Italian (16)70`s

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Italian (16)70`s
Italian (16)70’s
Musique italienne pour violon et basse continue des années 1670
Giovanni Battista DEGLI ANTONII, Balletti, correnti, gighe, e sarabande da camera a Violino, e
clavicembalo ò violoncello, op. 3, 1677 :
Ballo decimo & Sarabanda
Ballo quarto & Corrente
Giovanni Bonaventura VIVIANI, Capricci armonici da chiesa e da camera per violino e basso continuo,
op. 4, 1678
[Suite de pièces en la mineur]
Introdutione
Allemanda
Corrente
Aria [quarta]
Con affetto
Gagliardo. Adagio
Sarabanda
Giga
Pietro DEGLI ANTONII, Balletti, correnti & arie diverse a violino, e violone per camera, op. 3, 1671
Aria. Adagio & Sua Corrente
Balletto quinto & Sua Corrente
Giovanni Maria BONONCINI, Arie, correnti, sarabande, gighe & allemande a violino e violone, over
spinetta, op. 4, 1671
[Suite de pièces in stil Francese en sol mineur]
L’Anghisciola. Aria in stil francese
La Molza. Corrente in stil francese
La Palavicina. Aria in stil francese
La Strozza. Corrente in stil francese
Sarabanda in stil francese
La Barbiera. Corrente in stil francese
Ensemble Sopra il manico
Cécile HERBUEL, violon baroque
Xavier BIGOT, violone
L’interprétation « historiquement informée » : c’est quoi exactement ?
Dans la musique classique, on peut mettre
beaucoup de choses : Vivaldi, Mozart,
Tchaïkovski, ou Dvořak, et bien d’autres encore. Pourtant, quand on les écoute, on se rend
compte que toutes ces musiques sont différentes, même si on ne sait pas comment l’expliquer. Cela tient d’une certaine façon au fait
qu’elles appartiennent toutes à des époques
distinctes.
L’interprétation historiquement informée part
de ce principe qu’on ne peut pas jouer toutes
ces musiques de la même façon. Jouer du
Mozart, ce n’est pas pareil que jouer du
Dvořak, tout comme jouer du Tchaïkovski ce
n’est pas jouer du Vivaldi. Et puisque l’époque
historique est pour beaucoup dans les différences qui existent entre toutes ces musiques,
l’un des meilleurs moyens de les jouer en respectant justement leurs spécificités respectives, c’est de chercher à savoir comment elles
étaient jouées dans leurs époques.
Le travail de l’interprétation historiquement
informée consiste à s’interroger en permanence sur tous les aspects de la production
musicale1, avec en ligne de mire le son et l’esprit de la musique. Tout ce que l’on croit savoir après avoir suivi une formation musicale
quelle qu’elle soit doit être en permanence remis en cause, et interrogé à l’aune de ce que
l’on peut savoir du contexte dans lequel s’inscrit une musique.
Ainsi, l’interprétation historiquement informée ne s’attache pas à l’interprétation de la
musique d’une période en particulier ; elle est
bien plus un courant de pratique qui vise à replacer n’importe quelle musique dans le contexte qui lui est propre, d’abord historiquement, mais aussi géographiquement, socialement, ou artistiquement, cela afin de lui restituer une part essentielle de son sens et de sa
vérité.
C’est d’abord la redécouverte de la musique
baroque2 dans les premières décennies du XXe
siècle, puis le formidable mouvement des
« baroqueux » d’après les années 1970-1980
qui a insufflé l’élan dont bénéficie actuellement l’interprétation historiquement informée.
Le concert auquel vous vous apprêtez à assister s’inscrit pleinement dans cette tradition baroqueuse. En effet, nous jouons sur des instruments d’époque, qui sont très différents des
instruments modernes, et qui offrent une esthétique sonore tout autant différente. De
plus, la façon dont nous voulons vous offrir
cette musique cherche à être la plus respectueuse possible de ce que l’on sait de la manière dont on jouait en Italie septentrionale à
la fin du XVIIe siècle.
Suivez-nous, et embarquez pour un voyage
sonore, historique et géographique !
Quelques mots des compositeurs et de leurs œuvres
Les compositeurs dont nous vous présentons
la musique ce soir sont probablement inconnus pour le plus grand nombre d’entre vous.
Mais rassurez-vous, même les musicologues
ne savent pas grand-chose d’eux3 !
1 Dans
l’Euridice de Jacopo PERI en 1599, à la mort du kantor
Johann Sebastian BACH en 1750.
3 Cela tient souvent seulement aux différents recueils
qu’ils ont publiés, ainsi qu’aux éventuelles fonctions
qu’ils ont assumées dans l’organisation musicale des
villes dans lesquelles ils ont travaillé.
le sens de la restitution de la musique écrite par
le biais de l’interprétation ; ce que l’on désigne plus
simplement encore par le fait de jouer de la musique.
2 Arbitrairement, il s’agit de la musique des années 1600
aux années 1750 ; en d’autres termes du premier opéra,
Lorsqu’on joue de la musique baroque, on joue
des « stars absolues », comme Vivaldi, Bach ou
Albinoni4, mais on joue également beaucoup
d’inconnus. Des inconnus dont la musique n’a
pas été entendue depuis plusieurs siècles, et
même souvent depuis leur vivant.
C’est une chance inouïe et un défi unique
quand on est musicien que d’avoir la primeur
de donner à entendre une musique tombée
dans l’oubli depuis des générations, sans l’empreinte de qui que ce soit pour être influencé
dans un sens ou un autre : pas d’enregistrement, et souvent personne qui ait jamais joué
cette musique. En somme, pas besoin du dernier tube de Rihanna ou de Coldplay pour
avoir de la nouveauté !
L’ensemble des pièces qui constituent le programme de ce soir font partie de recueils de
« pièces variées » : cela veut dire que les musiciens étaient plus ou moins libres de piocher
dans ces recueils, et d’associer différentes morceaux les uns avec les autres, cela afin de constituer des suites plus ou moins complexes. Et
c’est précisément ce que nous avons fait : nous
avons compulsé quatre recueils des années
1670, en avons sélectionné un certain nombre
de pièces, et les avons organisés en morceaux
en plusieurs mouvements selon une logique
musicale.
Ainsi, nous avons choisi d’ouvrir ce concert
avec deux balli, chacun suivis d’une danse de
Giovanni Battista DEGLI ANTONII (16361698). Ces deux pièces d’ouverture portent
une légèreté et une allégresse propres à commencer dans la meilleure humeur.
La Suite de pièces en la mineur de Giovanni
Bonaventura VIVIANI (1638-post 1692) se
veut en revanche bien plus grave. Comme
nous en parlions un peu plus tôt, elle n’existe
pas en tant que telle au sein de ce recueil de
16785, mais nous l’avons constituée à partir de
différentes pièces. Elle repose sur une alternance de mouvements lents et de danses plus
ou moins vives, dans le souci du respect de
l’esprit des suites dites à la française.
Comme vous le devinez sûrement, il existe
bien un lien de parenté entre le premier Degli
Antonii, et celui qui est l’auteur des deux morceaux suivants, Pietro DEGLI ANTONII
(1639-1720). Il s’agit en effet de deux frères
ayant œuvré dans la même ville de Bologne à
peu près à la même période, mais dont les musiques sont sensiblement différentes. Ces deux
pièces, également en forme de ballets suivis
d’une danse, arborent une structure harmonique et mélodique plus complexe que celles
qui nous ont servi d’ouverture.
Pour finir ce concert, nous avons décidé de
jouer une suite de pièces qui fasse écho à celle
de Viviani. Celle-ci, également « constituée »
par nos soins, est très clairement orientée vers
la musique française, alors en opposition avec
la musique italienne. Giovanni Maria
BONONCINI (1642-1678) le précise en effet
directement dans le titre de chacun des morceaux, mais il a également modelé son écriture
sur cette influence française, afin de lui en
donner les accents essentiels (rythmes pointés,
syncopes, danses vives ternaires, etc.).
Avec le soutien de :
Mairie de Savères
Encore que ce dernier n’est connu que par un Adagio
qui n’est pas de lui.
5 Il s’agit donc d’un recueil publié l’année précise de la
naissance de Vivaldi dans sa ville de Venise : on a donc
4
là un témoignage de l’environnement sonore dans lequel il a pu grandir.