prud`hommes cour de cassation

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prud`hommes cour de cassation
SOC.
CF
PRUD'HOMMES
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 mars 2012
Cassation partielle
M. LACABARATS, président
Arrêt no 936 FS-D
Pourvoi no T 11-11.307
REPUBLIQUE FRANCAISE
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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu
l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par Mme Yvonne Morissette,
domiciliée 16 rue des Veaux, 67000 Strasbourg,
contre l'arrêt rendu le 18 mai 2010 par la cour d'appel de Colmar
(chambre sociale - section B), dans le litige l'opposant à la société UGC ciné
cité, société par actions simplifiée, dont le siège est 25 route du Rhin, 67100
Strasbourg cedex,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux
moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du
code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 février 2012,
où étaient présents : M. Lacabarats, président, M. Frouin, conseiller
rapporteur, Mme Mazars, conseiller doyen, MM. Bailly, Blatman, Béraud,
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Linden, Mme Goasguen, M. Huglo, conseillers, Mme Grivel,
Mme Pécaut-Rivolier, M. Flores, conseillers référendaires, M. Weissmann,
avocat général référendaire, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Frouin, conseiller, les observations de la
SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de Mme Morissette, de
Me Le Prado, avocat de la société UGC ciné cité, l’avis de M. Weissmann,
avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la
loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme Morissette, engagée
à compter du 1er juillet 1975 en qualité d’agent d’accueil par la société UGC,
a été licenciée pour faute professionnelle, le 29 novembre 2006 ; qu’elle a
saisi la juridiction prud’homale pour faire juger que son licenciement n’était
pas fondé, comme consécutif à sa participation à un mouvement de grève,
et pour demander le paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l’arrêt de la débouter de sa
demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement en raison
du lien entre le licenciement et l’exercice de son droit de grève et à
condamner l’employeur à lui verser une somme à titre de dommages-intérêts
alors, selon le moyen :
1o/ que l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture
du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ; que tout
licenciement prononcé en absence de faute lourde est nul de plein droit ; que
lorsqu'un salarié allègue que la rupture du contrat de travail est intervenue en
raison de sa participation à un mouvement de grève, il appartient à
l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs
étrangers à l'exercice normal du droit de grève ; que pour refuser de faire
droit à la demande de Mme Morissette qui invoquait la nullité de son
licenciement en raison du lien avec l’exercice du droit de grève, la cour
d’appel a retenu que d’une part que «si la salariée fait état de ce que sa
participation à une réunion le 14 novembre 2006 au cours de laquelle aurait
été constaté que les revendications des salariés n'étaient pas satisfaites, elle
ne démontre pas davantage que son licenciement est consécutif à l'exercice
de ses droits fondamentaux», et d’autre part que «si la salariée soutient par
cette lettre résume la problématique qui va conduire à la grève, elle ne
démontre toutefois pas le lien entre le licenciement et la grève» ; qu’en
statuant par de tels motifs, la cour d’appel a fait peser la charge de la preuve
sur la salariée en violation des articles 1315 du code civil et L. 2511-1 du
code du travail ;
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2o/ qu’il appartient aux juges de rechercher au-delà des
énonciations de la lettre de licenciement quelle est la véritable cause de la
rupture ; qu’en se fondant sur la seule considération que la lettre de
licenciement ne fait ni expressément mention, ni la moindre allusion à la
participation de Mme Morissette à la grève, ce qui n’était pas de nature à
exclure que cette participation en soit la cause, la cour d’appel qui a refusé
de rechercher le lien avec la grève n’a pas justifié sa décision au regard de
l’article L. 2511-1 du code du travail ;
Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés et
par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui
étaient soumis, que la salariée remettait en cause de manière systématique
les consignes de l’encadrement et les procédures de travail mises en place
qu’elle ne respectait pas toujours, dénigrait l’équipe de direction en termes
injurieux, et adoptait de manière régulière un comportement agressif en
créant un climat de tension permanent, la cour d’appel a fait ressortir que le
licenciement était justifié par des motifs étrangers à sa participation à un
mouvement de grève ;
Et attendu que, contrairement aux énonciations du second grief
du moyen qui manque en fait, la cour d’appel a constaté que les motifs
énoncés dans la lettre de licenciement constituaient la véritable cause du
licenciement ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu le principe d’égalité de traitement ;
Attendu que la seule différence de catégorie professionnelle ne
saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence
de traitement, résultant d'un accord collectif, entre les salariés placés dans
une situation identique au regard dudit avantage, cette différence devant
reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement
la réalité et la pertinence ; que repose sur une raison objective et pertinente
la stipulation d'un accord collectif qui fonde une différence de traitement sur
une différence de catégorie professionnelle , dès lors que cette différence de
traitement a pour objet ou pour but de prendre en compte les spécificités de
la situation des salariés relevant d'une catégorie déterminée, tenant
notamment aux conditions d'exercice des fonctions, à l'évolution de carrière
ou aux modalités de rémunération ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de
rappels d’indemnité compensatrice de préavis et d’indemnité de licenciement
fondée sur la rupture d’égalité de traitement entre les cadres et les
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non-cadres, l’arrêt retient que la nature de l'emploi correspondant au statut
de cadre dont l'accès est conditionné par des connaissances professionnelles
spécifiques, des diplômes, ou de l'expérience acquise, ainsi que les
responsabilités confiées auxdits cadres avec la charge nerveuse qu'elles
impliquent caractérisent l'élément objectif justifiant une différence de
traitement entre Mme Morissette, non cadre, et les cadres de la société UGC
ciné cité, tant en ce qui concerne la durée du préavis que pour les modalités
de calcul de l'indemnité de licenciement ;
Qu’en se déterminant ainsi, en se fondant sur des éléments qui
permettaient seulement de définir l’appartenance à la catégorie des cadres,
la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne les
demandes à titre d’indemnité de préavis et congés payés afférents, et
d’indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 18 mai 2010, entre les parties,
par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause
et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être
fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société UGC ciné cité aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à
payer la somme de 2 500 euros à Mme Morissette ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de
cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la
suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et
prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux
mille douze.
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MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux
Conseils pour Mme Morissette.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Mme MORISSETTE de
sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement en raison
du lien entre son licenciement et l’exercice de son droit de grève, et à la
condamnation de l’employeur à lui verser 60 000 euros de dommages et
intérêts à titre de réparation.
AUX MOTIFS QUE la lettre datée du 29 novembre 2006 par laquelle la
société UGC Ciné Cité a notifié à Mme Yvonne MORISSETTE son
licenciement est libellée dans les termes suivants : "Le lundi 6 novembre
dernier, en raison de votre attitude énervée et de mauvaise humeur à l'égard
de nos clients, je vous ai demandé d'accueillir nos clients en respectant les
standards d'accueil en vigueur dans notre société. Vous vous êtes tournée
vers moi et m'avez traité de « con ». D’une manière générale, vous faites
preuve d'un comportement négatif dans l'exercice de vos fonctions, en
remettant en cause de manière systématique les consignes qui vous sont
données par votre hiérarchie et en dénigrant systématiquement votre
encadrement. Aussi je vous ai convoquée le 24 novembre 2006 à un entretien
préalable à votre licenciement pour fautes professionnelles. Suite à cet
entretien, je vous informe que nous sommes contraints de mettre un terme
à votre contrat de travail et la présente lettre constitue la notification de votre
licenciement pour fautes professionnelles, avec effet au 1er décembre 2006.
Compte-tenu de la durée de votre préavis, fixée à deux mois par la
Convention Collective en vigueur, votre contrat de travail expirera le 31
janvier 2007 au soir. Toutefois, je vous informe que vous êtes dispensée
d'effectuer votre préavis qui vous sera néanmoins intégralement réglé sous
forme d'indemnité compensatrice. A compter du 31 janvier 2007, vous
voudrez bien nous contacter (03.90.41.26.50) afin de convenir d'un
rendez-vous pour venir retirer, contre reçus, le solde de tout compte, votre
certificat de travail ainsi que votre attestation ASSEDIC vous pouvez
bénéficier des droits acquis au titre du Droit Individuel à la Formation (DIF),
soit 55 heures à ce jour, sous réserve d’en faire la demande avant la fin de
votre préavis " ; Mme Yvonne MORISSETTE invoque la nullité de son
licenciement en application des dispositions de 1'article L.2511-1 du Code du
travail en vertu desquelles, l'exercice du droit de grève ne peut justifier la
rupture du contrat de travail sauf faute lourde imputable au salarié et, d'autre
part, tout licenciement prononcé le l'absence de faute lourde est nul de plein
droit ; Mme Yvonne MORISSETTE soutient en premier lieu que son
licenciement est consécutif à sa participation à un mouvement de grève au
sein de l'entreprise et qu'il est dès lors nul, en ce qu'il est intervenu en
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réaction à la mise en oeuvre de ses droits fondamentaux et en l'absence de
faute lourde ; L'examen de la lettre de licenciement révèle qu'elle ne fait ni
expressément mention de la participation de Mme Yvonne MORISSETTE à
un mouvement de grève ni même la moindre allusion ; Les griefs relatifs au
comportement négatif dans l'exercice des fonctions, la remise en cause
systématique des consignes et le dénigrement systématique de
l'encadrement ne peuvent être considérés comme étant en eux-mêmes en
relation avec la grève à laquelle a participé la salariée ; En effet, ainsi que
l'ont relevé les premiers juges, il résulte des attestations produites par
L'employeur, soit celles établies par M. Adrien THIEL, responsable
d'exploitation, Mme Valérie HERZOG, chef d'équipe accueil, M. HELLER,
opérateur projectionniste, Mme Anne CLESSIENNE, agent d'accueil4eme
degré, Mme ELMIR, agent 3ème degré et M. Maxime VAUCOULON, chef
d'équipe accueil adjoint, que Mme Yvonne MORISSETTE créait un climat de
tension permanent, prenait à partie les nouveaux employés, incitait ses
collègues à ne pas respecter les nouvelles consignes, avait un comportement
agressif et systématiquement négatif à l'encontre des décisions de la
direction, critiquait systématiquement les procédures de travail mises en place
ainsi que la gestion pratiquée par la direction ; Si la salariée fait état de ce
que sa participation à une réunion le 14 Novembre 2006 au cours de laquelle
aurait été constaté que les revendications des salariés n'étaient pas
satisfaites, elle ne démontre pas davantage que son licenciement est
consécutif à l'exercice de ses droits fondamentaux ; Il en est de même de la
lettre adressée par Mme Yvonne MORISSETTE à l'employeur le 30 octobre
2006, laquelle outrepasse sa liberté d'expression en ce qu'elle contient les
termes suivants déjà relevés par les premiers juges: " ... je ferai valoir la
brutalité avec laquelle la direction de Strasbourg traite ses salariés, dont les
plus anciens en particulier ... Je préciserai cependant que M. CAZAU ne dit
pas la vérité: "c'est une attitude habituelle chez lui pour arriver à ses fins ...
Mais ce qui est plus grave encore, c'est que la date de la note du 18 février
signée par les représentants du personnel a été modifiée à la main. Un
maquillage pour avoir nécessairement raison, et ce même en usant du
mensonge ... Il y a un malaise réel dans le management de la direction de
Strasbourg. Aucune discussion n'est possible. Il nous faut constamment subir,
endosser et supporter ... " ; Si la salariée soutient par cette lettre résume la
problématique qui va conduire à la grève, elle ne démontre toutefois pas le
lien entre le licenciement et la grève ; Ainsi que Mme Yvonne MORISSETTE
n'établit pas le bien fondé de sa demande tendant à la nullité de son
licenciement pour ce motif.
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, selon la lettre de
licenciement du 29 novembre 2006, il est reproché à Mme MORISSETTE les
fautes professionnelles suivantes : - d'avoir le 6 novembre 2006, traité de
"con" M. CAZAU, directeur de CINE CITE STRASBOURG, qui lui avait
demandé, en raison de l'attitude énervée et de mauvaise humeur de la
salariée à l'égard de la clientèle, de respecter les standards d'accueil en
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vigueur dans la société ; - d'une manière générale, d'avoir fait preuve d'un
comportement négatif dans l'exercice de ses fonctions, en remettant en
cause, de manière systématique, les consignes données par sa hiérarchie et
en dénigrant systématiquement son encadrement. La lettre adressée par
Mme MORISSETTE à M. Lionel MOREAU, directeur des ressources
humaines de la société UGC, pour se plaindre de la direction de Strasbourg
est datée du 30 octobre 2006, soit antérieure de moins de deux mois à la
convocation de la salariée à l'entretien préalable ; D'autre part, les
dispositions du code du travail qui interdisent qu'un seul fait fautif puisse
donner lieu, à lui seul, à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà
d'un délai de 2 mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance
ne s'opposent pas à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois
dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai ;
L'employeur peut ainsi se prévaloir à l'encontre de Mme MORISSETTE, des
termes utilisés par celle-ci dans la lettre qu'elle avait adressée le
13 mars 2006 à M. CAZAU et à Mme Sandrine MARIE, respectivement,
directeur et directrice adjointe ; Mme MORISSETTE conteste avoir traité son
directeur, M. Francis CAZAU, de "con" et en l'état des seules pièces versées
aux débats, la preuve formelle que la salariée ait proféré une telle injure n'est
pas rapportée ; Mais il n'en demeure pas moins que les griefs de
comportement négatif, de remise en cause des consignes et de dénigrement
de l'encadrement formulés à son encontre sont établis ; En effet, il ressort de
la lettre précitée du 13 mars 2006, que Mme MORISSETTE contestait les
ordres qui lui étaient donnés de tenir ou de ne pas tenir la caisse en janvier
et février 2006 ou de déposer des pièces dans un autre monnayeur, Mme
MORISSETTE dénonçant et soulignant l'absence "d'esprit sain et honnête"
des challenges organisés, l'autoritarisme des agents et leur manque de
respect des contrats de travail, l'indélicatesse et le manque de tact de
certains des agents, et Mme MORISSETTE ajoutant que "si après cette lettre,
il s'avérait que la Direction de Strasbourg ne prête pas attention à ces
critiques à l'égard de ces agents, je me verrai dans l'obligation d'informer la
Direction de Paris de ces faits et dires inconvenants dans un milieu de
travail" ; En réponse à une demande écrite de M. CAZAU concernant la prise
des congés d'été, faite le 4 septembre 2006 à Mme MORISSETTE, celle-ci
adressait le 30 octobre 2006 un long courrier à la Direction des Ressources
Humaines du groupe UGC qui contient des propos malveillants, voire
injurieux et en tous cas des critiques excessives à l'égard des membres de
la direction de Strasbourg et qui sont constitutifs d'un abus de la liberté
d'expression, notamment par l'utilisation des termes suivants : "Si je vous
envoie un courrier, c'est afin d'illustrer l'entêtement de l'encadrement à
disposer de nos deux jours de repos ... ... En second lieu, je ferai valoir la
brutalité avec laquelle la direction de Strasbourg traite ses salariés, dont les
plus anciens en particulier . ... lIs disposent de nos jours de repos comme bon
leur semble, et ils nous les rendent ensuite comme bon leur semble ... ... On
a même forcé deux collègues (prêtes à témoigner) à signer pour des périodes
de vacances posées et imposées par la direction ... ... . Je préciserai que M.
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CAZAU ne dit pas la vérité. C'est une attitude habituelle chez lui pour arriver
à ses fins ... Mais ce qui est plus grave encore, c'est que la date de la note du
18 février signée par les représentants du personnel a été modifiée à la
main... Un maquillage pour avoir nécessairement raison, et ce même en
usant du mensonge ... ... Il y a un malaise réel dans le management de la
direction de Strasbourg. Aucune discussion n'est possible. Il nous faut
constamment subir, endosser et supporter ... Si la présence de Mme
MORISSETTE pendant plus de 30 ans dans l'entreprise a justement conduit
l'employeur à ne pas se prévaloir de la faute grave à l'encontre de cette
salariée, cette ancienneté n'autorisait pas pour autant Mme MORISSETTE à
dénigrer son supérieur hiérarchique M. CAZAU auprès de la Direction des
Ressources Humaines en termes nettement injurieux et diffamatoires
(entêtement, brutalité, mensonge, falsification) et qui n'ont plus rien à voir
avec une revendication salariale ou une action syndicale normales. M. THIEL
Adrien, responsable d'exploitation, Mme Valérie HERZOG, chef d'équipe
accueil, Mme Anne CLESSIENNE, agent d'accueil 4eme degré, M. Bernard
HELLER, opérateur projectionniste, ancien délégué du personnel et ancien
membre du comité d'entreprise, M. Maxime VAUCOULON, chef d'équipe
adjoint, Mme ELMIR Hanan, agent 3, ont indiqué dans les attestations qu'ils
ont établies chacun, que Mme MORISSETTE émettait des critiques
incessantes à l'encontre des procédures de travail mises en place et de la
gestion pratiquée par l'encadrement et la direction, que le dialogue avec elle
était impossible puisqu'elle réagissait par l'agressivité et la revendication et
qu'elle adoptait un comportement systématiquement négatif à l'encontre des
décisions de la direction et des membres de l'encadrement, qu'elle ne
respectait pas l'organisation telle que décidée en se plaçant parfois où elle le
souhaitait, en caisse ou en salle, sans en informer le chef d'équipe, que Mme
MORISSETTE cherchait à inciter le personnel à ne pas respecter les
nouveaux processus, créant un climat de tension permanent et prenant à
partie les employés nouvellement embauchés. Les attestations produites par
Mme MORISSETTE pour faire valoir sa ponctualité, sa gentillesse, ses
compétences et son dévouement au service de l'employeur n'enlèvent pas
leur crédibilité aux attestations adverses précitées et ne peuvent effacer les
propos révélateurs d'un comportement des plus négatifs et figurant dans ses
courriers des 13 mars 2006 et octobre 2006. Mme Yvonne MORISSETTE
n'est en mesure de se prévaloir d'aucun fait objectif qui permettrait de
présumer qu'elle a été victime d'une discrimination à raison de son âge ou de
la privation d'un avantage "places de cinéma". Aucun élément ne permet non
plus d'accréditer les assertions de la demanderesse suivant lesquelles son
licenciement serait fondé sur une raison économique, à savoir la volonté de
l'employeur de réduire le personnel par suite de la mise en place de bornes
de vente automatiques ou que son licenciement serait intervenu en raison de
sa participation à un mouvement de grève. En conséquence, il se vérifie que
le licenciement de la demanderesse est fondé sur une cause réelle et
sérieuse et il y a donc lieu de la débouter de l'intégralité de ses prétentions.
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ALORS QUE, l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du
contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ; que tout
licenciement prononcé en absence de faute lourde est nul de plein droit ; que
lorsqu'un salarié allègue que la rupture du contrat de travail est intervenue en
raison de sa participation à un mouvement de grève, il appartient à
l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs
étrangers à l'exercice normal du droit de grève ; que pour refuser de faire
droit à la demande de Mme MORISSETTE qui invoquait la nullité de son
licenciement en raison du lien avec l’exercice du droit de grève, la Cour
d’appel a retenu que d’une part que « si la salariée fait état de ce que sa
participation à une réunion le novembre 2006 au cours de laquelle aurait été
constaté que les revendications des salariés n'étaient pas satisfaites, elle ne
démontre pas davantage que son licenciement est consécutif à l'exercice de
ses droits fondamentaux », et d’autre part que « si la salariée soutient par
cette lettre résume la problématique qui va conduire à la grève, elle ne
démontre toutefois pas le lien entre le licenciement et la grève » ; qu’en
statuant par de tels motifs, la Cour d’appel a fait peser la charge de la preuve
sur la salariée en violation des articles 1315 du Code civil et L. 2511-1 du
Code du travail ;
ET ALORS QU’ il appartient aux juges de rechercher au-delà des
énonciations de la lettre de licenciement quelle est la véritable cause de la
rupture ; qu’en se fondant sur la seule considération que la lettre de
licenciement ne fait ni expressément mention, ni la moindre allusion à la
participation de Mme Yvonne MORISSETTE à la grève, ce qui n’était pas de
nature à exclure que cette participation en soit la cause, la Cour d’appel qui
a refusé de rechercher le lien avec la grève n’a pas justifié sa décision au
regard de l’article L 2511-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Mme MORISSETTE de
sa demande de rappels d’indemnité compensatrice de préavis et d’indemnité
de licenciement fondée sur la rupture d’égalité de traitement entre les cadres
et les noncadres
AUX MOTIFS QUE en cause d'appel Mme Yvonne MORISSETTE sollicite en
outre la condamnation de l'employeur à lui verser un montant de 13 87 € à
titre de reliquat de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi qu'une somme
de 138 € à titre d'indemnité compensatrice de congé payés sur préavis outre
un montant de 6014 € à titre de reliquat d'indemnité de licenciement en
faisant valoir qu'elle est fondée à obtenir les mêmes indemnités de
licenciement et de préavis que celles attribuées aux cadres, nonobstant la
circonstance qu'elle ne bénéficiait pas du statut cadre, en l'absence des
éléments objectifs justifiant cette différence de traitement ; Mme Yvonne
MORISSETTE invoque ainsi le principe d'égalité de traitement qui s'applique
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à toutes les relations de travail ; L'article L.3221-4 du Code du travail dispose
que: "Sont considérées comme ayant une valeur égale, les travaux qui
exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances
professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique
professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquises, des
responsabilités et de charge physique ou nerveuse" ; la nature de l'emploi
correspondant au statut de cadre dont l'accès est conditionné par des
connaissances professionnelles spécifiques, des diplômes, ou de l'expérience
acquise, ainsi que les responsabilités confiées auxdits cadres avec la charge
nerveuse qu'elles impliquent caractérisent l'élément objectif justifiant une
différence de traitement entre Mme Yvonne MORISSETTE, non cadre, et les
cadres de la société UGC Ciné Cité, tant en ce qui concerne la durée du
préavis que pour les modalités de calcul de l'indemnité de licenciement ; La
demande à ce titre de Mme Yvonne MORISSETTE doit être rejetée
ALORS QUE, la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en
elle même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de
traitement entre les salariés placés dans une situation identique au regard
dudit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives
dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu’en
l’espèce, pour refuser de faire droit aux demandes de la salariée, la Cour
d’appel a retenu que « la nature de l'emploi correspondant au statut de cadre
dont l'accès est conditionné par des connaissances professionnelles
spécifiques, des diplômes, ou de l'expérience acquise, ainsi que les
responsabilités confiées auxdits cadres avec la charge nerveuse qu'elles
impliquent caractérisent l'élément objectif justifiant une différence de
traitement entre Mme Yvonne MORISSETTE, non cadre, et les cadres de la
société UGC Ciné Cité, tant en ce qui concerne la durée du préavis que pour
les modalités de calcul de l'indemnité de licenciement » ; Qu’en statuant ainsi,
alors qu’aucun des éléments visés par la Cour d’appel n’était de nature à
constituer des éléments objectifs justifiant la différence de traitement, la Cour
d’appel violé le principe d'égalité de traitement entre les salariés