Les programmes Internet de promotion de la santé auprès des

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Les programmes Internet de promotion de la santé auprès des
Les programmes Internet de promotion de la santé auprès des minorités sexuelles au Canada : étude des
composantes, des objectifs et des perspectives de développement 1
Équipe de recherche:
Joseph J. Lévy, Chercheur principal, Département de sexologie, Université du Québec à Montréal
Bill Ryan, Co-chercheur, École de travail social, Université McGill
Christine Thoër, Co-chercheure, Département de communication sociale et publique, Université du Québec à Montréal
Alain Léobon, Collaborateur et professeur associé, Chaire de recherche du Canada en éducation à la santé, Université du Québec à Montréal
Jean Dumas, Assistant de recherche, Université du Québec à Montréal
Contexte: Plusieurs recherches ont démontré le potentiel d’Internet pour la promotion de la santé auprès des minorités sexuelles. Toutefois, ces
travaux ont essentiellement porté sur les programmes destinés aux hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HARSAH), tandis
que les programmes Internet destinés aux autres minorités sexuelles LGBT sont très peu documentés.
Objectif: Cette recherche a comme objectif de dresser un portrait des programmes Internet de promotion de la santé menés auprès de
toutes les minorités sexuelles au Canada. Dans la première phase de la recherche, nous avons identifié 1) les sites qui présentent des
informations sur la santé des minorités sexuelles au Canada, 2) les types d’organisations qui développent et gèrent ces sites, 3) les populations
LGBT visées, 4) les thèmes de santé abordés et 5) les activités interactives proposées aux usagers. Dans la deuxième phase, une analyse du
processus de développement de certains de ces sites sera effectuée, de manière à identifier les facteurs de succès et les obstacles reliés au
maintien et au développement des programmes existants. Cette recherche est également l’occasion de s’interroger sur les avantages et les limites
d’une recherche évaluative en ce qui concerne les programmes de promotion de la santé réalisés sur Internet.
Méthodes: Afin d’atteindre l’objectif proposé, la recherche se déroule en deux grandes phases s’échelonnant sur deux années (2008-2009 et 20092010). Dans la première phase, des moteurs de recherche ont permis de trouver des sites Internet gérés par des organisations canadiennes et
offrant des contenus relies à la santé des minorités sexuelles. Nous avons identifié 237 sites correspondant à ces critères et les gestionnaires des
sites furent invités à compléter un questionnaire en ligne. Durant la période comprise entre janvier et septembre 2009, 72 organisations ont participé
à la recherche.
Résultats préliminaires
A – Analyse des sites identifiés (N=237) (voir figure 1)
Catégories d’organismes : Deux grandes catégories d’organismes sont à l’origine de ces sites, soit ceux offrant de l’information sur divers thèmes
reliés à la santé LGBT et ceux proposant des contenus davantage reliés au VIH/sida.
Types d’organismes: La majorité des organismes dans ces deux catégories sont des organismes communautaires et des associations ou
coalitions, œuvrant par exemple, pour les droits de la personne ou pour la lutte contre l’homophobie.
Populations ciblées: 11% des sites sont destinés à la population en général mais présentent certaines informations reliées à la santé des minorités
sexuelles ; 39 % ciblent toutes les personnes LGBT ou des minorités plus spécifiques tout en offrant des informations sur plusieurs thèmes de
santé ; 50% sont dédiés aux problématiques reliés VIH/sida telles que la prévention et, pour la plupart, ciblent la population en général, à l’exception
de quelques-uns spécifiquement destinés aux hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HARSAH). Certains sites offrent des
informations adaptées afin de répondre aux besoins d’autres segments de la population tels que les jeunes, les communautés culturelles, les
premières nations, les familles, les personnes vivant avec le VIH/sida et les professionnels de la santé.
B – Les organismes participants (N=72)
Distribution géographique: Les organismes ayant complété le questionnaire en ligne sont davantage situés au Québec (35 %), en Ontario (25 %),
en Colombie-Britannique (14 %) et en Alberta (10 %). Les organismes situés dans d’autres provinces ou territoires sont moins nombreux (entre 1,5
et 4 %).
Populations ciblées: 11% des sites sont destinés à la population en général mais présentent certaines informations reliées à la santé des minorités
sexuelles ; 39 % ciblent toutes les personnes LGBT ou des minorités plus spécifiques et présentent des informations sur plusieurs thèmes de santé ;
50 % sont dédiés aux problématiques reliés VIH/sida telles que la prévention et, pour la plupart, ciblent la population en général, à l’exception de
quelques-uns spécifiquement destinés aux HARSAH.
Informations sur la santé disponibles (voir figures 2 et 3): Les principaux thèmes de santé abordés dans les sites participants (50 % des sites ou
plus) sont : l’homophobie, le bien-être sexuel, l’utilisation du condom, les infections transmissibles sexuellement ou par le sang (ITSS), la
discrimination et le processus de dévoilement de l’orientation sexuelle (coming out) et les relations familiales. Près du tiers des sites présentent des
informations sur les relations de couple, environ un quart sur la violence, la consommation de drogues, le suicide et la dépression et un site sur cinq
abordent les thèmes comme la fin d’une relation, la consommation d’alcool et le décès d’un proche. Parmi les thèmes moins fréquemment abordés
(moins de 20 % des sites), on retrouve le stress et le niveau de stress ou d’anxiété élevé, la dépendance affective, l’image corporelle, la prise en
charge d’une personne souffrant de maladie et la recherche d’un partenaire stable ou régulier. Le jeu compulsif, la dépendance à Internet et la
sexualité compulsive sont des thèmes plus rarement traités dans les sites (moins de 10%). On remarque des différences statistiquement
significatives lorsque l’on compare les informations sur la santé disponibles sur les sites LGBT et les sites VIH/sida. Les organismes VIH/sida sont
plus nombreux à présenter des informations sur des thèmes tels que la santé sexuelle (ITSS, utilisation du condom, pratiques sexuelles et niveaux
de risques associés) et les sites LGBT sont plus nombreux à présenter des contenus reliés au suicide et à plusieurs autres thèmes de santé ayant
trait aux relations interpersonnelles et sociales (discrimination, coming out et violence).
Activités interactives: Mis à part l’affichage d’une adresse courriel, les organismes proposant de véritables activités interactives sont relativement
peu nombreux (environ un quart à un tiers) mais plusieurs ont indiqué un intérêt à en proposer davantage. Une nouvelle stratégie adoptée par
plusieurs organismes consiste à créer un profil sur les sites de réseautage sociaux tels que YouTube, Facebook ou MySpace afin de rejoindre des
usagers qui ne visitent par leurs sites. Ces sites de réseautage offrent un potentiel intéressant pour des interventions en matière de santé (voir figure
4).
1 Cette recherche est financée par le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada (CRSH – 820-2007-1061 – programme des initiatives de développement de la recherche) et
son développement a été soutenu par une subvention de l’Institut de la santé des femmes et des hommes (ISFH), une composante des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC
2005-11-HOA-1988721) de même que d’une subvention du Fonds Québécois de Recherche sur la Société et la Culture (FQRSC 111796) accordée à l’équipe SVR.
Conclusions: Cette étude exploratoire démontre la place importante
occupée par les organismes communautaires concernant la diffusion
d’informations sur la santé des minorités sexuelles sur Internet. Les
principaux thèmes de santé abordés sont associés au statut
problématique des minorités sexuelles dans la société contemporaine et
à la prévention des ITSS et du VIH/sida. Les thèmes associés à la santé
mentale et d’autres problèmes de santé sont moins souvent couverts,
suggérant que, dans un contexte où un nombre de plus en plus
important d’organismes adoptent une approche globale de la santé,
seulement quelques-uns ont développé des contenus s’inscrivant dans
cette perspective. Les programmes d’intervention privilégiant
l’interactivité (usager-intervenant ou usager-usager) sont encore
relativement peu nombreux mais plusieurs organismes voient leur
potentiel et seraient intéressés à adopter de telles stratégies. Se joindre
à des sites de réseautage sociaux et intégrer un salon de clavardage
dans les sites sont des exemples de développements envisagés par les
organisations. Une meilleure compréhension des raisons expliquant
pourquoi les organisations évoluent lentement vers ces stratégies est
nécessaire. C’est l’objectif de la prochaine phase de notre recherche.
Pour ce faire, nous avons sélectionné un échantillon d’organismes
œuvrant auprès de sous-groupes de la population LGBT à travers le
Canada et réaliserons des entrevues semi-dirigées avec les
gestionnaires de leurs sites Internet.