Synthèse PE Aquitaine MCN

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Synthèse PE Aquitaine MCN
Diagnostic de la précarité énergétique sur l’Aquitaine
Synthèse de l’étude
La caractérisation de la précarité énergétique des ménages de la région Aquitaine a été effectuée à l’aide de
l’outil EQUITEE dont la méthodologie repose sur le traitement des données du recensement INSEE de
population (année de référence 2008). Cet outil permet de croiser les données sur le profil et le revenu des
ménages avec les typologies de logement, leur état thermique et l’énergie de chauffage, pour identifier les
ménages en précarité énergétique.
La précarité énergétique est définie de manière large comme le phénomène propre aux ménages ayant « des
difficultés particulières à disposer de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de [leurs] besoins
élémentaires » (Loi Grenelle 2). Il est possible de chiffrer le phénomène avec différents indicateurs dont le taux
d’effort énergétique (TEE) « réel estimé » (qui réunit les ménages dont au moins 10% du revenu disponible est
destiné à la facture énergétique) et le TEE « conventionnel » (qui évalue le poids relatif dans le revenu de la
facture énergétique permettant le respect des conventions de confort thermique et prend donc également en
compte les ménages en auto-restriction).
Contexte général
En 2008 l’Aquitaine comptait 1 405 000 ménages, répartis dans
1 723 000 logements sur les 5 départements. La grande majorité
des logements est constitué de maisons individuelles, dont plus
de la moitié datent d’avant 1975 (date de la première
réglementation thermique dans l’habitat).
Les énergies de chauffage des logements sont majoritairement le
gaz et l’électricité. Le gaz est utilisé en zones urbaines, alors que
le fioul, le GPL (combustibles coûteux) et le bois sont privilégiés
en zones rurales, moins peuplées. Ainsi, la Dordogne et le Lot-et
Garonne ont un quart de leurs logements chauffés au fioul tandis
que la Gironde et les Pyrénées-Atlantiques chauffent 40% de leurs
logements au gaz naturel.
Figure 1 : Part du fioul dans le mix énergétique
de chauffage des logements par commune
Le classement des bâtiments par étiquette DPE indique que 84 % des logements consomment plus de
150 kWhep/m². L’étiquette DFE (diagnostic de facture énergétique) croise les performances thermiques avec le
coût de l’énergie de chauffage utilisée de façon à classer les logements en fonction de leur facture. Ce
classement est plus adapté au repérage de la précarité énergétique.
Le classement DFE montre que 82 % des
logements impliquent une facture énergétique
conventionnelle
supérieure
à
14 €/m²
(étiquettes P2 à P5). Les logements les plus
coûteux du point de vue énergétique (étiquette
P5) sont en majorité des maisons individuelles
d’avant 1975 (plus de 1600 € de facture par an)
et sont très souvent chauffés au fioul et GPL.
L’étiquette P5 caractérise 15 % des ménages
aquitains.
Précarité énergétique sur le territoire
L’Aquitaine compte 153 800 ménages en situation de précarité énergétique au sens d’un TEE réel supérieur à
10%. Cela représente 11 % de la population, ce taux correspond au taux national établi à 11% en 2006. En
prenant comme indicateur le TEE conventionnel, qui prend en compte en plus le phénomène d’autorestriction, s’ajoutent 125 700 ménages. Il y a donc en Aquitaine environ 279 500 ménages en précarité
énergétique au sens TEE conventionnel, soit 20 % des ménages, la moyenne nationale étant de 25 %.
Si la région Aquitaine prise dans son ensemble est touchée par la précarité énergétique dans des proportions
légèrement inférieures au niveau national, deux départements sont plus sévèrement touchés. La Dordogne et
le Lot-et-Garonne affichent un tiers des ménages en situation de précarité énergétique (TEE conventionnel).
Parmi ces ménages, 45 % n’ont pas une facture énergétique supérieure à 10 % de leur revenu, mais au prix
d‘un confort thermique dégradé qui peut occasionner des problèmes de santé et d’exclusion sociale. Il est donc
important d’en tenir compte dans l’analyse de précarité énergétique.
Figure 1 : Taux de ménages en précarité énergétique
(TEE conventionnel) sur les communes d’Aquitaine
Figure 2 : Cartographie des dispositifs de type OPAH et PIG
existants en Aquitaine (source : www.lesopah.fr)
La carte de la précarité énergétique ci-dessus montre des taux de précarité énergétique plus élevés dans les
zones rurales. La comparaison de cette carte avec le zonage des dispositifs existants révèle qu’une grande
partie des territoires de Dordogne, des Landes et de Lot-et-Garonne ne bénéficie d’aucun dispositif alors que
de forts taux de précarité énergétique y sont observés.
L’approche par profils de vulnérabilité des ménages permet de préciser l’analyse en ciblant les catégories de
ménages les plus concernées. Quatre profils rassemblent 62 % des ménages en précarité énergétique (voir
tableau suivant).
Nombre de ménage en
précarité énergétique
(TEE conventionnel)
Part du profil sur le total
des ménages en
précarité énergétique
Ménages très modestes, propriétaires de
maisons individuelles, âgés de plus de 65 ans
83 184
31%
Ménages très modestes propriétaires de maisons
individuelles, d’âge compris entre 40 et 65 ans
31 708
12%
Ménages modestes, propriétaires de maisons
individuelles, âgés de plus de 65 ans
30 380
11%
Etudiants et jeunes actifs âge de moins de 25 ans
19 524
7%
Profil de vulnérabilité
Une grande majorité des ménages en précarité énergétique sont des propriétaires de maisons individuelles, et
parmi ceux-ci les plus âgés sont fortement représentés. Quel que soit le département, la fraction de ces
propriétaires âgés de plus de 65 ans présente les taux de précarité énergétique les plus élevés. En Dordogne et
Lot-et-Garonne, plus de 70 % des ménages sénior très modestes propriétaires de leur maison sont en précarité
énergétique.
Concernant les aides possibles, on peut remarquer que neuf dixièmes des ménages en précarité sont éligibles
aux aides ANAH. Le constat est différent pour l’éligibilité aux tarifs sociaux de l’énergie : si la quasi-totalité des
ménages en précarité énergétique vivant dans le parc public est éligible aux tarifs sociaux, seuls 82 % des
locataires dans le parc privé et la moitié des propriétaires occupants le sont.
Le type d’énergie utilisée semble aussi
affecter la vulnérabilité des ménages : la
moitié des ménages aquitains utilisant
du fioul ou du GPL pour se chauffer sont
en précarité énergétique. Le prix élevé
de ces combustibles peut ici être mis en
cause. Le bois est une autre énergie
privilégiée
chez
ces
ménages
vulnérables, dans ce cas, la performance
du logement ou des équipements de
chauffage est plus surement coupable.
Les ménages chauffés au gaz ou à
l’électricité sont moins touchés.
Figure 4 : Taux de ménages en précarité énergétique en fonction de
l’énergie de chauffage du logement
Le type d’habitat est également un facteur
déterminant. Les ménages en précarité
énergétique habitent très majoritairement dans
des maisons, et pour deux tiers des maisons
datant d’avant 1975, alors que sur l’ensemble des
ménages aquitains, 36% seulement habitent dans
ces maisons : la maison individuelle ancienne est
donc clairement un facteur de précarité et
d’auto-restriction, notamment en raison de
surfaces à chauffer et de déperditions plus
importantes. Il conviendra donc de traiter en
particulier ce type d’habitat dans les dispositifs
de soutien aux travaux de réhabilitation à mettre
en place.
Figure 5 : Ménages en précarité énergétique par type de logement
La répartition géographique de la précarité énergétique est telle que les ménages très modestes de plus de 65
ans concernés sont à l’est et au sud de la région, alors qu’elle est plus uniforme dans la tranche d’âge 40-65 ans
et chez les ménages modestes. Les étudiants et jeunes actifs sont quant à eux très peu nombreux et très
rarement en précarité énergétique en dehors des grands centres urbains.
Précarité énergétique transports
L’outil Equitée permet d’approcher de façon assez
précise la mobilité quotidienne des ménages, en
reconstituant les distances annuelles parcourues et
les parts modales associées pour les déplacements
pour motifs domicile-travail, domicile-scolaire/étude,
achats, loisirs et autres.
En croisant avec les consommations unitaires des
véhicules et le prix des carburants et des
abonnements de transports en commun, ces
données
permettent
de
remonter
aux
consommations énergétiques des ménages dues aux
transports quotidiens puis au coût de la mobilité
quotidienne pour les ménages.
Figure 6 : Part des ménages en précarité énergétique
transport dans les communes d’Aquitaine
Les dépenses de transport des ménages sont
sensiblement différentes entre les ménages des
agglomérations urbaines et ceux des communes
rurales : en ville un ménage dépense environ 1500 €
par an, alors qu’à la campagne, le transport coûte
plus de 3000 € par an. La précarité énergétique
transport (définie par l’attribution d’au moins 10 %
du revenu dans les dépenses de transport - carburant
ou titre de transport en commun) est relativement
faible en zone urbaine (taux moyen de 15 %) mais
très importante en zone rurale.
Le croisement des résultats de précarité énergétique dans l’habitat et dans le transport montre que les
ménages ruraux subissent souvent une double précarité : de nombreuses communes rurales sont fortement
impactées par les deux phénomènes.
Conclusion
Sur les 1 405 000 ménages que compte la région Aquitaine, 279 500 sont en situation de précarité énergétique
(au sens TEE conventionnel) soit 20 % des ménages. Ce taux n’est pas homogène entre les départements : de
14 % en Gironde, il monte à plus de 33 % en Dordogne et dans le Lot-et-Garonne.
Les ménages très modestes, propriétaires de maisons individuelles, âgés de plus de 65 ans, ont le taux de
précarité énergétique le plus élevé quel que soit le département. Les ménages en précarité énergétique vivent
très majoritairement dans une maison individuelle (80 %). Le chauffage au fioul et au GPL est surreprésenté
parmi ces ménages, le prix de ces combustibles étant une des causes de leur situation de précarité
énergétique.
A cette précarité énergétique dans le logement s’ajoute une précarité énergétique due au transport. Cette
dernière ne concerne que 15 % des ménages des grandes villes, mais peut toucher l’ensemble de la population
des communes les plus isolées.
Le diagnostic statistique réalisé est une première étape qui sera complétée par une analyse des actions en
cours et des besoins pressentis par les acteurs locaux.