effets a court et moyen termes de séances de musculation
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effets a court et moyen termes de séances de musculation
POULAIN P., LEYLEIRE J.-C., Laboratoire d’étude de la motricité humaine Lille II, 8 chemin Latéral, 59790 Ronchin. PERTUZON E., Laboratoire de physiologie neuro-musculaire Lille I, 59650 Villeneuve d'Ascq. EFFETS A COURT ET MOYEN TERMES DE SÉANCES DE MUSCULATION EXCENTRIQUE SUR LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DU MUSCLE SQUELETTIQUE HUMAIN INTRODUCTION L'analyse de certaines techniques sportives comme les sauts et les lancers en athlétisme ou le ski montre qu'il est important pour le sportif de résister à un écrasement préjudiciable au bon rendement du mouvement. Cette action est obtenue grâce à la mise en jeu d'un mode de contraction avec allongement appelée contraction anisométrique excentrique (EXCT). Les autres modes de contraction musculaire peuvent être soit isométrique (ISOM) quand Il n'y a pas de modification de la longueur musculaire, soit anisométrique concentrique (CONC) quand Il y a raccourcissement de la longueur du muscle. A chaque mode de contraction correspond un travail mécanique (voir tableau 1). TENSION (T) T=R T=R T=R TYPE DE CONTRACTION Concentrique Isométrique Excentrique FONCTION Accélération Fixation Décélération TRAVAIL MECANIQUE EXTERNE positif : W = F X D nul : W = F X # négatif : W = F X (-D) Tableau1: Classification des types de contractions et d'exercices W = travail en Joule F = Force de Newton D = Distance en mètre De façon traditionnelle, les méthodes d'entraînement de la force musculaire utilisent soit le mode EXCT et l'on parle alors de musculation «récessive», soit le mode CONC (musculation «dynamique»), soit la succession rapide des modes EXCT puis CONC (musculation «plyométrique» ou «réactive»), soit enfin le mode ISOM (musculation «statique»). Actuellement l'entraînement de la force (partant de l'analyse biomécanique de gestes sportifs comme en athlétisme ou en ski), privilégie les modes de contraction musculaire spécifiques à l'activité sportive. De ce fait les contenus des séances d'entraînement s'orientent de plus en plus vers l'utilisation de la musculation «récessive» et «plyométrique». Ces deux types de musculation ont en commun le mode de contraction EXCT. Il nous est apparu intéressant d'étudier les effets spécifiques, à court et moyen terme, d'un entraînement qui utilise de façon exclusive ce mode de contraction, sur les propriétés contractiles du muscle humain. Les propriétés contractiles comme la vitesse de raccourcissement musculaire (V), les forces de contraction (F) anisométrique concentrique et isométrique sont étudiées à partir des relations Force-Vitesse (F.V.) et couple-angle (C.A.). L'étude est réalisée sur les fléchisseurs du coude. On examinera les effets à court terme d'une séance de musculation sur la cinétique récupération des forces et de vitesse et les effets à moyen terme sur ces critères biomécaniques après un cycle de seize séances. Figure 1 : Dispositif ergométrique d'après Peauzon 1972. 1. TECHNIQUE ET PROTOCOLE DES ÉPREUVES-TESTS A. Techniques Le dispositif expérimental utilisé pour déterminer les relations F.V. et C.A. est celui mis au point par Cnockaert (1968) et Pertuzon (1972), (voir fig. n° 1). Un bâti fixé au sol (11) porte un équipage mobile autour d'un axe vertical. Cet axe porte : - un levier horizontal supportant une attelle de fixation de l'avant-bras (1) et un accéléromètre tangentiel, . - un levier portant des masses métalliques destinées à faire varier le moment d'inertie de l'ensemble mobile (8), - une poulie horizontale sur laquelle un câble permet d'exercer des couples au moyen de masses suspendues au câble par l'intermédiaire de poulies de renvoi (9). Une butée de sécurité (12) arrête les mouvements de flexion à un angle de 120°, compté à partir de l'extension complète du coude. Un dynamomètre, fixé sur le bâti et couplé à l'équipage mobile permet la mesure des couples statiques de flexion (7). Le sujet est fixé sur un siège réglable et sa posture générale est stabilisée. a) Angle de l'articulation (θ θ) en rad. Cet angle est mesuré au moyen d'un goniomètre potentiométrique. Ce signal est échantillonné par pas de 8.10-3 secondes. b) Vitesse angulaire (θ θ') en rad.x.sec-1 Elle est obtenue par différentiation du signal goniométrique après lissage de ce signal. c) Accélération angulaire (θ θ") en rad.x.sec-² Elle est calculée à partir de la mesure instantanée de l'accélération tangentielle à une distance de 2.10-1 m de l'articulation du coude et échantillonnée par pas de 8.10-3 sec. d) Calcul des variables musculaires La vitesse de raccourcissement (V) du biceps brachii considéré comme fléchisseur équivalent (F.E.) du coude (BOUISSET 1973) ainsi que la force (F) du fléchisseur équivalent sont calculées à partir des valeurs de θ, θ', θ". De plus ce calcul requiert pour chaque sujet la détermination préalable de la géométrie musculo-squeletique de l'articulation et du moment d'inertie (lm².kg) de l'avant-bras + équipage mobile. La vitesse V et la force F sont calculées au moyen des équations suivantes : où a = distance entre l'axe de rotation du coude et le point d'insertion du biceps brachii sur la crête bicipitale du radius (en mètre). b = distance entre l'axe de rotation du coude et le point d'insertion moyen au niveau de l'épaule (en mètre). e) Contrôle électromyographique Les épreuves de fatigue et les épreuves-tests sont effectuées sous contrôle électromyographique de surface du biceps brachii (BB), du brachio-radialis (BR) et du triceps brachii (TB). De plus ces électromyogrammes sont quantifiés par intégration. Ce contrôle a permis d'objectiver la fatigue développée au cours des épreuves de fatigue et de valider les mouvements tests. f) Enregistrements Les variables mécaniques et électromyographiques sont enregistrées au moyen d'un enregistreur MINGOGRAF 800 (bande passante de θ à 500 Hz). B) Protocole des épreuves tests A partir des épreuves tests, sont établies deux relations caractéristiques : - la relation force-vitesse instantanée des fléchisseurs du coude, au cours de mouvements volontaires et maximaux de flexion contre 5 inerties différentes. L'angle de départ du mouvement de flexion est de 30°. Un repos est accordé entre chaque contraction. - la relation couple-angle. Il a été demandé aux sujets de faire une contraction isométrique maximale de flexion à différents angles du coude (30, 45, 60, 75, 90, 105 et 120°). a) Epreuve de fatigue Pour examiner les effets à court terme d'une séance de musculation nous avons mené cette épreuve-test un jour avant la séance de musculation (J - 1), juste après cette séance (J0) et un et deux jours après cette séance (J + 1 et J + 2). b) Contrôle de l'entraînement Pour examiner les effets à moyen terme d'un cycle de musculation l'épreuve test a été effectuée avant entraînement et après 16 séances de musculation. Il. DESCRIPTION DES ENREGISTREMENTS 1) Contraction ISOM fig. (2.a) Le couple est calculé à partir de la déviation du tracé de C. Il atteint sa valeur maximale progressivement (70 à 80 % de Cmax sont obtenus en 140 m.sec et 100 % en 500 m.sec. Le tracé plat de θ atteste du caractère isométrique de la contraction. L'examen des EMG des BB,BR et TB permet de valider la contraction : EMG amples, réguliers pour les fléchisseurs. Les signaux du TB doivent être faibles. Figure 2 : Enregistrement des contractions musculaires a : contraction jsométrique ; b : contraction ansisométrique concentrique ; c : tracé du couple isométrique ; TB, BB, BR = EMG des triceps, biceps, brachio-radialis ; QBB, QBR = EMGi des biceps et brachio-radialis ; θ : déplacement angulaire en radian ; θ' : vitesse angulaire en radXsec-1 ; θ": accélération angulaire en radXsec -2. 2) Contraction anisométrlque concentrique fig. (2.b) La force est calculée, à partir de l'accélération du mouvement (tracé θ") et du déplacement θ, en utilisant les équations citées plus haut. La vitesse de raccourcissement est calculée à partir de la vitesse angulaire du mouvement θ' et du déplacement angulaire θ. Le mouvement est étudié pendant la phase de décroissance de la force, quand le niveau, d'excitation est maximum (EMG d’amplitude constante), c'est-à-dire entre les repères c et d de la figure 2b. Compte tenu de la géométrie musculosquelettique des fléchisseurs, Il apparaît un déphasage entre le moment où la force de l'accélération sont maximales. F max est obtenue avant θ"max. Le triceps montre une activité réduite. 3. Etude des relations Les modèles retenus dans chaque condition sont présentés sur la figure n°3. - Contraction isométrique : La relation C. A. (fig n° 3, a) se présente sous la forme d'une courbe à maximum, les couples les plus faibles sont développés pour les angles de 30° (grande longueur du muscle) et les couples maximaux pour un angle compris entre 75° et 105°. - Contraction anisométrique : La relation F.V. (fig. n° 3, b) montre une décroissance de la force, lorsque la vitesse de raccourcissement augmente. La vitesse de raccourcissement maximale (V0) est obtenue pour une force nulle, c'est-à-dire lors d'une contraction isométrique. Hill (1938) propose une équation qui décrit cette relation : (F + a)(V + b) = (F0+a) b (3) ou F0 représente la force de contraction isométrique maximale, F est la tension développée par le muscle, a et b sont des coefficients qui ont une dimension de force pour a et de vitesse pour b. Le terme (F0 + a) b est donc constant et la relation est une branche d'hyperbole. D'après l'équation (3), le maximum de puissance est obtenu pour : (TIHANYI et coll. 1982) F = V = (1 + F0)*0,5 - 1 a b a (4) De l'équation (4), on calculera les valeurs de force (FPmax) et de vitesse de raccourcissement VPmax) correspondantes à cette puissance, ainsi que la puissance maximale (Pmax). Figure 3: Relations caractéristiques des propriétés contractiles du muscle a : relation couple angle d'après Pertuzon 1972. b : relation Force-Vitesse et Puissance-Vitesse d'après Pertuzon 1972. III. EFFETS A MOYEN TERME D'UN CYCLE DE MUSCULATION EXCENTRIQUE A. Protocole d'entraînement 1) sujets : Trois sujets sportifs étudiants en EPS ont participé à l'expérimentation. Ce sont des athlètes de niveau régional dans des épreuves de sprint en athlétisme. Ils ne font plus d'entraînement de musculation des membres supérieurs, en dehors des séances prévues pour l'expérimentation. Les sujets continuent leur pratique sportive habituelle. Leurs caractéristiques sont présentées dans le tableau II. SUJETS DA KE HF TAILLE en cm. 183 175 178 MASSE en kg. 79,35 70,80 75 AGE SPECIALITES en années ATHLETIQUES 19,50 100 m. 19,50 100 m. 22,50 100 m. PERFORMANCES 11"3 10"9 11"5 Tableau II : Caractéristiques des sujets 2) Organisation de l'entraînement (fig, n° 4) Les propriétés mécaniques du muscle sont testées avant et après la période d'entraînement qui est de 4 semaines, à raison de 4 entraînements par semaine. La séance d'entraînement se compose de 8 séries de mouvements séparées de 3 minutes de récupération. Les charges sont présentées en pyramide (fig. n° 5). Pour chaque série, la charge représente un pourcentage de la charge maximale que le sujet peut redéposer au cours d'un mouvement régulier d'environ 2 secondes. La valeur de cette charge est recherchée au début des séances 1-5-9-13. 3) Description du mouvement Les sujets sont assis, aisselle en appui, bras à l'horizontale, avant-bras dans le prolongement de la ligne des épaules. La main est en semi-pronation. Les mouvements se déroulent de 120° à 30°, dans un plan vertical. Un aide positionne la masse puis le sujet la redépose. Le mouvement est régulier et dure environ 2 secondes. B) Résultats 1) Contraction isométrique : On constate (fig. n° 6) que l'entraînement améliore significativement les valeurs de couples maximaux, pour tous les angles testés de la relation C - A (P<0,01 ; Twilcoxon=4 ; N=21). Toutefois les gains ne sont pas identiques pour tous les angles : d'après les résultats de la figure n° 6a, on calcule les gains en couple pour chaque angle (6,b). Les gains les plus importants sont obtenus aux angles de 30° et 45°, c'est-à-dire aux angles qui correspondent aux grandes longueurs du muscle. Les écarts-type, pour les valeurs de couple, sont plus importants après entraînement. Cela correspondrait à une individualisation des effets de l'entraînement. 2) Contraction anisométrique-concentrique (fig. 7) L'équation de l'hyperbole, obtenue en ajustant les points de la relation à l'équation de Hill (1938), s'adapte bien aux points qui correspondent aux valeurs faibles et moyennes de la vitesse. Les valeurs maximales de force et vitesse rencontrés dans le mouvement sont inférieures aux valeurs extrapolées sur l'axe des abscisses et des ordonnées (F0 = Valeur de F pour V = 0 et V0 = valeur de V pour F = 0). Nous étudions les relations pour les valeurs réellement obtenues dans le mouvement. Figure 4 : Protocole général d'entraînement. S = Semaine T = Test C = Réajustement des charges de travail E = Entraînement Figure 5 : Séance d'entraînement Afin de comparer les résultats pour l’ensemble des sujets, la vitesse est normalisée par rapport à la longueur du F.E. à 75° et la force par rapport à la force maximale isométrique à 75°, calculée lors du premier test. L'entraînement excentrique conduit donc à améliorer les propriétés contractiles du muscle, en contraction isométrique et anisométrique concentrique. Le gain en contraction isométrique est toutefois supérieur à celui obtenu en contraction anisométrique. L'effet spécifique du travail excentrique se porte surtout sur les propriétés dynamiques, c'est-à-dire Vmax et Pmax (fig. n° 8). Cette dernière se trouve améliorée par une augmentation particulière de VPmax (33 %), qui compense ainsi une légère diminution de Fpmax (- 5,7 %). Figure 6 : Relation C.A. avant et après entraînement. a) en tiret-point : après entraînement en continu : avant entraînement b) gain en % par angle. Figure 7 : Relation F-V- maximale avant et après entraînement. en tiret point : relation après entraînement en continu : relation avant entraînement en pointillé : relation extrapolée. F : normalisée par rapport à Fo isométrique maximale à 75° du premier test V : normalisée par rapport à la longueur du muscle à 75°. Figure 8 : Propriétés contractiles du muscle en contraction anisométrique avant et après entraînement en haut : symbole vide avant entraînement, les valeurs extrêmes sont figurées sur les histogrammes. en bas : gain en pourcentage val AV - val AP val AV C. Discussion Après entraînement, l'augmentation de la force est classiquement attribuée ; d'une part à une augmentation de la masse contractile soit par hyperplasie soit par hypertrophie des fibres musculaires. D'autre part, à des modifications de la commande qui se traduisent par une transformation des UM et/ou à une meilleure organisation du recrutement des UM. Les résultats seront discutés par l'examen des effets de l'entraînement sur le niveau d'excitation ainsi que sur la vitesse de contraction. 1) EMGi et entraînement Le niveau global d'excitation est ici apprécié à partir de l'électromyogramme de surface. La quantification de l'EMG est réalisée à un angle de 75 degrés, lors de contractions isométriques. L'EMGi est fonction, entr'autres facteurs, de la fréquence de battements des UM, ainsi que du nombre d'UM mis en jeu lors de la contraction. Si l'on peut admettre qu'une UM atteint assez rapidement un fréquence de battements stable (MATON 1970) - (MATON-BOUISSET 1972), la variation de l'activité électrique du muscle, en contraction maximale, doit s'effectuer grâce à un mécanisme de recrutement spatial, s'accompagnant donc d'une augmentation concomitante du nombre d'UM active du muscle. Après entraînement, on peut s'attendre à ce que les fréquences maximales et/ou le nombre d'UM augmentent. Les résultats (tableau III) ne montrent qu'une très faible modification de l'EMGi en contraction maximale. On peut donc penser que cette modalité d'entraînement a eu pour effet une amélioration de la force contractile des UM et non une augmentation de la masse contractile. Le maintien, à sa valeur initiale, du périmètre du bras renforce cette hypothèse. On peut également supposer que l'entraînement a eu pour effet l'utilisation d'un plus grand nombre d'UM au cours du mouvement volontaire maximal. L'amélioration de la force après un entraînement excentrique de quatre semaines serait donc due soit à une amélioration des modalités de mise en jeu des éléments contractiles (RASCH et MOREHOUSE 1957), soit à un renforcement des liaisons actine-myosine (MORlTANI et DEVRIES 1979), soit à la possibilité d'utiliser davantage d'UM (SCHMIDTBLElCHER 1984) et d'augmenter ainsi le rapport entre la force maximale volontaire et la force maximale - résultant d'une stimulation intensive sur le nerf moteur lui-même (SCHMIDTBLElCHER et coll. 1978). EMGi max Périmètre du bras en m. AV 110,2 AP 114,3 DIFFERENCE EN % 3,7 ns .228 .228 0 Tableau III : Modification de EMGi et périmètre du bras après entraînement 2) Entraînement et vitesse de contraction (Vc) Vc correspond au temps mis pour développer un certain niveau de force, elle s'exprime en Newton x.sec-1 Compte tenu de la difficulté à apprécier le début du développement de la force et le début du palier atteint (fig. n° 2, a), la vitesse de contraction isométrique (Vc ISO) est calculée à partir des mesures de force et de temps qui séparent les moments où sont développés 20 % et 80 % de la force finalement atteinte. La vitesse de contraction anisométrique (Vc ANISO) est le quotient de la force maximale anisométrique par le temps mis pour l'atteindre. Les résultats de la figure n° 9 montrent que l'entraînement excentrique aboutit à une amélioration de Vc ISO (42 %) et Vc ANISO (18,35 %). Le calcul de Vc indique qu'elle dépend de plusieurs facteurs : - du niveau de force développée, - du temps de contraction. F est améliorée dans les deux modalités de contraction musculaire testées. En contraction ISO, le temps mis pour atteindre un même niveau de force est plus court après entraînement. En contraction ANISO, la vitesse de contraction augmente (18%) sous le double effet de l'augmentation de F (+ 5,9 %) et de la diminution du temps de contraction (7,2 %). La diminution du temps de contraction représente donc un facteur de l'amélioration des performances du muscle après entraînement. Il faut également considérer que la diminution du temps de contraction peut être due à une diminution de la compliance du muscle (WILKIE 1950). Le mécanisme de stockage restitution d'énergie s'en trouverait donc diminué. Figure 9 : Vitesses de contraction isométrique et anisométrique avant et après entraînement. en pointillé : relation après entraînement en continu : relation avant entraînement Les écarts types sont présentés sur les relations. * * p < 0,01. Les vitesses sont exprimées en 103NXsec-2 IV. EFFETS A COURT TERME D'UWE SÉANCE DE MUSCULATION A) Protocole de fatigue Cinq sujets, de sexe masculin, âgés de 23 à 28 ans ont participé à l'expérimentation. L'épreuve de fatigue (J0) est décrite dans la (fig. n°10). L'épreuve est précédée de la détermination du couple maximum que développent les fléchisseurs du coude en EXCT pendant une durée de 3 secondes. Toutes les contractions suivantes sont développées à 80 % de ce couple. Le sujet doit alors exécuter des séries de 10 contractions d'une durée de 3 secondes séparées par un repos de 3 secondes. Entre chaque série de 10 contractions un repos d'une minute est accordé. Le sujet poursuit l'épreuve jusqu'à l'impossibilité d'exécuter une série de 4 contractions. Le temps de repos entre chaque série est progressivement diminué au prorata du nombre de contractions exécutées à chaque série. Ainsi Il a fallu 134 + 27 contractions, pour que les sujets soient fatigués. Les contractions sont développées entre les angles de 105 et 45 degrés et le retour à l'angle de départ (105 degrés) est assuré par l'expérimentateur. Figure 10 : Aperçu synoptique de l'épreuve de fatigue RÉSULTATS 1) Contraction isométrique (fig. n° 11) On constate qu'après fatigue excentrique, la relation entre le couple isométrique maximal de flexion (C) et l'angle de l'articulation conserve dans tous les cas sa forme caractéristique (PERTUZON 1971). Cependant, on peut remarquer, quel que soit l'angle de l'articulation, une diminution du couple à J0 et J+1, suivie d'une récupération partielle à J+2. 2) Contraction anisométrlque concentrique Les valeurs, réellement développées au cours du mouvement, de Puissance maximale, de Force maximale et de vitesse de raccourcissement maximale sont obtenues en ajustant les points expérimentaux de l'équation Hill (1938). La puissance maximale (fig. n° 11 a) chute après l'épreuve de fatigue (- 30 % ) pour revenir en deux jours vers les valeurs initiales. La force maximale (fig. n° 11 b) ne retrouve pas sa valeur initiale après deux jours de repos. En effet, les pertes de force de 19,3 % et 18,4 % à J0 et J+1 sont encore à 14% à J+2. La vitesse (fig. N° 12c) revient vers les valeurs initiales plus rapidement. On assiste à une récupération en deux jours après J0. (- 7,4 % à J+2). Ainsi, Il semblerait que la récupération de la puissance s'opère plus par celle de la vitesse de raccourcissement que par celle de la force de contraction. Par ailleurs on remarque (fig. n° 12d) que les valeurs de Vpmax/Vmax ainsi que celles de Fpmax/Fmax varient avec la fatigue. Vpmax/Vmax est toujours supérieure à Fpmax/Fmax. Figure 11 : Relation Couple-Angle C normalisé par rapport au couple maximum isométrique à 75° développé à J-1 Le différentiel évolue également : si à J - 1, J + 1 et J + 2 Il est sensiblement le même (19 %), il se réduit à J0 (8 %). Ainsi, il apparaît que la puissance et la récupération de celle-ci s'obtiennent en priorité par des valeurs élevées de vitesse. Figure 12 : Evolution de P,F,V,VPmax/.Vmax et de FPmax/Fmax avant et après une séance de musculation excentrique. Légende : a) La puissance b) La force c) La vitesse d) VPmax/Vmax (hachuré) et Fpmax/Fmax (blanc) Explications dans le texte. C. DISCUSSION L'examen des résultats montre que le mode de fatigue EXCT n'est suivi d'aucune récupération à J+ 2 (que cela soit testé en contraction isométrique ou en contraction anisométrique concentrique. Il aurait vraisemblablement été souhaitable de poursuivre les épreuves tests jusqu'à J+5. ARMSTRONG et coll. (1983) ont montré que le mode EXCT était suivi par une augmentation du nombre de cellule macrophages dans le muscle jusqu'au cinquième jour après l'épreuve de fatigue. 1) Récupération de Fmax, Vmaz .t de Pmax Pmax est récupéré plus rapidement par le biais de la vitesse de raccourcissement que par le biais de la force. Or Vmax est atteinte au cours des mouvements exécutés contre des inerties faibles. Dans ces conditions, les vitesses maximales de raccourcissement peuvent être atteintes même si les capacités contractiles du muscle sont diminuées par la fatigue. La récupération de Vmax peut, par conséquent, s'effectuer rapidement. Par contre la diminution des capacités contractiles du muscle se répercute plus fortement et plus longtemps sur Fmax, mesurée pour des mouvements exécutés contre les inerties les plus fortes. D'ailleurs cette récupération lente de Fmax est vérifiée par l'examen de la fig. n° 13 où l'on constate que, même à J + 2, le niveau de commande (EMGi) n'est pas totalement récupéré. 2) Fatigue et commande motrice La diminution de la force après fatigue peut être due à une diminution transitoire des capacités contractiles du muscle mais également à une diminution transitoire de la commande motrice. Il semble qu'une inhibition de la commande motrice pourrait être liée au caractère douloureux de l'effort à J0, J+1 et J+2. En effet, ces conséquences nociceptives de l'épreuve de fatigue ont entraîné chez les sujets une altération de la position de repos articulaire et une chute des valeurs du couple (voir fig. n° 13). La chute des valeurs du couple semble être également liée à la valeur de la vitesse de contraction. Celle-ci a été calculée lors d'une contraction maximale isométrique à 75 degrés, à partir des valeurs de 20 et 80 % de la force maximale (∆F) et des valeurs des temps correspondants (∆T). On s'aperçoit (voir tableau IV) que la vitesse de contraction chute à J0 et J + 1 pour revenir vers les valeurs initiales à J + 2. Figure 13 : Relation EMGi-Couple, après épreuve de fatigue C maximal de flexion à 75 degrés EMGi en kilostatique-seconde. Les écarts-type sont figurés de part et d'autre des valeurs. CONCLUSION Il apparaît qu'après une séance de musculation excentrique qui aboutit à une fatigue importante (incapacité à produire un travail supérieur à 25 % du travail initial), la récupération des propriétés mécaniques n'est pas accomplie 48 heures après la séance. Le retour lent des capacités motrices du muscle, tant en mode de contraction isométrique qu'en mode de contraction dynamique, impose des périodes de récupération longues, de façon à récupérer les capacités de force contractile, voire les surcompenser. Cette modalité de travail peut en effet entraîner une désorganisation de l'appareil contractile du muscle, pendant une période de 5 jours suivant la séance (ARMSTRONG et coll. 1983). J-1 x s 16.05 3.27 J0 8.35 3.33 J+1 7.58 3.31 J+2 17.11 7.76 Tableau IV : Valeurs des vitesses de contraction (∆F/∆t) exprimées en Ns -1.103 avant et après fatigue EXCT On note cependant qu'après une séance ou un cycle d'entraînement, la puissance maximale instantanée est récupérée ou améliorée, malgré une baisse de Fpmax, grâce à un retour rapide ou une augmentation de Vpmax. Cette modalité d'entraînement aboutit à un gain des propriétés mécaniques du muscle et plus particulièrement sur les vitesses maximales de raccourcissement et de contraction. Il faut donc tenir compte de la cinétique de la récupération des propriétés mécaniques du muscle dans l'organisation des cycles de musculation excentrique. On augmentera progressivement les charges d'entraînement en prenant des intervalles de récupération longs, jusqu'à 5 jours après des séances qui conduisent à l'épuisement. On prendra des intervalles plus courts (2 jours) avec maintien des charges d'entraînement pendant plusieurs séances lorsque celles-ci sont d'intensité modérée (fig. n° 14). Des résultats constatés, il convient également de remarquer que les effets d'une séance de musculation sont différés, les capacités de force de contraction sont récupérées plus lentement que les capacités de vitesse de contraction et de raccourcissement. Cela permet de penser que les mécanismes nerveux (recrutement des UM) sont plus susceptibles d'amélioration que d'autres facteurs déterminants de la force de contraction (masse musculaire, réserves énergétiques...) il a pu être montré par ailleurs que les vitesses de raccourcissement et de contraction, ainsi que les forces isométrique et anisométrique se développent et se récupèrent plus rapidement après travail isométrique, qu'après travail excentrique (LYLEIRE 1985 - POULAIN 1985). Ces résultats permettent de penser que la combinaison d'exercices isométriques et excentriques devrait procurer des gains encore plus importants des propriétés mécaniques dynamiques du muscle. Figure14 : Schématisation des effets de l'entraînement en fonction de l'intensité, ainsi que de l'intervalle entre les séances (d'après MATVEEV 1983). De haut en bas : - intervalles longs entre les séances et charges d'entraînement croissantes ; - intervalles moyens entre les séances et charges d'entraînement constantes ; - intervalles courts entre les séances et charges d'entraînement décroissantes. Après entraînement isométrique, le gain de force est non seulement plus important, mais encore il y a spécificité de l'angle d'entraînement sur les effets obtenus (ZACIORSKI et RAJCIN (1982) - THEPAULT - MATHIEU (1985)). Considérant le geste sportif, Il faudrait peut-être proposer un travail isométrique, combiné à un travail excentrique. Le travail isométrique serait effectué, d'une part aux angles du début du mouvement, d'autre part aux angles pour lesquels le muscle passe d'une contraction excentrique à une contraction concentrique. Les cinétiques de récupération différentes, pour les deux modalités de contraction musculaire imposeraient d'ajuster le rythme de succession des séances en fonction de la nature du travail musculaire. 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