Idée noire ou plus jamais je ne titillerai la fée verte

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Idée noire ou plus jamais je ne titillerai la fée verte
Question de point de vue
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Idée noire ou plus jamais je ne
titillerai la fée verte
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Par Raphaël D'Amore
Militant aux Equipes Populaires de Mons-La Louvière
Avec le soutien de
Drôle d’animal que l’homme. Terrifiant animal. Du genre à surpeupler la terre à raison de 3
rejetons par seconde, sans se soucier des suites. Capable d’être un loup pour son frère. Vrai
génie de l’auto-extermination de masse. Mais aussi du genre à écrire des poèmes avant la
bataille. « Le seul être de la création qui a ajouté la littérature au meurtre » !
Des idées noires, direz-vous peut-être. Oui. Mais avant tout, des idées. Nées d’une capacité à
s’émouvoir et à s’indigner, puis à questionner. Ce qui est le propre de cet animal pensant
qu’est l’homme. L’auteur, homo sapiens comme tant d’autres parmi nous, livre trois idées
noires, dont voici la troisième.
Nous sommes tous des Apollinaire ? Nous devenons
le bourreau armé d’un fusil, d’une voiture polluante,
d’un caddie de supermarché bourré de sacs
plastiques qui finiront en dioxines et PCB (dérivés
chimiques chlorés) dans le lait des mamans et la
chair des bébés.
Dieu que la guerre est jolie
(partie 1)
(citation de Guillaume Apollinaire)
Nous sommes le seul animal de la création qui
ajoute la littérature au meurtre. L’homme est
l’unique être vivant qui compose des poèmes
avant la bataille : ce qui ne l’empêche pas de salir
son pantalon avant de monter à l’assaut, il
anéantit ses semblables en chantant «la Madelon,
l’Internationale, ou le cantique des cantiques…»
mais il devient aussi sans aucun complexe le
bourreau de la nature.
Nous n’avons plus de prédateurs naturels - (ours des
cavernes, tigres, requins…) - Il reste si peu de
créatures bien peu agressives. Nous n’avons qu’un
seul ennemi : les microbes, virus, bactéries… mais
ces prédateurs sont lâches, invisibles, nous
subissons la grippe, la peste, le paludisme.
Frustration ! Ces ennemis bafouent les règles du
combat singulier et donc nous retournons notre
violence contre nous-mêmes, nous devenons nos
tueurs à la fois prédateurs et proies. Ainsi nous
créons les conditions de notre extinction.
Dans les années soixante, Rachel Carson, dans son
livre «Printemps silencieux», révèle
l’empoisonnement de la chaîne alimentaire au DDT
(insecticide). Il éveille le
mouvement écologiste et amène
à l’interdiction du DDT… Mais
problème, nous répandons bien
plus d’insecticide aujourd’hui que
dans les années soixante.
Nous saccageons notre planète dont nous avons
besoin pour respirer, manger, boire, vivre… Nous
inventons, avec une imagination sans limite, mille
machines à tuer : la hache de pierre, la kalachnikov,
les missiles nucléaires.
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Nous fabriquons par milliers de tonnes de
mégatonnes d’armes blanches, conventionnelles,
chimiques, bactériologiques, atomiques. Nous
appuyons sur la détente, mettons le feu aux
poudres, lançons des gaz de combat. Nous
préparons de terrifiantes épidémies de variole, de
charbon (anthrax c’est la même chose, de gros
bubons noirs et le grand noir au bout) et tout cela
avec une facilité déconcertante… Nous arrivons à
nous justifier "défense du monde libre", "guerre
juste" et demain nous appuierons sur le grand feu
d’artifice nucléaire.
dans sa grotte jouit en mobilisant les mêmes
molécules que Jack l’éventreur ou qu’un couple
faisant l’amour… Le paradis communique avec
l’enfer.
Nous nous faisons hara-kiri, notre suicide nous
fascine. Nous pleurons sur la tragédie humaine mais
nous l’accélérons, la maison s’écroule et nous
branchons la télévision, la fumée nous fait tousser,
et nous regardons l’élection de miss blonde ou la
coupe du monde de foot. Nous avalons avec un air
béat la logorrhée des politiciens et des économistes
qui nous promettent la croissance perpétuelle et
s’extasient sur la progression d’un quart de point de
l’indice de confiance de l’institut de statistiques.
Ce noyau est farci de récepteurs de dopamine, un
neurotransmetteur comme la sérotonine… On peut
dire que c’est la molécule du bonheur… Toutes nos
émotions, l’amour, la joie, la haine, la tristesse… ne
sont qu’un mélange, un subtil équilibre entre ces
molécules… en un mot comme en cent… rien que
de la chimie.
Fin du cours de biologie des passions.
Dans notre cerveau, il existe des aires de plaisir et de
récompense, tout se passe dans ce que l’on nomme
cerveau primitif ou reptilien. C’est là que se trouve le
support de la mémoire et des émotions ainsi que
dans un petit organe insignifiant, négligeable "le
noyau d’accumbens", et c’est dans cet amas de
neurones que s’élabore le plaisir.
Si Dieu existe, il se moque de nous derrière son
nuage, mais si Dieu nous a créés, quel flop ! Quel raté
historique !
ème
Le 21 siècle sera belliqueux, la conclusion pourrait
être une série de conflits terrifiants se terminant par
une 3ème guerre mondiale… une apothéose, la
guerre nucléaire, la dernière, la plus belle tant elle
sera lumineuse et au final de ce feu d’artifice,
l’humanité serait grillée, irradiée, affamée, anéantie
sans le moindre espoir de renaissance. Ne resterait
que les cafards et les scorpions.
Lorsque ces récepteurs sont excités : nous aimons,
nous adorons, nous sommes gratifiés par ce que
l’existence possède de plus positif… l’extase… nous
sommes heureux !
La peau s’échauffe, les yeux papillotent, la
respiration s’accélère, le cœur bat plus fort, nous
bavons, nous gloussons… Alléluia ! Nous avons un
orgasme… Nous avons l’air idiot, béat, que nous
voulons le revivre… bis repetita placent !
Allez hop ! Un petit verre de fée verte.
Nous avons trois pulsions essentielles ancrées en
nous. Le sexe, le territoire, la domination. Nous
adorons qu’elles nous fouettent et nous fassent
ramper… parce qu’elles nous font plaisir.
Petit cours de biologie des passions
Le plaisir et son
cortège de fantasmes
est subjectif, nous les
renforçons par des
images excitantes, d’où
la notion de péché,
base de toutes les
religions, s’y trouve
aplatie. Le schéma
organique du bien et
du mal, du vice et de la vertu, de l’amour et de la
haine sont d’un poids moléculaire égal. L’ermite
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Lorsque nous ressentons
le plaisir, nous identifions
la cause : un bon vin, un
visage ami, le spectacle
d’un sexe. Nous en
mémorisons la source,
nous cherchons à y revenir
et nous nous retrouvons
dépendants, en addiction,
obligés d’augmenter la
dose… Nous sommes tous accros, junkies. On a
beau nous persuader que nous sommes adultes,
vaccinés, rationnels, maîtres de nos passions, en
vérité nous ne contrôlons rien, nous disons amen à
nos circuits de la récompense que Freud nomme le
«CA». Notre moi, notre surmoi, nos sentiments,
notre religion, notre morale se plient aux oukases de
nos récepteurs de dopamine.
Dur à avaler hein ! Nous sommes drogués, nous en
oublions jusqu'à ce que nous sommes : "homo
sapiens" l’homme sage.
Les stupéfiants majeurs les plus faciles à trouver
sont le sexe, la domination, le territoire. Ce ne sont
ni les moins chers, ni les moins dangereux mais ils
sont légaux.
égorgent l’infidèle en psalmodiant "Dieu est
grand…".
Les types de domination varient avec les époques :
Les critères peuvent être socio-économiques : il en
est ainsi dans l’antiquité (esclaves, plébéienspatriciens) ou l’Inde (intouchables aux
maharadjahs), à la féodalité (serfs-clergé-seigneurs)
ou dans les classes sociales (quart-monde,
prolétariat, petite et moyenne bourgeoisie,
capitaliste, world company…).
La distinction relève parfois de la religion : dans les
théocraties, curé, pope, pasteur, imam, rabbin sont
infaillibles.
Le degré de tolérance au
sexe varie avec l’intensité
de la coercition religieuse,
les intégristes de tout poil
fustigent l’acte charnel qui
les obsède.
La vibration érotique n’est pas la même dans
l’occident de 1968 et dans l’Iran des mollahs.
Imaginez un Woodstock à Téhéran : la musique rock,
cent mille corps nus, sous un portrait de l’ayatollah
Khomeiny en train de chanter "faites l’amour et pas
la guerre sainte"… Stop ! J’arrête ce délire (les
effets de la fée verte sans aucun doute…). Les fous
d’Allah, les barbus hurleraient au sacrilège.
A qui porte la bonne parole par le prosélytisme ou la
guerre sainte, on promet la domination suprême…
UNE PLACE AU PARADIS…
Du côté du territoire et de la hiérarchie, tout est
permis. Encouragées, la possession, la domination
sont élevées au rang des valeurs : on les récompense
par des biens matériels, salaires, profits, médailles.
Chaque fois que nous étendons notre territoire ou
que nous prenons le dessus sur quelqu’un, nous
jouissons. Un flot de dopamine et autres molécules
nous envahissent et on ne demande qu’une seule
chose RECOMMENCER… Devenir plus riche, plus
puissant. A l’inverse, nous souffrons si un concurrent
nous dépasse. Comme tout animal, nous aimons
notre territoire parce que nous nous y sentons en
sécurité, il nous garantit notre approvisionnement :
nourriture, eau, air… Il accroit nos chances de
rencontrer un partenaire sexuel (Spinoza dirait : qu’il
permet à notre être de préserver dans son être) !
Nous ne connaissons pas d’expression plus douce
que "faire son nid, fonder un foyer"… Le sans-abri
est malheureux, le nomade inquiète, suscite la
suspicion, le rejet, la haine… Nous n’avons plus
conscience que nous sommes dans une société où
l’on meure lentement… et que notre ultime
territoire sera celui d’une concession au cimetière.
Nous défendons nos biens comme un chien sa
niche…
Avec les utopies communistes, le territoire, la
hiérarchie prennent un autre sens : Tout le monde a
la même valeur, mais comme l’écrivait Georges
Orwell dans la ferme des animaux "certains sont plus
égaux que d’autres". Les
dirigeants du parti épousent
la cause du peuple… Ils
mangent du caviar… mais
prolétarien… ils vivent dans
des palais… mais se font
appeler «camarades»… ils
citent Marx… le congrès
applaudit… preuve qu’ils
aiment les masses
populaires… Ils s’appellent Lénine, Staline, Mao,
Castro, El Che… Ils séparent le bon grain de l’ivraie
gauchiste ou révisionniste en appliquant la vertu
égalitaire des chars d’assaut dans les rues de
Budapest, Prague, ou Tien’anmen.
D’autres codes d’évaluation sont moins lourds que
les tanks : Le bulletin scolaire, le tableau d’honneur,
le championnat de foot… Il leur arrive également de
faire des morts. Nous utilisons tous les moyens pour
escalader l’échelle sociale : la banque, la politique, le
commerce, l’escroquerie, le droit, les médias et
même l’amour et l’amitié.
Les stratégies de groupes excellent : le
corporatisme, le communautarisme, le poujadisme,
le populisme triomphant.
Il s’ensuit une foire d’empoigne dont la guerre n’est
que le délire suprême… L’orgasme
sadomasochiste… Partout l’individu affronte
l’individu, le groupe défie le groupe.
Dans le manifeste du parti communiste Marx lance :
PROLETAIRES DE TOUS LES PAYS UNISSEZ-VOUS !
Devant le spectacle de ceux qui se battent pour leur
clocher, leur ethnie, leur religion, je crie :
«INDIVIDUALISTES DE TOUS LES PAYS RESTEZ-LE !»
Il suffit d’observer les relations entre voisins, les
collègues au travail, les politiciens, les écrivains, les
philosophes qui se haïssent en dissertant sur la
bonté universelle, ces humanitaires qui se disputent
les victimes ou ces soldats de la vraie foi qui
Allez hop ! Un petit verre d’absinthe.
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Un autre trait de notre nazisme essentiel est le
racisme.
Tous les biologistes, anthropologues,
ethnologues éclairés, intelligents, censés savent
qu’il n’existe qu’une et une seule race : HOMO
SAPIENS SAPIENS. La couleur de la peau, des
yeux sont des traits génétiques négligeables. S’il
faut greffer le cœur d’un aryen fasciste, on a
autant de chance de trouver l’organe compatible
dans la poitrine d’un juif, d’un noir ou d’un arabe.
Mais rien n’y fait, le racisme prospère.
train de navetteurs en entendant un poivrot
éructer des insultes contre les «négros,
bougnoules… ». Sûrement que cet imprécateur
imbibé de bière à bon marché
appartenait à la race des
seigneurs.
Entre le racisme et la guerre il y
a l’épaisseur d’une grenade.
Nous avons le racisme… nous
aurons la guerre.
Il existe un autre homo sapiens qui pousse jusqu’à
l’absurde notre désir de domination : le terroriste.
Celui qui pose une bombe dans un train, qui réduit
en lambeaux la chair innocente, en clamant qu’il agit
dans un but politique ou pour son dieu : celui-là peut
être appelé "le plus humain des hommes Nietzsche".
Il concentre tous les caractères de notre espèce
dont certains disent que seul "un dessein intelligent
a pu le créer".
Le kamikaze endoctriné, dont on a reformaté le
cerveau jusqu'à se faire exploser les boyaux, est le
plus bel exemple de ce que nous incarnons.
Aucun chimpanzé, orang-outan, gorille, bonobo
(n’oublions pas que nous sommes des primates
évolués…quoique j’en doute…) n’irait se suicider
pour l’empereur des macaques du Japon ou le Ben
Laden des gorilles. Le grand frisson du terroriste nait
de la perception du pouvoir qu’il exerce sur ses
semblables au moment d’infliger… dix, cent, mille
victimes d’un coup… un avant-goût de puissance
divine. Le tueur en série éprouve la même excitation,
un éclair de jouissance, un subtil équilibre entre
dopamine, endorphine, sérotonine…
Comment la bête immonde donne naissance
au racisme en trois étapes : démonstration
1ère étape
Je veux accroitre mon territoire (plaisir), mon voisin
me gêne, je dois le dominer (plaisir) puis je
l’extermine (double plaisir).
Pour m’en débarrasser, je vais le discréditer par le
verbe puis l’achever par le pogrome (massacre).
D’abord je l’anéantis en parole, je répands l’idée,
«scientifiquement démontrée», qu’il appartient à
une race inférieure. Je le décris comme stupide, laid,
paresseux, voleur, pervers, vicieux. Il est repérable
par sa peau (noire, bronzée), ses cheveux (crépus,
frisés…), il sent mauvais, parle fort, ne songe qu'à
forniquer.
2ème étape
Lorsque je l’ai dévalorisé à mes yeux, et si possible
aux siens, il me reste à le parquer dans un ghetto. Le
jour où j’ai besoin d’un bouc émissaire je déclenche
le massacre "discours de Nuremberg – discours
d’Hitler" ou "les effluves nauséabondes de Radio
mille collines à Kigali (Rwanda)"…
3ème étape
Pour que l’opération soit une réussite… je me pose
en victime, je ne suis pour rien dans ces événements,
tout ce qui arrive est de sa faute… "Il n’avait qu’à
s’intégrer". Le méchant au gros nez ou la peau
basanée me veut du mal, il me dévalise, séduit ma
femme… Si personne ne l’arrête, il sera maître chez
moi, sa présence perturbe la bonne marche de la
société, laquelle deviendrait idéale si je refusais le
problème une fois pour toute… et je passe à l’acte
avec la satisfaction du citoyen responsable, je suis en
état de légitime défense, je protège les miens. En
éliminant cette erreur de l’évolution, je fais mon
devoir et j’éprouve un plaisir pour le travail bien fait.
S’il avait la moindre idée de ce que signifie
"civilisation" celui que j’élimine devrait me
remercier. Fin de la démonstration.
"Un raciste est un crétin congénital possédant le
QI d’une blatte". J’ai lancé cette phrase dans un
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Concernant les septante vierges promises au
martyr… à mon avis je pense qu’il s’agit d’une
interprétation erronée… septante asticots… ceux-là
au moins c’est sûr.
Allez, à votre santé… il reste encore une demibouteille d’absinthe…
Ecrit en écoutant best of : Creedence clearwater
revival 1969.
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PS : "La religion est l’opium du peuple" disait Marx à
son époque… aujourd’hui on est proche de la
cocaïne.