Coopetition at Work: how firms shaped the airline industry
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Coopetition at Work: how firms shaped the airline industry
Sup de Co Montpellier Business School From the SelectedWorks of Leo- Paul Dana 2013 Coopetition at Work: how firms shaped the airline industry Wojciech Czakon Leo Paul Dana Available at: http://works.bepress.com/dana/15/ 1 JOURNAL OF Social Management Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management Zeitschrift für Sozialmanagement Vol. 11 | 2nd semester | 2013 Vol. 11 | 2° semestre | 2013 Heft 11 | 2. Semester | 2013 English and French Edition Édition anglaise et française 2/2013 Numéro spécial: Coopétition, stratégies et performances / Special Issue: Coopetition, strategies and performances Sous la direction de / edited by Wojciech Czakon, Anne Sophie Fernandez et Frédéric Le Roy Bertuch 2 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Journal of Social Management Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management Zeitschrift für Sozialmanagement ISSN 1612-8389 © 2013 by Bertuch Verlag, Weimar, Germany | www.bertuch-verlag.com | [email protected] RÉDACTEUR EN CHEF / EDITOR-IN-CHIEF Pr. Dr. Ali Smida, Université Paris 13, France CONSEIL ÉDITORIAL / MANAGING EDITORS AD Dr. Dr. h. c. Johann F. Schneider, Universität des Saarlandes, Saarbrücken, Allemagne Pr. Dr. Ali Smida, Université Paris 13, France Pr. Dr. Bernard Cadet, Université de Caen Basse-Normandie, France COMITÉ ÉDITORIAL / EDITORIAL COMMITTEE Rudolf Dadder, Rechtsanwalt, Frankfurt-Main, Allemagne Dr. Thomas Franke, Geschäftsführer, Weyarn, Allemagne Carmen Fronek, Controllerin, Weimar, Allemagne Andreas Kaplon, Rechtsanwalt und Justitiar, Weimar, Allemagne Dr. Peter Kleinmann, Geschäftsführer Institut für Sozial- und Umweltforschung (ISUF), Weiskirchen/Möglingen, Allemagne Bernd Kröber, Prokurist Alten- und Pflegeheim Hettstedt GmbH, Allemagne Pr. Dr. Krum Krumov, Sofia University St. Kliment Ohridski, Sofia, Bulgarie Reinhard Müller, Landesgeschäftsführer des Wohlfahrtsverbandes, Landesverband Thüringen, Allemagne Paritätischen Pr. Dali Pardschanadse, Tblisi State University, Tiblisi, Georgie Jörg Rommelfanger, Rechtsanwalt und Geschäftsführer, Halle, Allemagne Falk Stirner, Geschäftsführer, Dresden, Allemagne Joachim Schmidt, Geschäftsführer ,Weimar, Allemagne Torsten Steinborn, Geschäftsführer, Landsberg, Allemagne Claude Treyer, Institut de Gestion Sociale, Paris, France 3 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Dr. Jonny N. Weatherly, Senior Management Trainer, Geschäftsführender Leiter der NEWSTAND Management Akademie sowie von Vita e.V., Berlin, Allemagne COMITÉ SCIENTIFIQUE/SCIENTIFIC COMMITTEE Pr. Dr. Mokhtar Amami, Royal Military College, Kingston, Canada Pr. Dr. Aliyus Amin, Nations Unies, Dakar, Sénégal Pr. Dr. Alistair R. Anderson, Director of the Centre for Entrepreneurship at Aberdeen Business School, Robert Gordon University, Royaume-Uni Pr. Dr. Alain Bienaymé, Université de Paris Dauphine, Paris, France Pr. Dr. Bernard Cadet, Université de Caen Basse-Normandie, France Pr. Dr. Didier Chabaud, Université d'Avignon, France Pr. Dr. Gérard Chasseigne, Université de Reims, France Pr. Dr. Alexandre Dorna, Université de Caen Basse-Normandie, France Pr. Yves Enrègle, Doyen du Corps Professoral, Institut de Gestion Sociale, IGS Paris, France Pr. Dr. Marc Favier, Université de Grenoble, France Pr. Dr Alina Gomez-Mejia, Pontificia Universidad Javeriana, Cali, Colombie Pr. Dr. Thierry Jolivet, Université du Mans, France Pr. Dr. Jacques Lauriol, ESC, Rouen, France Pr. Dr. Robert Le Duff, Université de Caen Basse-Normandie, France Pr. Dr. Frédéric Le Roy, Université Montpellier I, France Pr. Dr. Benjamin Matalon, Université de Paris 8, France Pr Dr. Ababacar Mbengue, Université de Reims, France Pr. Dr. Karim Messeghem, Université de Monypellier 1, France Pr. Dr. Caroline Mothe, Université de Savoie, France Pr. Dr. Etienne Mullet, Directeur de Recherche à l’École Pratique des Hautes Études, Paris, France Pr. Dr. Gérald Orange, Université de Rouen, France Pr. Dr. Jean-Claude Papillon, Université de Caen Basse-Normandie, France Pr. Dr. Robert Paturel, Université de Bretagne Occidentale, France Pr. Dr. Yvon Pesqueux, Conservatoire National des Arts et Métiers, Paris, France Dr. Guru P. Prabhakar, Bristol Business School, University of the West of England, Royaume-Uni Pr. Dr. Philippe Robert-Demontrond, Université de Rennes, France 4 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Pr. Dr. Ricardo Romero, Université Nationale de Colombie, Bogota, Colombie Pr. Dr. Esperanza Ronan, Université Nationale de Colombie, Bogota, Colombie Pr. Dr. Mohammed Saad, Bristol Business School, University of the West of England, Royaume-Uni Pr. Ass. Dr. Nina Slanevskaya, St. Petersburg State University, Russie Pr. Dr. Claude Treyer, Institut de Gestion Sociale, IGS Paris, France. Pr. Dr. Bertrand Urien, Université de Bretagne Occidentale, France Pr. Dr. Jean-Laurent Viviani, Université de Rennes 1, France. ASSISTANCE À LA PUBLICATION / PUBLICATION ASSISTANCE Antje Genth-Wagner Martine Peyrard-Moulard, EBS Paris, France REVISION / REVISION Pr. Ass. Dr. Basile Ganidis, Université de Paris 13, France ABONNEMENT / SUBSCRIPTION [email protected], [email protected] SM est une revue scientifique à caractère international éditée dans deux séries semestrielles: l’une, à vocation académique, publie les articles en Français et en Anglais, l’autre à vocation professionnelle, publie les articles en Allemand et en Anglais. Tarifs: Le numéro: 25,00 euros L’abonnement annuel: - une série (édition anglaise et française ou édition anglaise et allemande), soit 2 numéros par an: 40,00 euros - les deux séries (édition anglaise/française et édition anglaise/allemande) soit quatre numéros par an : 80,00 euros. ÉDITEUR / PUBLISHER Bertuch Verlag, Schwanseestr. 101, 99427 Weimar /Germany www.bertuch-verlag.com 5 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 6 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Sommaire Contents Politique éditoriale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Editorial aims and scope . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Présentation du numéro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 Presentation of the issue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16 Les auteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 The authors . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Résumés des articles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Abstracts of articles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30 Wojciech CZAKON, Leo Paul DANA Coopetition at work: how firms shaped the Airline Industry . . . . . . . . . 32 Famara Hyacinthe SANOU, Frédéric Le ROY Réseaux coopétitifs, comportements concurrentiels et performances. . . 62 Paul CHIAMBARETTO, Emmanuelle RIGAUD Coopétition, hétérogénéité des consommateurs et stratégies de ciblage. . 98 Rhizlane HAMOUTI, Frank ROBERT, Anne Sophie FERNANDEZ, Frédéric Le ROY Quel type de coopétition pour l’innovation-produit? Le cas de l’industrie des jeux vidéo. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132 Laetitia DARI La coordination : niveau relationnel intermédiaire des stratégies de Coopétition. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 Procédure de soumission des articles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188 Articles Submission Guidelines . . . . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . 193 7 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Politique éditoriale Présentation de la revue SM est une revue scientifique à caractère international éditée dans deux séries semestrielles en trois langues (Allemand: Zeitschrift für Sozialmanagement, Anglais: Journal of Social Management, Français: Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management) : - une série, à vocation académique, publie les articles en Français et en Anglais. Elle privilégie une ligne éditoriale plus axée sur la recherche mais s’appuyant sur des travaux de terrain; - une série, à vocation professionnelle, publie les articles en Allemand et en Anglais. Elle se penche davantage sur les aspects professionnels mais avec un souci de conceptualisation et de modélisation. Les articles qui répondent aux exigences des deux séries peuvent, sur proposition du Rédacteur en chef de SM, être publiés dans les deux séries, après traduction éventuelle. Objectifs de la revue La revue SM vise à produire et à diffuser des connaissances scientifiques dans le domaine académique des Sciences Sociales et du Management. Elle se veut également proche des experts et des praticiens de ces domaines en s’appuyant sur le terrain et en diffusant ces connaissances à l’intention des professionnels. En ouvrant ses colonnes à la fois aux chercheurs académiques et aux praticiens, tout en encourageant les débats d’idées scientifiques, la revue SM se veut un réel lieu de rencontres, donc d’enrichissements mutuels entre : - théorie et pratique, - hommes de terrain qui souhaitent mettre en perspective scientifique leur action et hommes de réflexion scientifique qui ont le désir de déboucher sur une pratique. Optant pour un esprit de tolérance, la revue SM veut avoir l’ouverture la plus large vers: - les chercheurs de toutes les disciplines de sciences sociales sans exception qui souhaitent enrichir (et s’enrichir par) la réflexion dans le domaine du management, - toutes les formes de contributions, quelles que soient leurs méthodes et leurs courants philosophiques, qui permettent de comprendre et de faire avancer les pratiques managériales. 8 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management En résumé, la revue SM valorise la rigueur scientifique pour enrichir les Sciences du Management sur les plans conceptuels, épistémologiques, méthodologiques, théoriques et opérationnels. Pr. Dr. Ali SMIDA, Rédacteur en chef 9 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Editorial aims and scope Review presentation SM is a scientific review with an international scope. It is published in two six monthly editions in three languages (German: Zeitschrift für Sozialmanagement, English: Journal of Social Management, French: Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management): - An edition with an academic vocation, which publishes articles in French and English, favors an editorial line more focused on research, but based on field work. - An edition with a professional vocation, which publishes articles in German and English, is more focused on professional aspects, enhancing conceptualizing and modeling. Articles that meet the requirements of the two editions may be, on proposal of the Editor-in-Chief, published in both editions after potential translation. Aims of the Review SM aims to produce and disseminate scientific knowledge in the academic field of Social Sciences and Management. SM is also meant to be close to the experts and practitioners in these areas, to be based on the field, and to spread this knowledge to the professionals. By opening its columns to both academic researchers and practitioners, while encouraging the discussion of scientific ideas, the journal SM is a real meeting place, and therefore mutual enrichment between: - Theory and Practice, - “People of the Field” who wish to give a scientific perspective to their actions, and “People of the Thought” who have the desire to lead a practice. Opting for a spirit of tolerance, the SM review wants the widest opening on: - Researchers in all disciplines of social sciences without exclusivity, wishing to enrich (and enriched by) thinking in the field of management, - All forms of contributions, regardless of their methods and philosophical background, to understand and advance management practice. 10 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management In summary, the SM review promotes scientific rigor to enrich the Management Sciences at the conceptual, epistemological, methodological, theoretical and operational levels. Pr Dr Ali SMIDA Editor-in-Chief 11 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Présentation du numéro COOPETITION : STRATÉGIES ET PERFORMANCES Les stratégies de coopetition ont été définies une première fois en 1996 par Brandenburger et Nalebuff (1996). Elles consistent à combiner simultanément des relations de compétition et de coopération avec le même partenaire-rival (Bengtsson et Kock, 1999, 2000). Plus de quinze années ont passé depuis les travaux de Brandenburger et Nalebuff, qui ont permis la reconnaissance de la coopétition comme objet de recherche (Dagnino et al., 2007 ; Yami et al., 2010). Les travaux se sont développés dans de multiples directions et la question de l’impact de la coopétition sur la performance est un élément central de la recherche. En effet, de façon normative, les travaux pionniers sur la coopétition considèrent que cette stratégie doit devenir une alternative par rapport aux stratégies fondées sur la coopération pure et aux stratégies fondées sur la compétition pure. Bengtsson et Kock (1999, 2000), Brandenburger et Nalebuff (1996), ainsi que Lado et al. (1997) s’entendent pour considérer que la coopétition est la stratégie qui recèle le plus fort potentiel de performance pour les entreprises ou, du moins, qui a le plus fort impact sur des variables clairement susceptibles de les rendre plus performantes. Les économies de coûts, le partage de ressources et la stimulation qui favorisent l’innovation sont parmi les gains potentiels de cette nouvelle stratégie (Gnyawali et al., 2008). Plus précisément, une entreprise qui suit une stratégie de coopétition se place dans une situation où elle peut bénéficier à la fois des avantages liés à la compétition et des avantages liés à la coopération. La compétition pousse les entreprises à introduire des nouvelles combinaisons productives, à innover, à améliorer leurs produit-services, etc. Elle est donc un facteur de progrès capital pour les entreprises. De plus elle permet aux entreprises d’espérer améliorer leurs positions de marché et leurs performances au détriment des rivaux (Lado et al, 1997). La coopération, quant à elle, permet à l’entreprise d’avoir accès de façon quasigratuite à des ressources, des compétences et des connaissances qui lui sont nécessaires voire indispensables (Lado et al., 1997). Les entreprises qui 12 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management suivent des stratégies de coopétition devraient donc être plus performantes que celles qui ne suivent pas ce type de stratégie. D’un autre côté, si la coopétition est porteuse de vertus pour l’entreprise et semble incontournable dans certains secteurs, elle n’en est pas moins une stratégie risquée. Ces risques sont identifiés assez rapidement, notamment par Hamel (Hamel et al., 1989 ; Hamel, 1991). Les alliances entre concurrents ne sont clairement pas la fin de la rivalité mais une nouvelle forme de concurrence (Hamel et al., 1989). Une entreprise s’allie avec un concurrent dans l’espoir de s’améliorer et donc de l’emporter sur ses rivaux, alliés compris. Les alliés les plus coopératifs, ceux qui apportent le plus à l’entreprise, sont également les rivaux les plus dangereux de cette entreprise. Les alliances entre concurrents ne font pas disparaître les conflits d’intérêts entre les rivaux. Elles intègrent ces conflits et reposent tout autant sur la coopération que sur les rapports de force entre partenaires-rivaux. Vue sous cet angle, la stratégie de coopétition se révèle particulièrement agressive. Chaque coopétiteur tente d’apprendre et d’appréhender le plus possible, tout en préservant également l’accès à ses propres compétences. Dans ce véritable « agenda caché », la coopétition est la traduction de la volonté d’absorption du savoir-faire de l’autre. La coopétition peut même être envisagée comme l’occasion de nuire à un concurrent en captant son savoirfaire et en lui enlevant toute compétence spécifique. La question posée dans ce dossier spécial est celle de la portée des stratégies de coopétition. La théorie de la coopétition est normative. Elle postule que les stratégies de coopétition sont supérieures aux autres types de stratégie en termes de performance. Dans le même temps, la théorie de la coopétition admet les risques spécifiques consubstantiels aux stratégies coopétitives. La normativité de la théorie de la coopétition doit donc être mise à l’épreuve. Les résultats obtenus dans les articles présentés dans ce numéro spécial vont plutôt dans le sens d’un impact positif de la coopétition sur les performances. Ainsi, Wojciech Czakon et Leo Paul Dana montrent que les compagnies aériennes ont adopté des stratégies de coopétition suite à la dérégulation du secteur. Ces stratégies permettent aux entreprises qui les suivent de devenir des acteurs clés du réseau de valeur dans l’aérien. Cette position est essentielle pour la performance des entreprises. Les acteurs qui sont dans les mouvements coopétitifs créent plus de valeur par rapport à ceux qui ne sont pas dans cette dynamique. 13 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management L’adoption de ces stratégies de coopétition permet aussi aux entreprises de changer les règles du jeu sur le marché à leur avantage. De ce fait, toutes les entreprises du secteur sont peu ou prou amenées à adopter ce type de stratégie. Dans l’article suivant, Famara Hyacinthe Sanou et Frédéric Le Roy étudient les liens entre les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et les performances. La recherche est menée dans l’industrie des opérateurs de téléphonie mobile. Les résultats montrent que la centralité dans les réseaux coopétitifs a un impact positif sur le comportement concurrentiel agressif. Ils montrent également, que la position centrale dans un réseau coopétitif a un effet positif direct sur les performances. Ils montrent, enfin, que le comportement concurrentiel agressif influence positivement et directement la performance de la firme. De façon générale, ces résultats montrent qu’être performant dans un réseau coopétitif implique d’être à la fois coopératif et agressif. Paul Chiambaretto et Emmanuelle Rigaud étudient le rôle des stratégies de ciblage de clientèle dans l’émergence de nouvelles formes de coopétition. Ils montrent, à partir d’une étude de cas multiple dans le transport aérien, que l’hétérogénéité des consommateurs conduit les firmes à développer de nouvelles formes de stratégies coopétitives. En effet, lorsqu’une firme décide de mettre en place une stratégie marketing de couverture de tous les segments, elle ne peut le faire de façon performante qu’en développant des stratégies relationnelles complexes mêlant simultanément coopération et coopétition. Cette stratégie de coopétition lui permet de répondre aux besoins spécifiques des différents segments sans se spécialiser. Rhizlane Hamouti, Frank Robert, Anne Sophie Fernandez et Frédéric Le Roy centrent leur recherche sur l’impact des stratégies de coopétition sur l’innovation-produit. Ils distinguent trois types de coopétition, horizontale, verticale ou à la fois horizontale et verticale, et tentent d’évaluer l’impact de chacun d’entre eux sur l’innovation. La recherche empirique est réalisée au sein du secteur de l’édition de jeux vidéo. Les résultats montrent que la coopétition horizontale a un impact positif sur l’innovation-produit. Ils montrent également, que la coopétition verticale a un impact négatif sur l’innovation-produit. Ils montrent enfin, que la coopétition à la fois horizontale et verticale, ou « between brand bundle », est celle qui a l’impact le plus fort sur l’innovation-produit. 14 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Le dernier article du dossier est proposé par Laetitia Dari. Cette recherche est focalisée sur l’industrie du prêt-à-porter. La question qui est posée est la suivante : Les entreprises de cette industrie ont-elles intérêt à se regrouper et à coopérer pour faire face aux instabilités du marché ? Les résultats montrent que les relations inter-organisationnelles dans l’industrie ont une double dimension coopérative et concurrentielle. Les entreprises qui décident de poursuivre des stratégies qui leur sont propres risquent à terme de disparaître si l’instabilité de l’environnement augmente. Les stratégies coopétitives permettent aux entreprises de construire collectivement le milieu dans lequel elles se trouvent afin de réduire l’instabilité de ce dernier. La présence d’un acteur central coordonnant ces stratégies amène les entreprises à évoluer dans un milieu fortement institutionnalisé. Les preuves empiriques apportées dans ces différents articles alimentent tout un courant de pensée qui fait de la coopétition une stratégie à fort potentiel de performance pour les entreprises (Brandenburger et Nalebuff, 1996 ; Bengtsson et Kock, 1999, 2000 ; Dagnino et al., 2007 ; Yami et al., 2010). Force est alors de constater que ce potentiel semble encore mal connu, voire trop peu reconnu, puisque les recherches sur la coopétition ne sont finalement pas si nombreuses, notamment dans l’espace francophone. Ce numéro spécial se veut donc à la fois un apport à la communauté scientifique tout autant qu’un appel à cette même communauté pour promouvoir les recherches sur la coopétition. Frédéric Le ROY Anne Sophie FERNANDEZ Wojciech CZAKON 15 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Presentation of the issue Coopetition: Strategies and Performance In 1996, Brandenburger and Nalebuff (1996) have identified coopetition strategies for the first time. They consist in combining simultaneously both competitive and collaborative relationships with the same partner - rival (Bengtsson and Kock, 1999, 2000). More than fifteen years after Brandenburger and Nalebuff’s study, were needed in the literature to recognize coopetition as an interesting research topic (Dagnino et al., 2007; Yami et al, 2010.). The research field followed multiple directions. Among them, the impact of coopetition on firm performance appears as a critical issue. Indeed, in a normative way, initial studies on coopetition consider this strategy as an alternative to both pure competition and pure collaboration. Bengtsson and Kock (1999, 2000), Brandenburger and Nalebuff (1996) and Lado et al. (1997) agree to consider coopetition as the strategy with the highest level of potential performance for the firm, or at least, with the highest impact on variables that could probably increase the firm performance. Cost economies, resource sharing and the stimulation that promote innovation are among the potential benefits of this new strategy (Gnyawali et al., 2008). More specifically, firms adopting a coopetition strategy could benefit from the advantages of the competition and the advantages of the collaboration. On the one hand, competition pushes firms to introduce new productive combinations, to innovate, to improve their products and services, etc. Competition is therefore a key driver for development and growth. Moreover, competition allows companies to improve their market position and performance at the expense of their rivals (Lado et al, 1997). On the other hand, collaboration allows the company to access necessary or critical resources, skills and knowledge (Lado et al., 1997). Firms adopting coopetition strategies are therefore expected to be more successful than those who do not follow this type of strategy. However, even if coopetition is a virtue for the company, a strategic standard in some industries, it remains a risky one. Some risks have been identified quite early in the literature (Hamel et al., 1989; Hamel, 1991). 16 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Alliances between competitors do not put an end to rivalry, or and end to competition, but instead generate new forms of competition (Hamel et al., 1989). Firms develop alliances with competitors in a strive to improve and to win over competitors, including current partners. The most collaborative partners are those who bring the most to the firm, but they are also the most dangerous rivals. Alliances between competitors do not eliminate conflicts of interest between competitors. On the contrary, these conflicts are inherent to the relationships. Alliances between competitors rely as much on the collaboration as on the balance of power between partners-rivals. Seen from this standpoint, coopetition appears as highly aggressive strategy. Each coopetitor tries to learn and appropriate as much as possible while preserving the access to its own competencies. In this real "hidden agenda", coopetition reflects each partner’s will to absorb the partner’s know-how. Coopetition can even be seen as the opportunity to harm a competitor, capturing expertise and removing him from any distinctive competence. The issue addressed in this special issue is the purport of coopetition strategies. The coopetition theory is a normative one. It postulates that coopetition strategies are superior, in terms of performance, to other types of strategy. At the same time, the coopetition theory recognizes the specific risks inherent and consubstantial to coopetitive strategies. Thus, the normativity of coopetition theory has to be empirically tested. The results obtained in the papers presented in this special issue suggest a positive impact of coopetition on performance. The first contribution, by Wojciech Czakon and Leo Paul Dana, shows that airlines have adopted strategies of coopetition after the deregulation of the sector. These strategies allow companies to become key players in their value network. Players involved in coopetitive dynamics create more value than the others. The adoption of coopetition strategies helps companies to change market rules and to benefit from these new rules. Therefore, all companies in the sector are more or less induced to adopt coopetition. In the next paper Famara Hyacinthe Sanou and Frederic Le Roy study the links between coopetitive networks, competitive behavior and performance. The research is conducted in the mobile operators industry. The findings show 17 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management that the centrality in coopetitive networks has a positive impact on the aggressive competitive behavior. They also show that a central position in a coopetitive network has a direct positive effect on performance. Finally, they show that the simultaneous competitive and aggressive behavior positively and directly influences the firm performance. In conclusion, the results show that the performance in a coopetitive network relies on a simultaneous aggressive and collaborative behavior. Paul Chiambaretto and Emmanuelle Rigaud study the role of customers targeting strategies in the emergence of new forms of coopetition. From a multiple case study in the airline business they show that the heterogeneity of customers encourages firms to develop new forms of coopetition strategies. Indeed, when a firm decides to effectively implement a marketing strategy to target all the market segments, it is forced to develop complex relational strategies mixing simultaneously collaboration and coopetition. This type of coopetition strategy allows the firm to answer the specific expectations of the different segments of customers without specializing. Rhizlane Hamouti, Robert Frank, Anne Sophie Fernandez and Frederic Le Roy focus their research on the impact of coopetition strategies on product innovation. They distinguish three types of coopetition, horizontal, vertical and both horizontal and vertical, and assess the impact of each type of coopetition on innovation. Empirical research is conducted within the video games industry. Findings show that horizontal coopetition has a positive impact on product innovation. They also show that vertical coopetition has a negative impact on product innovation. Finally, they show that both horizontal and vertical coopetition also named as the “between brand bundle” is the strategy that has the greatest impact on product innovation. Laetitia Dari proposes the last paper of this issue. Her research is focused on the ready-to-wear industry. The question asked is the following: In this industry, do firms have any interest to join their forces and to collaborate in order to face market instabilities? Findings show that inter-organizational relationships have a double dimension, collaborative and competitive. Companies that decide to pursue individual strategies risk to disappear if the volatility of the environment increases. Coopetition strategies allow companies to collectively build their environment in order to reduce its instability. The presence of a central player in coordinating these strategies leads companies to operate in a highly institutionalized environment. 18 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management The empirical evidences provided in this collection of papers contribute to build a theoretical body that demonstrates the potential of coopetition to increase firm performance (Brandenburger and Nalebuff, 1996; Bengtsson and Kock, 1999, 2000; Dagnino et al., 2007, Yami et al., 2010). However, we emphasize that this potential remains little recognized since research on coopetition are that many, more specifically in the Francophone academy. Therefore, this special issue should be considered as a contribution to the scientific community as well as a call to the same community to promote and develop research on coopetition. Frédéric Le ROY Anne Sophie FERNANDEZ Wojciech CZAKON Bibliographie Bengtsson, M., & Kock, S. (1999). Cooperation and competition in relationship between competitors in business network. Journal of Business and industrial Marketing, 14 (3), 178-190. Bengtsson, M., & Kock, S. (2000). Coopetition in business networks – to cooperate and compete simultaneously. Industrial Marketing Management, 29 (5), 411-426. Brandenburger, A., Nalebuff, B. (1996). Coopetition, Doubleday. Dagnino, G. B., Le Roy, F & Yami, S. (2007). La dynamique des stratégies de coopétition, Revue Française de Gestion, 33 (76), 87-98. Gnyawali, D. R., He, J., & Madhavan, R. (2008). Coopetition Promises and Challenges Chapter 38 in C. Wankel (Dir), The 21st Century Management : A Reference Handbook, Sage Publications, (1), 386-398. 19 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Hamel, G. (1991). Competition for Competence and Inter-partner Learning within International Strategic Alliances, Strategic Management Journal, 12 (1), 83-104. Hamel, G., Doz, Y, & Prahalad, C.K. (1989). Collaborate with your competitors and win, Harvard Business Review, 67 (1), 133-139. Lado, A., Boyd, N., & Hanlon, S.C. (1997). Competition, Cooperation, and the Search for Economic Rents: a Syncretic Model, Academy of Management Review, 22 (1), 110-141. Yami, S., Castaldo, S., Dagnino, G. B. & Le Roy, F. (2010). Coopetition: winning strategies for the 21st century, Edward Elgar, Cheltenham, UK, Northampton, MA, USA. 20 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Les auteurs Paul CHIAMBARETTO Professeur assistant en marketing et stratégie au sein du Groupe Sup de Co Montpellier Business School et chercheur associé à l’Ecole Polytechnique. Ses recherches se concentrent sur les relations inter-organisationnelles entre firmes telles que les stratégies d’alliances ou de coopétition. Le secteur des transports aérien et ferroviaire sont au cœur de ses intérêts. Il a déjà publié plusieurs articles sur ces sujets. Wojciech CZAKON Professeur à l’Université des Sciences Economiques de Katowice. Il a obtenu son doctorat (2002) et son habilitation à diriger des recherches (2007) dans cette même université. Sa recherche est centrée sur les phénomènes, stratégiques et processus interorganisationnels, notamment la coopétition et les réseaux. Il est chercheur principal sur des projets financés par le 7 Framework Programme de l’Union Européenne et du Centre National pour la Recherche polonais. Membre du conseil de L’European Academy of Management et Codirigeant de son programme doctoral. Léo-Paul DANA Professeur au Groupe Sup de Co Montpellier GSCM. Il a obtenu son Doctorat à l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales de Montréal et il a enseigné à McGill University jusqu’en 1997. Après trois années à Singapore où il a rempli la fonction de directeur de programme de l’International Business MBA de la Nanyang Business School (Nanyang Technological University), il devient professeur visiting en Entrepreneuriat à l’INSEAD. Dans sa carrière, Dr. Dana a publié plus de 150 articles dans des revues à comité de lecture et il a publié 25 ouvrages. Il a été keynote speaker pour plus de 25 conférences. Laetitia DARI Docteur d'Etat en Sciences de gestion (option stratégie et logistique), ses recherches portent sur les relations inter-organisationnelles. Ses travaux s’intéressent notamment à l’influence d’acteurs intermédiaires (organismes professionnels, associations, etc.) pouvant inciter les entreprises à s’intégrer dans des projets collectifs. Elle a également travaillé sur la faisabilité de projets coopératifs en matière de logistique et d’adoption de nouvelles technologies (RFID) dans le secteur du textile-habillement. Ses terrains d’étude sont variés et concernent le prêt-à-porter, la perliculture ou encore l’industrie du liège en Corse. 21 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management L’objectif de ses recherches est d’apporter un éclairage sur des secteurs d’activité traditionnels, et la nécessité, pour les entreprises évoluant en milieu instable et fortement concurrentiel, de comprendre les enjeux de la mutualisation à un niveau local pour consolider ou relancer leur activité. Laboratoire LEMNA, Université de Nantes (France) Anne Sophie FERNANDEZ Maître de conférences en management stratégique à l’université de Montpellier 1 (Institut des Sciences de l’Entreprise et du Management – ISEM) et membre du laboratoire Montpellier Recherche en Management. Dans ses recherches, elle cherche à comprendre comment des firmes peuvent efficacement manager des stratégies de coopétition. Elle s’intéresse donc plus largement au management des tensions et des paradoxes. Les industries de haute-technologie et l’innovation comptent parmi ses centres d’intérêts. Elle a déjà publié plusieurs articles sur ces sujets. Rhizlane HAMOUTI Doctorante à l’université Montpellier 1, membre du laboratoire Montpellier Research in Management (MRM), et ATER (Attachée temporaire de l’enseignement et de la recherche) à l’ISEM-Université Montpellier1. Ses recherches portent sur le management stratégique, les stratégies interorganisationnelles, les stratégies de coopétition, la performance de l’innovation produit, et plus particulièrement dans l’industrie des jeux vidéo. Frédéric LE ROY Professeur en sciences de gestion à l’Université de Montpellier I (Institut des Sciences de l’Entreprise et du Management). Il a publié de nombreux articles scientifiques dans des revues françaises et internationales comme la Revue Française de Gestion, Finance, Contrôle, Stratégie, Management International. Il est aussi auteur et coauteur de plusieurs ouvrages dont Stratégies militaires et management stratégiques chez Economica en1999, La concurrence chez Vuibert en 2002, Stratégies collectives chez EMS en 2007, Coopetition, Winning Strategies for the 21th Century chez Edward Elgar en 2011. Emmanuelle RIGAUD Professeur en marketing et stratégie au sein de Neoma Business School et chercheur associé à l’Ecole Polytechnique. Ses recherches se concentrent sur les relations inter-organisationnelles entre firmes et les fusions-acquisitions. Elle a déjà publié plusieurs articles sur ces sujets. 22 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Frank ROBERT Professeur d’économie au GSCM-Montpellier Business School (Groupe Sup de Co Montpellier), Il est responsable du département Management des Organisations. Ses recherches portent sur la coopétition et ses différentes formes. Il s’intéresse au lien entre cette stratégie et l’innovation produit. Ses recherches portent également sur la création d’entreprises et les profils des entrepreneurs dans le high-tech. Il est titulaire d’un doctorat en Economie de l’Université Montpellier. Famara Hyacinthe SANOU Docteur en Sciences de gestion (Management Stratégique). Il est ingénieur de recherche au LabEx (Laboratoire d’excellence) ENTREPRENDRE, de l’Université de Montpellier I. Ses travaux portent sur l’étude des comportements des firmes en situation de coopétition, de coopération horizontale ou de concurrence pure. 23 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management The authors Paul CHIAMBARETTO Assistant Professor in Marketing and Strategy at Groupe Sup de Co Montpellier Business School and a Research Associate at Ecole Polytechnique. His research interests include inter-organizational relationships such as alliance and coopetition strategies. He is specifically interested in air and rail transportation industries. He has already published several articles on these topics. Wojciech CZAKON Professor at the University of Economics in Katowice. He earned his Ph. D. (2002) and his HDR (2007) at this University. His research focuses on interorganizational phenomena, strategies and processes, notably on coopetition and networks. He is lead researcher in projects funded from the 7 Framework Programme and the Polish National Centre for Scientific Research. Board member of the European Academy of Management, and Co-Chair of the EURAM Doctoral Colloquium. Léo-Paul DANA Professor at Groupe Sup de Co Montpellier, GSCM, Montpellier Business School. He earned BA and MBA degrees at McGill University, and a PhD from the Ecole des Hautes Etudes Commerciales HEC-Montreal, and in 1985 served as Expert Witness for the Government of Canada House of Commons Standing Committee on Transport. He holds the honorary title of Adjunct Professor at the University of Regina, in Canada. Among his appointments, he served as Visiting Professor of Entrepreneurship at INSEAD and Deputy Director of the International Business MBA Programme at Nanyang Business School, in Singapore. He has published extensively in a variety of leading journals including the British Food Journal, Cornell Quarterly, Entrepreneurship & Regional Development, Entrepreneurship: Theory & Practice, Journal of Small Business Management, the Journal of World Business, and Small Business Economics. Laetitia DARI PhD in Management (option strategy and logistics), her research covers the domain of inter-organizational relationships. Her works are focus upon the influence of intermediate actors (professional organizations, associations, etc.) able to incite companies to become integrated into collective projects. She also worked on the feasibility of cooperation projects regarding logistics and adoption of new technologies (RFID) in the textile industry. Her studies are varied and concern ready-towear, pearl industry or cork industry in Corsica. The goal of these researches is 24 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management to give a perspective on traditional business industry, and the necessity, for companies evolving in unstable and strongly competitive environment, of understanding stakes of mutualization at a local level to strengthen or boost their activity. University of Nantes (France) Anne Sophie FERNANDEZ Assistant Professor in Strategic Management at the University of Montpellier 1 (Institute of Science of Enterprise and Management - ISEM) and a member of the Montpellier Research in Management research team. Her research focused on how firms effectively manage coopetition strategies, which deals with the management of paradoxes and tensions. She is specifically interested in high-tech industries and collaborative innovation. She has already published several articles on these topics. Rhizlane HAMOUTI PhD candidate in Montpellier 1 University, member of Montpellier Research in Management laboratory (MRM), and “temporarily attached to the teaching and research”. Her research covers the domain of the strategic management, interorganisational, the coopetition strategies, and the performance of the product innovation, particularly in the video games industry. Frédéric LE ROY Professor of Management at the University of Montpellier I (Institut des Sciences de l’Entreprise et du Management). His research has been published in numerous French and international reviews such as la Revue Française de Gestion, Finance, Contrôle, Strategie, Management International. He is also the author and coauthor of several books, including Stratégies militaires et management stratégiques (Economica) in 1999, La concurrence (Vuibert) in 2002, Stratégies collectives (EMS) in 2007, Coopetition, Winning Strategies for the 21th Century (Edward Elgar) in 2011. Emmanuelle RIGAUD Professor in Marketing and Strategy at Neoma Business School and Research Associate at Ecole Polytechnique. Her research interests include inter-organizational relationships and mergers. She has already published several articles on these topics. Frank ROBERT Professor of economics at Montpellier Business School (Group Sup de Co Montpellier), he is head of Management department. His research focuses on the coopetition and its different forms. He is interested in the link between this strategy and product innovation. His research is also interested by the relationship between entrepreneurship and the regional 25 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management environment, start-up survival and growth, profile entrepreneurship in the ICT sector. His research has been published in such journals as Journal of Entrepreneurship & Small Business, Journal of Entrepreneurship & Small Business, Revue Sciences de Gestion, Revue Internationale PME. Famara Hyacinthe SANOU PhD in Administration Science (Strategic Management) from the University of Montpellier I. He is Research Engineer in the LabEx (Laboratory of Excellence) Entreprendre at the University of Montpellier I. His research interests lie mainly in the areas of firms’ behaviours in situation of coopetition, horizontal cooperation or pure competition. 26 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Résumé des articles Coopétition au travail: comment les mettent en place dans le transport aérien firmes la Wojciech Czakon, Leo Paul Dana La littérature sur la coopétition s’est largement développée autour des questions relatives aux caractéristiques et aux résultats de ce type de stratégie. Une attention moindre a été portée à la question de l’émergence de la coopétition. Cet article s’intéresse aux facteurs exogènes susceptibles d’expliquer l’adoption d’une stratégie de coopétition, au niveau de l’industrie. Une perspective évolutionniste est retenue. Les résultats de l’étude longitudinale menée au sein de l’industrie du transport aérien montrent que la coopétition est un mode opératoire qui vise à orchestrer les relations entre les membres d’un réseau de valeur. Les mouvements coopératifs des acteurs clés du réseau représentent un mode efficient de création de valeur. Ces mouvements impliquent également des relations de concurrence au sein du réseau et entre les réseaux. La redéfinition des règles de l’industrie est suivie par une forte compétition pour s’approprier la valeur créée, ce qui aboutit à une redéfinition du marché. Pour répondre à la course à l’imitation, les concurrents doivent réagir et adopter des comportements coopétitifs. Réseaux coopétitifs, comportements concurrentiels et performances Famara Hyacinthe Sanou, Frédéric Le Roy Cette recherche étudie les liens entre les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et les performances. Le terrain d’étude est l’industrie des opérateurs de téléphonie mobile. L’ensemble des entreprises de cette industrie est étudié sur la période 2000-2006. La méthode utilisée est l’analyse de contenu structuré de leurs actions/réactions concurrentielles et coopératives. Les résultats montrent que la centralité dans les réseaux coopétitifs a un impact positif sur le comportement concurrentiel agressif. Ils montrent, également, que la position centrale dans un réseau coopétitif a un effet positif direct sur les performances. Ils montrent, enfin, que le comportement concurrentiel agressif influence positivement et directement la performance de la firme. De façon générale, ces résultats montrent qu’être performant dans un réseau coopétitif implique d’être à la fois coopératif et agressif. 27 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Coopétition, hétérogénéité des consommateurs et stratégies de ciblage Paul Chiambaretto, Emmanuelle Rigaud Cet article étudie le rôle des stratégies de ciblage dans l’émergence de nouvelles formes de coopétition. Considérant que les acteurs externes (comme les clients) peuvent contribuer au développement de relations coopétitives, nous essayons d’analyser comment les stratégies de ciblage peuvent pousser des firmes à coopérer avec des concurrents. A partir d’une étude de cas multiple dans le transport aérien, nous montrons que l’hétérogénéité des consommateurs peut conduire les firmes à développer de nouvelles formes de coopération combinant alliances classiques et coopétition. Dans un dernier temps, nous élaborons un modèle analytique en vue de répliquer et d’expliquer ces observations empiriques. Quel type de coopétition pour l’innovation-produit ? Le cas de l’industrie des jeux vidéo. Rhizlane HAMOUTI, Frank ROBERT, Anne Sophie FERNANDEZ, Frédéric Le Roy Les recherches antérieures sur l’impact des stratégies de coopétition sur l’innovation-produit aboutissent à des résultats contrastés. Pour certaines recherches, l’impact est négatif alors que, pour d’autres recherches, l’impact est positif. Afin d’expliquer ces différences de résultats, nous proposons de distinguer trois types de coopétition (horizontale, verticale ou à la fois horizontale et verticale) et d’évaluer l’impact de chacun d’entre eux sur l’innovation. La recherche empirique est réalisée au sein du secteur de l’édition de jeux vidéo en combinant une méthode qualitative et une méthode quantitative. Les résultats montrent que la coopétition horizontale a un impact positif sur l’innovation-produit. Ils montrent, également, que la coopétition verticale a un impact négatif sur l’innovation-produit. Ils montrent, enfin, que la coopétition à la fois horizontale et verticale, ou « between brand bundle », est celle qui a l’impact le plus fort sur l’innovation-produit. La coordination : niveau relationnel intermédiaire des stratégies de coopétition Laetitia DARI L’industrie du prêt-à-porter a une fonction capitale dans l’univers économique, social et culturel de notre société. Néanmoins, le succès de l’industrie repose sur la maîtrise de différentes phases : le renouvellement du produit, l’adaptation de l’outil de production, et une distribution efficace relayant les tendances du marché. La mode peut donc être facteur de profits si l’instabilité qu’elle génère est maîtrisée. Mais elle peut aussi être une menace pour les entreprises, compte tenu de la multitude des comportements d’achat. Un tel contexte à fort degré d’incertitude rend indispensable une réflexion sur les stratégies menées par les entreprises. Ont-elles intérêt à se regrouper et à coopérer pour faire face aux instabilités de leur marché ? 28 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Un premier éclairage à travers les stratégies collectives d’Astley et Fombrun (1983) semble être pertinent mais peut manquer d’ambition. Nous pensons que ce concept peut-être élargi à celui de la coopétition dans la mesure où les relations inter-organisationnelles ont une double dimension. Il peut en effet exister dans une même filière une succession de logiques coopératives et de logiques concurrentielles. L’objectif est de comprendre ce qui se passe dans le secteur du prêt-à-porter français. L’article, basé sur une étude qualitative, vise à définir les stratégies mises en œuvre par les entreprises, et les positions relationnelles au sein de la filière selon que les firmes coopèrent ou restent concurrentes. L’analyse vise également à mettre en avant des niveaux de relations intermédiaires à la coopération et à la compétition, tel que la coordination. 29 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Abstracts of articles Coopetition at Work: How Firms Shaped the Airline Industry Wojciech Czakon, Leo Paul Dana The literature on coopetition has made a substantial progress in identifying its attributes and outcomes. However, published work has much less to say about the emergence of this strategy. We develop a view on coopetition adoption at industry level, focused on exogenous factors, and seen from an evolutionary perspective. Our longitudinal study of the airline industry development reveals that coopetition is a way of operating, aimed at shaping relationships between value network members. Empirical data suggest that cooperative moves of key players are meant at a more efficient value creation. Yet, those moves involve also intra- and internetwork competition. Industry rules reshaping is followed by competition for the value created, which in turn generates a re-framing of the market game. Rapid imitation suggests that competitors need to react and also adopt coopetitive behaviours. Coopetitive Networks, Competitive Behaviours and Performances Famara Hyacinthe Sanou, Frédéric Le Roy This research explores the relationship between coopetitive networks, competitive behaviour and performance. The field of study is the mobile telephony industry. All the companies in this industry have been studied over the period 2000-2006. The method used is the structured content analysis of their competitive and cooperative actions and reactions. The results show that centrality in coopetitive networks has a positive impact on competitive aggressive behaviour. They show also that the central position in a coopetitive network has a direct positive effect on performance. They finally show that the competitive aggressive behaviour directly and positively influences firm’s performance. These results show that being performing in a coopetitive network for an enterprise involves being both very cooperative and very aggressive. Coopetition, Paul Chiambaretto, Emmanuelle Rigaud This article examines the role of targeting strategies in the emergence of new forms of coopetition. Considering that external stakeholders (such as customers) can contribute to the development of coopetition relationships, we try to analyze how targeting strategies can push firms to cooperate with competitors. Based on a multiple case study in the air transportation industry, we show that consumer heterogeneity may lead firms to develop new forms of 30 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management cooperation combining traditional alliances and coopetition. In a last step, we develop an analytical model to replicate and explain these empirical observations. Which form of coopetition for product innovation? The case of the video games industry Rhizlane HAMOUTI, Frank ROBERT Currently the impact of coopetition strategies on the performance of product innovation is subject of academic controversy. While some authors state that coopetition has a positive impact on innovation, others state the opposite. We seek to address this debate by linking different types of coopetition relationship with the performance of product innovation. We argue that a distinction of different types of coopetition strategies: horizontal, vertical, or both horizontal and vertical, is fundamental for assessing the performance of innovation. In order to do so, we undertake a mixed methodological approach, using qualitative and quantitative methods for the study of the video games’ sector. We find out that product innovation can be achieved through a strategy of horizontal coopetition, vertical coopetition or both horizontal and vertical. Additional results show that "between brand bundle" product innovation achieved thanks to a strategy of both horizontal and vertical, is the most efficient form of innovation. Coordination: Intermediate coopetition’s strategies relational level of Laetitia DARI The ready-to-wear industry has a major function in the economic, social and cultural universe of our society. Nevertheless, the success of this industry is based on the control of various phases: the renewal of the product, the adaptation of the production tool, and an efficient distribution. Fashion can be a factor of profits if the instability which it generates is well managed. But it can also be a threat for companies, considering the multitude of purchasing behaviors. This context of uncertainty makes essential a reflection on companies’ strategies. Should they group together and cooperate to face the instabilities of their market? A first lighting through the collective strategies of Astley and Fombrun (1983) seems to be relevant but can be lacking ambition. We think that this concept could be linked with the concept of coopetition. It can exist in the same industry a succession of cooperative and competitive logics. The objective is to understand what is taking place in the French ready-towear industry. The article, based on a qualitative approach, aims is to define the strategies implemented by companies, and relational positions in the industry. The analysis highlights intermediate relations levels between cooperation and competition, such as coordination. 31 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Coopetition at work: how firms shaped the Airline Industry Coopétition au travail: comment les firmes la mettent en place dans le transport aérien. Wojciech Czakon* 1 Leo Paul Dana** *University of Economics in Katowice, Poland **GSCM Montpellier Business School, France Résumé La littérature sur la coopétition s’est largement développée autour des questions relatives aux caractéristiques et aux résultats de ce type de stratégie. Une attention moindre a été portée à la question de l’émergence de la coopétition. Cet article s’intéresse aux facteurs exogènes susceptibles d’expliquer l’adoption d’une stratégie de coopétition, au niveau de l’industrie. Une perspective évolutionniste est retenue. Les résultats de l’étude longitudinale menée au sein de l’industrie du transport aérien montrent que la coopétition est un mode opératoire qui vise à orchestrer les relations entre les membres d’un réseau de valeur. Les mouvements coopératifs des acteurs clés du réseau représentent un mode efficient de création de valeur. Ces mouvements impliquent également des relations de concurrence au sein du réseau et entre les réseaux. La redéfinition des règles de l’industrie est suivie par une forte compétition pour s’approprier la valeur créée, ce qui aboutit à une redéfinition du marché. Pour répondre à la course à l’imitation, les concurrents doivent réagir et adopter des comportements coopétitifs. Mots-clés Coopétition, évolution, industrie, stratégie, imitation 1 Corresponding author: Wojciech Czakon, [email protected] 32 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Abstract The literature on coopetition has made a substantial progress in identifying its attributes and outcomes. However, published work has much less to say about the emergence of this strategy. We develop a view on coopetition adoption at industry level, focused on exogenous factors, and seen from an evolutionary perspective. Our longitudinal study of the airline industry development reveals that coopetition is a way of operating, aimed at shaping relationships between value network members. Empirical data suggest that cooperative moves of key players are meant at a more efficient value creation. Yet, those moves involve also intra- and internetwork competition. Industry rules reshaping is followed by competition for the value created, which in turn generates a re-framing of the market game. Rapid imitation suggests that competitors need to react and also adopt coopetitive behaviours. Key-words Coopetition, evolution, industry, strategy, imitation 33 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Introduction Following major shifts in managerial practice and strategic challenges, inter-firm relationships have received increasing academic attention during the past three decades. At the dyadic level of analysis firms were found to enter competitive, collaborative or coopetitive relationships, while some part of them coexist without visible interaction with others (Bengtsson and Kock, 1999). Interfirm relationships are claimed to shape industries, as value networks offer the opportunity to create a bigger value in collaboration and appropriate a larger portion of it, than available through individual action (Brandenburger and Nalebuff, 1996). Viewed from this perspective, coopetition is a strategy designed to achieve better performance levels, and ultimately above average profitability, through cooperation with a firm’s competitors (Czakon, 2009). Coopetition implies dynamics, as paradoxical relationships rarely stay in equilibrium for extended periods of time. While the simultaneous appearance of competition and collaboration (Bengtsson and Kock, 2000; Dana, 2000), value creation and appropriation (Lado, Boyd and Hanlon, 1997), or complex dyadic interdependencies (Dagnino and Padula, 2002) have been much emphasised as key traits of coopetition, few empirical studies expressly focused on industry dynamics (Solitander and Tidstrom, 2010) and even less have taken a long term perspective. We adopt the view that coopetition is long term strategy, which shapes the structure of an industry, and in turn plays an important role both in firm performance and in industry evolution (Madhavan et al. 1998). Therefore our study is industry-level and involves long term data, which has so far been vastly missing from the literature. Longitudinal data have the advantage to provide both descriptions of the changing context and capturing causal relationships, which often appear to be discrete or visible over long time span (Jacobides and Winter, 2005). We focus on events that trigger structural change (Koka et al. 2006) in order to identify coopetition emergence. How did coopetition change the airline industry? This study aims at developing coopetition theory by exploring the impact of inter-firm dynamics on the airline industry over a period of four decades. Our data suggest that coopetition is a strategic choice adopted in the industry when competition and collaboration strategies became wide-spread. We argue that the emergence of 34 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management collaborative agreements between competitors, then between networks of competitors is driven by external factors. In sum, we provide an evolutionary perspective on coopetition. The paper is organised in three sections. Firstly, the theoretical background of coopetition and inter-organisational dynamics are discussed. Next, the longitudinal case study of airline industry evolution is introduced. The empirical setting selection is justified, and data triangulation closely observed. Thirdly, results have been presented as an event story, discussed as the industry evolution unfolds. Finally, we draw conclusions on collective action and a pattern of competition-cooperation balance changes, which allows for a more comprehensive definition of coopetition strategy. 1. Theoretical background The assumption of firm’s heterogeneity underpins strategic management research. A substantial explanatory power is attributed to endogenous factors such as: resources (Barney, 1991), competencies (Hamel, 1991), routines (Nelson and Winter, 1984), strategies (Eisenhardt, 1997) and more recently to knowledge related concepts of absorptive capacity (Blyler and Coff, 2003) or learning (Grant, 2002). Adopted as preferred theoretical perspective for a majority of strategic management studies, the resource based view of the firm suggests that if an organisation is unable to access or to develop resources it needs individually, then it enters collaborative relationships and thus creates resource pools (Katila, Rosenberger and Eisenhardt, 2008). Collaboration allows also relational rent generation (Dyer and Singh, 1997), as a result of synergistic resource exploitation together with other organisations (Dyer, Singh and Kale, 2008). However, while the RBV explains how additional value is generated, it does not address the process of its distribution among partners. Value appropriation remains a major concern, which is typically addressed through isolation mechanisms or value maximization moves (Hurmelinna-Laukkanen and Puumalainen, 2007). Over thirty years ago cooperative arrangements came into light, and quickly developed into the alliance thread of research. Collaboration complements 35 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management competition in the marketplace. Yet, the competition literature has grown to be considerably larger than the collaborative one. Beyond mere recognition of the alliance phenomenon, researchers have shed light on: the collaboration rationale (Haagedorn, 1993), the alliance process (Kanter, 1994), then shifted to managerial challenges such as proprietary knowledge protection (Hamel, 1991), partner selection (Gulati, 1995), adaptation (Doz, 1996) or instability (Das, Teng, 2000). Collaboration studies have shown that exogenous factors also hold considerable portions of competitive advantage understanding (Dyer and Singh, 1997). Exogenous factors may trigger, frame or direct firm’s actions, notably through imitation (Garcia-Point and Nohria, 2002) or as a result of deregulation (Stober, 2003) and thus have an impact also at industry level. This section provides a focused literature review on the coopetition concept, followed by inter-organisational dynamics in order to provide an operational understanding of coopetition and points out to some gaps in extant literature, which are addressed in our study. Coopetition features The term “coopetition” itself was introduced from a practitioner’s standpoint to grasp both collaboration and competition between firms, clearly underlining the relevance of coopetition to managers (Brandenburger and Nalebuff, 1996). Initially, the concept has been described at network level of analysis. It collectively brought into focus the firm, its competitors, its suppliers, its customers and complementors. By introducing this value network perspective Brandenburger and Nalebuff (1996) pointed out to value generation roles and recognized the need to place customers expectation in the centre of strategic thinking. Some key features of the concept are recognized in the literature: (1) simultaneous occurrence of competition and cooperation; (2) dynamics of relationship scope, content or partners; and (3) rent seeking behaviour. The first distinguishing feature of coopetition is that unlike cooperation or competition alone it is not a one-dimensional concept (Dagnino, Le Roy and Yami, 2007). While some authors consider that a sequence of competition and collaboration also falls under the label of coopetition, we will consider only simultaneous occurrence of the two relationships in our study. Mixing 36 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management cooperation and competition refers to bringing opposing forces together in the same relationship. The literature increasingly acknowledge that horizontal alliances preserve the “inalienable de facto right to pursue [..] own interests at the expense of others” (Gimeno, 2004). Yet, the alliance literature considers competition as a source of conflict (Tidstrom, 2009) or nuisance for the relationship’s survival. Therefore, while cospecialized alliances can create value by exploiting efficiencies of mutual specialization and synergistic resource exploitation, the competitive tension (Das and Teng, 2000) remains a threat to actually achieving the collaboration objectives. A gap emerges in the literature as it under-explores the reasons why coopetition can be stable over time regardless of its internal tensions. In our study we focus on the airline industry as a recognized arena of collaboration between competitors, anticipating that this empirical setting enables clear observations. The second peculiar feature of coopetition is that it implies changes in the relationship, making it dynamic as opposed to static or stable concepts. So far, theoretical models avoided paradoxical concepts, proposing rather idealtype situations (Barney, 2001), which offered the opportunity to explore how and to which extent the real life phenomena were not in line with theoretical models. Coopetition brings the paradox into light (Dagnino and Padula, 2002) in order to better match a distinct phenomenon. Change provides a key difference of coopetition vis-à-vis of alliances. Alliances may be seen as collaborative frameworks within which competition sometimes emerges. Stability of alliances is therefore assumed as a precondition for success, while instability a hindrance (Das and Teng, 2000). In turn, coopetition does capture the dynamic change of mutual relationships without privileging collaboration or competition as a framework. As a result, coopetition studies rather explore how the two relationships come into simultaneous existence and how their interplay unfolds over time. In our study, we explore how coopetition strategy emerges and spreads over the airline industry. The third feature of coopetition addresses expressly rents. While value creation is an important academic problem, managers tend to focus on how the firm, for which they are accountable for, is able to get the best share of the value generated on the market (Lado et al. 1997). This brings rent-seeking into light. Monopolistic rent seeking is typical to firms striving for market domination, both dominant on their own markets and unwilling to collaborate. 37 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Inversely, collaborative rent seeking occurs when the firm is collaboration oriented and unwilling to compete aggressively. There is another, syncretised form of rent-seeking behaviours, which logically brings a collaborative attitude together with competition. If those are distinctive advantages a firm should deliberately seek for both (Le Roy, Marques, Robert, 2007). More than that, the ability to successfully expand available rents and appropriate a substantial portion of them is seen as the core of coopetition strategy (Okura, 2007). Coopetition within inter-firm relationships Inter-organisational dynamics may be considered as the field for studying complex phenomena occurring along and across the value chain of an industry. In the past two decades or so research yielded at least four idealtype theories for explaining them (Van de Ven, Poole, 1997), namely: life cycle, learning, internal tension and evolutionary explanations. The first three theories focus on the firm or the relationship itself, exploring endogenous factors of change. Consequently, interorganizational relationship dynamics are explained either through a living organism metaphor, through learning coupled with adaptation efforts done by partners, or finally through opposing forces instability. Evolutionary theories turn researcher’s attention to exogenous factors of change. Following Van de Ven and Poole (1997), we use evolution in a restrictive sense to capture cumulative changes in structural forms within industries. The underlying assumption here is that interfirm relationships are reshaped in order to cope with environmental change (Koka, Madhavan and Prescott, 2006). Previous research shows that major reshaping at industry level occurs when new technologies are introduced (Madhavan, Koka and Prescott, 1998). Co-evolutionary models (Koza and Lewin, 1998) suggest in turn that the moving force, which explains changes in both collective and individual strategies, resides in the close environment. Firms adopt structures, strategies and operating models because their competitors implemented them successfully. In the airline industry alliances between direct competitors are generally not effective (Gimeno, 2004), which suggests that other reasons induce actors to collaborate. Among those exogenous factors, the rival’s alliances and networks are pointed out as triggers for industry-wide collaborative arrangements emergence. Authors refer to the Darwinian theory 38 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management that selection mechanisms contribute to retaining most fit variants of species. While the selection mechanism is widely recognized to be competition (Jacobides and Winter, 2005), imitation plays a role in spreading the most fit set of features or at least avoiding failure. In sum, the ideal-type theories have adopted a narrow view of interorganisational relationships, reducing their variety to collaborative ties only. Primarily this is why we should call those theories ideal-type, given that in real life nor collaboration neither competition appears in pure form alone. Theoretically, organisations may remain in four types of relationships: coexistence, competition, collaboration and coopetition (figure 1). Figure 1: Relationships between businesses and their possible dynamics. Coexistence Competition Cooperation Coopetition Source: Czakon, W. (2009) ‘Power asymmetries, flexibility and the propensity to coopete: an empirical investigation of SMEs’ relationships with franchisors’, Frederic Le Roy and Said Yami, Guest Editors, Int. J. Entrepreneurship and Small Business, Special Issue on Coopetition and Entrepreneurship, Vol. 8, No. 1, pp. 44–60 While coexistence is a logical or residual case of no relationship at all, the three remaining suggest differences in actors’ behaviours in circumstances of overlapping interests. If actors rival for the same objective it is called competition; if they pursue the objective jointly it is called collaboration. Coopetition appears here as a hybrid form, bringing together both rivalry and collaboration in the same relationship. However, the current understanding of inter-organisational dynamics provides grounds for investigating single type relationships. It does not however address the research question: RQ1: Why do firms change from competition to collaboration or coopetition? 39 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Coopetition should be identifiable through the changes in, or new ways of generating of the market rules in extended periods of time. This issue refers to the dynamics of inter-firm relationships, and requires the study of types of relationships and collateral strategies adopted by industry actors in the long run. In order to address this question, an industry wide and longitudinal study can be of value. 2. Empirical research design The vast majority of published work on coopetition focuses on the firm level, and this within relatively short time spans. Industry or value network changes are claimed to remain beyond the reach of this approach (Jacobides and Winter, 2005). Untangling the black box of coopetitive dynamics requires a longitudinal study (Lorenzoni and Lipparini, 1999), the global airline industry is our empirical setting. We have adopted a qualitative approach (Arino and Ring, 2010) in order to address the research question and contribute to the development of coopetition theory. However, the competitive, collaborative and coopetitive relationships do appear only for some firms, so our data do not cover all firms in the airline industry. Several reasons justify the industry selection. Firstly, airline alliances have been so far studied from the deregulation or alliance or competition standpoints. Most recent studies explored the collective strategic mimesis in forming large alliances (Teo, Wie and Benbasat, 2003). However, those studies have been privileging one facet only of the relationship dynamics which actually occur in the industry. Hence, the airline industry allows for extant theory confrontation and thus achieving the theory development objective (Eisenhardt and Greabner, 2007). Secondly, the global airline industry has gone through major shakeouts in the last four decades or so. Key players had to first adapt to deregulated market operations, then with a growing competition, followed by a market model implementation effort carried out by major companies. Therefore we can reasonably expect both individual and collective strategies to appear. We identify stages of industry development, and delimitate these stages and the behaviours of actors in focus (Langley, 1999). This allows to develop an event40 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management based analysis (Langley, 1999), where events trigger structural industry’s changes (Madhavan et al. 1998) Thirdly, airlines grant a substantial transparency and relative ease of data collection. Most of the moves done by industry actors are clearly observable, including participatory observation, or are reported in secondary data sources. This allows both for rich insights into the processes under scrutiny, and for data triangulation which is crucial for the credibility of our study findings. We have used several data sources in order to complete this study and ensure its rigor (Gibbert, Ruigrok, Wicki, 2008), including International Air Transport Association (IATA) reports, airline’s annual reports and industry overviews (Iatrou and Oretti, 2007). 3. Results We have identified four distinct phases in airline global industry development, where three major shakeouts of existing rules of this market clearly separate the industry development into distinct phases. A first shakeout is connected with deregulation which ended monopolies on national markets, starting in the US in the 1970s. The typical growth and market expansion option has been incremental or mergers, followed by major companies turning to subcontracting. Secondly, the international air traffic regulations relaxation has triggered a rapid increase of bilateral collaboration at global scale due to imitation by competitors. Thirdly, multilateral network alliance competition appeared in the industry, and has also rapidly been imitated by major competitors (figure 2). Interestingly, companies entering into new types of interorganizational relationships did not exit previous ones. 41 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Figure 2: Airline industry relationship development Network coopetition Dyadic coopetition Sub contracting Airline incremental growth Phase 1 – Incremental growth and quantum mergers under strong regulation It used to be that many governments owned airlines. In some cases, an airline was an instrument of national prestige more than a commercial entity. Many airlines provided public services and were not necessarily in business to make a profit. For instance Trans-Canada Airlines – renamed Air Canada in 1965 – was government-funded for the purpose of “public convenience.” Canadian Pacific Airlines served the community of Norman Wells, which had a population of 420 people, with a Boeing 737 that could carry 120 passengers. The state subsidised the industry. It also set the rules of the game, including the destinations, routes, ticket prices, airports and even the equipment. Traditionally, airlines were classified according to the nature of service provided, namely intercontinental, trunk, regional, intra-state, or commuter service (Table 1). 42 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Table 1. Examples of airline companies classified according to service nature Nature of service provided Examples British Overseas Airways Corporation (B.O.A.C.), Intercontinental airline Northwest Orient Airlines, Pan American World Airlines (Pan Am), and Trans World Airlines (T.W.A.) Trunk American, Continental, Delta Air Lines, Eastern, National (later absorbed into Pan Am), Northeast (merged into Delta in 1972), and United Regional In the USA, Allegheny (later renamed USAir and currently U S Airways), Frontier, Lake Central, Mohawk, North Central (absorbed into Republic Airlines), Ozark (merged into T.W.A.), Piedmont (merged into USAir), and Southern (merged into Republic). In Europe, British European Airways (B.E.A.), merged with BOAC to create British Airways. Commuter Air New England, Delta Air Transport, Florida Airlines, Pilgrim and Provincetown-Boston Airlines (PBA). Today, there is a trend to operate globally, or at least to have a global presence. The traditional, and relatively slow, way for an airline to expand is to add flights to its schedule, using its own equipment and crew. For decades, this was the typical means to expansion. Growth was generally incremental. To cite an example, Qantas - originally Queensland And Northern Territory Aerial Service (Q.A.N.T.A.S.) - started out by providing air service within Australia. In time, it added many international sectors, creating an elaborate route network, for instance, from Bali to Singapore and on to London. Yet, incremental expansion requires time as well as significant capital expenditures. A more quantum approach to expansion is through mergers and/or acquisitions. Mergers have been popular for several reasons (table 2). 43 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Table 2. Mergers and Acquisitions rationale in airline industry. 1 2 3 Motivation Examples Lower capital expenditure British Airways was created by merging the British Overseas Airways Corporation (B.O.A.C.) with British European Airways (B.E.A.). British Airways later engulfed British Caledonian, the latter itself being a merger of British United (B.U.A.) and Caledonian. Larger connections network Better customer value Domestic with intercontinental service Single: ticket, carrier, luggage handling In several cases, airlines merged, in order to provide customers with a better offer. Primarily the larger the connection network the better an airline customer offer. Prior to airline deregulation in the United States, Pan Am had an inter-continental route-map with few domestic services. When Pan Am retired its last Boeing 707, all of its remaining fleet consisted of wide-bodied aircraft, designed for long-range flights. An inherent problem was that although Pan Am served the world from New York, the airline lacked a domestic feeder network, i.e., service linking New York to all points within the United States. Therefore, a passenger in St. Louis was more likely to fly T.W.A. from St. Louis all the way to Cairo, rather than use T.W.A. between St. Louis and New York only to transfer to Pan Am at New York’s John F. Kennedy Airport (JFK). To strengthen its own domestic network, in November 1986, T.W.A. acquired Ozark Airlines and Ozark Midwest, resulting in another significant merger. Small, regional airlines also wanted to grow, for instance North Central and Southern merged to become Republic Airlines, which also absorbed Hughes Air West. These moves have been mirrored by other industry players. In Canada, Canadian Pacific Air Lines acquired Air Maritime, Eastern Provincial Airways, Nordair and Nordair Metro, as well as equity in Air Atlantic, and Quebecair. In 1986, Pacific Western Airlines (PWA) purchased Canadian Pacific and its subsidiaries. On April 26, 1987, Canadian Airlines International emerged as the fusion of Canadian Pacific, Eastern Provincial, Nordair, Pacific Western, and 44 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Transair. A few months later, Quebecair, Nordair Metro and Quebec Aviation amalgamated under the name Inter-Canadien, to serve as spokes for Canadian Airlines. In addition, Air Alma, Air Atlantic, Air Labrador, Air St-Pierre, Burrard Air, Calm Air, Canadian Regional Airlines, Norcan Air, North Wright Air, Ontario Express, Pacific Coastal Airlines, Pem Air and Time Air became affiliated with Canadian Airlines International. In January 1989, Maxwell William Ward announced the sale of his airline, Wardair, to PWA. As changes in regulation gave greater importance to market forces, it became evident that passengers also wanted convenience, and it was obviously more convenient to purchase one ticket than to buy several. Also, it is often easier to use one airline, rather than more. In the event of a transfer from T.W.A. to Pan Am at JFK, passengers were required to change terminals and, at the time, it was necessary to pay for transportation between airport buildings. Also, when connections are necessary (changing flights at an intermediary airport), statistics show that the chances of misplacing or delaying luggage increase in proportion to the number of carriers involved. In other words, an one-line (same airline) connection may be preferable over a switch of carriers along the way. Not surprisingly, in order to provide itself with a domestic feeder service, Pan Am bought National Airlines, and both were merged. Pan Am also relied on Empire to feed international departures from New York; this was so until Piedmont acquired Empire and agreed to feed T.W.A.’s international departures. Phase 2 – Deregulation of the industry boosts codesharing by sub-contractors During the late 1970s, airline deregulation in the United States allowed air carriers to abandon unprofitable routes and to focus on the most lucrative ones. This prompted a vast shakeout of industry structure. Whereas the airline sector was traditionally among the most regulated, the reduction in government intervention made market forces the principal regulator, and competitors shaped the industry amongst themselves, with a growing role of the IATA. First-movers introduced a new business model based on: (1) specialization in terms of routes and equipment; (2) outsourcing routes and connected equipment to other firms; (3) code-sharing with a network of cospecialized partners. 45 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Although Delta absorbed Northwest and United acquired Continental relatively recently, the trend has been toward co-operative marketing rather than relying on growth by means of capital-intensive expansion or acquisitions. Instead of expanding their own services, airlines have been: (1) connecting with one another, such as to form networks; (2) using networks to maintain market presence during low demand periods; (3) maximizing profits through economies of scale collaborative implementation. Networks include very small firms as well as larger corporations. In addition to using networks as a means to expand, alliances are also being formed in order to maintain market-presence during rough economic times. For instance, when the Asian Crisis led Garuda and Vietnam Airlines to suspend flights to Manila in 1998, both airlines decided that rather than compete with Philippine Airlines, co-operating would be more profitable. It used to be that airlines went out of their way to offer good service, in order to earn customer loyalty. Nowadays, by collaborating with one another, formerly rival firms are working together to maximise their profits. In essence, the suppliers of airline service have managed to increase their power. Economies of scale among emerging alliances have become de-facto barriers to entry. The buyers of airline service have, as a result, a limited choice, among fewer competitors. Also known as outsourcing, sub-contracting involves an agreement in which one company contracts a specific segment of its business operations to another firm. This allows firms to focus on that which they choose to specialise. In the airline industry, larger firms with fleets suitable for longerhaul flights have been sub-contracting short-haul routes to local carriers with turbo-prop aircraft. Each scheduled airline has a two-letter airline identification code, which designates its flights. That is why sub-contracting is also labelled as code-sharing. Significant cost reductions can be achieved in terms of more specialised aircraft. Also, a small carrier may benefit from not being unionised. Allegheny Airlines based in Washington, D.C., pioneered the concept of sub-contracting flights to independent firms, to which it assigned its own twoletter designator. The airline developed a hub in Pittsburgh and introduced new routes. In June 1978, Allegheny upgraded its fleet, to include the Boeing 727, a three-engine jet very suitable for new, longer routes to Florida and beyond. Simultaneously, Allegheny phased out its Convair 580, a turbo-prop ideal for short hops between Pittsburgh and New York. Deregulation allowed Allegheny Airlines to concentrate on its most profitable routes, using jet aircraft; yet, many other routes were still important as they provided feeder traffic and thus enlarged the customer base. Rather 46 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management than discontinue service to minor airports, Allegheny maintained a network of independent carriers that would provide flights, under the brand name Allegheny Commuter on behalf of Allegheny Airlines, under contract. This enabled Allegheny Airlines (later USAir2 and more recently, US Airways) to focus on expanding its presence, without abandoning low-density routes to smaller communities. This concept proved beneficial, and when Allegheny changed its name to USAir, it kept the Allegheny Commuter network, which eventually became USAir Express. This largely successful model has been replicated widely throughout the industry (table 3). Table 3. Outsourcing networks spreading in the airline industry. Network 1 Allegheny Commuter3 2 Trans World Express 3 American Eagle6 4 Delta Connection 5 United Airlines Members Chatauqua Airlines, Fischer Brothers Aviation,4 Henson, Ransome Airlines,5 South Jersey Airlines and Suburban Airlines Air Midwest, Resort Air and Resort Commuter, Piedmont Airlines AVAir, Air Midwest, Chaparral Airlines, Command Airways, Executive Air Charter, Metro Express II, Metroflight, Simmons Airlines and Wings West Airlines Atlantic Southeast Airlines, Comair, Ransome Airlines, Rio Airways. SkyWest Airlines and South Central Air operated Western Express for Western Airlines7 Air Wisconsin, Horizon Air,8 WestAir, Aspen Airways 2 On December 8, 1986, the announcement was made that Pacific Southwest Airlines (PSA) agreed to be acquired by the USAir Group, helping USAir expand further. A few months later, USAir also absorbed Piedmont Airlines, which formerly had a cooperative marketing agreement with TWA, code-sharing the TW designator. 3 The Allegheny Commuter program was introduced in 1967, at which time it was quite unique. 4 USAir lost Fischer Brothers Aviation when this feeder was acquired by Midway, in May 1987. 5 Family-owned Ransome Airlines opted to operate independently as of June 1982. The airline subsequently joined forces with Delta Air Lines, Inc. 6 The American Airlines originally opposed the concept, but in November 1984 launched its own outsourcing program. 7 Both networks were combined when Delta Air Lines absorbed Western Airlines on April 1, 1987 8 United lost Horizon when Horizon was acquired by Alaska Airlines 47 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Deregulation has spread to Canada and Europe, and so the principle of creating an alliance of sub-contractors has been vastly imitated. Code-sharing rapidly gained international popularity. During the mid-1980s, AUA Austrian Airlines provided code-sharing service for T.W.A. passengers in Germany. However, such bilateral agreements were limited in geographic scope; they tended to be short-term in duration and exploratory in nature. In 1998, AUA was code-sharing with Malev, the flag-carrier of Hungary. Such limited agreements can be volatile, simply because there is not much at stake. If, however, equity is involved, a more long-term relationship can be expected. Sub-contracting has proven itself, over the past 30 years, to be an effective means of providing a specialised niche service in the airline industry. It should be noted, however, that sub-contracting also has disadvantages, most importantly, an inherent loss of quality control. Phase 3 – Dyadic coopetition within bilateral alliances Strategic alliances are generally characterised in one of two ways with regard to value chain activities. Vertical relationships entail firms co-operating in complementary activities, while horizontal relationships involve co-operation within the same activity. Since the 1980s, airlines have been becoming increasingly involved in horizontal relationships. Firms enter alliances for competitive reasons. Alliances allowed firms to gain economies of scale in production and marketing; they can also overcome regulatory barriers and facilitate access into new markets, fostering international or global expansion. In 1989, KLM Royal Dutch Airlines purchased one fifth of Minneapolisbased Northwest. This joint venture obtained anti-trust immunity and this was the beginning of the first large-scale, international alliance between airlines. An open-sky treaty between the Netherlands and the United States gave both airlines unrestricted rights between their respective countries, and KLM soon became Europe’s fastest growing airline company. The two firms embarked in the industry’s largest joint marketing programme and in 1994, they introduced World Business Class together, the world’s first joint global service. Codesharing allowed each of the two airlines to assign its own airline code to flights operated by the other. Co-operation enabled both airlines to increase efficiency. For instance, KLM had a passenger reservations facility in Montreal, while Northwest had its own in Minneapolis. Rather than retain duplicate activities, in 48 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 1998, KLM re-routed its Montreal reservations to Minneapolis and eliminated 77 jobs in Montreal. In 1998, KLM Royal Dutch Airlines had only 86 aeroplanes of its own. However, its world-wide marketing was linked to that of Northwest Airlines, with 338 aircraft. Meanwhile, KLM’s largest partner, Northwest, established its own network, code-sharing with Air UK (a former KLM partner), America West, Asiana, Business Express (originally a Delta Connection carrier), Eurowings, Pacific Island Aviation and Trans State. Consequently, the bilateral alliance increased their relative position versus competitors acting individually. In the same time, this increased pool of customers was generating value, for which each of the alliance parties needed to compete. In some cases, firms may choose to cooperate only with cargo matters. For instance, Qantas and United Parcel Service (UPS) shared a Boeing 747 freighter between Sydney (Australia) and Louisville, Kentucky (the hub of UPS). This helped UPS increase its presence in a market dominated by Memphis-based Federal Express. When Air New Zealand and T.W.A. began code-sharing trans-Pacific cargo service, in 1998, it was announced that the two companies might co-operate to a greater extent in the future. Thus, airlines from around the world teamed up to increase their market share. This largely successful model has again been replicated widely throughout the industry. Phase 4 – Industry dynamics within and between alliance networks - network coopetition A logical progression after bilateral code-sharing is for these to evolve into multilateral alliances. The European Quality Alliance was a pioneer of multilateral alliances in the airline industry. Air France, Scandinavian Airlines System (SAS) and Swissair formed it in October 1989. These airlines agreed to co-ordinate their flights and to co-operate in aircraft acquisition and fleet maintenance. Joint purchasing of aeroplanes and spare parts gives the collective buyers a greater bargaining power when dealing with suppliers. At some airports, partners have relocated in order to be situated in the same terminal, thereby facilitating passenger connections within the alliance network. Even frequent flyer programmes have been streamlined. A collateral of this facilitation has been capturing customers, so that corresponding flights across global alliances became very difficult. 49 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Table 5. Major airline alliances. Alliance 1 2 3 Star Alliance Sky Team One World Formation year 1997 2000 1999 Figures 4,023 aeroplanes, 1,160 airports, 181 countries, 402,208 employees 3,140 aeroplanes, 898 destinations, 169 countries, 316,445 employees 2,203 airplanes, 701 destinations, 136 countries, 293,334 employees Membership Air Canada, Lufthansa German Airlines, Scandinavian Airlines System (SAS), Thai Airways International Ltd., United Airlines Inc. Air Canada, Air Dolomiti, Varig Brazilian Airlines, Air New Zealand Ansett Australia All Nippon Airways Singapore Airlines Ltd., British Midland, Mexican Airlines, Asiana, Spanair, LOT Polish Airlines, US Airways, Blue1 (taken under the SAS umbrella in late 2012), Adria Airways, Croatia, TAP Portugal, South African Airways, Swiss International Air Lines. Air China, Shanghai Air Airlines, Turkish Airlines, Egyptair, Aegean Airlines, Brussels Airlines, TAM. Air France, Alitalia, KLM, China Southern, Delta, Korean Air, Aeroflot, Air Mexico, Air Europa, Czech Airlines, Kenya Airways, Tarom, Vietnam Airlines. American Airlines, British Airways, Cathay Pacific, Finnair, Iberia, Japan Airlines, LAN, Malev, Mexicana, Qantas, Royal Jordanian, S7 Airlines. The Star Alliance, announced on May 14, 1997, is the network founded by Air Canada, Lufthansa German Airlines, Scandinavian Airlines System 50 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management (SAS), Thai Airways International Ltd., and United Airlines Inc. Beyond joint marketing in the context of the Star Alliance, Lufthansa and United also cooperate in catering; LSG Lufthansa service/SKY Chefs provides most meals on United flights from Europe to the United States. Further, many regional and local carriers joined as to achieve a total membership of 27 by November 2010. This model has again spread rapidly throughout the industry (table 5). For large airlines it became increasingly difficult to compete against Star Alliance members, which created a strong mimetic pressure. The collaboration network has become a tool to compete on the global market. Multilateral alliances have contributed to rapidly increase the total value available in the industry (Stober, 2003). In the same time, the value available to partners was relatively stable, and triggered competitive manoeuvring within the network. 4. Discussion Our airline industry longitudinal study has been oriented at answering the research question: Why do firms change from competition to collaboration or coopetition? Our evidence shows that competition and collaboration between air lines during the regulation phase was very limited. Inversely, since the deregulation started in the US and followed in other markets, a wide range of competitive, cooperative and coopetitive moves have been observed in the airline industry. This suggests that all three relationships, i.e. competition, cooperation and coopetition, are present on markets, and that deregulation fosters the dynamics of relationships between firms. When the regulator steps back, industry players step in and aim at shaping the industry along their strategic objectives, which takes the form of interorganizational relationship formation and development. We found evidence that coopetition is a strategy, which firms adopt but not as a first choice option. Firms typically opted for incremental development, using acquisitions in order to foster it. Then firms opted industry-wide for collaborative agreements on marketing and sales, as a response to first-mover 51 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management initiatives. Similarly, the industry has adopted multilateral alliances, competitive both towards other alliances, and within the network itself. Finally firms turned to organizing the industry as to create more value for suppliers, airports and customers. This confirms an event focused approach to industry evolution (Madhavan et al 1998). The data show that all strategies, whether dominant competition or dominant cooperation, reveal to be temporary. Once an industry structure reflected by interfirm relationships exhausted its value generating potential mainly because widespread competitors imitation, firms turn to other options, without dropping immediately competition for collaboration. Contrary to RBV rationale suggesting endogenous resource strive (Katila et al. 2008) and early coopetition literature assuming an internal need to offer increased value to customers (Brandenburger and Nalebuff, 1996), the reasons why coopetition spreads over in the industry are exogenous. Our evidence support the view that coopetition is a dynamic concept, constantly changing and adapting to external contingencies. Proposition 1: Coopetition strategies emerge as a response to exogenous factors, such as deregulation or mimetic pressures. Our study suggests also that firms turn to advantages of organizing the value creation network when simple competitive and collaborative moves have been implemented or adopted as industry standard. Recent years have witnessed the evolution of a variety of joint-marketing strategies in the airline industry. Sub-contracting allows a major airline to maintain an all-jet fleet, while out-sourcing short-haul routes to regional airlines using a specialised turbo-prop fleet. Finally, alliances with former rivals can contribute to competitiveness, by making possible a global presence without heavy capital expenditures. The success of alliances in the airline industry suggests that such co-operative marketing strategies may spread to other service industries. The airline industry development is made of clearly separated four development phases. 52 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Airlines have opted for different strategic choices and behave differently in all four phases. Our evidence extends the interorganizational relationships typology (Bengtsson and Kock, 2000) by adopting a dynamic view. While we confirm that firms remained in one of the four theoretically possible relationships, we also found that there is a sequence: competition – collaboration – coopetition. Proposition 2: Coopetition is a strategy adopted by players when competitive and collaborative strategies have been exploited, imitated by competitors and adopted as industry standard. Innovations change the shape of the industry by new ways to create value for the customer. Convenience at airports, global range of destinations, network density on domestic markets, quality of service have been the moving force for competitive advantage achievement. Innovators have impacted a value creating network composed of plane suppliers, airports, long-haul lines, domestic lines to better create value. Increased efficiency does not accrue to the firm alone, but to the whole value creating network. Imitation is an industry-wide competitive move to react to advantage gained by the innovator. This suggests that industry shape innovations have been a strong threat to competitors, and called for alignment. The collaborative advantages are connected to increased efficiency mainly due to economies of scale and specialization effects. In addition to facilitating the marketing function, collaborative relationships allow airlines to share resources such as ground support crew and passenger lounges. This leads to substantial cost savings. In sum, the wide imitation movement makes a type of relationship between firms a standard, and calls for further innovations in order to achieve a competitive edge. Therefore industry structure changes are in line with the features of coopetition strategies, which create both common benefits available to all players, and private benefits which can be appropriated by the individual firm (Khanna, Gulati and Nohria, 1998). Our data confirm that coopetition creates common benefits. 53 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Proposition 3: Coopetition strategies shape interfirm relationships in the industry in order to create bigger value, through: increased efficiency, better value for the customer and relative better position towards competitors outside the value creating network. The adoption of coopetition follows alliances, which have been recognized in the literature to yield disappointing performance for the firm (Gimeno, 2004). Our study suggests that rent appropriation concerns have been a major reason for interfirm dynamics. Whether competition did not satisfy to the expectations in terms of value appropriation, or collaboration in terms of the value the firm can sustainably get, players choose to act unilaterally in order to increase their “share in the pie”. In sum coopetition appears here as a collective effort to shape the industry, so that it creates more value than before and in the same time to keep up with competitive pressures. Airline industry development has been marked by both exogenous factors – mainly deregulation, and firms’ decisions relative to resources and the capabilities to use them. The RBV provides explanations for each stage in the industry development. Resource control and resource constraints mark the difference between industry development phases. Notwithstanding, those changes are discrete and happen seldom over long periods of time. Airlines, formerly rivals in a highly regulated industry, have become opportunistic seekers of co-operation. In today’s world, mega-carriers and small airlines are working together rather than competing with one another. Forms of co-operation include subcontracting, code-sharing, and the formation of global marketing networks. Such alliances allow firms to focus on their respective core competencies, while drawing the benefits of scale economies. In essence, co-operation among competitors has led to increased competitiveness against other networks. Exogenous factors appear in our study as the glue, which holds firms together even if they primarily did not choose to collaborate, and even if the performance of their interorganizational relationship is disappointing. Therefore we develop extant theory (Dagnino and Padula, 2007) by revealing why the paradoxical coopetitive relationship is stable over time. Our data allow to attribute it to exogenous factors. 54 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Thus, we also go beyond the dyadic opposing forces metaphor (Das and Teng, 2000) by showing that the centrifugal forces are mitigated by external pressures. If overlapping interests or lower than expected value appropriation might induce managers to reconsider coopetition strategies, competition from other networks and individual players balances those disruptive tendencies. In sum coopetition would not be stable between two isolated actors, but in a complex environment external pressures make it possible: Proposition 4: Collaboration and competition can exist within the same relationship because of external pressures. Our data on the industry shaping shows, that a deregulated market has been followed by a self-regulated one. The tools used to set new rules of the game have been first predominantly mergers and acquisitions, then world-wide alliances. The market is again highly structured by the three global alliances. Competition interestingly appears between them, but what is more surprising also within the alliances. Major players have all adopted a mix of competition and collaboration, making coopetition their business model. This extends theory both by suggesting that coopetition is a “normal” market relationship, appearing when deregulation allows firms to implement their own strategic choices. Conclusion It used to be that airlines would try to differentiate themselves from their competitors. Each airline had its own distinct brand of service. Currently mimetic processes make airlines adopt breakthrough strategies rapidly. Taken together the industry has moved from strongly regulated national monopolies onto global coopetition networks. This paper offers an exogenous perspective on coopetition and contributes to the literature in several ways. Firstly, it reflects important changes and reveals the weaknesses of mainstream theoretical stances used in the alliance and inter-organisational 55 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management relationships studies. Generally the RBV has been seen as a static approach. While the resource rationale explains why firms form relationships with others, it has been claim to fall short of explaining post-formation dynamics or governance choices. Our study adopted a long time span, which unveils the resource dependency to be a causal mechanism operating over the long term (Jacobides and Winter, 2005). Each phase of industry development is derived from resource-interdependency arguments. In other words we provide evidence for RBV to be a dynamic theory, yet its time span is very long and reaches industry-wide resource base considerations. Secondly, our research demonstrates that short-period or static quantitative methods of analysis yield much less insights into dynamic and complex phenomena. Descriptive studies help to avoid many a priori assumptions, just like the dyadic cooperative linkages instabilities pitfall (Das and Teng, 2000). This widely cited in the literature assumption suggested that each form of market relationship should be expected to be stable, while our empirical evidence suggests that change is a more accurate view of inter-firm dynamics. Longitudinal data has enabled to identify and explain the changes of relationships between market actors. Thirdly, our study provides a longitudinal study of industry-wide alliances in the airline business. Empirical data suggest that since the deregulation process started, firms use competition and cooperation in a balanced way. This extends existing literature which typically focused on single phases of the relationship dynamics, such as alliance formation or disruption. Extant literature provide theoretical framework for explaining vertical industry dynamics (Jacobides and Winter, 2005). However, the framework uses empirical data only to illustrate. Our study extends prior research by providing grounded theoretical propositions. Fourthly, the study extends coopetition theory. It clearly appears as a market relationship, which emerged as soon as the regulator allowed for more market in the industry. Therefore it is justified to believe that coopetition is wherever market is. Inversely, if market forces are absent, coopetition will not appear. Also, coopetition is an option of innovative relationship operation within the industry. Fifth, coopetition here is seen as a rent-seeking strategy, which supports previous theory (Brandenburger and Nalebuff, 1996). So far coopetition has 56 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management been considered as a collective, industry-reshaping strategy in order to increase the pie available to all actors. Our case suggests that this effect has been achieved through multilateral alliances. After the collaboration started to generate additional value, partners tend to unilaterally bargain for the biggest possible part of it. Asymmetry of power reveals to be a strong inducement for alliance big partners to coopete with their own allies. Sixth, our study extends the four inter-organisational relationship model (Bengtsson and Kock, 1999) in several ways. Initially the model identified four relationships, some authors suggested then that firms deliberately choose and change those forms in time (Czakon, 2010). Our study clearly shows that managers choose from available options, but each choice is temporary. In fact, coopetition dominates, regardless of whether partners start by competing or by cooperating with each other. Also coopetition appears here as the result of a sequence: competition – collaboration – coopetition. Seventh, our evidence shows that any of the four ideal-type theories for explaining interorganizational dynamics are useful in following the dynamics at industry level. We have identified a stable pattern within each industry development phase: innovation – imitation – convergence. The sequence clearly supports extant literature on competitive dynamics. What is interesting though, is that this competitive pattern brings firms to use collaborative and coopetitive relationships. This supports the simultaneous existence of opposing strategies in coopetition. The limitations of our study are connected with the method and the empirical setting exploited. A theory building approach requires not only methodological rigor, but also further testing. The empirical setting under scrutiny is specific in many ways, detailed in our empirical research design. Therefore, our results may be industry specific and thus biased. Today, buying a ticket for travel with a particular airline is no longer straightforward. As a result of coopetition, flights are operated by franchisees and other partners, causing ambiguity. Furthermore, the lack of brand differentiation marks the industry. Almost all of the major airlines are trying to market themselves as global. Is that enough? In summary, the airline industry has been selling transportation services as a commodity. Should it be? 57 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management References A. Arino, P. S. Ring (2010) ‘The Role of Fairness in Alliance Formation’ Strategic Management Journal, Vol. 31, Nr 10, pp. 1054 – 1087 J. Barney (2001) ‘Is the Resource-Based View a Useful Perspective for Strategic Management Research? 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L’ensemble des entreprises de cette industrie est étudié sur la période 2000-2006. La méthode utilisée est l’analyse de contenu structuré de leurs actions/réactions concurrentielles et coopératives. Les résultats montrent que la centralité dans les réseaux coopétitifs a un impact positif sur le comportement concurrentiel agressif. Ils montrent, également, que la position centrale dans un réseau coopétitif a un effet positif direct sur les performances. Ils montrent, enfin, que le comportement concurrentiel agressif influence positivement et directement la performance de la firme. De façon générale, ces résultats montrent qu’être performant dans un réseau coopétitif implique d’être à la fois coopératif et agressif. Mots clés Réseaux coopétitifs, centralité, comportement concurrentiel, agressivité concurrentielle, performance Abstract 9 Corresponding author : frederic.le [email protected] 62 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management This research explores the relationship between coopetitive networks, competitive behaviour and performance. The field of study is the mobile telephony industry. All the companies in this industry have being studied over the period 2000-2006. The method used is the structured content analysis of their competitive and cooperative actions and reactions. The results show that centrality in coopetitive networks has a positive impact on competitive aggressive behaviour. They also show that the central position in a coopetitive networks has a direct positive effect on performance. They finally show that the competitive aggressive behaviour directly and positively influences firm’s performance. These results show that being performing in a coopetitive network for an enterprise involves being both very cooperative and very aggressive. Keywords Coopetitive Networks, Centrality, Competitive Behaviour, Competitive Aggressiveness, Performance 63 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Introduction Si les réseaux ont été l’objet d’un nombre très important de recherches, les réseaux coopétitifs qui sont les réseaux constitués d’entreprises en concurrence dans une même industrie, restent encore mal connus (Gnyawali et al., 2006). Plusieurs recherches antérieures posent la question du comportement concurrentiel des entreprises dans les réseaux coopétitifs. Certains auteurs associent les réseaux coopétitifs à la collusion (Harrigan, 1986 ; Porter et Fuller, 1986). Dans cette approche, le fait que le réseau d’une entreprise soit constitué de concurrents conduit nécessairement à une modération de la rivalité entre les membres du réseau. D’autres auteurs considèrent, au contraire, que le fait d’appartenir à un réseau coopétitif et d’y occuper une position centrale augmente l’agressivité concurrentielle (Gnyawali et Madhavan, 2001 ; Gnyawali et al., 2006 ; Andrevski et al., 2007). Le problème posé par ces recherches antérieures est qu’elles tentent d’établir l’impact des réseaux coopétitifs sur les comportements concurrentiels sans tenir compte des performances. Or il semble capital de comprendre, non seulement l’impact des réseaux coopétitifs sur les comportements concurrentiels, mais également l’impact des réseaux coopétitifs et des comportements concurrentiels sur les performances. Cette recherche se propose de combler ce vide. Précisément, elle se propose de répondre à la question suivante : quelle relation peut-on établir entre la position occupée par une firme dans un réseau coopétitif, son comportement concurrentiel et ses performances ? Afin d’apporter des réponses à cette question, nous avons mené une étude au sein de l’industrie des opérateurs de téléphonie mobile. L’ensemble des comportements coopératifs et concurrentiels des entreprises est étudié sur la période 2000-2006. La méthode utilisée est l’analyse de contenu structuré des mouvements concurrentiels et coopératifs des opérateurs durant cette période (Jaugh et al, 1980 ; Ferrier et al, 2004). Cette méthode permet d’identifier les mouvements stratégiques de l’ensemble des opérateurs de téléphonie mobile dans des pays et régions différents. La position des entreprises dans le réseau coopétitif est identifiée, ainsi que l’ensemble de ses mouvements concurrentiels. 64 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Les résultats montrent, tout d’abord, que la centralité dans les réseaux coopétitifs a un impact positif sur le comportement concurrentiel agressif. Ils montrent, également, que la centralité dans les réseaux coopétitifs a un impact positif direct sur la performance de marché. Ils montrent, enfin, qu’un comportement concurrentiel agressif a un impact positif direct sur les performances de marché. La centralité dans les réseaux coopétitifs a donc un double impact sur la performance : un impact positif direct et un impact via le comportement concurrentiel agressif. De façon générale, ces résultats montrent qu’être performant dans un réseau coopétitif implique d’être à la fois coopératif et agressif. Nous abordons cette recherche en exposant dans une première partie, ses fondements théoriques majeurs. Notre approche mobilise plusieurs courants théoriques pour appréhender l’impact des réseaux coopétitifs et du comportement concurrentiel sur la performance. Dans cette partie, nous définissons les concepts clés de cette recherche que sont les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et coopératifs et présentons les hypothèses de recherche en tentant d’établir la relation entre les choix comportementaux envisageables par l’entreprise dans un réseau coopétitif et ses performances. Ensuite la méthodologie d’étude que nous adoptons est présentée en seconde partie. Les principaux résultats de la recherche font l’objet d’une troisième partie. Enfin, nous nous attachons à discuter les principaux résultats obtenus. 1. Fondements théoriques 1.1. Les réseaux coopétitifs La littérature sur les réseaux est fondée sur le concept d’encastrement popularisé par Granovetter (1985). Le concept d’encastrement fait référence à la nature contingente de l’action économique. Loin d’être des entités atomistiques, libres de prendre des décisions qui dépendent uniquement de leurs propres ressources, les entreprises font partie d’un réseau de relations qui influencent leurs comportements et leurs performances (Nohria, 1992 ; 65 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Burt, 1992 ; Baum et Dutton, 1996 ; Gulati et al., 2000, Hakanson et Snehota 2005). Ce réseau apporte des ressources à l’entreprise et contraint plus ou moins fortement son comportement. Le concept de réseau est très large et accepte des formes d’organisation très différentes et très variées. Les recherches sur les concepts d’encastrement et de réseau sont multidimensionnelles. Elles portent sur la taille du réseau, sa structure, sa dimension cognitive, ses aspects politiques, ses processus interactionnels, etc. (Zukin et Di Maggio, 1990 ; Coviello, 2006). Cette recherche est centrée sur un type particulier de réseau : les réseaux coopétitifs. La coopétition est une relation spécifique qui consiste à être simultanément en situation de rivalité et de coopération avec le même partenaire/adversaire (Brandenburger et Nalebuff, 1996 ; Bengtsson et Kock, 1999, 2000 ; Ritala, 2012). Les réseaux coopétitifs sont les réseaux qui sont composés d’entreprises en concurrence dans une même industrie (Gnyawali et Madhavan, 2001 ; Gnyawali et al., 2006 ; Andrevski et al., 2007). Comparativement à des réseaux non coopétitifs, les réseaux coopétitifs ont la particularité d’impliquer des entreprises qui sont en situation de coopétition ; c’est-à-dire qui coopèrent tout en étant rivales sur les mêmes marchés. C’est cette simultanéité de la compétition et de la coopération qui conduit à les qualifier de réseaux coopétitifs (Gnyawali et al., 2006). Une des premières contributions de la théorie des réseaux est l’identification de l’acteur le plus important au sein du réseau (Wasserman et Faust, 1994). C’est pour exprimer cette idée que le concept de centralité a été introduit par Jordan et repris par de nombreux auteurs (Hage et Harary, 1995). La centralité est un des concepts les plus utilisés dans l’analyse des réseaux (Borgatti, 2005). Elle fait l’objet de plusieurs définitions au sein de la littérature (Wasserman et Faust, 1994 ; Galaskiewicz et Wasserman, 1994). De façon générale, la centralité fait allusion à l’importance de la position d’un acteur individuel au sein d’un réseau. Elle permet de déterminer la mesure dans laquelle cet acteur focal occupe une position stratégique importante au sein du réseau, à travers l’entretien de liens significatifs avec les autres acteurs du réseau (Wasserman et Faust, 1994). Une firme est considérée comme centrale dans son réseau si elle a un grand nombre de connexions avec les autres acteurs du réseau, que ces connexions soient directes ou indirectes (Scott, 1991). 66 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Au sein de l’analyse par les réseaux, il existe plusieurs niveaux d’analyse de la centralité. A chaque niveau correspondent des propriétés et méthodes qui lui sont associées (Wasserman et Faust, 1994). Ces différents niveaux sont les suivants : le niveau d’analyse par acteur, le niveau d’analyse dyadique, le niveau d’analyse par paires d’acteurs, le niveau d’analyse triadique, le niveau d’analyse par sous-groupe et le niveau d’analyse pour l’intégralité d’un groupe. Le niveau nodal, ou niveau d’analyse par acteur, est celui qui est retenu de cette étude. La centralité d’un acteur est définie par sa capacité à être actif dans le réseau (degré de centralité). La centralité dans un réseau coopétitif est définie ici comme la capacité d’une entreprise à être un acteur nodal au sein d’un réseau constitué d’entreprises appartenant à la même industrie et étant en situation de compétition. Plus une entreprise se situe en position nodale dans le réseau coopétitif, plus elle entretient des liens coopératifs avec les concurrents de son industrie. 1.2. Le comportement concurrentiel Le concept de comportement concurrentiel a été développé dans les recherches qui considèrent la stratégie comme un ensemble d’actions et de réactions concurrentielles (Young et al, 1996 ; Grimm et Smith, 1997 ; Smith et al, 1997 ; Ferrier et al., 1999). Le comportement concurrentiel est défini par le nombre d’actions concurrentielles initiées par une entreprise, leur variété, leur caractère imprévisible ainsi que leur vitesse de mise en œuvre (Smith et al 1991 ; Chen et Mac Millan, 1992 ; Chen et Hambrick, 1995 ; Ferrier et al, 1999). Une entreprise est jugée agressive, au cours d’une période donnée : 1) si elle initie un plus grand nombre d’actions et de réactions concurrentielles que ses rivales (Ferrier et al, 1999), 2) si elle répond plus rapidement aux actions concurrentielles de ses rivales (D’Aveni, 1995), 3), si son répertoire d’actions concurrentielles est plus complexe (Ferrier et al, 1999 ; Gnyawali et al, 2001), 4) si ses actions concurrentielles sont plus imprévisibles (Miller et Chen, 1996). 67 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Il est rare que les recherches englobent simultanément ces quatre caractéristiques du comportement concurrentiel. La plupart du temps, comme le font Andrevski et al. (2007) ainsi que Gnyawali et al, (2006), deux caractéristiques sont retenues : la fréquence et la diversité des actions et réactions concurrentielles. Conformément à ces recherches, nous avons circonscrit le concept de comportement concurrentiel à deux variables principales les plus courantes: 1) l’activité concurrentielle de l’entreprise, c’est-à-dire la propension de l’entreprise à initier un grand nombre d’actions concurrentielles et à répondre aux actions concurrentielles de ses rivales et 2) la variété de l’activité concurrentielle de la firme, c’est-à-dire la mesure dans laquelle la firme initie des actions et réactions concurrentielles de nature différente. Plus une entreprise a une propension forte à initier des actions concurrentielles et plus ses actions sont variées, plus cette entreprise est considérée comme agressive. 1.3. Centralité dans les réseaux comportement concurrentiel coopétitifs et Dans la théorie des réseaux, l’encastrement des firmes dans des alliances coopératives a un profond impact sur leurs comportements et sur leurs résultats économiques (Granovetter, 1985 ; Oliver, 1991 ; Gnyawali et Madhavan, 2001). Les contextes sociaux et économiques dans lesquels sont encastrées les firmes influencent leurs comportements, leurs actions et leurs choix stratégiques (Granovetter, 1985 ; Burt, 1992 ; Borgatti et al. 2009). Quel effet peut alors avoir l’encastrement d’une firme au sein d’un réseau cooopétif sur son comportement concurrentiel ? Deux points de vue divergent quant à l’impact des réseaux coopétitifs sur le comportement concurrentiel agressif de la firme (Gnyawali et Madhavan, 2001). Dans une première approche, une forte centralité de la firme au sein d’un réseau réduirait sa capacité à être agressive (Harrigan, 1986). Le nombre de liens dans lesquels la firme est impliquée reflète sa dépendance vis-à-vis de ses partenaires (Gnyawali et Madhavan, 2001). Si ces partenaires sont ses concurrents, cela diminue la capacité à interagir de façon agressive. De même, chaque lien dans le réseau peut être perçu comme un point de fuite 68 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management potentielle, notamment d’information (Harrigan, 1986). Or l’information est un des déterminants de la propension des concurrents à réagir à une attaque concurrentielle. Entretenir de nombreux liens dans un réseau coopétitif peut donc rendre l’entreprise plus vulnérable aux réactions de ses rivaux. Dans une seconde approche, il existe un impact positif de l’encastrement sur le comportement concurrentiel. Le cœur de cette thèse repose sur le concept de capital social. Pour Burt (1992), le capital social est défini comme « l’ensemble des informations et ressources provenant des autres acteurs d’un réseau et exploitables par la firme ». Un acteur au sein d’un réseau dispose d’un capital social à exploiter qui détermine sa capacité à être compétitive. Ainsi, la firme centrale dans son réseau a une plus grande facilité d’approvisionnement, un meilleur accès aux ressources, une meilleure capacité informationnelle et un pouvoir de dissuasion qui lui permettent d’avoir de nombreuses opportunités (Galaskiewicz, 1979 ; Wernerfelt, 1984 ; Gulati et al, 2000). Elle bénéficie alors d’une asymétrie positive de ressources (Gnyawali et Madhavan, 2001). Or l’initiation d’actions concurrentielles est fortement dépendante des ressources dont dispose l’entreprise. La capacité d’une entreprise à initier des actions concurrentielles agressives est d’autant plus forte qu’elle dispose d’avantages en ressources (Gnyawali et Madhavan, 2001). Pour Chen (1996), le fait de disposer de ressources supérieures à ses concurrents encourage l’initiation d’actions concurrentielles, et dissuade également les concurrents de riposter ou de répondre aux actions concurrentielles. De ce fait, la position centrale d’une entreprise est susceptible de lui procurer plus de ressources que ses concurrentes. Ces ressources supplémentaires lui permettent d’être plus agressive que ses rivales. De plus, du fait de leur position moins centrale, les firmes concurrentes ont plus de difficulté à interpréter correctement les causes et conséquences des actions concurrentielles (Chen, 1996). Elles ont du mal à prédire les actions concurrentielles de la firme centrale qui leur semblent complexes et imprévisibles, ce qui accroit leur vulnérabilité. Les chances pour qu’une firme initie une action concurrentielle sont d’autant plus élevées qu’elle dispose d’informations concernant ses concurrents et d’un avantage en ressources (Smith et al, 1991 ; Chen, 1996), et que la probabilité pour que les concurrents répondent est faible (Chen et Miller, 1994). La coopération donne la capacité d’initier plus d’actions concurrentielles 69 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management du fait de l’accès aux ressources qu’elle permet (Koh et Venkatraman, 1991 ; Young et al, 1996). Une entreprise sera d’autant plus agressive qu’elle entretient des relations de coopération. H1a : Plus une entreprise occupe une coopétitif, plus son activité concurrentielle H1b : Plus une entreprise occupe une coopétitif, plus son activité concurrentielle position centrale dans un réseau est forte position centrale dans un réseau est variée 1.4. Centralité performances réseaux dans les coopétitifs et De nombreuses recherches mentionnent les effets du réseau sur les entreprises et leurs performances (e.g. Ahuja, 2000). Sous l’angle de la théorie de l’encastrement, les recherches montrent que les liens inter-entreprises aident les entreprises à développer et à absorber des technologies (Powell et al, 1996 ; Ahuja, 2000), à résister aux chocs technologiques et environnementaux et, surtout, à accroître leurs performances financières (Hagedoorn et Schakenraad, 1994 ; Zaheer and Zaheer, 1997). Le contexte économique et social dans lequel les firmes sont encastrées influence leurs actions économiques (Granovetter, 1985 ; Gnyawali et Madhavan, 2001). En effet, ce contexte induit l’accès à l’information et aux ressources qui bénéficient aux entreprises qui s’y trouvent (Burt, 1992 ; Borgatti, 2006). Les firmes centrales sont celles qui bénéficient du meilleur accès à l’information et aux ressources (Ibarra et Andrews, 1993). Un fort degré de centralité crée des bénéfices et opportunités, ce qui n’est pas le cas pour les firmes moins centrales (Ibarra et Andrews, 1993 ; Mc Dowell et Voeckler, 2008). Pour Borgatti (2002), la différence de centralité entre entreprises au sein d’un réseau justifierait la différence de performance. L’aperception générale est qu’un acteur central connaît de meilleures performances économiques qu’un acteur non central (Mc Dowell et Voeckler, 2008). Une firme très centrale dans un réseau utilisera cette position comme une source d’information et un lieu d’approvisionnement en ressources. Cela lui permet d’obtenir des 70 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management informations plus rapidement et plus efficacement (Mc Dowell et Voeckler, 2008). Ainsi, les bénéfices issus des alliances sont d’autant plus élevés que la firme s’engage et maintient de nombreuses alliances (Zahra et al, 2001). Forts de cette argumentation, nous pensons que les propriétés associées à l’ensemble des réseaux sont d’autant plus vraies pour les réseaux coopétitifs qu’une entreprise qui est centrale dans son réseau coopétitif, c’est-à-dire dans l’ensemble des relations de coopération qu’entretiennent des entreprises en concurrence dans une industrie, tirera des avantages en termes de ressources de ce réseau ; donc devrait être plus performante. Ceci conduit à formuler l’hypothèse suivante : H2 : Plus une entreprise occupe une position centrale dans un réseau coopétitif, plus elle est performante 1.5. Comportement concurrentiel et performances L’un des consensus majeurs auxquels aboutissent les études sur le comportement concurrentiel est le lien entre l’adoption d’un comportement agressif et la performance. Les recherches convergent pour montrer l’impact positif d’un comportement agressif sur la performance (Chen et Mac Millan, 1992; Chen et Hambrick, 1995 ; Miller et Chen, 1996 ; Makadok, 1998 ; Ferrier et al, 1999 ; Ferrier, 2001). Elles montrent l’existence d’une relation positive entre la performance et plusieurs aspects du comportement concurrentiel (Miller et Chen, 1996), comme le volume des actions concurrentielles (Ferrier, 2001), la durée de l’activité concurrentielle (Ferrier, 2001), la complexité de la séquence d’actions concurrentielles (Ferrier, 2001) et l’imprédictibilité de ces actions (D’Aveni, 1995). Les entreprises qui sont les premières à initier un grand nombre d’actions concurrentielles en peu de temps connaissent de meilleures performances en termes de part de marché et de profitabilité (Chen et Mac Millan, 1992; Smith and al, 1992; Chen et Hambrick, 1995 ; Young et al, 1996 ; Ferrier et al, 1999 ; Ferrier et al, 1999; Ferrier, 2001). Les entreprises qui initient une grande variété d’actions concurrentielles sont vues comme ayant une plus grande profitabilité ou obtenant de meilleures 71 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management parts de marché que celles qui se cantonnent à des gammes moins variées d’actions concurrentielles (Smith, Grimm et Gannon, 1992 ; Ferrier, 2001). Les firmes qui entreprennent des actions concurrentielles plus complexes que leurs rivales retardent les réponses des concurrents, ce qui leur laisse un temps de répit pour bénéficier de l’avantage concurrentiel créé et avoir de bonnes performances financières. Nous poserons donc l’hypothèse suivante (figure 1): Figure 1 : Modèle de recherche H3a : Plus l’activité concurrentielle d’une entreprise est forte, plus elle est performante H3b : Plus l’activité concurrentielle d’une entreprise est variée, plus elle est performante H1a Centralité dans les réseaux coopétitifs H1b Activité conc. Variété activité conc. H3a H3b Performances H2 2. Méthode 2.1. Collecte des données Le secteur étudié est celui des opérateurs de téléphonie mobile. Les données sur les actions stratégiques ont été collectées de 2000 à 2006 à partir des numéros du Global Mobile et du 3G Mobile devenu 3GWireless. Le Global Mobile et le 3G Wireless sont deux bimensuels, de 12 à 30 pages, qui paraissent de façon alternée. Ils nous ont renseignés chaque semaine sur les mouvements stratégiques pendant la période d’étude. 72 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Les indicateurs concernant les marchés domestiques des opérateurs été obtenus à partir du World Telecommunication International Data (WTID). L’étude est focalisée sur les actions stratégiques des opérateurs mobiles. Nous avons voulu éviter de circonscrire notre étude à une seule région géographique et avons répertorié les actions stratégiques des opérateurs mobiles d’Europe de l’Ouest, d’Europe de l’Est, d’Amérique du Nord, d’Amérique Centrale et du Sud, d’Asie/Pacifique et de la région Afrique/Moyen Orient. Environ 6300 pages ont été analysées. Les opérateurs mobiles retenus sont ceux qui ont été visibles sur la période concernée, c’est–à-dire ceux qui ont initié au moins une action concurrentielle ou coopérative dont on a pu obtenir les données sur le marché domestique (pays d’origine) et sur les performances. Finalement, 193 opérateurs mobiles de 70 pays différents ont été retenus. Nous avons procédé par analyse et al, 1980 ; Ferrier et al, 2004) de Mobile et le 3G Wireless pour détecter des opérateurs mobiles, ainsi que leurs de contenu structuré et détaillé (Jaugh tous les articles parus dans le Global les actions et réactions concurrentielles actions coopératives. Cette méthode est recommandée pour explorer les processus stratégiques d’un large échantillon multivarié (Ginsberg, 1988). Nous avons dans un premier temps construit un répertoire annuel des opérateurs traditionnels dans chaque pays. Nous avons ensuite procédé à la recherche, par nom des opérateurs en détectant toutes les actions stratégiques dans lesquelles ils étaient impliqués, ainsi que des dates auxquelles ces actions ont eu lieu. Nous nous sommes spécifiquement intéressés aux actions concurrentielles des opérateurs mobiles. Nous avons fait la distinction entre les actions stratégiques des opérateurs mobiles et celles de leurs opérateurs télécom de tutelle. Par exemple, nous avons comptabilisé les actions concurrentielles de Telefonica Moviles de Espana et non celles de Telefonica, qui est son opérateur télécom de tutelle, et qui dispose aussi de ligne fixe, et fournit d’autres prestations de services. De même pour les opérateurs ayant changé d’appellation au cours de la période d’étude, nous avons retenu la nouvelle nomination de l’opérateur, tout en comptabilisant les actions stratégiques qui ont été faites sous l’ancienne appellation. 73 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Une fois les actions stratégiques identifiées, nous avons ensuite fait la distinction entre actions coopératives et concurrentielles. L’objet était de mettre en évidence les relations de coopération horizontale, qui mettent en situation deux ou plusieurs firmes concurrentes ou potentiellement concurrentes (Young et al, 1996). Les actions coopératives retenues sont celles qui mettent en relation au moins deux opérateurs mobiles. Elles comprennent aussi bien la participation à des associations commerciales, les consortia technologiques; les jointventures, etc. dont nous avons fait une typologie. Une action coopérative incluant plusieurs opérateurs a été comptabilisée comme une action coopérative de chacun des opérateurs y prenant part (Fjeldstat et al, 2004). 706 actions coopératives ont été identifiées. Les actions concurrentielles ont été classées en six catégories, conformément à la classification des recherches antérieures (Ferrier et al, 2002). Les actions stratégiques comme les fusions-acquisitions entre deux opérateurs ont été considérées à la fois comme agressives et coopératives. Dans le cas d’une fusion-acquisition, nous avons considéré les deux opérateurs en présence comme ayant chacun initié une action coopérative. Ensuite, l’opérateur qui acquiert a été crédité d’une action concurrentielle en plus. 2595 actions et réactions concurrentielles ont été détectées. 2.2. Mesures des variables La centralité dans les réseaux coopétitifs Le réseau coopétitif considéré dans cette étude est composé de l’ensemble des relations coopératives horizontales tissées par les opérateurs mobiles dans le monde de 2000 à 2006. Afin de mesurer la centralité de l’entreprise dans ce réseau, nous avons calculé la centralité de chaque opérateur de téléphonie mobile au sein de l’ensemble des actions coopératives ayant eu lieu dans le secteur pendant la période d’étude. Nous avons mesuré la centralité de la firme par une des mesures les plus consensuelles, usuelles et disponibles : la « degree centrality ». 74 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La « degree centrality » montre l’ensemble des liens directs noués par un opérateur mobile avec d’autres opérateurs mobiles pendant la période d’étude. Les mesures ont été obtenues à partir d'Ucinet 6.178 et de Netdraw 2 .069 (Borgatti, et al., 2002). Le comportement concurrentiel Il existe plusieurs dimensions et mesures du comportement concurrentiel (Ferrier et al, 1999 ; Lumkin et Dess, 1996). Une action concurrentielle est définie comme un mouvement externe direct, spécifique et observable, initié par une firme afin d’accroître ou de défendre sa position concurrentielle (Smith et al., 1991 ; Miller et Chen, 1996 ; Grimm et Smith, 1997 ; Ferrier et al., 2004). La réaction est un mouvement pris pour contrer une action concurrentielle initiale d’un concurrent (Chen, 1996 ; Grimm et Smith, 1997). Conformément à Andrevski et al. (2007), Gnyawali et al. (2006) ou encore Basdeo et al. (2006), nous le définissions par deux caractéristiques: la fréquence et la diversité des actions et réactions concurrentielles. Nous mesurons donc le comportement concurrentiel de la firme : 1) par l’activité concurrentielle, qui correspond au nombre d’actions et de réactions concurrentielles de l’entreprise au cours de la période d’étude Activité concurrentielle de l’entreprise ou Concurrence = Σ NTL avec NTL = Nombre d’actions concurrentielles et de réactions concurrentielles de l’entreprise 2) par la variété de l’activité concurrentielle, qui correspond à la mesure dans laquelle une entreprise initie des actions et réactions concurrentielles de nature différente. Variété de l’activité concurrentielle = 1 - / Σ (Na/NTL) 2 Avec Na= Nombre d’actions/réactions concurrentielles de l’entreprise dans la ième catégorie dans l’année et NTL = Nombre total d’actions/réactions concurrentielles de l’entreprise dans l’année ou encore activité concurrentielle totale 75 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La Performance La performance des opérateurs mobiles est calculée par le nombre d’abonnés et par la variation moyenne du nombre d’abonnés de l’opérateur sur son marché d’origine. La variation du nombre d’abonnés de l’opérateur prend aussi bien en compte les gains en nombre d’abonnés que les pertes. Les variables de Contrôle Plusieurs variables de contrôle ont été introduites dans la recherche. Deux variables qui sont communément utilisées dans les recherches en dynamique concurrentielle et relatives au secteur : la première est la concentration industrielle du marché domestique de l’opérateur, la seconde est la maturité du marché domestique de l’opérateur, considérées dans les recherches en dynamique concurrentielle (e.g. Ferrier et al, 1999 ; Fjeldstad et al, 2004 ; Luo, 2007) comme ayant un impact à la fois sur les comportements des firmes et sur leurs performances. La concentration industrielle est évaluée, à la suite de Fjeldstadt et al (2004) par un indice Herfindhal des parts de marché des opérateurs d’un même pays et par an. Concentration = Si 2 10000 Avec Si = la part de marché de chaque opérateur La maturité du marché domestique de l’opérateur est mesurée par le taux de pénétration du marché d’origine (pays) dont il est issu. Les marchés matures sont ceux qui présentent un taux de pénétration élevé. Deux autres variables de contrôle ont été introduites. La première est l’implantation géographique. Ce choix de variable est lié au fait que les opérateurs sont situés dans des zones géographique très différentes. L’implantation géographique correspond à six régions géographiques d’implantation: Europe de l’Ouest, Europe de l’est, Afrique/Moyen Orient, Amérique du Nord, Amérique Centrale et du Sud, Asie/Pacifique. 76 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La seconde variable est le temps. En effet, les données sont collectées sur plusieurs années et il fallait donc en tenir compte. Le temps est représenté par les différentes années de notre étude. 3. Résultats 3.1. Résultats pour les hypothèses H1a et H1b L’hypothèse H1a suppose un lien positif entre la centralité dans le réseau coopétitif et l’activité concurrentielle. Le tableau 1 montre que la centralité (degree) dans les réseaux a un impact positif significatif sur la fréquence des actions concurrentielles dans le secteur. Plus l’opérateur est central, plus il initie un grand nombre d’actions concurrentielles et plus il répond promptement aux actions concurrentielles de ses rivales (modèle 3 ; p < 0.01). L’hypothèse H1a est donc validée. 77 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 1 : Centralité et activité concurrentielle Variable dépendante : Activité concurrentielle de la firme Modèle 1 Modèle 2 Modèle 3 geo -0.036 -0.028 0.208*** (0.05) (0.06) (0.05) time 0.051 -0.055 -0.105* (0.05) (0.06) (0.05) concentration -1.232* -0.467 (0.57) (0.46) maturity 0.011** 0.004 (0.01) (0.01) degree 0.451*** (0.02) constant 2.172*** 1.753*** 0.977** (0.26) (0.39) (0.32) R-sqr 0.017 0.026 0.378 dfres 1137 917 916 BIC 5716.0 4566.2 4159.6 *p < 0.05, ** p < 0.01, *** p < 0.001 En ce qui concerne les variables de contrôle, le tableau 1 montre que la fréquence des actions et réactions concurrentielles de l’opérateur n’est pas influencée par son implantation géographique (geo). Il montre, cependant, que la fréquence des actions et réactions concurrentielles de l’opérateur est négativement influencée par la période temporelle (temps) pendant laquelle l’agressivité est mesurée (p < 0.05). L’hypothèse H1b suppose un lien entre la centralité dans un réseau coopétitif et la variété de l’activité concurrentielle. Le tableau 2 montre que la centralité dans les réseaux a un impact positif significatif sur la variété des actions concurrentielles de la firme (modèle 6 ; 78 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management p < 0.001). Plus l’opérateur est central, plus il initie une grande variété d’actions concurrentielles. Ce résultat valide l’hypothèse H1b. Tableau 2 : Centralité et variété de l’activité concurrentielle Variable dépendante : Variété de l’activité concurrentielle de la firme Modèle 4 Modèle 5 Modèle 6 geo -0.007 -0.007 0.018*** (0.00) (0.00) (0.00) time 0.001 -0.006 -0.009* (0.00) (0.00) (0.00) concentration -0.140** -0.094* (0.05) (0.04) maturity 0.001* 0.002 (0.01) (0.01) degree 0.023*** (0.00) constant 0.176*** 0.176*** 0.130*** (0.02) (0.03) (0.03) R-sqr 0.022 0.036 0.199 dfres 1072 864 863 BIC 158.3 149.7 304.3 *p < 0.05, ** p < 0.01, *** p < 0.001 En ce qui concerne les variables de contrôle, le tableau 2 montre que la variété des actions concurrentielles de l’opérateur n’est pas influencée par son implantation géographique. Il montre aussi que la variété des actions concurrentielles de l’opérateur est négativement influencée par la période temporelle pendant laquelle l’agressivité est mesurée (p < 0.05), de même que par la concentration du marché domestique de l’opérateur (p < 0.05). 79 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 3.2. Résultats pour les hypothèses H2, H3a et H3b Résultats pour le nombre d’abonnés L’hypothèse H2 suppose un lien positif entre la position centrale dans les réseaux coopétitifs et les performances. Le tableau 3 montre que la centralité est liée positivement au nombre d’abonnés (modèle 9, p < 0.001). L’hypothèse H2 est donc validée quand la performance est mesurée par le nombre d’abonnés. L’hypothèse H3a suppose un lien positif entre (compétition) et les performances. l’activité concurrentielle Le tableau 3 montre l’existence d’un lien significatif positif entre l’activité concurrentielle de l’opérateur et le nombre d’abonnés (modèle 10, p < 0.001). L’hypothèse H3a est donc validée pour le nombre d’abonnés. 80 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 3 : Centralité, agressivité et nombre d’abonnés Variable dépendante : Nombre d’abonnés geo time Modèle 7 Modèle 8 Modèle 9 Modèle 10 Modèle11 636734.372 -156952.176 -192684.190 -62702.840 55267.391 (361714.69) (457631.85) (440720.73) (428095.45) (452213.53) 1521219.963 *** 2149830.831 *** 1915585.775 *** 2244601.669 *** 2396004.810 *** (386202.06) (444283.57) (428892.57) (415615.31) (438384.75) 3521122.524 7224264.313 7954379.742 9461323.708* (4395782.30) (4259584.26) (4132700.62) (4436180.09) -79363.977 ** -100388.974 *** -104941.139 *** -98641.885 *** (27460.85) (26581.31) (25797.62) (27103.19) concentration maturity 1357797.526 *** degree (173845.30) 2346381.884 *** competition (222980.17) 28018408.424 *** competdiv (3108088.44) 1176398.704 ** 4718808.664 ** 1979393.151 ** -472958.219 ** -1653088.707 ** (1931166.11) (2994572.23) (2905008.08) (2843809.98) (3054138.66) R-sqr 0.020 0.033 0.105 0.155 0.132 dfres 922 766 765 765 729 BIC 33744.1 28133.7 28081.2 28036.1 26774.8 constant *p < 0.05, ** p < 0.01***, p < 0.001 L’hypothèse H3b suppose un lien positif entre la variété de l’activité concurrentielle (competdiv.) et les performances. Le tableau 3 montre l’existence d’un lien positif significatif entre la variété de l’activité concurrentielle de l’opérateur et le nombre d’abonnés (modèle 11, p < 0.001). L’hypothèse H3b est donc validée pour le nombre d’abonnés. En ce qui concerne les variables de contrôle, le tableau 3 montre que le nombre d’abonnés est positivement influencé par la période temporelle 81 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management pendant laquelle le comportement de l’entreprise est mesuré (p < 0.001 pour tous les modèles). Le tableau 3 montre aussi que la concentration du marché domestique de l’opérateur impacte peu le nombre d’abonnés de l’opérateur (p < 0.05, modèle 5). Le tableau 3 montre, enfin, que le nombre d’abonnés est négativement influencé par la maturité du secteur (p < 0.01). Résultats pour la variation du nombre d’abonnés L’hypothèse H2 suppose un lien positif entre la position centrale dans les réseaux coopétitifs et les performances. Le tableau 4 montre que la centralité est liée positivement à la variation du nombre d’abonnés (modèle 14, p < 0.001). L’hypothèse H2 est donc validée quand la performance est mesurée par la variation du nombre d’abonnés. L’hypothèse H3a suppose un lien positif entre l’activité concurrentielle et les performances. Les résultats du tableau 4 montrent l’existence d’un lien significatif positif entre l’activité concurrentielle de l’opérateur et la variation du nombre d’abonnés (modèle 15, p < 0.001). 82 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 4 : Centralité, agressivité et variation du nombre d’abonnés Variable dépendante : Variation du nombre d’abonnés Modèle 12 geo time concentration maturity Modèle 13 300722.446 19383.413 *** (82989.58) (106708.20) 389851.753 146027.529 *** (89367.66) (104360.97) 2494408.09 9* (1065996.4 8) -30942.450 *** (6414.86) degree constant R-sqr dfres BIC Modèle 15 Modèle 16 9085.620 28487.768 55613.751 (104157.81) 353527.764 *** (102024.99) 3242518.89 2** (1047487.5 0) -35035.042 *** (6296.07) 249227.338 *** (40572.02) (103524.86) (108904.40) 413273.021 432733.905 *** *** (101296.78) (106464.45) 3184812.55 3547045.421 6** ** (1038986.9 (1118207.34) 9) -35096.820 -34363.869 *** *** (6252.32) (6547.16) 368319.821 *** (53639.30) competition competdiv Modèle 14 4545205.477 *** (754190.05) 14244.287 814515.179 277015.094 3330.829 237121.897 * * * * * (441703.36) (703603.41) (692250.16) (692871.18) (743985.83) 0.018 0.055 0.101 0.112 0.102 891 737 736 736 701 29953.3 24892.0 24861.5 24852.5 23721.1 *p < 0.05, ** p < 0.01***, p < 0.001 L’hypothèse H3b suppose un lien positif entre la variété de l’activité concurrentielle et les performances. 83 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Les résultats du tableau 4 montrent l’existence d’un lien significatif positif entre la variété des actions concurrentielles de l’opérateur et la variation du nombre d’abonnés (modèle 16, p < 0.001). L’hypothèse H3b est donc validée quand la performance est mesurée en variation du nombre d’abonnés. En ce qui concerne les variables de contrôle, le tableau 4 montre que la variation du nombre d’abonnés est influencée par la période temporelle pendant laquelle l’agressivité est mesurée (p < 0.001). Le tableau 4 montre, aussi, que la variation du nombre d’abonnés est influencée par la concentration (p < 0.05 et p < 0.01). Le tableau 4 montre, enfin, que la variation du nombre d’abonnés est négativement influencée par la maturité du secteur (p < 0.001). 4. Discussion Cette recherche est consacrée à l’étude des relations entre les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et les performances. Les recherches antérieures traitent essentiellement des liens entre les réseaux coopétitifs et les comportements concurrentiels. Deux thèses s’opposent. Dans la première, les réseaux coopétitifs diminuent la rivalité (Harrigan, 1986 ; Porter et Fuller, 1986). Dans la seconde, au contraire, le fait de coopérer dans des réseaux coopétitifs augmente l’agressivité (Gnyawali et al., 2006 ; Andrevski et al., 2007). Ces recherches ont en commun de ne pas intégrer les performances dans l’analyse. Il a donc été considéré comme nécessaire de mener une recherche reliant les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et les performances. Les résultats obtenus ici permettent de confirmer un certain nombre de recherches antérieures et de mettre en évidence des éléments nouveaux. Les résultats montrent, premièrement, qu’il existe un lien positif entre la centralité dans les réseaux coopétitifs et le comportement concurrentiel. Ces résultats sont concordants avec ceux obtenus par Gnyawali et al. (2006) et par 84 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Andrevski et al. (2007). Plus une entreprise occupe une position centrale dans un réseau coopétitif, plus elle augmente la fréquence de ses actions concurrentielles et leur diversité. Le fait d’occuper cette position centrale est bien un moyen d’augmenter l’accès aux ressources, ce qui permet ensuite d’être plus agressif. Ces résultats contredisent donc les recherches plus anciennes qui assimilent la coopération entre les concurrents à l’entente (Harrigan, 1986 ; Porter et Fuller, 1986). Les résultats obtenus ici montrent l’inverse. Plus une entreprise coopère avec ses rivaux, plus elle est agressive avec ces mêmes rivaux. Les résultats, montrent, deuxièmement, qu’il existe un lien direct entre la centralité dans les réseaux coopétitifs et la performance. Dans la théorie structurale des réseaux, le fait d’être en position de centralité dans un réseau est en soi un facteur de performance (Wasserman et Faust, 1994 ; Galaskiewicz et Wasserman, 1994 ; Borgatti, 2005 ; Borgatti, 2006). Les résultats obtenus ici confirment cette théorie pour un type de réseau particulier, en l’occurrence les réseaux coopétitifs. C’est, à notre connaissance, la première fois qu’une relation positive entre la position centrale dans les réseaux coopétitifs et les performances est mise en évidence empiriquement. Cela signifie que la théorie des réseaux s’applique tout aussi bien aux relations entre entreprises qui ne sont pas concurrentes qu’aux relations entre entreprises qui sont en concurrence. Même quand les entreprises qui constituent le réseau sont en concurrence, le fait d’être en position centrale dans le réseau procure des ressources supplémentaires, ce qui permet aux entreprises qui sont dans cette position d’avoir de meilleures performances que celles qui sont dans des positions plus marginales. Les résultats montrent, troisièmement, qu’il y a un lien direct entre l’adoption d’un comportement concurrentiel agressif et la performance de marché. Dans la théorie de la dynamique concurrentielle, le fait d’être agressif est en soi un facteur de performance (Ferrier et al, 1999 ; Ferrier, 2001). Cette affirmation est confirmée dans le contexte des réseaux coopétitifs. L’industrie de la téléphonie mobile est bien une industrie dans laquelle les comportements concurrentiels agressifs permettent une meilleure performance de marché. Considérés ensemble, les résultats obtenus ici permettent une lecture originale des relations entre la position dans les réseaux coopétitifs, le 85 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management comportement concurrentiel et les performances. En effet, il est possible de considérer que la centralité dans les réseaux a un double impact sur la performance de marché. Elle a un impact direct et un impact indirect, via le comportement concurrentiel agressif. Obtenir une position centrale dans les réseaux dans l’industrie des opérateurs de téléphonie mobile est donc décisif. Cela permet d’avoir des ressources qui impactent directement la performance, et cela permet également d’être agressif, autre facteur qui a une influence directe sur la performance. Dans cette perspective, la théorie des réseaux devient un antécédent de la théorie de la dynamique concurrentielle. Une entreprise qui souhaite être performante dans son industrie doit s’attacher tout particulièrement à occuper une position centrale dans les réseaux coopétitifs. Sa capacité à nouer des relations d’alliance avec ses rivaux est alors essentielle. Ces relations d’alliance lui procurent des ressources supplémentaires, ce qui lui permet d’avoir un plus grand nombre d’actions concurrentielles et plus variées. Les deux théories ne s’opposent donc pas mais se complètent pour expliquer la performance de l’entreprise. Conclusion Cette recherche pose la question des liens entre les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et les performances. Les recherches antérieures traitent essentiellement du lien entre les réseaux coopétitifs et les comportements concurrentiels (Gnyawali et al., 2006 ; Andrevski et al., 2007). La question de la performance n’est pas abordée. Afin de combler ce vide, une étude empirique est menée dans l’industrie de la téléphonie mobile. Les résultats montrent un lien positif entre la centralité dans les réseaux et le comportement concurrentiel agressif, un lien positif entre la centralité dans les réseaux et les performances de marché et un lien positif entre le comportement concurrentiel agressif et les performances de marché. Ces résultats confirment les recherches antérieures menées par Gnyawali et al. (2006) et par Andrevski et al. (2007). Il y a bien un lien positif entre la position centrale dans les réseaux et le comportement concurrentiel agressif. 86 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Ces résultats confirment également la validité de la théorie des réseaux (Burt, 1992 ; Nohria, 1992 ; Baum et Dutton, 1996 ; Gulati et al., 2000) pour les réseaux coopétitifs. Etre en position centrale dans les réseaux composés de firmes concurrentes permet bien d’accéder à des ressources supplémentaires et donc à des performances supérieures. Ces résultats confirment, enfin, la théorie de la dynamique concurrentielle (Ferrier et al., 1999 ; Ferrier, 2001) dans des contextes de réseaux coopétitifs. Dans les industries où se développent des réseaux coopétitifs, le fait d’être plus agressif que ses concurrents conduit à des performances supérieures. Ces trois résultats combinés permettent une nouvelle explication des liens entre les réseaux coopétitifs, les comportements concurrentiels et les performances. Dans les réseaux coopétitifs, occuper une position centrale de réseau a un impact direct sur la performance. Cela permet également d’avoir accès à un certain nombre de ressources, ce qui conduit à augmenter son degré d’agressivité. Cette propension à être plus agressif se traduit à son tour par une augmentation des performances de marché. La centralité a donc à la fois un impact direct sur les performances et un impact indirect, par le fait qu’elle permet d’augmenter l’agressivité, qui ellemême augmente la performance. Ces résultats ne doivent cependant être compris que relativement aux limites de la recherche. La principale limite vient du fait que les mesures du comportement concurrentiel et de la centralité peuvent apparaître comme un peu restrictives, relativement à la littérature abondante sur ces deux sujets. Le temps, la complexité de la séquence d’actions concurrentielles et/ou l’imprédictibilité du type d’actions concurrentielles de la firme sont autant de mesures mobilisées pour définir le comportement concurrentiel, qui, si elles étaient utilisées enrichiraient les résultats. La centralité de l’entreprise va également au-delà des seuls liens directs de la firme. Une entreprise peut être très coopérative parce qu’elle a des activités d’intermédiation forte au sein de son secteur, ou parce qu’elle entreprend des relations coopératives avec d’autres firmes qui sont très coopératives à leur tour. 87 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La prise en compte d’autres dimensions de la centralité telles que la « betweeness centrality », la « closeness centrality » ou « l’eigenvector centrality » ou de sa nature permettrait une meilleure compréhension et une plus grande généralisation des impacts de la centralité à la fois sur le comportement agressif et sur les performances de la firme. Une autre limite tient au fait que la recherche est menée au sein d’une seule industrie : l’industrie de la téléphonie mobile. Les résultats obtenus sont donc contingents à cette industrie. Il se pose alors la question leur généralisation à d’autres industries. A la suite de cette recherche, il conviendrait donc de mener des études similaires dans d’autres industries, pour déterminer s’il y a une stabilité des résultats ou s’ils ne peuvent s’observer que dans l’industrie de la téléphonie mobile. Les résultats font émerger autant de questions sur le phénomène étudié, représentant autant de pistes de recherche plus ciblées. Nous nous sommes focalisés dans un premier sur les variables d’adoption du comportement agressif dans un réseau coopétitif. A ce niveau, seule la centralité de la firme a été considérée comme variable ayant un impact direct sur l’adoption du comportement agressif. Or le comportement concurrentiel de la firme, même dans un réseau coopétitif, ne saurait être expliqué dans son intégralité uniquement par sa position centrale dans le réseau. Quels sont donc les variables autres que la centralité susceptibles d’expliquer le comportement agressif de la firme dans un réseau coopétitif ? De plus, les seuls effets des stratégies coopératives et agressives que nous montrons sont leur impact sur les performances des firmes. Il est cependant évident que la performance ne peut être la seule implication de la centralité et l’agressivité de la firme. Quelles peuvent en être les autres effets sur la firme ? Enfin, alors que l’analyse des réseaux sociaux comprend plusieurs niveaux, dans cette recherche, nous nous sommes focalisés sur un seul niveau d’analyse, celui de la firme. Quels peuvent être les effets de l’adoption des comportements coopératifs et ou agressifs sur le réseau dans son intégralité ? Ces questions jusque- là sans réponse laissent penser que l’étude des liens entre la centralité dans les réseaux coopétitifs, le comportement 88 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management concurrentiel et les performances est un champ de recherche particulièrement riche à explorer. Références Ahuja, G. (2000). 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A partir d’une étude de cas multiple dans le transport aérien, nous montrons que l’hétérogénéité des consommateurs peut conduire les firmes à développer de nouvelles formes de coopération combinant alliances classiques et coopétition. Dans un dernier temps, nous élaborons un modèle analytique en vue de répliquer et d’expliquer ces observations empiriques. Mots-clés Coopétition, hétérogénéité des consommateurs, stratégies de ciblage, industrie du transport aérien Abstract 10 Corresponding author : [email protected] 98 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management This article examines the role of targeting strategies in the emergence of new forms of coopetition. Considering that external stakeholders (such as customers) can contribute to the development of coopetition relationships, we try to analyze how targeting strategies can push firms to cooperate with competitors. Based on a multiple case study in the air transportation industry, we show that consumer heterogeneity may lead firms to develop new forms of cooperation combining traditional alliances and coopetition. In a last step, we develop an analytical model to replicate and explain these empirical observations. Key-words Coopetition, consumer heterogeneity, targeting strategies, air transportation industry 99 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Introduction La multiplication rapide des alliances et en particulier des accords de coopétition, c’est-à-dire des alliances entre firmes concurrentes, a soulevé le problème du rôle des clients dans l’émergence de tels accords. En effet, si de nombreux déterminants de la coopétition, tant au niveau individuel que de l’industrie, ont été étudiés en profondeur, la question du rôle des acteurs externes a jusque-là été relativement peu traitée (Fernandez, 2011). Ainsi, à l’exception de quelques contributions comme celles d’Ancarani & Costabile (2010) ou de Depeyre & Dumez (2007, 2010), la problématique du client comme catalyseur de relations coopétitives n’a été que peu analysée. Si ces contributions ont posé les premières pierres d’une analyse des clients dans le processus de coopétition, elles présentent deux points communs qui en sont leurs principales limites. La majorité des articles sur le rôle des acteurs externes (et donc a fortiori des clients) se concentrent sur des relations de type Business-to-Business (B2B). Dans ces configurations, le client est puissant du fait de sa relative rareté (il est parfois unique comme dans le cas de la défense), de sorte que l’offre qui sera créée pour lui sera souvent faite sur mesure (Malaval & Benaroya, 2005). On comprend aisément que le rapport de force en faveur du client peut pousser les firmes à accepter de coopérer avec des concurrents pour satisfaire ces clients importants. Une seconde limite vient du passage d’une logique B2B à une logique Business-to-Consumers (B2C), car elle pose la question de l’hétérogénéité des consommateurs. Dans une logique B2B, chaque client peut être traité quasiindividuellement. A l’inverse, une telle démarche n’est pas viable dans une logique B2C et les méthodes de segmentation traditionnelles permettent de regrouper les consommateurs aux comportements homogènes. Une fois ces différents segments identifiés, la firme doit décider de la stratégie adopter : se focaliser sur un seul d’entre eux, créer une offre adaptée à chaque segment ou encore contre-segmenter. 100 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La question qui se pose alors est celle de savoir si ces différentes stratégies de ciblage peuvent conduire les firmes à adopter simultanément des stratégies coopératives et compétitives. D’où notre question de recherche : Comment les stratégies de ciblage permettant de gérer l’hétérogénéité des consommateurs peuvent-elles pousser des firmes à adopter des modes coopératifs plus ou moins complexes ? Notre article sera structuré autour de 5 grands axes. Tout d’abord, nous rappellerons le cadre théorique de la coopétition et de ses déterminants, afin de faire émerger un gap théorique sur le rôle des clients et les stratégies de ciblage. Dans un second temps, nous préciserons notre méthodologie et notre démarche de recherche. Ensuite, nous présenterons la narration de nos trois cas afin d’en extraire un certain nombre de conclusions. Dans un quatrième temps, nous élaborerons un modèle d’analyse afin de pouvoir mettre en évidence de manière plus systématique le rôle des clients et du ciblage dans la structuration des relations coopératives d’une firme. Enfin, dans un cinquième et dernier temps, nous discuterons de la portée de nos résultats. 1- Cadre théorique Avant d’étudier en profondeur le rôle des stratégies de ciblage dans l’émergence de la coopétition, il est nécessaire de commencer par un bref retour historique sur la coopétition, tant du point de vue de ses définitions que de ses débats. Une fois les termes du sujet clairement définis, nous nous intéresserons de plus près à la question des déterminants de la coopétition. Dans un troisième temps, ayant constaté que les contributions sur les déterminants de la coopétition identifiaient un vide théorique, nous proposerons d’analyser plus en détail le rôle que les clients peuvent jouer dans l’émergence de comportements coopétitifs. 101 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 1-1 La coopétition : historique et définitions On attribue généralement à Ray Noorda, le fondateur de Novell (une entreprise informatique), la paternité du terme « coopétition » dans les années 1980-1990. Il faut attendre le milieu des années 1990 avec les travaux de Brandenburger & Nalebuff (1996) pour voir une première théorisation des stratégies coopétitives. Néanmoins leur démarche est considérée avec scepticisme par la communauté scientifique qui se lance alors dans un travail de reconstruction et de réappropriation du concept de coopétition (Chiambaretto, 2011). Ainsi, on considère généralement que les premiers travaux sur la coopétition sont ceux de Lado & al. (1997), de Bengtsson & Kock (1999, 2000) ou encore Dagnino & Padula (2002). Cependant, dès ces premières contributions, il apparait que la coopétition peut prendre plusieurs formes, rendant ainsi son étude plus complexe. En effet, les stratégies de coopération entre concurrents peuvent se faire selon différentes modalités, posant ainsi des problèmes de définition. La majorité des contributions sur la coopétition tendent à mobiliser les mêmes définitions. Il s’agit de définitions consensuelles, suffisamment globales, pour se positionner au-dessus des débats sur les frontières de la coopétition. Plus les années passent, plus des définitions larges sont adoptées afin de prendre en compte les apports des nouvelles contributions. A titre d’exemple, nous fournissons trois définitions (par ordre chronologique) pour montrer cette évolution. La première est celle de Bengtsson & Kock (2000) qui, s’appuyant sur les activités et les ressources, définissent la coopétition comme la « relation dyadique et paradoxale émergeant quand deux entreprises coopèrent dans quelques activités, et sont en même temps en compétition sur d’autres activités ». Tentant d’aller au-delà de la question des activités et des relations dyadiques, Dagnino & Padula (2002) voient dans la coopétition « un système d’acteurs qui interagissent sur la base d’une congruence partielle des intérêts et des objectifs ». La question du nombre d’acteurs est donc posée et parler de système permet d’envisager la possibilité de relations coopétitives entre plus de deux acteurs. 102 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Enfin, comme troisième définition, nous proposons celle de Gnyawali & al. (2008), à savoir « la coopération et la concurrence simultanées entre différents acteurs individuels ou organisationnels ». On observe ici un élargissement permettant de prendre en compte des relations de coopétition différentes : entre individus, horizontales/verticales,… Du fait du relatif jeune âge de ce champ de recherche, de vifs débats demeurent sur la nature de la coopétition. Faisant une synthèse des principaux travaux sur la coopétition, Le Roy & al. (2010) considèrent que la coopétition implique deux éléments : la simultanéité des relations et leur horizontalité (puisque les organisations en présence doivent être en concurrence). Or ces points sont loin de faire l’unanimité. Des auteurs comme Dumez & Jeunemaître (2005) ou Pellegrin-Boucher & Fenneteau (2007) insistent sur la possibilité de retrouver les caractéristiques des relations coopétitives lorsque deux acteurs alternent fréquemment les relations de concurrence et coopération. La question de la structure des relations coopétitives fait aussi débat (Depeyre & Dumez, 2010 ; Gnyawali & al., 2008 ; Lacoste, 2012). Nous proposons de retenir une définition de la coopétition relativement consensuelle en vue d’englober l’ensemble de ces débats : « la coopétition fait référence à la coopération et la concurrence simultanées entre différents acteurs individuels ou organisationnels » (Gnyawali & al., 2008). 1-2 -Les déterminants de la coopétition Pour justifier le recours à cette stratégie « contre-nature » (Fernandez & Le Roy, 2010), toute une réflexion a été entamée sur les déterminants de la coopétition. Différentes approches ont ainsi été mobilisées, mobilisant tant des facteurs internes qu’externes. Du point de vue des déterminants internes, la première justification de cette stratégie vient de Brandenburger & Nalebuff (1996) qui mobilisent la théorie des jeux. La coopétition est alors une façon de passer d’une situation « winlose » (modèle concurrentiel classique) à une situation « win-win ». Pour reprendre leur métaphore du gâteau, la dimension coopérative permet de faire croître la taille du gâteau qui devra être partagé au cours de la phase concurrentielle. Cette justification par la théorie des jeux a été rapidement 103 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management complétée par une approche par les ressources. Avec les travaux de Lado & al. (1997) ou de Bengtsson & Kock (1999,2000), la coopétition est alors vue comme une opportunité d’avoir accès à des ressources détenues par d’autres firmes. On retombe alors dans le paradigme de la « relational view » (Dyer & Singh, 1998), avec une nuance importante: le maintien d’une relation de concurrence qui assure la supériorité de la coopétition sur les alliances classiques (i.e. purement coopératives). La coopération permet certes d’obtenir les ressources manquantes, mais le maintien d’une forme de concurrence sert de pression en faveur de l’innovation et de comportements plus offensifs sur le marché. Enfin, une dernière justification interne de la coopétition consiste à voir en elle une opportunité d’apprentissage pour la firme (Baumard, 2010). Un peu selon la même logique que pour les ressources, la coopétition est une opportunité pour une firme d’apprendre de ses concurrents sur certaines activités (souvent non-stratégiques) tout en restant en concurrence sur le reste de ses activités. En parallèle, une série de déterminants externes peuvent favoriser l’émergence des stratégies de coopétition entre firmes d’un secteur donné. Selon Bonel & Rocco (2007) ou Gnyawali & Park (2009), les caractéristiques ou la structure d’une industrie peuvent expliquer l’attrait des stratégies de coopétition. Ainsi, l’importance de la technologie, les dépenses de R&D élevées, le raccourcissement du cycle de vie des produits auraient tendance à conduire des firmes concurrentes à coopérer entre elles. Au-delà des caractéristiques de l’industrie, d’autres facteurs externes peuvent jouer. En effet, le choix d’un tel mode relationnel ne dépend pas seulement des acteurs en jeu dans la dyade ou le réseau : les parties prenantes peuvent jouer un rôle dans l’émergence de ces stratégies. Ainsi, des acteurs externes peuvent contribuer au développement de la coopétition en façonnant les relations entre les membres d’une industrie (Jacobides & al., 2006). Ils peuvent par exemple avoir une certaine vision de l’industrie et contribuer à l’essor de tout un écosystème autour d’eux (Gueguen, 2009). L’Etat aussi peut favoriser les relations de coopération entre concurrents pour améliorer la compétitivité d’un secteur par exemple (Breznitz, 2009 ; Rusko, 2011). Parmi ces acteurs externes, on retiendra plus particulièrement les clients. Ils peuvent pousser à la coopétition de plusieurs manières. La convergence des industries et la demande des clients pour des solutions intégrées (ordinateur + imprimante) peuvent conduire des firmes concurrentes 104 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management à coopérer sur certains marchés pour proposer des produits complets souvent dans le cadre de bundles (Ancarani & Costabile, 2010 ; Chiambaretto & Dumez, 2012). Par ailleurs, dans les secteurs où les clients sont des firmes (donc dans une relation B2B), les clients possèdent généralement un pouvoir de négociation très fort. Ils vont donc pouvoir utiliser ce pouvoir de force pour pousser des concurrents à coopérer afin d’obtenir un produit répondant parfaitement à leurs besoins (Depeyre & Dumez, 2010 ; Fernandez, 2011). On voit donc que les relations coopétitives sont généralement le résultat de plusieurs facteurs, tant internes qu’externes. 1-3 Gap théorique L’objet de cet article de recherche est d’analyser de plus près le rôle des clients et des stratégies de ciblage dans l’émergence de nouvelles formes de coopétition. Si l’on fait une synthèse des contributions précédentes, on observe que la plupart de ces travaux insistent sur la possibilité pour le client de pousser des entreprises concurrentes à coopérer autour d’un projet spécifique. Un point important doit cependant être souligné : l’ensemble de ces articles s’intéressent à des cas où les clients sont des firmes, c’est-à-dire à des relations Business-to-Business (B2B). Dans ces configurations, le client est puissant du fait de sa relative rareté (il est parfois unique comme dans le cas de la défense), de sorte que l’offre qui sera créée pour lui sera faite sur mesure (Malaval & Benaroya, 2005). On comprend aisément que le rapport de force (en faveur du client) puisse pousser les firmes à accepter de coopérer avec des concurrents pour satisfaire ces clients. Une première question se pose donc : peut-on observer des phénomènes similaires dans des configurations du type Business-toConsumers (B2C) ? En effet, dans une relation B2C, le client a individuellement moins de pouvoir et a donc moins de marge de manœuvre pour pousser des firmes concurrentes à coopérer. Un deuxième point doit être noté. Le passage d’une logique B2B à une logique B2C pose la question de l’hétérogénéité des consommateurs. 105 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Dans une logique B2B, chaque client peut être traité quasi-individuellement de sorte que l’on peut arriver à des cas extrêmes avec autant de produits que de clients (comme dans l’aérospatiale par exemple). A l’inverse, une telle démarche n’est pas viable dans une logique B2C et les méthodes de segmentation permettent de regrouper les consommateurs aux comportements homogènes. La question qui se pose est donc de savoir si ces différents segments peuvent conduire les firmes à adopter simultanément des stratégies coopératives et compétitives. En d’autres termes, peut-on observer des situations où une partie de la clientèle va pousser la firme à la coopération avec un concurrent tandis que l’autre partie de la clientèle va préférer la solution interne ? Néanmoins, il nous faut observer dans un troisième temps que l’hétérogénéité des consommateurs n’est pas nécessairement synonyme de coopétition. En effet, si la majorité des marchés sont caractérisés par une clientèle hétérogène, on ne voit pas pour autant des stratégies de coopétition émerger sur chacun d’entre eux. La problématique de l’hétérogénéité des clients renvoie en fait aux stratégies de ciblage, c’est-à-dire au choix fait par la firme de s’adresser à certains segments spécifiques. Parmi les options de ciblage à sa disposition, une firme peut décider de se concentrer sur un segment en particulier ou au contraire d’en servir plusieurs à la fois (avec un seul ou plusieurs produits différents). Compte-tenu des conséquences organisationnelles propres à chaque segment, on peut imaginer que suivant la stratégie de ciblage adoptée, différentes formes de coopétition pourront émerger. D’où notre troisième question : comment les stratégies de ciblage peuvent-elles contribuer au développement de nouvelles formes de coopétition ? Notre apport se positionnera donc à deux niveaux : d’une part, nous étudierons le rôle des clients sur le développement de la coopétition du fait de leur capacité à faire coopérer des concurrents et cela même dans une logique B2C. D’autre part, nous montrerons comment les stratégies de ciblage peuvent être à l’origine de nouvelles formes organisationnelles. 106 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 2 Méthodologie Notre étude cherche à comprendre en quoi les stratégies de coopétition peuvent être guidées par les besoins des clients ou les impératifs de marché. Elle se positionne comme une étude qualitative, puisque nous cherchons à explorer des manœuvres stratégiques de façon détaillée et en profondeur (Miles et Huberman, 1994), afin de mieux comprendre certains processus de décisions difficiles à extraire par un autre type de méthodologie. Plus précisément, nous avons décidé de procéder à l’aide d’une étude de cas multiple. Le recours à l’étude de cas multiple ne relève pas d’une logique de répétition (au sens du « sampling »), mais au contraire d’une logique de réplication (Yin, 2009). L’objectif n’est donc pas de constituer un échantillon représentatif, mais au contraire d’utiliser les études de cas multiple pour émettre des hypothèses. Yin (2009, p. 54) explique ainsi : « Each case must be carefully selected so that it either (a) predicts similar results (a literal replication) or (b) predicts contrasting results (a theoretical replication)». Le choix des cas est clairement lié à celui du secteur. Nous souhaitions étudier de près un secteur caractérisé par des transactions de type B2C et dans lesquelles de nombreuses formes d’alliances (purement coopératives ou coopétitives) coexistaient. Depuis la fin des années 1980, le secteur du transport aérien a été caractérisé par l’émergence d’un très grand nombre d’alliances avec des formes organisationnelles variées (Iatrou & Oretti, 2007). Les compagnies aériennes ont même créé des alliances avec des opérateurs ferroviaires, repoussant ainsi les frontières de leur marché (Givoni & Banister, 2006, 2007). Considérant ce secteur, nous avons donc décidé de nous concentrer sur trois cas. A partir de ces cas, des méthodes de comparaison ont alors pu être utilisées pour mettre en place notre analyse inter-cas. Nous appuyant sur une approche relativement similaire de celle développée par De Man & al. (2010), nous sommes partis de la narration des cas pour établir des observations empiriques. A partir de ces observations, nous avons élaboré un modèle en vue de répliquer nos observations et mieux en comprendre les enjeux. 107 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Puis, grâce à ce modèle, nous avons essayé de développer plusieurs résultats sur l’influence des clients dans le choix des modes relationnels. Notre étude de cas multiple peut ainsi être assimilée à un «hypothesis-generating case study» au sens de Lijphart (1971). Pour obtenir des éléments sur chaque cas, plusieurs sources ont été recoupées. Nous avons tout d’abord réalisé une série d’entretiens semidirectifs avec l’ensemble des responsables des alliances en question, et cela pour l’ensemble des firmes présentées (afin d’éviter tout biais d’interprétation). Pour assurer une pluralité de points de vue, d’autres acteurs ont été interviewés : concurrents, régulateurs (DGAC), associations de professionnels (IATA), ainsi que des journalistes spécialisés. Pour s’assurer de la validité de nos données, nous avons procédé par triangulation en multipliant les sources secondaires. Nous avons pour cela recensé et analysé les articles de presse concernant ces alliances dans les quotidiens nationaux (Le Monde, Le Figaro,…), les quotidiens économiques (Les Echos, La Tribune) et la presse spécialisée (Airline Business, Flight International,…). Ces faits étant recoupés par l’étude de rapports d’activités et livres spécialisés sur le sujet. 3 Trois études de cas sur les alliances aériennes et intermodales Dans cette partie, nous allons commencer par donner quelques éléments de contexte sur les alliances aériennes et intermodales, afin de mettre en perspective les trois cas qui seront analysés par la suite. 3-1 Cadre empirique A l’exception de quelques compagnies aériennes se concentrant sur des marchés de niches, la plupart des compagnies aériennes tentent de créer un réseau global, couvrant le maximum de destinations, tant pour minimiser les 108 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management coûts unitaires que pour maximiser les recettes (Holloway, 2008 ; Shaw, 2011). Néanmoins, cette volonté de créer un réseau global est confrontée à une réalité beaucoup plus complexe. En effet, au-delà de la question des ressources nécessaires à la création d’un tel réseau, il s’avère qu’une compagnie aérienne ne peut accéder directement à toutes les villes dans le monde, essentiellement du fait de restrictions sur les droits de trafic (Park, 1997 ; Odoni, 2009). Afin de contourner ces barrières matérielles et légales, les compagnies aériennes vont donc créer des alliances avec des compagnies aériennes locales pour mettre en place un réseau virtuellement global, sans avoir à en assumer les coûts (Iatrou, 2004). Elles utilisent pour cela des accords dits d’interlining ou de partage de code (code-share en anglais) pour étendre artificiellement la taille de leur réseau dans les systèmes de réservation. Par exemple, alors qu’Air France ne sert que réellement une dizaine de villes aux Etats-Unis, son partage de code avec Delta Airlines lui permet de proposer des vols sur plus d’une cinquantaine de villes à travers le pays. Le fait d’apposer son « code » sur le vol d’une autre compagnie aérienne permet d’être proposé en priorité dans les systèmes de réservation et donc accroit la probabilité d’être choisi par un voyageur (EC DG Comp, 2007). Ces accords de partage de code ont véritablement explosé à partir de la fin des années 1980 et on en recense plus de 800 à ce jour (Mills, 2011). Il s’agit d’une forme de coopération moyenne : bien que les compagnies aériennes coopèrent sur l’affichage des vols (souvent dans le cadre d’un accord réciproque), elles restent concurrentes sur la vente des sièges. Généralement, ces accords de partage de code ont lieu entre compagnies aériennes. Néanmoins, avec l’essor des trains à grande vitesse en Europe, des accords de coopération ont été signés entre compagnies aériennes et opérateurs ferroviaires. On appelle ces partenariats des alliances intermodales air-fer (Givoni & Banister, 2006, 2007). Concrètement, un passager souhaitant faire un Marseille – Hong Kong dans le cadre d’un billet combiné fera le trajet Marseille – Roissy en train (où le trajet en train aura un numéro de vol) et le Roissy – Hong Kong en avion. On distingue alors différentes formes d’alliances intermodales suivant qu’il s’agisse de remplacer des vols existants - comme Air France qui remplace certains vols par des TGV sur le Paris-Lyon - ou d’accroître son réseau dans les villes de province que l’on ne sert pas - comme l’accord de Cathay Pacific avec la SNCF qui lui donne accès à 20 villes de 109 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management province alors qu’elle ne sert que Paris en avion - (Chiambaretto & Decker, 2012). Ces alliances intermodales sont souvent utilisées par les compagnies nonalignées (c’est-à-dire n’appartenant pas à une alliance globale comme Star Alliance ou Skyteam) afin de concurrencer la compagnie nationale du pays. L’idée est simple : si une compagnie n’a pas accès à une ville de province (sur laquelle la compagnie nationale a un quasi-monopole), elle peut s’allier avec un opérateur ferroviaire et servir virtuellement cette ville et donc se rendre plus attractive auprès de ces passagers régionaux souhaitant partir à l’étranger. Afin de mieux comprendre les différentes stratégies de ciblages décrites dans les cas, il convient de décrire la nature de la clientèle aérienne. On distingue généralement deux types de clientèles aériennes (Belobaba & al, 2009; Shaw, 2011) : la clientèle loisirs et la clientèle affaires (aussi appelée « pro » ou « business »). La clientèle dite « loisirs » est essentiellement composée de personnes se déplaçant dans le cadre des vacances pour visiter de nouveaux lieux ou rendre visite à leur famille. Payant eux-mêmes le prix du billet d’avion, ils sont fortement sensibles aux variations de prix. En revanche, puisqu’ils ne voyagent pas souvent, ils sont beaucoup moins sensibles à l’heure ainsi qu’à la durée du trajet. A l’inverse, la clientèle « affaires » est composée de professionnels voyageant dans le cadre de leur travail. Leur billet étant payé par leur entreprise, ils sont caractérisés par une plus faible sensibilité aux variations de prix. En revanche, parce qu’ils sont souvent en déplacement, ils cherchent à minimiser le temps de trajet total. Les caractéristiques de ces deux principaux segments sont résumées dans le tableau 1 ci-dessous. Tableau 1. Caractéristiques des clientèles « loisirs » et « affaires » dans le transport aérien Segment Loisirs Affaires Sensibilité au prix Forte Faible Sensibilité au temps Faible Forte 110 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Ces éléments de contexte en tête, nous décrivons trois cas d’alliances aériennes et/ou intermodales, afin de mieux comprendre la relation entre les clients et le choix de la coopétition. 3-2 Le cas Corsair International et SNCF La compagnie aérienne Corsair International (ex Corsairfly) est créée en 1981 avec pour objectif d’effectuer des vols à la demande des tour-opérateurs. Petit à petit, en parallèle de son activité charter, la compagnie aérienne développe ses vols réguliers et devient un acteur majeur des vols vers les Antilles dans les années 1990. Un des atouts de la compagnie aérienne a longtemps été de proposer des vols directs vers les Caraïbes au départ des villes de province. A ce jour, Corsair International est la deuxième compagnie aérienne régulière française, tant par le nombre de sièges offerts que par son chiffre d’affaires. En 2011, un changement majeur dans la stratégie de Corsair intervient. Face à la concurrence croissante des compagnies françaises sur ces routes, la compagnie Corsair décide de revoir totalement sa stratégie. Un des axes importants de cette nouvelle stratégie est la reconfiguration du réseau. Bien qu’attractifs aux yeux des consommateurs, les vols directs au départ des villes régionales ne sont pas rentables. Le réseau est donc reconfiguré de sorte que tous les vols outre-océan seront au départ et à direction de Paris-Orly. Les passagers régionaux seront donc pré-acheminés en train jusqu’à Orly et feront le reste du trajet en avion. En février 2011, un accord de partage de code est donc signé avec la SNCF, permettant à Corsair International de rester compétitif face à Air France. La Figure 1 illustre cet accord. 111 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Figure 1. Accord de coopération entre Corsair International et Air France Stricto sensu, il ne s’agit pas d’un accord de coopétition. Pour reprendre la typologie proposée par Fernandez & Le Roy (2010), il s’agit d’un simple cas d’intégration avec deux partenaires non-concurrents. En d’autres termes, nous sommes face à une relation verticale classique où la SNCF joue le rôle de fournisseur pour Corsair International en lui fournissant des passagers à l’aéroport de Paris. Maintenant, analysons les conséquences de cet accord pour Corsair International. Pour cela, comparons les gains et coûts de cette alliance par rapport à la situation où Corsair faisait tout le trajet toute seule. L’objectif initial de cet accord était de réduire les coûts d’exploitation pour les passagers au départ de province, de sorte que cet accord se traduise par une baisse de prix pour les passagers. Cependant, cet accord présente des inconvénients pour les passagers : passer d’un TGV à un avion ne se fait pas de manière aussi fluide qu’une correspondance entre deux vols (et a fortiori qu’un vol direct). Cet accord est donc synonyme d’une baisse des prix, mais d’une augmentation des coûts de transaction (complexité, temps,…). Cette approche semble donc particulièrement pertinente pour une clientèle peu sensible au temps et à la complexité, mais en revanche caractérisée par une forte élasticité-prix. En d’autres termes, pour reprendre la typologie loisirs/affaires propre au transport aérien (Shaw, 2011), ce type d’alliance est très attractif pour une compagnie aérienne ayant décidé de cibler en priorité une clientèle « loisirs ». 112 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 3-3 Le cas Air Canada et Air France Le marché transatlantique est un des plus gros et plus concurrentiels au monde. Air France et Air Canada rivalisent pour essayer d’attirer le plus de voyageurs sur leurs routes entre l’Europe et l’Amérique du Nord. La pression concurrentielle y est très forte et les marges sont réduites au strict minimum. Alors même que ces deux compagnies sont de féroces concurrents, elles ont décidé de signer contre toute attente un accord de coopération en Septembre 1992 (et renouvelé à plusieurs reprises depuis). Il s’agit d’un accord d’interlining autorisant Air France à vendre des billets d’Air Canada à ses propres clients sur des vols entre Montréal et d’autres villes canadiennes (en continuité de l’un de ses vols reliant la France à Montréal). Symétriquement, Air Canada peut vendre des billets d’Air France à ses propres clients sur des vols entre Paris et la province (en continuité d’un vol reliant le Canada à Paris). L’objectif de cet accord est de lier les deux réseaux, mais le niveau d’intégration et de coopération reste faible. D’un point de vue structurel, la présence simultanée d’une composante verticale pour la coopération et d’une composante horizontale pour la compétition fait que l’on retombe dans une configuration de type coopétition orthogonale (Chiambaretto, 2011). On propose une représentation graphique de la relation entre Air France et Air Canada dans la Figure 2. 113 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Figure 2. Relations entre Air France et Air Canada A première vue, on peut se dire que cet accord est contre-intuitif. Si l’on se place du point de vue du marché français, la présence d’Air France dans les villes régionales est un véritable atout qui la différencie de ses concurrents pour ses vols transatlantiques. A priori, la compagnie française n’a donc aucun intérêt à donner accès à ce marché privilégié à un de ses concurrents. Pourtant, cet accord s’avère rentable pour Air France car il lui permet d’accroître le taux de remplissage de ses vols régionaux (et donc ses revenus pour un coût marginal très faible), mais aussi de facturer les sièges à Air Canada à un prix supérieur à celui pratiqué individuellement. Quelles sont les conséquences pour Air Canada ? Cet accord lui permet d’offrir un accès à un plus grand nombre de villes régionales en France, et cela dans le cadre d’une offre de transport complémentaire et compatible. Du point de vue du prix, cette solution est coûteuse car elle implique souvent un prix de facturation interne élevé. En revanche, cet accord d’interlining permet d’offrir une solution avec de faibles coûts de transaction pour les voyageurs (temps de transport minimal, gestion intégrée des bagages,…). D’ailleurs, le prix élevé est souvent justifié par l’ensemble de ces prestations intégrées. Cette démarche semble donc particulièrement pertinente pour une compagnie aérienne comme Air Canada, essentiellement si elle vise une clientèle caractérisée par une faible élasticité-prix et une forte sensibilité au temps et à la complexité. 114 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Autrement dit, cette offre est pertinente pour la clientèle « affaires ». D’ailleurs, on observera que cette offre est relativement confidentielle chez Air Canada et qu’elle n’est pas proposée directement sur le site internet, mais uniquement auprès du service clients d’Air Canada. Pourtant, il s’agit d’une offre qui rencontre un grand succès auprès des voyageurs « affaires ». 3-4 Le cas Qatar Airways, Air France et SNCF Ce troisième cas mérite toute notre attention car il s’agit d’un cas hybride, au sens qu’il résulte d’une combinaison des deux cas précédents. La compagnie aérienne Qatar Airways a été fondée en décembre 1993 à Doha. Après quelques années de balbutiements, elle se lance dans une stratégie d’expansion sur les marchés mondiaux à partir de 1997. Caractérisée par un taux de croissance annuel supérieur à 35% au cours des dix dernières années, la compagnie aérienne qatarie est très vite passée du stade d’outsider à celui de challenger sur de nombreux marchés. A ce jour, elle dessert plus de 120 destinations à travers le monde et a transporté plus de 16 millions de passagers au cours de l’année financière 2010/2011. Dès les premières années de son existence, Qatar Airways a noué des partenariats (à l’aide d’accords de partage de code) avec des compagnies aériennes nationales, tant pour accroître son réseau que pour bénéficier de leur réputation locale. Au début des années 2000, Qatar Airways commence à servir le marché français (d’abord indirectement via l’Allemagne, puis directement). Elle ne vole alors que vers Paris-CDG. Afin de se développer sur le marché français, Qatar Airways entame des négociations avec Air France pour un accord de partage de code. Air France, considérant la menace que représente cette compagnie aérienne, refuse de signer un partenariat avantageux et accepte tout au plus la création d’un accord d’interlining entre les deux compagnies, sans aucun tarif préférentiel. En d’autres termes, si un passager de Qatar Airways veut accéder à une ville régionale à l’aide d’un vol Air France, Qatar Airways a le droit d’émettre ce billet, mais elle ne dispose d’aucun tarif préférentiel. Ces offres sont alors essentiellement proposées à une clientèle professionnelle souhaitant arriver rapidement à destination et cela peu importe le prix. 115 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Cependant, conscients que cette situation n’était pas tenable pour une clientèle « loisirs » (qui représente la majorité des passagers de Qatar Airways), les responsables de Qatar Airways ont cherché une alternative. Fin 2004, un accord de partage de code est signé entre la SNCF et Qatar Airways, permettant à la compagnie qatarie d’accéder à une dizaine de villes en France via le réseau TGV. Cet accord est essentiellement destiné à une clientèle loisirs, peu sensible au temps de trajet mais beaucoup plus sensible au prix. Près de huit ans après la signature, Qatar Airways conserve ces deux partenariats de manière simultanée. On se retrouve alors face à une configuration organisationnelle complexe (Figure 3). Figure 3. Relations entre Qatar Airways, Air France et la SNCF Sur le marché français, nous avons d’une part un cas de compétition avec intégration de deux partenaires non concurrents (« SNCF + Qatar Airways ») en vue de concurrencer Air France sur le segment « loisirs ». Cet accord présente l’avantage d’offrir des préacheminements jusqu’à Paris à un prix raisonnable, mais pose le problème de la compatibilité TGV-avion et donc de l’augmentation des coûts de transaction (temps de trajet, complexité pour les passagers,…). En parallèle, nous avons un cas de coopétition orthogonale (Qatar Airways et Air France) mise en œuvre uniquement pour le segment « business ». Ici, l’enjeu est de créer une offre intégrée avec une minimisation des coûts de transaction (temps de trajet minimal, correspondance purement 116 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management aérienne,…) mais en faisant payer un prix plus élevé aux passagers choisissant cette offre. Le suivi en parallèle de ces deux alliances (avec des degrés de coopération nettement différents) correspond à la volonté pour Qatar Airways de couvrir l’ensemble du marché. Contrairement aux cas précédents où un seul segment était ciblé, l’objectif ici est de répondre aux besoins hétérogènes. Puisque ces besoins sont différents, ils impliquent des combinaisons de ressources différentes et donc des alliances différentes. 3-5 Analyse inter-cas A partir de nos trois cas, nous pouvons faire quelques remarques. Ces observations serviront ensuite de base pour la construction du modèle analytique (dans la partie suivante). Si l’on analyse la coopétition sous l’angle des ressources (Fernandez & Le Roy, 2010) et que l’on considère les destinations servies comme des ressources (Gimeno, 2004 ; Mitsuhashi & Greve, 2009), on observe que la non-substituabilité parfaite des ressources joue un rôle primordial dans les comportements coopératifs. En effet, les ressources permettant d’accéder à Marseille en avion ou en train ne sont pas parfaitement substituables aux yeux des clients: elles ont des coûts mais aussi des degrés de compatibilité différents. Le caractère idiosyncratique des ressources (Barney, 1991) est donc fondamental dans l’explication de comportements coopétitifs. Une firme pourra être poussée à coopérer avec un concurrent si la ressource parait non-substituable aux yeux des clients. D’où notre première observation : Observation 1 : Le choix de la coopération avec un concurrent (plutôt qu’avec un partenaire non-concurrent) est d’autant plus grand que les ressources possédées par celui-ci apparaissent comme non-substituables aux yeux des clients ciblés. Comme nous l’avions souligné précédemment, une de nos contributions est de prendre en compte l’hétérogénéité des clients et les stratégies de 117 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management ciblage. Pour rappel, dans le cas du transport aérien, la segmentation est la suivante (Shaw, 2011): des clients « loisirs » (forte élasticité-prix / faible élasticité-temps) et des clients « affaires » (faible élasticité-prix / forte élasticité-temps). Nous proposons de croiser cette segmentation de la clientèle avec le comportement coopératif d’une firme. Si l’on insiste généralement sur les avantages des alliances, celles-ci présentent de nombreux risques, en particulier du fait du partage de la valeur ajoutée et du risque d’opportunisme (Baum & al, 2000). Ce risque augmente d’ailleurs lorsque le partenaire en question est un concurrent comme c’est le cas dans le cadre la coopétition (Czakon, 2010). Une entreprise concurrente possédant des ressources non-substituables souhaitera donc se prémunir contre tout risque de la part de son partenaire en lui faisant payer un « price premium » élevé pour accéder à ses ressources. Ainsi, seuls les clients les moins sensibles aux variations des prix trouveront cette alliance avantageuse. D’où l’observation 2 suivante : Observation 2 : Plus un client est caractérisé par une faible élasticité-prix, plus il a la possibilité de pousser des concurrents à coopérer (du fait de sa capacité à payer le « price premium » induit par la coopétition). Notre dernière remarque est liée à la stratégie marketing des firmes en question. Face à un marché segmenté, une firme peut adopter trois grandes stratégies de ciblage : une stratégie de couverture (en offrant un produit différent pour chaque segment), une stratégie de concentration (en offrant un produit à un seul segment) et enfin une stratégie de contre-segmentation (en offrant un produit unique à l’ensemble des segments). Les deux premiers cas d’alliances (Corsair International et Air Canada) correspondaient à des stratégies de concentration, où les partenariats visaient seulement un segment. Le troisième cas nous parait plus riche en enseignements car il met en évidence le lien entre stratégie de couverture et complexité des modes coopératifs d’une firme. D’où notre dernière observation : Observation 3 : La mise en place d’une stratégie marketing de couverture peut conduire une firme à adopter différents comportements concurrentiels simultanément. 118 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Considérant l’ensemble de ces observations, nous proposons dans la dernière partie de cet article un modèle permettant de montrer dans quelles circonstances la segmentation de la clientèle peut pousser une firme à adopter des comportements coopératifs simples ou complexes. 4 Proposition d’un modèle analytique L’objectif de ce modèle est de déterminer, compte-tenu de segments donnés a priori, si une firme doit (a) coopérer avec un partenaire nonconcurrent, (b) entrer dans une relation de coopétition avec un concurrent ou (c) combiner les deux modes relationnels. On étudie spécifiquement le cas d’une firme souhaitant répondre aux attentes de l’ensemble des segments. Dans un premier temps, nous fixons un ensemble d’hypothèses et de notations pour élaborer notre modèle. Puis, nous formulons le modèle et les règles de décision pour en présenter les principaux résultats. 4-1 Hypothèses et notations 4-1.1 Hypothèses et notations sur les ressources On se place du point de vue d’une firme focale i. La stratégie marketing de cette firme consiste en une stratégie de couverture, c’est-à-dire qu’elle souhaite servir l’ensemble des segments en adaptant son offre en fonction des besoins de chaque segment. Par ailleurs, cette firme doit accéder à des ressources pour être présente sur un marché. Elle a alors le choix entre deux entreprises qui peuvent lui fournir des ressources imparfaitement substituables. L’entreprise k peut lui fournir la ressource Rk et l’entreprise m peut fournir la ressource Rm. Ces ressources ne sont pas totalement substituables pour les clients de la firme i, car combinées avec la ressource Ri (de la firme i), elles donnent des résultats différents. 119 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Ainsi, si l’on considère les deux prix et les durées de trajet comme des paramètres fixes, alors la combinaison des ressources donne les outputs suivants: et Par ailleurs, au-delà de la question des ressources, les entreprises sont elles-mêmes de nature différente. L’entreprise m est un concurrent de l’entreprise i, tandis que l’entreprise k n’est pas un concurrent. Afin de rendre notre propos plus clair, nous illustrons nos notations. La firme i correspond à une compagnie aérienne étrangère souhaitant desservir des villes régionales en France. Elle peut s’associer avec une entreprise non concurrente k (la SNCF) qui peut lui donner accès à ces villes pour un faible prix total p mais avec un temps de transport élevé T. L’alternative qui s’offre à elle est de coopérer avec la compagnie aérienne nationale qui est sa concurrente (Air France) en payant un prix plus élevé p en contrepartie d’un temps de transport plus faible t. On peut donc synthétiser les combinaisons de ressources dans le tableau suivant (Tableau 2). Tableau 2. Effets des combinaisons des ressources avec celles de l’entreprise Nom de l’entreprise Entreprise Entreprise 4-1.2 Statut Prix total Temps de trajet total Non-concurrent Concurrent Hypothèses et notations sur la demande On pose l’hypothèse que le marché est composé de deux segments aux caractéristiques très différentes : - Un segment « loisirs », noté l, avec o Une forte sensibilité au prix o Une faible sensibilité au temps 120 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Un segment « business », noté b, avec o Une faible sensibilité au prix o Une forte sensibilité au temps Afin de préciser notre fonction d’utilité, nous introduisons les notations suivantes : - - La variable de prix peut prendre les valeurs - La variable de temps ou . peut prendre les valeurs ou . D’où la fonction d’utilité suivante pour un segment firme coopère avec la firme lorsque la . est une constante positive. mesure la sensibilité au prix du segment . mesure la sensibilité au temps du segment . Par ailleurs, compte-tenu des caractéristiques sur les sensibilités au prix et au temps des différents segments, on a les relations suivantes : et . 4-2 Modèle et résultats 4-2.1 Elaboration de la règle de décision Ce modèle s’intéressant essentiellement au rôle des clients dans le choix des modes relationnels, nous nous demandons quelles sont les circonstances dans lesquelles les clients vont préférer tel ou tel type de coopération. Nous proposons de définir la fonction individu du segment mesurant l’écart d’utilité pour un entre la coopération avec la firme et la coopération avec la firme . 121 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Si l’on note et , alors on peut définir la fonction comme suit : Nous pouvons alors fixer la règle de décision suivante : - Si , alors le client du segment préfèrera l’accord avec l’entreprise à celui avec l’entreprise - Si , alors le client du segment à celui avec l’entreprise - . Si préfèrera l’accord avec l’entreprise . , alors le client du segment sera indifférent entre les deux accords. 4-2.2 De la règle de décision au choix des modes relationnels A partir de la règle de décision, on peut déterminer des droites d’indifférences pour chaque segment. Ces droites permettent de définir des zones où les différents modes coopératifs sont préférés. Ainsi, pour le segment « loisirs », la droite d’indifférence est caractérisée par l’équation . Symétriquement, pour le segment « business », l’équation de la droite d’indifférence est . Si l’on représente graphiquement ces droites d’indifférences dans un repère avec en abscisses et en ordonnées on observe que, compte-tenu des coefficients, la droite d’indifférence des passagers du segment « business » se trouve au-dessus de celle du segment « loisirs ». Graphiquement, l’accord purement coopératif (c’est-à-dire l’accord avec la firme ) sera préféré par le segment pour tout point appartenant à l’aire audessus de la droite d’indifférence. 122 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Ainsi, la zone grisée sur la figure 4a représente l’ensemble des points pour lesquels le segment « loisirs » préfère un accord avec la firme . De même, sur la figure 4b, la zone grisée correspond à l’ensemble des points pour lesquels le segment « business » préfère un accord avec la firme . Ces différentes aires sont représentées sur la Figure 4. Figure 4. Zones de préférence pour les différents modes relationnels pour chaque segment La figure 4c mérite plus d’attention de notre part. On y distingue 3 zones, correspondant à trois ensembles de points. - La zone 1 correspond à un ensemble de points (caractérisés par une faible différence du prix et une forte hausse du temps entre les deux alternatives) qui poussent les deux segments à choisir la mise en place d’un accord avec la firme concurrente . - La zone 2 regroupe des points avec une très importante différence de prix et un faible écart de temps entre les deux alternatives, conduisant 123 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management les deux segments à choisir la coopération avec la firme nonconcurrente . - La zone 3 est caractérisée par une situation intermédiaire où le segment « loisirs » préfère la coopération avec la firme non-concurrente , tandis que le segment « business » préfère une coopération avec la firme concurrente Les résultats associés à ces trois zones sont résumés dans le tableau suivant (Tableau 3). On y observe clairement que certaines formes de coopétition hybrides (mêlant des stratégies de coopétition et des stratégies purement coopératives) sont explicables par les préférences hétérogènes des différents segments du marché et les stratégies de ciblage associées. Tableau 3. Synthèse des modes relationnels préférés par les différents segments Numéro de la zone Mode relationnel préféré par le segment « loisirs » 1 Coopération avec la firme concurrente 2 3 Coopération avec la firme nonconcurrente Coopération avec la firme concurrente Mode relationnel préféré par le segment « business » Configuration organisationnelle Coopération avec la firme concurrente Coopétition avec la firme concurrente Coopération avec la firme nonconcurrente Coopération avec la firme nonconcurrente Coopération avec la firme nonconcurrente Coopétition hybride Nous avons donc réussi, grâce à ce modèle, à reproduire le rôle de la segmentation des clients dans l’émergence de modèle coopératifs plus ou moins complexes. 124 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 5 Conclusion L’objectif de cet article était d’étudier plus en profondeur l’impact de l’hétérogénéité des clients et des stratégies de ciblage dans le choix de certains modes relationnels et donc dans l’émergence de la coopétition. Notre contribution se joue à deux niveaux. D’une part, nous avons étudié le rôle des clients dans le cadre de relations de type B2C et non dans des relations B2B comme dans les travaux précédents. Nous avons ainsi pu montrer que même dans une configuration où une firme est face à de nombreux clients, ceux-ci peuvent jouer un rôle dans l’émergence de certaines formes de coopétition. D’autre part, nous avons essayé de relier les problématiques de segmentation et de ciblage du marché avec la diversité des formes relationnelles. En d’autres termes, nous avons montré que les stratégies de ciblage peuvent pousser les firmes à coopérer avec des firmes concurrentes ou non. Plus spécifiquement, que ce soit avec nos cas ou avec le modèle, nous avons montré que lorsqu’une firme décide de mettre en place une stratégie marketing de couverture (c’est-à-dire de servir tous les segments), elle peut développer des stratégies relationnelles complexes mêlant simultanément coopération et coopétition pour répondre aux besoins des différents segments. L’originalité de cette contribution réside à la fois dans la méthode utilisée (avec l’utilisation d’une étude de cas multiple pour élaborer un modèle algébrique) et dans les résultats obtenus. A travers le troisième cas, nous avons mis en évidence la possibilité pour deux firmes de développer simultanément des relations de coopétition et de coopération suivant le segment considéré. Ce type de stratégie, appelé coopétition hybride, peut être expliqué par une stratégie de ciblage visant à couvrir des segments aux préférences hétérogènes. Notre contribution peut cependant être améliorée de plusieurs manières. D’une part, un inconvénient majeur de ce travail est de s’être concentré uniquement sur les revenus associés à de tels modes relationnels. Ainsi, si l’on pousse la logique du modèle jusqu’au bout, toutes les firmes ont intérêt à mettre en place une stratégie de couverture, pour servir tous les segments et 125 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management donc maximiser ses recettes. Les stratégies de concentration sur un seul segment ne « feraient donc pas sens ». Or la réalité est plus complexe et ces stratégies de concentration ou de contre-segmentation « font précisément sens » si l’on intègre la problématique des coûts. Développer autant de produits que de segments est coûteux pour la firme. Quand bien même ces produits ne seraient pas développés en interne, mais seraient le fruit d’une collaboration, la multiplication des alliances entraînerait une forte augmentation des coûts de coordination. Ainsi, notre démarche et notre modèle gagneraient en pouvoir explicatif s’ils intégraient cette problématique des coûts dans la réflexion sur le choix des modes relationnels. Cela permettrait entre autres de pouvoir établir des recommandations en termes de types de stratégie marketing (couverture vs concentration) à mettre en place. D’autre part, un deuxième axe d’amélioration consiste à renforcer la réflexion sur la nature de nos segments. Le cas étudié ici (le secteur aérien) est associé à une segmentation relativement simple et connue de tous. Nous étions ici dans une configuration où nous avions deux segments dont nous connaissions déjà les caractéristiques. Deux voies d’améliorations sont donc envisageables. La première est de réfléchir à la robustesse de nos résultats si les firmes ne peuvent pas définir de segmentation a priori. Comment une firme peut-elle choisir son mode relationnel si elle ne sait pas selon quels critères segmenter son marché ? La seconde voie consiste à se demander si la multiplication des segments (trois, quatre, cinq,…) va conduire à une multiplication des formes d’accord ou à une saturation. En d’autres termes, cinq segments conduisent-ils à cinq formes relationnelles différentes ou observe-t-on un plafonnement à quelques formes relationnelles traditionnelles ? Cet article a donc été l’occasion d’analyser plus en profondeur le rôle des clients et des stratégies de ciblage dans l’émergence de nouvelles formes de coopétition. Néanmoins, d’autres pistes de recherche sont apparues au cours de notre analyse et nous restons persuadés que l’étude du rôle des acteurs 126 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management externes dans l’émergence de la coopétition demeure un champ de recherche fertile. Références Ancarani, F., Costabile, M. 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Afin d’expliquer ces différences de résultats, nous proposons de distinguer trois types de coopétition (horizontale, verticale ou à la fois horizontale et verticale) et d’évaluer l’impact de chacun d’entre eux sur l’innovation. La recherche empirique est réalisée au sein du secteur de l’édition de jeux vidéo en combinant une méthode qualitative et une méthode quantitative. Les résultats montrent que la coopétition horizontale a un impact positif sur l’innovation-produit. Ils montrent, également, que la coopétition verticale a un impact négatif sur l’innovation-produit. Ils montrent, enfin, que la coopétition à la fois horizontale et verticale, ou « between brand bundle », est celle qui a l’impact le plus fort sur l’innovation-produit. 11 *Correspondance : [email protected]; [email protected]; [email protected]; [email protected] 132 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Mots Clés Coopétition horizontale, coopétition verticale, coopétition double, innovation-produit, bundle, jeux vidéo Abstract Currently the impact of coopetition strategies on the performance of product innovation is subject of academic controversy. While some authors state that coopetition has a positive impact on innovation, others state the opposite. We seek to address this debate by linking different types of coopetition relationship with the performance of product innovation. We argue that a distinction of different types of coopetition strategies: horizontal, vertical, or both horizontal and vertical, is fundamental for assessing the performance of innovation. In order to do so, we undertake a mixed methodological approach, using qualitative and quantitative methods for the study of the video games’ sector. We find out that product innovation can be achieved through a strategy of horizontal coopetition, vertical coopetition or both horizontal and vertical. Additional results show that "between brand bundle" product innovation achieved thanks to a strategy of both horizontal and vertical, is the most efficient form of innovation. Key words Horizontal coopetition, vertical coopetition, product innovation, bundle, video games 133 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Introduction Les entreprises adoptent des stratégies de coopétition pour améliorer leurs processus d’innovation-produit (Gnyawali et Madhavan, 2006 ; Gnyawali et Park, 2009). Mais les stratégies de coopétition permettent-elles effectivement aux firmes d’améliorer leur innovation-produit ? Cette question fait l’objet de controverses. Certains travaux empiriques montrent une relation positive entre l’adoption de stratégies de coopétition et l’innovation-produit (Belderbos et al, 2004 ; Tomlinson, 2010 ; Neyens et al, 2010 ; Ritala, 2012 ; Le Roy et al, 2013). D’autres travaux montrent le contraire (Nieto et Santamaria, 2007 ; Santamaria et Surroca, 2011). Tous ces travaux antérieurs ont en commun de ne pas prendre en compte les types de stratégies de coopétition. La coopétition désigne des relations de coopération entre concurrents directs (Bengtsson et Kock, 2000 ; Le Roy et al, 2010). La coopération peut être horizontale ou verticale (Depeyre et Dumez, 2007 ; Pellegrin et al, 2013). Dans certains cas, les relations de coopération horizontale et verticale peuvent se combiner (Fernandez et Le Roy, 2010 ; Depeyre et Dumez, 2010 ; Chiambaretto, 2011 ; Pellegrin et al, 2013). La question n’est donc plus de savoir si la coopétition est source d’innovation mais plutôt de tenter de déterminer l’impact de chaque type de coopétition sur l’innovation. L’objectif de cette recherche est d’évaluer l’impact des trois types de stratégies de coopétition (coopétition horizontale, coopétition verticale et coopétition horizontale et verticale) sur l’innovation-produit. A cette fin, une étude mixte, qualitative et quantitative, est réalisée sur le secteur des jeux vidéo. Les résultats montrent que la stratégie de coopétition horizontale a un impact positif sur l’innovation-produit. Ils montrent également que la stratégie de coopétition verticale a un impact négatif sur l’innovation-produit. Ils montrent, enfin, que la coopétition simultanément horizontale et verticale a le plus fort impact sur l’innovation-produit. Ce type de coopétition permet d’élaborer un « between brand bundle » qui combine les avantages du bundling et du cobranding. Ces résultats permettent d’expliquer les contradictions entre les recherches antérieures. Ils montrent que l’impact de la coopétition sur l’innovation-produit dépend du type de coopétition qui est établi, horizontale, verticale ou les deux à la fois. C’est la première fois que ces résultats sont mis en évidence dans les 134 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management recherches sur la coopétition. Ils peuvent donc être considérés comme un apport original à la connaissance. 1. Coopetition et innovation-produit 1.1 L’innovation un déterminant stratégies de coopétition majeur des Depuis le milieu des années 1990, le concept de coopétition fait l’objet de nombreux travaux. Après Nalebuff et Brandenburger (1996), Bengtsson et Kock (1999, 2000) définissent les stratégies de coopétition comme une « relation dyadique et paradoxale qui émerge quand deux entreprises coopèrent dans quelques activités, et sont en même temps en compétition l’une avec l’autre sur d’autres activités » (Bengtsson et Kock, 2000, p.412). C’est la définition du concept de coopétition que nous retenons pour cette étude. Elle insiste sur le niveau d’analyse dyadique et sur la simultanéité entre la coopération et la compétition. Dans le contexte économique actuel, l’innovation est un enjeu majeur de compétitivité (Gnyawali, 2006). Pour innover, les firmes ont besoin de ressources. La firme doit faire un choix stratégique. Soit elle s’appuie sur ses ressources internes et développe ses propres innovations. Elle privilégie alors une stratégie individuelle (Penrose, 1959 ; Barney, 1991, D’Aveni, 1995). Soit la firme ne dispose pas des ressources et des compétences nécessaires pour réaliser ses innovations-produits. Elle est contrainte alors de les chercher en externe, au travers de partenariats (Dyer et Singh, 1998 ; Pfeffer et Salancik, 2003). Le développement de nouveaux produits nécessite le recours à des relations de coopérations internes et externes caractérisées par des échanges de connaissances riches, fréquents et réciproques (Lee et Chen, 2007). Un partenaire est intéressant dès lors qu’il dispose d’un portefeuille de ressources et de compétences complémentaires (Gnyawali et Madhavan, 2006). Le degré de complémentarité le plus élevé s’obtient entre firmes concurrentes (Gnyawali et Park, 2009). Cette complémentarité en ressources incite les firmes à adopter des stratégies de coopétition. En adoptant ce type 135 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management de stratégie de coopétition, les entreprises bénéficient à la fois de la compétition qui les stimule pour améliorer constamment leur offre et de la coopération qui leur permet d’avoir accès aux ressources du partenaire. 1.2 La relation entre coopétition et performance de l’innovation La diffusion et l’essor des stratégies de coopétition au sein d’industries de haute-technologie soulèvent des questions. Les stratégies de coopétition représentent-elles des stratégies plus performantes que des relations de coopération simple ou des relations de compétition ? La question fait l’objet de controverses. D’un point de vue théorique, des arguments issus de la théorie des jeux, de l’approche par les ressources et de la théorie des coûts de transaction ont été mobilisés (Lado et al, 1997; Quintana-Garcia et Benavides-Velasco, 2004). D’après la théorie des jeux, les concurrents participent à des jeux positivement créateurs de valeur pour tous les participants (Nalebuff et Brandenburger, 1996 ; Dussauge et al, 2000 ; Tether, 2002). En revanche, du point de vue de la théorie des coûts de transaction, la coopétition apparaît comme une stratégie extrêmement risquée en raison des risques d’opportunisme des acteurs (Park and Russo, 1996 ; Hakansson et Ford, 2002 ; Quintana-Garcia et Benavides-Velasco, 2004). Le risque perçu pourrait même devenir un obstacle à la collaboration entre concurrents (Arranz et Arroyabe, 2008). D’un point de vue empirique, les travaux qui étudient l’impact des stratégies de coopétition sur les processus d’innovation obtiennent des résultats controversés. Pour certains auteurs, la relation entre la coopération et la performance de l’innovation est peu évidente. Les stratégies de coopération entre concurrents semblent avoir un impact négatif sur le degré de radicalité de l’innovation (Nieto et Santamaria, 2007). D’autres recherches montrent même que les stratégies de coopération entre concurrents ont un impact négatif sur l’innovation (Santamaria et Surroca, 2011). Coopérer avec des acteurs non-concurrents permet d’obtenir une meilleure performance d’innovation plutôt qu’en coopérant avec des acteurs concurrents (Nieto et Santamaria, 2007 ; Santamaria et Surroca, 2011). Ce résultat s’explique notamment par la présence de comportements opportunistes et par le manque de confiance entre les rivaux. Les stratégies de 136 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management coopétition ne représentent innover. donc pas la meilleure option stratégique pour Pour d’autres auteurs, la coopétition améliore la performance de l’innovation-produit (Belderbos et al, 2004 ; Tomlinson, 2010 ; Neyens et al, 2010 ; Ritala, 2012 ; Le Roy et al, 2013). Les stratégies de coopétition centrées sur la R&D accroissent les gains d’efficacité (Belderbos et al, 2004). Les liens coopératifs horizontaux sont un facteur explicatif significatif de la performance d’innovation d’une entreprise (Tomlinson, 2010). Pour Neyens et al. (2010), les alliances stratégiques « continues » entre concurrents impactent positivement la performance de l’innovation radicale et les alliances stratégiques « discontinues » entre concurrents impactent positivement la performance de l’innovation incrémentale. Ritala (2012) montre que les stratégies de coopétition sont bénéfiques en termes de l’innovation et de la performance du marché. Enfin, selon Le Roy et al. (2013), la coopération avec un acteur nonconcurrent est performante lorsqu’il s’agit d’un client ou dans un degré moindre, d’une université. Mais les auteurs montrent également que la coopération avec un concurrent obtient de bonnes performances sur l’innovation radicale lorsque le concurrent est européen ou américain. La revue des recherches antérieures montre que certaines d’entre elles établissent un impact négatif de la coopétition sur la performance (Nieto et Santamaria, 2007 ; Santamaria et Surroca, 2011) et d’autres un impact positif (Belderbos et al, 2004 ; Tomlinson, 2010 ; Neyens et al, 2010 ; Ritala, 2012 ; Le Roy et al, 2013). Comment expliquer ces différences de résultats ? 1.3 Les différentes formes de coopétition Le concept de coopétition est protéiforme. La coopétition correspond à une relation de coopération et de compétition simultanées. Lorsque la coopération s’opère sur la même étape de la chaîne de valeur, la coopétition est horizontale (Gnyawali et al, 2008). Deux concurrents directs peuvent également coopérer verticalement. Il s’agit alors d’une stratégie de coopétition verticale (Depeyre et Dumez, 2010 ; Pellegrin et al. 2013). Les firmes peuvent également adopter des stratégies de coopétition double, à la fois horizontale et verticale 137 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management (Fernandez et Le Roy, 2010 ; Depeyre et Dumez, 2010 ; Chiambaretto, 2011, Pellegrin et al. 2013). La coopétition horizontale Nalebuff et Brandenburger (1996) incluent dans les stratégies de coopétition toutes les relations entre les firmes qui peuvent être complémentaires. Cette approche est ensuite restreinte par Bengtsson et Kock (1999 ; 2000). La coopétition est considérée comme un comportement à la fois coopératif et compétitif entre des entreprises qui offrent le même type de produit au même type de clients (Pellegrin et al. 2013). Lorsque la coopération est horizontale, la coopétition est qualifiée de coopétition horizontale (Bengtsson et Kock, 2000 ; Le Roy et al, 2010). Cette relation est représentée dans la figure 1. Figure 1 : la stratégie de coopétition horizontale Coopération horizontale Firme A Firme B Compétition horizontale La coopétition verticale D’autres acteurs s’intéressent à des relations de coopétition où la compétition est horizontale et la coopération verticale (Padula et Dagnino, 2002 ; Depeyre et Dumez, 2010, Pellegrin et al. 2013). Par exemple, un fournisseur de composants électroniques peut coopérer avec un fabricant d’ordinateurs, tout en produisant de son côté des ordinateurs (Chiambaretto, 2011). Les relations de coopération verticale concernent souvent les activités de distribution et la répartition des ressources entre les différents acteurs (Kaplinsky et Morris, 2001 ; Kotzab et Teller, 2003 ; Kovacs et Tatham, 2009). Les relations de coopétition horizontale s’appuient sur une forte interdépendance entre les organisations en raison de la dimension concurrentielle de leur relation (Bengtsson et Kock, 1999). Elles sont moins visibles, plus tacites et plus informelles (Bengtsson et Kock, 1999). Au contraire, les relations de coopétition verticale sont plus visibles, plus formelles et plus contraintes. Elles sont plus facilement identifiables. 138 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La figure 2 suivante présente la stratégie de coopétition verticale. Figure 2 : La coopétition verticale Compétition horizontale Firme A Firme B Coopération verticale Firme B’ La coopétition double Dans certains cas très complexes, deux concurrents directs adoptent à la fois des relations de coopération verticale et horizontale. Les stratégies de coopétition horizontale et verticale se combinent (Fernandez et Le Roy, 2010 ; Depeyre et Dumez 2010 ; Chiambaretto, 2011 ; Pellegrin et al, 2013). Nous qualifions cette stratégie de coopétition double. Fernandez et Le Roy (2010) constatent ce type de coopétition dans l’industrie spatiale. La coopération est à la fois verticale et horizontale. Les entreprises n’hésitent pas à mutualiser des ressources situées sur les mêmes maillons de la chaîne de valeur afin d’en créer des nouvelles, ce qui constitue une véritable dynamique coopérative d’apprentissage entre concurrents (Fernandez et Le Roy, 2010). Depeyre et Dumez (2010) analysent également ce type de relation dans le secteur de la défense américaine. Ils proposent trois typologies de la coopétition où la coopération intervient verticalement dans une relation client/fournisseur : la coopétition imposée par le client ; la coopétition structurellement complémentaires ; la coopétition stratégique. Chiambaretto (2011) étudie une relation caractérisée par une double composante coopérative à la fois verticale et horizontale. L’auteur qualifie cette situation de « relations perpendiculaires ». Pellegrin et al. (2013) identifient des relations similaires dans l’industrie des TIC. Les auteurs proposent une typologie des stratégies de coopétition. Parmi ces stratégies, il existe une possibilité qui consiste à coopérer horizontalement et verticalement avec ses concurrents directs. 139 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Comme le montre la figure 3, la coopétition double combine des relations de coopétition horizontales et verticales. Figure 3 : La coopétition horizontale et verticale Firme A Firme B Compétition horizontale Filiale Coopération verticale Firme B’ S’il semble opportun pour une firme de s’allier pour améliorer son processus d’innovation, quelle forme de coopétition doit-elle privilégier ? Est-il préférable pour la firme de coopérer avec ses concurrents directs, ses clients, ses fournisseurs ou les trois à la fois ? Quelle est la forme de coopétition la plus performante pour innover ? S’agit-il d’une stratégie de coopétition verticale, horizontale ou de coopétition double ? Afin de proposer des éléments de réponse à ces questions, une étude empirique est menée au sein du secteur des jeux vidéo. Composé de firmes intégrées et non-intégrées, ce secteur représente un terrain propice à l’étude des dynamiques inter-organisationnelles croisées, à la fois verticales et horizontales. Cette recherche représente un premier effort de mise en discussion de l’impact des trois types de stratégies de coopétition sur les processus d’innovation. L’objectif est d’identifier le type de stratégie de coopétition la plus performante pour l’innovation-produit. 140 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 2. DESIGN DE LA RECHERCHE 2.1. La méthode La recherche combine une étude qualitative et une étude quantitative (Johnson et Onwuegbuzie, 2004). L’objectif est de mesurer l’impact du type de stratégies de coopétition sur la performance d’innovation. Il s’agit de comprendre le choix des firmes de coopérer avec ses concurrents et/ou avec ses clients et ses fournisseurs. Pour répondre à cet objectif, une démarche qualitative exploratoire puis une étude quantitative confirmatoire sont successivement mises en œuvre (Charreire et Durieux, 2007). La démarche qualitative exploratoire L’étude qualitative de type étude de cas approfondie permet d’améliorer la compréhension d’un phénomène à plusieurs niveaux (Yin, 1994). Elle sert à identifier et caractériser les différentes stratégies au sein du secteur. Cette étude repose sur le traitement de données primaires issues d’entretiens semi-directifs réalisés en face-face. Trente entretiens semidirectifs sont réalisés auprès des directeurs généraux ou du directeur marketing des 21 éditeurs indépendants de jeux vidéo, d’un éditeur de jeux vidéo intégrés, de sept développeurs de jeux vidéo et d’un fabricant de consoles de jeu. Ces entretiens sont réalisés en face à face à l’exception de six entretiens téléphoniques. D’une durée de 1h à 1h30, les entretiens sont intégralement retranscrits mot à mot. Le matériel empirique ainsi constitué fait l’objet d’un processus de codage thématique et d’une analyse de contenu suivant la méthode recommandée par Miles et Huberman, 2003. Une clause de confidentialité est signée avec les acteurs interrogés. L’anonymat des répondants et de leur entreprise est préservé. Un numéro est affecté à chaque répondant selon l’ordre de leur rencontre. Le tableau 1 suivant présente les fonctions des différents répondants. 141 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 1 : Détail des entretiens réalisés Acteurs Fonction Nombre Directeur général 2 Editeurs indépendants Directeur marketing et stratégie 19 Editeurs intégrés Directeur marketing 1 Fabricant de consoles Directeur Hardware (console) 1 Studios de développement Directeur général 7 Total 30 La démarche quantitative confirmatoire L’objectif de l’étude quantitative est d’identifier le type de la stratégie de coopétition qui optimise la performance d’innovation-produit. Pour ce faire, un modèle de régression multi-varié est utilisé. Ce modèle est testé sur une base de données élaborée par nos soins à partir de données secondaires. La collecte de données : Ces données sont issues des rapports annuels des acteurs, d’articles de presse, des sites internet spécialisés. Elles sont également collectées sur les sites internet des éditeurs de jeux vidéo et de fabricants de consoles. La base de données constituée regroupe tous les jeux vidéo réalisés entre 2006 et 2011 par les éditeurs du top 10 mondial à partir d’une stratégie de coopétition, de compétition ou de coopération (cf. Tableau 2). Le modèle de régression multi-varié est testé sur un échantillon composé des 168 jeux vidéo réalisés à partir d’une stratégie de coopétition (horizontale, verticale ou les deux). Ces jeux réalisés en coopétition représentent 25% de l’ensemble des jeux sortis pendant cette période (toutes stratégies confondues). 142 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 2 : Le top 10 des éditeurs mondiaux des jeux vidéo Position 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Editeurs Activision Blizzard Electronic Arts Namco Bandai Konami Sega Square Enix Ubisoft Capcom THQ TakeTwo Origine USA/France USA JAPON JAPON JAPON JAPON France JAPON USA USA Les variables : La performance d’innovation-produit notée Y est mesurée par le chiffre d’affaires. La variable représente le chiffre d’affaires généré par les jeux créés en coopétition. Le « type d’innovation » est mesuré par « l’innovation incrémentale » (X1) et « l’innovation radicale » (X2). Le coût du développement est mesuré par « coût du développement » (X3). Le « nombre de joueurs » est notée (X4). Les trois types de coopétition sont notés ainsi : la coopétition horizontale (X5), la coopétition verticale (X6) et la coopétition à la fois verticale et horizontale(X7). 143 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Le tableau 3 présente les différentes variables utilisées dans le modèle. Tableau 3 : Les variables Variables Variable à expliquer Chiffre d’affaires (Y) Variables explicatives Innovation incrémentale (X1) Innovation Radicale (X2) Coût de développement (X3) Nombre de Joueurs (X4) Coopétition Horizontale (X5) Coopétition Verticale (X6) Coopétition double (Horizontale et verticale) (X7) Le modèle : La performance d’innovation-produit (chiffre d’affaires) est expliquée par: le type d’innovation, le coût du développement, le nombre de joueurs et le type de comportement coopétitif adopté par les firmes. Le modèle est présenté de la façon suivante : Chiffre d’affaires = Cte + β1 Innovation incrémentale+ β2Innovation radicale + β3Coût de développement + β4 Nombre de Joueurs + β5 Coopétition Horizontale+ β6 Coopétition Verticale + β7Coopétition double + ε 2.2. Le cas de l’édition des jeux vidéo Les acteurs de l’industrie des consoles et ceux de l’édition de jeux vidéo sont étroitement liés. Leurs produits sont très complémentaires. Pour jouer à un jeu, seul, en famille ou en réseau, la présence d’une plateforme est indispensable. Aujourd’hui, la console de salon représente l’une des 144 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management plateformes les plus populaires. Elle est devenue un outil multimédia complet qui satisfait tous les types de joueurs. L’industrie des jeux vidéo se compose de deux segments majeurs : la fabrication des consoles et l’édition des jeux vidéo. Cinq acteurs sont identifiés et répartis selon la chaîne de valeur suivante (cf. Figure 4). Figure 4 : Chaîne de valeur globale de l’industrie des jeux vidéo Les fabricants de consoles de jeu sont les deux géants japonais Sony et Nintendo et le géant américain Microsoft. Nintendo est le leader du marché grâce à sa console Wii (48,7% de parts de marché en 2009). Microsoft occupe la deuxième place avec sa console Xbox 360 (29,70% de parts de marché en 2009). Sony occupe la troisième place avec la PlayStation3 (21,6% des parts de marché en 2009). L’édition de jeu vidéo se compose de plusieurs phases : en amont la conception et la production, en aval la commercialisation et le marketing (Gandia et Gardet, 2010). Les studios de développement s’intéressent à la conception et à la réalisation des maquettes des jeux vidéo. Il s’agit principalement de studios de petites tailles. Les éditeurs sont représentés par de grosses structures (Ubisoft, Electronic Arts, Activision-Blizzart, etc.). Leur principal rôle est le financement, l’édition, le marketing et la promotion des jeux. Actuellement, la majorité des éditeurs dispose de ses propres studios de développement. Ils intègrent ainsi l’activité de développement des jeux vidéo. Et enfin, les distributeurs sont représentés par l’ensemble des magasins responsables de la vente des consoles et des jeux vidéo pour le client final. 145 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Le tableau 4 suivant présente les principaux acteurs de l’industrie. Tableau 4. Les principaux acteurs de l’industrie Fabricants de composants électroniques et périphériques IBM Toshiba ATI, etc. Fabricants de Développeurs consoles Nintendo Sony Microsoft Black Lantern Studios Crytek Eden Games, etc. Editeurs Distributeurs ActivisionBlizzard Electronic arts Ubisoft Sega, etc. Maxis Game Telltalegames, etc. L’innovation dans le secteur de l’édition de jeux vidéo La sortie d’un jeu vidéo est aujourd’hui un fait culturel majeur au même titre qu’un film au cinéma, qu’un roman ou que le dernier album d’un chanteur célèbre. Avec des bandes annonces dignes d’une méga-production hollywoodienne, la parution d’un jeu vidéo est un événement médiatique mondial. Pour s’en convaincre, il suffit de constater le succès rencontré par le jeu de guerre « Call of Duty », produit par l’éditeur américain Activision. En 2010, le jeu enregistre des ventes historiques de 6 millions d’exemplaires en 24h rien qu’en Angleterre et aux Etats-Unis. Ce jeu rapportait déjà en 2009 plus de 550 millions de dollars. La compétition entre les éditeurs de jeux vidéo est principalement basée sur l’innovation. Cette course à l’innovation est exacerbée par des produits aux cycles de vie courts. L’estimation de la durée de vie d’une console est de 5 à 6 ans. Notre attention porte principalement sur le secteur de l’édition du jeu vidéo où la durée de vie des produits est plus restreinte. Dans la majorité des cas, elle ne dépasse pas douze mois. Les éditeurs de jeux sont tenus d’apporter des améliorations en continu (nouvelles expériences, des niveaux de jeu supérieurs, etc.) s’ils souhaitent maintenir leur produit sur le marché comme c’est le cas des jeux blockbusters. Les départements Recherche & 146 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Développement et Création & Innovation deviennent alors de véritables ressources stratégiques pour développer la compétitivité des éditeurs de jeux vidéo. Face à un public de plus en plus exigeant, les éditeurs de jeux vidéo et les fabricants de consoles sont à la recherche permanente d’idées et de concepts de jeu de plus en plus innovants. 100% des répondants affirment que le moteur de l’industrie des jeux vidéo est l’innovation. Les acteurs se livrent à une course à l’innovation et à la créativité permanente, comme en témoignent nos répondants : « C’est l’innovation qui fait vivre l’industrie des jeux vidéo. Sinon, les acteurs seraient morts depuis longtemps […] ». Éditeur 4. « […] L’industrie des jeux vidéo est très imprévisible, à tout moment on peut se faire surprendre par une innovation ou la sortie d’un nouveau produit qui peut bouleverser complètement le marché » Éditeur 1. 3. RESULTATS L’étude qualitative met en évidence trois types de stratégies de coopétition pour réaliser un nouveau jeu vidéo : coopétition verticale, coopétition horizontale, ou coopétition double. Dans le premier cas, la coopération se fait exclusivement entre un éditeur de jeux vidéo et un fabricant de consoles (un client concurrent). Dans le deuxième cas, la coopération se fait entre deux éditeurs indépendants de jeux vidéo concurrents. Dans le troisième cas, la coopération se fait entre l’éditeur indépendant et l’éditeur intégré du fabricant de consoles, alors que ces deux acteurs sont a priori concurrents. Nous présentons successivement chacune de ces stratégies de coopétition avant de tester le lien entre chaque type de stratégies de coopétition et la performance de l’innovation-produit. 147 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 3.1. Le within brand bundle : résultat stratégie de coopétition verticale d’une Un bundle est défini par une association entre deux marques. Dans l’industrie des jeux vidéo, il s’agit soit de l’association entre un fabricant de consoles et un éditeur de jeux vidéo indépendant, soit de l’association entre deux éditeurs indépendants pour la création d’un nouveau jeu ou entre un éditeur de jeu et un fabricant de consoles pour rendre son offre de consoles plus attractive. Ils forment alors un bundle. Le jeu inclus dans l’offre doit être un jeu Blockbuster et avoir fait l’objet d’une amélioration de son contenu. Il sera proposé exclusivement au fabricant de consoles avec qui le deal est négocié. La version antérieure du jeu a déjà été proposée aux autres fabricants de consoles. Donc, pour avoir une contribution significative dans le bundle, l’éditeur doit apporter à la coopération une valeur ajoutée. Le fabricant profite ainsi d’une certaine exclusivité. Le responsable hardware du fabricant de consoles interviewé revient sur cet aspect : « […] Un bundle c’est l’association du hardware et du software pour proposer un produit plus attractif aux clients. Dans notre industrie, le bundle sera exclusif entre un éditeur donné et un fabricant de consoles donné. Ce qui veut dire que le fabricant de consoles concurrent n’aura pas le droit d’avoir le jeu en exclusivité » (Fabricant de consoles et Editeur 6) La relation entre le fabricant et l’éditeur se caractérise par une stratégie de coopétition verticale comme le montre la figure 5. Figure 5 : le within brand bundle, résultat d’une stratégie de coopétition verticale 148 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Le bundle ainsi créé est interne à la marque. Il correspond au within brand bundle (Simonin et Ruth, 1995). Grâce à ce type de bundle, les éditeurs de jeux augmentent leurs ventes de jeux vidéo. Ils obtiennent également un cofinancement de leurs campagnes publicitaires. Ils profitent de la coopération avec leur concurrent pour vendre de nouveaux jeux qui mettent des univers et des expériences de jeux uniques. De plus, grâce à cette relation de coopération, l’éditeur indépendant obtient le droit d’utiliser tous les supports médias du fabricant de consoles (i.e. site internet, toutes les publicités de la console, blogs, réseaux sociaux). Il dispose d’accès facilité à des ressources stratégiques pour améliorer sa compétitivité. Tous ces avantages s’ajoutent à sa force commerciale puisqu’il continue de vendre son jeu de base sur les autres plateformes (consoles) sans l’amélioration du jeu proposé au concurrent. Deux éditeurs confirment notre analyse : « […] l’avantage pour l’éditeur, c’est qu’en plus de la vente du jeu avec la console, il vend encore plus de jeux, grâce à la promotion du bundle. Car le fabricant de consoles avec qui le bundle est fait, doit participer à hauteur de 50% au financement de la campagne publicitaire du jeu faisant l’objet du bundle […] » (Éditeur 10) « […] Pour être compétitif, il faut être innovant et original […] » (Editeur 13). 3.2. Le crossover : résultat d’une stratégie de coopétition horizontale Deux éditeurs indépendants concurrents coopèrent pour la création d’un nouveau jeu comme le montre la figure 6. Dans ce nouveau jeu, les personnages les plus connus des deux éditeurs se rencontrent mais dans des expériences différentes. Le nouveau jeu ainsi créé par deux éditeurs concurrents est vendu auprès de l’ensemble des fabricants de consoles. Ici, il n’y a pas d’exclusivité avec un fabricant de consoles puisque deux éditeurs indépendants réalisent le nouveau produit. Cette stratégie permet de dynamiser les ventes des deux éditeurs et d’augmenter leurs parts de marché respectives. 149 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Figure 6 : le crossover : résultat d’une stratégie de coopétition horizontale Coopération Editeur indépendant 1 intégré Editeur indépendant 2 Compétition Par exemple, le jeu de combat « Soul Calibur IV », sorti en 2008, réunit dans une même aventure les personnages emblématiques de deux éditeurs de jeux indépendants. Ezio, le personnage phare du jeu vidéo Assasin’s Creed de l’éditeur Ubisoft, rejoint l’aventure Soul Calibur de l’éditeur japonais NamcoBandai. Ce type de coopération entre concurrents est une source d’innovation-produit majeure dans l’industrie des jeux vidéo, même si les éditeurs hésitent parfois à cause des risques de transferts de connaissances et de savoir-faire. Ainsi, en témoigne l’un de nos répondants : « Nous pouvons faire un bundle ou un Crossover avec un autre éditeur, le principe consiste en l’intégration d’un personnage connu d’un de nos jeux dans un jeu concurrent, ou à l’inverse il nous propose d’intégrer un personnage charismatique d’un de leurs jeux le plus connu dans l’un de nos jeux. Les personnages concernés doivent être du même genre de jeu (aventure, action, combat etc.) […] Ce type de coopération se fait rarement dans notre industrie pour des raisons de sécurité, mais se fait quand même » Editeur 9 3.3 Le between brand bundle stratégie de coopétition double : résultat d’une Dans ce cas, l’innovation-produit repose sur une stratégie en deux étapes. La première étape repose sur une stratégie de coopétition où la relation de coopération est horizontale, c’est-à-dire entre acteurs concurrents (cf. Figure 7). L’éditeur intégré et l’éditeur indépendant coopèrent pour établir un jeu dans lequel ils intégreront des personnages et des univers de leurs deux blockbusters respectifs. Le but est de créer un jeu innovant inspiré de deux jeux triple A, appartenant initialement aux deux partenaires. L’éditeur de jeux 150 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management indépendant pourra notamment intégrer dans son jeu le plus populaire un personnage-phare venant d’un jeu concurrent de l’éditeur intégré. Par exemple, le jeu « Mario et Sonic aux jeux olympiques », est sorti pour la première fois en 2007. Il réunit les deux personnages les plus emblématiques du jeu vidéo. Mario, la mascotte du fabricant de consoles et éditeur de jeux Nintendo et Sonic, le hérisson bleu mascotte de l’éditeur de jeux indépendant Sega. Inspirés des univers de Mario et de Sonic, les deux éditeurs décident de réunir ces deux personnages, a priori concurrents, dans le même jeu pour leur faire vivre des expériences et de nouvelles aventures. Le nouveau jeu est édité exclusivement sur les consoles Wii (console de salon) et DS (console portable). Il connaît un très fort succès auprès des consommateurs avec 10 millions d’exemplaires vendus dans le monde à sa sortie. Nagoya Tsurumi, le président de la filiale américaine et européenne du groupe Sega témoigne de ce succès : « Le partenariat de Mario & Sonic a été un succès phénoménal et nous sommes extrêmement fiers de pouvoir renouveler l'expérience avec Nintendo et ISM à l'occasion des Jeux Olympiques de 2012 de Londres ». Source www.nintendo.com Figure 7 : Première étape du between brand bundle: la coopétition horizontale Concurrence Editeur de jeux vidéo indépendant Editeur de jeux vidéo intégré Coopération horizontale La deuxième étape de création est réalisée à partir d’une stratégie de coopétition où la relation de coopération est verticale, c’est-à-dire entre des acteurs appartenant à deux segments différents de la chaîne de valeur, comme pour le within brand bundle. Dans cette étape, l’éditeur de jeux indépendant associe le nouveau jeu créé à la console du fabricant avec qui le bundle est négocié. La filiale intégrée de ce fabricant de consoles devient coéditeur du nouveau jeu. Cette coopération verticale entre le fabricant de consoles et l’éditeur indépendant a pour finalité d’associer le jeu à la console. Il s’agit de pouvoir commercialiser le nouveau jeu et la console dans une offre groupée innovante et originale. Le fabricant de consoles associé à la création du jeu dispose alors 151 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management du personnage charismatique et très connu, jusqu’alors exclusivement réservé à la console de l’éditeur intégré (cf. Figure 8). Figure 8 : Deuxième étape du between brand bundle : la coopétition verticale Compétition Editeur de jeux vidéo intégré Filiale Filiale Fabricant de consoles de jeux Coopération horizontale : création d’un jeu commun Editeur de jeux vidéo indépendant Coopération verticale Nouveau jeu+console Coopération verticale : Association du jeu à la parconsole deux séquences L’innovation-produit réalisée stratégiques de coopétition horizontale et verticale, correspond au « between brand bundle » (Simonin et Ruth, 1995). Le between brand bundle autorise le fabricant de consoles à améliorer l’attractivité de son offre grâce à la création d’un nouveau jeu avec son concurrent. Il bénéficie d’un personnage héroïque supplémentaire avec des univers et des expériences variés lui étant exclusivement dédiés. Cette exclusivité est signalée au consommateur. L’éditeur indépendant précise la mention suivante sur l’emballage du jeu « en exclusivité sur la console X ». L’augmentation de l’attractivité des fabricants de consoles grâce au between brand bundle apparaît dans le discours des personnes interrogées : « […] Le bundle rend l’offre de la console plus sexy pour attirer les consommateurs. En revanche, le jeu qui va faire partie du bundle doit avoir de vrais attraits, c’est ce que l’on appelle un jeu triple A (un jeu blockbuster) qui se vend en millions d’exemplaires » (Éditeur 9) « […] D’ailleurs les fabricants de consoles coopèrent avec les éditeurs de jeux vidéo, sur un jeu triple A pour vendre plus de consoles… » (Éditeur 8) 152 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 3.4 La performance de l’innovation-produit L’analyse quantitative permet de mettre en évidence le type de stratégie la plus performante pour réaliser une innovation-produit dans l’industrie des jeux vidéo. La qualité globale du modèle Comme le présente le tableau 5, le modèle explique 76% de la variance du chiffre d’affaires (R² ajusté). Il peut donc être considéré comme significatif. Tableau 5 : Qualité globale du modèle Modèle 1 R ,876 a R-deux R-deux ajusté ,768 ,760 La variable coopétition a trois modalités exclusives. Parmi les trois, deux peuvent être retenues simultanément dans l’analyse afin d’éviter les biais. Les tests sont effectués sur deux modalités à la fois. L’ensemble des combinaisons est testé (cf. Tableau 6). Tableau 6 : Performance d’innovation-produit (C.A) Variables Coopétition horizontale Coopétition double (horizontale et verticale) Innovation incrémentale Coût de développement Nombre de joueurs Coefficients standardisés Bêta ,094* T (Student Sig. ) 1,983 ,049 ,207** 4,092 ,000 ,054 ,187** ,658** 1,312 3,902 13,255 ,191 ,000 ,000 *Significatif à 5%**Significatif à 1% 153 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La stratégie de coopétition verticale a un impact négatif sur l’innovationproduit (-,097*) avec un seuil de 5%. Ce résultat peut s’expliquer par la nature du produit. Le jeu intégré exclusivement à la console n’est qu’une version améliorée d’un jeu précédent. Les joueurs connaissent déjà la version précédente du jeu et montrent moins d’engouement pour cette fausse nouveauté. La coopétition horizontale et la coopétition double ont toutes les deux un impact positif sur la performance d’innovation-produit. En revanche, l’impact de la stratégie de coopétition double est supérieur à celui obtenu dans le cas d’une stratégie de coopétition horizontale. Les « between brand bundles », résultant d’une stratégie de coopétition à la fois horizontale et verticale, représentent une véritable nouveauté pour les clients. Il n’existe pas de version antérieure du jeu. Ces bundles sont perçus comme de véritables innovations radicales par les joueurs. Même avec ces résultats, les éditeurs de jeux vidéo restent frileux à cette pratique. Selon les autres variables, le nombre de joueurs a un effet positif sur le chiffre d’affaires. Au contraire, le type d’innovation n’a pas d’effet significatif sur la performance d’innovation-produit. L’innovation incrémentale ne respecte pas le seuil de significativité. 4. DISCUSSION Cette recherche s’intéresse à l’impact des différentes stratégies de coopétition sur la performance de l’innovation-produit. L’étude qualitative confirme l’existence de trois types de stratégies coopétitives mobilisées par les éditeurs de jeux vidéo pour développer une innovationproduit : la coopétition horizontale avec un concurrent direct, la coopétition verticale avec un client-concurrent et la coopétition simultanément horizontale et verticale que nous avons nommée coopétition double. Chaque type de stratégie de coopétition conduit à une forme d’innovation-produit spécifique. L’étude quantitative mesure l’impact de chaque type de stratégie de coopétition sur l’innovation-produit. 154 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management A partir des résultats il est possible d’affirmer que la stratégie de coopétition double est la plus performante. Le tableau 7 présente une synthèse des résultats. Tableau 7 : synthèse des résultats Type de coopétition Type d’innovationproduit Impact sur la performance Verticale Horizontale Double Within brand bundle Codéveloppement Between brand bundle - + ++ Les résultats montrent que la coopétition verticale a un impact négatif sur la performance de l’innovation-produit. Ils sont cohérents avec les recherches qui montrent qu’il vaut mieux éviter de coopérer avec ses concurrents et qu’il est donc préférable de coopérer avec des acteurs nonconcurrents pour réaliser une innovation-produit (Nieto et Santamaria, 2007 ; Santamaria et Surroca, 2011 ; Tomlinson, 2010). L’impact négatif des stratégies de coopétition verticale sur l’innovationproduit s’explique par le fait que le nouveau produit exclusivement proposé à un client concurrent n’est pas nouveau pour le consommateur. Le consommateur ne perçoit pas le nouveau jeu comme inédit. Il connaît déjà les versions antérieures du jeu, disponibles chez d’autres concurrents. Le consommateur est moins séduit par la nouveauté. En accord avec de nombreux travaux antérieurs (Belderbos et al, 2004 ; Tomlinson, 2010 ; Neyens et al, 2010 ; Ritala, 2012 ; Le Roy et al, 2013), les résultats soulignent l’impact positif des stratégies de coopétition horizontale sur la performance d’innovation. La collaboration avec un concurrent direct se traduit dans l’industrie des jeux vidéo par une stratégie de co-développement entre deux éditeurs indépendants. Le crossover est l’innovation-produit résultant de ce co-développement. L’étude montre que les stratégies de coopétition double permettent aux firmes d’obtenir une meilleure performance de leur innovation-produit. Dans l’industrie des jeux vidéo, coopérer avec le fournisseur intégré du client concurrent s’avère plus profitable. L’éditeur indépendant collabore avec l’éditeur intégré du fabricant de consoles pour le développement d’un nouveau 155 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management jeu. Ce dernier sera dédié exclusivement au fabricant de consoles qui a contribué à sa création. Les acteurs s’associent suivant une logique de complémentarité des ressources et des compétences. L’innovation-produit qui résulte de cette stratégie est appelée un between brand bundle. Cette innovation-produit obtient de meilleures performances que le crossover. En effet, le consommateur perçoit le between brand bundle comme une réelle nouveauté, très attractive. Il est davantage séduit par cette association entre deux marques qu’il apprécie. Le between brand bundle combine ainsi les avantages du bundling et du cobranding. L’étude réalisée permet de répondre à la question : Quel est le type de coopétition le plus performant pour réaliser une innovation-produit ? Au regard des résultats obtenus il n’est pas intéressant de s’allier avec un client pour réaliser une innovation-produit performante dans l’industrie des jeux vidéo. Au contraire, il est préférable de s’allier avec un concurrent direct. Mais la coopération avec le fournisseur intégré du client représente la solution optimale pour la firme. Cette stratégie maximise la performance de son innovation-produit. Si la relation entre coopétition et performance de l’innovation est discutée dans les travaux antérieurs, nous montrons ici que cette question doit prendre en compte le type de stratégie de coopétition mise en œuvre. La stratégie de coopétition verticale a un impact négatif. La stratégie de coopétition horizontale a un impact positif. La stratégie de coopétition double apparaît comme la stratégie de coopétition la plus performante pour l’innovation-produit parmi les trois types de stratégie de coopétition étudiés. L’étude approfondie de la stratégie de coopétition double complète les travaux antérieurs (Depeyre et Dumez, 2010 ; Fernandez et Le Roy, 2010 ; Chiambaretto, 2011, Pellegrin et al. 2013). L’évaluation de cette stratégie sur la performance de l’innovation-produit représente une contribution originale. Les résultats de l’étude participent ainsi à la construction de la théorie de la coopétition. 156 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management CONCLUSION La relation entre les stratégies de coopétition et l’innovation-produit est discutée empiriquement. Certains travaux antérieurs montrent une relation positive entre l’adoption des stratégies de coopétition et la performance d’innovation (Belderbos et al, 2004 ; Tomlinson, 2010 ; Neyens et al, 2010 ; Ritala, 2012 ; Le Roy et al, 2013). Au contraire, d’autres montrent que les stratégies de coopération avec des concurrents ont un impact négatif ou nul sur la performance de l’innovation (Nieto et Santamaria, 2007 ; Santamaria et Surroca, 2011). Compte tenu de la controverse existante, il est possible de se poser la question suivante : Les stratégies de coopétition sont-elles source de performance d’innovation ? Pour apporter des éléments de réponse à cette question, la recherche s’intéresse aux relations entre les différents types de stratégies de coopétition et la performance de l’innovation-produit. Les résultats affirment que la coopétition verticale a un impact négatif sur la performance de l’innovation-produit. Au contraire, les stratégies de coopétition horizontale ont un impact positif sur la performance de l’innovation-produit. Mais, c’est grâce à une stratégie de coopétition à la fois horizontale et verticale que les firmes obtiennent une meilleure performance. La coopétition double maximise la performance de l’innovation-produit. Dans l’industrie du jeu vidéo, c’est avec le fournisseur intégré du client qu’il est préférable de collaborer. Cette stratégie permet d’élaborer une innovationproduit appelée between brand bundle. Ce type de bundle combine les avantages à la fois du bundling et du cobranding. Les résultats obtenus doivent être nuancés par les limites de la recherche. Les résultats sont empiriquement ancrés. Ils sont obtenus premièrement au travers d’une étude de cas unique. Cependant, l’industrie du jeu vidéo est un cas exemplaire d’industrie de hautetechnologie. Ce même caractère exemplaire peut être attribué au cas des éditeurs de jeux vidéo. Nous pouvons émettre l’hypothèse que des résultats similaires pourront être obtenus dans d’autres industries innovantes. Seules de futures recherches corroboreront ou infirmeront ces résultats. 157 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Deuxièmement, cette recherche se limite à l’identification de cette stratégie de la double coopétition. Il serait intéressant de l’intégrer dans de futurs travaux pour en étudier ses caractéristiques managériales : La stratégie de double coopétition crée-t-elle des tensions ? Comment sont-elles gérées par les managers ? Références Arranz, N., & Arroyabe, J. (2008). The choice of partners in R&D cooperation an empirical analysis of Spanish firms. Technovation, (28), 88-220. Aveni, (D’) R. (1995). Hypercompétition, Paris, Vuibert. Barney, J. B. (1991). Firm resources and sustained competitive advantage. Journal of Management, 17 (1), 99–120. Belderbos, R., Carree, M., Diederen, B., Lokshin, B., Veugelers, R., (2004) in press. Heterogeneity in R&D cooperation strategies. International Journal of Industrial Organization. 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Néanmoins, le succès de l’industrie repose sur la maîtrise de différentes phases : le renouvellement du produit, l’adaptation de l’outil de production, et une distribution efficace relayant les tendances du marché. La mode peut donc être facteur de profits si l’instabilité qu’elle génère est maîtrisée. Mais elle peut aussi être une menace pour les entreprises, compte tenu de la multitude des comportements d’achat. Un tel contexte à fort degré d’incertitude rend indispensable une réflexion sur les stratégies menées par les entreprises. Ont-elles intérêt à se regrouper et à coopérer pour faire face aux instabilités de leur marché ? Un premier éclairage à travers les stratégies collectives d’Astley et Fombrun (1983) semble être pertinent mais peut manquer d’ambition. Nous pensons que ce concept peut-être élargi à celui de la coopétition dans la mesure où les relations inter-organisationnelles ont une double dimension. Il peut en effet exister dans une même filière une succession de logiques coopératives et de logiques concurrentielles. L’objectif est de comprendre ce qui se passe dans le secteur du prêt-àporter français. L’article, basé sur une étude qualitative, vise à définir les stratégies mises en œuvre par les entreprises, et les positions relationnelles au sein de la filière selon que les firmes coopèrent ou restent concurrentes. 164 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management L’analyse vise également à mettre en avant des niveaux de relations intermédiaires à la coopération et à la compétition, tel que la coordination. Mots clés Coopétition, coordination, prêt-à-porter, stratégies collectives. Abstract The ready-to-wear industry has a major function in the economic, social and cultural universe of our society. Nevertheless, the success of this industry is based on the control of various phases: the renewal of the product, the adaptation of the production tool, and an efficient distribution. Fashion can be a factor of profits if the instability which it generates is well managed. But it can also be a threat for companies, considering the multitude of purchasing behaviors. This context of uncertainty makes essential a reflection on companies’ strategies. Should they group together and cooperate to face the instabilities of their market? A first lighting through the collective strategies of Astley and Fombrun (1983) seems to be relevant but can be lacking ambition. We think that this concept could be linked with the concept of coopetition. It can exist in the same industry a succession of cooperative and competitive logics. The objective is to understand what is taking place in the French readyto-wear industry. The article, based on a qualitative approach, aims at defining the strategies implemented by companies, and relational positions in the industry. The analysis puts forward intermediate relations levels between cooperation and competition, such as coordination. Key-words Collective strategies, coopetition, coordination, ready-to-wear. 165 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Introduction L’industrie du prêt-à-porter a une fonction capitale dans l’univers économique, social et culturel de notre société (Tarde, 1890 ; Simmel, 1895; Maffesoli, 1988 ; Kaiser, 1990 ; Marion, 1999 ; Lipovestky, 2006). Au-delà des strass et paillettes, il s’agit d’un secteur important qui comprend plus de 4 000 entreprises, dont 600 de plus de 20 personnes, et réalise un chiffre d’affaires de 10 milliards € HT en 200912. Néanmoins, la subjectivité liée à la partie créative du produit multiplie les risques de ne pas répondre aux attentes du consommateur. Le succès de l’industrie repose donc sur la maîtrise de différentes phases : le renouvellement du produit par la création, l’adaptation de l’outil de production aux aléas de la mode, et une distribution efficace relayant les tendances du marché. La mode peut donc être facteur de profits si l’instabilité qu’elle génère est maîtrisée. Mais elle peut aussi être une menace pour les firmes, compte tenu de la multitude des comportements d’achat. Un tel contexte à fort degré d’incertitude rend indispensable une réflexion sur les stratégies menées par les entreprises. Ont-elles intérêt à se regrouper et à coopérer pour faire face aux instabilités de leur marché ? Un premier éclairage à travers les stratégies collectives d’Astley et Fombrun (1983) semble être pertinent mais peut manquer d’ambition. Nous pensons que ce concept peut-être élargi à celui de la coopétition dans la mesure où les relations inter-organisationnelles ont une double dimension. Il peut en effet exister dans une même filière une succession de logiques coopératives et de logiques concurrentielles. Si cela s’avérait être le cas dans le cadre du secteur du prêt-à-porter, les entreprises seraient donc en situation de coopétition au sens de Nalebuff & Brandenburger (1996), c’est-à-dire coopérant et partageant les incertitudes liées à leur environnement sur certaines activités, mais restant néanmoins concurrentes sur d’autres activités. Elles pourraient alors bénéficier des avantages compétitifs qui découlent à la fois de la coopération et de la compétition (Bengtsson & Kock, 2000 ; Dagnino & Padula, 2002 ; Paché & Medina, 2007). 12 Données UNEDIC au 30 avril 2009 166 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management L’objectif est de comprendre ce qui se passe dans le secteur du prêt-àporter français. L’article, basé sur une étude qualitative, vise à définir les stratégies mises en œuvre par les entreprises, et les positions relationnelles au sein de la filière selon que les firmes coopèrent ou restent concurrentes. Ainsi, en amont de la filière, la présence de bureaux de style permet aux firmes de procéder à des activités de veille marketing. Cependant, cette volonté de coordination et de centralisation des activités du secteur ne s’effectue pas à tous les niveaux. La logistique est par exemple fortement externalisée et les projets collectifs dans ce domaine ne semblent pas intéresser les firmes qui poursuivent des actions individuelles dans ce domaine. En poussant l’analyse, il s’avère que les relations entre entreprises dans le cadre de la coopétition ne sont pas toujours coopératives et compétitives, mais peuvent être à mi-chemin entre les deux, on parle alors de coordination. Nous verrons dans un premier temps que les stratégies collectives permettent aux entreprises de maîtriser l’instabilité de leur milieu, mais que celles-ci n’excluent pas pour autant la compétition. Le concept de stratégie collective peut donc être élargi à celui de coopétition. Nous illustrerons notamment cette dualité relationnelle en nous appuyant sur le secteur du prêt-à-porter. Enfin, dans une dernière partie nous proposerons des éléments de discussion pouvant venir enrichir les concepts théoriques précédemment présentés. 1. Cadre théorique Les relations inter-organisationnelles sont par nature concurrentielles dans la mesure où chaque entreprise développe une stratégie qui lui est propre dans le but de réaliser les meilleurs résultats et d’assurer sa croissance dans un secteur d’activité donné. L’entreprise est donc en interaction avec son milieu et entretient des relations compétitives voire conflictuelles avec d’autres entreprises de son secteur. En se mesurant sans cesse les unes aux autres, elles sont parfois tentées de fausser les règles du jeu et d’avoir des comportements opportunistes. La concurrence est néanmoins nécessaire afin d’assurer le bon fonctionnement d’un secteur et dynamiser l’activité des entreprises. Dans ces 167 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management conditions, l’entreprise est une entité agissant individuellement et mettant en œuvre des stratégies pour assurer sa position ou sa survie dans un secteur. Or, limiter les relations inter-organisationnelles à de la compétition s’avère très réducteur. Penser l’organisation c’est aussi l’envisager dans le cadre de coopérations éventuelles avec d’autres entreprises. 1.1. De la stratégie collective… Astley & Fombrun (1983) définissent les relations inter-entreprises à travers le concept de stratégie collective. Celle-ci est une réponse globale proposée par un ensemble d’organisations qui collaborent durablement entre elles en vue d’absorber l’instabilité que génère leur environnement. Autrement dit, il existe une « mobilisation commune de ressources et la formulation de l’action au sein de collectivités d’organisations » (Yami & Le Roy, 2006). Astley & Fombrun (1983) distinguent différents types de stratégies collectives en retenant deux critères principaux : d’une part, la nature des entreprises et le type de relations existant entre ces dernières, ce qui permet de distinguer entre stratégies « commensales » (entre entreprises concurrentes dans une relation horizontale) et stratégies « symbiotiques » (entre entreprises complémentaires dans une relation verticale) ; d’autre part, le caractère direct ou indirect des stratégies, repéré en fonction de la définition éventuelle des bénéfices économiques retirés par chacun des partenaires. Au final, quatre types de stratégies collectives peuvent être identifiés, comme l’indique le tableau 1. Tableau 1 : Les quatre stratégies collectives identifiées Types d’association Directe Indirecte Commensale Symbiotique Confédérée Agglomérée Conjuguée Organique (Source : d’après Astley & Fombrun, 1983, p.580) 168 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Les stratégies confédérées se retrouvent dans des environnements très concentrés où coexiste un petit nombre d’entreprises (fusions, joint-ventures). Les stratégies agglomérées se développent plutôt dans des milieux constitués de nombreuses entreprises de petite taille où des organismes centraux (GIE, syndicats, fédérations) vont coordonner le secteur. Les stratégies conjuguées s’appuient sur des contrats directs pour mettre en place des activités (donneur d’ordres et sous-traitants). Enfin, les stratégies organiques sont des engagements mutuels dans un réseau d’entreprises aux activités complémentaires. Joffre & Koenig (1992) montrent que les entreprises entrent dans une démarche de coopération lorsqu’elles s’aperçoivent que le seul moyen d’assurer leur propre survie est de se préoccuper de la survie du secteur en initiant des « conduites de solidarité ». Autrement dit, « les acteurs qui appartiennent à un même système sont à la fois en situation de concurrence pour des ressources limitées et solidaires dans la nécessité d’éviter la destruction du système » (Joffre & Koenig, 1992). Cette citation fait écho au concept de coopétition. Les relations inter-organisationnelles sont complexes et ne se résument pas seulement à des rivalités ou des échanges. Les entreprises peuvent ainsi se retrouver en situation de coopérer afin de réduire l’instabilité sectorielle, mais rester concurrentes, notamment sur des fonctions pouvant être considérées comme stratégiques. Opter pour une analyse unidimensionnelle des relations entre entreprises reviendrait à occulter la complexité et la richesse des échanges interorganisationnels. 1.1. …A la coopétition Dans ces conditions, limiter notre cadre théorique aux stratégies collectives serait réducteur. Il est donc nécessaire d’étudier les entreprises à des niveaux relationnels différents afin d’appréhender au mieux leur complexité et les actions engagées. Martinet (1994) considère que les relations entre entreprises ne sont pas purement conflictuelles ou coopératives, mais peuvent revêtir ces deux dimensions. Position que rejoignent Nalebuff & Brandenburger (1996) avec la notion de coopétition selon laquelle les entreprises coopèrent et partagent les incertitudes liées à leur environnement, mais restent néanmoins concurrentes : 169 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management « La rivalité peut rôder sous la surface de la coopération, et cependant la coopération avoir le dessus et adoucir la rivalité » (Mintzberg et al., 1999). Selon Martinet (1994), « tout choix stratégique contient, qu’on le veuille ou non, un positionnement sur le continuum lutte / coopération à l’égard des parties prenantes concernées ». L’équilibre entre lutte et coopération s’articule selon l’intensité du pouvoir entre les entreprises. Hamel et al. (1989) présentent la coopération comme une continuité de la concurrence, et si l’on coopère, c’est parce que l’on veut éviter des conflits, potentiellement fatals, avec d’autres entreprises. On peut donc envisager la coopération et la compétition comme des phases dans la vie d’une organisation. Hunt (1997) montre ainsi que des entreprises concurrentes peuvent être des partenaires et bénéficier d’avantages qui découleront à la fois de la compétition et de la coopération. Bengtsson & Kock (2000) avancent quant à eux que l’avantage de la coopétition résulte de la combinaison de la pression concurrentielle (issue de la compétition) et de l’accès aux ressources (issu de la coopération). D’une part, la concurrence entre entreprises les oblige à prendre des mesures pour obtenir la meilleure position sur le secteur ; cette pression permettra d’être toujours plus innovant afin de garder sa position de leader sur le marché. D’autre part, la coopération permet aux entreprises de gagner en compétences et en ressources nouvelles ; elles pourront ainsi bénéficier de moyens et de savoirs pour développer des produits à des coûts moins élevés dans la mesure où chaque acteur y participe. L’enjeu de cette recherche est ainsi d’illustrer ce phénomène coopétitif par la présentation du secteur textile-habillement. Les relations duales, compétitives et coopératives, que l’on y observe permettent de mieux cerner l’étendu de ce concept. 2. Méthodologie Cette recherche a été menée au sein du secteur du prêt-à-porter français, dont nous proposons une brève présentation dans l’encadré ci-dessous. 170 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La filière du textile-habillement se compose de deux industries (Source : Sessi, 2007). L’industrie textile a joué un rôle essentiel pendant la Révolution industrielle. Elle est désormais en déclin dans l’ensemble des pays industrialisés et 30 % des entreprises ont disparu. L’habillement regroupe deux grands types d’industries : L’industrie du luxe regroupe « des articles de haute qualité, à marché très ciblé et de faible diffusion comme la haute couture, mais aussi certains segments de secteurs comme ceux de la maroquinerie, de la bijouterie, de la lunetterie, des parfums, voire des arts de la table et de l'horlogerie ». L’industrie de la mode comprend les activités de « fabrication de vêtements, d’articles chaussants et de pulls, d’articles de maroquinerie, de chaussures, de parfums et de bijoux ». L’industrie du luxe se distingue de l’industrie de la mode par la qualité du matériel utilisé et le savoir-faire. Notre recherche se focalise principalement sur l’industrie de la mode, et plus particulièrement du prêt-à-porter, dans la mesure où il représente la part la plus importante de l’industrie de la mode avec plus de 40% du chiffre d’affaires réalisée majoritairement par des PME qui font 91 % du chiffre d’affaires. Notre recherche traitant des relations entre acteurs dans la filière du prêt-à-porter, le sujet s’avère délicat, notamment dans un secteur où la concurrence est très élevée. Le taux de refus peut-être important, et l’échantillon dépend donc fortement du nombre d’acteurs acceptant ou non les entretiens. Nous avons également souhaité multiplier les points de vue en interviewant des personnes situées à des niveaux différents au sein de la filière pour en comprendre son fonctionnement. La position de certains acteurs a notamment nécessité cette prise de position. Ainsi, les bureaux de style se positionnent à un niveau national voire mondial, tandis que d’autres acteurs se situent à un niveau régional. Nous avons également pris en compte le point de vue des entreprises afin de connaître leur position. Le fait d’avoir un échantillon hétérogène permet d’assurer une réelle signification aux résultats obtenus : « l’hétérogénéité exerçant une influence négative sur la significativité de l’effet, si la relation 171 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management apparaît significative malgré cet inconvénient, alors les résultats peuvent faire l’objet d’une généralisation » (Thiétart, 2007, p.202). L’analyse est de nature qualitative. La collecte des données a été réalisée à partir de données primaires issues d’entretiens semi-directifs et de données secondaires provenant de revues professionnelles spécialisées. Les entreprises de mode étant localisées dans un nombre restreint de régions françaises, nous avons sélectionné des acteurs à la fois au niveau national, mais également au niveau régional. Vingt-quatre entretiens ont été effectués avec les principaux acteurs du secteur du prêt-à-porter : fédérations nationales, syndicats professionnels régionaux, entreprises membres, associations et instituts professionnels, bureaux de style, stylistes. Le pôle textile-habillement en PACA a été privilégié. Cette zone géographique se caractérise en effet par une histoire forte en matière d’habillement, et de nombreux organismes professionnels et projets collectifs s’y développent. Les Bouches-du-Rhône concentrent 34 % des établissements de la filière textile-habillement de la région PACA et 37,8 % des emplois (Chambre de Commerce et Industrie, 2007). L’industrie textile regroupe des activités telles que l’impression sur tissus, la fabrication de tissus techniques, etc. L’industrie de la confection est composée quant à elle d’entreprises de prêt-à-porter masculin et féminin (J.J. Garella, Parakian, Madame Zaza of Marseille, etc.), sportswear (Sugar, Olly Gan, etc.), vêtements de sport (Sun Valley, etc.). Marseille représente notamment le pôle régional majeur de cette filière : un établissement sur cinq y est implanté et plus de 23% des emplois régionaux du textile et de l'habillement sont marseillais (INSEE, 2003). Les entretiens ont été conduits en face à face de manière individuelle, enregistrés, puis retranscrits dans les meilleurs délais de manière à préserver la qualité de l’information (Romelaer, 1999). Après une lecture flottante des entretiens et la formulation d’objectifs d’étude, nous avons effectué une analyse de contenu. Celle-ci s’est composée autour de trois thématiques : le secteur (caractéristiques, principaux acteurs et perspectives), les relations entre acteurs (les rôles et missions des acteurs, les types de relation, l’absence de relation), les stratégies engagées (niveau de la stratégie et fonctions concernées). 172 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 1. Résultats L’analyse des entretiens a permis de faire ressortir des résultats intéressants concernant les relations inter-organisationnelles au sein d’une filière traditionnelle. Nous avons pu ainsi observer deux niveaux relationnels illustrant une situation de coopétition dans le secteur. 1.1. Petite histoire de la coopétition dans le secteur du textile-habillement La mode n’est pas due au hasard, elle est « un choix collectif » (Erner, 2006, p.145). Ces choix collectifs sont notamment l’œuvre d’acteurs intermédiaires (Hirsch, [1972], Abrahamson, [1996], Warnier et Lecocq, [2004]). Il faut « suggérer la consommation de demain et réduire l’incertitude de la production… pour vendre plus, encore plus, toujours plus ! » (Cuvillier, 2008, p.94). C’est pourquoi apparaît en 1961 le cahier de tendances : un cahier répertoriant un ensemble d’information sur les tendances de mode, et permettant aux entreprises de construire méthodologiquement leur collection. Si l’ « on manipule les consommateurs en leur donnant envie de couleurs, de tendances et de produits nouveaux, les industriels seront obligés de proposer ces nouveautés au risque de déplaire et de disparaître » (Cuvillier, 2008, p.98). Warnier et Lecocq (2004) ont notamment mis en évidence le rôle clé du bureau de style. Ils ont ainsi montré que ces derniers ont acquis une véritable compétence en matière de définition des tendances, faisant d’eux des acteurs incontournables et essentiels de la filière. Les cahiers de tendances qu’ils diffusent sont des sortes de « prophétie autoréalisatrice » puisque l’ensemble des acteurs s’accordent sur les tendances à venir (Warnier et Lecoq, 2004, p.13). Au travers des cahiers de tendances qu’ils éditent, les bureaux de style ont su développer une véritable offre créative pour les entreprises du prêt-à-porter et une base de travail commune à tous les acteurs de la filière. Ces mêmes bureaux de style se coordonnent également concernant la définition des couleurs (Dari, 2010). La production textile fait donc elle aussi 173 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management l’objet d’un consensus afin que seuls les couleurs et matières correspondant aux tendances définis soient conçus. Une fois par an les bureaux de style se rencontrent afin de se mettre d’accord sur les couleurs de la prochaine saison. Les nombreux salons et défilés sont également des moments de rencontres entre entreprises de la filière au travers desquels une influence indirecte s’établit. Un travail démocratique se met en place afin d’homogénéiser l’offre et optimiser le réseau. Tout l’enjeu est d’éviter une production de matières premières qui ne pourrait pas être écoulée, car en inadéquation avec les attentes du marché. Les bureaux de style qui coordonnent une partie de la filière peuvent donc être considérés comme des «relais» au sens de Crozier et Friedberg (1977). Autrement dit un réseau d’acteurs structurés qui deviennent indispensables à l’action de l’entreprise : «Bras allongés de l’environnement face à l’organisation, les relais sont aussi les agents de celle-ci dans l’environnement (…). Ces relais sont en position de force face à l’organisation: ils sont des réducteurs d’incertitude indispensables» (Crozier et Friedberg, 1977, p.168). Si l’industrie de la mode semble être un milieu très créatif, force est de constater que la définition des tendances est fortement centralisée. Les nombreux échanges directs et indirects entre les acteurs de la filière « sont autant d’occasions de construire une "doxa", une opinion commune » (Erner, 2006, p.121). Nous assistons ainsi à une standardisation des tendances qui permet de stabiliser le secteur. Si les industriels semblent coopérer sur des fonctions considérées comme stratégiques, telles que la conception de nouveaux produits, elles poursuivent parallèlement des stratégies qui leurs sont propres concernant la logistique de distribution. Alors que les activités relatives à la logistique sont massivement soustraitées à des prestataires de services dans des secteurs d’activité comme les biens de grande consommation, elles restent très fortement internalisées dans la filière textile–habillement. Cependant, le renouvellement rapide des produits (six collections par an au lieu de trois) et le contexte socio-économique de la filière (concurrence internationale, évolution des attentes de consommation, externalisation de la production, modification des circuits de distribution) nécessitent une remise en question de la gestion des flux. Les entreprises doivent désormais maîtriser l’aval de la filière afin de remplacer les anciens produits et de diffuser la nouvelle mode, en tenant compte des 174 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management rythmes de production de plus en plus courts et des flux de collection continus. Cela les oblige à garantir une maîtrise de leurs flux physiques et d’informations, à mettre en place une organisation réactive pour faire face à l’obsolescence rapide des produits, et à raccourcir les délais de planification, de production et de livraison. Les entretiens effectués montrent que les firmes tendent à se recentrer sur leur cœur de métier. Certaines vont sous-traiter une partie de leur logistique et conserver certaines fonctions, tandis que d’autres vont externaliser toute leur logistique. La logistique demeure une activité nouvelle pour les entreprises et ses enjeux ne sont pas toujours maîtrisés. Elle est réalisée pas à pas, par l’intermédiaire de prestataires logistiques, ou parfois de façon très artisanale et individuelle dans chaque entreprise. Elle ne fait donc pas partie de la culture sectorielle des entreprises et la priorité reste donnée à la création des collections (Dari, 2010). La logistique dans le prêt-à-porter reste spécifique. Elle en est à ses débuts et les entreprises n’en maîtrisent pas toutes les possibilités. Nous pouvons ainsi identifier dans le tableau 2 trois types de gestion de la logistique. Tableau 2 : Types de logistique dans le secteur du prêt-à-porter Logistique artisanale Logistique internalisée Pas d’investissements Investissements en ressources logistiques : entrepôts, salariés, informatique, etc. Travail manuel Absence de compétences logistiques Peu de volumes à traiter Volonté de la direction de maîtriser l’activité en interne Volumes importants Logistique externalisée Pas d’investissements Recentrer sur le cœur de métier Diminuer les coûts Bénéficier de compétences logistiques Volumes importants (Source : Dari, 2010) 175 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Parmi l’ensemble des entreprises, certaines externalisent donc tout ou partie de leur logistique. Chaque entreprise se trouve néanmoins à des stades d’avancement différents en la matière. Chacune s’engage donc dans des stratégies individuelles, en fonction de son histoire et de sa culture, ce qui permet de comprendre pourquoi la logistique ne fait pas l’objet de coopération avancée (tableau 3). Tableau 3 : Les principaux freins concernant la coopération logistique Freins sectoriels Freins par rapport à l’acteur responsable du pilotage de la coopération Le secteur est en crise : les entreprises n’ont pas les moyens d’adhérer à des projets et se focalisent sur leur métier, la création. Maturité des entreprises peu importante en matière de logistique. Certaines commencent à peine à sous-traiter cette activité. Culture sectorielle très individualiste et concurrentielle, peu tournée vers la mutualisation: importance du créateur et du dirigeant d’entreprise. Effet de mimétisme : les entreprises participent à des projets collectifs si d’autres le font, ou si les retours sont bons. Il est également nécessaire de donner des informations chiffrées sur les gains d’une coopération en matière de logistique. Besoin de proximité et de confiance : établir des liens durables. Garantir la confidentialité. Respect des délais, qualité de la prestation et prix attractif. Avoir une bonne connaissance du secteur, de sa culture, du produit, empathie par rapport aux entreprises et à leur difficultés à « laisser » leur collection dans les mains d’un prestataire (rapport quasi fusionnel avec le produit). (Source : Dari, 2010) Le secteur du prêt-à-porter relève ainsi d’une « gestion paradoxale » de la coopétition selon laquelle les entreprises sont engagées dans des projets communs au niveau des activités stratégiques de création, via les bureaux de style, mais restent volontairement concurrentes sur d’autres activités de la filière qui, ailleurs, font généralement l’objet de coopérations avancées. 176 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Ces relations peuvent être considérées comme étant paradoxales dans la mesure où traditionnellement les activités de créations et de R&D font l’objet d’une compétition farouche. L’innovation étant au cœur de l’activité de ces entreprises, nous aurions pu envisager une concurrence importante. Cependant, pour construire leur collection, les entreprises doivent choisir les bonnes tendances de mode afin de sortir des produits adaptés aux attentes du marché. Or, la multitude des tendances, liée à des comportements variés et volatiles du consommateur, ne permet pas aux entreprises d’être en capacité de sélectionner la bonne tendance. Elles risquent ainsi de se trouver en fin de saison avec un stock de produits non écoulés. L’intervention d’un tiers permet donc d’homogénéiser l’offre et de coordonner toutes les entreprises à partir d’une même base de travail. Concernant l’activité logistique, elle fait souvent l’objet de coopérations entre entreprises. L’intérêt de ces coopérations pour les entreprises consiste à « réaliser ensemble une même opération productive de manière à diviser les coûts y afférant, et à permettre, en conséquence, à chacune d’entre elles d’accroître sa quasi-rente organisationnelle, et donc sa quasi-rente entrepreneuriale » (Gaffard, 1990, pp.413-414). Ainsi, si pendant longtemps la logistique a été un terrain d’affrontement, elle est désormais un moyen de coopération et de pilotage favorable aux deux parties (Colin et Paché, 1988). Dans le cas du secteur du prêt-à-porter, cette activité, perçue comme stratégique, est encore mal maîtrisée en interne par manque de compétences et de connaissances. Les priorités des entreprises portent sur d’autres problématiques, et toutes n’ont pas atteint un niveau de maturité suffisant pour comprendre l’intérêt de s’intégrer dans des projets coopératifs en matière de logistique. 2.1. Discussion : envisager des degrés relationnels dans la coopétition Suite à la recherche empirique, nous souhaitons apporter des éléments complémentaires à la définition des stratégies collectives d’Astley et Fombrun (1983) et au concept de coopétition. Ces derniers définissent les stratégies collectives comme des stratégies « collaboratives ». 177 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Or, l’analyse du secteur montre qu’en amont, concernant la définition des tendances, les entreprises ne sont pas dans une réelle situation de coopération. Les entretiens font notamment ressortir des relations de type coordination. Ces deux notions étant répandues dans la majorité des recherches, sans véritablement les distinguer l’une de l’autre, il nous semble important de les expliciter dans le tableau 4. 178 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 4 : Distinction entre les notions de coordination et de coopération Coordination Implication pour l’entreprise Pouvoir de l’entreprise Les entreprises assemblent et combinent des actions en vue d’harmoniser leurs actions et d’avoir une position sectorielle favorable. L’entreprise garde toute latitude décisionnelle, elle ne dépend pas directement d’une autre entreprise, de ses ressources et résultats. Aucun lien formel ne lie les entreprises. Il en découle des bénéfices mutuels qui ne sont pas toujours équitablement partagée entre les entreprises par manque de formalisation de la relation. Des acteurs intermédiaires peuvent intervenir pour coordonner les entreprises dans leurs activités. Coopération Les entreprises s’engagent dans une action commune après avoir identifié et adopté un but commun. Il s’agit généralement d’une volonté d’obtenir des résultats. Les entreprises sont solidaires mais ne perdent pas de vue leurs intérêts individuels. Latitude décisionnelle limitée : partage du pouvoir, décisions communes, interdépendance limitant la concurrence. Acceptation d’un certain degré d’obligation et d’assurance, mais risque d’opportunisme des acteurs car l’engagement (financier, ressources, pouvoir) est élevé. Formalisation concernant le partage de la valeur issue de la coopération. Lien formel entre les entreprises. Rôle essentiel de la confiance, l’établissement de la coopération est longue dans le temps même si les résultats à court terme sont faibles. (Source : Dari, 2010) 179 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Nous pouvons ainsi proposer une définition pour chacune de ces notions. Dans le cadre de la coordination, les acteurs cherchent à améliorer leur situation dans un secteur tout en gardant leur indépendance. Il s’agit d’améliorer la position des entreprises et de favoriser certaines actions sans aucun lien formel. A l’inverse, la coopération peut être envisagée comme un ensemble d’acteurs recherchant une solution mutuellement satisfaisante pour les deux parties et s’abstenant de tricher. Ils mettent en commun des ressources qui seront partagées au travers de relations formelles. En analysant les quatre types de stratégies collectives, nous pouvons souligner que le caractère direct des stratégies confédérées et conjuguées entraîne des relations qui engagent durablement les entreprises. Celles-ci, au travers d’alliances ou de contrats d’externalisation, s’engagent en effet sur le long terme avec leurs partenaires. Elles décident de mettre en commun des moyens et des ressources, ou de faire réaliser une partie de leur activité par une autre entreprise : on peut dans ce cas parler de coopération. D’un autre côté, le caractère indirect des stratégies agglomérées et organiques sous-tend des relations dans lesquelles les entreprises sont moins impliquées. Leur niveau de dépendance aux autres entreprises est peu élevé, et elles sont en mesure de garder toute latitude décisionnelle. En étant fédérées par des organismes centraux ou en décidant de s’imbriquer dans un réseau, les entreprises gardent une large part de libre-arbitre et restent autonomes dans les actions qu’elles souhaitent engager : on peut dans ce cas parler de coordination. Astley et Fombrun (1983) au travers de leur définition des stratégies collectives avaient déjà appréhendé le phénomène de coopétition et lui avaient attribué des niveaux différents. Ainsi, dans le cadre des stratégies commensales, les entreprises concurrentes peuvent collaborer pour diminuer l’incertitude de leur milieu. On observe à ce niveau deux types de relations : les stratégies confédérées au travers desquelles les entreprises coopèrent (alliances, fusions) ; les stratégies agglomérées au travers desquelles les entreprises se coordonnent par l’intervention d’acteurs intermédiaires. La coordination est donc perçue comme une dimension intermédiaire dans les relations entre entreprises. Ces dernières sont parfois loin de vouloir engager des relations de type coopératif avec d’autres entreprises dans la mesure où elles peuvent perdre une partie de leur latitude décisionnelle. 180 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management La coordination est donc un bon compromis, notamment lorsque leur environnement est trop instable pour y faire face seule. La coordination permet aux entreprises d’articuler certaines de leurs actions afin de diminuer les incertitudes de leur secteur. La coordination peut être une forme de relation à part entière dans laquelle les entreprises sont concurrentes et poursuivent en parallèle des actions visant à se coordonner pour limiter l’impact de leur environnement. Elle peut aussi devenir une étape préalable qui permettrait aux entreprises de tendre vers des relations coopératives. En observant les relations qui prennent forme dans le secteur du prêt-àporter, nous pouvons identifier des niveaux relationnels distincts. Il existe en effet des stratégies collectives agglomérées au travers desquelles des acteurs jouent un rôle de coordination entre entreprises concurrentes. Cependant, cette coordination ne constitue pas le seul élément pouvant qualifier les relations dans la filière. Les entreprises poursuivent également des logiques concurrentielles qui nous permettent d’analyser le secteur au travers du filtre de la coopétition tel que nous l’avons défini précédemment. Autrement dit, les entreprises sont en concurrence sur certaines activités mais peuvent être amenées à se coordonner sur d’autres sans pour autant s’engager durablement les unes avec les autres dans le cadre de relations plus poussées telles que la coopération. L’objectif est de montrer que les stratégies coopétitives peuvent être complexes et ne se limitent pas qu’à des relations de coopération ou de concurrence. Il peut exister des niveaux relationnels intermédiaires tels que la coordination. Une typologie des relations coopétitives peut ainsi être envisagée. Cette typologie plus globale de la coopétition, présentée dans le tableau 5, peut être établie en suivant la structure des stratégies collectives d’Astley et Fombrun (1983). 181 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Tableau 5 : Typologie de la coopétition Stratégies commensales : entre entreprises concurrentes Stratégies symbiotiques : entre entreprises non concurrentes Relations directes Coopétition complexe : compétition + coopération Coopétition transitoire : coordination vers coopération Relations indirectes Coopétition simple : compétition + coordination Coopétition transitoire : coordination vers coopération (Source : Dari, 2010) La coopétition complexe est une coopétition « classique » où les entreprises concurrentes sont amenées à coopérer dans certains domaines. Elle a fait déjà l’objet de nombreuses recherches (Yami et Le Roy, 2010). Dans le cadre de cet article nous avons pu avoir une illustration de la coopétition simple où les entreprises du prêt-à-porter se coordonner sur la définition des tendances de mode, et restent en concurrence concernant les activités logistiques. Des entreprises concurrentes vont progressivement se coordonner puis coopérer sur certaines activités. Le niveau coopératif sera atteint lorsque les relations entre entreprises auront évolué à plus long terme et nécessiteront une implication plus grande de la part des parties prenantes. Une analyse du secteur du textile technique, à travers le pôle de compétitivité Techtera en Rhône-Alpes, peut être une illustration pertinente pour des perspectives de recherche futures. 182 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Conclusion Les rapports entre entreprises sont traditionnellement observés sous l’angle du conflit. La concurrence constitue une dimension incontournable des relations inter-organisationnelles. Celle-ci peut être issue de l’environnement dans lequel les entreprises évoluent, ou découler du comportement des acteurs. La concurrence est ainsi une dynamique pour les entreprises dans la mesure où ces dernières développeront de manière quasi permanente des stratégies afin de rester durablement sur leur secteur. Néanmoins, les entreprises font partie d’un même milieu et subissent les mêmes fluctuations. Autrement dit, elles partagent une même dépendance liée aux ressources. Dans ces conditions, elles peuvent décider de poursuivre des stratégies qui leurs sont propres mais risquent à terme de disparaitre si l’instabilité de leur environnement augmente. Elles peuvent aussi poursuivre des stratégies collectives et partager un destin commun. Les stratégies collectives permettent aux entreprises de construire collectivement le milieu dans lequel elles se trouvent afin de réduire l’instabilité de ce dernier. En développant des normes et des règles communes, elles vont structurer leur environnement. La présence d’un acteur central coordonnant ces stratégies amènent les entreprises à évoluer dans un milieu fortement institutionnalisé. La coopétition permet ainsi de mieux appréhender toute la complexité des relations inter-organisationnelles. L’analyse du secteur du prêt-à-porter va même bien au-delà de relations de coopération et de compétition, et laisse apparaître des niveaux relationnels intermédiaires. La coordination, notion galvaudée, est souvent utilisée dans de nombreux travaux comme un synonyme de la coopération. Or, l’étude du prêt-à-porter met en évidence qu’elle est une relation à part entière dans les stratégies engagées par les entreprises. Le concept de coopétition irait donc bien au-delà de la dualité entre coopération-compétition, et ferait intervenir un degré relationnel supplémentaire entre les entreprises. Cet article comporte néanmoins des limites. Tout d’abord la typologie reste incomplète. L’étude d’un secteur d’activité, tel que l’industrie du textile 183 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management technique, permettrait notamment d’apporter un éclairage supplémentaire et comparatif au secteur du prêt-à-porter. Cette étude apporterait une nouvelle étude de cas pouvant illustrer la typologie proposée. La recherche est par ailleurs focalisée sur le secteur de l’habillement en France, et notamment en PACA. Un élargissement à d’autres régions, en Rhône-Alpes par exemple, avec le pôle de compétitivité Techtera, serait un moyen de généraliser les résultats. Références Abrahamson, E. (1996). Management fashion. Academy of Management Review, 21(1), 254-285. 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Paris, De Boeck. 186 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management 187 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Procédure de soumission des articles SM (Journal of Social Management / Zeitschrift für Sozialmanagement / Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management) publie des articles originaux proposés par des chercheurs en sciences sociales et par des responsables d’organisations publiques ou privées qui contribuent à enrichir la réflexion et les pratiques dans le domaine du Management. Les articles reçus par SM sont soumis à une procédure d’évaluation qui garantit l’objectivité et la rigueur scientifique de leur sélection. 1 Procédure d’évaluation des articles Les auteurs sont invités à envoyer leurs articles en version électronique MS Word à l’adresse suivante: Professeur Ali Smida, Rédacteur en chef, courriel : [email protected]. 1.1 Recevabilité des articles Tout article adressé à la revue SM est soumis au Comité éditorial qui se prononce sur sa recevabilité. Si l’article est jugé non recevable pour des raisons éditoriales, l’auteur en sera immédiatement avisé. Si l’article est jugé recevable par le Comité éditorial, il sera transmis aux évaluateurs. 1.2 Évaluation des articles Tout article jugé recevable par le Comité éditorial de SM sera évalué, en double aveugle, par des membres du Comité Scientifique. Le Comité éditorial peut faire appel à des évaluateurs externes au Comité Scientifique. Sur la base des rapports remis par les évaluateurs, le Comité éditorial prendra l’une des décisions suivantes: - acceptation de l’article sans modification; 188 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management - acceptation de l’article sous réserve de modifications. L’auteur devra alors, en tenant compte des remarques des évaluateurs, corriger le texte de son article et rédiger la liste de ses réponses sur un document séparé; - rejet de la proposition d’article. 2 Publication Les articles acceptés après des modifications éventuelles seront publiés : - dans la série anglo-francophone s’ils sont à dominante académique. - dans la série anglo-germanophone s’ils sont à dominante professionnelle. - dans les deux séries si le Comité éditorial en juge l’opportunité. Les épreuves ne sont pas soumises aux auteurs avant leur publication. L’auteur s’engage à ne pas publier son article dans un autre support. Chaque auteur reçoit deux exemplaires du numéro auquel il a contribué. 3 Normes de présentation des articles Les auteurs sont invités à respecter les normes suivantes : 3.1 Mise en page - Mise en page (format A4): marges (supérieures, inférieures et latérales) de 2,5 cm. - Longueur du texte: 20 pages au maximum, y compris la bibliographie et les annexes. Le texte sera justifié (aligné à gauche et à droite). - Caractères: Verdana (12 points), en interligne simple. 189 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management - Les notes de bas de page: Verdana (10 points). Elles sont réservées aux commentaires et explications. Elles doivent être numérotées dans l’ordre d’insertion. - Pas d’entête et pas de pied de page. 3.2 Premières pages La première page, non numérotée, comprendra uniquement : - le titre de l’article en Anglais et en Français (Verdana 18 gras); - le(s) nom(s) de(s) auteurs et leur affiliation: institution et éventuellement laboratoire d’accueil (Verdana 12 ) ; - un curriculum vitae en Anglais et en Français de chacun des auteurs (200 mots maximum par auteur) (Verdana 12); - l’adresse postale et électronique, le téléphone et le fax de l’auteur à qui la correspondance doit être adressée (Verdana 10); - un résumé en Anglais et en Français interligne simple de maximum 200 mots indiquant la problématique, la méthodologie et les principaux résultats de l’article (Verdana 12, justifié) - un maximum de 5 mots clés en Anglais et en Français (Verdana 12); La deuxième page reprend le texte de la première page, sans mentionner le(s) auteur(s) afin de garantir l’anonymat de l’évaluation. 3.3 Le corps de l’article La hiérarchie des titres ne doit pas dépasser trois niveaux et doit respecter la présentation suivante: - NIVEAU 1: un chiffre (1. par exemple) titre en Verdana 18 gras interligne 2. 190 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management - NIVEAU 2: deux chiffres (1.1 par exemple) sous-titres en Verdana 16 gras interligne 2. - NIVEAU 3: trois chiffres (1.1.1 par exemple) sous-titres en Verdana 12 gras interligne simple. Les tableaux et figures doivent être insérés dans le texte aux bons endroits et numérotés par ordre d’insertion. Le titre doit être indiqué au-dessous du tableau ou de la figure. Les auteurs sont également invités à envoyer des fichiers séparés (Excel, Power Point, etc.) contenant les graphiques et les tableaux utilisés tout au long du texte. 3.5 Les références bibliographiques SM utilise les normes APA (American Psychological Association) pour les références bibliographiques. Voici quelques exemples de références au format APA Les références dans le corps du texte sont à présenter comme suit : - cas de l’utilisation du nom de l’auteur dans le texte : Penrose (1953). Smith and Denton (2005). - cas d’un seul auteur par référence : (Wuthnow, 1995). - cas de deux auteurs : (Smith & Denton, 2005). - cas de trois auteurs et plus : (Smith et al., 2006) - quand il s’agit d’une citation textuelle, la(les) page(s) de référence seront indiquées: (Grimm et al., 2005, p. 4). À la suite de l’article, une liste des références bibliographiques sera établie par ordre alphabétique des auteurs, selon les modèles suivants : 191 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Articles: Beckerman, N. L. (2002). New faculty: Reports from an orientation program. Arete, 26, 92-96. Romney, L., & Gold, S. (2007, July 14). Health program at risk. Los Angeles Times, p. A1. Wilson, J. & Hanoski, T. (1995). The contribution of religion to volunteer work. Sociology of Religion, 56(2), 137-152. Livres: Grimm, R., Dietz, N., Spring, K., Arey, K. & Foster-Bey, J. (2005). Building active citizens: The role of social institutions in teen volunteering. Washington, D.C.: Corporation for National and Community Service. Chapitre dans un ouvrage collectif: Yagi, D. T., & Oh, M. Y. (1995). Counseling Asian American students. In C. C. Lee (Ed.), Counseling for Diversity (pp. 61-84). Needham Heights, MA:Longwood. 192 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Articles Submission Guidelines SM (Journal of Social Management / Zeitschrift für Sozialmanagement / Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management) publishes original articles proposed by social scientists and officials of public and private organizations that help enrich the thinking and practices in the field of Management. The articles received by SM are subject to an evaluation process that ensures objectivity and scientific rigor of their selection 1 Evaluation procedures of Articles Authors are invited to send their articles in electronic MS Word at the following address: Professor Ali Smida, Editor-in-Chief, email: [email protected]. 1.1 Admissibility of Articles Any article submitted to the journal SM is subject to Editorial Board, which decides on its admissibility. If the item is considered inadmissible for editorial reasons, the author will be notified immediately. If the item is deemed admissible by the Editorial Board, it will be forwarded to reviewers. 1.2 Assessment of Articles Any article deemed admissible by the Editorial Board of SM will be evaluated in double blind by the Scientific Committee members. The Editorial Committee may call on external reviewers to the Scientific Board. On the basis of reports submitted by the evaluators, the Editorial Committee will take one of the following decisions: 193 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management - acceptance of the article without change - acceptance of the article, subject to change. The author will then, taking into account the comments of reviewers, correct the text of his article and write a list of his answers on a separate document - rejection of the proposed article. 2 Publication Papers accepted after any changes will be published: - In the English/French series, if they are mainly academic. - In the English/German series, if they are vocationally oriented. - In two series, if the editorial committee considers useful. The final version of the article before publication will be not submitted to the authors. The author agrees not to publish his article in another medium. Each author receives two copies of the issue to which he contributed. 3 Standards for submitting articles Authors are invited to meet the following standards: 3.1 Layout - Layout (A4): margins (top, bottom and sides) of 2.5 cm. - Text Length: 20 pages maximum, including bibliography and appendices. The text is justified (left and right aligned). - Font: Verdana (12 points), single spaced. 194 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management - Footnotes: Verdana (10 points). They are reserved for comments and explanations. They should be numbered in the order of insertion. - No header and no footer 3.2 First pages The first page, not numbered, include only: - The title of the article in English and French (Verdana 18 bold) - The author(s) name(s) and affiliation(s): the institution and possibly home laboratory (Verdana 12); - A curriculum vitae in English and French for each author (maximum 200 words per author) (Verdana 12); - Postal and email address, telephone and fax of the author to whom correspondence should be addressed (Verdana 10); - A summary in English and in French single-spaced maximum of 200 words stating the core issue, methodology and major findings of the article (Verdana 12, justified) - Up to 5 keywords in English and French (Verdana 12); The second page contains the text of the first page, without author(s) name(s) to ensure the anonymity of the evaluation. 3.3 The body of the article The hierarchy of titles must not exceed three levels and must meet the following presentation: - LEVEL 1: one digit (1. for example) title in Verdana 18 bold spaced 2. - LEVEL 2: two digits (1.1 for example) subtitles Verdana 16 bold spaced 2. 195 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management - LEVEL 3: three digits (1.1. 1 for example) subtitles Verdana 12 bold single-spaced. Tables and figures should be inserted in the text to the right places and numbered in order of insertion. The title should be indicated below the table or figure. The authors are also invited to send separate files (Excel, Power Point, etc.) Containing graphs and tables used throughout the text. 3.4 The references SM uses the standard APA (American Psychological Association) for references. These are examples of references in APA format. The references in the text are presented as follows: - When using the author's name in the text: Penrose (1953). Smith and Denton (2005). - If one author by reference: (Wuthnow, 1995). - For two authors: (Smith & Denton, 2005). - For three or more authors: (Smith et al., 2006). - When it is a verbatim quote, the page(s) of reference will be shown: (Grimm et al., 2005, p. 4). Following the article, a list of references will be made in alphabetical order of authors using this model: Articles: Beckerman, N. L. (2002). New faculty: Reports from an orientation program. Arete, 26, 92-96. Romney, L., & Gold, S. (2007, July 14). Health program at risk. Los Angeles Times, p. A1. Wilson, J. & Hanoski, T. (1995). The contribution of religion to volunteer work. Sociology of Religion, 56(2), 137-152. 196 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Books: Grimm, R., Dietz, N., Spring, K., Arey, K. & Foster-Bey, J. (2005). Building active citizens: The role of social institutions in teen volunteering. Washington, D.C.: Corporation for National and Community Service. Chapter in an edited volume: Yagi, D. T., & Oh, M. Y. (1995). Counseling Asian American students. In C. C. Lee (Ed.), Counseling for Diversity (pp. 61-84). Needham Heights, MA: Longwood. 197 Journal of Social Management / Revue Européenne des Sciences sociales et du management Bon de commande A renvoyer à : Bertuch Verlag GmbH · Schwanseestr.101, 99427 Weimar, Germany TEL: +49 36 43 44 17 0 | fax: +49 36 43 44 17 11 | www.bertuchverlag. com [email protected] | [email protected] Journal of Social Management Revue Européenne des Sciences Sociales et du Management Zeitschrift für Sozialmanagement Je commande : o un numéro : 25,00 euros o une série (édition anglaise et française), soit deux numéros par an: 40,00 euros o une série (édition anglaise et allemande), soit deux numéros par an: 40,00 euros o les deux séries (édition anglaise/française et édition anglaise/allemande), soit quatre numéros par an : 80,00 euros NOM ET PRÉNOM : . . . . . . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . INSTITUTION / ENTREPRISE: . . . . . . . .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 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