Banalisation et élimination des déchets d`activités de soins à risque

Transcription

Banalisation et élimination des déchets d`activités de soins à risque
Banalisation et élimination des déchets
d'activités de soins à risque infectieux
Nadia Meskini
Laboratoire de Biochimie, Environnement et Agroalimentaire,
FST de Mohammedia, Université Hassan II - Mohammedia
Maroc BP 146, 20650
[email protected]
Les Déchets Industriels au Maroc, Potentiel des R
15, 16, 17 Decembre 2010 Casablanca
Introduction et definitions
Les déchets d'activités de soins sont
« les déchets issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement
préventif, curatif ou palliatif, dans les domaines de la médecine humaine
et vétérinaire ».
L'élimination de ces déchets est réglementée par des dispositions
issues du Code de l’environnement et du Code de la santé publique.
L’élimination regroupe l'ensemble des étapes de tri, conditionnement,
collecte, transport, stockage, et traitement (article L.541-2 du Code de
l’environnement).
La responsabilité de leur élimination incombe :
• à l'établissement producteur ;
• à la personne morale pour le compte de laquelle un professionnel de
santé exerce l'activité productrice de déchets (hospitalisation à domicile,..) ;
• à la personne physique qui exerce l'activité productrice de déchets dans le
cadre de son activité professionnelle ( médecins et infirmières d’exercice
libérale…).
les déchets d’activité de soins à risques
Les déchets d'activités de soins peuvent présenter divers risques
(infectieux, chimique et toxique, radioactif, mécanique) qu'il convient de
réduire pour protéger :
• les patients hospitalisés (maladies nosocomiales);
• le personnel de soins (contamination);
• les agents chargés de l'élimination des déchets (contamination);
• l'environnement (pollution).
La réduction des risques passe nécessairement par :
• une information et une formation de tous les acteurs de l'établissement
producteur ;
• une tenue et un comportement adaptés aux circonstances d'exposition ;
• une gestion rigoureuse de l'élimination des déchets d'activités de soins à
risques ;
• une maîtrise de l'hygiène et de la sécurité pour l'ensemble des étapes de la
filière d'élimination.
La mise en place des filières d'élimination
Une filière d’élimination comporte deux parties bien distinctes :
• la partie interne (de la production à l'enlèvement du service producteur)
• la partie externe (au niveau des services techniques chargés de la
collecte des déchets et le transport à l'extérieur du site de production).
La bonne solution se trouve à la croisée des chemins
Chaque producteur de déchets d'activités de soins est conduit à
considérer le contexte spécifique auquel il est confronté
Le choix de la filière d'élimination la plus appropriée repose sur
une analyse multicritère fondée sur :
• la réglementation et les normes ;
• les données quantitatives et qualitatives de production ;
• les filières d'élimination existantes localement ;
• les contraintes structurelles et organisationnelles ;
• le contexte local ;
• les résultats économiques des différents scénarios possibles.
Une concertation entre les différents acteurs
• les professionnels de santé producteurs de DASRI (médecin,
infirmière, pharmacien, personnels de laboratoire…) ;
• le personnel des services logistiques, économiques et techniques
• les gestionnaires et les services administratifs ;
• les intervenants extérieurs à l'établissement, et les prestataires
de service.
Une nécessaire cohérence des filières d’élimination
• les critères de tri et les protocoles de soins (pour garantir la
qualité et la pérennité du tri)
• les critères de tri et les filières d'élimination (pour éviter tout refus
de prise en charge)
• les conditionnements, le matériel de collecte, les locaux et d’une
manière générale le circuit des déchets de manière à réduire tout
risque sanitaire
La qualité de la gestion interne des déchets d'activités de soins
• l'identification d'un référent "déchets" qui sera l’interlocuteur de tous
les intervenants de la filière, travaille en étroite collaboration avec le
Comité de lutte contre les infections nosocomiales (CLIN), l'équipe
opérationnelle d'hygiène, le Comité d'hygiène, de sécurité et des
conditions de travail (CHSCT) ;
• la réalisation d'une étude préalable de la production et des flux ;
• la formalisation des protocoles et procédures retenus (tri,
conditionnement, entreposage intermédiaire, fréquence des
enlèvements…), intégrant la spécificité de certains services ou d’unités
de soins;
• l'information et la formation systématique et de tous les personnels
(formation initiale, continue, …). Une attention particulière sera apportée
au retour de l'information auprès des acteurs concernés.
Le code de la santé publique prévoit deux techniques possibles pour
l’élimination des DASRI:
incinération ou le prétraitement par des appareils de désinfection
validés par le Conseil supérieur d'hygiène publique de France
Certains déchets sont à exclure du prétraitement par désinfection et de
l'incinération
• sels d'argent et produits chimiques
• produits chimiques, explosifs ou à haut pouvoir oxydant ;
• déchets mercuriels ; déchets radioactifs ; toxiques volatils ;
• pièces anatomiques et cadavres d'animaux de grande taille
D’aures sont à exclure du prétraitement par désinfection
• déchets susceptibles de renfermer des agents transmissibles non
conventionnels
• déchets liés à l’utilisation de médicaments cytostatiques et cytotoxiques
• déchets susceptibles d’endommager les appareils de désinfection (ex :
pièces métalliques de grande taille, prothèses en titane…).
Le prétraitement par désinfection des DASRI
On parle de prétraitement par désinfection car les déchets ainsi
désinfectés doivent subir encore un traitement par la filière des déchets
ménagers et assimilés (mise en installation de stockage ou incinération)
Le principe
• Modifier l'apparence des déchets (par broyage)
• Réduire la contamination microbiologique (par élévation de la température
et/ou chimique).
Les déchets ainsi prétraités peuvent être éliminés soit par incinération, soit
par stockage dans une installation de stockage de déchets non dangereux
(ISDND),
les techniques de compostage sont exclues en raison des caractéristiques
et de l’origine de ces déchets.
Les contraintes de la désinfection
Pour l'établissement producteur
-obligation de traiter in fine les déchets désinfectés par mise en installation de
stockage de déchets non dangereux ou par incinération.
- nécessité d'un tri rigoureux des déchets admis compte tenu des restrictions
d'usage,
- nécessité d'un contrôle régulier de l'efficacité du pré-traitement et d'une
exploitation par du personnel qualifié,
- certains appareils supposent l'achat de consommables
- pour les appareils in situ, nécessité de prévoir une filière alternative pour les
arrêts programmés (maintenance) ou non (incident ou accident) ;
Pour les appareils in situ
- nécessité de prévoir une aire suffisante pour l’entreposage des conteneurs
pleins et une aire de nettoyage et de désinfection des GRV
Pour les appareils extérieurs au site de production
- la durée du transport et du traitement doit être comptabilisée dans
les délais réglementaire (72heures ou une semaine)
L'incinération des déchets d'activités de soins à risques infectieux
Les conditions de mise en oeuvre
Il peut s'agir de :
• Installation spécifique
• Installation d’incinération de déchets dangereux
• Installation d'incinération des déchets ménagers et assimilés
La co-incinération des DASRI dans une usine d’incinération
d’ordures ménagères (UIOM) autorisée à cet effet est le mode
d’incinération le plus répandu sur le territoire national français.
Les prescriptions techniques principales de l’incinération des DASRI
• un traitement en 2 étapes : une incinération à 850°C et une post
combustion à la même température durant 2 secondes ;
• le taux d’imbrûlés ne doit pas dépasser 3 % ;
• la manutention et le transport des récipients se font dans des conteneurs
rigides clos à fond étanche, de manière à préserver l'intégrité de ces
récipients jusqu'à leur introduction automatisée dans le four
Les derniers incinérateurs in-situ ont été
arrêtés au début des années 2000 sur le
territoire français
Incinération externe des DASRI
Il peut s'agir d'une installation spécifique ou d'une installation d'incinération
des déchets ménagers et assimilés conforme aux prescriptions de l'arrêté du
23 août 1989 relatif à l'incinération des déchets contaminés dans une usine
d'incinération d’ordures ménagères UIOM.
UIOM adaptée: Solution qui impose ne pas mêler les DASRI aux autres
déchets, et de conserver l’intégralité du conditionnement jusqu’à
l’enfournement dans le four
l’introduction directe des DASRI dans le four sans manipulation humaine par
l’intermédiaire d’une trémie, d’un sas ou avec un poussoir
Le quota maximum de DASRI admissible est fixé à 10% du total des déchets
incinérés
Les intérêts de l'incinération externe pour l'établissement producteur
- pas d'investissement important en moyens humains et financiers,
- pas d'immobilisation de surface pour le traitement,
- bonnes conditions de combustion dues à un fonctionnement en continu,
- bien équipées en dispositifs de dépoussiérage, de traitement de fumées
- bonne adaptation aux forts gisements,
-contrôle régulier des installations
-enfin le secours en cas de panne est garanti, car il existe plusieurs
lignes d’incinération par UIOM
Les contraintes de l'incinération externe pour l'établissement producteur
-la durée du transport doit être comptabilisée dans les délais réglementaires
(72 heures ou 7 jours),
- coûts variables en fonction de la technologie d'enfournement des déchets
et des distances par rapport à l'usine,
- non maîtrise des coûts en liaison notamment avec les mises aux normes
relatives aux émission gazeuses,
- utilisation de conditionnements conformes à la technologie d'enfournement
et à l'A.D.R.
Cas du département du Rhone (Lyon, France)
Traitement des DASRI au département du Rhône
Constat
Inventaire des quantités de DASRI en Rhône-Aples
Qunatités de DASRI collectés par département
Tonnages
1996
2003
Haute Savoie
Savoie
Rhône
Loire
Isere
Drome
Ardeche
Ain
7000
6000
5000
4000
3000
2000
1000
0
Le Rhône est le plus gros département producteur de DASRI (47% de la
production régionale) soit 5420 T (PREDAS 1996) et 6958T (PREDAS 2003)
423,6
148,3
Répartition des quantités de DASRI collectées dans
le Rhône par type de producteur
<5 Kg/mois
>5 Kg/mois et <100
Kg/sem
6386
>100 Kg/sem
La plus grande quantité de DASRI est produite par les établissements
sanitaire (publics & privés) 92% contre 6% (labo analyses médicales) et 2%
producteurs diffus (PREDAS 2003)
Répartition de la production totale des DASRI par zone géographique
dans le département du Rhône ( DDASS 1996)
Etablissements
publics T/an
Etablissements
privés T/an
60
31
COURLY
3906
680
Tarare
Sud Rhône
Zone de
production
Villeufranche
Production
totale
Producteurs
diffus T/an
Total de
production
T/an
Pourcentage
%
92
2
4545
97
14,33
14,33
0,3
24,22
24,22
0,5
5074,55
100
359
le principal gisement de déchets à risques du département du Rhône est
celui produit par la COmmunauté URbaine de LYon COURLY
Recensement des installations existantes: Données 1996
Le département possède 4 sites de traitement :
- un incinérateur spécifique à l’hôpital Neuro-cardiologique traitant les
déchets des établissements au groupement d’achat des établissements
publics du Rhône, traite 1700 T/ an
- deux sites équipés de banaliseurs de capacité 1200 T/an :
un banaliseur à l’hôpital Hedouard Herriot à Lyon traitant 1100 T /an
un banaliseur à Vénissieux traite 1200 T/an
- un troixième banaliseurs de 1200 T/an sur Villefranche traite 540 T/ an
une capacité de traitement théorique de 5580 T/ an. Cette capacité est
largement suffisante pour traiter la totalité des déchets du département
(4000T/an )
Installations de traitements des DASRI en France
Installations de traitement des DASRI en
France
1996 (ADEME)
2008
UIOM adaptées
19
29
Usines spécfiques
2
3
Usines incinération
déchets industriel
1
3
Banaliseurs
9
19
les filières à caractère définitif qui se sont développées au niveau national sont
l’incinération avec des lignes spécifiques d’alimentation (UIOM adaptées).
Au niveau national, 142 815 T de DASRI sont incinérés contre 21 843 T sont
prétraités
Paradoxalement, le Rhône, département bien équipé en 4 UIOM , a
investi dans l’achat de 3 banaliseurs (1996). Cette solution est liée au fait
que les UIOM ne sont pas en conformité pour certaines et ne traitent pas
la totalité des OM produits dans le département.
Solutions
Selon la démarche nationale et aussi selon les objectifs de PREDAS, la
solution la plus pérenne serait l’incinération sur UIOM par alimentation
spécifique en respectant le principe de proximité et la capacité de
production de des déchets autour de site de traitement
Ainsi une réflexion s’est engagée en vue d’équiper une UIOM du
département d’une ligne d’incinération et augmenter sa capacité et
l’aménager pour traiter les DASRI du département (co-incinération)
Aspect économique par type de traitement 1996
Traitement par désinfections
Coût (euros TTC)
(4000 T de DASRI)
Coût d’investissement en matériels :
4 banaliseurs
(1200T/an x 4) soit 4800 T/an
1,5 M euros
(4x 376 000 TTC)
Coût
(euros TTC/T)
Coût d’exploitation
- Frais d’amortissement (linéaire, 5 ans)
300.751
- Frais de personnel
345.864
45.112,78
- Frais de maintenance + stock de pièces
- Frais transport et traitement final déchets 631.578,95
(157,9 /T
97,74/ T incinéré)
- Frais de consommables (eau, élecrti,
désinfect,…)
Total
120.300
1.443.609
360,9
Incinération four spécifique
Coût (euros TTC)
(4000 T DASRI)
Coût d’investissement en matériels :
2 fours (300kg/h)
1,08 M euros (2x 541.353
TTC)
Coût
(euros TTC/T)
Coût d’exploitation
- Frais d’amortissement (linéaire, 15 ans)
72.180
240.602
- Frais de personnel
162.406
Frais de maintenance + stock de pièces
66.165
- Frais évacuation divers (mâchefers,
REFIOM,.)
150.376
- Frais de consommables
Total
691.729
173 – 207
Incinération UIOM adaptée
Coût (euros TTC)
(4000 T de DASRI)
Coût d’investissement en matériels :
équipement 1 seule ligne de four par une
alimentation entièrement automatisée
526.312
Coût
(euros TTC/T)
Coût d’exploitation
- Frais d’amortissement (linéaire, 5 ans)
105.2
- Frais de personnel
75.188
- Frais de maintenance + stock de pièces
26.316
- Frais de consommables
90.225
- Frais d’incinération
390.977
Total
687.970
172,00
Conclusion
L’incinération
le coût global à la tonne pour traiter les DASRI par incinération, que ce soit
dans un four spécifique ou dans une UIOM adaptée est sensiblement
équivalent alors que celui de la banalisation est plus élevé.
Un autre facteur qui avantage l’incinération est le renouvellement total de
l’installation est beaucoup moins fréquent et moins lourds surtout l’UIOM
l’incinération par une alimentation spécifique sur UIOM est la plus
intéressante
- élimination de bonne qualité liée à une maîtrise plus grande des conditions
d'exploitation dans des unités centrales de traitement (Stabilité decombustion,
- bien équipées en dispositifs de dépoussiérage et de traitements de fumées)
- l’évacuation des résidus d’incinération (mâchefers, REFIOM) moins chère
comptes tenu des volumes importants à traiter,
- de possibilités de récupération d’énergie .
- enfin le secours en cas de panne est garanti, car il existe plusieurs lignes
d’incinération par UIOM
La banalisation
• pose souvent des problèmes de sécurité pour le personnel d'exploitation
(si mauvais tri),
• des contraintes de tri pour les établissements,
• risque de pannes intempestives du broyeur (si mauvais tri),
• les conditions et le coût du traitement final des déchets s’ajoutant à la
banalisation,
•une obligation d'incinération pour les DASRI qui sont susceptible de
renfermer des agents transmissibles non conventionnels (ATNC : type
prion) ou contaminés avec des résidus de traitement anticancéreux
(antimitotiques)
• enfin, des coûts d’investissement et de fonctionnement importants
Situation actuelle
Cependant, de manière générale, il convient de signaler que si
l'incinération est la solution la moins chère, force est de constater qu'à
ce jour ce sont les banaliseurs qui sont installés soit sur site hospitalier
(Rhône, APHP de Paris ; le CHU de Poitiers ; ...) soit sur sites
industriels.
La désinfection représente encore une part très importante 58 % des
tonnages traités en Rhône-Alpes (73% dans le département du Rhône).
Situation actuel au département du Rhône
Département de
prevenance de
déchets
Quantités déclarées par les sites de traitement
(tonnes) 2003
Incinération
désinfection
Total
Ain
6,6
343,5
350,3
Ardèche
0,285
0
0,3
Drôme
84,272
0
84,3
Isère
2109,581
204,6
2314,2
Loire
419,043
1112,9
1531,9
Rhône
1451,8
5082,1
73%
6533,9
savoie
1758
0
1805,0
Haute Savoie
Total
47
5829,8
8010,1
13839,8
42%
58%
Quantités de déchets traitées en Rhône-Alpes en 2003 selon le type de
traitement (PREDAS 2003)
Répartition géographique
Les raisons sont :
- la facilité de mise en œuvre (ces installations ne relèvent pas de la
législation sur les ICPE (dossier très léger, pas d'enquête publique, ....) ;
- les déchets une fois banalisés sont évacués, avec les OM au moyen de
bennes "compactrices", en décharge car les taxes (TGAP) sont plus faible
que celles liées à l'incinération
- L’autre frein à l’incinération est le transport des DASRI vers les UIOM
équipées. Ce transport coûte cher car ces produits ont une densité très
faible puisque le compactage de ces déchets est interdit
 - la réglementation (délais de traitement et traçabilité) pénalise la filière
(coût de personnel) qui n'incite pas les exploitants d'UIOM à être "moteur"
pour favoriser ce mode de traitement.
Merci pour votre attention