IUFM de l`académie de Dijon

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IUFM de l`académie de Dijon
IUFM DE BOURGOGNE
CONCOURS DE RECRUTEMENT :
Professeur des écoles
Les jeux collectifs
M. GUERAUD
Vincent
Et
La citoyenneté
Directeur de mémoire : Mr Béguine
Année 2004-2005
N° de dossier : 04STA00409
SOMMAIRE
Introduction……………………………………………………………………………………..p.1
I. Questionnements théoriques
A. Mes interrogations personnelles…………………..…………………….p.3
B. La citoyenneté du point de vue théorique………………………….p.6
1). Apports théoriques sur la citoyenneté……………………….p.6
2). Pourquoi la citoyenneté ?......................................p.6
3). EPS et citoyenneté………………………………………………………p.7
4). La citoyenneté et les instructions officielles………………p.9
C. L’autonomie et le développement de la personne…………….p.11
D. Les règles en EPS…………………………………………………………………p.13
1). Les différents types de règles et leurs effets…………….p.13
2). Niveaux d’intégration de la règle……………………………….p.15
II. Mise en situation pratique
A. Les hypothèses d’action……………………………………………………….p.18
B. Description et analyse des séances…………………………………….p.20
1) . séance 1……………………………………………………………………..p.20
2). Séance 2……………………………………………………………………..p.22
3). Séance 3……………………………………………………………………..p.25
4). Séance 4………………………………………………………………………p.27
5). Le jeu du « chasseur-lapin »……………………………………..p.28
6). Bilan……………………………………………………………………………..p.29
CONCLUSION………………………………………………………………………………………p.31
BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………………….p.33
INTRODUCTION
La constitution du mémoire professionnel à la charge des
professeurs des écoles s’inscrit dans une démarche réflexive qui doit
permettre à son auteur de s’interroger sur une question de divers ordres.
Il est donc à la charge du stagiaire de construire sa pensée de manière à
la faire évoluer pour répondre, dans la mesure du possible, à ses
interrogations. Je vais donc essayer de démontrer le cheminement réflexif
que j’ai mené pour réaliser ce mémoire.
Dans mon cas je me suis toujours intéressé à la vie en collectivité
et aux interactions mises en jeu lors des échanges dans les groupes. Il
m’a donc été naturel de choisir comme thème la citoyenneté, même s’il
s’agit d’un sujet récurrent dans ce support d’évaluation. Mais comment
peut-il en être autrement quand on est dans une classe ? La citoyenneté
en tant que valeur s’expose, à différents degrés, dans toute situation.
A ce moment je devais donner une nouvelle orientation. Pour ce
faire il fallait préciser le champ disciplinaire des programmes de l’école
élémentaire sur lequel j’allais porter mon attention. J’ai choisi l’Education
Physique Sportive, et plus particulièrement le chapitre des programmes
intitulé « s’opposer individuellement ou collectivement ». Il me semblait
plus pertinent d’observer les comportements des enfants dans des actes
les engageant sans retenue, lors desquels leur mise en action ne serait
pas perturbée par d’autres obligations. J’ai remarqué, au moment de mon
stage tutelle, que les enfants envisageaient les jeux collectifs comme tel,
c'est-à-dire dans les premiers temps comme des jeux pour s’amuser, pour
prendre du plaisir. L’aspect « apprentissage » comme il peut l’être dans
d’autres disciplines ne figurent pas dans leur esprit. Pour eux, l’enseignant
leurs propose des activités où ils peuvent se dépenser.
Il s’agit également d’un champ de liberté pour les élèves en terme de
réussite et d’échec. Un enfant n’a pas peur, ou moins peur, de se tromper
ou de « faire mal ». Il n’hésite pas à proposer des réponses personnelles
aux questions qu’on lui pose. Il n’a plus l’appréhension de la moquerie ou
encore le regard de ses camarades lui semble plus supportable. Ce qui
importe c’est le JEU.
Dès lors l’enseignant revêt un rôle d’observateur des plus importants
pour mener les enfants dans des situations les amenant à construire leurs
savoirs, car le maître devient un guide garant des connaissances mais
sans une approche transmissive.
Je
développerai
précédemment
de
la
les
quelques
manière
pistes
suivante :
de
dans
travail
un
suggérées
premier
temps
j’approfondirai mon questionnement dans la perspective d’en dégager une
problématique affinée à la suite de laquelle des éléments théoriques
viendront préciser la réflexion. Afin de répondre aux hypothèses soulevées
j’expliciterai
la
mise
en
œuvre
pratique
au
travers
de
séances
d’apprentissages envisagées et dans le même temps je porterai une
analyse de cette pratique.
I.
Les questionnements théoriques
A. Mes interrogations personnelles
Le métier de professeur des écoles exige de savoir gérer différentes
obligations :
en
terme
de
polyvalence
relative
aux
différents
enseignements, de compétences dans la construction de situations
d’apprentissages, de conduite de la classe et gestion de l’hétérogénéité
des élèves, et enfin dans le domaine de la responsabilité éducative.
Si certes l’objectif consiste à maîtriser les contenus de chacun des items
précédents, il en est un particulièrement où l’enfant est au centre. Il s’agit
bien entendu de celui de la conduite de la classe et de l’hétérogénéité. La
classe demeure un lieu de vie pour les enfants. Ils la fréquentent de plus
en plus assidûment au cours de leur scolarité. La question de la
citoyenneté apparaît alors comme un axe prioritaire d’interrogation.
La citoyenneté traduit des comportements de vie de chacun dans un
groupe d’individus. En cela elle est inhérente au fonctionnement d’une
classe. La vie en communauté, que peut représenter un groupe d’élèves et
son maître, nécessite un ensemble de points d’accord afin que chacun y
évolue dans les meilleures conditions. Pour moi un tel objectif semble
prioritaire. Les différentes observations que j’ai pu faire lors de mon année
en tant que liste complémentaire ou encore lors des divers stages ont
toujours démontré l’importance du groupe,et donc des individus pris
isolement, de sa cohésion et de son équilibre dans le bien être de la
classe.
Sous cet angle, la citoyenneté, traduisant les rapports sociaux et
moraux entre des individus, dans notre cas les enfants, peut se définir
comme la socialisation. Faire en sorte que les enfants apprennent à
évoluer ensemble. Formulé ainsi est certes réducteur mais on pourrait
s’en contenter. Seulement j’ai pu remarquer que l’enfant ne peut se
résoudre à une si simple acceptation, ou alors elle ne serait que
ponctuelle, épisodique donc non intégrer ou acquise par l’enfant. Il doit
s’imprégner d’une situation concrète pour en saisir le sens. L’enfant se
construit dans l’action qu’il réalise. L’enfant doit vivre la situation.
Autrement dit il faut que l’enfant soit acteur, non pas qu’il compose, mais
qu’il construise lui-même ses apprentissages. Ici la notion d’acteur est
empruntée au champ lexical de la sociologie.
L’enfant doit alors s’interroger sur une situation, pratique on non, qui lui
pose problème et ensuite la mise en oeuvre, elle aussi pratique ou non,
permet d’analyser et d’interpréter les résultats afin d’en dégager une
conclusion. Cette démarche se retrouve dans l’approche scientifique
développée en école primaire. Je voulais essayer de montrer qu’une telle
approche pouvait se mettre en place de manière significative dans un
autre champ disciplinaire. Mais lequel ?
L’E.P.S. m’a semblé convenir dans la mesure où l’enfant évolue
souvent en groupe dans lequel se créent des rapports sociaux. Puisqu’il
s’agit de groupe les programmes proposent un intitulé convenant à mes
attentes : celui de « s’opposer collectivement ». Ma recherche portera sur
les jeux collectifs.
Comment l’enfant devient-il acteur de son savoir et de ses
connaissances? Etre acteur signifie être dans l’action ou plus précisément
dans l’acte à accomplir. Par exemple il peut pratiquer, manipuler, agir
mais cela ne suffirait pas car son rôle alors seulement être
celui
d’imitateur. Acteur c’est plus. L’acte s’accomplit dans la construction de
l’action. Il faut donc placer l’enfant en situation où il construit et donc où il
se construit.
Ce constat suggère donc les deux axes de travail suivant. D’une part il
convient de se demander se que l’enfant peut construire dans une activité
de jeu collectif. Il m’a donc semblé pertinent de centrer la recherche sur la
notion de règle, ici non pas les règles de vie comme on pourrait l’entendre
dans
l’idée
de
citoyenneté.
D’autre
part
l’enfant
se
construit
simultanément à la construction de son savoir. Pour inscrire l’enfant dans
une telle démarche il est nécessaire de le placer en situation d’autonomie.
Dés lors une problématique se dégage : comment la construction de
règles dans une situation de jeu collectif peut amener l’enfant à
devenir autonome ?
Je propose donc de traiter dans la suite de cette première partie de la
citoyenneté d’un point de vue purement théorique afin de dégager les
notions de règles et d’autonomie adéquates à mes interrogations.
B. La citoyenneté du point de vue théorique
1) Apports théoriques sur la citoyenneté
Définition de la citoyenneté :
« Etre citoyen : c’est tenter de dépasser son cas singulier, s’abstraire de
ses conditions pour s’associer avec d’autres à la gestion de la vie publique,
devenir avec eux co-partageants et co-participants au pouvoir. Il y a
citoyenneté dès que l’individu accepte de suspendre son point de vue privé
pour prendre en considération le bien commun, entrer dans l’espace public
où les hommes se parlent à égalité et agissent les uns avec les autres. »
P. BRUCKNER.
« Chacun, adulte ou enfant, homme ou femme est citoyen en raison
de son appartenance à la société humaine. Appartenir à une collectivité
(école, entreprise, nation, monde, etc.) crée la citoyenneté qui est faite de
droits et de devoirs. L’enfant qui participe là où il est, et en tant qu’enfant,
à la vie de son groupe, est déjà à son niveau, un citoyen à part entière.
Plus tard, les droits politiques viendront élargir le domaine d’exercice de
sa citoyenneté. » M.FLONNEAU.
Le citoyen n’est pas seulement celui qui obéit à la loi, c’est aussi
celui qui la fait, avec les autres. Alors, on pourrait définir le citoyen
comme : « celui qui apprend à faire la loi et pas seulement à y obéir. »
Etre citoyen, c’est pouvoir commencer à considérer l’autre comme un
autre soi-même.
Le citoyen est bien celui qui doit construire avec les autres citoyens le
sens qu’il entend donner à l’existence collective
2) Pourquoi la citoyenneté ?
L’éducation du citoyen est restée une préoccupation constante de
l’école. En 1882,
Jules Ferry consacre définitivement l’institution scolaire comme lieu
privilégié pour cette éducation. Aujourd’hui, face aux menaces qui pèsent
sur les valeurs démocratiques et aux risques d’exclusion, elle est une
priorité réaffirmée du système éducatif français.
« Le discours politique et institutionnel, tout comme l’opinion
publique, considère le civisme comme un rempart contre la violence et la
fracture sociale dont souffre notre société », selon M. FLONNEAU.
L’école est le premier espace d’exercice de la citoyenneté de l’enfant, il
découvre les autres et apprend à vivre avec eux, c’est-à-dire à les
respecter, à les comprendre et à élaborer avec eux des projets qui
dépassent son intérêt personnel.
Si l’école n’est pas capable, seule, de rétablir la cohésion sociale qui
permet à l’individu de vivre dans la société et de surmonter les difficultés
quotidiennes, elle fait acquérir des savoirs et des comportements qui
expriment des valeurs démocratiques. Elle prépare à la participation et à
la prise de responsabilité au nom de l’intérêt général.
L’éducation civique, renchérit E.ALTSCHULL, consiste avant tout à
faire réfléchir les élèves sur les droits et les obligations que partagent les
citoyens et qui sont autant d’acquis historiques.
L’enjeu de cet enseignement est fondamental car des méthodes et des
options de l’enseignant d’aujourd’hui dépendront en partie l’identité et la
vie sociale des adultes de demain.
L’éducation à la citoyenneté est réalisée par tous les acteurs de l’école. Le
professeur des écoles a donc un rôle à jouer dans ce processus
d’apprentissage à la citoyenneté. En effet, il est placé au début du
système éducatif et doit être donc conscient de l’importance que
représente cette éducation. Il doit aussi savoir qu’il s’agit d’une entreprise
qui dépasse le cadre scolaire, elle va au-delà de l’école puisque les parents
ainsi que l’environnement extra-scolaire ont une influence sur les enfants.
Les enfants doivent être citoyens toute l’année.
3) E.P.S. et citoyenneté :
L’enseignement de l’éducation physique et sportive vise :
- le développement des capacités et des ressources nécessaires aux
conduites motrices,
- l’accès au patrimoine culturel que représentent les diverses
activités
physiques,
sportives
et
artistiques,
pratiques
sociales
de
référence,
- l’acquisition des compétences et connaissances utiles pour mieux
connaître son corps, le respecter et le garder en forme.
En ce sens, elle apporte une contribution originale à la transformation de
soi et au développement de la personne telle qu’elle s’exprime dans les
activités liées au corps.
Pour aborder la notion de citoyenneté, j’ai donc choisi le cadre de
l’éducation physique et sportive. Un tel choix ne tient pas au hasard : si
pour ma part l’E.P.S. est une activité scolaire à part entière, elle jouit chez
les élèves d’un statut privilégié. En tant que discipline, elle présente
quelques
spécificités
par
rapport
aux
autres
disciplines
dites
«
traditionnelles » : les élèves ne sont plus assis ce qui entraîne des formes
changeantes de groupements et une manipulation de matériel. Ils
agissent, les actions sont visibles, et par la même, deviennent patentes et
chargées du regard de l’autre. De plus, le jeu sportif permet d’avoir à sa
disposition un moyen engageant, le plus direct pour présenter une tâche
d’apprentissage.
L’activité corporelle apparaît comme un excellent moyen d’éducation
car
elle
implique
l’être
dans
sa
totalité,
en
interaction
avec
un
environnement physique et social.
Les activités servant de support à l’E.P.S. mettent en jeu le corps et
produisent des émotions.
Comment l’E.P.S. peut-elle développer les qualités du citoyen ? Comment
aide-t-elle à s’informer, à construire le sens critique et le sens des
responsabilités ?
Les nouveaux programmes précisent : « l’éducation physique et sportive
contribue à la formation du citoyen, en éduquant à la responsabilité et à
l’autonomie. Elle offre la possibilité de jouer avec la règle, de mieux la
comprendre, de la faire vivre, et d’accéder ainsi aux valeurs sociales et
morales. »
Les démarches devant être mises en œuvre pendant les A.P.S. doivent
faciliter l’intégration de l’élève dans le groupe et même faire comprendre
les règles de la vie de groupe. L’acceptation de la pratique sportive dans
ses aspects organisationnels (du fait d’appartenir à un groupe ayant un
but commun) dans une certaine mesure fait prendre conscience à l’enfant
de l’idée de citoyenneté.
L’éducation physique participe pleinement à la construction de l’identité de
la personne et ce, dès l’école maternelle. Par les activités motrices,
l’enfant prend conscience de ses possibilités, de ses limites car la
connaissance de soi passe par l’appropriation de son corps.
L’E.P.S. a un rôle très important à jouer dans l’élaboration de l’enfant
individu-citoyen .
Elle représente l’axe fondamental qui permet de faire vivre, et c’est
essentiel pour l’enfant, l’éducation civique et de lui donner sens.
Les activités physiques à l’école primaire permettent de mettre le corps
dans des situations inhabituelles ; cela permet à l’enfant de se sortir de
ses repères pour s’en construire d’autres et prendre conscience de son
adaptabilité à des situations nouvelles, aussi déstabilisantes soient-elles.
L’enseignant doit donc proposer aux enfants des activités adaptées à leur
développement, son approche pédagogique (ses formes de groupement,
sa façon de faire réfléchir l’élève ou un groupe d’élèves sur leur attitude…)
est une donnée essentielle au travail de la citoyenneté dans le cadre des
cours d’E.P.S. .
4) La citoyenneté et les Instructions Officielles :
Dans le chapitre Education Civique, se trouve le paragraphe « Participer
pleinement à la vie de son école » qui développe les notions :

Ecouter l’autre ;

Respecter les différences ;

Respecter les règles élémentaires ;

Comprendre les contraintes de la vie collective.
En ce sens, les programmes pour l’école élémentaire proposent aux
enseignants de mettre en place une éducation civique dans leurs classes
car « c’est à partir de la vie en classe que l’enfant découvre les règles de
la vie en société, les valeurs qui la fondent et fait l’apprentissage de sa
propre responsabilité ». L’éducation civique intervient auprès de l’élève
comme un véritable apprentissage de la vie d’adulte.
En ce qui concerne les Instructions Officielles relatives à l’E.P.S.,
elles indiquent que l’enfant doit être capable « d’organiser ses actions en
fonction de règles… de communiquer avec les autres… d’agir en fonction
des autres selon des règles, et de tenir divers rôles dans une équipe…
d’acquérir des règles de l’action motrice individuelle et collective, de
dominer ses appréhensions ». Les programmes soulignent que l’Education
Physique et Sportive « favorise le comportement corporel, physique et
social ».
Dans le chapitre Education Physique et Sportive, un des objectifs
principaux est la contribution « à la formation du citoyen, en éduquant à la
responsabilité et à l’autonomie. Elle offre la possibilité de jouer avec la
règle, de mieux la comprendre, de la faire vivre et d’accéder ainsi aux
valeurs sociales et morales. »
On indique aussi, que l’E.P.S. permet d’acquérir des attitudes, des
méthodes, des démarches favorables aux apprentissages, dans la pratique
de l’activité mais également dans la vie sociale. Les élèves apprennent à
mieux se connaître, à mieux connaître les autres, à comprendre et à
mettre en œuvre des règles. Le travail en équipe permet de réfléchir avec
les autres sur la meilleure façon d’agir, de pouvoir aider un camarade ou
de se faire aider par une parade ou un conseil.
A travers l’E.P.S. l’élève peut construire des principes de vie collective
c’est-à-dire se conduire dans le groupe en fonction de règles, de codes. Il
apprend à écouter et respecter les autres, à coopérer. La coopération
représente un axe important de réflexion dans l’appréhension des jeux
collectifs d’opposition mais je fais le choix de ne pas la traiter et de
l’inclure dans ma recherche pour me centrer sur la règle et l’autonomie.
C. L’autonomie
et
le
développement
de
la
personne.
L’E.P.S. doit permettre le développement de la sécurité, la solidarité,
la responsabilité et l’autonomie en vue d’une éducation citoyenne. Nous
allons donc nous intéresser, au niveau de l’école primaire, à l’autonomie.
L’autonomie est une notion. Elle n’appartient à aucun champ
scientifique et relève plutôt d’une réflexion philosophique (KANT) et
pédagogique (les pédagogies actives, non directives). De ce fait, elle est
confuse. D’abord, elle peut donner l’illusion d’un « état autonome »
parfait, définitif, état qui évidemment n’existe pas. L’autonomie serait
plutôt
un
processus
long,
non
linéaire
de
situations
de
moindre
dépendance.
De plus, le passé de la notion (NEILL, 1960 ; ROGERS, 1961)
renvoie souvent à l’idée d’une libération individuelle, d’un épanouissement
qui ferait l’économie du « social ». Cette conception conduit à des
impasses car justement l’autonomie est une « liberté sociale » (MEARD et
BERTONE, 1998), ce qui n’a pas grand chose à voir avec la vision idyllique
d’une liberté hors du monde.
Au niveau pratique, l’autonomie repose sur un paradoxe : en effet,
l’action d’éduquer implique l’influence volontaire sur une personne, donc
sa « dépendance », au moins momentanée. En ce sens, pour BATESON,
parler d’autonomie dans le cadre scolaire est une « injonction paradoxale
». Mais en même temps, cette influence de l’éducateur est mise en œuvre
dans le but de disparaître à terme (sinon la personne ne devient jamais
autonome).
Situé au centre de l’acte d’éducation, ce paradoxe est une source
permanente de contradictions ; il ouvre la voie, en ce qui concerne les
mises en œuvre, à tout et son contraire.
Ceci, afin d’aider chaque élève, fort ou faible, à grandir, s’épanouir, à
réaliser le meilleur de lui-même, à devenir adulte. En définitive, c’est
l’aider à atteindre une autonomie toujours plus réelle.
Mais qu’est-ce que l’autonomie de la personne ?
Lorsqu’on interroge des enseignants sur ce qu’évoque pour eux
l’expression « être autonome », apparaissent dans un premier temps les
propositions les plus diverses, qui ont toutes trait à la vie individuelle, au «
moi » : être libre, faire des choix, être créatif, prendre des initiatives,
apprendre par soi-même, s’affirmer, être authentique, se prendre en
charge….
Mais « viennent ensuite, au cours des échanges, d’autres notions telles
que communiquer, être à l’écoute, respecter l’autre, être tolérant, prendre
des responsabilités, savoir coopérer, faire des projets communs….qui
montrent que l’autonomie se vit en relation avec les autres, se vit en
société. » (HOFFMANS-GOSSET, 1987).
« La finalité dernière- dit P.MERIEU- (1991) est bien l’émergence d’un
sujet libre, d’une volonté capable de se donner ses propres fins,
d’effectuer le plus lucidement possible ses propres choix, de décider en
toute indépendance de ses propres valeurs ». Dans le même sens, pour
O.REBOUL, la finalité de l’éducation est de donner aux élèves « le pouvoir
de se passer de maîtres, de poursuivre par eux-mêmes leur propre
éducation, d’acquérir par eux-mêmes de nouveaux savoirs et de trouver
leurs propres normes ».
L’autonomie de la personne n’est pas quelque chose qui s’attend,
mais quelque chose qui s’apprend : non pas une autonomie seulement
pour plus tard, comme la résultante d’une somme d’exigences assumées,
mais bien un objet d’apprentissage progressif et permanent.
C’est dans l’exercice régulier de l’autonomie que l’élève pourra réaliser,
dans les relations mais aussi au travers des conflits avec d’autres et avec
l’enseignant
lui-même,
«
l’expérience
de
l’altérité,
qui
est
la
reconnaissance de l’autre comme vraiment autre » G.FOUREZ, 1990).
De là, pourra découler une éducation au respect des autres, avec leurs
particularités, avec leurs différences sur le plan de l’habileté, de la culture,
de la religion, de la race…. La recherche concrète de l’autonomie n’est-elle
pas le plus sûr chemin de la motivation des élèves ?
D. Les règles en E.P.S.
« De même que l’écolier peut réciter sa leçon sans la comprendre et
substituer le verbalisme à l’activité rationnelle, de même l’enfant obéissant
est parfois un esprit soumis à un conformisme extérieur, mais qui ne saisit
“en fait ” ni la portée réelle des règles auxquelles il obéit, ni la possibilité
de les adapter ou d’en construire de nouvelles. »
A travers cette phrase, PIAGET résume une situation qui me semble
importante : de même qu’il faut donner du sens aux apprentissages, il
faut donner du sens aux règles.
1) Les différents types de règles et leurs effets
Les règles propres à l’éducation physique doivent s’inscrire dans
celles du code de vie de l’école. Elles ne doivent en aucune façon venir à
l’encontre des règles de l’institution.
Pour J-A.MEARD et S.BERTONE, l’attitude des élèves en E.P.S. est
déterminée par les rapports de celui-ci aux différentes règles qui régissent
le cours. Ces auteurs définissent cinq types de règles :
- Les règles de sécurité : obligation visant le maintien de l’intégrité des
personnes, souvent incluse dans le règlement institutionnel et renvoyant à
une responsabilité individuelle (exemples : s’assurer et assurer un
camarade en escalade, s’assurer que le matériel est bien en place au saut
en hauteur).
- Les règles institutionnelles : elles sont écrites et dépassent le cadre
strict du cours d’E.P.S. Elles sont de l’ordre de la loi, celles sur lesquelles
l’élève et l’enseignant ont moins de prise. Pourtant, elles sont sans cesse
adaptées, filtrées par le maître et le groupe.
- Les règles groupales : elles sont spécifiques à chaque groupe et
changeantes, mais elles sont toujours sous-tendues par de grands
principes (intégrité des personnes, égalité des droits). (exemples :
répartir les charges de travail lors du rangement du matériel, négocier et
accepter une décision collective, la répartition des rôles).
- Les règles des jeux sportifs : règles « pour du beurre », mais en
même temps, elles sont les conditions du jeu car elles comportent
l’émotion spécifique de l’activité en garantissant l’égalité des chances ; les
règles des jeux sont souvent complexes et imposent une interprétation
(exemples : arbitrer, accepter de se faire arbitrer par un camarade,
négocier une modification de règle).
- Les règles d’apprentissage : procédés de résolution de certaines
catégories de problèmes. Ils correspondent aux opérations à découvrir et
à faire fonctionner pour apprendre et pouvant être :

dictées par l’enseignant,

induites par un modèle à imiter (apprentissage par observation),

masquées volontairement (résolution de problème – C.Amade-Escot,
1989)
Parmi ces règles de jeux sportifs, se dégagent deux sous-groupes :
- Les règles essentielles ou fondamentales : elles sont non négociables et
donnent le sens du jeu pratiqué. Peu nombreuses, elles permettent
d’entrer dans l’action rapidement.
- Les règles particulières : elles sont construites avec les élèves et
permettent le fonctionnement du jeu à un moment précis. Elles sont
négociables.
Ces auteurs procèdent aussi à une distinction entre leurs fonctions :
D’une part, les règles à fonction opératoire (règles d’apprentissage) qui
engagent prioritairement la mise en œuvre de résolutions cognitives et de
pouvoirs moteurs.
D’autre part, les règles à fonction sociale (règles institutionnelles,
groupales, de sécurité et des jeux sportifs) qui ont une fonction avant tout
sociale et relèvent de processus socio-affectifs, relationnels, voire moraux.
On note que les règles du jeu possèdent une double fonction. Elles ont une
fonction sociale car elles déterminent les pouvoirs respectifs des joueurs.
Elles véhiculent l’émotion de l’activité et peuvent être modifiées dans un
but didactique. Parce qu’elles sont à l’origine des règles d’apprentissage et
qu’elles sont manipulées par les élèves, on peut penser qu’elles ont aussi
une fonction opératoire.
2) Niveaux d’intégration de la règle
Pour rendre l’élève plus autonome, il est nécessaire d’identifier le
processus qui préside chez lui au passage d’un niveau de décodage à un
autre. J-A.Méard et S.Bertone isolent cinq niveaux d’attitudes, de
conduites typiques.
- Tout d’abord, l’anomie (déviance). Certains élèves difficiles ignorent ou
rejettent l’appareillage réglementaire institutionnel, scolaire, social, parce
qu’ils sont privés des outils d’encodage-décodage nécessaire.
- Ensuite, l’autonomie négative (déviance). Une forme d’attitude
rassemble
les
conduites
volontairement
et
ouvertement
déviantes.
Contrairement au profil précédent, on postule ici à un assujettissement du
sujet à un système de règles dont les valeurs sous-jacentes sont
différentes de celles véhiculées par l’école. On peut penser que le système
scolaire fait parfois connaître tant d’échecs répétés à l’enfant anomique ou
simplement non performant que celui-ci se construit une cohérence basée
sur le rejet global de l’école et la constitution d’une contre-culture.
- Puis, l’hétéronomie (soumission). C’est une catégorie de comportement
qui se manifeste par la docilité, la soumission à la règle scolaire, avec
contrôle extérieur. Le système de règles est imposé de l’extérieur et son
application vérifiée, ce qui rend le sujet dépendant de l’adulte qui énonce
et fait respecter ce système de règles. Dans ce cas, l’élève modifie les
mobiles habituels de son activité, il « s’immunise » des sources habituelles
de la motivation en même temps qu’il se déresponsabilise. Or, la plupart
du temps, les tâches scolaires comportent cette pression sociale.
- L’autorégulation. Dans ce cas, l’appareillage réglementaire
est
reconnu. L’élève attribue un sens aux règles parce qu’il les relie à un
principe, un contrat, une loi. C’est une sorte de soumission volontaire,
basée sur la reconnaissance d’une nécessité de la réglementation. Cet
accès à la fonction de la règle permet à l’enseignant de faire l’économie du
contrôle et même de la formulation de la règle.
- Enfin l’autonomie, dernière étape observable chez les élèves qui se
manifeste par une capacité à négocier, à amender, à adapter une règle.
Au niveau de l’apprentissage, cette étape se caractérise par une capacité à
élaborer des règles, justement en rapport avec leur fonction dans la
réalisation d’une tâche.
Cependant, conformément au modèle de la sociologie institutionnelle
qui décrit un enchaînement de périodes de stabilisation des rapports de
force (instituant), et des périodes de reconstruction de nouveaux
équilibres (institutionnalisation), l’évolution des attitudes n’est pas un
processus linéaire, continu et serein. Au contraire, les transformations
d’attitudes conduisent à une représentation conflictuelle, marquée par des
crises… On note donc des périodes de stabilisation, de régression, de
latence.
MEARD et BERTONE mettent aussi en avant la « contamination d’attitude
», qui pousse à concevoir les rapports aux règles de manière systémique,
c’est à dire comme un ensemble d’éléments en interaction, ensemble qui
déterminerait l’attitude des élèves vis à vis des contenus d’enseignement
(les règles d’apprentissage) et par rapport aux personnes (toutes les
autres règles).
En E.P.S., laisser les enfants s’exprimer constitue un vecteur important de
l’enseignement et cette discipline semble apporter des solutions quant à la
prise de parole où l’enseignant joue un rôle de médiateur. En sensibilisant
les élèves au respect d’autrui, aux confrontations langagières nécessaires
à la résolution d’un conflit, le maître les guide sur la voie de la tolérance.
Cependant, il est indispensable d’engager les enfants dans des activités de
réflexion aboutissant à une réelle prise de conscience de la nécessité de
développer des attitudes citoyennes à l’école mais aussi dans la vie
quotidienne.
C’est pourquoi je vais tenter, en m’appuyant sur les pratiques de
terrain de comprendre en quoi et comment les règles, et leur construction,
peuvent permettre aux élèves de développer des attitudes citoyennes.
II. MISE EN SITUATION PRATIQUE
A. Les hypothèses d’action
Avant de se lancer dans la mise en œuvre pratique il est nécessaire
d’envisager au préalable quelles séances construire afin de répondre aux
questions soulevées par la recherche théorique.
Je rappelle donc que je cherche à montrer comment former l’élève à la
responsabilité et à l’autonomie. Pour cela l’élève doit jouer avec la règle,
c'est-à-dire que pour la comprendre il faut qu’il la fasse vivre, autrement
dit qu’il la construise. L’acquisition d’aptitudes à l’autonomie permettra de
savoir si une telle démarche, de construction de règles, est efficace ou
non. L’autonomie reflète la construction par soi-même, en ce sens
l’individu est acteur, et oblige à faire des choix sur les normes à élaborer.
Quelles règles permettent-elles de placer l’élève dans un tel processus ?
Les règles groupales, faisant place à la négociation, et les règles de jeux
sportifs, pour la même raison et le travail d’interprétation, y semblent
favorables.
Parmi
celles-ci,
les
règles
particulières
valorisant
leur
construction et la négociation apparaissent comme les plus importantes.
Les règles dites
« masquées »,
situation
équivalente
aux
situations
problèmes en mathématiques, correspondent-elles, au niveau des règles
d’apprentissage,
à
une
entrée
dans
le
processus
de
recherche
d’autonomie ?
A partir de ces quelques remarques il convient de construire des
situations de jeu en adéquation avec les hypothèses envisagées. Je vais
donc proposer aux élèves des jeux collectifs d’opposition, ceux-ci
favorisant
la
confrontation,
aussi
bien
physique
que
mentale.
La
confrontation devant se soustraire par la suite à un travail de négociation
pour développer les choix émis par les enfants.
La conception des jeux devra dans un premier temps ne pas enfermer les
enfants dans des situations restreignant leurs comportement. La situation
ne devra donc comporter que quelques règles simples et basiques afin de
laisser un champ vaste de liberté d’action. Une telle condition engendrera
de manière quasi certain un plus ou moins léger chaos nécessaire à la
prise en considération du besoin de règles et de leurs constructions
communes. Le rôle de l’enseignant devient alors celui de médiateur et de
régulateur.
Enfin le processus d’acquisition d’autonomie s’inscrivant dans la durée, il
paraît obligatoire de mener de telles observations sur une longue période,
que les situations de stage offrent plus ou moins. Dans mon cas les
observations proviennent de mes deux stages en responsabilité lors
desquels de telles situations n’ont pas toujours été effectives. Les résultats
s’en trouvant biaisés.
Je vous propose maintenant de passer à la description des séances
que j’ai mis en place ainsi qu’à leur analyse.
B. Description et analyse de séances
Afin de répondre aux hypothèses mises en évidence précédemment,
je développerai
dans cette partie les séances réalisées lors de mes
différents stages en responsabilité. Je tiens à signaler que je n’ai pu
mener convenablement les séquences : pour mon premier stage des
disciplines sportives étant planifiées je n’ai pu vivre qu’une séance en lien
avec mon interrogation, et lors de mon deuxième stage les intempéries
(cours enneigée et gelée) ont suspendu la pratique sportive de la classe
pendant une semaine. Je ne pus donc n’exploiter que les quelques séances
de ce dernier stage.
1) Séance 1
Le jeu originel est la balle assise mais dans mon but de construction
de règles un certain nombres d’entre elles, propre au jeu, n’ont pas été
divulguées.
L’objectif
étant
que
les
élèves,
par
observation
et
interprétation de leur pratique, construisent des règles pour jouer
correctement.

Echauffement : trottiner en se faisant des passes.

Dispositif : l’ensemble des élèves sur un terrain de
10*15


Matériel : un ballon mousse et un sifflet.
Objectifs : savoir attraper le ballon
Viser une cible qui bouge
Agir selon les règles
 Analyse
La consigne est « je lance le ballon, n’importe qui peut le rattraper. Le but
du jeu est de toucher les autres joueurs avec le ballon. »
Dès la mise en jeu deus comportements se distinguent : ceux qui veulent
la balle et ceux qui ne la veulent pas. Mais, surtout comme attendu, le jeu
devint vite du « n’importe quoi ». J’interrompt alors le jeu et fais asseoir
les élèves pour leur demander leur impressions : « je l’ai touché mais il a
continué, un tel a été touché, il est sorti... On remarque ici que l’absence
de règles essentielles des jeux sportifs bride le jeu. Il convient de les
mettre en place. Pour être sûr qu’elles soient bien comprises je laisse les
enfants les trouver. Un tel fonctionnement peut cependant engendrer un
long moment d’interruption du jeu.
Je leur demande donc ce qu’il faut changer : on n’a pas le droit de sortir
du terrain, quand on est touché on ne joue plus sont les deux propositions
pertinentes ressorties de la confrontation. Après une phase rapide de
validation par l’ensemble du groupe le jeu reprend.
Le jeu devient plus fluide avec ses deux règles. Les joueurs sont vites
touchés surtout qu’un élève garde la balle et se déplace avec. « Mais il n’a
pas le droit » se plaint une élève. J’interrompt de nouveau le jeu et je lui
demande d’expliquer à ses camarades ce qu’elle a dit et pourquoi. Les
autres sont d’accord avec elle. Les propositions pour palier à cette
situation sont variées : marcher, faire cinq pas, courir doucement, rester
immobile. Ces propositions furent ensuite discuter et marcher, courir
doucement
furent
écartées
car
difficiles
à
évaluer.
Le
principe
d’observation/interprétation est ici mis en évidence. Un enfant observe un
comportement et le groupe, après confrontation/discussion, propose une
solution. Celui qui a le ballon n’a pas le droit de bouger. Le jeu reprend.
Cette fois le temps réel de jeu devient convenable. Des stratégies
individuelles se développent. Je laisse le jeu se terminer. Une fois fini je
leur demande, pour valider la nécessité des règles, comment était le jeu.
La réponse fut positive mais quelques remarques existaient. La séance se
termine sur ce jeu après avoir fait formuler par les élèves les règles du
jeu. Toutes furent citées.
Cette première séance, bien que ne mettant par en jeu une
opposition collective, montre déjà l’importance des règles fondamentales.
Sans celles-ci le jeu n’en était pas un au début. Mais il n’empêche, qu’au
prix d’un début de séance houleux et agité pour les enfants, obligeant
l’enseignant à une vigilance accrue ainsi qu’une adaptabilité et une
réactivité immédiate, ces règles peuvent néanmoins être construites par
les élèves. Elles sont donc négociables. Mon rôle aura été celui de
médiateur et régulateur. Bien que je disposais des réponses à leurs
questions mon intervention se limita au bon déroulement des phases de
discussion.
On remarque également qu’en l’absence de règles les enfants adoptent
des comportements très variés. Certains en profitent pour se permettre
des comportements déplacés. Ce qu’on pourrait assimiler à une certaine
autonomie négative dans la mesure où leurs attitudes leurs sont propres
et non dictées. Mais une fois la mise en vigueur de certaines règles ces
actions se dissipent, ce que l’on a appelé hétéronomie ou soumission. A
noter que le groupe classe a décidé des règles. Elles ne sont pas imposées
par un adulte.
2) Séance 2

Echauffement : identique à séance 1

Dispositif : 2 équipes de 9 joueurs sur un terrain de
10*15

Matériel : un ballon en mousse, des chasubles et un
sifflet

Objectifs : identiques à la séance 1
 Analyse
La deuxième séance commence, après l’échauffement, par un rapide
rappel
oral du jeu vu la veille ainsi que des règles. Les enfants sont
concernés et restituent l’ensemble des règles.
J’annonce que le jeu est le même sauf qu’aujourd’hui se sont deux
équipes qui s’opposent.
Le jeu débute par une cohue sous le ballon. Les contacts sont plus durs
qu’hier. J’interviens de suite pour régulariser le problème en demandant
ce qu’il venait de se passer. Les filles réagissent de suite en stipulant
l’engagement des garçons. Désormais personne n’a le droit de pousser.
Une fois de plus cette proposition a été formulée par une élève et
l’approbation admise par le groupe. Le jeu pu reprendre. Le porteur du
ballon oubliant souvent ses partenaires, étant plus attiré par la cible
adverse (les chasubles étant de couleurs vives attiraient-elles peut être
aussi instinctivement l’œil !!!). Se dégagea alors plusieurs problèmes : que
faire de la balle lorsqu’elle touche le sol avant de toucher quelqu’un, que
faire quand on rattrape la balle avant qu’elle ait touché le sol et enfin a-ton le droit de se cacher derrière un élève déjà touché pour éviter d’être
touché. Ces quelques remarques provenant de mon observation pendant
la pratique. Le jeu dura sans qu’aucune équipe de parvienne à battre
l’autre.
Je décidais alors d’arrêter la partie. Y a t il un vainqueur ? « On a gagné »
pourquoi ? « On en a touché plus qu’eux » Alors quand est ce qu’une
équipe gagne ? « Une équipe gagne quand elle a touché plus d’adversaire
que l’autre équipe » Tout le monde semble d’accord. Mais je fais
remarquer que cela ne marche que si j’arrête le jeu avant qu’une équipe
soit totalement éliminer. Mais ils ne trouvent rien à dire donc je passe à
autre chose. Je décide de revenir plus tard sur cette question.
Quelles
attitudes
avez-vous
observées
chez
certains
de
vos
camarades ? J’ai eu toutes sortes de réponses mais pas celles attendues.
Puis un enfant dit qu’il avait touché un autre après que la balle ait touchée
le sol, mais qu’il avait continué à jouer. Je demandais au reste des élèves
ce qu’ils en pensaient. Il décidèrent finalement après négociation et vote à
main levée qu’une fois que la balle avait touché le sol, elle n’étais plus
dangereuse. Lors de ce débat fut mis en évidence par les enfants le fait
que sans cette règle on ne pouvait pas ramasser la balle. Ainsi le jeu
deviendrait plus rapide. On note ici la construction d’une règle de jeux
sportifs sur la base de la négociation, mais surtout le souci d’adapter la
règle au bon fonctionnement du jeu. La règle sert le jeu. De ce point de
vue un tel comportement reflète une certaine autonomie chez les élèves.
Après une telle phase, assez longue, je décidais de remettre les enfants
en activité.
Le jeu commençait à prendre sens pour les enfants. Des stratégies
apparaissaient. Les déplacements et l’occupation de l’espace se faisaient
plus précis. Le jeu gagnait en rapidité mais certains continuaient de ne pas
prendre la balle. Les enfants ayant assimilés cette nouvelle règle ne
manquaient de leurs rappeler que maintenant ils pouvaient prendre la
balle après qu’elle ait touchée le sol.
Puis certains, par imitation, se cachèrent derrière des enfants déjà
touchés. J’interrompis le jeu en obligeant les enfants à rester sur place
pour qu’ils puissent observer la position des petits malins. A ce moment je
leurs demandais de trouver un moyen pour éviter se problème sans
interdire de se mettre quelqu’un. « On peut se déplacer » « non on a dit
qu’on n’avait pas le droit » «
on a cas se baisser » «
s’asseoir quand on est touché » «
on peut aussi
oui c’est une bonne idée »
« on
essaie » Pas le temps de dire quoi que se soit qu’ils étaient déjà presque
tous en place. Sans discussion, comme si la négociation était devenue un
consensus immédiat. Ils venaient de mener seuls la procédure sur laquelle
je les guidait depuis le début, bien que je leurs ai avancé le problème. On
peut parler ici d’une construction de règles mais il faut quand y amputer
l’absence d’interprétation de l’observation. Néanmoins l’empressement à
débuter une nouvelle partie montre que les élèvent commencent à
accorder du sens aux règles puisqu’ils veulent voir ce que la dernière
trouvée peut amener dans le jeu. On parle alors d’autorégulation. Mais il
reste encore à valider ou non cette idée.
Le jeu se déroula normalement et enfin une équipe parvint à toucher
tous les membres de l’autre équipe. Cette réussite, une fois verbalisée,
valide donc la nécessité et la justesse de la règle.
3) Séance 3
L’échauffement, le matériel, le dispositif et les objectifs sont les
mêmes que pour la séance précédente. La coopération sera le nouvel
élément attendu dans le comportement des élèves. Je rappel que cet
aspect ne fait pas partie de l’analyse bien qu’elle demeure un objectif
d’apprentissage.
 Analyse
La séance commence par l’habituelle verbalisation des règles. Je fais
attention à ce que se ne soient pas toujours les mêmes élèves qui
restituent les règles. Je demande donc à ceux qui prennent moins
volontairement la parole. Résultat à une énonciation claire et complète des
différents points s’ajoute un vocabulaire adapté. Signe que la construction
est porteuse de sens pour les enfants. Ce sentiment renforcé s’accroît
lorsqu’ils expliquent par une mise en scène des diverses situations
correspondantes à une règle précise.
Il ne faut pas laisser une phase trop longue d’attente avant la mise
ne action. Ils se montrent impatients de jouer. Ce que je ne dois pas
entraver.
Mon souhait, masqué, sur cette séance est la complexification du jeu en
permettant aux joueurs touchés de pouvoir se libérer. Place au jeu. Ce
dernier se déroule dans les règles. Les enfants se les précisent entre eux :
« non tu n’as pas le droit » « tu es sorti » « la balle a touché le sol
avant »… ces remarques s’accompagnent néanmoins souvent de coup
d’œil à mon égard afin de s’assurer de la justesse et de la validité de leur
propos. Cependant mes interventions restent minimes. Je peux tenir
convenablement mon rôle d’observateur. Je note donc que les enfants
voulant la balle se font toucher rapidement car ils laissent échapper la
balle en voulant l’attraper. Je vois sur leur visage un sentiment de
frustration et de résignation. Plus le jeu avance et plus ne reste en jeu que
les joueurs qui se contentent d’esquiver la balle. Je laisse la partie suivre
son cours pour valider la justesse des règles en vigueur.
A la fin je les regroupe dans le but de partager les réactions, mais
personne ne dit rien. Alors une nouvelle partie commence. Les situations
se reproduisent à l’identique, notamment pour les joueurs éliminés de
suite. De nouveau j’attends la fin de la partie.
Cette fois je sollicite les enfants concernés par cette situation. Je
leurs demande ce qu’il ne va pas, pourquoi ils font la tête. Un élève me
répond qu’il ne joue pas. Je lui signale qu’il est sur le terrain comme les
autres et donc que je ne comprends pas son objection. « Je perds
toujours tout de suite. J’en ai marre » répond-il. Je lui demande de
répéter ses mots à l’ensemble de la classe. Alors un autre lui répond que
« c’est le jeu, ce sont les règles », « elles sont nulles » rétorque-t-il. Cet
échange, bien que vif, est porteur de sens.
La confrontation des réactions fait émerger deux comportements liés à
l’application des règles : pour le premier on peut parler d’autorégulation
puisque l’élève attribue un sens aux règles mais il y reste soumis, alors
que pour le second enfant le sentiment de frustration provient de sa
volonté, inconsciente puisqu’il ne peut le verbaliser, de trouver une
adaptation de la règle pour pallier à de telles situations. En ce sens ce
dernier fait preuve d’une certaine autonomie dans la réalisation d’une
tâche. Reste à voir s’il est capable ou quelqu’un d’autre de trouver la
solution à un tel problème, à savoir adapter la règle.
Je laisse alors quelques secondes pour voir la réaction du groupe
mais rien n’émerge. Je leur propose de commencer une nouvelle partie
tant en faisant attention aux comportements de certains et qu’après on
réfléchirait à d’éventuels changements. Je ne donne pas de suite la
solution. Je veux leur accorder encore une chance. Dans le cas contraire la
solution viendra de l’adulte et dans ce cas je pourrai évaluer le niveau
d’intégration de la règle quand celle-ci est imposée de l’extérieur.
Aucune intervention ne m’obligeant à réagir je laissais les enfants
s’amuser et gérer. Une fois terminé, je les regroupais. De nouveau rien ne
ressortie. Je décidais d’arrêter la séance sur ce point pour débuter la
prochaine sur cette interrogation que je devrai susciter.
4) Séance 4
 Analyse
De nouveau les règles sont verbalisées et de nouveau la restitution
est bonne, signe que les règles font sens pour les élèves. Ils utilisent les
mêmes mises en scène et le même vocabulaire que lors de la séance
précédente.
Je leur demandais s’ils se souvenaient du problème rencontré en fin
de séance précédente. Une fois de plus rien à signaler une nouvelle partie
pu commencer. C’est alors qu’un enfant assis se retrouva avec la balle
dans les mains. Par réflexe il l’attrapa alors qu’elle venait sur lui. « Non tu
n’as pas le droit de la prendre » protestèrent certains, « oui mais sinon je
la prenait dans la tête » répondit l’enfant concerné. C’était l’occasion à
saisir. J’interrompis le jeu pour me faire expliquer ce qu’il se passait. Les
enfants me restituant clairement la situation. Je leur demandais alors
comment on pourrait faire pour libérer un de ses camarades assis.
Seulement je n’eu pas une seule réponse et j’imposais alors la règle
suivante : passer le ballon à ses partenaires pour les délivrer. Il
s’agit ici d’une règle imposée par l’enseignant. L’enfant devient alors sujet
dépendant. Quel comportement aura-t-il ?
Une nouvelle partie débuta. Le jeu se développa comme à
l’accoutumée. La règle précédemment annoncée ne change rien. Je vois
deux explications plausibles : soit la règle intervient après plusieurs
parties sans réelle évolution et donc les élèves se sont installés dans ces
principes de jeu, soit la soumission à une règle non construite par euxmêmes leur demande plus de temps pour être effective.
A la fin de cette partie deux élèves se plaignirent de ne pas avoir jouer
« ils n’ont pas essayé de me libérer ». Il expliqua à l’ensemble de la classe
la nouvelle règle après lui avoir demander. Je fis ensuite répéter la règle
par plusieurs enfants pour être sûr qu’un maximum l’ait au moins
entendu.
Après la fin de la partie suivante je leur demandais ce qu’amenait cette
nouvelle règle. La réponse fut : « elle permet de jouer tout le temps ».
Bien que cette règle ne fût pas amenée par les élèves, elle leurs permet
quand même de donner du sens à celle-ci. Là on ne parle pas
d’autonomie mais plutôt d’une autorégulation dans le sens où les élèves
se soumettent volontairement à l’application de la règle.
5) Le jeu du chasseur et des lapins
Je décidai pour la dernière séance de changer de jeu afin de juger de
l’adaptabilité des enfants à un jeu nécessitant les mêmes règles que celles
construites lors des séances précédentes.
Echauffement : passe à dix
Dispositif : un cercle de 10m de diamètre
Matériels : 2 ballons
Objectifs : savoir tirer vite et juste
Savoir esquiver une balle
Savoir anticiper une trajectoire
Agir selon des règles
Je leur donnais comme consigne qu’une équipe, les chasseurs devaient
tirer sur l’autre équipe, les lapins, celle dans le cercle.
C’est alors que les questions fusèrent : « est ce qu’on a le droit de sortir
du cercle ? ou d’y entrer ? Que fait-on quand on est touché ? »
Ils comprirent alors qu’il manquait des règles pour jouer efficacement. Je
leur proposait donc de construire ensemble les règles. Chacun devait voter
à main lever pour décider de la validité d’une règle proposée. Les unes
après les autres, les règles du jeu précédent furent votées.
Avec les quelques règles fondamentales données le jeu aurait pu se
dérouler mais les enfants ont bien saisis l’importance d’un règlement
adapté pour rendre appréciable et vivable une situation. Même si dans ce
cas les règles sont les mêmes que celles déjà construites, ils ont été
néanmoins dans la capacité de se rendre de la nécessité d’une telle
rigueur pour réaliser leur tâche, jouer avec plaisir.
6) Bilan
Ce déroulement de séances a mis en évidence l’importance des
règles dans un jeu collectif. Je suis conscient que le cheminement
intellectuel et déductif réalisé par les élèves a été une chance pour mes
observations et l’avancé du travail.
On remarque l’ensemble des règles définies précédemment (règles
de sécurité, groupales, des jeux collectifs, les règles fondamentales et les
règles particulières) ont toutes leur importance et leur niveau d’efficacité.
Chacune a besoin de l’autre pour leurs applications effectives. Chacune
apportant un aspect essentiel pour le bon déroulement d’une activité.
Le processus de recherche d’autonomie se définit bien en différents
stades : autonomie négative, hétéronomie, autorégulation et autonomie.
Cependant l’évolution ne paraît pas si linéaire au du moins si automatique.
L’enfant ne passe pas d’un stade à un autre de manière définitive. Il va et
vient dans ces catégories de comportement selon sa compréhension de la
situation dans laquelle il évolue. Bien entendu ces changements ne sont
pas incessants. L’autonomie effective sur une tâche n’est pas gage d’une
autonomie totale pour l’enfant. Il convient alors de toujours se soucier
d’inscrire l’enfant dans une telle démarche en s’assurant de son stade
dans ce processus, et ainsi de lui proposer des tâches adaptées.
Pour finir le parallèle entre la construction de règles et le processus
d’autonomie paraît porteur de sens. Les différents types de règles, leur
imposition ou non de la part de l’enseignant offrent la possibilité d’adapter
pédagogiquement les séances selon l’objectif rechercher. Ainsi, selon la
réactivité des enfants il est possible de d’ajuster sa progression. Le panel
de règles permet à l’élève de toujours, ou souvent, trouver un aspect à
améliorer. De plus l’échange qui se manifeste entre les enfants lors des
phases de négociation est source de leur construction d’autonomie.
Le travail de l’enseignant est multiple : médiateur et observateur sont les
principaux. Mais il doit également envisager au préalable des séances les
réactions des élèves et les choix qu’ils feront. Se montrer patient et
accorder un statut à l’erreur afin de mieux rebondir. Enfin un travail fin
d’analyse immédiate afin d’orienter les enfants dans la direction voulue
sans que ces derniers ne le ressentent comme une imposition.
CONCLUSION
Pour un enseignant en formation rencontrer des problèmes sonne
comme un pléonasme. Un mémoire permet de faire émerger une réflexion
sur sa propre pratique. Bien que la mise en application sur le terrain ne
soit pas toujours évidente à mettre en place, se heurtant souvent à la
dure réalité, je suis arrivé à certaines conclusions.
La prise de conscience, par les élèves, de la nécessité de développer
des comportements citoyens, semble favorisée par le pratique de l’E.P.S
au sein de l’école.
C’est par l’interrogation qu’il peut engager au sujet de la notion de règle
que l’enseignant semble en mesure de faire construire à l’élève des
compétences transversales. Cette construction se développant grâce à la
recherche d’autonomie. Ce processus s’avérant long et non linéaire, oblige
l’enseignant à, d’une part, anticiper le plus finement possible les réactions
des élèves et, d’autre part, savoir se détacher de sa préparation pour
adapter ses choix et orientations nécessaires pour faire progresser les
enfants.
Les séances d’EPS, étant de véritables lieux d’échanges où chacun peut
s’exprimer librement, favorise la prise de conscience de nécessité de
règles par le principe de négociation entre pairs, puisque l’enseignant ne
doit, dans la mesure du possible, que se soustraire au rôle de médiateur.
Un tel principe de citoyenneté développant la responsabilité et donc
l’autonomie de l’individu. Ce qui signifie que les pratiques de référence de
l’EPS sont porteuses, au-delà, des techniques, de normes et de valeurs
morales. Le souci de l’EPS n’est donc pas de greffer de la citoyenneté sur
les contenus, mais d’exploiter la richesse des pratiques sociales qui
légitiment sa présence à l’école.
Enfin
une
démarche
basée
sur
l’intégration
d’un
système
réglementaire ne dispense pas de la question du sens à donner aux
contenus d’apprentissage. Ainsi la règle peut devenir un outil pour
apprendre, comprendre et gérer ses apprentissages, seul et avec les
autres. La règle peut devenir le lien incontournable entre les droits et les
devoirs de l’élève, qui l’aide à construire sa citoyenneté et à se construire
lui-même.
BIBLIOGRAPHIE
# Ouvrages :

M.E.N., « Qu’apprend-on à l’école, les nouveaux programmes »,
2002

Flonneau M, « l’éducation à la citoyenneté aux cycles 2 et 3 »
Nathan 1998

MéardJ, « l’autonomie et l’intégration des règles en éducation
physique », PUF 1998

Mérieu P, « apprendre…Oui, mais comment ? » ESF, 1990
# Revus :

EPS, N° 278 « pour une contribution de l’EPS à l’éducation à la
citoyenneté », 1999
N° 273 « de la règle et du sens », 1998
N° 282 « respect des règles et socialisation », 2000

EPS 1, N°96 « Autonomie de l’élève et intégration des règles en
EPS », 2001