Lieu de vie
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Lieu de vie
Faculté de Médecine Hyacinthe BASTARAUD N° 2014AGUY0697 UNIVERSITE DES ANTILLES ET DE LA GUYANE 2013 Pratique de la cancérologie en milieu équatorial ; étude rétrospective sur trois années (2010-2013) THESE Présentée et soutenue publiquement à la Faculté de Médecine Hyacinthe BASTARAUD des Antilles et de la Guyane Et examinée par les Enseignants de la dite Faculté Le 03 avril 2014 Pour obtenir le grade de DOCTEUR EN MEDECINE Par LAURE BIANCO Né(e) le 04/01/1986 Au Port (974) Examinateurs de la thèse : Mr Pierre COUPPIE Professeur & président Mr Jean-Pierre DROZ Professeur & Directeur de thèse Mr Pascal BLANCHET Professeur Me Béatrice CENCIU Docteur en Médecine REMERCIEMENTS A notre président du jury Monsieur le Professeur Couppié Vous me faite l’honneur de présider ce jury et je vous en remercie tout particulièrement. Ayant été mon chef de service durant ce stage à l’hôpital de jour, merci pour votre disponibilité constante et votre attention ; Jamais je n’ai rencontré un chef de pôle si investi et accessible, grâce à qui tous les projets sont réalisables. A Monsieur le Doyen, membre du jury Monsieur le Professeur Pascal Blanchet Vous me faites l’honneur de participer à ce jury. Sachez que je suis reconnaissant à la faculté dont vous êtes le Doyen de la formation qu’elle me donne au cours de mon internant de médecine Générale. Soyez assuré de ma sincère reconnaissance et de mon profond respect. A mon Directeur de thèse et membre du jury Monsieur le Professeur Jean-Pierre Droz Un simple merci ne suffirait pas, votre sagesse et votre expérience m’ont permis d’avancer sereinement tout au long de ce travail ; cette thèse est le fruit d’un travail d’équipe entre une élève et son mentor, au-delà de cette étude scientifique, j’ai appris à chercher, trier, lire, synthétiser et même à écrire, mais j’ai surtout appris à me faire confiance et à aimer la Guyane autrement. A Madame le Docteur Béatrice Cenciu, membre du jury Vous m’avez montré la prise en charge des patients atteints de cancer avec grande compétence et grande gentillesse. J’ai beaucoup appris à votre contact. Ensuite, je tiens à remercier toutes les personnes qui ont suivi de près ou de loin les patients inclus dans ce recueil de données durant ces trois dernières années. Elles se sont impliquées dans le développement et le bon fonctionnement de l’hôpital de jour depuis sa restructuration en 2009. Ainsi, je pense au Dr Béatrice CENCIU, qui s’est formée spécialement en oncologie médicale pour pouvoir assurer son rôle de praticien hospitalier de l’hôpital de jour du Centre Hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne. Son investissement et sa disponibilité m’ont permis de ne jamais me perdre dans le dédale des histoires cliniques et des dossiers ! Merci également aux Dr Olivier LABORDE, Dr Ghassan ESTEPHAN, Dr Thierry BASSET, Dr Tania VAZ, Dr Myriam EL GUEDJ, Dr Mélanie CALVEZ, Drs Thomas et Olivia CREPEAU, Dr Stéphane GONON, Pr Daniel JEANBOURQUIN, pour leur présence aux RCP et leur prise en charge spécialisée. Par la suite, merci au Dr Sophie EDOUARD pour son intérêt porté à ce travail et sa présence récente au sein de l’hôpital de jour. Sans une équipe mobile de soins palliatifs et une équipe paramédicale bien formée, ce service n’aurait pas pu se développer si bien. De même, je remercie Mme Elisabeth PION, assistante sociale, Mme Josiane VILDEUIL, secrétaire, pour leur accueil si chaleureux et leur soutien. Mais surtout, je remercie infiniment, le Dr Jérôme FAYETTE, le Pr Pierre COUPPIE et le Pr Jean-Pierre DROZ pour leur travail colossal mené dans cet hôpital, avec tous les niveaux de difficultés que cela implique : administratif, médical, organisationnel...etc. Grâce à eux, les patients guyanais bénéficient d’une prise en charge identique à celle des patients du Centre Léon Bérard de Lyon, sans perte de chance. Enfin, je tiens à remercier tous mes proches qui m’ont supportée durant ces moments d’angoisse et de stress, mais surtout qui n’ont jamais douté de moi et m’ont soutenue contre vents et marées malgré les milliers de kilomètres qui nous séparent. Merci à Annick et Raphaël BIANCO pour m’avoir permis d’être ici aujourd’hui, cette thèse est VOTRE réussite ! Merci à Quentin BIANCO, Célia ARNAUD, Hélène DEVAMBEZ, Maelle HENNION, Delphine POINTAIRE, Bettina CHENESSEAU, Vanessa CINGALA …pour votre soutien et vos instants de dérision qui m’ont donné l’inspiration, le recul et la vision passionnante de ce futur métier qui est le nôtre. Donc, à tous, comme on dit en Guyane : merci (français). gan tangui fi you yé (aloukou) ipok manai (wayana) grémési (créole guyanais) mési (créole haïtien) thank you (anglais – Guyanien, Surinamais) obrigado (portugais – Brésilien) ua tsaug (H'mong) Le professeur Jean-Pierre Droz souhaite à l’occasion de ce travail remercier un certain nombre d’acteurs importants de son activité en Guyane. A Cayenne il remercie d’abord Monsieur Pierre Pauchard, directeur du Centre Hospitalier Andrée Rosemon jusqu’en juin 2013. C’est une étroite collaboration et une complicité amicale qui ont permis de monter ce programme de travail. Monsieur Philippe Damie, directeur de l’ARS jusqu’en avril 2013, a été un acteur bienveillant. La complicité et le travail en commun ont été constants avec le docteur Bruno Provost, de l’ARS, et continue d’être amical. Il ne doute pas que l’accueil bienveillant de Monsieur Dominique Delpech, nouveau directeur du CHAR et de Monsieur Christian Meurin, nouveau directeur de l’ARS, préluderont à la poursuite de ce travail. Il remercie aussi de leur écoute et de leur amicale aide le Dr Alain Bouix, Mme le Dr J Plenet, et Mr T Roué du Registre du Cancer de Guyane, le Dr Jean-Luc Deshayes et Mr Yves Bhagooa de l’AGEDOC, le Dr Laurent Dejault, président du Réseau ONCOGUYANE. Merci au Dr Yves Ho Tchou Liong, président du Conseil de l’ordre des médecins de Guyane, de l’avoir accueilli parmi eux. Enfin merci au professeur Pascal Blanchet, Doyen de la Faculté de Médecine des Antilles-Guyane de l’avoir accueilli comme enseignant, en particulier dans le cadre du DCEM1. Dans le cadre plus précisément hospitalier, il remercie le Dr Béatrice Cenciu, PH de l’Hôpital de Jour sans qui rien n’aurait été possible. Elle a assuré souvent seule la continuité des soins aux malades dans les moments de pires difficultés. Qu’elle en soit sincèrement remerciée et il l’espère récompensée. Mais aussi merci aux internes qui depuis 3 ans maintenant travaillent dans le service avec beaucoup de compétence et de curiosité. Merci aux infirmières et aux aides-soignantes de l’Hôpital de Jour, aux petits soins pour les patients. Elles se sont bien adaptées à l’organisation mise en place et en particulier à la consultation d’annonce. Merci aux cadres infirmiers successifs, à madame Josiane Vildeuil (secrétaire), dont nous demandons et demanderons toujours plus (dans certaines limites !), à madame Elisabeth Pion (assistante sociale) dont l’énergie soulève des montagnes (pas toutes !). Merci aux collègues médecins et chirurgiens, et ils sont nombreux (voir la liste des invités à la RCP !) et ne peuvent pas être tous nommés, mais tout particulièrement les pionniers de cette interaction : le Dr Ghassan Estéphan (mais oui ! on t’aime !), le Dr Olivier Laborde (mais oui ! on adore te brusquer !), le Dr Olivia Crépeau-Boespflug et son équipe de l’Equipe Mobile de soins palliatifs, le Dr Stephan Gonon de l’HAD de Guyane et son team. Merci aux anatomopathologistes tout juste débarqués du Poitou-Charente, les Drs Martine et Sylvain Labbé. Merci au Professeur Daniel Jeanbourquin à qui est demandé l’impossible…et il le fait ! Merci à Mmes Marie-Lise Brucker et Anne-Marie Simon qui amènent une brise de rigueur dans la qualité de prise en charge des patients. Merci au Dr Michel Salle pour rappeler les terres brondillantes. Mais surtout il veut remercier le Professeur Pierre Couppié, un ami, un petit frère, dont la constance de caractère (dans la gentillesse !) est un sujet permanent d’étonnement et dont les capacités de travail sont toujours impressionnantes. Merci aux collègues de Kourou et de Saint-Laurent du Maroni avec lesquels les échanges sont amicaux et fructueux. En souhaitant qu’ils s’étendent avec d’autres challenges. Au Centre Léon-Bérard, à Lyon, il remercie d’abord le Professeur Thierry Philip, directeur jusque fin 2010 pour lui avoir proposé de relever ce défi…sans que nous sachions combien il était passionnant et maintenant il se poursuit avec le professeur Sylvie Négrier, nouveau directeur. Merci à Jérôme Fayette, son binôme pour les missions, pour son enthousiasme dans la thérapeutique en cancérologie et bientôt Christelle de la Fouchardière qui va se joindre à eux. Merci aux collègues médecins qui ont un rôle fondamental dans ce travail, les Drs Séverine Racadot (Radiothérapie), Pierre Méeus, Frédéric Beurrier, Philippe Zrounba (chirurgiens). Merci à Dalila Haoues qui assure la majorité du secrétariat, les secrétaires des différents médecins, les assistantes sociales qui sont la cheville ouvrière de la filière de soins. Il a une pensée particulière pour les aides-soignantes du service Papillon qui bichonnent les patients de Guyane, et les infirmières des différents services (en particulier la Curiethérapie). Cette liste est, à y regarder de près, impressionnante. Mais elle montre combien la prise en charge des patients de Guyane atteints de cancer implique d’acteurs, chacun étant indispensables. Enfin une pensée particulière de gratitude pour les patients de Guyane, leur famille et leurs médecins généralistes. RESUME Aim French Guiana is the French Overseas Department which grows the faster in terms of population and economics. The medical oncology service in the Cayenne public regional hospital was developed in 2009 with the help of specialists from the “Centre Léon Bérard”, comprehensive cancer center in Lyon. There are only few publications on oncology in French Guiana. Therefore, it was decided to list all the patients who were followed in this service between January 2010 and December 2012. We were thus able to study the epidemiological aspects of cancer and also the role of health providers in this multicultural environment. This analysis provides evidence of the public health problem faced by the generalist in the French Guiana. Patients and methods We collected the clinical files of all patients seen at the medical oncology outpatient’s clinic, for diagnosis of either solid tumor or hematological disease. We found 594 cases between January 1st, 2010 and December 31s, 2012. A standard questionnaire was used to retrospectively analyze patients’ medical files. Results On 594 patients, 44% were male and 56% female. The median age at diagnosis was between 45-64 years and Most of them were living on the coast, with easy access to medical care. Forty percent of patients had a cardiovascular comorbidity, namely hypertension. The most frequent tumors are: breast cancer, cervix cancer, gastric cancer, head/neck cancers and prostate cancer. Among hemopathies, myeloma is the most frequent, then highgrade NHL and ATL lymphoma/leukemia. When compared to French metropolitan data: patients were in general younger and stage was more advanced. We attempted to describe the health care organization and limits to care access for the very heterogeneous population in this area. We studied the immunological status of patients to HIV (4.7% positive) HTLV1, HVB and HVC and focused our discussion on viral-induced cancers. It is estimated that 81 patients (14%) had cancers possibly related to virus or parasitic organisms and additionally 70 patients had at least one positive serological exam. This is in favor of an important role of viral carcinogenesis in cancers in the tropical area. Conclusion This study has allowed discussing the major facts of oncology in an equatorial area. It shows also the importance of public health problems in this patients’ population: access to caregivers, precarity, and accessibility to heath structures, languages and cultural diversity. General practitioners are key-actors in this setting. They must be aware of all aspects through a specific teaching program and continuous education process. They must be integrated in the health care pathway SOMMAIRE SOMMAIRE……………………………………………………………… INTRODUCTION……………………………………………………….10 MATERIEL, PATIENTS ET METHODES…………………………...12. Contexte général du projet Histoire des structures concernées par ce travail Organisation des dossiers et base de données cliniques Critères de l’étude Structure de la base de données Méthode de codage et contrôle qualité Méthode d’analyse Recherche bibliographique RESULTATS…………………………………………………………….16 I. Dénombrements généraux ……………………………………………16 a. Nombre de patients selon l'année du diagnostic b. Sexe c. Sexe et âge au moment du diagnostic d. Lieu de vie - lieu de naissance e. Comorbidités f. Sérologies virales g. Parcours de soins h. Recherche bibliographique (Pubmed) i. Types de cancers: j. Protocoles de soins globaux II. Analyse des tumeurs solides ………………………………………..36 a. SEIN 36 b. COL de l’Utérus 41 c. PROSTATE 46 d. COLON 50 e. POUMON 53 f. ESTOMAC 58 g. ORL 61 III. Analyse des hémopathies …………………………………………..66 LNHhg 66 MYELOME 68 LYMPHOME « T » DE L'ADULTE (ATL) 71 SYNDROMES MYELO-PROLIFERATIFS (SMP) 73 DISCUSSION……………………………………………………………76 Epidémiologie 1- Données concernant la population 76 2- Epidémiologie des comorbidités 76 3- Epidémiologie des cancers 77 Organisation générale de la cancérologie, santé publique. 1- Evolution de la prise en charge basée sur les dispositifs de l’INCa…………80 a. Evolution du nombre de patients b. Mise en place des RCP c. Réalisation des traitements, autorisations d. Filière et EVASAN e. Données manquantes 2- Origine et lieu de vie des patients …………………………………………. .. 83 a. Problème de l’éloignement des établissements de soins b. Problème de l’immigration, manque de données socio-administratives c. Perspectives démographiques à 20 ou 30 ans 3- Offre médicale en cancérologie en Guyane ………………………………….86 a. Diagnostic b. Autorisations de chirurgie c. Autorisations d’oncologie médicale d. Question de la radiothérapie e. Indication des thérapeutiques couteuses f. Essais thérapeutiques 4- Stade évolutifs des cancers curables (sein, col, colon) à comparer à la métropole et implication pour le dépistage et la prévention ……………………………….88 a. Cancer du sein b. Cancer du col de l’utérus c. Cancer du colon d. Cancer de la prostate e. Cancers ORL f. Cancer de l’estomac 5-infections virales identifiées: cancers et virus …………………………………95 a. Répartition globale des positivités des sérologies virales par type de cancer b. Physiopathologie des cancers liés au VIH et résultats de l’étude c. Virus VHB & VHC et cancers. Rôle en particulier dans les LNH d. Hémopathies liées à HTLV1 : description, physiopathologie, caractéristiques des populations e. Virus associés : HPV et HHV8 6-Aspects sociologiques et dispositifs du plan cancer médiation culturelle …….105 Groupes sociologiques différents a. Description générale, lieux de vie et de naissance, données manquantes ou non accessibles (langue, origine, situation sociale, niveau scolaire) b. Caractéristiques connues par l’ethnologie et la sociologie Noirs marron Amérindiens Créoles haïtiens Créoles guyanais et antillais c. Difficulté de la consultation d’annonce d. Perception de la maladie et du traitement Quelles perspectives développer Comment réaliser une médiation culturelle en cancérologie 7-Place du médecin généraliste dans l’ensemble de la prise en charge ………….110 1- Place en première ligne en amont du diagnostic……………………………... 110 a. Rôle de proximité. Rôle dans les postes et centres de santé b. Connaissance du patient et de sa famille c. Rôle dans le dépistage et le diagnostic précoce 2- Il dispose de moyens d’information sur les structures et de moyens pour le diagnostic ……………………………………………………………111 a. Diagnostic : imagerie, biopsies, spécialistes b. La Télémédecine c. Accès à des RCP d. Filière de prisé en charge des EVASAN 3- Aide à la prise en charge médico-sociale globale……………………………..112 a. DISSPO : soins de support b. EMSP c. HAD (de Guyane et Saint-Paul) d. Réseau de cancérologie (ONCOGUYANE) Thésaurus régional des arbres de décision Consultation de psychologie Assistante sociale Formations médicales, para médicales et grand public Site internet e. Suivi des patients : réhabilitation, surveillance f. le médecin généraliste est la clé de voute de la prise en charge (déclaration ALD30) g. Les besoins du médecin généraliste : La communication : le courrier, les CR d’hospitalisation, le DPC (dossier patient communiquant) La formation L’intégration dans la filière de prise en charge Le rôle du médecin généraliste est difficile, mais il est crucial. Réflexion critique sur le travail…………………………………………………..115 CONCLUSION…………………………………………………………………….116 BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………...118 ANNEXES…………………………………………………………………………125 10 INTRODUCTION Située à proximité de l’Equateur, la Guyane partage des frontières communes avec le Surinam et le Brésil. A l’inverse des autres départements d’outre-mer constitués d’îles et caractérisés par de faibles superficies et des ressources naturelles limitées, la Guyane fait partie intégrante du continent sud-américain, dispose d’une superficie importante (83 534 km2 dont 7 618 100 ha de surface boisée soit 91% du territoire) et bénéficie d’un potentiel naturel important en matière forestière et halieutique1. La démographie de la Guyane présente à la fois une forte croissance et une structure en déséquilibre : de 1999 à 2006, la population guyanaise a augmenté de 202 % (dix fois plus vite qu’en Métropole), le taux de progression annuel s’élevant à 3,8 % par an ; le dernier recensement de 20102 évalue la population à 219 266 habitants. La répartition de la population par tranche d’âge révèle que les moins de 20 ans représentent près de la moitié de la population alors que les plus de 60 ans, seulement 6%. Le déséquilibre est aussi territorial : plus de la moitié de la population réside dans l’île de Cayenne, la capitale qui, à elle seule, rassemble un tiers de la population totale. Avec 41 600 immigrés recensés en 1999, soit 27 % de la population régionale, la Guyane est la région française où la présence immigrée est la plus forte. Aujourd’hui, elle est évaluée à 40% de la population. Disposant d'un large espace inhabité, la Guyane a très tôt cherché à attirer des immigrants pour peupler son territoire. Or, jusqu'au début des années 1960, elle en attira peu : son histoire se caractérise au contraire par un peuplement difficile et insuffisant. Après une immigration chinoise et saint-lucienne très ancienne, la Guyane a connu une diversification de ses flux migratoires3. En 1999, les trois-quarts des immigrés sont natifs du Suriname, d'Haïti ou du Brésil. La population immigrée connaît des conditions de vie globalement plus difficiles que celles de l'ensemble de la population régionale. Cela se ressent également dans le système de soins où la plupart des patients sont en situation irrégulière et précaire avec un suivi médical très chaotique4. L’aspect culturel intervient aussi dans les difficultés de prise en charge des patients sur ce département. Le cancer est la deuxième cause de mortalité après les maladies cardio-vasculaires (chez la personne âgée de plus de 65 ans ; auparavant il est la première cause de mortalité)5. La prise en charge se fait par une longue filière de soins qui articule le travail de différents spécialistes, mais qui implique en début de chaine (diagnostic) et en fin de chaine le médecin généraliste (réhabilitation). Celui-ci est aussi concerné par toutes les étapes de la prise en charge des effets secondaires et des soins de support. De plus, en termes de santé publique, le médecin généraliste est impliqué dans la prévention et le dépistage, puis, après traitement, dans la gestion des complications et des effets à long terme. En cas d’évolution péjorative il est impliqué dans la prise en charge palliative. La Guyane est donc un département spécifique par sa géographie, son climat, son histoire, ses infrastructures, son développement, ses pathologies infectieuses et les autres comorbidités, et sa population multiethnique. Peu de publications ont porté sur la prise en charge du cancer en Guyane. Nous avons effectué un stage dans le service d’Hôpital de Jour de Cancérologie et nous avons participé à une première étude spécifique au sujet âgé. Une étude rétrospective globale des patients pris en charge a été faite au même moment par notre directeur de thèse qui nous a proposé d’envisager spécifiquement les questions en rapport avec la pratique de la prise en charge des cancers en envisageant le rôle des médecins généralistes en Guyane. Hormis ce sujet spécifique nous participerons aux travaux qui seront menés sur les différents cancers et qui relèvent de domaines spécialisés. 11 L’objectif de ce travail est de faire un état des lieux de la pratique de la prise en charge du cancer en Guyane, sachant que le traitement médical est centralisé (pour des questions règlementaires) essentiellement au centre hospitalier de Cayenne. Il est structuré par des médecins généralistes encadrés règlementairement par des médecins spécialistes issus d’un Centre de Lutte Contre le cancer de Métropole (Centre Léon-Bérard, Lyon). L’analyse des résultats est destinée à amener une réflexion sur les axes à développer dans le domaine de la cancérologie, de la prise en charge, de la recherche et de l’organisation de la filière en insistant sur le rôle du médecin généraliste. 12 MATERIEL, PATIENTS & METHODES Contexte général du projet. Etude descriptive de l’activité de cancérologie au CH de Cayenne entre janvier 2010 et décembre 2012, dans un service d’Hôpital de Jour (HDJ) tenu par des médecins généralistes formés, mais non diplômés en oncologie médicale et encadrés par des médecins spécialistes en mission. Cet état des lieux permet de mettre en évidence les problèmes de santé publique auxquels sont confrontés les médecins généralistes exerçant en Guyane, les problèmes de prévention, de dépistage, de prise en charge tant sur le plan médical, que médico-social et culturel. Ce sont ces différents aspects qui sont abordés. L'histoire de ce projet débute au mois de février 2012, lors de notre passage en tant qu'interne en Médecine Générale, dans le service de l'Hôpital de jour (HDJ) du Centre Hospitalier Andrée Rosemon (CHAR) de Cayenne. Histoire des structures concernées par ce travail. L'HDJ a été créé afin de permettre aux patients guyanais une prise en charge et des traitements médicaux sur place. Deux médecins généralistes ayant une formation de base en oncologie médicale mais non qualifiés ainsi qu'une équipe paramédicale permettent cette prise en charge. Les décisions sont discutées en RCP par deux oncologues qualifiés en oncologie médicale qui assurent en alternance une fois par mois (3 à 10 jours) les consultations de mise en route des traitements, les consultations d'annonce et le suivi des patients. La RCP se fait avec la présence physique des médecins spécialistes une fois par mois, en visioconférence chaque semaine dans l’intervalle. La RCP hebdomadaire se compose des médecins de l'HDJ, d'un oncologue spécialiste, des chirurgiens qui opèrent à Cayenne, des médecins spécialistes ainsi que de l'équipe de soins palliatifs et de l'HAD. Pour la prise en charge des soins de support, conformément à la législation, il y a une autre RCP hebdomadaire "Soins de Support" avec les médecins de l'HDJ, les assistantes sociales, une aide-soignante et/ou une infirmière formée à la consultation d'annonce, l'équipe de soins palliatifs et de l'HAD. Le Pr DROZ et le Dr FAYETTE, médecins oncologues au Centre Léon-Bérard (CLB), sont impliqués pleinement dans les consultations et l'activité du service afin de permettre aux guyanais une prise en charge et un suivi similaires aux patients métropolitains du CLB. Le Pr DROZ a pris en charge le développement de la cancérologie conformément aux dispositifs de l’INCa (Institut National du cancer) : mise en place des RCP, consultation d’annonce, Plan Personnalisé de Soins (PPS) des staffs médico-sociaux et des soins de support en oncologie, des évacuations sanitaires en métropole, en particulier au CLB...etc.) et la totale réorganisation de l'HDJ ces deux dernières années. A l'issue de sa mission, le Pr DROZ nous a ainsi proposé de faire le point sur ces trois années de cancérologie en Guyane grâce aux données des archives de l'HDJ. Organisation des dossiers et base de données cliniques. En effet, avant 2010, les dossiers étaient manuscrits, avec une première de couverture décrivant Nom, Prénom, Date de naissance, Lieu de naissance et Adresse. Puis, le médecin écrivait son observation manuscrite selon le protocole habituel: antécédents, traitements en cours, virologie, histoire de la maladie, examen clinique, conclusion, conduite à tenir. Les RCP, les examens paracliniques diagnostiques et le bilan d'extension étaient ensuite introduits 13 dans le dossier. Enfin, le suivi du patient était tenu par le compte-rendu de chaque consultation et de chaque examen ou traitement prescrit. Nous avons donc retrouvé dans les archives de l'HDJ, tous les dossiers des patients en cours de traitement ou perdus de vue ou décédés sous forme manuscrite. A partir de 2010, furent mises en place les RCP et les dossiers sous forme dactylographiée. Nous avons alors relevé dans les archives, l'ensemble des fiches RCP et compte-rendus de consultations en rapport avec le Centre Léon-Bérard (CLB). Mais toutes les fiches n'étaient pas toujours disponibles et cela concernait uniquement les patients traités à l'HDJ. C'est en septembre 2011, que l'arrivée du Pr DROZ en mission à temps plein d’une durée de 8 mois permit la numérisation de toutes les RCP, consultations et de tous les listings de chimiothérapies sur disque dur. Nous disposions donc des compte-rendus de traitements au CHAR et au CLB des patients vus en RCP ou en consultation à l'HDJ. Enfin, les archives étaient organisées en séparant bien l'hématologie de la cancérologie organique, et les dossiers classés par ordre alphabétique. Critères de l’étude. Il s'agit donc d'une étude quantitative descriptive observationnelle rétrospective sur 595 dossiers de patients pris en charge entre le 01/01/2010 et le 31/12/2012 discutés en RCP ou traités à l’HDJ. Critères d’inclusion : tous les patients admis en HDJ pour consultation médicale avec un des médecins du service pour un diagnostic de cancer, qu’ils soient ensuite suivis à l’HDJ ou ailleurs, que ce soit pour un diagnostic de tumeur solide ou d’hémopathie, entre le 01 janvier 2010 et le 31/12/212. Critères d’exclusion : aucun. L’accord du chef de pôle de Médecine ainsi que du chef de service de l’HDJ a été obtenu pour cette étude. L’accord du Professeur Droz et du Dr J Fayette, consultants au CLB et référents de consultations spécialisées en oncologie médicale au CHAR a également été obtenu. Structure de la base de données. Par ailleurs, s'agissant d'un fichier interne du service, les noms et prénoms des patients ne sont pas indiqués, nous n'avons noté que leurs initiales et dates de naissance. De même, nous n'avons pas demandé de consentement éclairé, donc ce recueil de données est anonyme et descriptif, totalement interne au service; il n'a fait l'objet d'aucune déclaration règlementaire. Dans un premier temps, nous nous sommes concentrées sur les dossiers des patients pris en charge dans le service afin d'effectuer le recueil de données suivant: - Initiales et date de naissance des patients. - Sexe: 1= féminin/ 2= masculin. - Lieu de naissance: permet d'approcher les spécificités culturelles, les différences linguistiques/origines et langue maternelle. - Lieu de vie. - Comorbidités: HTA oui= 1/DNID oui= 1/DID oui= 1/ addiction/ coeur&vaisseaux/ poumon/ système nerveux/ infectieux/ gastroentero/ endocrinologie/ métabolisme/ rein/ divers/ nb total: n'ont été retenues que celles qui ont une incidence sur la prise en charge. - Sérologies HTLV1, VIH, VHB-VHC: sérologie négative= 0/ sérologie positive= 1/ NC= non connue ou non faite. - Date diagnostic. - Primitif 1: type de cancer faisant l'objet de la consultation ou de RCP 14 - Précision: localisation du primitif1 ou caractère spécifique - Cancer1: histologie du primitif1. - Extension: L/R/M: local/ régional (ganglions régionaux)/ métastatique selon les principes de la classification TNM. - Rechute: rechute de cancer1 oui= 1/ NA= non applicable/ non= 0. - Primitif 2: cancer précédent ou concomitant oui= 1/ non= 0. - Chirurgie: oui= 1/ non= 0 en principe, on a essayé de nommer l'intervention - Radiothérapie: précise la réalisation d’une radiothérapie et éventuellement sa nature (ne préjuge pas de sa chronologie par rapport aux autres traitements) oui= 1/ non= 0 -Chimiothérapie: Protoc1/ Protoc2/ Protoc3 délivrés mais pas nécessairement chronologique; en général, les lignes ultérieures ne sont pas indiquées. - Autre traitement: signifie les traitements significatifs réalisés en HDJ ou prescrits en consultation et en particulier les thérapeutiques ciblés utilisées en monothérapie - Prise en charge au CLB: oui= 1/ non= 0 - Autre lieu de prise en charge en dehors de la Guyane. - Fiche RCP: 1= présence d’une fiche RCP dans le dossier papier puis dans le dossier informatisé; 0= pas de fiche RCP retrouvée - Date dernière nouvelle - Etat dernière nouvelle: vivant avec cancer= 0/ vivant en RC= 0,1/ décès de cancer= 1/ décès de complication de traitement = 2/ décès d'autre cause= 3. - Problème rencontré: identifie tout problème médical majeur (dont certaines complications) ou tout problème d’organisation. - Evaluation: RC= réponse complète/ RP= réponse partielle/ SD= maladie stable/ PD= maladie progressive. NC= non connu NA= non applicable 1= oui 0= non Puis, dans un deuxième temps, nous avons inclus l'ensemble des dossiers des patients nontraités directement à l'HDJ grâce aux fiches RCP et aux compte-rendus de consultation et de prise en charge lors d'évacuations sanitaires au CLB ou ailleurs. Méthode de codage et contrôle qualité Enfin, chaque information fut vérifiée par le Pr DROZ qui a relu tous les compte-rendus informatisés de consultation et de RCP archivés dans le service ou au CLB. Les sérologies furent contrôlées grâce aux dossiers de consultations du COREVIH. Les protocoles de chimiothérapie furent également réévalués sur les tableaux de chimiothérapies journalières tenus à chaque passage du patient. Les comorbidités furent reclassées par catégories telles que énumérées ci-dessus et comptabilisées selon leur présence avant le diagnostic de cancer et leur incidence sur la prise en charge (surlignées en rose dans la base de données). Le classement a été inspiré de la Classification CIRS-G (Cumulative Illness Rating System-Geriatrics) utilisée en gériatrie. La base de données contient donc 48 variables. Les chimiothérapies, cancer1, primitif1, comorbidités ont été encodées sur un fichier Word annexe permettant une homogénéisation parfaite des données à traiter. 15 Méthodes d’analyse. Concernant le mode d'analyse des données, nous avons choisi d'utiliser les méthodes d’analyse du fichier Excel par classement quantitatif des types de cancer (primitif, histologie, caractéristiques, stade), comorbidités, sérologies virales, types de prise en charge etc... Sans avoir recours aux logiciels d’analyses épidémiologiques habituels type Stata. Il s’agit donc de méthodes descriptives utilisant des classes et des médianes (avec extrêmes). Recherche bibliographique Nous avons fait une recherche Medline (PubMed) limitée à la zone équatoriale et aux cancers à l’exclusion des cancers liés au VIH, VHB/C et HTLV1 et nous avons trouvé au maximum 40 articles (littérature depuis 1950). Si nous ajoutons les cancers liés aux virus et en nous limitant aux aspects cliniques nous trouvons environ 50 articles (littérature après 1980). Nous avons décidé de faire une autre approche de la recherche bibliographique en utilisant les critères suivants : - Mots clés (en anglais): cancer ; breast cancer ; cervix cancer ; prostate cancer ; cancer epidemiology ; lymphoma - + Le nom du pays (en anglais) : Brazil ; Surinam ; French guiana : Guyana ; Antilles ; Guadeloupe ; Martinique ; Senegal ; Mauritania : Ivory Coast : Nigeria ; Ghana ; Congo ; Zaire ; Cameroun/ Cameroon ; Kenya ; tanzania ; uganda ; Rwanda ; Burundi; Indonesia ; Malaysia ; Borneo ; Papua New Guinea ; Cambodia ; Philippines ; Vietnam - + Deux langues : anglais et français - + Limite de date de publication : 5 dernières années Cela a permis d’étendre la sélection de références comme montré dans les résultats. Enfin nous avons fait une recherche sur Google focalisée sur la « Guyane » en ciblant les organismes : « ARS, HAS, INCa, InVS, IRD, CNRS, Université Antilles-Guyane, etc. » Sur les questions spécifiques de la médiation culturelle, de l’ethnologie et de la sociologie nous avons utilisé une recherche medline (PubMed) mais aussi Google avec les noms des auteurs tels que D Vernon, F & P Grenant, etc. La bibliographie a été traitée avec le logiciel Reference Manager® version 2012. 16 RESULTATS L'analyse de la base de données a été réalisée en septembre 2013. I. Dénombrements généraux a. Nombre de patients selon l'année du diagnostic 594 dossiers en cours de prise en charge ont été répertoriés à l'HDJA et par la mission d’oncologie. Pour l'année 2010, il y a à la fois les cas traités pour un cancer diagnostiqué avant 2010 et les nouveaux cas découverts en cours d'année, cela représente donc une combinaison de la prévalence (nombre total de sujets malades à un instant T dans la population) et de l’incidence pour l’année 2010. En revanche, en 2011 et 2012, il n'y a que des nouveaux cas répertoriés (incidence). De ce fait, la somme totale des cas recensés au cours des années 2010, 2011, 2012 permet un calcul d'incidence (nombre de nouveaux cas survenus dans une population durant une période définie). Figure 1 : Conclusion : on observe une augmentation de l’incidence au cours de ces trois années. En fait il y avait un déficit de nouveaux cas en 2010, probablement en rapport avec des problèmes d’organisation médicale. 17 b. Sexe Sur les 594 patients répertoriés on compte 259 hommes pour 335 femmes Figure 2 : c. Sexe et âge au moment du diagnostic L'âge médian au diagnostic se situe entre 45 et 64 ans. Figure 3 : Histogramme global : âge au diagnostic 141 135 104 87 65 18 25 18 1 <15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 >84 On constate que pour les femmes, le nombre de cancers est plus important entre 35-44 ans par rapport aux hommes (lié au nombre de cancers du sein et du col utérin). Figure 4 : 18 d. Lieu de vie - lieu de naissance Nous avons défini les zones géographiques de la manière suivante: - Côte: d'Est en Ouest, de Régina à Mana (exclus), en passant par Cayenne. - Fleuve: d'Ouest en Est (sens antihoraire), de Mana à Régina (inclus), en passant par SaintLaurent, Maripasoula et Saint-Georges. - Forêt: Saul et quelques zones d’orpaillage. Figure 5 : Zones Côte Mana Iracoubo Saint- Kour Cayenne sinnamary Apatou Gran Santi Regina Fôret SaintSaul Maripasoul Camopi Fleuve Lieu de vie. La plupart des patients pris en charge au CHAR vivent en Guyane, notamment sur la côte (avec un accès au diagnostic et aux soins sans doute plus précoces). Figure 6 : Lieu de vie 341 147 89 10 1 Côte Fôret Fleuve Ailleurs NC 4 2 Brésil Suriname 19 Figure 7 : Lieu de vie Mana 7 Saint-Laurent Iracoubo Kourou 28 Apatou 5 Cayenne 310 Gran Santi 7 Maripasoula Regina 4 Saul 2 Saint-Georges Camopi En revanche, les lieux de naissance des patients, sont très variés. En effet, on constate des chiffres presque identiques de gens venant du fleuve, de la côte, d’Haïti, du Brésil ou du Suriname. La majorité des patients du groupe "Ailleurs" est constituée de personnes originaires de France métropolitaine ou des Antilles, à l'exception de quelques personnes venant d'Afrique. Par contre, le nombre de "Non Connu" est relativement important (36%), ce qui ne permet pas de conclure sur une éventuelle relation entre l'origine ethnique et le taux de cancers associés. Figure 8 : 20 e. Comorbidités Figure 9 : Nombre total comorbidités 0 1 2 3 4 5 6 NC Nombre patients 304 147 92 37 8 3 1 3 TOTAL: 594 MEDIANE: 0 La médiane étant de zéro et sachant que l'âge médian au diagnostic du cancer se situe entre 45 et 60 ans, la plupart des patients ne présentait donc pas de comorbidités importantes. Néanmoins les patients âgés de > 70 ans ont plus de comorbidités. Figure 10 : Nombre comorbidités & âge < 70 ans ≥ 70 ans 51 28 30 25 25 15 6 9 1 aucune une deux trois 5 quatre 0 0 cinq 0 0 six 21 Figure 11: Catégories Comorbidités Nb patients 188 77 46 19 31 46 17 9 1 1 11 7 Les femmes sont beaucoup plus souvent atteintes d'hypertension artérielle Figure 12 : Comorbidités- sexe 140 120 100 80 60 40 20 0 Hommes Femmes HTA : hypertension artérielle ; DNID : diabète non insulinodépendant ; DID : diabète insulinodépendant. Sur les 291 patients ayant des comorbidités, 232 sont atteints d'au moins un facteur de risque cardio-vasculaire. L'HTA représente la principale maladie de cette catégorie alors que le tabac, contrairement à la France métropolitaine, est moins souvent relevé en Guyane. Figure 13 : FRCV NOMBRE DE PATIENTS HTA 189 DIABETE 98 TABAC 32 HTA+DIABETE 70 HTA/DIABETE+TABAC 12 TOTAL PATIENTS FRCV= (189-70) + (98-70)+(32-12)+70 soit : 232 FRCV : facteur de risque cardio-vasculaire 22 Si le crack et la cocaïne sont omniprésents en Guyane, peu de patients présentent une ou plusieurs conduites addictives. Seulement 5,5% des patients sont fumeurs et 4,2% ont une consommation d'alcool régulière. Toutefois la valeur du relevé est sujette au doute : on ne peut affirmer que l’information ait été relevée de manière systématique. Seuls les cas avérés ou avoués sont certains. Il est intéressant de souligner que sur la totalité des personnes interrogées, 100% des addictions concernent les hommes. Figure 14 : Addictions - 100% hommes Stupéfiants; 5 Alcool; 25 Tabac; 33 Nous avons croisé les comorbidités «insuffisance rénale chronique et « FRCV et maladies cardio-vasculaires », nous avons relevé la répartition suivante des protocoles de chimiothérapie utilisés: Figure 15 : sels de platine anthracyclines palliatif 240 111 4 26 17 7 3 7 TOTAL FRCV & maladies cardiaques IRC FRCV : facteur de risque cardio-vasculaire ; IRC : insuffisance rénale chronique (clairance de la creatinine < 30 ml/mn). f. Sérologies virales Figure 16 : Classement des patients en fonction de leur sérologie positive Sérologie positive Nombre de patients VIH 28 HTLV1 19 VHB 18 VHC 5 Le dénombrement des patients ayant une sérologie positive permet d'effectuer une étude en pourcentage sur la totalité de la population du recueil, soit 594 personnes. On constate que le VIH est l'infection virale la plus répandue bien que le nombre de "Non Connu" reste encore trop élevé. 23 Figure 17 : VIH Positif 4.7% VIH VIH Non connu 56% VIH Négatif 39.3% Figure 18 : VHB VHB Positif 3% VHB Non connu 59% VHB Négatif 38% Figure 19 : VHC VHC Positif 1% VHC Non connu 59% VHC Négatif 40% Figure 20 : HTLV1 Positif 3% HTLV1 HTLV1 Négatif 32% HTLV1 Non connu 65% 24 VIH: La Guyane connaît le taux de prévalence le plus élevé de France. En 2006, le taux par million d’habitants de découverte de l’infection à VIH y était de 308 contre 150 en Ile de France selon le dernier rapport du CNRS (2008). Nous avons étudié les taux d'infections VIH en fonction des lieux de naissance et lieux de vie afin d'établir une information sur la géographique de cette infection. Ainsi, tout comme constaté lors des évaluations diagnostics, la plupart des patients dépistés vivent sur la côte; concernant le lieu de naissance, on remarque qu'il existe une majorité de Brésiliens et d'Haïtiens. Figure 21 : Lieu de naissance 8 7 6 5 4 3 2 1 0 Côte Fleuve Guyane Brésil Haïti Ailleurs NC Figure 22 : Lieu de vie 20 15 10 5 0 Brésil Guyane Fleuve NC Côte Le rétrovirus atteint plus d'hommes que de femmes et la tranche d'âge moyen est entre 45 et 54 ans, ce qui est légèrement inférieur à la moyenne générale calculée dans cette étude. Par ailleurs, les cancers diagnostiqués chez ces patients sont surtout des hémopathies, alors que les autres cancers se chiffrent par seulement 2 ou 3 cas maximum. 25 Figure 23 : Sexe Femmes 32% Homme 68% Figure 24 : Age 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 <15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 >84 Figure 25 : Type cancer 9 3 2 1 1 1 1 1 2 2 2 3 26 Virus hépatitiques : Figure 26 : Type d'hépatite VHB+ 17 VHC+ 4 VHB+VHC+ 1 VHB guéri 1 TOTAL 23 Figure 27 : o VHB: Concernant les lieux de vie et de naissance, le constat est: la plupart des patients vivent sur la côte tandis que les origines sont plutôt brésiliennes (bien qu'un trop fort taux de "Non Connu" persiste). De même, les cancers hématologiques (Lymphomes) sont majoritaires dans ce contexte virologique. Figure 28 : Lieu de vie 16 14 12 10 8 6 4 2 0 Côte Fleuve NC Ailleurs 27 Figure 29 : Lieu de naissance 8 6 4 2 0 Côte Fleuve Guyane Brésil Ailleurs NC Suriname Figure 30 : VHB+ et type cancer 8 3 3 2 1 1 1 o VHC: Pour ce qui concerne le virus de l'hépatite C, la répartition géographique des patients en fonction de leur lieu de vie et de naissance est la même que pour l'hépatite B. L'âge au moment du diagnostic se situe pour la plupart des cas entre 55 et 64 ans. Enfin, les types de cancers associés à cette infection virale sont essentiellement hépatiques et des lymphomes non-hodgkiniens. Figure 31 : Age 8 7 6 5 4 3 2 1 0 <15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 >84 28 Figure 32 : VHC+ et type cancer poumon 20% foie 40% foie LNH poumon LNH 40% o HTLV1 Dans notre série, nous avons trouvé 19 patients atteints de HTLV1, soit une prévalence de 3,2%. La plupart des patients sont originaires du Suriname et vivent sur le fleuve. Figure 32 : Age 6 5 4 3 2 1 0 <15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 >84 Figure 33 : Sexe femmes 42% hommes 58% 29 Figure 34 : Lieu de naissance 7 3 3 2 1 1 1 1 Figure 35 : Lieu de vie 9 8 Côte Fleuve 1 1 Brésil NC Figure 36 : Type cancer 15 1 1 colon foie 1 prostate 1 rein Hémato 30 g. Parcours de soins Il est intéressant d'observer l'évolution du parcours de soins global des patients pris en charge entre 2010 et 2012. En effet, la collaboration directe des oncologues médicaux du Centre Léon Bérard avec l'HDJA ayant commencé en 2010, on constate une homogénéisation des parcours de soins au fil des années. En 2012, la totalité des patients suivis à l'HDJA bénéficie de réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) afin d'établir pour chacun un plan personnalisé de soins, alors qu'en 2010, seulement un tiers des patients étaient concernés. De plus, la plupart des évacuations sanitaires sont maintenant orientées vers le Centre LéonBérard à Lyon, ceci afin d'assurer un suivi direct par les médecins oncologues ayant participé aux RCP. Enfin, le nombre d'évacuations sanitaires a nettement diminué au cours des années grâce à la mise en place de protocoles médico-chirurgicaux dispensés au CHAR (chimiothérapies, chirurgie gynécologique et viscérale) et la définition d’un thésaurus de prise en charge pour rationaliser le parcours de soins. Nombre de RCP - 2010/2012 Année Total patients RCP pas de RCP <2010 204 78 127 2010 84 41 43 2011 151 124 27 2012 156 147 9 Lieux de prise en charge et orientations 89 Total EVASAN 140 69 5 45 57 68 40 1 41 67 44 18 3 21 71 45 Année Total patients CLB non CLB IGR autre IGR <2010 204 11 129 40 2010 84 17 40 2011 151 27 2012 156 53 h. Recherche bibliographique (Pubmed) Mots clés (en anglais): cancer ; breast cancer ; cervix cancer ; prostate cancer ; cancer epidemiology ; lymphoma + Le nom du pays (en anglais) : Brazil ; Surinam ; French Guiana : Guyana ; Senegal ; Mauritania : Ivory Coast : Nigeria ; Ghana ; Congo ; Zaire ; Cameroun/ Cameroon ; Kenya ; Tanzania ; Uganda ; Rwanda ; Burundi ; Indonesia ; Malaysia ; Borneo ; Papua New Guinea ; Cambodia ; Philippines ; Vietnam + Deux langues : anglais et français + Limite de date de publication : 5 dernières années (environ) % 31 Figure 37 : Pays Brésil Guyane Surinam Guyana Antilles** Sénégal Mauritanie Côte d’Ivoire Nigéria Ghana Congo*** Zaîre*** Cameroun Kenya Tanzanie Uganda Rwanda Burundi Indonésie Malaisie Bornéo Papouasie Nouvelle Guinée Cancer* 4973 2 3 4 88 46 4 37 569 57 87 9 74 123 68 106 13 1 147 967 9 14 Sein* 542 Col* 230 1 Prostate* LNH* 231 272 1 1 11 3 1 8 5 1 14 3 4 91 14 9 6 76 7 7 1 52 4 5 17 9 4 20 1 9 27 19 20 6 15 231 4 Epidémiologie* 950 1 17 4 11 35 1 5 0 9 59 6 9 1 0 15 7 28 1 44 22 1 14 259 27 14 3 19 56 26 64 6 7 62 12 30 15 57 42 218 9 4 3 4 Cambodge 83 18 15 4 2 52 Vietnam 617 90 94 35 38 347 Philippines 477 113 51 19 25 256 LNH : Lymphomes Non hodgkiniens ; * : nombre de publications correspondant à la recherche ; ** : Antilles néerlandaises et françaises (Guadeloupe & Martinique) *** : La République Démocratique du Congo (Zaïre) et le Congo Brazzaville sont parfois difficiles à rechercher individuellement. Nous avons sélectionné la bibliographie d’abord à partir des titres, puis ensuite des résumés. Nous avons collecté environ 250 articles en PDF et 25 documents, rapports, thèses ou mémoires. Le choix de lecture complète des articles a été fait avec notre directeur de thèse, en fonction de l’utilité dans l’argumentaire de la discussion 32 h. Types de cancers: Figure 38 : Tumeurs solides Sein Colon Poumon Utérus col corps Estomac ORL Prostate Ovaires Os&parties molles Pancréas uretère vessie Urologie verge testicule rein surrénale Rectum Œsophage Foie CHC cholangiocarcinome kaposi Peau carcinomes mélanome rares SNC CUP Anus Tumeurs GIST rares thyroïde TNE ovaires trompe Fallope choriocarcinome placentaire parotide TOTAL Nombre Hommes Nombre de patients 123 51 37 34 8 34 29 25 24 15 12 1 5 3 4 9 1 8 5 7 5 3 4 13 4 6 5 6 5 4 2 2 1 2 4 501 Nombre Femmes 0 29 21 0 0 26 25 25 0 7 4 1 3 3 4 5 0 6 4 5 4 3 2 7 2 5 5 4 2 2 0 0 0 0 123 22 16 34 8 8 4 0 24 8 8 0 2 0 0 4 1 2 1 2 1 0 2 6 2 1 0 2 3 2 2 2 1 2 0 204 4 297 33 Le tableau ci-dessus répertorie toutes les tumeurs solides suivies à l'HDJA depuis 2010. Certaines sont regroupées par catégories telles que "utérus", "urologie", "foie", "peau", "tumeurs rares". Nous les avons classées par ordre décroissant, tous sexes confondus. On constate alors que les tumeurs du sein représentent un quart des tumeurs solides à ellesseules. Ensuite, sont également réparties les tumeurs du colon et de l'utérus qui représentent 10% des cas; et enfin, ressortent successivement de manière significative les cancers du poumon, de l'estomac, ORL, de la prostate, des ovaires. Les mélanomes sont aussi importants en Guyane. ( Deux cancers non répertoriés dans le tableau car un étiqueté " intestin" et l'autre étiqueté "os".) Le tableau suivant concerne les hémopathies. De même, ils ont été classés par ordre décroissants, tous sexes confondus. Les myélomes sont les plus nombreux, ils représentent un tiers des cas; les lymphomes nonhodgkiniens(LNH) sont presque aussi importants avec 27 cas répertoriés. Figure 39 : Hématologie Nombre de patients Hommes Myélome 29 bas grade 5 LNH haut grade 22 Syndromes 8 myéloprolifératifs LMC thrombocytémie 4 autre 2 leucémie 2 ATL LNH 9 LLC Leucémie aiguëe Hodgkin TOTAL 5 4 3 91 Femmes 12 0 15 5 17 5 7 3 2 1 0 7 4 4 1 51 2 1 2 2 1 0 2 40 34 Figure 40 : Deux cancers : 30 • Anus 2 • Colon 6 • Estomac 2 • ORL 1 • Ovaire 1 • Sein 12 • Uretère 1 • Col 1 • Col; estomac • Colon 2; prostate 1;MDS 1;col 1; endomètre 1 • Colon 1; CHC sur VHB 1 • Sarcome Radio-induit 1 • Rectum 1 • Bilatéral 5 (dont BRCA1 = 1); endomètre 2; col 2; thyroïde 1; peau 1; ovaire 1 • Prostate 1 • Poumon 1 Le tableau suivant nous permet de comptabiliser les différents stades au diagnostic, tous cancers confondus. Ainsi, les tumeurs locales (L) restent majoritaires tandis que les stades régionaux(R) et métastatiques(M) sont également répartis. Pour l'hématologie, cette étude est évidemment non-applicable(NA). Figure 41 : Stade au diagnostic L 187 R 153 M 157 NA 90 NC 7 35 i. Protocoles de soins globaux: Figure 42 : Protocole de soins chirurgie 350 Radiothérapie 189 Chimiothérapie 375 Figure 43 : CHIMIOTHERAPIE 1 lignée 220 2 lignées 99 3 lignées 56 Nous avons répertorié par ordre décroissant les différentes thérapeutiques ciblées utilisées au CHAR ces trois dernières années. Figure 44 : Thérapeutiques ciblées AVASTIN HERCEPTINE VELCADE GLIVEC MABTHERA TARCEVA ERBITUX IRESSA 40 23 17 13 11 10 9 6 36 II. Analyse des tumeurs solides a. SEIN Figure 45 : Nombre de cancers en fonction population totale du recueil. cancers Age < 15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 > 84 Femmes 0 2 7 30 36 27 14 7 0 123 TOTAL 1 10 20 61 72 71 59 32 9 335 Le tableau et le diagramme nous permettent d'évaluer le nombre de cancers en fonction de l'âge au diagnostic, par rapport au nombre total de femmes répertoriées dans ce recueil. Ainsi, entre 2010 et 2012, 123 cancers du sein ont été traités à l'HDJA. L'âge médian est entre 45 et 54 ans et le maximum de cas se situe entre 35 et 64 ans, ce qui correspond à une tranche d'âge plutôt jeune. Figure 46 : Age-population cancer Femmes <14 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 La plupart des femmes suivies dans le service vivent sur la côte, et le stade au diagnostic ne semble pas influencé par le lieu de vie. 37 Figure 47 : Côte; 87 Lieu de vie NC; 23 Fleuve; 9 Ailleurs; 4 Figure 48 : Stade-Lieu de vie Côte Fleuve Ailleurs NC 39 38 14 3 9 5 2 L 2 4 0 R 0 4 1 M 1 0 1 NC L: local; R: régional; M: métastatique; NC: non-connu. Concernant le lieu de naissance, on constate une égale répartition des origines ethniques. Mais le nombre de non-connus (NC) reste trop important pour obtenir une réponse significative. Figure 49 : 32 Lieu de naissance 19 15 14 10 13 14 6 Quelque soit l'âge, très peu de patientes présentent une ou plusieurs comorbidités au moment du diagnostic: seulement un quart des cas ( 34 au total sur 123 cancers), tous âges confondus. 38 Figure 5O : Comorbidités & cancer selon âge nb patients avec comorbidités cancer < 15 15-24 25-34 35-44 55-64 45-54 65-74 75-84 > 84 Figure 51 : Nbre patientes Nombre de comorbidités selon âge < 70 aucune 76 une 24 deux 8 trois 1 quatre 0 cinq 1 six 0 > 70 1 4 6 2 0 0 0 Enfin, si comorbidité il y a, l'HTA est largement majoritaire comme cela a été vu dans l'étude des données générales. Figure 52 : Axis Title Types comorbidités HTA DNID DID Cœur Pou Syst infec gastr endo méta rein diver mon nerv tieux o crino bolis s me eux 6 1 Nb patients 32 13 1 6 3 2 1 1 1 2 39 Figure 53 : relation Stade-âge nbr patientes NC M R L âge 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 L: local; R: régional; M: métastatique; NC: non-connu. Il est intéressant d'observer le stade au diagnostic en fonction de l'âge des patientes. En effet, on constate que pour les femmes jeunes ( < 50 ans), beaucoup de tumeurs sont déjà au stade régional tandis que chez le femmes après 54 ans, les cancers locaux sont majoritaires. Figure 54 : Récepteurs < 70 ans > 70 ans Triple négatifs 22 20 2 RH- HER2+ 12 10 2 RH+ HER2- 52 49 3 Triple positifs 10 7 3 NC 27 27 0 Un quart des cas sont de mauvais pronostic, avec des récepteurs triple négatifs ou bien HER2 positif, tandis que la moitié des cancers sont de bon pronostic (triple positifs ou RH+ HER2-). Cependant, un quart des récepteurs sont non-connus(NC). Figure 55 : Stade Total Rechute L 57 14 R 50 7 M 13 NA NC 4 NA L= local; R= régional; M= métastatique; NC= Non-connu 40 Figure 56 : PROTOCOLES DE SOINS Chirurgie 113 92% Radiothérapie 78 63.5% Chimiothérapie 94 76.4% La majorité des cancers étant diagnostiqués à un stade précoce (local ou régional), le taux de protocoles de soins chirurgicaux est élevé. Figure 57 : Protocoles chimiothérapie 70 60 50 40 30 20 10 0 Figure 58 : Protocoles traitements adjuvants Arimidex Herceptine Femara Tamoxifene Hormonothérapie Zometa Xeloda L&R 19 10 7 18 9 3 2 M& RECHUTE 0 0 1 1 0 5 1 41 Figure 59 : Thésaurus CHAR-CLB & ONCOGUYANE (version 11.2011) : arbre de décision. b. COL de l’Utérus Figure 60 : Ce diagramme représente, en fonction de l’âge, le nombre de cancers du col de l’utérus (au total 34) par rapport au nombre total de femmes atteintes de cancer comptabilisées dans cette 42 base de données, comparé aux données du registre du cancer de Guyane 2003-2008. Ainsi, il est intéressant de voir qu'une majorité des cancers se situe entre 35 et 44 ans alors que pour le registre de Guyane, l'âge médian est entre 45 et 54 ans. Figure 61 : Nombre Lieu de vie Fleuve Côte N Lieu Les patientes vivant sur la côte sont deux fois plus nombreuses que celles venant du fleuve. Cependant, trop de lieux de vie ne sont pas renseignés dans les dossiers de soins. Figure 62 : Localisé Fleuve avancé Côte métastatique N Le stade au diagnostic est le plus souvent "avancé" quelque soit le lieu de vie. Par contre, les stades métastatiques sont bien plus nombreux lorsque les patientes vivent sur le fleuve ou viennent d'un lieu non connu. Figure 63 : 43 Il est important de constater que, contrairement aux lieux de vie en majorité situés sur la côte, les lieux de naissances sont essentiellement sur le fleuve côté Brésil ou au Surinam. Mais le nombre de non-connus reste toujours trop conséquent pour conclure. Figure 64 : Le cancer du col de l'utérus étant un cancer de la femme jeune, on constate évidemment peu de comorbidités dans la plupart des cas étudiés. Figure 65 : Nb comorbidités Nombre comorbidités-âge aucune 18 une 6 deux 1 trois 2 quatre 1 cinq 0 six 0 3 1 2 0 0 0 0 Figure 66 : Nb patients Types comorbidités HTA DNID DID Cœur Series1 11 1 3 0 Syst Poum infecti endoc métab nerve gastro rein divers on eux rino olisme ux 1 3 1 0 0 0 2 1 44 L'hypertension artérielle (HTA) et le diabète (DNID-DID) sont les comorbidités les plus fréquentes, cela correspond aux données générales évoquées précédemment. Figure 67 : Sérologies VIH; 11% VHB; 4% HTLV1; 0% VHC; 0% NC; 85% A noter que 11% des patientes atteintes du cancer du col de l'utérus, avaient une sérologie VIH positive au diagnsotic. Le taux de non-connus (NC) étant de 85%, cela sous-entend une probable sous-estimation du nombre de patientes séropositives. Figure 68 : Thésaurus CHAR-CLB & ONCOGUYANE (version 11.2011) : arbre de décision. Cancer du col de l’utérus La classification FIGO est le stade T Petit Gros 45 Figure 69 : Le stade avancé du cancer du col est largement majoritaire. Le retard diagnostic semble important quelque soit l'âge des patientes. Figure 70 : 46 Figure 71 : PROTOCOLES DE SOINS c. Chirurgie 20 59% Radiothérapie 22 64.7% Chimiothérapie 14 41% PROSTATE Figure 72 : Au total, 25 cancers de la prostate ont été traités ces 3 dernières années au CHAR. L'âge médian est entre 55 et 64 ans, ce qui correspond à un âge jeune par rapport aux données de la population générale( 65-70 ans). Figure 73 : Le lieu de vie au diagnostic concerne principalement les hommes vivant sur la côte. 47 Figure 74 : Les lieux de naissance sont répartis de façon homogène pour la côte, le Brésil et les Antilles, tandis qu'on retrouve très peu de gens du fleuve dans ce recueil. Le taux de non-connus( NC) est très important. Figure 75 : Figure 76 : 48 Les patients présentent peu de comorbidités. Celles-ci augmentent avec l'âge à partir de 55 ans. L'hypertension artérielle( HTA) reste prédominante dans les comorbidités générales. Figure 77 : Dix-sept pourcent des patients sont atteints du VIH au moment du diagnostic. Mais le pourcentage de non-connus( NC) est toujours beaucoup trop majoritaire. Figure 78 : sérologies VHB; 1; 3% HTLV1; 0; 0% VIH; 5; 17% négatifs; 8; 28% NC; 15; 52% VHC; 0; 0% 49 Figure 79 : Il est intéressant de voir que les stades au diagnostic sont également répartis entre Local ( L) et Métastatique ( M), tandis qu'il existe très peu de stades Régionaux (R). Figure 80 : L: local; R: régional; M: métastatique; NC: non-connu. Comparés à l'âge des patients, les stades locaux et métastatiques sont également répartis entre 55 et 64 ans. Avant 45 ans, tous les cancers sont avancés car probablement non dépistés systématiquement. Après 64 ans, les stades locaux deviennent majoritaires. Figure 81 : PROTOCOLES DE SOINS Chirurgie 3 12.5% Radiothérapie 11 46% Chimiothérapie 7 29% 50 d. COLON 50 cancers du colon ont été comptabilisés, dont 29 chez les hommes et 21 chez les femmes. Chez les hommes, les diagnostics sont également tépartis pour chaque tranche d'âge à partir de 35 ans. Chez les femmes, les cancers sont plus nombreux à partir de l'âge de 45 ans Figure 82 :. Figure 83 : Figure 84 : Le lieu de vie est le plus souvent sur la côte, alors que les lieux de naissances sont variables mais beaucoup sont non-connus ( NC). 51 Figure 85 : Figure 86 : Les hommes comme les femmes ont des comorbidités à partir de 45 ans, environ chez 50% des patients tous sexes confondus. Figure 87 : 52 Figure 88 : Figure 89 : Les types de comorbidités sont toujours essentiellement les facteurs de risque cardiovasculaires. 53 Figure 90 : L: local; R: régional; M: métastatique; NC: non-connu. Chez les hommes, on constate beaucoup plus de cancers régionaux que chez les femmes qui présentent plus de cancers locaux. Par contre les cancers métastatiques sont plus nombreux à partir de 75 ans chez l'homme tandis qu'ils sont retrouvés présents dès l'âge de 65 ans chez les femmes. Figure 91 : L: local; R: régional; M: métastatique; NC: non-connu. e. POUMON Trente-sept cancers du poumon ont été diagnostiqués au cours de cette étude, dont 21 chez des hommes et 16 chez des femmes. 54 Figure 92 : L'âge au diagnostic des hommes se situe entre 45 et 64 ans alors que l'âge des femmes se situe plutôt entre 65 et 74 ans. Figure 93 : Figure 94 : Les hommes comme les femmes ont des comorbidités à partir de 45 ans, environ chez 50% des patients tous sexes confondus. 55 Figure 95 : Figure 96 : Les patients ayant des comorbidités ont moins de 70 ans pour la plupart mais cela est dû au fait que l'âge au diagnostic est en majorité inférieur à 70 ans. Figure 97 : 56 Onze patients sur 37 sont tabagiques actifs. De même, 11 personnes présentent une HTA connue. La grande majorité des patients avec comorbidités ont des antécédents cardio-vasculaires. Ils représentent au total 51% des patients totaux atteints de cancer du poumon et 60% des patients ayant une ou plusieurs comorbidités. Figure 98 : Type anatomopathologique : la majorité des cancers sont de type adénocarcinomes (ADK); il y a autant de carcinomes épidermoïdes que de carcinomes à grandes cellules(GC) que de carcinomes à petites cellules( CPC). Figure 99 : Les hommes sont plus souvent atteints d’adénocarcinome ou de cancer à grandes cellules que les femmes. 57 Figure 100 : L: local; R: régional; M: métastatique Le stade au diagnostic est essentiellement métastatique. Seuls les carcinomes à grandes cellules sont parfois diagnostiqués au stade Régional. Figure 101 : L: local; R: régional; M: métastatique. 58 f. Estomac 34 tumeurs de l'estomac ont été diagnostiquées entre janvier 2010 et décembre 2012 avec une majorité d'hommes. L'âge moyen se situe entre 45 et 54 ans ou bien entre 65 et 84 ans. Figure 102 : Ages Hommes/Femmes 30 25 20 15 hommes 10 femmes 5 0 Figure 103 : Lieu de vie 17 10 Lieu de vie Côte 4 3 Fleuve Brésil NC Les lieux de vie sont essentiellement sur la côte tandis que les lieux de naissances sont très variés, bien répartis entre le Suriname, Haïti et le Brésil. Figure 104 : Lieu de naissance 10 6 5 5 4 3 1 Lieu de naissance Côte Fleuve Brésil Haïti Ailleurs Suriname NC 59 Figure 105 : Comorbidités&cancers selon l'âge nb patients avec comorbidités cancer 34 21 00 00 24 22 7 2 45 5 8 46 22 Deux tiers des patients présentent des comorbidités au moment du diagnostic; celles-ci sont également répartis avant et après 70 ans. Figure 106 : Nombre comorbidités selon l'âge < 70 aucune 10 une 5 deux 5 trois 1 quatre 0 cinq 0 six 0 > 70 3 3 4 3 0 0 0 Figure 107 : Types de comorbidités 10 9 4 2 3 2 0 0 2 0 0 0 La plupart des antécédents retrouvés sont des facteurs de risque cardio-vasculaires. 60 Figure 108 : Stade- âges hommes 7 6 5 4 3 2 1 0 M R L < 15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 > 84 L= local; R= régional; M= métastatique. Figure 109 Stades- âges femmes 4 3,5 3 2,5 2 1,5 1 0,5 0 femmes M femmes R femmes L L= local; R= régional; M= métastatique. On constate que les hommes ont souvent un stade régional ou local avant 54 ans mais que le stade métastatique est fréquent après cet âge. Pour les femmes, le stade régional est largement majoritaire, bien qu'à partir de 55 ans, les cancers métastatiques soient presque exclusivement présents. Figure 110 : Type histologique ADENOCARCINOME 26 LINITE 6 CARCINOME 1 NC 1 Trois quarts des tumeurs sont des adénocarcinomes mais les linites gastriques sont tout de même très présentes par rapport aux chiffres nationaux. 61 Figure 111 : Protocoles de soins Chirurgie 22 Chimiothérapie 24 Radiothérapie 3 Palliatif 6 Figure 112 : 16 14 12 10 8 6 4 2 0 Protocoles chimiothérapie EOX FOLFIRI LV5FU2 FOLFOX Figure 113 : Sérologies VIH; 3 VHB; 2 VHC; 0 HTLV1; 0 Négatifs ; 29 g.ORL Trente-trois cancers ORL ont été répertoriés ces 3 dernières années dont 27 carcinomes épidermoïdes, 1 papillome Shneiderien, 1 rhabdomyosarcome, 1 tumeur mixte. La majorité des cas concerne les hommes entre 45 et 64 ans. 62 Figure 114 : Figure 115 : Les lieux de vie sont également répartis entre le fleuve et la côte bien que l'on retrouve beaucoup de non-connus (NC). Par contre les lieux de naissance n’ont pas été indiqués dans la majorité des cas. Figure 116 : 63 Figure 117 : Plus de la moitié des patients diagnostiqués présentaient une ou plusieurs comorbidités à partir de 45 ans. Figure 118 : Figure 119 : Les facteurs de risque cardio-vasculaires et le tabac sont notés chez plus d'un tiers des patients. 64 Figure 120 : L: local; R: régional; M: métastatique Le stade est soit local soit régional avec une majorité très nette des atteintes régionales. Figure 121 : TOPOGRAPHIE DES TUMEURS Lèvre inférieure Plancher buccal Langue Voile palais Epiglotte Glande salivaire Pharynx Oropharynx Larynx Corde vocale Cavum Fosse nasale Parotide/Maxillaire 1 2 4 3 2 1 3 3 3 2 2 4 3 Topographie : noter une légère prédominance des tumeurs de la langue, des fosses nasales De manière générale, les tumeurs sont réparties de façon homogème en terme de fréquence 65 Figure 122 : PROTOCOLES DE SOINS Chirurgie 20 Radiothérapie 18 Chimiothérapie 19 Figure 123 : PROTOCOLES CHIRURGIE Exerèse Gastrostomie Laryngectomie Parotidectomie Glossectomie Maxillectomie NC 4 3 3 2 2 1 5 66 III. Analyse des hémopathies Figure 124 : Diagnostic LLC 6% LA MdH 4% 3% Myélome 32% ATL 12% SMP 15% LNHhg 22% LNHbg 6% LNHhg: lymphome non-hodgkinien de haut grade; LNHbg: lymphome non-hodgkinien de bas grade; SMP: syndrome myélo-prolifératif; ATL: lymphome T de l'adulte; LLC: leucémie lymphoïde chronique; LA: leucémie aigüe; MDH: maladie de Hodgkin. La majorité des pathologies hématologiques concerne les myélomes et les lymphomes nonhodgkiniens de haut grade. Les ATL représentent 12% des cas soit 11 personnes atteintes pour un échantillon de 12 patients ayant une sérologie HTLV1 positive. Enfin on note 15% de SMP. Nous étudierons donc ces 4 atteintes les plus fréquentes. LNHhg On a compté 22 lymphomes non-hodgkiniens de haut grade ces 3 dernières années dont 64% d'hommes et 36% de femmes. Figure 125 : 67 L'âge au diagnostic est très variable; il est intéressant de souligner qu'il y a des cas de LNHhg chez les jeunes adultes entre 15 et 24 ans, chez les adultes entre 45 et 54 ans et chez les personnes âgées entre 65 et 84 ans. Figure 126 : 8 Lieu de naissance 6 4 2 0 Côte Fleuve Guyane Ailleurs NC On note une nette prédominance de patients originaires du fleuve, très souvent des Noirs Marrons. En revanche, le lieu de vie est essentiellement sur la côte. Figure 127 : 12 Lieu de vie 10 8 6 4 2 0 Côte Fleuve Guyane NC Figure 128 : Sérologies associées 6 3 2 2 1 VIH+ HTLV1 VHB+ VHC+ NC Seulement 3 patients présentaient une sérologie HTLV1 positive au moment du diagnostic. Cependant, le nombre de non-connus (NC) est trop important pour conclure. 68 Figure 129 : Stade au diagnostic 10 8 6 4 2 0 Le stade IV du LNHhg correspond aux atteintes multi-viscérales au-delà des ganglions et de la rate. Il représente le stade le plus fréquent en Guyane au moment du diagnostic. Figure 130 : Types LNH et nbr rechutes 6 6 5 4 3 2 1 0 4 4 4 3 2 1 1 Le lymphome B à grandes cellules est le plus fréquent suivi du lymphome de Malt et du lymphome T. MYELOME Au total, 29 myélomes ont été diagnostiqués dont 59% de femmes et 41% d'hommes. Figure 131 : Age 15 10 5 0 69 L'âge médian au diagnostic se situe entre 55 et 64 ans, ce qui est plus jeune que la moyenne nationale (63 ans et plus). Figure 132 : 10 Lieu de naissance 8 6 4 2 0 Côte Fleuve Guyane Ailleurs NC Le lieu de naissance est majoritairement sur le fleuve tandis que le lieu de vie est presque toujours aux alentours de Cayenne. Figure 133 : Lieu de vie 25 20 15 10 5 0 cayenne macouria NC saint-laurent Figure 134 : Sérologies associées 12 1 VIH 3 0 VHB VHC 0 HTLV1 NC La plupart des patients ont un statut sérologique inconnu, ce qui rend les résultats non significatifs pour cette pathologie 70 Figure 135 : Age et comorbidités 30 25 20 15 10 5 0 cancer TOTAL patients > 84 75-84 65-74 55-64 45-54 35-44 25-34 15-24 < 15 nb patients avec comorbidités Deux tiers des patients ont des comorbidités dont la grande majorité est constituée des facteurs de risque cardio-vasculaires tels que HTA et diabète. Figure 136 : Axis Title Types de comorbidités 12 10 8 6 4 2 0 HT DNI DID Cœ Pou Syst infe gas end mét rein div A D ur mo ner ctie tro ocri abo ers n veu ux no lism x e Nb patients 12 6 0 3 2 3 0 0 0 1 1 1 Figure 137 : Sous-types de myélome 13 7 7 2 Quarante-quatre pour cent des myélomes sont de type IgG, donc de meilleur pronostic; la moyenne nationale étant de 55% des cas 71 Figure 138 : PROTOCOLES DE SOINS Velcade+DEXA 14 Thalidomide+DEXA 9 Melphalan+DEXA 5 HDCT 5 Revlimide 5 Thalidomide+Melphalan 4 LYMPHOME « T » DE L'ADULTE (ATL) Nous avons retrouvé 11 ATL ces trois dernières années dont 4 femmes et 7 hommes. Figure 139 : AGE 4 3 2 1 0 <15 15-24 25-34 35-44 45-54 55-64 65-74 75-84 >84 L'âge au diagnostic est plutôt jeune entre 35 et 64 ans avec un pic entre 45 et 54 ans. Figure 140 : Lieu de naissance 6 4 2 0 Suriname Fleuve Côte Ailleurs Le lieu de naissance est le Suriname, il s'agit donc toujours de patients originaires du fleuve. 72 Figure 141 : Lieu de vie 6 4 2 0 Fleuve Côte Mana Les lieux de vie sont également sur le fleuve pour la grande majorité. Figure 142: Types de comorbidités 4 3 2 1 0 Il est intéressant de souligner que 7 des patients présentaient des comorbidités au moment du diagnostic mais surtout que 4 d'entre eux étaient atteints d'anguillulose. Figure 143 : Sérologies associées 12 10 8 6 4 2 0 VIH VHB VHC HTLV1 Il est important de signaler que dans 100% des cas, les sérologies HTLV1 étaient positives! 73 Figure 144 : Stade au diagnostic 6 5 4 3 2 1 0 I II III IV NC Le stade IV est toujours le plus fréquent lors de la prise en charge diagnostique ce qui est de plus mauvais pronostic pour le patient. Tous les protocoles de chimiothérapie en première intention sont de type R-CHOP; en seconde intentions, 3 protocoles DHAP ont été proposés. SYNDROMES MYELO-PROLIFERATIFS (SMP) On note 14 patients atteints de SMP : 7 femmes et 7 hommes. L'âge médian au diagnostic est entre 40 et 50 ans tandis que les chiffres nationaux indiquent une fourchette entre 50 et 60 ans en Métropole. Figure 145 : AGE 8 6 4 2 0 Figure 146 : 8 7 Lieu de naissance 6 5 4 3 2 1 0 Côte Fleuve Antilles Ailleurs NC Guyane 74 Il y a trop de non-connus (NC) pour pouvoir étudier l'origine géographique des patients. Figure 147 : 10 Lieu de vie 8 6 4 2 0 cayenne kourou NC Figure 148 : sérologies associées 11 1 0 VIH 0 VHB VHC NC Figure 149 : Types SMP 8 4 2 LMC: leucémie myéloïde chronique; SMP: syndrome myélo-prolifératif sans précision. 75 Le GLIVEC est un inhibiteur de la Tyrosine kinase bcr-abl utilisé comme thérapeutique ciblée de première intention dans certains cas de SMP. De même, le SPRYCEL est un analogue du GLIVEC que l'on propose en cas d'échappement ou de résistance, en seconde intention. La chimiothérapie est l’HYDREA, administrée comme traitement symptomatique du syndrome tumoral. Figure 150 : CHIMIOTHERAPIE HYDREA 9 THERAPEUTIQUES CIBLEES SPRYCEL 6 GLIVEC 3 76 DISCUSSION Epidémiologie: 1-Données concernant la population générale: D’une superficie de 86 504 km2, la Guyane est la plus grande des régions françaises. Elle possède 300 km de côtes, 520 km de frontières avec le Suriname et 700 km avec le Brésil. C’est également la région française dont la population progresse le plus vite, grâce à la conjonction d’un taux de natalité élevé et d’un solde migratoire excédentaire1. La Guyane compte 221500 habitants soit une densité de 3 habitants /Km2. 108673 femmes et 110593 hommes sont dénombrés dont 22% des 25-54 ans sont sans activité professionnelle. 52% de la population n'aurait pas de diplôme. La population de la Guyane est très jeune. En effet, les plus de 60 ans représentent seulement 6% de l’ensemble de la population, soit quatre fois moins qu’en métropole. Presque la moitié de ses habitants a moins de vingt ans, soit presque deux fois plus qu’en métropole2, 6. En comparaison, la France métropolitaine compte 64.3 millions d'habitants soit une densité de 117 habitants /km2 dont le taux de chômage est de 9.5% chez les 25-54 ans. La situation économique et sociale de la population guyanaise y est donc globalement plus défavorable que dans d’autres DOM et a fortiori qu’en métropole. Plus de 30 % de la population bénéficie du Revenu Minimum d’Insertion (RMI), le taux de chômage est plus élevé ainsi que le nombre de familles monoparentales, dont on sait la plus grande faiblesse économique. La question de la population de personnes en situation illégale sera discutée plus loin3. 2-Epidémiologie des comorbidités: Dans l’analyse des comorbidités de cette étude, nous avons constaté une grande majorité de facteurs de risque cardiovasculaires. En effet, 40% des patients ont au moins un facteur de risque cardiovasculaire dont 31% d'hypertension artérielle (HTA), 16.5% de diabète et 5.4% de tabagisme actif. Cela correspond aux chiffres de l'INVS pour la population Antilles-Guyane en 2008, tous sexes confondus. Les femmes représentent deux tiers des cas atteints d'hypertension artérielle. Or, selon les chiffres nationaux de la métropole, on observe une plus grande prévalence de l’HTA aux Antilles-Guyane par rapport à la métropole (18,4 vs. 9,6 %, p<0,001), écart en partie lié à une plus forte prévalence de l’obésité (16,9 vs. 8,9 %, p<0,001). Chez les hommes, l’écart de prévalence entre les Antilles-Guyane et la métropole est moindre, respectivement 19,5 vs. 16,2 %, p<0,0017. Le taux brut de prévalence du diabète traité en Guyane pour les assurés du Régime Général stricto sensu est de 2,7% en 20078. Il varie selon le sexe et l’âge. Les femmes de 70 à 79 ans présentent un taux de prévalence de 24%. A titre de comparaison, le taux de prévalence maximum pour la France métropolitaine en 2005 est constaté pour les hommes de 70 à 79 ans : 18%. La prévalence du diabète en Guyane, à structure d’âge et de sexe identique à celle de la France métropolitaine, serait de 5,6%, au lieu de 2,7% en taux brut. En Guyane, le taux de prévalence du diabète serait de 2 points supérieur à celui de la France métropolitaine. Mais, tout comme l'HTA, il est plus souvent observé en Antilles Guyane chez les femmes, avec un âge médian de 59 ans alors qu'en métropole, les hommes sont plus souvent concernés avec un âge médian de 65 ans8. 77 Par ailleurs, 51% des personnes âgées de moins de 70 ans ne présentent aucune comorbidité tandis que 25% n'en ont qu'une seule. Chez les personnes âgées de plus de 70 ans, 30% ont une comorbidité et 25% en ont deux. Ces chiffres sont inférieurs à ceux de la métropole. Mais il n'existe pas d'étude précise comparant le nombre de comorbidités à l'âge chez des patients atteints de cancer. 3-Epidémiologie des cancers: Pour la période 2010 à 2013, le nombre de nouveaux cas de cancers est de 390 (201 cas diagnostiqués avant janvier 2012), correspondant à un taux brut de 177 pour 100.000 habitants, dont 44% chez les hommes. Or, le Registre de Guyane faisant état des tumeurs diagnostiquées entre 2003 et 2005, rapporte un taux brut de 215 cas pour 100.000 habitants dont 60% d'hommes9. De même, nous retrouvons un âge médian au diagnostic d'environ 45-50 ans alors que le registre rapportait un âge médian de 64 ans en 2005. Chez les hommes, le cancer le plus fréquent est le cancer du côlon (29 cas) suivi du cancer de l'estomac (26) et de la prostate ou ORL (25). Alors que pour le registre de 2005, le cancer de la prostate était majoritaire suivi du poumon puis de l'estomac. Chez la femme, le cancer du sein est de loin le plus fréquent (123 cas), puis les tumeurs du col de l'utérus (34), suivis des cancers de l’ovaire et du colon. L'âge médian au diagnostic est 4554 ans, données correspondantes à celles du registre de 2005. C'est donc chez les hommes que les types de cancers ainsi que l'âge médian sont différents de ceux rapportés dans le registre du cancer de Guyane. Cela reflète simplement un biais de sélection dû à la comparaison de chiffres hospitaliers avec des chiffres de registre de population générale. De plus le mode de recueil que nous avons adopté évolue avec le temps et l’avancement de l’organisation. C’est donc l’existence de nombreux biais qui rend très fragiles les comparaisons. Il n’en reste pas moins intéressant d’examiner ces données qui reflètent une pratique. Cependant, en comparaison avec la métropole, le nombre relatif de tumeurs de la prostate que nous rapportons entre 2010 et 2013 (10%), reste peu important (34% en métropole). Cela est parfaitement lié à un biais de recrutement car l’autorisation d’urologie est localisée au CMCK à Kourou. Concernant le cancer du sein, un nombre relatif de 36.7% au CHAR ces trois dernières années correspond tout à fait aux chiffres de métropole5, 10. L'incidence de cancer du sein a nettement augmentée entre 2005 et aujourd'hui en Guyane (27% en 2005). Cela s'explique par la mise en place d’une campagne de dépistage organisée efficace, la mise en place de moyens de diagnostic et une population de plus en plus sensibilisée. Toutefois, comparativement à la métropole, le taux de dépistage reste insuffisant en Guyane, 45% vs 60%, pour un objectif européen à atteindre de 70%5. Le cancer du col est beaucoup plus fréquent en Guyane qu'en France métropolitaine avec un nombre relatif de 17.8% des cancers incidents vs 2.3% en métropole, soit quatre fois moins. Comparaison des registres nationaux des cancers Il est intéressant de comparer également les chiffres du registre du cancer de Guyane avec ceux des registres de cancers d'Afrique Noire. Certains pays bénéficient de données épidémiologiques précises telles que décrites dans les figures suivantes. 78 Figure 151 : Incidence cancers chez l'Homme Pourcentage 50 40 30 20 10 0 Foie Colon Peau 43 14,9 13,1 0 11 0 Côte Ivoire 15,6 4 8,8 2,8 4,4 21,2 Nigeria Congo 29,2 22,1 0 2,3 0 3,7 4 22,7 7 4,2 0 6,6 GUYANE Prostate Poumon Estomac 0= Non-connu Figure 152 : Incidence cancers chez la Femme Pourcentage 50 40 30 20 10 0 GUYANE Sein Col Poumo Ovaires n 6,3 0 Colon Lymph omes Peau 27 17,8 3,2 0 0 12,4 0 0,8 3,26 2,6 3,6 10,5 Nigeria 0 17,5 40,4 3,7 0 3,1 0 Congo 30,1 26,3 0,5 5,7 1,8 1,2 3,5 Côte Ivoire On constate ainsi qu'en Côte d'Ivoire11 les cancers de la peau, du sein et de la prostate sont les plus fréquents tandis qu'au Nigéria ce sont les tumeurs pulmonaires pour les femmes et de la prostate pour les hommes. Les âges médians au diagnostic sont respectivement 51 ans et 49 ans. Au Nigéria12, 13 le cancer de la prostate occupe la première place chez l’homme, le cancer du poumon puis le cancer du col chez les femmes. Au Congo14, les cancers du sein et du col sont aussi fréquents qu'en Guyane ainsi que ceux de la prostate chez l'homme. On note aussi une grande incidence des cancers du foie chez l'homme. Au Sénégal15, le cancer du sein est le deuxième cancer le plus fréquent après le cancer du poumon; à noter une forte incidence du cancer de la vessie (1.8%) due à l'endémie de Bilharziose. Au Gabon16, le cancer du col représente 26.5% des cancers et le cancer du sein 39% suivis des LNH, 7.1% chez les femmes. Chez les hommes, les cancers du foie et la peau sont les plus fréquents. Au Cameroun17 se pose le problème de l’augmentation de l’incidence du cancer du Larynx dont le taux augmente beaucoup à cause d'une augmentation du tabagisme actif. 79 Globalement, la fréquence relative du cancer du col en Afrique Subsaharienne varierait entre 7 et 15%, due à un âge jeune au premier rapport sexuel et à une multiplicité des partenaires18. Il est important de souligner que toutes les données analysées précédemment sont issues de registres nationaux. Comparaison de registres hospitaliers. Nous allons ensuite examiner les registres hospitaliers recueillis de façon probablement identique à notre recueil de données. Au Gabon, une étude rétrospective menée en 1967 à l’Hôpital Albert-Schweitzer de Lambaréné19 rapporte le nombre de cancers diagnostiqués entre 1950 et 1965 ; 196 cas ont été découverts dont 18 tumeurs du col de l'utérus, 15 du foie, 11 lymphomes non-hodgkiniens et 8 cancers de la prostate et des ovaires. Ces données hospitalières retrouvent une majorité de cancers du foie et du col de l'utérus comme dans le registre national de 1996. En Guyane, l’étude de l’Hôpital Jean Martial publiée en 195220 fait état d'une majorité de cancers de l'estomac suivie du sein puis du col. L'âge médian au diagnostic est situé entre 40 et 60 ans. Or, selon le dernier registre de Guyane, le cancer de la prostate est largement prédominant suivi du poumon chez les hommes. En Guadeloupe, en 2006, chez les femmes, on comptait 37% de cancers du sein, 14% de cancers du col, 7.5% de tumeurs du corps de l'utérus et 5.7% des ovaires. Ces fréquences relatives sont inférieures aux chiffres de France métropolitaine sauf pour le col de l'utérus où la fréquence est nettement plus élevée, comme en Guyane21. En Martinique, les fréquences relatives sont de 57.3% pour le cancer du sein, 16.9% pour le cancer du col de l'utérus. La Guadeloupe est le département de la Caraïbe qui présente le moins de cancers du sein et du col depuis 2006. En Haïti, l'incidence du cancer du col est la plus élevée. Il est intéressant de noter que l’âge médian de survenue du cancer du sein est plus bas aux Antilles (58 ans) qu’en France métropolitaine (70 ans). Cette différence d’âge n’est pas totalement expliquée par la pyramide des âges dans la mesure où, les taux d’incidence spécifique par tranche d’âge et standardisée à l’âge de la population mondiale sont inférieurs de cinq ans en Guadeloupe par rapport à la France métropolitaine. Ces résultats rejoignent d’autres observations similaires publiées aux États-Unis pour les populations dites afroaméricaines et évoquent l’hypothèse d’un âge de survenue plus précoce du cancer du sein, dans les populations partageant des origines subsahariennes. De plus, près de 41 % des cas de cancer du sein en Guadeloupe (37 % en Martinique) sont diagnostiqués avant 50 ans, alors que ce pourcentage n’est que de 23,3 % en France métropolitaine. Au Cameroun en 1997, un recueil intra-hospitalier chez les personnes de plus de 50 ans retrouve chez l'homme 22% de tumeurs foie et prostate, 19% de cancers de la peau et 9% de cancers ORL; chez les femmes, on note 31% de cancers du col, 18% du sein et 12% de cancers de la peau17. En Guyane, un recueil de données chez les personnes âgées de plus de 70 ans retrouve sur une période de deux ans, 71 cancers diagnostiqués chez les patients nés avant le 1er janvier 1940. L'âge médian est de 78 ans; on note 16 tumeurs du colon, 8 du poumon et 7 de la prostate. Le stade au diagnostic est souvent régional ou métastatique22. Ces deux études de cas sur le sujet âgé sont apparemment les seules publications actuelles focalisées sur les sujets âgés. 80 Organisation générale de la cancérologie, santé publique: Le dispositif mis en place par l’Institut National du Cancer (INCa)23 dans le cadre des deux précédents plans cancer (2005-2009 et 2010-2014) comporte : l’organisation des Réunions de Concertation Pluridisciplinaires (RCP), la remise du Parcours Personnalisé de Soins (PPS), l’organisation de la Consultation d’Annonce (CA), l’organisation des Soins de Support (par exemple dans le cadre d’un Département Interdisciplinaire des Soins de Support en Oncologie [DISSPO] comportant l’accès à une consultation douleur, à une équipe de soins palliatifs, à un diagnostic et un support social, à un support de psycho-oncologie et l’ensemble des arbres de décision concernant les soins de support). Par ailleurs ce dispositif impose l’organisation d’un réseau de cancérologie qui organise les arbres de décision pour la prise en charge spécifique du cancer mais aussi les soins de support. Enfin il est nécessaire d’évaluer la qualité par diverses procédures organisées par l’INCa23, l’HAS24 et l’ARS25. 1-Evolution de la prise en charge basée sur les dispositifs de l'INCa: a. Evolution du nombre de patients: En 2010, 84 nouveaux patients ont été admis à l'HDJA pour prise en charge d'un cancer. En 2011 et 2012, on en décompte environ 150 par an. Le nombre de cas diagnostiqués et suivis au CHAR de Cayenne n’a pas pu être étudié car nécessite une analyse par le PMSI et une vérification du diagnostic principal. Le service de l'HDJA du Centre Hospitalier de Cayenne a été créé en 1998 (" http://www.ch-cayenne.net"), mais la coopération avec le Centre LéonBérard n’a débuté que fin 2009. Le nombre de nouveaux patients pris en charge chaque année est le reflet du développement d'une structure de soin et d'un accès aux soins durant ces trois dernières années. D’ailleurs une récente analyse de l’activité de la Mission Oncologie vient confirmer cette observation (Pr JP Droz, communication personnelle): - Le nombre de dossiers discutés en RCP en 2012 et 2013 a été de 369 et 350 respectivement - Le nombre de consultations de la Mission Oncologie en 2012 et 2013 a été de 510 et 644 respectivement. En effet, certains objectifs de coopération sanitaire en cancérologie ont été mis en place ou sont actuellement à l’étude afin d’optimiser la prise en charge des patients: - Travail avec l’ARS sur les projets de cancérologie - Travail avec les partenaires du GCS sur les projets de cancérologie - Coopération avec le réseau ONCOGUYANE - Travail de réflexion et de médiation territoriale avec les Centres de soins et de santé et les médiateurs culturels. - Organisation de la pris en charge des patient atteints de cancer avec les hôpitaux de Kourou et de Saint-Laurent, les centres de soins et de santé et les organisations d’HAD/ SAD et les médecins traitants. b. Mise en place des RCP: Le nombre de RCP est passé de 78 sur 204 patients en 2010 à 147 sur 156 patients (soit près de 100%) en 2012 au sein de la structure de cancérologie de Cayenne. Cette nette progression est due à la mise en place de missions d'oncologie médicale effectuées par le Pr Droz et le Dr Fayette (praticiens du Centre Léon-Bérard à Lyon) à partir 81 de la fin 2009. Ces oncologues médicaux spécialistes ont organisé des Réunions de Concertation Pluridisciplinaires hebdomadaires de la manière suivante. Organisation et gestion de la RCP hebdomadaire (incluant Saint-Laurent). La Mission d’Oncologie ayant lieu chaque mois une RCP est organisée en présence du médecin spécialiste, les trois autres RCP du mois sont organisées en visioconférence (WEBEX®). Les médecins reçoivent chaque semaine le lundi une invitation à la RCP qui a lieu le jeudi à 9H (quelle que soit la saison) ; ils reçoivent une fiche de demande de RCP (exemplaire en annexe) qu’ils renvoient avant le mercredi soir. Les dossiers sont discutés en présence des demandeurs, de l’anatomopathologiste du CHAR, des médecins généralistes de l’HDJ, des médecins responsables de l’EMSP et de l’HAD et de l’un des médecins de la Mission Oncologie. Ce dernier consigne les conclusions qu’il signe et la fiche est envoyée par mail aux participants à la RCP et à différents correspondants du CHAR et du CLB pour archivage et suivi. La fiche RCP est imprimée par la secrétaire de l’HDJ et archivée par ordre chronologique dans un classeur mais aussi dans le dossier HDJ du patient (et maintenant dans le DPU). La fiche est reçue par le demandeur qui a la charge de l’archiver localement si nécessaire et de l’envoyer au médecin traitant. Lorsqu’il est nécessaire d’avoir un avis spécialisé, le médecin de la mission se charge de transmettre la fiche avec les questions qui se posent au chirurgien ou au radiothérapeute du CLB. Parfois le dossier est présenté en RCP spécialisée au CLB. Les informations et avis reçus sont alors incorporés à la fiche RCP. Par ailleurs, les structures suivantes ont été mises en place : Un Thésaurus et arbre de décision en mars 2010, actualisés et validés par le réseau ONCOGUYANE, puis prévision d’une mise à jour en janvier 2014 et extension au domaine du DISSPO. Organisation du DISSPO, basé : - sur les liens avec l’Equipe Mobile de Soins Palliatifs (EMSP) et lits de soins palliatifs. - Prise en charge de la douleur - Consultation d’annonce et ERI (Espace Renseignement Information pratiqué par les infirmières de consultation d’annonce). Les Infirmières de consultation d’annonce ont été formées dans le cadre du réseau ; ce sont soit des IDE (trois) soit des aides-soignantes (deux) de l’HDJ. Elles assistent aux consultations de la mission et à certaines consultations des médecins de l’HDJ. Elles notent les informations recueillies selon un formulaire standardisé qui est conservé dans un classeur de l’HDJ accessible à leurs collègues. Elles remettent au patient le PPS et le carnet de soins, elles font visiter les locaux de l’HDJ et expliquent la réalisation des soins au patient en début de traitement et servent de référent au patient. - Parcours personnalisé de soins (PPS) : il est remis au patient au moment de la CA. - Mise en place d’un CREX (Commission de retour d’Expérience) pour l’HDJ, donc limité aux questions d’organisation de l’Oncologie Médicale) - Mise en place d’une RMM (Réunion de Morbimortalité) en oncologie médicale, chirurgie viscérale et gynécologie. - Convention cadre entre le CLB et le CHAR, qui a été signée en février 2012 et qui sert de cadre aux relations entre les deux institutions. - RCP organisées avec CMCK de Kourou (hors du cadre de ce travail). 82 c. Réalisations des traitements, autorisations: Sur les 594 cas sur 3 ans étudiés, 350 personnes ont bénéficié de chirurgie, tous types d'intervention confondus. 375 patients ont eu une chimiothérapie et 189 une radiothérapie. Les structures médico-chirurgicales du CHAR ont des autorisations pour la la chirurgie viscérale et la chirurgie gynécologique, pour la pratique de l’oncologie médicale, permettent d'effectuer les chimiothérapies ainsi que certaines thérapeutiques ciblées. Par contre il n’y a pas d’autorisation de chirurgie du sein ni en urologie (la chirurgie en oncourologie est autorisée au CMCK de Kourou). Aucune structure de Guyane n’a d’autorisation pour la radiothérapie pour le moment. L’autorisation d’Oncologie médicale est détenue par le CHAR et le CMCK de Kourou (dans ce dernier établissement, présence d’un médecin qualifié en oncologie médicale). Au CHAR le fonctionnement est basé sur deux médecins PH en médecine générale ayant une formation en cancérologie (le profil est le « cours de chimiothérapie » et le DU de Cancérologie de l’Institut Gustave-Roussy) qui traitent les malades en HDJ ou hospitalisés. L’encadrement, la prescription, la mise en place de la chimiothérapie est assurée par les deux médecins spécialistes du CLB qui assurent trois à 10 jours de consultation chaque mois sur place, qui assurent chaque semaine les RCP et peuvent être contactés en permanence par mail ou par téléphone. d. Filière et EVASAN: En 2010, les évacuations sanitaires étaient très fréquentes: 69% des patients partaient en métropole pour une prise en charge médico-chirurgicale. Selon le Registre de Guyane 2005, 53% des interventions chirurgicales, 72% de la chimiothérapie et 100% de la radiothérapie se faisaient hors-Guyane. En 2012, seuls 45% des patients étaient envoyés en EVASAN depuis l’HDJ et la Mission Oncologie vers la métropole, notamment pour bénéficier d'une radiothérapie ou d'une chirurgie particulière (essentiellement sénologie et ORL). De plus, en 2010, seulement 8% des EVASANS étaient orientées vers le Centre Léon Bérard (CLB). Grâce à l'organisation des RCP et des missions directement en coordination avec le CLB, les évacuations sanitaires se sont en majorité concentrées vers le CLB afin d'assurer un suivi plus sûr des patients entre le CHAR et le CLB (75% des EVASANS en 2012). Il faut donc retenir que le nombre d’EVASAN a légèrement augmenté mais que le pourcentage d’EVASAN par rapport au nombre total de patients pris en charge a nettement diminué. Cela témoigne d’une meilleure structuration de la filière. e. Données manquantes: Lors du recueil de données, nous avons constaté un certain nombre d'informations manquantes dans les dossiers, informatisés ou pas. Il existe en effet deux structures de dossiers. Le premier est celui du dossier papier archivé à l’HDJ puis aux archives centrales lorsque le dossier n’est plus actif. Ce dossier contient la photocopie des éléments issus des dossiers papier des services et consultations (en particulier CRO, CRH, fiches RCP, résultats d’examens d’imagerie, de la biologie, double des dossiers d’EVASAN, etc.) depuis mai 2013 les dossiers sont gérés selon le principe du DPU (dossier patient Unique, sous forme d’un dossier papier). Le second est un archivage sur un espace dédié et protégé du hardware CHAR qui est dénommé « Mission Oncologie ». Son accès est limité aux médecins de l’HDJ, aux 83 médecins de la Mission Oncologie, à la secrétaire, l’assistante sociale et le cadre infirmier de l’HDJ. Il contient les fiches RCP sous WORD, toutes les consultations de la mission, les documents et compte rendus envoyés par mail. Une mise à jour avec une copie de protection est assurée par le Pr JP Droz. Ce fichier informatisé a été mis en place en septembre 2011. On note que 24.7% des lieux de vie n'étaient pas renseignés dans les dossiers ainsi que 36% des lieux de naissance. Ces données manquantes ne nous permettent donc pas d'établir des conclusions sur les répartitions géographiques car elles sont beaucoup trop nombreuses, rendant les résultats non significatifs. Il faut remarquer que la recherche a été aussi faite sur le dossier administratif CORA du CHAR, ce qui veut dire que ces données sont mal renseignées aussi au niveau administratif hospitalier. Il est important de souligner que les sérologies VIH, VHB, VHC et HTLV1 n'ont pas été effectuées/précisées dans 56 à 65% des cas. Les infections par VIH et d'HTLV1 étant considérées comme endémiques en Guyane, cela nous aurait permis d'établir des liens entre comorbidités et cancers plus intéressants. De même, pour les patients infectés, les traitements antiviraux et le statut immunitaire ne sont pas souvent mentionnés dans les dossiers (ces données sont demandées dans la dernière version de la fiche RCP). Les lieux des interventions chirurgicales ne sont pas non plus souvent répertoriés dans cette série, ce qui ne nous permet pas de comparaison avec les informations du registre de Guyane 2005, à savoir quel est le pourcentage d'interventions hors-Guyane. Pour le cancer du sein, un quart des résultats de récepteurs hormonaux et d’expression de HER2 est non-connu alors que cette information représente un facteur pronostic majeur. Pour le cancer du col, on note que 85% des statuts sérologiques sont inconnus. Le type de Human Papilloma Virus n'est pas non plus défini lors du diagnostic. Nous ne savons donc pas quel type de virus est responsable du taux élevé de tumeurs du col de l'utérus en Guyane (quatre fois plus qu'en métropole). Enfin, 206 fiches de RCP papier n'ont pas été retrouvées dans les dossiers correspondants alors que nous avions la preuve que la réunion avait eue lieu. Nous avons pu les récupérer grâce au dossier informatique créé en septembre 2011. 2-Origine et lieu de vie des patients: a. Problème de l'éloignement des établissements de soins: Comme nous l’avons vu, la Guyane est le plus grand département de France, entièrement recouverte de forêt amazonienne et de fleuves, sauf sur la région côtière. Les villes avec des infrastructures adaptées sont uniquement localisées sur la côte, notamment à Cayenne, Kourou et Saint-Laurent. Les autres bourgs possèdent juste un centre de santé ou de soins où exercent médecins et infirmiers avec peu de moyens paracliniques à disposition. 84 Figure 153 : Trois pôles de soins • Cayenne: – – – – – 1 Centre Hospitalier (Centre Hospitalier Andrée Rosemon) 1 Clinique 2 Hospitalisations à Domicile 2 Soins de Suites et de Réadaptation 3 Etablissements d’Hébergements de Personnes Agées Dépendantes • Kourou: – 1 Centre Médicochirurgical (CMCK) – 1 HAD Et les postes de santé Et centres de soins • Saint Laurent du Maroni: • 1 CH (CH Ouest Guyanais-CHOG – Franck Joly) • 1 SSR • 1 HAD Ainsi, les patients ne résidant pas sur la région côtière doivent se déplacer en pirogue ou être récupérés en hélicoptère pour rejoindre ces pôles de soins. D’autres doivent voyager en avion depuis Maripasoula ou Saul. Certains diagnostics sont évoqués tardivement et certaines prises en charge sont trop irrégulières à cause de cette difficulté géographique d'accès aux soins. b. Problème de l'immigration, manque de données socio-administratives: La population guyanaise est le fruit de vagues d’arrivées successives qui ont produit une société véritablement pluriculturelle. Toutefois les autochtones sont les amérindiens. Ensuite depuis le XVIème siècle vont venir la peupler les africains amenés comme esclaves qui vont être l’origine d’une part des différents groupes de « noirs marrons » et des créoles guyanais. Une importante part de la population est aussi constituée de créoles originaires des Antilles. Il ne reste pratiquement aucuns descendants des blancs colonisateurs ni des bagnards. Si les Chinois et les Saint-Luciens se sont installés en Guyane depuis le 19ème siècle, c’est-à-dire bien avant la loi du 19 mars 1946 qui en fait l’un des quatre départements d’outre-mer, la Guyane connaît depuis quelques années une augmentation significative du nombre d’Haïtiens et de Surinamiens3. En 2005, 55.390 immigrés résidaient en Guyane, ce qui représente 29 % de la population régionale. Aujourd'hui, ils représentent près de 40% de la population. Des quatre départements d'Outre-mer, la Guyane est celui où la présence immigrée est la plus forte : en Guadeloupe les immigrés représentent 5 % de la population (21 200 personnes) et moins de 2 % en Martinique et à la Réunion (respectivement 5 300 et 10 000 immigrés). En métropole, cette proportion varie de 1,6 % en Bretagne à 14,7 % en Île-de-France, pour une moyenne nationale à 7,4 %26. Il est important de souligner que ces chiffres comprennent à la fois les immigrés en situation régulière et ceux en situation irrégulière connus. De ce fait, il est très difficile de définir une démographie précise car le nombre d'immigrés en situation irrégulière est probablement sous- 85 estimé. De même, cela ne nous permet pas de déterminer qui a une couverture sociale et qui n'en a pas. Au total parmi la population des immigrés de Guyane, quel que soit leur statut administratif, on retrouve approximativement: • Haïtiens: 15% • Brésiliens: 15% • Créoles antillais: 15% • Métropolitains: 10% • Hmongs: 3.000; Chinois, libanais, javanais, indiens,etc. • Surinamais (Bushinengués et créoles): 33% • dont 50 à 80.000 clandestins ( ?), donc de personnes en situation irrégulière (10.000 orpailleurs) Les patients appartenant à ce groupe n'ont pas souvent de couverture sociale et on ne possède que peu de renseignements administratifs concernant leur suivi médical. Leurs antécédents sont méconnus et les prises en charge antérieures dans leur pays d'origine sont mal décrites. La consultation tardive et la barrière de la langue sont régulièrement problématiques dans les pôles de soins en Guyane. Le suivi est tout aussi chaotique par la suite. c. Perspectives démographiques à 20 ou 30 ans: - Démographie de la population de Guyane : La Guyane serait de loin la région française la plus dynamique sur le plan démographique, avec une croissance annuelle moyenne de la population de 3,1 % entre 2007 et 20404. Elle serait suivie par La Réunion, avec 0,9 % par an sur la même période, et des régions de France métropolitaine les plus dynamiques. L’évolution démographique régionale serait tout à fait singulière par rapport aux départements antillais. La Guyane deviendrait, à partir de 2030, la région la plus peuplée des trois. En effet, la population de la Martinique augmenterait très faiblement au cours des trente prochaines années alors que celle de la Guadeloupe stagnerait. En 2040, la Guyane demeurerait, de loin, la région française la plus jeune avec un âge médian de 30 ans, 10 ans de moins que la seconde région la plus jeune (La Réunion) et 13 ans de moins qu’au niveau national. Cet âge médian augmenterait toutefois de quatre ans par rapport à 2007 notamment du fait de l’allongement de l’espérance de vie27. Le scénario correspondant à une hypothèse « migration basse » conduirait à une population 2,3 fois supérieure à celle de 2007. Á l’inverse, avec le scénario « migrations hautes », la population projetée en 2040 serait 3,1 fois plus grande qu’en 2007. Sur la base de ces deux scénarii extrêmes, la population guyanaise serait comprise entre 482.000 et 665.000 d’ici 20404. - Démographie médicale en Guyane : En 2008, l’effectif est de 343 médecins répartis en 202 généralistes (58,9%) et 141 spécialistes (41,1 %). L’âge moyen des praticiens guyanais est de 49,5 ans. 71,3% des généralistes et 78,0% des spécialistes de Guyane sont installés dans sa zone « Cayenne » Contrairement aux deux autres départements des Antilles, la Guyane bénéficierait selon les prévisions d’une croissance quasi régulière de sa population médicale entre 2008 et 2030. Elle passe de 343 médecins à 577 soit une augmentation de 68,2%. L’effectif serait composé en 2019 de 276 généralistes et de 182 spécialistes (39,7%), en 2030, 328 généralistes et 249 spécialistes (43,1%)28. 86 Figure 154 : 3-Offre médicale en cancérologie en Guyane: ce que l'on peut ou ne peut pas faire. a. Diagnostic: Le centre hospitalier de Cayenne bénéficie d'un service d'anatomopathologie et de radiologie médicale avec Scanner, IRM et certains gestes de radiologie interventionnelle. Le CMCK de Kourou et le CHOG de Saint-Laurent disposent d’un scanner. Le CHAR et le CMCK disposent d’un mammotome. Par ailleurs, la scintigraphie osseuse et tous les examens de médecine nucléaire ne sont pas disponibles en Guyane. b. Autorisations de chirurgie: La chirurgie cancérologique n'est réalisable qu'au CHAR de Cayenne, dans des domaines bien précis : la gynécologie (curage ganglionnaire, hystérectomie, annexectomie bilatérale, colpectomie..etc), la chirurgie viscérale à l’exception de la chirurgie du pancréas et du foie. L’autorisation de chirurgie urologique du cancer (cystectomie, néphrectomie, prostatectomie) est détenue par le CMCK de Kourou. La demande d’autorisation en chirurgie sénologique a été faite et acceptée en novembre 2013, mais pas encore mise en place. Aucun hôpital de Guyane n’est autorisé pour la pratique de la chirurgie des cancers ORL, thoraciques ou du système nerveux central, ni la chirurgie des cancers de l’enfant et celle des sarcomes (en particuliers osseux). Par contre certains gestes d’urgence de neurochirurgie sont possibles. c. Autorisations d'oncologie médicale: Depuis le début de la coopération du CHAR et du CLB, l'oncologie médicale est encadrée par les médecins oncologues spécialistes venant du CLB chaque mois. Deux médecins qui travaillent en Guyane à temps plein sont PH, médecins généralistes mais ont effectué une formation d'oncologie médicale non qualifiante. Toutes les décisions et tous les protocoles de prise en charge et de suivi se font en coordination avec les recommandations de la Mission Oncologie du CLB. Ainsi, les chimiothérapies sont autorisées au CHAR, avec toutes les 87 infrastructures nécessaires, en particulier une préparation centralisée de la chimiothérapie avec prescription informatisée et un personnel soignant bien formé. Une telle structure est également présente au CMCK de Kourou avec la présence d’un médecin qualifié et une autorisation de pratiquer les traitements médicaux du cancer. Une convention a été signée également entre le CMCK et le CLB pour la gestion de la cancérologie. Les RCP, les consultations d'annonce, les bilans d'extension et les examens complémentaires de suivi sont également réalisés sur place. Par contre la chimiothérapie intensive avec support de cellules souches hématologiques et la chimiothérapie des leucémies ne peuvent être réalisées en Guyane. d. Question de la radiothérapie: La radiothérapie n'est pour l'instant pas envisageable en Guyane. Il existe en effet des obligations sur le nombre de machines, la présence de radiothérapeutes et de physiciens qui imposent un nombre d’actes suffisant pour les justifier (en pratique au regard du nombre de cancers à traiter, donc de la population). Bien entendu la progression démographique dans l’avenir changera ces conditions. La radiothérapie est donc réalisée hors Guyane (Antilles ou métropole). e. Indication des thérapeutiques couteuses: A la différence de la chimiothérapie classique, le concept des thérapies ciblées repose sur une connaissance approfondie des mécanismes moléculaires impliqués dans la cancérogenèse. Le développement de cette classe de produits a été rendu possible par les progrès réalisés dans la compréhension de la biologie de la cellule cancéreuse. C’est grâce à la modélisation des protéines normales et de leur équivalent « anormal » (qui résulte de certaines mutations) que l’on a pu comprendre le fonctionnement aberrant de la cellule cancéreuse. Ainsi, le développement des thérapies ciblées est guidé par des principes rationnels, permettant de bloquer le fonctionnement d’une ou plusieurs protéines dans la cellule cancéreuse. D’une manière générale, toutes ces nouvelles thérapeutiques reposent sur les notions de récepteurs (membranaires ou intra cytoplasmiques), de ligands, et d’activation des protéines, le plus souvent par phosphorylation via une enzyme appelée kinase. Leurs principales indications actuelles sont le cancer du sein, du colon, du poumon et du rein. Ces thérapeutiques sont accessibles en Guyane et réalisées à l'HDJA sous conditions de leur prescription dans le cadre de l’AMM et des bonnes pratiques par un médecin spécialiste qualifié. f. Essais thérapeutiques : La convention cadre entre le CHAR et le CLB permettra de faire accéder les patients atteints de cancers aux essais thérapeutiques : soit dans un cadre de traitement très spécialisé (par exemple de phase I ou de technique chirurgicale ou de radiothérapie) sur place au CLB, soit dans le cadre de la Guyane. C’est une perspective à développer avec les impératifs suivants : - Disposer d’un centre de data management, et dans ce cadre un contrat avec le CICEC de Guyane est possible. - Disposer d’un Comité d’Ethique sur place 88 - Faire un choix raisonnable en termes de recrutement : par exemple cancer du sein, cancer du côlon et cancer du col (voire cancer de l’estomac). Toutefois au cours de la période considérée il a été possible de faire bénéficier un patient d’une ATU (Autorisation Temporaire d’Utilisation) de Denosumab dans le cadre d’un cas de tumeur à cellules géantes et une patiente d’un essai phase I (cancer du poumon). Par ailleurs le CHAR participe au projet du PHRC sur « cancer et infection VIH » accepté début 2013 pour financement par l’INCa. 4-Stades évolutifs des cancers curables (sein, col, colon). Une enquête menée au CHU de Brazzaville en 2010 sur les patients diagnostiqués à un stade de cancer avancé (III ou IV) avait pour but de définir quels étaient les facteurs principaux de retard au diagnostic29. Cette étude a relevé un facteur de responsabilité faible des patients euxmêmes. La population était essentiellement féminine (67,4%). L’âge des patients était en moyenne de 53,8 ans (21 à 83 ans). La responsabilité directe du patient pour se rendre en consultation était de 24,5 % par ignorance et peur du diagnostic. Le personnel hospitalier, les paramédicaux et les médecins installés en cabinet privé sont intervenus pour la plus grande part (40,8%). Les médecins hospitaliers, spécialistes ou non, ont été déterminés comme responsables dans 25,5 % des cas. Les patients ont été essentiellement vus en hospitalisation (68,6 %) et la plupart avaient un niveau d’éducation scolaire absent ou primaire (70,9%)29. Par ailleurs, une étude menée en 2010 a permis de faire l’état des lieux des chances de survie à 5 ans de différents cancers dans différentes régions du Monde30. A Singapour, en Turquie et en Chine, le taux de survie à 5 ans variait de 63 à 82% selon le cancer (63% pour le col, 76 pour le poumon et 82 pour la prostate). En Gambie et en Ouganda le taux de survie n’excédait pas 22% tous types de cancers confondus. Ces résultats étaient corrélés avec des stades de diagnostic tardif III ou IV en Afrique. Dans les données épidémiologiques africaines de 2013, le sarcome de Kaposi est décrit comme un cancer dont la fréquence est comparable au cancer du côlon dans les pays occidentaux. Cela s’expliquerait par le statut endémique du VIH dans certaines régions telles que le Zimbabwe. Par ailleurs, il est précisé que l’incidence des cancers risque d’augmenter considérablement avec l’allongement de l’espérance de vie de ces populations. Le stade avancé et les comorbidités importantes au diagnostic sont des facteurs de mauvais pronostic pour les patients31. Ainsi, en Guyane, le niveau de précarité sociale approche celui observé dans certains pays d’Afrique, mais cependant on constate des diagnostics précoces du cancer de plus en plus fréquents. L’accessibilité aux soins est meilleur qu’en Afrique et les campagnes de prévention récentes commencent à faire leur effet. Les Principaux cancers : a. Cancer du sein: La moitié des tumeurs diagnostiquées au cours de ces trois dernières années étaient à un stade localisé (57/134). L'âge médian est de 45-54 ans avec chez les femmes de 35-44 ans plus souvent des stades avancés. Les cancers de mauvais pronostic selon l'étude des récepteurs, sont retrouvés dans un quart des cas. Dans la moitié des cas ils sont de bon pronostic. 89 On retrouve 74 patientes sur 96 (77%) patientes ou cela a été recherché, avec HER2 négatif. Or, une étude menée en 2012 montre une prévalence plus élevée de cas HER2 négatifs chez les femmes noires, que ce soit en Afrique de l’Ouest, en Jamaïque ou aux Etats-Unis32. Le cancer du sein triple négatif (TPN) n’exprime aucun récepteur hormonal (œstrogène et progestérone) ni récepteur HER2. Il est en général considéré comme similaire au sous-type moléculaire basal. Il est plus grave que les autres sous-types de cancer du sein (risque de rechute plus grand et plus précoce, taux de mortalité supérieur33. Il survient à un âge plus jeune que les autres sous-types, il représente environ 15% des cancers du sein. Dans notre série nous observons 23% définis TPN, en sachant que le profil de 27 cas sur 123 est inconnu. Il est remarquable qu’il a été décrit une plus grande fréquence dans les populations d’origine africaine et une plus grande fréquence dans ces cas de la présence d’une mutation germinale de BRCA133. Une étude plus précise de nos cas serait intéressante. Pour ce qui concerne les mutations de BRCA (BRCA1 et BRCA2), nous n’avons pu recueillir cette information lors du recueil de données que chez une patiente. En fait cela est dû au fait que la proposition de recherche d’une prédisposition n’est faite que si les conditions d’observation d’un cancer du sein répond aux critères habituels (âge jeune de survenue, cancer bilatéral, association cancer du sein/cancer de l’ovaire, deux apparentées au 1er et 2ème degré atteintes de cancer du sein ou de l’ovaire (BRCA1) ou autres associations (BRCA2). D’une part il faut que le clinicien y pense, d’autre part qu’il interroge la patiente, que la famille de la patiente soit suffisamment étendue et enfin que la patiente ait une connaissance de l’état de santé de sa famille (difficile pour des personnes immigrées, surtout clandestines, et parfois diagnostic non connu pour des raisons culturelles comme les haïtiennes). Cependant, une étude menée au Nigeria en 2012 décrit une grande fréquence de mutation de BRCA1 dans une population jeune au moment du diagnostic. L’âge médian en Guyane étant aussi plutôt jeune lors du diagnostic, peut-être que retrouverions nous des chiffres similaires aux données sub-sahariennes34. Néanmoins cela est du domaine de la recherche (au Nigeria cette étude a été faite sous l’impulsion d’un leader de la génétique du cancer du sein, d’origine nigériane mais travaillant aux USA : le Pr I Olopade). Depuis 2009, le Nigeria considère le cancer comme un problème de santé publique et des Hospital Based Cancer Registries (HBCR) ont été mis en place afin d’évaluer la situation épidémiologique du pays. Par ailleurs, selon une étude menée en 2013, 90% des femmes auraient entendu parler du cancer du sein, 49% connaissent les facteurs de risque et 65% peuvent en identifier les premiers symptômes. Seulement 17% font un contrôle régulier chez le médecin35. Au Ghana, en 2013, l’âge médian au diagnostic est de 50.3 ans avec 50% de découverte au stade TNM III ou IV. En Malaisie et à Singapour, l’âge médian est de 50 ans avec une variation de 14 à 22% de stades III au diagnostic36. En métropole, l'âge médian au diagnostic est de 63 ans avec un taux de mortalité bien plus important après 80 ans. Les stades au diagnostic étaient in situ dans 14% des cas en 2009. En 2004-8 l’extension selon le stade local, régional, métastatique était en Côte d’or (Source : Registre des cancers du sein et autres cancers gynécologiques de Côte d’Or cité par l’état des lieux sur le cancer du sein de l’INCa10) et en Guyane de 47,8 et 48% ; 37,4 et 42% ; 6 et 10% respectivement9. Cela est du même ordre de grandeur. Par ailleurs, en 2010-2011, le taux de dépistage du cancer du sein organisé était de 60% en France métropolitaine tandis qu'il restait inférieur à 45% en Guyane10. 90 Au total, le pourcentage de cancers localisés en Métropole était de 47% en 2009 et de 40% pour les stades régionaux. Nous avons retrouvé 50 cancers localisés et 57 cancers régionaux sur 124 dans notre recueil de données. Selon le registre du cancer de Guyane de 2005, les stades au diagnostic se répartissaient comme suit : 29% de pT1 (tumeur ≤ 2cm), 41% de pT2 (tumeur > 2cm et ≤ 5cm), 15% de pT3 (tumeur > 5cm), 7% de pT4 (tumeur de toute taille : extension à la paroi thoracique ou à la peau) et 7% sans renseignement. Environ 44% des patientes avaient un envahissement ganglionnaire au diagnostic. Selon l’arbre décisionnel mis en place avec le Centre Léon Bérard (cf Figure 59), 92% des patientes ont bénéficié de chirurgie, 63,5% ont reçu de la radiothérapie et 76,4% de la chimiothérapie. Sachant qu’en Guyane, la chirurgie du sein et la radiothérapie ne sont pas encore autorisées, toutes ces patientes ont étaient traitées hors du département. La difficulté de prise en charge et le nombre d’évacuations sanitaires pour ce type de cancer sont donc très importants en Guyane. Une mesure possible est l’obtention d’une autorisation pour la pratique de la sénologie. Par contre ce n’est pas actuellement possible pour la radiothérapie. b. Cancer du col: Le cancer du col de l'utérus est quatre fois plus fréquent en Guyane qu'en métropole avec un taux d'incidence de 22.5 cas/an vs 7 cas/an entre 2003 et 200837. Figure 155 : Stade Guyane Hérault I 41% 39% II 13% 28% III 24% 18% IV 20% 12% Non connu 2% 3% Stade au diagnostic Les stades tardifs au diagnostic sont plus fréquents qu'en métropole, notamment dans les régions rurales. La proportion de stades I est identique à la France métropolitaine pour une incidence quatre fois plus élevée! 73% des femmes en Guyane sont diagnostiquées sur symptômes (essentiellement métrorragies). Dans notre étude, 59% des patientes ont eu une chirurgie, 64,7% une radiothérapie et 41% une chimiothérapie. Ces chiffres correspondent aux données du registre du cancer de Guyane de 2005. Ces patientes ont donc été évacuées vers la métropole pour accéder à la radiothérapie au cours de ces protocoles de soins. Pour le cancer du sein comme pour le cancer du col de l’utérus, la difficulté de prise en charge ne réside pas seulement dans la sensibilisation de la population à un dépistage précoce, il faut également convaincre la patiente de quitter le département et sa famille, puis organiser une évacuation sanitaire dans les meilleurs délais. 91 Figure15637 Guyane France Rapport Taux Incidence Taux Mortalité 28 (23-33) 7 (6.80-7.33) 10.6 (7.39-13.95) 4 (2.85-5.51) 5.5 (2.89-10.38) 1.95 (1.82-2.08) En 2012, l’Agence Internationale de Recherche pour le Cancer (IARC)38 a lancé un vaste projet de prévention et de sensibilisation du personnel soignant pour le dépistage et la prise en charge précoce des cancers du col de l’utérus, du sein et les cancers oraux. Ils ont ainsi réunis 600.000 participants à travers de nombreux pays tels que l’Angola, le Brésil, le Burkina Faso, la Chine, le Congo, la Guinée, l’Inde, le Mali, la Mauritanie, le Nigéria, le Népal, le Pérou, la Tanzanie et la Thaïlande. Figure 157 : World-wide locations of IARC’s screening initiatives in collaboration with national institutions for the prevention and early detection of cervical, oral and/or breast cancers. Au Nigeria, une étude épidémiologique réalisée dans différents hôpitaux a permis de constater que 39% des patientes étaient diagnostiquées à un stade III et 17% à un stade IV. 67% des patientes venaient d’un milieu rural et étaient illettrées, 27% avaient des partenaires multiples et seulement 1.6% avaient déjà fait un frottis cervico-vaginal dans leur vie. Le taux d’incidence des cancers du col au Nigeria est comparable à celui de la Guyane, pour les mêmes raisons sociales : illettrisme, éloignement des centres de santé, absence de prévention, partenaires multiples, âge jeune des premiers rapports sexuels39, 40. (Figure 151). Aux Antilles, l’incidence de ce cancer est de 15%, soit légèrement inférieur à la Guyane mais toujours nettement supérieur à la France métropolitaine avec un âge médian au diagnostic de 58 ans contre 51 ans en métropole ; cela est le reflet de diagnostics tardifs souvent en raison de l’absence de couverture sociale des patientes qui ne consultent que lors de l’apparition de 92 symptômes. Le taux de mortalité est en revanche identique à celui de la France métropolitaine21. Au Congo, le cancer du col représente 15.2% des cancers chez les femmes dont 6.8% de lésions intra-épithéliales (LIE) de Haut grade. A Brazzaville, une étude menée pendant 18 mois révèle que l’âge médian au diagnostic est de 42 ans avec une majorité de patientes ayant eu leurs premiers rapports sexuels entre 12 et 17 ans18. La co-infection du virus de l’immunodéficience acquise humaine (VIH) avec les HPV oncogènes est un facteur de risque supplémentaire qui tend à faire augmenter cette fréquence surtout dans les zones de haute endémicité du VIH en Afrique subsaharienne. Dans notre étude, on note 11% des patientes ayant une sérologie VIH positive au moment du diagnostic de cancer du col. L’âge médian de survenue des lésions intra-épithéliales de haut grade est estimé à 36 ans. Cette moyenne est relativement superposable à celle retrouvée dans des études africaines au sud du Sahara41. Mais cet âge médian peut être critiquable au regard des données démographiques de la population générale qui situent le moyenne des femmes en période d’activité génitale autour de 35-45 ans. La précocité des rapports sexuels et la multiplicité des partenaires apparaissent clairement dans notre étude, avec un écart relativement long entre la période possible de contamination primaire du Papilloma Virus Humain et l’apparition des lésions dysplasiques. Cette évolution est classiquement estimée entre 10 et 20 ans, expliquant le pic de survenue du cancer du col de l’utérus à un âge médian de 47±2 ans. c. Cancer du colon: Avec environ 40.500 nouveaux cas estimés en 2011 en France métropolitaine, dont 53 % survenant chez l’homme, le cancer du côlon-rectum (CCR) se situe, tous sexes confondus, au troisième rang des cancers les plus fréquents après le cancer de la prostate (71.000 nouveaux cas) et le cancer du sein (53.000). L’âge médian au diagnostic n’est pas disponible pour 2011. Il était estimé en 2005, à 70 ans chez l’homme et 73 ans chez la femme. En Guyane, l'âge médian au diagnostic n'est pas calculable chez l'homme car le nombre de tumeurs est également réparti dans toutes les tranches d'âge. Chez la femme, l'âge médian est de 45 ans. La majorité des stades sont régionaux au diagnostic, surtout chez les hommes. Les chiffres nationaux ne sont exprimés qu'en terme de mortalité soit 13.8 pour 100.000 hommes et 8.3 pour 100.000 femmes en 20115. D’après les données du registre des cancers de la Martinique42, le CCR est par ordre de fréquence au deuxième rang chez la femme et au quatrième rang des cancers chez l’homme. On observe une inégalité dans la répartition géographique des CCR dans le monde. Il existe des zones à forte incidence comme l’Europe occidentale, l’Amérique du Nord, le Japon, la Nouvelle Zélande et des zones à faible incidence comme l’Amérique du Sud, l’Asie, l’Afrique38. L’incidence du cancer du côlon parait en Guyane sensiblement moins importante qu’en métropole et aux Antilles. Toutefois nous n’avons pas inclus dans le groupe le cancer du rectum, qui ne peut être opéré en Guyane, du fait de la spécificité de la chirurgie. Il faut remarquer combien ce cancer est découvert à un stade tardif (seuls 17/50 patients -24%- sont pris en charge à un stade localisé) 93 d. Cancer de la prostate : Dans ce recueil de données, 25 patients atteints de cancer de la prostate sont répertoriés avec un âge médian au diagnostic de 55-64 ans. Or, en France métropolitaine, l’âge médian est de l’ordre de 65-70 ans. Au moment du diagnostic, les stades sont également répartis entre stade local (+/- régional) et métastatique avec une majorité de stades avancés chez les jeunes. En métropole, le cancer de la prostate est le premier cancer chez l’homme (34% de la totalité des cancers masculins) et la troisième cause de décès par cancer chez l’homme après le cancer du poumon et du colon. En revanche, le taux de mortalité décroit de 4.3% par an depuis 2003 grâce à un diagnostic précoce5. En Guyane, les données du registre9 montrent pendant la période 2003-5 un nombre de 258 nouveaux cas de cancer de prostate (taux brut de 91,7/100.000) et 32 décès. L’âge médian au diagnostic était de 69 ans et celui au décès de 77 ans. Ces chiffres sont en tous points différents de ceux que nous avons relevés. Plusieurs biais sont en cause : l’existence d’une autorisation d’urologie à Kourou, le fait que beaucoup du recrutement du CHAR est essentiellement lié à l’indication de traitements médicaux. L’extension des indications de traitements médicaux et de thérapeutiques ciblées vont conduire à une modification du recrutement. Toutefois cela souligne l’intérêt d’un recueil à l’échelon territorial des données. Au Nigeria43, en 2012, parmi les patients ayant un cancer de la prostate entre 2002 et 2003, 73.4% présentaient des comorbidités importantes telles que insuffisance rénale, trouble urinaire, infection urinaire chronique, hypertension artérielle ou diabète de type 244. Dans notre recueil de données, l’hypertension artérielle est la comorbidité majeure. L’âge médian au diagnostic est de 70 ans mais il est intéressant de souligner qu’entre 2005 et 2010, 46% des patients avaient entre 40 et 46 ans. Or, selon cette étude, l’âge n’a pas de rapport avec le degré de différentiation cellulaire au diagnostic (score de Gleason)43. En Guadeloupe45, 46, selon le rapport épidémiologique de 2009, 80% des cancers étaient diagnostiqués à un stade localement avancé, pour un âge médian de 68 ans. 41% des patients présentaient une obésité ou un surpoids. Les formes agressives avec un score de Gleason supérieur ou égal à (4+4) étaient retrouvées dans 27% des cas45. L’incidence globale de ce cancer en Guadeloupe et en Martinique est de l’ordre de 152 pour 100.000 habitants vs 80 pour 100.000 habitants en France métropolitaine. Pour les deux départements antillais, cette incidence apparaît donc largement supérieure. Les données internationales montrent clairement la très grande variabilité de l’incidence de cette tumeur selon les régions du monde. Globalement, l’incidence du cancer de la prostate apparaît plus élevée dans les régions économiquement développées, telles que l’Amérique du Nord et l’Europe, que dans les autres régions moins développées. Ces différences peuvent être partiellement expliquées par des facteurs reliés au développement socioéconomique, tels que l’accessibilité aux soins ou le recours au diagnostic précoce par le PSA, ainsi que par une diversité de facteurs environnementaux et nutritionnels suspectés de favoriser la survenue de la maladie. Cependant, des différences notables sont constatées selon les origines géographiques et les groupes ethniques. Ainsi, en Asie, l’incidence y est très faible quel que soit le développement socioéconomique du pays. À l’inverse, au sein d’une même région où pays, des différences notables existent selon l’appartenance ethnique des populations. C’est le cas aux États-Unis, où l’on constate des incidences croissantes qui vont des groupes asiatiques chez qui l’incidence est la plus faible vers les populations afro-américaines chez qui l’incidence est la 94 plus élevée, alors que les groupes caucasiens d’origine hispanique ou anglo-saxonne présentent des incidences intermédiaires47, 48. Certains facteurs environnementaux ont été invoqués. Ainsi aux Antilles49, la culture bananière, victime d’agressions par des insectes rampants et des nématodes, est utilisatrice de près de 80 % des pesticides importés, la majorité des matières actives étant des insecticides appartenant à la famille des organophosphorés ou des carbamates. Le chlordécone constitue un cas particulier pour plusieurs raisons50. Destiné à lutter contre le charançon du bananier, il a été employé depuis le milieu des années 1970 jusqu’en 1993. Ses caractéristiques physicochimiques, couplées à sa très faible dégradation biotique et abiotique, ont conduit à sa persistance dans l’environnement, polluant les sols et contaminant diverses ressources en eau et certaines denrées alimentaires locales, en particulier les légumes racines. Ainsi, la question de la responsabilité des pesticides dans la survenue de lésions tumorales, notamment de cancers de la prostate aux Antilles, est actuellement posée. De nombreuses études réalisées de par le monde convergent pour affirmer que les populations agricoles et/ou résidentes dans un milieu rural présentent un excès de risque de cancer de la prostate par rapport à la population générale. Cependant, l’hypothèse qu’un tel excès de risque soit relié à l’utilisation de pesticides n’a pas encore été formellement démontrée49. De tels faits ont été invoqués en Guyane mais aucune donnée objective ne vient l’étayer. D’autres facteurs génétiques ou épigénétiques, comme le polymorphisme de CY17 peuvent être en cause51. e. Cancer ORL : Dans ce recueil de données, entre 2010 et 2012, nous avons retrouvé 33 cancers ORL dont 27 carcinomes épidermoïdes (4,5% des cancers recueillis) : cancers de la langue, du pharynx, de l’oropharynx, du larynx, tumeurs des fosses nasales, du voile du palais, des cordes vocales, de la lèvre inférieure et du cavum. La majorité des stades au diagnostic étaient loco-régionaux. Une majorité d’hommes était concernée. Ces chiffres sont apparemment plus élevés que les données nationales de la France métropolitaine. En France métropolitaine, les cancers ORL sont au huitième rang des cancers (3% de l’ensemble des cancers) les plus fréquents avec 80% d’hommes atteints. Les facteurs de risque les plus importants sont le tabac et l’alcool. Nous n’avons pas relevé lors de notre étude les sérologies HPV des patients. Cependant, il est intéressant de constater qu’une étude menée en 2009 a mis en cause le rôle du HPV dans le pronostic de ces cancers ORL. En effet, le taux de tumeurs épidermoïdes a considérablement augmenté ces dix dernières années et plusieurs publications ont confirmé la présence du HPV chez les malades, avec un mode de transmission sexuel. Dans cette étude, l’utilisation d’antiEGFR associée au protocole de traitement habituel a permis un meilleur contrôle locorégional de la tumeur et l’augmentation des chances de guérison des patients. Ainsi, le diagnostic du virus HPV lors du diagnostic de cancer ORL est un important facteur pronostic et prédictif de la prise en charge52. Au Mali et au Sénégal, en 2012, 86,8% de la population était HPV positifs. On retrouvait 49% de virus HPV16 et 19% de virus HPV18 et 45. Le VIH était positif pour la plupart des patients atteints de HPV 18 et 45. Il a été donc évoqué l’idée que le VIH jouerait un rôle dans l’expression du HPV 18 et 4553. Cela expliquerait peut-être la recrudescence de ces tumeurs en Guyane par rapport à la métropole. 95 f. cancer de l’estomac : Parmi les cancers de l’estomac, nous avons répertorié trois-quarts d’adénocarcinomes soit 26 tumeurs et de plus 6 linites gastriques. La majorité des stades au diagnostic étaient régionaux avant 54 ans puis métastatiques après 54 ans. Il y avait 3 fois plus d’hommes que de femmes. Nous n’avons pas pu faire rechercher systématiquement la présence d’helicobacter pylori chez les patients de l’étude. 22 patients ont bénéficié de chirurgie, 24 ont reçu de la chimiothérapie et 3 de la radiothérapie. 6 patients ont été mis en soins palliatifs dès le diagnostic. Selon le registre du cancer de Guyane9, le taux standardisé de tumeurs gastriques est 2,5 fois plus important qu’en métropole avec un taux de mortalité 2,7 fois plus important également. Dans le monde, les cancers gastriques sont bien plus fréquents au Japon et en Amérique du sud38. L’infection par Helicobacter pylori, la spécificité génétique et le régime alimentaire de l’hôte sont les principaux facteurs impliqués dans ce cancer. Le risque augmente notamment avec un régime salé, riche en aliments fumés (les viandes séchées, salées ou fumées sont en troisième position des dépenses alimentaires en Guyane après le pain et la viande de volaille). Au Zaïre et au Nigeria, en 2011, une étude menée sur la prise en charge des patients a conclu que 27% des patients avaient des complications post-opératoires dont 16% associées à des comorbidités ou à des métastases péritonéales. Ainsi, la prise en charge chirurgicale des cancers gastriques dans les pays en développement suggère de bien tenir compte des facteurs de risques post-opératoires de complications54. Nous avons volontairement limité notre discussion à ces principales tumeurs solides qui sont soit les plus fréquentes soit posent des questions spécifiques à cette zone équatoriale. De la même façon, nous limitons la discussion sur les hémopathies aux rapports avec les infections virales identifiées. 5-infections virales identifiées: cancers et virus Les virus sont le deuxième facteur de risque de cancer après le tabagisme. Ils sont impliqués dans 15% des cancers humains. Les virus oncogènes pour l'homme sont incapables de provoquer par eux-mêmes le processus de carcinogenèse complet et agissent toujours en association avec d'autres co-facteurs pour aboutir à la transformation maligne de la cellule. On pense que les virus sont en général impliqués à un stade précoce de la carcinogenèse. Des facteurs génétiques, immunologiques ou environnementaux fourniraient ou faciliteraient les événements mutationnels supplémentaires à la progression tumorale. La cellule infectée deviendra maligne après une série d'événements se succédant sur une période assez longue allant de quelques années à quelques décennies55. 96 a. Répartition globale des positivités des sérologies virales par type de cancer. Figure 158 : Agents biologiques cancérigènes reconnus par l’IARC. (D’après V Bouvard Lancet Oncology 200956) Agent biologique Cancers certains Cancers possibles Mécanisme Epstein-Barr virus UCNT, LNH Burkitt, Carcinome gastrique, Prolifération, inhibition apoptose, instabilité (EBV) LNH de carcinome lymphogénomique, migration l’immunosuppression, épithéliaux cellulaire LNH NK/T extranodal, Hodgkin CHC Virus Hépatite B Cholangiocarcinome, Inflammation, cirrhose, hépatite chronique (VHB) LNH CHC, LNH Cholangiocarcinome Inflammation, cirrhose, Virus hépatite C fibrose hépatique (VHC) Prolifération, inhibition Maladie de Castelman Herpes Virus du Sarcome de Kaposi, apoptose, instabilité génomique, multifocale Kaposi (HHV8) LNH pleural primitif migration cellulaire Virus de Sarcome de Kaposi, Vulve, vagin, penis, Immunosuppression l’immunodéficience Hodgkin, LNH, col, peau (non (action indirecte) Humaine (VIH) anus, conjonctive mélanome), CHC Col, vulve, vagin, anus, Immortalisation, Larynx Human Papilloma cavité orale, oropharynx, instabilité génomique, Virus (HPV)* amygdale Virus LymphotropicT (HTLV1) Helicobacter Pylori ATL leucémie et lymphome Carcinome gastrique non cardial, MALT gastrique Cholangiocarcinome Cholangiocarcinome - inhibition réparation et apoptose Immortalisation et transformation cellules T Inflammation, stress oxydatif, prolifération, méthylation, mutations Inflammation, stress Clonorchis sinensis oxydatif, prolifération, Opisthorchis viverrini Inflammation, stress Schistosoma Cancer épidermoïde oxydatif haematobium vessie IARC: International Agency on Research on Cancer; UCNT: undifferentiated carcinoma of the nasopharynx tumor; LNH: lymphome non-hodgkinien; CHC: carcinome hépato-cellulaire; ATL: acute T-lymphocytic; MALT: mucosa associated lymphoid tissue. -* Les différents types de virus HPV cancérigènes sont montrés dans le tableau 161. Clonorchis sinensis, Opisthorchis viverrini et Schistosoma haematobium ne sont pas présents en Guyane. Une étude menée en Martinique entre 1990 et 1998 établissait un registre des tumeurs hématologiques et avait inclus une étude des sérologies virales57. Soixante-dix-neuf nouveaux cas par an en moyenne furent répertoriés, avec une majorité de Myélomes multiples (33%) et de Lymphomes Non-Hodgkiniens (LNH) (22,9%). L’âge médian au diagnostic était de 65 ans. Parmi 164 cas de LNH étudiés, 45 patients avaient des anticorps HTLV-1 et 3 étaient VIH positifs. Les lymphomes T adultes représentaient 57% de la population de LNH. Ces chiffres sont également retrouvés à Taïwan, au Japon et en Jamaïque alors qu’ils sont moins 97 importants en Europe et aux Etats –Unis, probablement à la rareté de l’infection HTLV-1 dans ces pays. Dans notre recueil de données, la majorité des pathologies hématologiques concernait les myélomes et les lymphomes non-hodgkiniens de haut grade. Les ATL représentaient 12% des cas soit 11 personnes atteintes, pour un échantillon de 12 patients ayant une sérologie HTLV1 positive. Une autre étude menée au Gabon en 2003, a révélé une relation entre le portage de l’AgHBS et les syndromes lympho-prolifératifs de type B58. La carcinogénèse vis-à-vis du système lymphoïde de l’HTLV-1 est bien établie mais elle ne concerne que les lignées T, comme cela a été montré par des études africaines. Par exemple une étude nigérienne n’a pas mis en évidence de relation entre ce virus et d’autres variétés de lymphomes ou avec des Leucémies Lymphoïdes Chroniques. En 1997, une vaste étude épidémiologique a relevé une responsabilité directe du Human Papilloma Virus (HPV) dans l’incidence du cancer du col, ainsi qu’une augmentation du taux de carcinomes hépatocellulaires chez les patients infectés par le virus de l’Hépatite B (VHB) et un risque relatif augmenté de 37% d’avoir un LNH si les patients ont une sérologie EBV (Epstein Barr Virus) positive59. En revanche, il n’existerait pas de preuve d’un lien direct entre d’autres virus et d’autres cancers. Le VIH serait un facteur de risque par son rôle d’inflammation chronique et d’immunosuppresseur. Le virus EBV est associé au développement des lymphomes immunoblastiques, des lymphomes à cellules B, certains types de lymphomes à cellules T, et de la maladie de Hodgkin. En Asie du Sud-Est, il est associé au carcinome nasopharyngé (carcinome épidermoïde). Il est aussi impliqué dans le Lymphome de Burkitt, tumeur maligne des tissus lymphatiques chez les enfants dans le centre et l'est de l'Afrique, en association avec l'infection à VIH et à la malaria dans bien des cas. Il semble qu'on rencontre le virus EBV dans plus de la moitié de la catégorie des cancers du sein ayant le plus mauvais pronostic55. 98 Figure 159 : Calcul de la fraction de la population de cancers attribuables aux virus par agent infectieux et par site de cancer (D’après C de Martel Lancet Oncology 201260, 61) Agent infectieux Risque relatif Prévalence estimée Site tumoral Type Lab RR Aire géographique Helicobacter pylori Ch/CC ELISA 5.9 Monde Estomac non cardia LNH gastriques MALT & DLBC Ch/CC ELISA 7.2 Monde Virus hépatitiques HBsAg 23 CC Sahel* CHC - VHB 17 Asie du sud-est CHC - VHC ELISA Amérique du sud Océanie ELISA Ch/CC LNH 2.5 Pays en développement* HPV à haut risque Col CC PCR >100 Monde Penis CC PCR NA Monde Anus CC PCR NA Monde Vulve CC PCR NA Monde Vagin CC PCR NA Monde Oropharynx CC PCR NA Pays en développement* HHV8 Ch/CC HHV8 100 Monde Kaposi DNA % 90 86 84 86 82 44 17 100 50 88 43 70 13 100 HTLV1 Ch/CC 100 NA Monde ATL lymphomes et leucémies IARC: International Agency on Research on Cancer; UCNT: undifferentiated carcinoma of the nasopharynx tumor; LNH: lymphome non-hodgkinien; CHC: carcinome hépato-cellulaire; ATL: acute T-lymphocytic; MALT: mucosa associated lymphoid tissue; HHV8: Herpes Virus du Kaposi ; HTLV1: Virus Lymphotropic-T ; Lab : méthode de dosage au laboratoire ; RR : risque relatif ; Ch : étude de cohorte ; CC : cas-contrôles ; ELISA : méthode de titration ; PCR : polymerase chain reaction ; NA : non applicable -* ne sont considérés ici que les régions comprenant une zone intertropicale ((par exemple pour les cancers ORL et HPV, le % de prévalence est très élevé, de l’ordre de 50% en Amérique du Nord, Europe de l’Ouest, Australie et Japon. L’impact de la carcinogénèse due au virus EBV est quasiment nul en Guyane. Clonorchis sinensis, Opisthorchis viverrini et Schistosoma haematobium ne sont pas présents en Guyane. Ces agents infectieux n’ont pas été introduits dans ce tableau. Figure 160 : Cette figure montre le nombre de cas attribuables aux agents infectieux dans les zones de haut développement économique et les zones moins développées (D’après C de Martel Lancet Oncology 201260). Pays moins développés Pays développés VHB/VHC 520.000 80.000 HPV 490.000 120.000 Helicobacter 470.000 190.000 autres 138.000 22.000 99 600 500 400 PMD 300 PD 200 100 0 VHB/VHC HPV HP Autre PMD= pays moins développés ; PD= pays développés. Le nombre absolu (et la proportion) de cancers dus à des agents infectieux est beaucoup plus important dans les pays en développement et (par analogie) les pays intertropicaux que dans les pays à haut niveau de vie. b. Physiopathologie des cancers liés au VIH et résultats de l’étude : Dans ce recueil de données, nous avons retrouvé 4.7% de patients atteints de cancer ayant une sérologie VIH positive. Ce chiffre correspond aux données épidémiologiques du registre de Guyane. Il est largement supérieur au taux de VIH en France métropolitaine, et concorde plutôt avec les chiffres de pays en développement tels qu’en Haïti ou en Afrique subsaharienne. La majorité des patients dépistés étaient Haïtiens ou Brésiliens. Cependant, 56% des sérologies étaient non-connues, ce qui sous-tend probablement une sous-estimation importante du nombre des sérologies positives. Enfin, 30% des cancers chez les patients VIH+ étaient hématologiques avec un âge médian au diagnostic de 45-54 ans. Les tumeurs solides étaient très différentes, sans prédominance de type ou de localisation particulière. Concernant les hémopathies, on a retrouvé essentiellement des LNH de haut grade et des sarcomes de Kaposi (par co-infection avec les virus Herpès HHV8). Une étude menée en 1998 dans laquelle on a répertorié tous les patients atteints du VIH aux Etats-Unis et à Porto Rico depuis 1979, confirme le risque accru de LNH en fonction du stade d’immunodéficience des personnes. En effet, selon ces résultats, le taux de LNH augmente significativement chez les patients immunodéprimés en général, tels que les patients greffés rénaux ou les patients séropositifs au stade sida. Il en serait de même pour les myélomes multiples. Par ailleurs, il est intéressant de souligner que selon ces mêmes résultats, la plupart des patients séropositifs ayant un lymphome étaient aussi infectés par l’Epstein Barr Virus (EBV). En revanche, il n’y a pas eu de lien établi entre le VIH en tant que virus potentiellement cancérigène et le risque de tumeur solide62. En 2000, les même auteurs ont approfondi leurs recherches et ont constaté une diminution du risque relatif de sarcome de Kaposi et de LNH avec l’apparition des trithérapies antirétrovirales. C’est donc probablement le niveau d’immunodépression qui définit le risque de lymphome et non pas le virus VIH en lui-même. Par contre le risque de LNH de haut grade est seulement diminué de façon modeste par les trithérapies. Les risques de LNH et de 100 sarcome de Kaposi sont diminués chez les patients ayant un polymorphisme génétique de CCR5 delta 32(CCR = Chemokines receptor) homozygote alors que le risque de LNH est augmenté chez les malades ayant un polymorphisme génétique de SDFI-3’A (Stromale cell detected factor). Chez les enfants atteints de SIDA les même phénomènes sont observés mais on observe un risque élevé de leiomyosarcome63. Ces auteurs ont également constaté que les patients VIH+ sont plus souvent atteints de cancers du col et de cancer anal, mais cela parait dû à la forte prévalence de HPV dans cette population associée à une immunodéficience persistante. Dans cette même étude, les sérologies HHV8 étaient 100% positives chez les patients séropositifs. Il apparait donc que l’association HHV8-immunodépression représente un risque accru de sarcome de Kaposi. Par ailleurs, on a retrouvé des anticorps HHV8 dans les prélèvements salivaires de patients, ce qui amène à penser que la transmission de ce virus n’est pas uniquement sexuelle, ce qui expliquerait les cas de transmission mère-enfant en Afrique63. Pour les LNH, le risque relatif est plus important pour les lymphomes de haut grade immunoblastiques mais aussi pour les lymphomes à grandes cellules. Les patients à peau blanche seraient plus touchés par le LNH car ils expriment le polymorphisme génétique SDF1-3’A qui favorise les cellules B chémokines, avec deux fois plus de risque que les patients à peau noire si ils sont hétérozygotes et quatre fois plus si ils sont homozygotes63. Au Brésil64, entre 1980 et 2006, 433.000 cas de patients VIH+ ont été répertoriés. Parmi ces patients, 71% des patients ayant un lymphome étaient co-infectés par l’EBV. Cette étude a décrit également un rapport direct de cause à effet entre le niveau d’immunodéficience et le risque de LNH. Dans 25% des cas de sarcome de Kaposi, les patients étaient séropositifs. Ces chiffres correspondent aux données épidémiologiques des Etats-Unis. Au Cameroun en 200265, 66, sur 172 patients suivis pour une hémopathie, 26% étaient séropositifs. On a essentiellement retrouvé des sérologies positives chez les patients atteints de LNH de la lignée B. Ainsi, une hyper-activation des cellules B a été évoquée dans cette étude. Aux Antilles-Guyane67, 68, on a répertorié 1.998 patients VIH+ pour l’année 2000 dont on a analysé les causes de décès au cours de cette année. On a observé 81 décès : 39 en Guyane, 22 en Guadeloupe, et 20 en Martinique, ce qui représentait respectivement 6%, 3% et 4 % des patients. Pour les patients décédés du sida (n = 54 soit 67%), les pathologies les plus fréquemment en cause différaient entre la Guyane et les Antilles. En Guyane, l’histoplasmose prédominait suivie de la toxoplasmose cérébrale et du syndrome cachectique. En Guadeloupe et en Martinique, les mycobactérioses atypiques, la tuberculose et l’infection à cytomégalovirus étaient les plus fréquentes. Il y avait peu de cas de lymphome malin nonHodgkinien contrairement à la métropole69. L’âge médian des patients décédés était de 43 ans, 69 % étaient des hommes, le mode de transmission du VIH était hétérosexuel dans 79% des cas. En comparaison avec les patients métropolitains, les femmes et le mode de transmission hétérosexuel étaient plus souvent représentés. Dans ces régions, le diagnostic tardif et le retard de prise en charge du VIH reste trop souvent la cause de décès précoce du sida70. A contrario, en 2004 lors d’une étude menée dans les hôpitaux de France métropolitaine, sur 964 décès de patients infectés par le VIH, 28% des causes étaient des hémopathies avec une large majorité de lymphomes non-hodgkiniens71. Il apparait donc essentiel chez les patients atteints de cancer et tout particulièrement ceux atteints de LNH (surtout de haut grade) de rechercher systématiquement une infection par le VIH, et chez ceux dont l’infection est connue de noter le nombre de CD4 et la charge virale, reflets du contrôle de l’infection VIH. 101 Pour ce qui concerne spécifiquement la relation entre VIH+ et la présence de virus HPV sur le col utérin, une étude menée en Côte d’Ivoire en 2012 révèle que 9% des patientes séropositives avaient aussi un frottis cervico-vaginal positif au HPV72. Au Zaïre, 38% des femmes atteintes du VIH étaient HPV positives en 1993. Les sérotypes 16 ou 18 étaient retrouvés dans 21% des cas73. c. Virus VHB & VHC et cancers. Rôle en particulier dans les LNH Le virus de l'hépatite est associé de façon très étroite avec l'hépato-carcinome. Le virus B s'intègre dans le génome et l'hépatite chronique, entraîne une stimulation permanente de la mort et de la régénération cellulaire augmentant les risques de transmission des anomalies cellulaires. L'hépatite aiguë se transforme dans près de 10% des cas en hépatite chronique. Le virus de l'hépatite B s'intègre dans le DNA de la cellule hépatique, ce que ne fait pas le virus de l'hépatite C74. L'hépato carcinome est un cancer très fréquent dans le monde (le 5ème rang) et le troisième cancer mortel. Son incidence varie beaucoup d'un continent à l'autre : de 5.8 cas pour 100.000 hommes en Europe, à plus de 35 pour 100.000 en Asie de l'Est (notamment au Japon). Une autre région très atteinte est l'Afrique sub-saharienne. La plupart de ces différences sont en rapport avec la prévalence de l'infection chronique par le virus de l'hépatite (soit hépatite B soit hépatite C). En Asie, plus de 53% des hépato carcinomes sont en rapport avec l'hépatite B. Dans notre étude, on a retrouvé 3% de patients VHB positifs et 1% de VHC positifs. Cependant, le taux de non-connus était bien trop élevé pour obtenir un résultat significatif. En 2006, une étude de l’INVS a révélé une prévalence de 24,6% de dosage de l’anticorps anti-HBC positif en Guyane, contre 7,3% en France métropolitaine75. Ce pourcentage est proche de celui estimé au Brésil. Nous avons observé 8 cas de LNH chez des patients VHB+, ce qui représente un nombre notable. Cela irait dans le sens d’une étude menée en Corée qui montre un risque relatif de 1,74 chez les patients VHB+. Les LNH concernés sont essentiellement des LNH-B de haut grade. Une telle observation n’est pas faite avec le VHC76. En revanche, aucune étude ne retrouve un lien significatif entre l’infection du virus B et la survenue de cancer hématologique. La majorité de lymphomes présents dans notre recueil de données pour ces patients est due à leur co-infection avec le VIH ou l’HTLV1. d. Hémopathies liées à HTLV1 : description, physiopathologie, caractéristiques des populations. La leucémie aiguë à cellules T de l'adulte a été décrite comme une prolifération maligne des lymphocytes CD-4. Elle existe à l'état endémique au Japon et dans les Caraïbes. Elle ressemble au mycosis fungoïde ou au syndrome de Sezary, mais entraîne la mort du malade en seulement 2 à 4 mois. Elle est précédée fréquemment par une phase pré-leucémique sous forme de lymphocytose chronique. On observe très fréquemment une hypercalcémie maligne77. 102 Le virus HTLV-1 a été découvert par Gallo (1980), puis par Yoshida (1982). Les preuves de l'implication de ce virus sont claires : il est présent dans toutes les cellules malignes d'un malade, il peut infecter in vitro des T-lymphocytes CD-4 et les immortaliser. Son génome est intégré dans le DNA cellulaire, dans une seule région pour un même malade. On retrouve des anticorps anti-HTLV-1 chez tous les patients, et ils ne réagissent qu'avec les cellules malignes. Toutes les cellules leucémiques contiennent le virus, au même endroit pour un seul individu (origine clonale de la leucémie), mais à des emplacements variés sur le DNA pour deux individus différents77. Le rétrovirus infecte les enfants par le lait maternel, mais peut être transmis par voie sexuelle, transfusion sanguine ou souillures de seringue. On retrouve des anticorps anti-HTLV-1 de façon beaucoup plus large dans les zones tout autour de l'océan Pacifique (environ 12 millions d'individus seraient infectés). Entre 15 et 25 millions d’individus au total dans le monde seraient infectés. Les principales régions de forte prévalence d’infection à HTLV sont le Japon, en particulier le Sud-Ouest (1 à 35 %), les Caraïbes (2-6%), l’Amérique centrale, l’Afrique sub-saharienne (0,5 à 10%), l’Asie du Sud-Est et l’Océanie (Nord de l’Australie). Aux Etats-Unis, 0,014 à 0,021 % des donneurs de sang sont infectés avec une prédominance chez les femmes noires, hispaniques ou asiatiques. En France métropolitaine, la séroprévalence est faible et évaluée à moins de 0,003 %. Aux Antilles françaises et en Guyane, elle est de 2 à 3 %. Le risque de développer une leucémie chez les patients séropositifs est de l'ordre de 6.6 % chez l'homme et de 2.1 % chez la femme77. On peut prévenir la transmission du virus en supprimant l'allaitement par les mères infectées, les précautions dans les rapports sexuels et l'évitement des donneurs de sang infectés (ou l'utilisation de seringues à usage unique chez les drogués). Cependant, aucun vaccin n'a été trouvé à l'heure actuelle. Le dépistage systématique chez les femmes enceintes en France a parmi la stabilisation de la propagation du virus. De même, il existe un temps de latence très long entre l'infection initiale et le développement de la leucémie. Cependant, aucune méthode n'a été trouvée pour prévenir cette transformation tardive. Enfin, le traitement de la leucémie est très décevant et le pronostic est sombre. Cependant, des progrès récents ont été observés avec les greffes allogéniques et les antiprotéasomes comme le Bortezomib). 103 Dans notre étude, 3% des patients étaient HTLV1+. 12% des hémopathies étaient des ATL (Lymphomes T de l’adulte). Ces chiffres correspondent tout à fait données épidémiologiques décrites précédemment. En 2001, une étude a trouvé une forte concentration de patients HTLV1+ dans le village de Maripasoula sur le fleuve Maroni avec une prévalence élevée de transformation en ATL. Cela soulève la question de l’influence génétique des ethnies sur le virus78. En Guadeloupe79, la prévalence du HTLV1 est nettement inférieure aux autres départements des caraïbes ; en effet, elle se situe autour de 0,31% pour la Grande Terre et la Basse Terre avec beaucoup de co-infections avec le VHB. Cela s’explique probablement par un mode de transmission identique pour ces deux infections. En revanche, on retrouve 2% de HTLV1+ parmi les habitants de Marie-galante, les Saintes et la Désirade. Ce département présente de telles différences d’une île à l’autre pour diverses raisons historiques : jusqu’à l’abolition de l’esclavage, les villageois se mariaient entre eux et ne se mélangeaient pas selon qu’ils venaient de Marie-Galante, des Saintes, de la Désirade ou de Grande-Terre et Basse-Terre. C’est sur la grande île que les esclaves d’origine africaine étaient le plus présents, ils représentent donc la majorité des descendants guadeloupéens. Etant un gros producteur de sucre, la Guadeloupe était un carrefour commercial important, et donc une ouverture sur le Monde à l’origine de sa grande mixité ethnique. Cela a entrainé une grande variabilité de la distribution de la séropositivité HTLV1 dans ce milieu géographique79. Enfin, concernant le traitement de l’ATL, deux études ont confirmé qu’au-delà d’une polychimiothérapie type R-CHOP, il était nécessaire de traiter les patients avec des antirétroviraux contre le HTLV1. Ainsi, associé à un traitement efficace du lymphome, un traitement inhibiteur de HTLV1 permet d’espérer une survie supérieure à 80% à 5 ans. De même l’utilisation d’Etoposide orale et d’Interféron-alpha aurait une bonne tolérance et induirait une meilleure réponse que la chimiothérapie. Ces thérapeutiques seraient le gold standard pour le traitement de première intention de l’ATL80, 81. e. Virus associés : HPV et HHV8 : HPV : En Guyane, le cancer du col de l’utérus est le deuxième cancer de la femme après le cancer du sein. Cela correspond aux données de certains pays d’Amérique sud. En France métropolitaine, il est au dixième rang seulement. Ce cancer représente 18% des cancers de la femme en Guyane soit 4,3 fois plus qu’en métropole37. Par ailleurs, dans notre recueil de données, nous avons constaté que la majorité des femmes atteintes de tumeurs du col de l’utérus étaient originaires du fleuve côté Brésil ou Suriname. L’âge médian au diagnostic était entre 35 et 44 ans, ce qui est différent des données du registre du cancer de 2005 (45-54 ans). Il est aussi intéressant de noter que 11% des patientes présentaient une co-infection à VIH ; chiffre important que l’on retrouve dans les données des études sur le HPV en Afrique subsaharienne. D’ailleurs, une étude de 2013 au Sahel, en Afrique du sud et au Niger a retrouvé chez les patientes atteintes de cancer du col de l’utérus, une majorité de HPV type 16 et 18 puis 35 et 45 ; de même, plus de 10% des femmes étaient également infectées par le VIH. A l’inverse, 97% des patientes séropositives avaient un frottis cervico-vaginal anormal avec HPV retrouvé82, 83. En Europe, 70% des HPV sont de types 16 ou 18 ; c’est pour cela que la vaccination est essentiellement ciblée sur ces deux sérotypes. 104 Or, en Guyane, il n’y a pas de publication permettant d’identifier les types de HPV responsables d’une telle fréquence des cancers du col. C’est pourquoi en 2012, le CIC-EC du CHAR de Cayenne, a mis en place le projet HPV qui nous a permis de partir en mission de dépistage sur les fleuves Oyapoque et Maroni afin de déterminer clairement sur un échantillon de population suffisamment étendu, quels sérotypes prédominent en Guyane. Les premiers résultats seront disponibles prochainement. Parallèlement à cela, le projet HPV2 est en cours de réalisation à l’hôpital de jour du CHAR pour permettre un dépistage systématique des patientes séropositives. Ainsi, plusieurs hypothèses sont à explorer concernant les causes de transmission plus fréquente du HPV en Guyane par rapport à la métropole84 : - Les Amérindiens ne se mélangent pas aux autres ethnies et se transmettraient probablement le virus de génération en génération. - Les populations du fleuve ont des rapports sexuels très jeunes (12-13 ans), ce qui permet au virus une expression plus précoce autour de 35-44 ans après 10 ans de latence. - Chez les Brésiliens et les Surinamais, les mœurs sexuelles paraissent plus ouvertes et le nombre de partenaires sexuels est plus important. - La précarité socio-économique de nombreuses femmes ne leur permet pas une sensibilisation suffisante au dépistage et à la prévention du cancer du col. - Peu d’accès à la vaccination en raison de grandes inégalités sociales. HHV8 : Le HHV8 n’est pas un virus ubiquitaire, il est essentiellement présent dans le bassin méditerranéen, en Afrique de l’Est et en Afrique Centrale. On le retrouve également au Japon et en Amérique du sud sur la côte Pacifique. Sa transmission est sexuelle ou lors de la grossesse et de l’allaitement maternel. En 2005, une étude chez les Amérindiens de Guyane, 6 tribus au total, a permis d’identifier le HHV8 omniprésent dans cette population depuis plusieurs générations. 27% de la population était atteinte par ce virus, avec une majorité d’hommes et un âge de 16- 45 ans. Les Wayampi vivant sur l’Oyapoque à partir du village de Camopi étaient les plus touchés (30%). Le sous-type E était alors prédominant suivi par le sous-type B. La séroprévalence de ce virus parmi ce peuple est due à un isolement important et une absence totale de mixité avec les autres ethnies de Guyane85. Cependant, il est important de souligner qu’aucun sarcome de Kaposi n’a été diagnostiqué lors de cette étude. Cela s’explique simplement par la très bonne surveillance des dermatologues en Guyane et leur implication dans la prévention de ce cancer chez les Amérindiens avec la mise en place d’une Télémédecine efficace même dans les centres de santé isolés. Dans notre recueil de données, nous avons répertorié 3 sarcomes de Kaposi entre 2009 et 2012. Il s’agissait de trois hommes âgés de 36, 38, et 54 ans, originaires de Haïti, de Guyane et du Venezuela .Le patient né en Guyane, vivait à Saint-Laurent du Maroni, et n’était pas d’origine amérindienne. Ces trois patients étaient infectés par le VIH avec un taux de CD4 inférieur à 500 UI/L et une charge virale non-contrôlée au moment du diagnostic. 105 6-Aspects sociologiques et dispositifs du plan cancer, médiation culturelle. Groupes sociologiques différents : a. Description générale, lieux de vie et de naissance, données manquantes ou non accessibles (langue, origine, situation sociale, niveau scolaire) La Guyane comprend trois principales zones géographiques : la côte qui va de Cayenne à Iracoubo en passant par Kourou, la forêt qui occupe la plus grande partie du département, surtout en son centre, et le fleuve qui constitue la frontière avec le Surinam pour le Maroni et la frontière avec le Brésil pour l’Oyapoque1. L’accès aux soins est bien plus facile pour les gens vivant sur la côte car les centres hospitaliers se situent à Kourou et à Cayenne. Dans notre étude, 341 patients pris en charge vivaient sur la côte, soit 57,4%. Les lieux de naissance des patients, sont très variés. En effet, on constate des chiffres presque identiques de gens venant du fleuve, de la côte, d’Haïti, du Brésil ou du Suriname. La majorité des patients du groupe "Ailleurs" est constituée de personnes originaires de France métropolitaine ou des Antilles, à l'exception de quelques personnes venant d'Afrique. Par contre, le nombre de "Non Connu" est relativement important (36%), ce qui ne permet pas de conclure sur une éventuelle relation entre l'origine ethnique et le taux de cancers associés. Nous n’avons pu recueillir que les lieux de vie et de naissance pour notre étude. En effet, étant un recueil de données anonyme, sans consentement signé des patients, nous n’étions pas en mesure de leur demander leur langue natale ou leur niveau scolaire. La situation socioprofessionnelle des patients n’était pas non plus précisée. b. Caractéristiques connues par l’ethnologie et la sociologie Noirs marron86 : Constituées au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, lorsque les esclaves africains fuirent les plantations surinamiennes, six petites nations marronnes (Saramaka, Ndjuka, Matawaï, Paramaka, Kwinti et Aluku) se sont implantées le long des fleuves à l’intérieur de la forêt surinamienne, du fleuve Maroni, frontalier avec la Guyane française, et de l’un de ses affluents, également frontalier, le Lawa. Tous partagent le même modèle social : un chef fédérant des clans, chacun ayant fondé un ou plusieurs villages, soudés par des liens sacrés. Sur le plan civil comme pénal, ils portent la responsabilité de tous leurs membres. Le culte des ancêtres et la célébration des funérailles qui l’accompagnent constituaient le pilier de la société. Les lignées sont transmises sur le mode matrilinéaire. En outre, de grandes divinités et des esprits de possession offrent aussi leur protection, leurs interprétations de l’indicible, leurs bénédictions et des soins pour les maladies. L’économie de subsistance est fondée sur la culture sur brûlis du manioc, du riz et de l’arachide, sur les produits de la pêche, de la chasse et, à un moindre degré, de la cueillette. Les champs, appelés abattis en Guyane, sont annuellement défrichés par les hommes, avant d’être cultivés par les femmes et les enfants. C’est à la fin du XXème siècle que les premières migrations massives vers la côte débutèrent, lorsque la guerre civile a bouleversé le Surinam de 1986 à 1992. Aujourd’hui, les groupes marrons, vivant majoritairement sur le littoral surinamien ou guyanais, recourent aux institutions médicales et scolaires de l’État français. Pour ceux qui se trouvent en situation régulière en Guyane, des aides sociales, comme les allocations familiales, le revenu minimum d’insertion et, éventuellement, l’allocation aux adultes handicapés (AAH), peuvent désormais constituer une nouvelle base de subsistance face aux besoins des personnes dépendantes. Les 106 immigrés n’ayant pu obtenir une carte de séjour se trouvent, eux, transformés en « handicapés économiques et sociaux » ou, au mieux, en « dépendants » de leurs familles. Mais malgré leur fréquentation de la société guyanaise et leur demande de soins biomédicaux, la plupart des Marrons continuent à interpréter et à prendre en charge (avant, simultanément ou après avoir fait appel aux médecins et aux hôpitaux) leurs problèmes de santé et leurs « malheurs » à partir de leur système thérapeutique traditionnel87, 88. Amérindiens89 : La Guyane compte plusieurs communautés amérindiennes (environ 5% de la population, soit environ 9 000 personnes) qui sont les descendantes des plus anciens habitants (probablement quelques milliers d’années) du pays. Les Palikur (entre 600 et 1000 locuteurs) habitent dans l’est de la Guyane à Macouria et sur les bords de l’estuaire du fleuve Oyapoque, frontière avec le Brésil ; les Lokono (ou Arawak) (150-200 locuteurs) et les Kalin’a90 (appelés Galibi à l’époque coloniale) (entre 2000 et 4 000 locuteurs) vivent près des zones côtières dans l’Ouest (Awala- Yalimapo, Paddock-et-Fatima, Saint-Laurent du Maroni) alors que les Wayana (200900 locuteurs) sont localisés dans le sud-ouest sur le haut Maroni, fleuve frontière avec le Surinam (Antécume-Pata, Elaé, Twenké) ; pour leur part, les Emerillon ou Teko (200-400 locuteurs) vivent au centre sud et les Wayampi (400-600 locuteurs) sur le haut Oyapock au sud-est ; ces deux dernières ethnies sont localisées au sud d’une ligne fictive, ouest-est, entre Maripasoula et Camopi qui délimitait autrefois le « territoire de l’Inini » dans lequel on ne pouvait pénétrer qu’avec une autorisation préfectorale. Les principales familles linguistiques autochtones de l’Amérique du sud amazonienne sont représentées en Guyane : tupi (Wayampi et Teko), arawak (Lokono et Palikour) et carib (Wayana, Kalin’a). Qu’ils se situent dans l’une ou l’autre zone géographique, les Amérindiens ont maintenu un mode de vie basé sur les activités traditionnelles : chasse, pêche, essartage dit agriculture sur brûlis (défrichage par le brûlis de parcelles qu’on appelle « abattis » en Guyane) et cueillette. Ils touchent, pour certains, des allocations familiales ou le RMI ce qui a créé des difficultés d’ajustement de leur gestion économique. Les Amérindiens côtiers sont, en général, bilingues (français et langue maternelle) et presque tous, même ceux de l’intérieur, sont scolarisés en français, du fait de la présence d’instituteurs dans certains villages. Cependant, les portraits des amérindiens que brossent la plupart des professionnels de santé, dans le cadre des démarches d’accès aux soins au quotidien, sont plutôt ceux d’individus à la dérive. Alors qu’ils sont plus souvent de nationalité française que les Noirs Marrons, ce qui leur évite un certain nombre d’obstacles administratifs (pas de problème de titre de séjour ni de recherche d’acte de naissance, droit à la CMU, etc.). Rappelant qu’ils sont les vrais autochtones, et qu’il y a encore peu ils vivaient de chasse, cueillette et pêche, on les présente comme l’incarnation-même des ravages que peut induire l’introduction de la société de consommation. Une véritable revendication argumentée de respect de leur individualité culturelle peut permettre de développer une vision qui intègre l’approche médicale traditionnelle de celle habituellement offerte par le système de santé français89. Créoles haïtiens : Les Haïtiens représentent la communauté la plus pauvre de Guyane (15% de la population). Nous avons retrouvé une quarantaine de patients haïtiens dans notre recueil de données, ce qui est très peu mais ce qui s’explique probablement par leur précarité sociale et très souvent leur situation irrégulière. 107 En ce qui concerne l’adhésion aux soins biomédicaux, les Haïtiens rejoignent les Noirs Marrons, en ce qu’on pointe souvent chez eux un défaut d’observance par fidélité à des pratiques traditionnelles et un déni total de certaines maladies « honteuses » comme le VIH et aussi le cancer dont la perception est très douloureuse. Créoles guyanais et antillais : Les Créoles ont représenté jusqu’aux années 1980 la majorité de la population guyanaise. A partir de la départementalisation en 1946, les Créoles qui vivent surtout sur le littoral, ont investi le système politique guyanais. Leurs positions seront encore renforcées avec la décentralisation. Aujourd’hui les Créoles subissent un renversement de rapport démographique. C’est la population la plus demandeuse de soins avec les Brésiliens. Ils sont le plus souvent en situation régulière et réagissent globalement comme les métropolitains. Les problèmes d’observance thérapeutique retrouvés chez eux sont les mêmes qu’en France métropolitaine, par manque de rigueur ou déni de la maladie. c. Difficulté de la consultation d’annonce Nous rapportons quelques courtes observations montrant les difficultés de prise en charge (Dr JP Droz, communication personnelle). Cas 1 : Femme de 45 ans originaire du Guyana, anglophone, sans titre de séjour, sans prise en charge sociale. Elle a plusieurs enfants dont un benjamin de 5 ans. Elle est suivie en Guyane depuis un an pour un cancer du col de l’utérus stade IV FIGO (ganglions lomboaortiques, compression urétérale) avec amaigrissement et métrorragies persistantes. Elle va recevoir une chimiothérapie par Paclitaxel hebdomadaire qui va être efficace un temps. Elle évolue. La patiente connait son diagnostic, son pronostic initial et son évolution actuelle. Elle est hébergée à Cayenne avec ses enfants. Elle est suivie par l’HAD. Son souhait est de ne pas mourir à l’hôpital, elle ne veut pas retourner au Guyana. Elle a informé elle-même ses enfants et les dispositions ont été prises pour pouvoir respecter sa volonté. Commentaire : cette patiente pose une difficulté médico-sociale réglée incomplètement par l’AME. Néanmoins elle aurait pu bénéficier d’une radiothérapie à visée hémostatique (par exemple aux Antilles) mais l’absence de titre de séjour l’empêche d’être traitée. On a donc utilisé des moyens médicaux classiques d’ailleurs assez efficaces. Cas 2 : femme de 91 ans, créole guyanaise habitant Cayenne, ayant un diabète insulinodépendant, une HTA, une démence (probablement vasculaire. Elle a eu 10 enfants mais sa descendance (arrière-arrière-petits-enfants) comporte environ 250 personnes. Elle a une dysphagie et un amaigrissement massif. Une fibroscopie avec biopsie révèle un carcinome épidermoïde de l’œsophage étendu. En RCP il est proposé une prise en charge palliative exclusive. La famille très présente et qui prend beaucoup soin de cette patiente est partagé : certains acceptent une prise en charge palliative, d’autres veulent une prise en charge active (au moins de la nutrition). La patiente n’a pas un niveau cognitif suffisant pour recevoir une information raisonnable pour décider. Commentaire : il s’agit d’une situation compliquée qui ne correspond pas aux critères habituels de la consultation d’annonce. On ne dispose même pas de la possibilité d’identifier une personne de confiance. La seule possibilité est de recevoir un nombre raisonnable de membres de la famille (des deux opinions) pour expliquer la réalité de la situation, ce qu’on peut faire, les bénéfices et les risques de tout choix. La prise en charge est faite par l’EMSP et l’HAD. 108 Cas 3 : homme de 61 ans qui habite Papaïchton et qui est un Aluku (Boni) qui ne parle pas le français et peut comprendre le créole91. Il a depuis 3 ans un cancer de prostate. En tout cas il est suspecté comme tel : le taux de PSA était de 100 ng/ml et il avait refusé initialement un toucher rectal et une biopsie. Sous blocage androgénique complet il est revu 3 ans plus tard avec une PSA autour de 120 ng/ml. Il refuse toujours le TR et la biopsie, mais le scanner montre des aspects de métastases osseuses ostéocondensantes mais aussi des zones ostéolytiques. Il est vu en consultation alors qu’il poursuit l’agoniste LH-RH avec des douleurs osseuses des hanches. L’examen neurologique ne montre pas de signes de compression médullaire. Le taux de testostérone est effondré. Dans ces conditions la maladie est considérée comme résistante à la castration. Dans ces conditions la décision est prise de continuer l’agoniste LH-RH et d’introduire le Denosumab (qui a obtenu l’AMM dans cette indication et est administré en sous-cutané), l’Abiraterone Acétate qui a obtenu l’AMM dans cette indication en association avec la prednisone à petite dose (les deux administrés par voie orale). L’alternative était une chimiothérapie par Docetaxel irréalisable à partir de son lieu de vie. Il est pris contact avec le médecin du Centre de santé de Papaïchton pour s’assurer de l’approvisionnement du produit et du suivi de la compliance. Une explication simplifié lui est donnée en créole, surtout centrée sur le traitement. Malheureusement le patient va décéder de problèmes infectieux intercurrents avant de pouvoir regagner son village. Commentaire : le premier problème est celui du diagnostic. Dans ce cas nous n’avons pas d’information sur la teneur du discours initial. En tout cas lorsqu’il devient résistant à la castration il est décidé de considérer le diagnostic comme acquis, car il n’y a pas de diagnostic différentiel. Il parait illusoire de compléter l’information en l’absence de maitrise de la langue91. Compte tenu de la maladie il est plutôt envisagé de procéder à une information dans un deuxième temps (ce que le décès non attendu en rapport avec un problème intercurrent a rendu impossible). Le choix de traitement considérés comme couteux était justifié : 1- ils respectent l’AMM ; 2- ils sont gérables dans le lieu de vie du patient et 3- ils n’imposent aucune prise en charge à l’hôpital : l’administration de Docetaxel toutes les 3 semaines imposait un aller et retour en avion depuis Maripasoula (à 90 mn de pirogue de Papaïchton) et un séjour à l’hôpital d’au moins 3 jours toutes les 3 semaines. d. Perception de la maladie et du traitement Quelles perspectives développer ? La maladie telle que nous la percevons avec nos yeux d’occidentaux vivant en pays développé, a un aspect scientifique et pragmatique qui nous permet de nous fier spontanément aux dires des médecins et aux résultats des examens paracliniques rendus. Or, comme décrit précédemment, certains peuples de Guyane ont une vision punitive et mystique de la maladie. Cela fait partie de leur culture et de leurs croyances ancestrales. Ainsi les Amérindiens et les Noirs marron vont consulter dans les centres de santé ou en ville très tardivement. Ou bien, ils vont être soignés parallèlement par les médecins traditionnels de leur communauté. Cela induit un biais et un retard de prise en charge évidents. Il semble donc nécessaire, en plus de notre attitude habituelle lors de nos consultations au CHAR, de sensibiliser ces populations à leur maladie et d’acquérir une relation de confiance. Nous nous devons de prendre le temps de leur expliquer avec leurs mots l’importance des traitements. Le mode de prise des médicaments (voix orale ou injections à l’hôpital ou encore hospitalisation) doit être décidé en fonction de l’accessibilité aux soins des patients et de leur capacité d’observance. Enfin, quelle que soit la vision qu’un individu peut avoir de sa maladie, nous devons la respecter et nous adapter à ses désirs : pas d’évacuation sanitaire si le patient ne le souhaite 109 pas, pas de transfusion si refus, suivi moins régulier selon la distance qui sépare le malade du CHAR, …etc. Cependant, le personnel soignant de l’HDJA est constitué de personnes venant de tous les horizons, y compris du fleuve et des Antilles ; cela permet aux patients de toujours retrouver une certaine proximité et une relation de confiance au sein du service. De même, un médiateur culturel est disponible pour faire le lien entre les patients et nous lorsque la barrière de la langue est trop contraignante. En dehors de l’hôpital, le rôle du médecin généraliste est indispensable pour assurer cette médiation culturelle à chaque étape de prise en charge ; nous en parlerons au prochain chapitre. Comment réaliser une médiation culturelle en cancérologie : En cancérologie, la médiation culturelle passe chronologiquement d’abord par une sensibilisation des populations au dépistage et à la prévention de certains cancers. Ainsi par exemple lors pour le projet de dépistage/ identification des souches HPV et vaccination lancé en Guyane sur les fleuves, dans les centres de santé isolés tels qu’à Camopi ou à Maripasoula, il y a toujours un médiateur qui parle parfaitement la langue et qui connait parfaitement les coutumes de chacun. Dans ces centres, la priorité est l’éducation dans le respect des croyances. C’est comme cela que la femme du chef coutumier de Camopi a convaincu les plus anciennes dames du groupe à effectuer un frottis cervico-vaginal pour montrer l’exemple. Ensuite, toutes les femmes du village ont consulté le médecin généraliste parce que les anciennes lui avaient accordé leur confiance (expérience personnelle). En fait cet objectif de dépistage et de prévention passe par l’éducation. Mais c’est en continuité avec l’éducation thérapeutique qui en cancérologie, n’a jamais été envisagé dans ce cadre particulier. Dans le cas de l’infection VIH et du SIDA, des études ont été menées et conduisent à proposer une attitude cohérente qui tienne compte des caractéristiques culturelles. Ce n’est pas le cas du cancer dont le nom est connu mais la signification n’a pas été approfondie en fonction des différentes cultures concernées. En effet il n’y a pas de solution unique comme cela est organisé dans les dispositifs du Plan Cancer1. Jusqu’à présent personne n’a envisagé l’organisation de la consultation d’annonce à la femme ou l’homme amérindien, noir marron, créole haïtien, voire d’autre origine. Dans l’état actuel de la pratique, nous essayons une transposition « raisonnable », mais approximative des dispositifs de l’INCa. La première condition est d’avoir un locuteur, ce qui est la base de l’échange. Toutefois cela n’est pas du tout la même chose s’il s’agit d’un médiateur culturel, d’un membre du personnel ou d’un membre de la famille. De plus l’univers mental du/de la patient(e) est inconnu du médecin, il est donc difficile de savoir jusqu’où on peut aller. Le choix se porte donc vers une explication progressive, simple, qui ne délivre pas des mots définitifs brutalement. Cela prend du temps, mais surtout il est difficile si le message est bien compris et perçu. Ensuite il est nécessaire de soigneusement vérifier avec l’assistante sociale le statut administratif (nationalité et si nécessaire titre de séjour) et médico-social (prise en charge médicale). Le PPS est beaucoup plus complexe encore à établir. Il est souvent illusoire de remettre un document règlementaire écrit. Pour les patients qui doivent recevoir un traitement médical, le « carnet de suivi » est plus approprié. D’autant plus que ce carnet sert de support pour la discussion avec l’infirmière de consultation d’annonce, à condition que la question de la langue ait été résolue. L’équipe mobile de soins palliatifs est également très attentive aux souffrances et aux craintes des patients vis-à-vis de leur pathologie et de l’aspect évolutif de la maladie. Mais la perception différente de la maladie et de la mort prochaine conduit à développer des stratégies de prise en charge complexe92. 110 En pratique, il parait nécessaire d’envisager la médiation culturelle en cancérologie sous trois aspects : • La mise en place dans le cadre du DISSPO des moyens humains nécessaires mais non suffisants pour faire un travail loyal, adapté et respectueux de la culture des patients : un locuteur, si possible et surtout un médiateur culturel, une assistante sociale. • Une formation « culturelle » des médecins et des infirmières de consultation d’annonce (il ne peut s’agir d’une prétention à remplacer un médiateur culturel dont c’est le métier, mais simplement d’avoir des personnels de soin « éclairés »). • Mettre en place une recherche (PHRC par exemple) sur la médiation culturelle en cancérologie. Les populations de Guyane pourraient être un terrain de recherche très efficace, utile pour eux et transposable à d’autres populations, y compris métropolitaines. Les interlocuteurs devraient être des ethnologues, des sociologues, des médecins et des médiateurs culturels. Mais plus que tout ce type de démarche doit faire intervenir les populations auxquelles on s’adresse. Ce sont elles seules qui peuvent définir leurs besoins et leurs attentes. Cela pose le choix des acteurs représentatifs et légitimes. 7-Place du médecin généraliste dans l’ensemble de la prise en charge. 1-Place en première ligne en amont du diagnostic : a. Rôle de proximité. Rôle dans les postes et centres de santé En Guyane, si les personnes ne vivent pas sur la côte, ils sont très isolés. Pour accéder aux soins du CHAR ou des autres centres hospitaliers, ils doivent effectuer de longs trajets en pirogue, à pied ou en avion. Les centres de santé implantés dans ces régions reculées en forêt et sur le fleuve sont donc indispensables. Dans ces centres parfois très précaires, il doit y avoir au moins un(e) infirmier(e), un médecin généraliste et un villageois qui fait le lien entre les soignants et les habitants. Le rôle du médecin généraliste sur place est essentiel pour assurer un diagnostic précoce et un suivi des patients. Sans cette organisation et sa présence, nous ne les verrions jamais arriver au CHAR pour être pris en charge. b.Connaissance du patient et de sa famille Pour que les populations Noirs-marrons ou Amérindiennes acceptent d’être suivies par un « étranger » au sein des centres de santé, le médecin doit établir une relation de confiance. C’est donc un investissement personnel et professionnel sur le long terme que le médecin généraliste doit effectuer. Il doit parfaitement connaitre toutes les familles, toutes générations confondues, en communiquant avec eux grâce au médiateur culturel du village. Puis, il doit rester suffisamment longtemps dans la région pour se faire reconnaitre par la population et apprendre la langue. D’un point de vue médical, n’ayant aucun moyen paraclinique (ni imagerie, ni biologie), les compétences du médecin généralistes sont mises à l’épreuve. Sur la côte, les médecins généralistes installés en cabinet ou dans les maisons médicalisées sont confrontés à des difficultés assez proches, sauf celle de l’éloignement de la structure médicale de recours. En effet, comme dit précédemment, le taux d’immigration étant très élevé, beaucoup d’Haïtiens, de Brésiliens ou d’autres, sont amenés à consulter. Très peu 111 d’entre eux parlent le français. De même, la relation de confiance est indispensable au suivi et à l’acceptation de certaines maladies. La chronicité des pathologies est très difficile à faire comprendre à certains patients, aux Haïtiens par exemple, alors le médecin généraliste doit assurer seul la médiation culturelle. On doit donc envisager ici aussi une formation spécifique des médecins aux aspects culturels. Cela permet une meilleure compréhension du patient, de sa famille, de ses attentes, de ses craintes et de son dégré d’adhésion potentielle aux actes médicaux diagnostiques et thérapeutiques. Mais cela ne peut se substituer à la médiation culturelle. On pourrait envisager une « mise en commun » de moyens permettant une médiation culturelle de qualité, incluant les moyens déjà cités : locuteur, médiateur culturel, assistante sociale. Ces moyens doivent être déployés d’une part là ou la population est concentrée les trois villes de la côte) mais aussi être accessible dans les zones de densité moindre de population (ce qui recoupe la question des centres de santé). Dans les zones de concentration urbaine cela peut être organisé par le réseau, mais cela concerne également les structures de santé publiques : ARS ou GCS de cancérologie). c. Rôle dans le dépistage et le diagnostic précoce Pour le dépistage et le diagnostic précoce des cancers, c’est le médecin généraliste qui est en première ligne sur la côte comme sur le fleuve et en forêt. Il doit rester attentif aux signes précoces et surtout, jouer un rôle d’information et de sensibilisation des populations. Il est le médecin de famille et son rôle de prévention est essentiel. Les peuples isolés, vivant entre eux depuis si longtemps n’écouteront jamais une autre personne qu’ils ne connaissent pas. C’est à ce niveau de prise en charge précoce que la relation de confiance prend tout son sens en Guyane. Contrairement à la France métropolitaine, très peu de gens ont accès aux médias et à la prévention par internet, la télévision ou les journaux. De même, d’autres médecin généralistes « mobiles » effectuent des missions de dépistage sur le fleuve ou bien se déplacent selon les besoins ponctuels de certaines populations. Ces médecins ont également un rôle dans la médiation culturelle et dans le dépistage précoce. Ils doivent travailler en harmonie avec les centres de santé pour se faire accepter rapidement par la population. Leur rôle est indispensable en Guyane dans ce contexte de désert médical. Ils font le lien physique entre les centres hospitaliers et les centres de santé. Les structures chargées de la promotion du dépistage et de la prévention (AGEDOC) ont un rôle de moteur et de promotion importants en conjonction avec les organismes de santé publique CIC-EC : centre d’investigation clinique- étude épidémiologique) 2-Il dispose de moyens d’information sur les structures et de moyens pour le diagnostic : a. Diagnostic : imagerie, biopsies, spécialistes En Guyane, les centres hospitaliers et les structures privées de santé de la côte ont développé des moyens permettant aux généralistes de prescrire des examens diagnostics adaptés. En effet, nous disposons de scanners, d’IRM et de radiologues échographistes pouvant faire ponction et microbiopsie sous échographie. Les biopsies et les prélèvements sont analysés sur place en anatomopathologie. La majorité des techniques d’histopathologie et d’immunohistochimie sont disponibles. Les examens plus spécialisés (FISH) sont adressés en métropole. Les résultats des examens sont communiqués directement au médecin prescripteur, exactement comme en métropole. Sur le fleuve et en forêt, les patients sont adressés directement au CHAR ou au CHOG pour les examens complémentaires. A cette étape encore, le médecin généraliste du centre de santé 112 doit à la fois communiquer avec le centre hospitalier de réception et convaincre le patient d’être évacué sur la côte. Son rôle est donc très important. b. La télémédecine La télémédecine est un système de communication développé en Guyane. Elle permet aux médecins des centres de santé d’envoyer via internet-satellite des photos cliniques des patients. Ainsi, elle est très utilisée en dermatologie mais aussi en cancérologie pour que les spécialistes du CHAR puissent communiquer leur avis clinique sur certaines lésions cutanées ou tumorales. Elle permet aux médecins généralistes d’avoir un premier avis sur le niveau d’urgence pour évacuer le patient en ville ou bien sur les premiers traitements à mettre en place. En dermatologie, certains patients du fleuve sont connus du CHAR et cela permet également de les suivre « à distance » selon l’évolution de la maladie. Néanmoins il manque encore la mise en place d’une messagerie sécurisée permettant la transmission des informations médicales et d’un dossier communiquant permettant le partage du dossier entre les acteurs. Ces moyens logistiques permettraient de résoudre en grande partie les problèmes de communication, en partie liés à l’isolement des structures médicales et surtout des patients. c. Accès à des RCP Une fois le cancer diagnostiqué, tous les centres hospitaliers ont accès aux RCP du CHAR et du CMCK qui se font en direct avec le centre Léon Bérard (CLB). Les réunions sont effectuées à la demande des spécialistes après avoir rempli une fiche de RCP type (cf en annexe). Les résultats de RCP doivent être communiqués aux médecins généralistes qui suivent les patients. Cela permet au médecin traitant de remplir la demande d’ALD30. Le médecin traitant doit être aussi le destinataire du PPS et doit recevoir les compte-rendus de consultation. Cela montre l’importance de l’informatisation pour la circulation de l’information, ce qui n’est pas encore le cas. La transmission actuelle est encore sous forme papier, avec de multiples imperfections. d. Filière de prise en charge des EVASAN Les évacuations sanitaires pour certaines prises en charge chirurgicales ou de radiothérapies sont essentiellement faites au CLB à Lyon, en raison de la signature de conventions cadre entre cet établissement et le CHAR d’une part et le CMCK d’autre part.. Mais il est toujours compte des désidératas du patient s’il a de la famille ou des préférences pour se rendre ailleurs en France métropolitaine ou aux Antilles. L’assistante sociale joue un rôle indispensable dans cette filière, et cela est encore rendu plus compliqué en cas de patients en situation irrégulière ou sans couverture sociale. Cela doit souvent être fait dans des délais précis, le médecin généraliste, l’oncologue, le médiateur culturel et l’assistante sociale doivent tous travailler en parfaite coordination pour assurer cette prise en charge délicate. 3- Aide à la prise en charge médico-sociale globale : Avant d’envisager l’application des différents dispositifs de la prise en charge médico-sociale, il faut souligner une réflexion qui ne peut entrer dans le cadre de notre thèse. Les aspects culturels, déjà évoqués, la précarité sociale, la vision de la médecine par les patients, la viion des patients par les soignants doivent toujours être considérés avec prudence : quels sont les préjugés, quelles sont les réalités ? Nous renvoyons à certains travaux réalisés en Guyane et en particulier dans l’ouest guyanais : analyse de la perception du corps87 et de la maladie par les noirs marrons88, cultures amérindiennes93, 93, cultures des noirs marrons86, 94, 95, accès aux soins dans l’ouest guyanais96, 97, barrage linguistique dans la pratique médicale98-100. 113 a. DISSPO : soins de support Le Département Interdisciplinaire des Soins de Support pour les Patients en Oncologie est un dispositif obligatoire de l’INCa. Il regroupe tous les moyens nécessaires à la rpise en charge des patients en dehors du traitement spécifique du cancer. Actuellement nous avons observés que les éléments suivants manquaient : - Une structure de médiation culturelle comme mentionné plus haut. - Un renforcement des moyens en termes de travailleur social - Surtout des moyens en psycho-oncologie. Ici aussi la dimension culturelle doit être prise en charge pour répondre réellement au besoin des patients. - Mise en place d’arbres de décision concernant les objectifs de soins de support. b. EMSP L’équipe mobile de soins palliatifs est une structure pivot pour la prise en charge des patients. Elle doit intervenir très tôt dans les formes non curables : premier contact permettant d’évaluer les besoins des patients et leur attente. Plus tard elle permet d’apporter des compétences dans le domaine de la prise en charge de la douleur, du support psychologique et de la phase terminale. Nous n’avons pas dans ce travail mesuré l’implication de cette structure installée trop récemment et nous n’avions pas non plus les moyens d’en mesurer l’activité. c. HAD Il existe en Guyane deux structures privées d’Hospitalisation à Domicile : HAD de Guyane et Saint-Paul. L’implication de la première est importante par l’articulation avec le DISSPO. Nous ne disposons pas non plus ici des données chiffrées de l’activité liée à la cancérologie. d. Réseau de cancérologie (ONCOGUYANE) Parallèlement à la création des structures de cancérologie en 2009, un réseau de cancérologie (ONCOGUYANE) a été mis en place, à l’image des réseaux établis dans les départements de France métropolitaine. Ainsi plusieurs actions médico-sociales se sont développées : Thésaurus régional des arbres de décision : Nous en avons présenté quelques-uns dans notre étude (figure 59 pour le cancer du sein, figure 70 pour le col) ; ils permettent à tous les patients d’avoir le même niveau de prise en charge et les décisions RCP sont faites selon les protocoles du CLB (en fait du réseau Rhône-Alpes) validés par les praticiens de Guyane. Consultation de psychologie : comme dans toute structure d’oncologie, le suivi psychologique des patients est indispensable en raison de l’impact des traitements et de la gravité de la maladie. Une offre de vacations de psychologue est faite par le réseau. Assistante sociale : son rôle est d’autant plus important en Guyane, nous l’avons expliqué précédemment. Les évacuations sanitaires et les inégalités sociales des patients sont des problèmes majeurs de prise en charge. Une offre de vacations d’assistante sociale est faite par le réseau. Formations médicales, para médicales et grand public : la sensibilisation du personnel soignant comme du grand public est essentielle. Dans le service, il n’y a pas de spécialiste oncologue médical. Des médecins généralistes ont dû être formés et passer des diplômes pour pouvoir exercer en autonomie à l’HDJA. Encadrés par les spécialistes oncologues médicaux du CLB, ils ont pu acquérir les compétences pour gérer le suivi et la prise en des patients selon les décisions RCP. De même, le personnel paramédical en place est fixe, car spécialement formé pour administrer les 114 chimiothérapies et subvenir aux besoins des patients atteints de cancers, pathologies très lourdes au quotidien. Le site internet du réseau (http://www.mdr-guyane.fr/reseau-onco/presentation/) donne les informations pratiques nécessaires, il donne aussi les liens avec les grands sites d’information, en particulier celui de l’Inca (http://www.e-cancer.fr/). e. Suivi des patients : réhabilitation, surveillance Comme décrit précédemment, le suivi des patients et leur surveillance doivent être assurés à la fois par le médecin généraliste, et si le patient vit en milieu isolé uniquement par lui, et par les médecins de l’HDJA ou de l’HAD si il est sur la côte. La réhabilitation du patient est difficile en Guyane car sa situation sociale initiale est souvent déjà très précaire et aucune structure n’a encore été mise en place. Il est nécessaire que des recommandations sur les modalités de surveillance soient accessibles aux praticiens (le meilleur support est sans doute le réseau). f. le médecin généraliste est à la clé de voute de la prise en charge (déclaration ALD30) Une fois la situation sociale du patient régularisée, sa maladie peut être déclarée en ALD (Affection Longue Durée) et lui permet une prise en charge à 100% par la Sécurité Sociale. Dans un département avec autant de précarité socio-économique, c’est indispensable pour assurer le suivi des patients. Si ceux-ci n’en bénéficient pas, ils ne se soigneront pas, par manque de moyen financier. Leur information à ce sujet doit être faite correctement car souvent, certains n’ont pas une connaissance du système de santé français. C’est donc le rôle du médecin généraliste de faire cette déclaration, en coordination avec les démarches de l’assistante sociale, mais après avoir reçu les informations de l’équipe de cancérologie et en particulier la fiche RCP. g.Les besoins du médecin généraliste Pour pouvoir effectuer correctement son travail et son rôle de médiateur culturel (surtout en milieu isolé), le médecin généraliste doit avoir un lien direct avec les médecins oncologues des centres hospitaliers. La communication est indispensable pour permettre à chacun d’assurer son suivi et sa prise en charge, à tous les niveaux, sociaux comme médicaux. Nous avons décrit précédemment, les moyens dont disposait le médecin généraliste pour palier à ses besoins. Certains éléments sont encore à développer pour compléter ce qui a déjà été mis en place : La communication : le courrier, les CR d’hospitalisation, le DPC (dossier patient communiquant) : les courriers, compte-rendu d’hospitalisation et dossiers de soins des patients ne sont pas toujours acheminés au médecin généraliste. Ils sont adressés avec beaucoup de retard. Pour les centres de santé, on remet directement les papiers au patient qui les perd ou les oublie quelque part et ne les remet parfois jamais au médecin. Cela montre l’importance de la mise en place des moyens de transmission et de partage de l’information. La formation : il est indispensable de former les médecins généralistes au dépistage de certains cancers (colon, prostate, sein, col). Un médecin généraliste doit savoir faire un frottis cervico-vaginal, il doit savoir faire une palpation des seins et avoir le réflexe de prescrire une mammographie tous les 2 ans ! Il doit connaitre les facteurs de risque pour certains patients et être sensibilisé au diagnostic précoce des cancers. L’intégration dans la filière de prise en charge : comme dit précédemment, avec des consignes précises de suivi des patients. Les médecins généralistes doivent se sentir concernés par la prise en charge post-diagnostic des patients, ce rôle ne doit pas être uniquement délégué au service de l’HDJA. Trop souvent encore, ils sont amenés à 115 suspecter ou poser un diagnostic ou demander un avis aux spécialistes puis soit à rester en retrait de la prise en charge oncologique, soit à être exclus du processus de prise en charge. Le rôle du médecin généraliste est difficile, mais il est crucial. Les seuls moyens pour qu’il soit partie prenante de la chaine de prise en charge sont : o Le respect de son rôle par les spécialistes, o La transmission et l’échange d’information, o Sa formation dans les domaines de la cancérologie qui sont de son ressort, o Que les spécialistes lui délègue une parte des actions de prise en charge. Réflexion critique sur le travail. Cette étude rétrospective sur la prise en charge des patients atteints de cancer au CHAR en 2010-2012 nous a permis de prendre la mesure de l’évolution au CHAR des mesures prises pour permettre aux patients une gestion optimale du cancer. Ainsi, avec la création de ce service et tous les moyens matériels et humains mis en place, nous avons pu constater une évolution positive des prises en charge et une coordination fonctionnelle avec le CLB. Les patients de Guyane sont de fait intégrés dans une filière de soins cohérente adaptée et comparable aux réseaux de France métropolitaine. Nous avons aussi pu évaluer le niveau de difficulté qui existe dans ce département pour en arriver là. En effet, le taux de précarité sociale, la mixité ethnique et les localisations géographiques isolées sont autant de barrières médico-sociales qui impliquent un investissement de tous les acteurs de soins du département. De nombreux efforts restent à faire et la réussite totale de ce projet dépendra des médecins généralistes et du développement des centres de santé dans les zones isolées. Dans ce cadre le réseau régional et les moyens informatiques d’information médicale sont fondamentaux. Les moyens matériels mis à disposition des chirurgiens et des oncologues médicaux devront aussi évoluer selon les recommandations nationales. Nous avons envisagé un certain nombre de solutions à adopter pour améliorer la qualité de la prise en charge du cancer dans cette région. Ce travail nous a permis d’aborder un certain nombre d’aspects importants en cancérologie : rôle de facteurs étiologiques comme celui des virus, l’impact ds comorbidités, celui des conditions sociales et culturelles enfin celui de l’épidémiologie dans les pays intertropicaux. Un certain nombre de critiques apparaissent à l’issu de ce travail : - Une dispersion des sujets : en effet il s’agit d’un grand nombre d’informations disponibles. Nous avons donc pris le parti de n’analyser que certains types de cancers et pour chacun de nous limiter à des aspects peu cancérologiques mais plus liés à la médecine générale. - Un grand nombre de données manquantes : ce sont des limites propres au recueil des données. Cela souligne l’importance de documenter les dossiers. Cela souligne aussi la nécessité de procéder à une gestion informatique des dossiers (qui est d’ailleurs indispensable à la transmission de l’information). - Nous avons sélectionné une bibliographie relativement limitée parmi environ 250 articles sous PDF. Le choix peut être considéré arbitraire mais il a été dicté par le choix des sujets que nous avions décidé, avec notre directeur de thèse, de discuter. Néanmoins cela permet d’aborder la cancérologie des régions équatoriales, voire intertropicales plus largement que dans l’optique spécifique de la Guyane. L’expérience que nous avons essayée de décrire doit être élargie aux pays proches d’Amérique du Sud (Brésil surtout, Suriname), aux pays d’Afrique de l’Ouest (mais aussi de l’Est), à certains pays d’Asie du Sud-est. Mais là aussi nous avons dû limiter notre propos car cela nous menait trop loin 116 CONCLUSION Nous avons réalisé une étude rétrospective de 594 cas de patients atteints de cancer pris en charge au Centre Hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne en 2010, 2011 et 2012. Nous avons analysé les caractéristiques des cancers (primitif, histologie, stade, traitement et en particulier traitement médical, filière de prise en charge). Nous avons aussi analysé les caractères démographiques des patients (sexe, âge, lieu de naissance, lieu de vie), l’existence de comorbidités et les résultats des sérologies virales. Nous avons dénombré 501 tumeurs solides et 93 hémopathies. Par ailleurs on observe une majorité de femmes (56 %) avec un âge médian (50 ans) plus jeune de 10 ans environ par rapport à la métropole. Parmi les comorbidités, l’incidence des facteurs de risque cardiovasculaire est élevée (39 %) compte tenu de l’âge. L’étude du parcours de soin révèle au cours des trois ans : une augmentation du nombre de nouveaux dossiers pris en charge, une diminution de la proportion des patients faisant l’objet d’une évacuation sanitaire même si le nombre absolu augmente, une limitation à la chirurgie et à la radiothérapie des évacuations sanitaires. Enfin la proportion des patients ayant fait l’objet d’une réunion de concertation pluridisciplinaire augmente au cours des trois années pour atteindre quasiment 100 %. Les tumeurs solides les plus fréquentes dans cette série sont : le cancer du sein (123 cas), le cancer du col (34 cas), le cancer de l’estomac (34 cas), les cancers ORL (29 cas), le cancer de prostate (25 cas). Parmi les hémopathies le myélome est le plus fréquent (29 cas) suivi des lymphomes de haut grade (22 cas) et des hémopathies ATL (11 cas). L’étude de la bibliographie révèle une épidémiologie proche de celle des pays africains, sauf en ce qui concerne les cancers du sein qui sont plus fréquents en Guyane que le cancer du col. Pour ce qui concerne le cancer du sein, on met en évidence une assez grande fréquence des formes ayant un profil triple négatif ou des formes de mauvais pronostic en général selon le profil d’expression des récepteurs membranaires (25 à 30 % des cas). Le recrutement du cancer de prostate est ici faible en raison d’un biais de sélection : l’autorisation d’urologie n’est pas détenue à Cayenne mais à Kourou. Il n’est pas possible ici de tirer des conclusions. Néanmoins l’étude épidémiologique montre une incidence intermédiaire à celle des Antilles et de la métropole. Clairement cancer du sein et cancer de prostate peuvent faire l’objet d’études spécifiques, en particulier au vu des données de la bibliographie sur le profil d’expression génétique des tumeurs du sein chez les patientes africaines. Un aspect très intéressant et assez spécifique de la cancérologie intertropicale est le rôle des virus dans la carcinogénèse ou tout au moins leur rôle favorisant du cancer par le biais de la déficience immunitaire. Ainsi nous avons trouvé 70 sérologies virales positives au total soit 12 % des cas, en étant consciente que près de la moitié des patients n’ont pas eu de sérologie virale. Il faut ajouter à cela les infections HPV qui ne sont pas, dans notre étude, identifiées par des examens mais sont présentes, selon les données de la littérature, dans 100 % des cas de cancers du col, de la verge et de l’anus, et 10 % des cancers ORL. Cela représente donc dans notre série 36 patients potentiels (donc, ici, sans preuve immunohistochimique, virologique ou moléculaire). A cela s’ajoutent les 11 patients ayant un ATL authentique. Il faut enfin ajouter les cas de cancers de l’estomac (34 cas) qui sont en général tous en rapport avec une infection à Helicobacter Pylori, sans toutefois que nous ayons la preuve sur l’anatomie pathologique. Au total on peut estimer que 81 cancers (14 %) sont en rapport avec un micro-organisme (virus ou parasite) auxquels il faut ajouter 70 patients ayant une sérologie 117 virale positive (quoiqu’il y ait des recoupements). Cela tend à montrer que la caractérisation précise des virus et parasites en cause doit être faite dans la prise en charge des patients pour la routine. Mais cela peut faire l’objet d’une recherche d’interface. Nous avons enfin abordé l’aspect humain de la pratique cancérologique, basée sur les dispositifs de l’INCa (RCP, consultation d’annonce, plan personnalisé de soins, soins de support). Nous avons constaté que la diversité sociologique et culturelle impose une connaissance par les praticiens et les personnels de soin de ces particularités. Compte tenu de l’absence quasi complète des connaissances raisonnées et appliqués à la cancérologie de ces aspects particuliers, une recherche en sciences humaines est probablement possible et serait utile pour la prise en charge des patients atteints de cancer en Guyane. Mais elle serait extrapolable à d’autres situations en métropole (zones de précarité et culturellement particulières) mais aussi dans d’autres pays intertropicaux. Le rôle du médecin généraliste est très important dans ce contexte spécifique lié aux distances et à l’isolement, à la diversité culturelle et à la précarité. Cela est d’autant important que le médecin généraliste est au centre du dispositif de prise en charge du cancer dans les recommandations des plans cancer. Cela implique d’une part une formation à ce rôle et à la mise à disposition de moyens logistiques. Nous concluons qu’il y des spécificités à la cancérologie équatoriale (ou intertropicale) qui méritent d’être approfondies au bénéfice de la connaissance mais surtout de la personne malade atteinte de cancer. 118 BIBLIOGRAPHIE 1. Montabo B, Sanite L. Guide encyclopédique; Guyane. Orphie; 2013. 2. INSEE guyane. Populations légales 2011. http://www.insee.fr/fr/ppp/bases-dedonnees/recensement/populations-legales/default.asp . 1-2-2014. Ref Type: Online Source 3. Mam Lam Fouk S, (sous la direction de). Comprendre la Guyane d'aujourd'hui; un département français dans la région des Guyanes. Ibis Rouge; 2007. 4. INSEE guyane. Projections de population à l'horizon 2040. www.insee.fr/guyane 71, 1-4. 2011. Ref Type: Online Source 5. INCa. La situation du cancer en France en 2011. http://www.e-cancer.fr/publications , 1-320. 2011. Ref Type: Online Source 6. ARS de Guyane. 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Faculté de Médecine Hyacinthe Bastaraud; 2010. 125 ANNEXES Annexe 1 : Fiche RCP de Cancérologie. Centre Hospitalier de Cayenne, Guyane. Le ……………. Présents : • • Drs B Cenciu & S Edouard (médecins de l’HDJ d’oncologie) • Pr JP Droz, Dr J Fayette (oncologue médical) Dossier présenté par : NOM : Prénom : Date de Naissance : Histoire de la maladie : Conditions générales : Performance Status OMS : poids : taille : • Dénutrition : perte de poids (3 derniers mois) <5% ; 5-10% ; >10%. • Créatinine : µmol/L Clairance (formule de Cockcroft)= • Comorbidités : • Traitements en cours : Situation médico-sociale : • Nationalité/ titre de séjour : • Lieu de vie : • Langue parlée : • Prise en charge sécurité sociale : Status virologiques : • VIH : • HTLV1 : • VHB : ml/mn 126 • VHC : Localisation de la tumeur : Stade clinique: T : N: Anatomie pathologique : Stade chirurgical : pT : Question posée à la RCP : Décision : Signatures Pr JP Droz ; Dr J Fayette Conforme au référentiel M: pN : Marge : 127 Annexe 2 : Illustrations cliniques: cancérologie en Guyane. H 25 ans. Tumeur à cellules géantes du sacrum F 62 ans, créole. Récidive d’un cancer du sein 5 ans après traitement. CCI, RE+ HER2-. SLM Créole fragile CCI, RE+, HER- H 61 ans, métropolitain. Mélanome invasif sur naevus préexistant d’indice de Breslow à 1,1mm ; excision complète. H 51 ans, créole antillais. Métastases ganglionnaires inguinales d’un mélanome. L’histoire de la maladie a débuté en décembre 2009 pour un mélanome plantaire stade IV de Clarck. CCI, RE+, HER2- : effet du Tamoxifene à 8 mois. 128 F 38 ans, saramaka du Surinam. Ostéosarcome chondroblastique de l’omoplate gauche. Mana Scanner Ostéosarcome chondroblastique de l’omoplate gauche H 38 ans, brésilien. Tumeur germinale non séminomateuse du testicule droit. Ganglions lomboaortiques F 53 ans, de Sainte-Lucie. CCI T4bN1M0 RE+ HER2-. Refus de traitement 18 mois. SLM H 44 ans, guyanien. Fibrosarcome de Darrier et Ferrand Histologie de fibrosarcome de Darrier et Ferrand 129 H 49 ans, haïtien. Carcinome urothélial de vessie métastatique. F 49 ans, adénocarcinome pulmonaire (EGFR non évaluable) métastatique. H 57 ans, haïtien. Hépatocarcinome. Traitement par Sorafenib Toxicité du Sorafénib F 59 ans, créole. Cancer du sein G en 1988, droit en 2012. Refus de recherche de mutation, mais deux nièces sont BRCA1+ F 49 ans, métropolitaine. CCI RE+ HER2- du sein droit, récidive. Mastectomie gauche pour suspicion de cancer. Prothèses bilatérales. 130 F 54 ans, métropolitaine. GIST du duodénum et métastases hépatiques. FDG TEP scan F 71 ans, haïtienne. Comorbidités. Adénocarcinome de l’ovaire H 52 ans, métropolitain. Mélanome type SSM Breslow à 0,4 mm H 56 ans, créole. Adénocarcinome du rectum de 4 à 10 cm de la marge anale. RXT/CT. F 66 ans. Adénocarcinome mucineux du sein RE+ RP- HER2-. T4 N0 F 31 ans, créole. Tumeur de la cuisse : sarcome à cellules fusiformes et pléomorphes de haut grade de la FNCLCC, plutôt apparenté à un sarcome à phénotype musculaire lisse incomplet 131 F 85 ans, créole. Fragile. Plasmocytome multifocal (côte, rachis, sternum) sans anomalie rein, calcémie ni EPP. H 50 ans. cavernome cérébral F 42 ans, créole. Col 1B2 carcinome épidermoïde HPV+. Métastase pulmonaire & lésion extensive pelvienne sur FDG TEP scan SLM H 32 ans, saramaka du Surinam. Carcinome neuroendocrine bien différencié, chromogranine B+, Synaptophysine+, Gastrine+, Somatostatine+, Ki67 à 5% H 91 ans, créole antillais. Vieillissement harmonieux. Adénocarcinome Lieberkühnien colique. H 62 ans, créole antillais. Comorbidités et cirrhose. Adénocarcinome de l’estomac HP+ & CHC (histologie et AFP # 1.000 ng/ml). 132 Gran Santi H 45 ans, Ndjuka. Albinisme, carcinomes baso-cellulaires multiples. Statut viral-. LB-B stade IIIBb. F 81 ans, créole. Fragile. CCI T4N2M1. RH+ HER2+. Tamoxifene+ Herceptine inefficace. Paclitaxel hebdomadaire efficace. F 60 ans, colombienne. Adénocarcinome parotidien métastatique. F 29 ans, haïtienne. VIH+. Améloblastome SLM F 86 ans, ndjuka. Fragile. GIST abdominal SLM F 38 ans, ndjuka du Surinam. Adénocarcinome mucipare à cellules indépendantes, HER2- de l’estomac métastatique. 133 Gran Santi H 63 ans, ndjuka du Surinam. Mélanome malin avec gros ganglions inguinaux. H 38 ans, créole. VIH+ contrôlé sans ARV. Maladie de Kaposi. Ganglions cervicaux et lésions pulmonaires. Mis à ARV et Aldara. F 48 ans, chinoise. CCI T4dN2M1. RH- HER2+ H 75 ans, créole. Ulcérations du coude gauche, évoluant depuis 2 mois sur cicatrice de brûlure par essence en 1991. Carcinome basocellulaire et dysplasie. F 49 ans, créole. Ablation d’un goitre en 1989. Récidive avec métastase pulmonaires. Carcinome vésiculaire. H 50 ans, créole. VIH+ contrôlé, toxoplasmose cérébrale, hémiplégie résiduelle. Déficit en protéine S (thrombose artérielle mésentérique 2009). cancer de prostate castration résistant. Epidurite métastatique, hypercalcémie. 134 H 49 ans, guyanien. Vitiligo étendu. Ganglions métastatiques inguinaux et LA d’un mélanome. F 52 ans, créole. adénocarcinome séreux le l’ovaire stade IV FIGO. H 36 ans, métropolitain. Séminome du testicule droit avec ganglions LA. SLM F 41 ans, saramaka. CCI RH+ & HER2- du sein droit T4NxM0 traité en 2008. Rechute locale et osseuse. F 38 ans, créole. CCI triple négatif T4N2M1 SLM F 43 ans, originaire Saint-Domingue. Acanthosis nigricans depuis 3 ans. cancer du sein T1 N2 M0, RH+ HER2-. 135 Saint-Georges H 90 ans, créole. Vieillissement harmonieux. carcinome épidermoïde. F 81 ans, créole. Vieillissement harmonieux. Récidive d’angiosarcome épithélioïde H 40 ans, haïtien. VIH+ mal contrôlé. Kaposi cutané et digestif. F 80 ans, créole. Fragile. CCI T4d N2 M1 avec RH+ et HER2+ (connu depuis 10 ans, non traité). Arimidex + Herceptine puis Paclitaxel. F 85 ans, créole brésilienne. Fragile. Récidive de tumeur à cellules géantes de l’avant-bras. F 53 ans, créole. CCI sein droit T4N2M1 avec RH- et HER2+. F 54 ans, créole. déficit immunitaire congénital, VIH-. Kaposi, thymome lymphocytaire B. Carcinome de la lèvre H 53 ans, créole guyanien, SLM. Tumeur rétro péritonéale. 136 F 30 ans, ndjuka surinamienne. VIH+ non contrôlé. Condylomatose anale et vulvaire (HPV+). H 56 ans, métropolitain. Carcinome épidermoïde (ganglion cervical sans porte d’entrée) métastatique. F 80 ans, créole surinamienne. CCI depuis 4 ans T4a N2 M0 avec RH+ HER2+. Chirurgie + lambeau. H 61 ans, métropolitain. Récidive de carcinome épidermoïde du voile du palais H 77 ans, créole antillais. Carcinome épidermoïde sur ulcère variqueux depuis 10 ans. Récidive locale. 137 Phéochromocytome non sécrétant. F 59 ans, créole. Ganglions diffus : aspect le LNH-T ATL. HTLV1+. Traitement Pegasys + retrovir. Gale interdigitale, cet aspect évoqie une gale norvégienne. F 65 ans. Rechute à 10 ans d’un leiomyosarcome utérin H 52 ans, ndjuka surinamien. Carcinome épidermoïde très différencié spinocellulaire sur ulcère après morsure de serpent 24 ans avant. H 59 ans, brésilien. Carcinome épidermoïde de la verge évoluant depuis au moins 1 an. Ganglions inguinaux bilatéraux. Ces cas cliniques ont été recueillis par le professeur JP Droz. Les photos ont été faites avec le consentement oral des patients à condition que l’anonymat soit conservé. Ces cas recouvrent en partie les cas décrit dans ce travail mais aussi des patients dont les dossiers ont été discutés en 2013. 138 UFR SCIENCES MEDICALES HYACINTHE BASTARAUD SERMENT D’HIPPOCRATE Au moment d’être admis à exercer la médecine, en présence des maîtres de cette école et de mes condisciples, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité qui la régissent. Mon premier souci sera, de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous les éléments physiques et mentaux, individuels collectifs et sociaux. Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité. J’informerai les patients de décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences. Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer leurs consciences. Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai influencer ni par la recherche du gain ni par la recherche de la gloire. Admis dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me sont confiés. Reçu à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers. Et ma conduite ne servira pas à corrompre les mœurs. Je ferai tout pour soulager les souffrances, sans acharnement. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément. Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Que je sois modéré en tout, mais insatiable de mon amour de la science. Je n’entreprendrai rien qui ne dépasse mes compétences ; je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés. J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité. Que je sois déshonoré et méprisé si j’y manque. Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses. 139 UNIVERSITE DES ANTILLES ET DE LA GUYANE FACULTE DE MEDECINE HYACINTHE BASTARA UD DEMANDE D'IMPRIMATUR Thèse pour obtenir le grade de Docteur en Médecine (Spécialité : Médecine Générale) Présentée par : Mlle La ure BIANCO Né(e) le04 janvier 1986 au Port Département : Réunion Pays : France Et intitulée : Pratiq ue de la cancérologie en milieu équatorial ; étude rétrospective sur trois années (2010-2013) Jury proposé Président : Mr le Professeur Pierre Couppié Juges : Mr le Professeur Pascal Blanchet Mr le Professeur Jean-Pierre Droz Vu Pointe-À-Pitre, le Le Prési H.-H.l;:. Pointe-À-Pitre, le . . ... 140 NOM ET PRENOM : Laure BIANCO SUJET DE LA THESE : Pratique de la cancérologie en milieu équatorial ; étude rétrospective sur trois années (2010-2013). THESE : Médecine QUALIFICATION : Médecine Générale ANNEE : 2014 NUMERO D’IDENTIFICATION : MOTS CLEFS : Cancer, épidémiologie, immigration, médecin généraliste, médiation culturelle, cancer et virus, comorbidités. RESUME DE LA THESE : Aim French Guiana is the French Overseas Department which grows the faster in terms of population and economics. The medical oncology service in the Cayenne public regional hospital was developed in 2009 with the help of specialists from the “Centre Léon Bérard”, comprehensive cancer center in Lyon. There are only few publications on oncology in French Guiana. Therefore, it was decided to list all the patients who were followed in this service between January 2010 and December 2012. We were thus able to study the epidemiological aspects of cancer and also the role of health providers in this multicultural environment. This analysis provides evidence of the public health problem faced by the generalist in the French Guiana. Patients and methods We collected the clinical files of all patients seen at the medical oncology outpatient’s clinic, for diagnosis of either solid tumor or hematological disease. We found 594 cases between January 1st, 2010 and December 31s, 2012. A standard questionnaire was used to retrospectively analyze patients’ medical files. Results On 594 patients, 44% were male and 56% female. The median age at diagnosis was between 45-64 years and Most of them were living on the coast, with easy access to medical care. Forty percent of patients had a cardiovascular comorbidity, namely hypertension. The most frequent tumors are: breast cancer, cervix cancer, gastric cancer, head/neck cancers and prostate cancer. Among hemopathies, myeloma is the most frequent, then high-grade NHL and ATL lymphoma/leukemia. When compared to French metropolitan data: patients were in general younger and stage was more advanced. We attempted to describe the health care organization and limits to care access for the very heterogeneous population in this area. We studied the immunological status of patients to HIV (4.7% positive) HTLV1, HVB and HVC and focused our discussion on viral-induced cancers. It is estimated that 81 patients (14%) had cancers possibly related to virus or parasitic organisms and additionally 70 patients had at least one positive serological exam. This is in favor of an important role of viral carcinogenesis in cancers in the tropical area. Conclusion This study has allowed discussing the major facts of oncology in an equatorial area. It shows also the importance of public health problems in this patients’ population: access to caregivers, precarity, and accessibility to heath structures, languages and cultural diversity. General practitioners are key-actors in this setting. They must be aware of all aspects through a specific teaching program and continuous education process. They must be integrated in the health care pathway. JURY: Président : Professeur P. Couppié Juges : Professeur P. Blanchet : Docteur B. Cenciu : Professeur JP. Droz ADRESSE DU CANDIDAT : 6, rue des Lys, 97434, Saint-Gilles les Bains, Réunion.