qui
domine l’artère principale fut
le « cadeau » de Staline à la
Pologne. La vieille ville, qui a été
reconstruite à l’identique, est un
Varsovie ne se donne pas
facilement
aux
visiteurs
en quête de typique et de
pittoresque. Il faut du temps pour
se laisser séduire pas son rythme,
son incroyable dynamisme, et
son caractère unique. Mais celui
qui prendra le temps et qui se
laissera guider par les locaux
ou qui se donnera la peine de
chercher un peu, trouvera une
ville insensée, d’une grande
intensité culturelle qui lui donne
des faux airs de Berlin ou … de
Barcelone ! Il faut être patient et
curieux pour l’aborder.
Différences et similitudes avec
Nîmes ?
Je n’en vois guère. Peut être
que Pissevin a des faux airs de
construction soviétique. A moins
que ce soit l’inverse… Ou peut
être ce caractère presque latin
qu’ont les gens ici et ce gout
immodéré qu’ils ont pour la fête.
On fait beaucoup la fête à
Varsovie ?
Quand tu sais où aller c’est
la féria toutes les semaines à
partir du mercredi soir, sans la
pégoulade et avec plus de vodka
et moins de pastis... C’est vrai
qu’il manque peut être aussi un
taureau ou deux…
Une anecdote humoristique sur
ta vie là-bas ?
Alors que je débarquais de Prague
où j’habitais dans un immeuble
du 15ème siècle dans le cœur
historique, et que le choc visuel
était assez grand, je me suis laissé
entrainé à un vernissage dans un
hangar désaffecté entièrement
éclairé à la bougie. Les gens
qui organisaient l’événement,
voyant que j’étais ébahi par le
spectacle inattendu, m’ont dit
sans broncher « tu vois, sans
électricité on arrive à faire des
choses. C’est juste une question
d’habitude ! » Le ton était donné,
je me fais encore régulièrement «
chambrer » alors que j’habite en
Europe Centrale depuis plus de
dix ans…
Nîmes te manque t-elle ?
Quand en hiver la nuit tombe
en milieu d’après midi et que le
thermomètre affiche un petit
moins 25 degrés, Nîmes me
manque alors cruellement…
Tu reviens à quelles occasions ?
Je reviens dès que je peux, pas
autant que je voudrais, pour voir
les miens qui me manquent en
toute occasion.
Propos recueillis par Jérôme Puechn
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 13
Reg' Arts
Une journée porte ouverte aux Arènes en 2010
proposée par les "Aficionados practicos"
Sur les sculptures d'Alain Taligrot
Rien que pour le geste
14 UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012
Reg' Arts
Alain Taligrot expose ses sculptures à la galerie Audrey Carbo, place d’Assas. Une à Nîmes pose un
regard admiratif sur cet artiste simple et doué dont la principale activité est de figer dans le bronze et
la céramique les femmes (souvent des danseuses) et les taureaux de combat.
«
Artiste sans concession, d’une suprême modestie,
et fort éloigné des basses spéculations » écrit Michel
Dansel, l’écrivain, dans la plaquette de présentation
des œuvres d’Alain Taligrot. C’est également un Nîmois
de la Croix de Fer né sous le signe du taureau. Un taureau
qui sculpte les fauves avec une grande force. Un taureau
qui le même âge que la féria de Nîmes. « Petit je garde un
souvenir particulier de la féria car j’avais pris un pétard
dans le visage. J’avais l’impression de saigner beaucoup»,
raconte pour témoignage cet petit bonhomme au crane
dégarni et aux cheveux longs sur la nuque.
Une famille nîmoise bien ordinaire
Des « Henri » pour références
Où voir les œuvres de Tali ?
Lorsque je tente de trouver des traces familiales de ce
talent, de ce don, Alain Taligrot ne sait pas me répondre.
Nous évoquons son frère restaurateur à Valleraugue
(Gard). Il m’explique que son père était négociant en vins
sur le boulevard Amiral Courbet. Enfin, il me parle de son
frère qui vit à Marseille tout comme le mien. De son fils
ou de sa fille, il n’attend rien car « ils en avaient marre de
devoir m’attendre finir mes travaux dans l’atelier ». Son
fils, Pablo, écrit certains textes de ses plaquettes.
Ma culture étant limitée, je vois dans ses œuvres exposées Malgré toute cette simplicité et cette modestie, vous
à la lumière d’un magnifique patio de la place d’Assas pouvez voir les œuvres d’Alain Taligrot dans le monde
un clin d’œil à Botero et à Giacometti. Alain Taligrot entier : sur le port de Copenhague, dans le jardin de
fait chanter ses œuvres autrement bien sûr. Sur un air Bernard Buffet à Montmartre, chez un ancien PDG de
de « Je m’appelle Henri » de Daniel
l’ORTF…à Nîmes les pièces sont
Balavoine, il me cite ses références
visibles au Cheval Blanc chez Michel
personnelles : Henri Laurens, Henri
Hermet, au restaurant du Lisita et à
Moore et Henri Matisse. Sa première "le picador Fritero était un l’Impérator. Le plus bel écrin demeure
émotion, Alain Taligrot la ressent avec
la galerie d’Audrey Carbo sur la place
camarade de classe"
Mayol. « J’aime la femme et la danse »,
d’Assas. Vous verrez quelques une
dit-il. Autre influence : la corrida. « Le
des 1 000 pièces qui sont sortis de
picador Fritero était un camarade de
son four à 1200 degrés et de son
classe au Mont Duplan», lance l’artiste.
atelier de 90 m2.
Son père l’amenait voir des corridas aux arènes. « Le
fameux 6ème taureau gratuit pour les nîmois ».
Il vous appartient comme moi de savoir aimer les belles
sculptures d’Alain Taligrot, « rien que pour le geste sans
vouloir le reste », dirait Florent Pagny.
Ses danseuses difformes
Les danseuses de Taligrot ne sont pas des canons de
féminité. « Massives, épaisses, infirmes d’elles-mêmes,
elles offrent leurs bras et leurs jambes difformes », nous
décrit une nouvelle fois la plaquette de présentation. La
beauté est ailleurs. Dans le geste. Dans un mouvement.
Une posture ou une attitude si bien reproduites par les
mains de son atelier de la rue du Cirque Romain. L’ancien
paysagiste s’est trouvé une belle reconversion lors d’un
retour salutaire à la campagne, « Dieulefit » le pays des
potiers dans la Drôme.
Jérôme Puech
Voir ses œuvres :
Galerie Audrey Carbo, place d’Assas à Nîmes
www.taligrot.com
UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012 15
Le Bamboo Beach
Plage du Grau du Roi
Samedi 30 juin
de 20h à 1h
DJ ROME fait sa Kitch
16 UNEÀNÎMES N°24 I juin 2012