OHADA : de quelques innovations juridiques, in : Revue africaine
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OHADA : de quelques innovations juridiques, in : Revue africaine
en REVUE AFRICAINE DES SCIENCES JURIDIQUES UJ :J a i= :J 0 Q. ....UJ en UJ :J a c 02 .., :J en UJ u z UJ • OHADA, Instrument d'Intégration Juridique en en • Système Contractuel-Fonction Publique au Burkina Faso ü THE AFRICAN LAW REVIEW UJ c . • Présomption ou Preuve Méconnue ~:J • African Charter, Women and Land u ~ • Coutume en Droit Camerounais de la Famille = UJ • Self Determination: Anglophone Cameroon c z • Family Allowance and Maternity Beriefits 0 • Présomption d'Innocence :J ~ UJ c • Partenariat en Droit Communnautaire •UJ .... ë;; a:: UJ ~ z :J ISBN 9956-19-000-4 \ OHADA : DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUES Par Anne-Marie MDONTSA ép. FONE Chargée de ·cours à fil Faculté des Sciences Juridiques et Politiques Université de Yaoundé II SOMMAIRE INTRODUCTION IERE PAKI'IE : L'OHADA : UNE NOUVELLE INSTITUTION D'INTEGRATION PAR LE DROIT. A- DE L'HARMONISATION A L'UNIFORMISATION LEGISLATIVE ET JURISPRUDENTIELLE 1) La technique utilisée : harmonisation - uniformisation 2) Le résultat: absence de mosaïque et d'anachronismejuridique B-LE NOUVEL ORDRE JURIDIQUE COMMUNAUTAIRE SUPRA-NATIONAL 1) Caractéristiques : Délégation, prolongement et coordination des souverainetés. Applicabilité directe, primauté de l'ordre juridique communautaire en cas de conflit 2) Fondement contractuel et Constitutionnel IIERE PARTIE: L'OHADA :UN NOUVEAU CADRE JURIDIQUE DES AFFAIRES A- LES ORGANES NOUVEAUX DES AFFAIRES 1) Respect du principe de séparation des pouvoirs Revue Africaiœ des Scienoc:s Jwidi.qucs Val2, W 2, 2001 S ANNE-MAA IE MOONTSA~P- F"ONE OHAOA : DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUES 2) Attributions des différents organes • Le conseil des ministres Le Secrétariat permanent Le C.C.J.A L'ERSUMA INTRODUCfiON B-LE CADRE LEGAL NOUVEAU DES AFFAIRES - Le traité fondateur ou droit originaire - Les Actes Uniformes ou droit dérivé • Acte Uniforme portant sur le droit commercial général. • Actes Uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique. • Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution. • Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif. • Acte Uniforme relatif au droit de l'arbitrage. • Acte Uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises. CONCLUSION Quelles innovations le droit peut-il apporter à une Afrique désintégrée et pauvre, sans paix, avec les marchés nationaux fragmentés davantage qu' ailleurs dans le monde? Comment rassurer les investisseurs nationaux et étrangers en leur garantissant la sécurité juridique ? le Traité signé à Port-Louis en Ile Maurice le 17 Octobre 1993 par les chefs d' Etats voisins appartenant à la même zone monétaire répond à cette question. Il formalise L'OHADA, Organisation pour l' Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. Un détour historique est indispensable pour mieux connaître et assimiler ce droit neuf dont le temps n'a pas encore révélé toutes les richesses et les difficultés de mise en œuvre. En fait l' idée d'un droit harmonisé est lancée par les ministres des fmances de la zone franc en avril 1991 à Ouagadougou et en la même armée à Paris. L'idée est consolidée par ces mêmes ministres en avrill992 à Yaoundé et en septembre de la même armée à Paris. Elle est approuvée par les chefs d'Etats et de délégation en octobre 1992 à Libreville 1 • Un directoire composé de trois membres prépare le Traité que les ministres de la Justice et des fmances fmalisent à Libreville les 7 et 8 juillet 1993 et les 21 et 22 septembre à Abidjan. Le Traité est donc signé le 17 octobre 1993 à Port-Louis en Ile Maurice. L'OHADA compte 16 Etats parties dont: Bénin, BUrkina Faso, Cameroun, RCA, Comores Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée-Equatoriale, Mali, Niger, SénégJ, Tchad, Togo. Les hommes d'Etat africains soucieux d'éviter le ridicule ont assigné à cette organisation des objectifs précis tels : l'élaboration et l'adoption des régies communes, simples modernes et adaptées afm de faciliter l'activité des entreprises et réaliser un environnement juridique et un espace économique commun; garantir par ce droit harmonisé la sécurité juridique des activités économiques et favoriser l'essor des investissements par élimination des conflits de lois; reconnaître l'arbitrage' comme instrument normal de réglement des différents contractuels; exalter la solidarité et le rapprochement des peuples; mettre en œuvre les procédures judiciaires appropriées. Cette présentation raisonnée de " l'outil juridique imaginé et réalisé par 1'Afrique pour servir 1'intégration économique et la croissancel " selon KEBA MBAYE, permettra qu'il soit " mieux connu et assimilé par les nouvelles générations d'étudiants, de magistrats et autres professionnels au service de 1'entreprise• " la sécurité et la transparence juridique offerte par son site' internet contribue à mettre à jour ses multiples talents et ses facettes cachées. Il convient, pour aborder de manière ordonnée les différentes innovations de l'OHADA, de l'étudier successivement comme une institution nouvelle d' intégration par le droit (I) et un nouveau cadre juridique des affaires (II). 1 Lire p.6. POUGOUE, présentation génénlc et procédure en OHADA, coll. Droit uniforme, PUA Yaoundc 1998 p.11 'Cf TIGER Philippe, droit dca affaires co Aliiquc, que sais-je, PUF. 3' Cd, 2001 p. 32et 1 ' Lire IŒBAMBAYE in OHADA, plaquette clabon!c par UNIDA octobre 2002 ' Lire Prof. Jacquca David prCfacc OHADA aûrdC juridique, Bruylant, UNIDA 2002 p.V ' WWW. OHADA.com (i(i Revue Africaine des Science• Juridiques Vol:.2, W 2. 2001 67 Revue Africaine des Sc::imcn:JœidiquesVo1.2, N"' 2.2001 r- OHADA : DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUËS h mE-Mo.l:tiE MOONTSA t:P. FONE 2- Résultat : absence de mosaïque et d'anachronisme juridique I ... PARTIE: L'OHADA :UNE INSTITUTION D'INTREGRATION PAR LE DROIT L'un des pères fondateurs de l'Europe communautaire Jean MONNET disait que la coopération entre les nations, si importante soit elle, ne résout rien. Ce qu ' il faut chercher, c'est une fusion des intérêts des peuples européens et non pas seulement le maintien des équilibres de ces intérêts6 • Cet acteur de l'intégration européenne exaltait ainsi l'une des techniques, de l'intégration juridique .Cette dernière est, selon le professeur Joseph ISSA SAYEGW " Le transfert de compétences étatiques de deux ou plusieurs Etats à une organisation internationale dotée du pouvoir de décision et de compétences supranationales ou super-étatiques pour réaliser un ensemble juridique unique et cohérent dans lequel les législations nationales s ' insèrent ou se fondent pour teindre les objectifs économiques et sociaux que les Etats membres se sont assignés ". L' intégration est donc un concept à géométrie variable et I' OHADA est bien une institution d ' intégrationjuridique pas le droit. Elle innove par l'utilisation des méthodes ou techniques particulières à l'instar de l' harmonisation et de l' uniformisation (A). L'OHADA innove surtout parce qu 'elle crée un nouvel ordre juridique communautaire supranational (B). A- DE L'HARMONISATION A L'UNIFORNISATION LEGISLATIVE ET JURISPRUDENTIELLE DANS L'OHADA 1- La technique utilisée L' harmonisation est la coordination, le rapprochement des systèmes juridiques d'origines et d ' inspirations différentes, voire divergentes, pour les mettre en cohérence entre eux en réduisant ou supprimant leurs différences et leurs contradictions de façon à atteindre des résultats compatibles entre eux et avec les objectifs communautaires recherchés. L' uniformisation ou l' unification consiste plutôt à instaurer dans une matière juridique donnée, une réglementation unique en tous points Pour tous les Etats parties et dans laquelle il n 'y a plus de place en principe pour les différences. Ainsi, dans la réalisation de son activité principale d'élaboration du droit uniforme des affaires, I' OHADA a expressément et théoriquement choisi la technique de l'harmonisation. Le professeur Jacques David, écrit à ce propos : " l'harmonisation affichée par le traité s' apparente à s'y méprendre, à une véritable uniformisation du droit8 ". Ainsi le traité parle d 'harmonisation, mais le professeur Paul GERARD POUGOUE précise qu' il est plus concret de parler de l' uniformisation des affaires. ' lire FONTAINE Pasco!, une idée neuve pour l'Europe, la décLuation SCHUMAN 1950 -2000 , Commiu ion européenne p.17 'Cf. ISSASAYEGH, (J) l' intégntionjuridique dco Eut.sAiiicoins dons la zone franc, p<rtan~ 1,823 p 5 à 3 1; pcnant 2, N" 824 p. 125 a 163 ' lire prof. POUGOUE (P G), t"senution Génénlle ct procédure en OHADA, droit uniforme PUA, Yaowulé 1998 p.ll 68 L' OHADA part donc de l' harmonisation vers l' uniformisation et forme un dispositif équilibré de réflexion, de décision et d ' interprétation de nature à surmonter les forces d'inertie, sans pour autant heurter les sensibilités nationales9 . L' OHADA innove aussi en sécrétant un nouvel ordre juridique. B-LE NOUVEL ORDRE JURIDIQUE coMMUNAUTAIRE SUPRANATIONAL DE L'OHADA 1- Caractéristiques du nouvel ordre juridique OHADA L' ordre Juridique est l'ensemble organisé de normes juridiques possédant ses propres sources, doté d' organes et procédures aptes à les émettre, à les interpréter ainsi qu' à en faire constater et sanctionner, le cas échéant les violation 10 • On distingue : l'ordre juridique interne, l'ordre juridique international et l'ordre juridique supra-national. L' OHADA est une institution d ' intégration supranationale dotée d'un véritable pouvoir normatif au régulateur, produisant des effets dans l' ordre interne des Etats. En fait, lorsque des Etats renoncent à leur autonomie législative dans les matières de droit des affaires ils délèguent leur souveraineté ou transfèrent leur compétence à une organisation internationale, I' OHADA, possédant une personnalité juridique autonome et distincte de celle des Etats parties. La souveraineté de ces Etats s' efface concernant ces matières pour les besoins de l' efficacité. Ces Etats parties créent ainsi une norme supérieure à des normes internes des Etats. Le traité du 17 octobre 1993 de Port Louis appelé traité fondateur ou droit originaire ainsi que les Actes Uniformes ou droit dérivé établissent un nouvel ordre juridique indépendant dont la supra-nationalité ou la primauté et la prééminence ainsi que l' applicabilité directe" excluent toute révocation ou modification de la législation communautaire en cas de conflit avec le droit national. 2 - Fondement contractuel et institutionnel Le prolongement et la coordination des souverainetés confèrent à 1' ordre juridique communautaire un double fondement contractuel et institutionnel. En fait, c' est par convention que les Etats ont crée I'OHADA. Ce concours de volontés est caractérisé par certains principes tels : la force obligatoire du contratt2 ou de la norme d' intégration. Selon ce principe les conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être ' Lire Jacquco David, ptiface OHADA. sümés, juriscopc, Bruylan~ Bruxselles 2002 pV. " Lire ISAAC (G), Droit Communautoin: Génénl, Pario, Armand Colin, 7' éd. P.ll7. " Liro Philippe Tigcr (Pb), Droit des alfaues, que sais-j e PUF, Paris J• éd. p.29. " L'art 46 du traitt dispose que l'OHADA a la capacité de contracter, d' acquérir des biens meubles ct inuncublco, d'en disposer, d 'ester en justice. 69 Revu< Afri<><•• "" Soim= l m<ti"""' Vol.2. N" 2. 2001 Rev ue Africaine des Scimcxs Jwidiques Vol.2, W 2. 2001 --- -- OHADA · DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUES .'INNE-MAAIE MOONTSAEP. FONE rend n' est porté devant la C.C.J.Aque par un Etat partie. Ainsi, le traité OHADAconstitue plus qu'un accord qui ne créerait que des obligations mutuelles entre les Etats contractants. Le fonctionnement de la communauté concerne directement les justiciables de la communauté. Le traité au-delà des gouvernements, concerne les peuples et de façon plus concrète par la création d'organes qui institutionnalisent les droits souverains dont l'exercice affecte aussi bien les Etats membres que leurs citoyens. Ces derniers sont également sujets du nouvel ordre juridique. Le deuxième exemple concerne Monsieur Y, actionnaire d' une société de distribution d'électricité de nationalité Centrafricaine. Cette société est nationalisée. Il y a transfert de son palrimoine à la société d'Etat Centrafricaine. Monsieur Y est donc privé de dividendes lui revenant, et refuse de régler une facture d' électricité au motif que la loi Centrafricaine de nationalisation a violé les dispositions du traité OHADA ainsi que l'Acte Uniforme sur le Droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique. Monsieur Y peut saisir le tribunal centrafricain qui va surseoir à statuer et soumettre à la C.C.J .A plusieurs questions préjudicielles sur l'interprétation et l' application des diverses dispositions. Le traité OHADA n' est donc pas un traité international ordinaire. Il institue un ordre juridique propre intégré au système juridique des Etats parties et qui s' impose à leurs juridictions. En instituant une communauté de durée illimitée, dotée d' institutions propres, de la personnalité, de la capacité juridique et de représentation internationale, ayant des pouvoirs réels issus du prolongement et de la coordination des souverainetés, les Etats parties ont crée un corps de droit applicable à eux mêmes et à leur ressortissants. Le traité OHADA a une source autonome, une nature spécifique et originale. Il ne peut se voir opposer judiciairement un texte interne quel qu' il soit, sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la communauté ellemême18. Le fondement contractuel de l'ordre juridique communautaire est doublé de son fondem.::nt constitutionnel puisque la volonté des Etats parties justifiant l' application des principes de force obligatoire du contrat et d' effet relatif des contrats, est empreinte ou influencée de l'intérêt général établi par les objectifs du traité. Aucun acte unilatéral incompatible avec la notion de communauté ne saurait prévaloir contre l' ordre juridique communautaire supra-national. Les dispositions communautaires ne peuvent être mise en œuvre de façon complète, uniforme et prioritairement dans tous les Etats parties que par 1' applicabilité immédiate et la primauté sur le droit national. C'est elles qui établissent directement les droits et les obligations pour les Etats parties et leurs ressortissants. L' ordre juridique communautaire a donc une valeur inestimable. Le troisième exemple concerne Monsieur A et B commerçant ivoiriens et congolais qui ont signé un contrat d' approvisionnement de marchandises. Mais suite à une mésentente, les parties à ce contrat ne peuvent plus exécuter leurs prestations. Elles ne veulent pas saisir les juridictions nationales. La voie de l' arbitrage leur est ouvert. En fait, la promotion de l'arbitrage comme instrument de règlement des différends contractuels est l'un des enjeux majeurs de l'OHADA. L' article 21 du traité déftnit la convention d' arbitrage en distinguant entre clause compromissoire antérieure au litige et compromis postérieur au litige. Tous les contrats non contraires à l'ordre public et tout le droit des affaires unifté ou non sont soumis à l'arbitrage. Il exécutées de bonne foi. Le principe de 1'effet relatif' 3 des contrats précise que " les conventions n'ont effet qu'entre les parties contractantes; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'art 1121 ". Les Etats tiers c'est-à-dire ceux qui ne sont pas Etats parties ne sont pas concernés par ce nouvel ordre communautaire des affaires. Le traité OHADA est cependant plus qu'une convention et a de ce fait un fondement institutionnel. Ainsi par exemple, supposons que l'entreprise de transport X est de nationalité camerounaise c'est à dire qu'elle y a son siège social réel correspondant à son centre de décision. Si une obligation contraire à celles exigées par l'Acte Uniforme OHADA sur le droit des sociétés commerciales et du G.I.E est imposée à l'entreprise X, elle peut estimer que le traité OHADA a èté violé et que l'Acte uniforme sur le droit des sociétés l'a aussi été. Pour la violation de l'Acte Uniforme, l'entreprise X va, en application de l'article 13 du Traité" saisir le T.P.I ou le T.G.I du lieu du siège social selon le montant de la demande. Elle interjettera appel et seule la C.C.J.A sera compétente pour le pourvoi en cassation. Il s'agit du contentieux de 1'Acte Uniforme. LaC. C.J.A est saisie soit par 1' avocat 15 de l'entreprise à compter de la notification de la décision contestée, soit sur renvoi de la cour suprême saisie par pourvoi dans l'affaire entreprise X. La C.C.J.A va évoquer et statuer sur le fond conformément à l'article 14 du traité. Elle va se prononcer sur la décision d'appel à l'exception de la décision appliquant des sanctions pénales. La procédure y est contradictoire et écrite. Elle peut être orale selon les articles 34 à 3 8 du règlement de procédure. Aucune autre procédure ne peut plus prospérer devant la cour suprême à propos de l'affaire entreprise X. Cette règle n'affecte pas les procédures d'exécution. L'arrêt de la C.C.J.A aura autorité de la chose jugée et force exécutoire à compter du jour de son prononcé. Il recevra dans tout Etat partie une exécution forcée 16 dans les mêmes conditions que les décisions des juridictions nationales. Aucune décision contraire dans la même affaire entreprise X ne pourra faire l'objet d'une exécution forcée dans aucun des seize Etats partie 17 • Les juridictions d'instance et d'appel ont la faculté lorsqu'elles sont saisies de ce contentieux, de solliciter 1' avis consultatif de la C. C.J.A pour des questions préjudicielles relatives à l'interprétation et l'application du traité et des Actes Uniformes. C'est l'activité consultative de la C. C.J.A. Cet avis peut ne pas s'imposer à la juridiction ; mais il prévaudra lorsque le litige sera porté devant elle. Ainsi, le tribunal ou la cour d'appel pourront demander à la C.C.J.A de leur dire si le traité ou l'Acte Uniforme sur le droit des sociétés ont été ou non violés. Quant au contentieux du traité entre Etats parties relatif à son interprétation et à son application, seule la C.C.J.A, après échec de la résolution à l'amiable, est compétente. Le difféu L'artidc 13 du traité dispœc: que ••tc contentieux relatif à l'applic.ation del Actes Unifonncs Clt réglé en première instance ct en •ppel paclc:o juridictions dca Eub partico ". u Le ministère d'avocat y est obligatoire cf. article 23 du règlement d '~orbitrage en vigueur depuis le 18 avril 1996. son mancbt est 1pécial 1• les artidct 47 à SO admettent la tierce oppotition, la demande en interprétation, la danandc en révision. CCl voies de rccoun cxtnordinaàa sc justifient par Je fait que cette clécision peut CltUcr préjudice à un tien non ~lé au procès ou présenter des 14 "Cf arrôts rendus par la cour de justice des communautés européennes dans l'affaire cosu / ENEL 1964 et l'affaire Vmd Gcnd &. Loos difficulté:a dans son interprétatioo ou c.aUICI" une injustice qu'un fait fiatw vient mettre i nu. 7 ' Cf. ~orticic 20 du traité 70 en 1963. Lire Klaus-Dieter BORCHARDT. l'ABC du doit communautoire, p.22 71 Revu< Afri<>in< dH Scion= Juri<liqun Vo1.2. N" 2. 2001 Revw:Africaine des Sci.coœsJuridicpa Vol.2, N"' 2. 2001 1• 1 hiNE-MAAIIE MOONTSAao. FONE OHAOA : DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUES suffit qu'une partie ait sont domicile ou sa résidence habituelle dans un Etat partie ou que le contrat soit exécuté ou à l'être en tout ou partie sur le territoire d'un ou de plusieurs Etats parties. Si A et B avait déjà saisi une juridiction nationale avant que l'un d'eux ne fasse la demande de procédure d'arbitrage, ce tribunal doit se déclarer incompétent et renvoyer les parties à cette procédure d' arbitrage 19 • Malgré son appellation, la C.C.J.A n'est pas une véritable cour d' arbitrage car elle ne tranche pas les litiges en tant qu'arbitre. Elle assure seulement 1' administration et le contrôle de 1'arbitrage. Elle est informée du déroulement de 1' instance et examine les projets de sentence 20 ; elle propose les modifications de pure forme et rend la décision d'exequatur en vertu de laquelle la sentence fera 1'objet d'exécution forcée. La sentence arbitrale aura autorité définitive de la chose jugée sur le territoire de chaque Etat partie au même titre que les décisions rendues par les juridictions de 1'Etat. Ainsi, cet ordre juridique est d'application directe21 dans tous les Etats parties. Une norme est dotée d'applicabilité directe lorsqu'elle fait naître directement dans l'ordre interne des droits au bénéfice des personnes privées physiques et morales elles peuvent en demander elle même 1'application aux organes des pouvoirs publics ou aux tribunaux de 1'ordre juridique 22 interne • L'OHAnA établit des droits et obligations pour les Etats parties et leurs ressortissants. Le droit communautaire devient ainsi le droit commun elles droits nationaux n'ont plus qu'un caractére résiduel ou supplétif. L'ordre juridique communautaire OHADA est particulier en ce sens qu'il n'utilise pas la force ou la soumission pour unifier l'Afrique. l'OHAnA est une création du droit et une communauté par le droit. Cette organisation poursuit ses objectifs en utilisant exclusivement le droit. L'unification par l'OHADA repose donc sur le libre consentement. Elle est réalisée et préservée par le droit. Le droit réussi ainsi ce que le sang versé n'a pu atteindre. Chaque citoyen devient un protagoniste de la communauté, tandis que l'ordre juridique nouveau influe de plus en plus directement sur sa vie quotidienne. Il se voit conférer des droits et imposer des obligations, étant soumis, en sa qualité de ressortissant d'un Etat partie, a des ordres juridiques de niveaux différents. L'ordre juridique communautaire OHADA place les citoyens comme dans un régime fédéral constitutionnel. Mais ces compétences sont limitées aux domaines et objectifs fixés par le législateur communautaire OHADA. Ellen' a pas la liberté de fixer d'autres objectifs au même titre qu'un Etat. Elle ne dispose ni de la toute puissance qui caractérise les Etats, ni de la capacité de se 23doter de nouvelles compétences ; car, 1'Etat à compétence pour statuer sur sa propre compétence • le droit communautaire déterminent les rapports entre la communauté et les Etats parties. Ceux-ci doivent prendre toutes les mesures appropriées pour satisfaire aux obligations qui leur incombent en vertu du Traité et des Actes uniformes. Il leur appartient d'aider l'OHADA à mener à bien sa mission et de s'abstenir de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs du Traité. L'OHAnA constitue en plus un nouveau cadre juridique des affaires. " Cf. uticlc 23 du tnitt • cf uticle 21 (2) du lnité. " Lin: Kla111 DIETER BORCHARDT, L'ABC du droit communaut.ain:, 2000 p.22 "Lin: Prof. Pierre Marie DuPUY Droit inl<mational public, j• écl DaUoz, 2000 p.38j. " Lin: Kla111 DIETER BORCHARDT, op.cit p.j7 72 R<vueAfri<Une<~<.sa.....,JuriœqœaVol.2, N' 2.2001 II,_ PARTIE : L'OHADA :UN NOUVEAU CADRE JURIDIQUE DES AFFAIRES L' OHADA innove en créant des organes qui respectent le principe de la séparation des pouvoirs et en fournissant un cadre légal nouveau. A-LESORGANESNOUVBAUXDESAFFAIRES Il convient de distinguer la séparation des pouvoirs des attributions de ces organes. l-Ies organes de l'OHADA et la séparation des pouvoin L'OHADA met en place quatre institutions qui respectent le principe non écrit de l' équilibre des pouvoirs ou de la séparation des pouvoirs jadis formulé par JOHN LOCKE et surtout MONTESQUIEU24 • Ce principe tend à prévenir les abus du pouvoir en général, en l'attribuant non à un organe unique, mais en le répartissant entre plusieurs organes, chargés chacun d'une fonction distincte et en mesure de se faire mutuellement contrepoids25 • D'où la distinction entre le pouvoir législatif qui décide des mesures à adopter, du pouvoir exécutif qui est chargé de les mettre en œuvre, et du pouvoir judiciaire qui doit les interpréter. Ainsi, on peut penser que le conseil des Ministres chargés des finances et de la justice des Etats parties qui adopte les Actes Uniformes assure le pouvoir législatif de l'OHADA. il se réunit au moins une fois par an sur convocation de son Président à son initiative ou à celle du tiers au moins des Etats parties. L'abstention d'un ou de plusieurs représentants ne fait pas obstacle à l'adoption d'un Acte Uniforme'• . Seul un vote défavorable d'un ou plusieurs Etats parties peut faire obstacle à l'adoption d'un projet d'Acte Uniforme qui aurait franchi avec succès les étapes précédentes de son élaboration. Les décisions sont prises soit à 1'unanimité des Etats parties présents et votant pour les Actes Uniformes, soit à la majorité absolue dans les autres hypothèses. Chaque Etat partie bénéficie en quelque sorte d'un véritable droit de veto. Les Etats parties délibèrent valablement si les deux tiers au moins des Etats parties sont représentés. Le pouvoir exécutif est assuré par le secrétariat permanent, son " bras séculier ". le siège est à Yaoundé-Cameroun. Il est dirigé par un Secrétaire permanent27 nommé par le Conseil des Ministres pour une durée de quatre ans renouvelable une fois' 8 • L' accord de siège du 30 Juillet 1997 entre le gouvernement du Cameroun représenté par le Ministre des relations extérieures et le Secrétaire permanent, a permis l'installation de ce secrétariat permanent. Il jouit de la personnalité juridique'• avec tous ses attributs. Il assure la protection de ces locaux inviolables. Il jouit de 1'immunité de juridiction, peut détenir ou transférer de fonds en toutes devises et "MONTESQUIEU, DEL'ESPRIT DES LOIS, clup.6 Livre Xl. "Lin: Pb TIGER, Droit des aflàil<o en Afrique op.cit p.31 " Lin: art. 8 du tnité OHADA "L'actuel Scattain: permanent est M. Lucien JOHSON "cf. art. 40 du tnité OHADA "L'OHADAjouitdano c:haqueEtatputie, cleo immunité~ etprivilèp (cf. ut. 74 du traité) Seo bi- etavoin ne peuvent fain: l'objet d 'aucune action judiciaire sauf si elle renonce i cette immunité cf. art. 48 du traité. la fonctionnaire~ ct Ica employé. del inttitutiODJ Revue Africaine da SciCDIXI J\a'idi.quc:s V<i.l, N• 2, 2001 73 ÂNH~IE MOONTSiu~:P. FONE OHADA : DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUES bénéficier de divers immunités et privilèges. Sa composition particulière, les règles de quorum et de vote, le caractère constitutionnel du traité consolident son poids politique et justifient la portée de ces décisions concernant les Actes Uniformes qui s'imposent sans autre formalité. Le pouvoir judiciaire autonome est assuré par la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA). C'est la Juridiction qui régule, oriente et unifie les applications et les interprétations. C'est elle qui permet une intégration juridique véritable. La supériorité du système OHADA réside en l'existence de cette juridiction unique qui va prolonger l'unification jurisprudentielle. Cette garantie n'est offerte que par la CCJAde l'OHADA30 • Elle est composée de sept juges élus au scrutin secret par le Conseil des Ministres sur une liste de personnes présentées par les Etats parties et comprenant deux candidats au plus par Etat. Une fois élus, les membres de la Cour sont inamovibles. Les juges sont élus pour une durée de sept ans renouvelable une fois parmi les magistrats, avocats, professeurs de droit ressortissants des Etats parties et ayant acquis au moins quinze ans d'expérience professionnelle. La Cour est renouvelée par septième et ne peut comprendre plus d'un ressortissant du même Etat partie. Chaque membre de la Cour conserve son mandat jusqu'à l'entrée en fonction de son successeur, et un dispositif organise la permanence de l'effectif en cas de vacances d'un poste. Son siège est à Abidjan, mais elle peut se réunir sur le territoire d'un autre Etat avec l'accord préalable de cet Etat. Une autorité désignée par le gouvernement est chargée dans chaque Etat partie d'apposer la formule exécutoire sur les arrêts de la CC'JA'1 , sans autre contrôle que celui de la vérification de 1'authenticité du titre. L'ERSUMA ou 1'Ecole Régionale Supérieure de Magistrature est rattachée au Secrétariat Permanent. Son siège est à Porto Novo au Bénin. Le Secrétaire Permanent préside son Conseil d'Administration. le Directeurl 2 Général est sous l'autorité du Secrétaire Permanent. Il est responsable des services et met en œuvre le plan de formation adopté par le Conseil d' Administration. 2- Les attributions précises des organes annuelles des Etats parties, approuve les conventions conclues par l'OHADA pour se procurer des ressources et accepte des dons et legs ; - adopte les budgets annuels de la CCJA et Secrétariat Permanent ; - approuve les comptes annuels de l'organisation. le Secrétariat Pennanent : -assiste le Conseil des Ministres et lui propose le programme annuel d'harmonisation ; - propose au Président du Conseil des Ministres 1'ordre du jour de cet organe ; - prépare les Actes Uniformes en concertation avec les Etats parties. Ce qui lui donne une dimension politique conséquente ; - en communique les projets aux gouvernements et recueille leurs observations écrites dans le délai de quatre-vingt dix jours. Il établit un rapport à leur sujet qu'il transmet à la CCJA ; -recueille 1'avis de la CCJA dans le délai de trente jours et met au point le projet définitif d ' Acte Uniforme ; - propose d 'inscrire son examen à l'ordre du jour du prochain Conseil des Ministres ; -reçoit toute demande écrite d'amendement ou de révision envoyée par un Etat partie ; -prête son concours à 1'élection des juges de la CCJA ; - assure de fait la gestion du J. 0 de l'OHADA ; -le Secrétaire permanent nomme ses collaborateurs conformément au critère de recrutement de 1' article 40 du Traité. La Coun Commune de Justice et d'Arbitrage : -Donne son avis sur tous projet d'Acte Uniforme; -Assure l'interprétation et l'application du Traité et des Actes Uniformes ainsi que des règlements pris pour l'application du Traité conformément à son article 14 ;- Intervient en matière d'arbitrage pour désigner les arbitres, suivre la procédure, examiner les projets de sentences, prononce I'exéquatur ;-Juge en cassation les recours contre les décisions prises en matière de droit harmonisé par les juridictions nationales en premier ressort et en appel. L'originalité de la CCJA est d'avoir un pouvoir évocateur puisqu'elle évoque et statue au fond ; -Assume une double activité consultative et contentieuse conformément aux articles 13, 14 et 56 du Traité L'Ecole Régionale Supérieure de Magistrature: - Concourt à la formation initiale des magistrats et auxiliaires de justice des Etats parties ; organise des colloques et stages de formations destinés à des Universitaires, des praticiens du droit et des opérateurs économiques. Le Conseil des Ministres : - nomme le Secrétaire Permanent et le Directeur de 1'ERSUMA dont il défmit le règlement ; prend, à la majorité absolue les règlements nécessaires à 1'application du Traité ; - adopte et modifie les Actes Uniformes ; -approuve le programme annuel d 'harmonisation sur proposition du secrétariat permanent ; - procède à l'élection et au remplacement des membres de la CCJA; consulte la CCJA sur toute question relative à l'interprétation et à l'application du Traité et des règlements pris pour son application ainsi que des Actes Uniformes ; - arrête les cotisations de t•OHADAjouiucnt dana l'exercice de leur fonction des privilègc::s ct immunités diplomatiquc::s. Cf. art. 49 du traité. Cc::s archivc::s sont inviobhlc::s où qu•clJc::sac trouvent Cf. art. SO du traité. Sc::s avoin, ses biens, ct n:vcnus, le opérations autorisées par les traités aont exonérés de tous impôb, taxc::s ct droit de douane. Cf. art. S 1. Elle est cxcm.ptc de toute obligation rcl.ttivc au recouvrement ou au paiement d'impôts, de taxes ou de droit de douane. Lire prof. P.G. POUGOUE, op.cit. P.6 "le Cameroun a ntifié le traité OHADA par décRI n"96/ITI duS tcptembrc 1996. " L'actuel rctpomable de la CCJA est M Scydou BA "L'actuel Directeur de I'ERSUMA est M Timothé SONE 74 Revue Africalnc des SciC'DOtl Juridiques: Vol..2, W 2, 2001 B- UN CADRE LEGAL NOUVEAU DES AFFAIRES L'OHADA offre comme dispositif législatif nouveau : -le Traité qui est le droit originaire ;- les Actes Uniformes réglementant les secteurs divers des affaires. L'Acte Uniforme est le texte pris pour l'adoption des règles communes des Etats parties. Il constitue le droit dérivé prenant sa source et sa validité dans le Traité fondateur. Il a par conséquent valeur supra législative. Les Actes Uniformes concernent toute discipline juridique .de nature à faciliter l'activité des entreprises, à encourager les investissements et à promouvoir les échanges régionaux et internationaux. Les Actes Uniformes déjà parus concernent : le droit commercial général, le droit des Sociétés commerciales et du GIE, le droit de sûretés, les procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution, les procédures collectives d'apurement du passif, 1' arbitrage, les comptabilités des entreprises. Il convient de recenser quelques unes RevucArri<:ainc dnSciCDCCIIJwidiquc:s Val.2,W 2. 2001 75 h iNe-MAAE MOONTSA.t::P. FONE OHADA : DE QUELQUES INNOVATIONS JURIDIQUES des innovations qu 'offrent ces divers Actes. Ainsi par exemple : SUR LE DROIT DES SURETES SUR LE DROIT COMMERCIAL GENERAL Les principales innovations sont : Les opérations nouvelles de commerce telles : l'achat d'immeubles en vue de la revente ; l'exploitation industrielle des carrières et des gisements ; les opérations de transit et de télé communication ; les opérations des intermédiaires sur les immeubles l'affirmation de la théorie des actes de commerce par accessoire à travers : les contrats entre commerçants pour les besoins de leur commerce ; les actes effectués par les sociétés commerciales. • introduction dans le droit positif des Etats parties, des dispositions sur la vente commerciale largement inspirées de la convention internationale de Vienne du Il avril 1980. SUR LE DROIT DES SOCIETES COMMERCIALES ET DU GIE Cet acte innove en : Instituant deux phases dans la constitution de la société : société "en formation" jusqu'à sa constitution c'est à dire jusqu'à la signature des statuts, et conduite jusqu 'à cette date par les " fondateurs "; après signature des statuts, elle est dite " constituée, mais non encore immatriculée " et conduite par des " dirigeants sociaux " . • La prévention des difficultés de 1'entreprise et la protection des épargnants par une réglementation spécifique aux sociétés faisant appel public à l'épargne. • Une description et une réglementation des liens de droit entre sociétés d'un même groupe • Les mesures préventives telles : les procédures d 'alerte (article 150 à 158) qui est un devoir supplémentaire imposé au commissaire aux comptes. Il doit alerter les dirigeants du risque sérieux de cessation d'exploitation. L'expertise de gestion (article 159 à 160) qui est une faculté offerte aux associes d 'agir en justice pour faire établir par un expert judiciaire un rapport sur une ou plusieurs opération de gestion. Concrètement, un ou plusieurs associés représentant au moins 20 %du capital social, peuvent soit individuellement soit en se groupant, demander aux président de la juridiction compétente du siège social, la désignation d ' un ou plusieurs experts, chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion. Cette innovation est destinée à renforcer le droit des associés de contrôler la gestion sociale. Elle permet aussi aux juges de s'ingérer dans le fonctionnement des sociétés • L'action sociale ut singuli C'est un nouveau régime des sûretés fiable, répondant aux besoins essentiels des affaires à savoir : la célébrité et la sécurité. Ses sûretés simples dans leur création et efficaces dans leur exécutions'3 sont de nature à convaincre 1'étranger à investir en Afrique, et les hommes d ' affaires africains eux mêmes à croire au potentiel économique de leurs pays. Les innovations essentielles sont faites au sein des catégories et consistent : pour les sûretés existences, en la suppression ou en la requalification de certaines d' entres elles, en 1' amélioration pour d' autres de leur régime par la consécration légale des solutions dégagées par la jurisprudence ; en la création de nouvelles sûretés que la pratique et la jurisprudence des affaires rendait indispensables. Il s ' agit du droit de rétention et de la lettre de garantie. (garantie à première demande). La première innovation à aborder est la redécouverte du cautionnement. Le cautionnement est désormais réputé solidaire par 1' Acte uniforme. La caution ne dispose pas du bénéfice de discussion ni du bénéfice de division en cas de pluralité de cautions sauf stipulation expresse ou loi contraire d' un Etat partie. Le cautionnement solidaire est donc le cautionnement de droit commun. (cf. art 10). Ce qui porte un coup sérieux à la règle de la subsidiarité de l'engagement de la caution. Le bénéfice de discussion est la faculté reconnue à la caution de contraindre le créancier à poursuivre d' abord le débiteur principal, à saisir et à vendre ses biens avant de 1' exécuter. Le bénéfice de discussion est une illustration du caractère accessoire et subsidiaire du cautionnement. Le créancier a le droit de poursuivre la caution en premier lieu, mais celle-ci à la possibilité d ' imposer au poursuivant qu'il fasse saisir et vendre les biens du débiteur principal avant de continuer les poursuites contre elle. L'effet du bénéfice de discussion est de suspendre les poursuites engagées contre la caution. Le créancier ne pourra reprendre les poursuites que s' il ne retire pas de la vente des biens un paiement intégral. L' article 16 dernier alinéa dispose qu'en tout état de cause, le créancier a intérêt à poursuivre le débiteur avec célérité et diligence, car précise la loi, il est responsable à l'égard de la caution de l'insolvabilité du débiteur principal survenue par le défaut de poursuites, et ce, jusqu' à concurrence des biens indiqués. En d' autres termes, le défaut de poursuites, le retard ou la négligence sont des fautes du créancier dont la caution n' a pas à supporter les conséquences. Le bénéfice de division est la faculté offerte à chaque caution en cas de pluralité de cautions garantissant la même dette, de demander au créancier poursuivant de diviser ses poursuites et ce dès les premières poursuites. Il faut que ces cautions soient solvables au moment où la division est invoquée ; si non, les autres cautions solvables en supportent. Le créancier qui prend 1' initiative de la division supporte également 1' insolvabilité des autres cautions et ne peut rétracter sa décision (art 17 al3 AUS). " CfPof. François ANOUKAHA, le Droit des •ûn:téa cluu l' Acte uniforme OHADA, PUA YaoUDdé 1998 P.9 76 RevucAfric::aiDe des Sci.mcesJuridiquca: Vol2, W 2, 2001 Revue AfricaiDe da: Scimc::a Jwidiquea Vol2, W 2, 2001 77 OHAOA : DE OUB.OUES INNOVATIONS JURIDIQUES ~&MAA~~SAtP~.FON~~E~------------------------------------------------------------- •La deuxième innovation concerne la durée et le montant du cautionnement qui doit être limité sous peine de nullité à un montant maximal déterminer par les parties. Ce montant inclut obligatoirement le principal et les accessoires. •L' autre grande innovation et la plus remarquable est la consécration législative de la lettre de garantie. C'est une convention par laquelle une personne, le garant, s'engage à payer une somme déterminée à une autre, le bénéficiaire, à la requête ou sur instruction préalablement émises par le donneur d'ordre. C'est une garantie à première demande justifiée (art 29. AUS) ne pouvant être souscrites que par les société commerciales et les GIE, sous peine de nullité ; et cette nullité doit être d'ordre public. Sa vocation est de servir de fmancement pour le commerce international. La lettre de garantie est indépendante par rapport au contrat de base. La lettre de contre-garantie est autonome par rapport à ce même contrat et par rapport à la lettre de garantie elle-même. CONCLUSION Telles sont autant d'innovations apportées par l'OHADA. Elle est une communauté de droit où la loi l'emporte sur la force car, comme le pense le philosophe suisseAMIEL ; "l'expérience de chaque homme recommence. Seules les institutions deviennent plus sages : elles accumulent l'expérience collective et de cette expérience, de cette sagesse, les hommes soumis aux mêmes règles verront non pas leur nature changer, mais leur comportement graduellement se transformer ". - L'OHADA a : éradiqué 1'insécurité juridique et judiciaire dans le périmètre des matières traitées par elle;- Développé l'arbitrage comme mode alternatif de règlement des conflits contractuels. L'avantage étant qu'ici, c'est les parties qui déterminent le cadre et les conditions dans lesquelles les litiges seront résolus, ainsi que la compétence de ceux qui assisteront à la résolution comme arbitre, médiateur ou personne neutre. Les ADR ou modes alternatifs de règlement des conflits offrent en plus aux opérateurs économiques, l'assurance d'une résolution rapide, convenable, à des coûts maîtrisés, dans des délais prévisibles, quel que soit le pays d'implantation de leurs affaires. Le législateur de l'OHADA a ainsi intégré une donnée fondamentale de la justice contemporaine au plan universel :le développement d'une" autre astucel" "d'une " autre justice "par rapport à la justice étatique. Ainsi, les initiateurs de l'OHADA, après avoir agi pour 1' ordre juridique communautaire en créant des normes primaires3 ' ou normatives36 qui sont des règles de comportement imposant des obligations ou des abstentions, ont également agi relativement aux normes secondaires ou constructives qui attribuent des compétences, organisent des procédures, de manière à rendre effectives les normes primaires et à en assurer 1' efficacité. Charles PERELMAW 7 écrivait d'ailleurs : " les juristes, dont le rôle est de maintenir et de faire fonctionner un ordre stable, en réduisant le nombre de conflits, en cherchant à les régler "Lire Picrrc MEYER OHADA, Droit de l'arbitragc,juritcopc, Brylant, Bruxelles 2002, Pl "Lire H. L. A. HART, le concept de droi~ B111Xcllca, prcucs fat Inuv. Saint Louis , 1976, P 127 ct a. "Lire DUGUIT, traité de droit to111tituti01Utcl, paris, de Bocc:d, 1927 - 1930, t9 "Lire Charlca PER.ELMAN, in Droil, monlc ct philosophie, Paris, L.G.DJ, 1976, P S3 78 RcvueAfricaîoc clcs Scimca )uri ci quel' Vcl2, N" 2. 2001 pacifiquement, ont inlaginé des institutions et des règles de procédure. C'est l'existcn.:e de telles règles qui distingue essentiellement le droit de la morale ". L'OHADA est une idée neuve pour l'Afrique, car inventée par des hommes d'Etat qui veulent vaincre l'humiliation de l' Afrique. Cependant, l'OHADA innoverait davantage Si : - une révision du traité pourrait être envisagée sur certains points tels la langue de travail38 , la monnaie ... (article 42, 63 du traité) ; -l'harmonisation de l'harmonisation contribue à une synergie et non pas à une concurrence 9 entre diverses organisations d'intégration telles l'UEMOA-CEMAC-CEEAC-OHADN ; -pour toute créance certaine, liquide et exigible justifiant 1'exécution forcée dans les saisies à fm d' exécution, l'article 32 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d' exécution s'interprétait de manière restrictive. Ce qui éviterait de heurter les principes fondamentaux du droit judiciaire tels les droits de la défense, l'autorisation pour Je juge d'appel d'apprécier les conditions et les risques de l'exécution d'une décision de justice frappée d'appel ; -l'on évite à l'article 18 du traité, la possibilité pour les parties de détourner la compétence de la C. C.J .A par collusion ; - une définition des termes tels 1'acte de comme dans le Droit Commercial général était donnée, car Portalis disait : " lorsque la loi est incomplète, lorsqu'elle devient progressivement obsolète, il faut pousser son interprétation jusqu'au stade de l'adoption, jusqu'à compléter même un dispositif inadapté"; -les législateurs nationaux dans les domaines non encore harmonisés agissaient auprès de la C.C.J.A exerçant sa mission consultative auprès des Etats ; -une charte des investissements permettait de promouvoir la culture de la compétitivité, le sentiment communautaire et la citoyenneté de J'OHADA ; -dans les matières encore à harmoniser, J'OHADA continue à se situer entre protectionnisme et libre échange, ménageant sagement les intérêts des peuples africains face aux règles de l'OMC que d'aucuns jugent particulièrement nocives pour nos économies; -l'on envisageait les problèmes du commerce transfrontalier avec les Etats non parties de l'OHADA. • • Lire Arrêt rendu le 11 octobre sur l'exécution provisoire des décisions de justice par la C.C.J.A. Lire Olivier BE.IU..E, Environn~ ment des affaira ct compétitivité. Contribution à l'atelier CEMAC tur la stratégie d'usistmce de la Banque Mondiale en Afrique Centrale. Yaoundé 16- 17 octobre 2002 Jt Lire Droit de la concurrence ct les autres domaines inscrit au programme de 1'harmonisation par le conseil des ministres des n ct 23 man 2001. Revu< Afrioain< <~<s sam= J.mœ,.... vo1.2. w 2. 2001 79