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DOSSIER
LA CONFIRMATION
LA TENDANCE
LE POINT FORT
LA CONTRAINTE
L’OBJECTIF

La chute des subventions
publiques qui ne représentent
plus que 24 % du financement des
associations contre 34 % en 2005.

Le basculement d’une relation
contractuelle entre associations
et pouvoirs publics vers une
relation de prestataire de services.

La capacité du secteur associatif
à construire des réponses nouvelles
aux besoins non satisfaits ou
émergents des territoires.

L’Europe, qui oblige
à redéfinir la place des
associations dans l’économie.

Affirmer l’ancrage territorial du
secteur associatif et reconnaître son rôle majeur dans le
développement économique.
L
DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES
LE RAYONNEMENT ASSOCIATIF
La CPCA et France Active
ont organisé, le 22 janvier
dernier, un colloque intitulé
« Les associations, actrices du
développement économique
et social des territoires ».
L’occasion d’affirmer la
biodiversité du secteur qui
irrigue les territoires de ses
divers projets.
e centre d’économie de la
Sorbonne2 a lancé, en 2012, son
quatrième programme de recherche auprès
des associations. Conduit dans un contexte
de fortes mutations et de crise économique,
ce programme vise deux objectifs majeurs :

mesurer et analyser l’activité du monde
associatif en produisant les indications chiffrées essentielles qui font défaut relatives au
poids économique des associations et aux
principales composantes du secteur ;

repérer les grandes évolutions du
monde associatif intervenues au cours de
ces dernières années, par comparaison
avec la dernière enquête conduite en
20063.
L’enquête a été organisée, comme les
précédentes, à partir des mairies afin de
contourner les difficultés qui tiennent à
l’absence d’un répertoire national des associations vivantes et de nombreuses questions ont été posées dans les mêmes termes
ou dans des termes très similaires de façon
à pouvoir comparer dans de bonnes conditions les résultats des deux enquêtes.
LE PAYSAGE ASSOCIATIF
FRANÇAIS EN 2012
Six ans après la dernière image du paysage associatif français,
la nouvelle enquête est achevée. Présentation de quelques
premiers résultats1.
des modalités des financements publics, de
l’emploi salarié, du travail bénévole et du
profil des dirigeants.
L’exploitation de l’enquête est en cours et
s’appuie sur un échantillon final soumis à
analyse de 8 000 questionnaires. Les résultats ont été redressés en fonction d’hypothèses qui ont pu être formulées sur le
nombre d’associations et la structure du
secteur selon l’emploi salarié et le domaine
d’activité. Le nombre des associations en
activité a été estimé à 1,3 million ; près de
du secteur permet de dégager quelques
grandes tendances de résultats sur la période
2005-2011.
AUGMENTATION SOUTENUE
DU NOMBRE D’ASSOCIATIONS
Le nombre des associations a continué de
croître à un rythme soutenu – près de 3 %
par année en moyenne – malgré les quelques
fléchissements observés en matière de
création d’associations (voir tableau 2 page
Le nombre des associations a continué de croître à un rythme
“
soutenu au cours de la période 2005-2011 malgré les quelques
fléchissements observés en matière de création d’associations.
Les associations créées sont plus souvent des petites associations de
membres, actives dans les domaines culturel et de vie sociale locale.
”
Le questionnaire adressé aux associations
compte 180 questions organisées autour du
profil de l’association (date de création, aire
d’intervention, nombre d’adhérents, structuration en réseau, type de population cible),
des ressources budgétaires, de l’origine et
183 000 d’entre elles ont recours à l’emploi
salarié, les autres associations s’appuyant sur
le bénévolat pour mettre en place leur projet
(voir tableau 1 page suivante).
Le traitement actuel des données relatives
au poids économique et au financement
1. Cette recherche a pu être réalisée grâce au soutien
du ministère de la Culture (direction des études et
de la prospective), de la Fondation Crédit coopératif,
de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), de
l’Institut CDC pour la recherche, de la Fédération
nationale du Crédit mutuel et de CHORUM. Les
résultats complets seront disponibles
en septembre 2013.
2. Laboratoire mixte CNRS et université de
Paris 1 – Panthéon-Sorbonne.
3. V. Tchernonog, Le Paysage associatif français,
Mesures et évolutions, Éditions Juris / Dalloz, 2007.
suivante). Les associations créées au cours
de la période 2005-2011 – qui représentent
près du quart du tissu associatif – sont plus
souvent des petites associations de membres,
actives dans les domaines culturel et de vie
sociale locale.
SOMMAIRE
P. 19 — Le paysage associatif français en 2012
P. 22 — Photographie économique : enquête
Journal officiel
P. 24 — Interview croisée : « Les associations
doivent réinventer des modèles
économiques moins dépendants
de la puissance publique »
18
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
P. 25 — Associations, actrices du développement
des territoires
P. 28 — Interview : « Il faut un système métropolitain avec une prodution de biens
et de services à haute valeur ajoutée »
P. 29 — Quels modèles économiques associatifs
au service des territoires ?
P. 32 — Interview : « L’engagement citoyen est
facteur de respiration démocratique »
P. 33 — Europe et territoires : quel cadre pour
soutenir les activités d’intérêt général ?
P. 37 — Interview : « Nous travaillons
à une remise à plat de la fiscalité
des associations »
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
15 avril 2013 - jurisassociations 477
19
DOSSIER
SECTEUR DE POIDS
TABLEAU 1
RÉPARTITION DES ASSOCIATIONS SELON LE SECTEUR
D’ACTIVITÉ ET L’EXISTENCE D’EMPLOI SALARIÉ DANS
L’ASSOCIATION
Associations
sans salarié
Associations
employeurs
Ensemble
Action humanitaire
3,8 %
4,5 %
3,9 %
Action sociale / Santé
8,6 %
20,9 %
10,3 %
Défense des droits et causes
14,7 %
3,6 %
13,1 %
Éducation, formation, insertion
2,8 %
8,5 %
3,6 %
Sport
23,7 %
28,4 %
24,4 %
Culture
20,7 %
19,2 %
20,5 %
Loisirs
22,8 %
8,5 %
20,8 %
Économie et développement local
2,9 %
6,4 %
3,4 %
Total
100 %
100 %
100 %
TABLEAU 2
DATE DE CRÉATION DES ASSOCIATIONS
SELON L’EXISTENCE D’EMPLOI SALARIÉ DANS
L’ASSOCIATION*
Associations
sans salarié
Associations
employeurs
Total
Avant 1950
9%
9%
9%
1951 à 1970
9%
9%
9%
1971 à 1990
29 %
35 %
30 %
1991 à 2000
18 %
23 %
19 %
2001 à 2004
10 %
9%
10 %
2005 et plus
25 %
14 %
23 %
100 %
100 %
100 %
Total
Le poids du secteur associatif, mesuré selon
le budget annuel cumulé de l’ensemble
du secteur, a continué de se développer à
un rythme assez soutenu de 2005 à 2010
malgré la crise économique et les contractions intervenues dans les budgets publics.
Depuis 2011, on observe au contraire une
stagnation du secteur en termes d’emploi
et de budget. Au final, le taux de croissance
moyen en volume observé de 2006 à 2011
est de l’ordre de 2,5 %. L’enquête montre
que le quart des associations qui ont recours
à l’emploi de professionnels salariés ont
parfois cédé des actifs, pour celles qui en
disposaient, afin de traverser la crise et de
maintenir l’emploi.
DÉVELOPPEMENT
DU FINANCEMENT PRIVÉ
La croissance en volume du secteur a surtout
été portée, comme pour la période précédente, par les financements privés, qui ont
augmenté globalement bien plus vite que
les financements publics tous confondus.
C’est essentiellement la participation des
usagers au service rendu par l’association, de
l’ordre de 4 % par an, qui explique l’important développement du financement privé :
les financements privés liés à la générosité
(dons et mécénat) ont crû, mais au même
rythme que l’ensemble du budget associatif
et leur part dans le budget cumulé des associations est restée globalement la même.
CONTRACTION DES FINANCEMENTS
PUBLICS
Les financements publics ont continué de
croître en volume au cours de la période
2006-2011. Cette croissance réelle – mais
limitée – est due à l’augmentation des
financements en provenance des conseils
généraux qui a compensé les contractions
des financements publics en provenance
des autres acteurs publics. La part relative
des financements des communes a baissé :
c’est une première. Le poids de l’État dans
le financement du secteur a continué de
diminuer. Si la baisse du poids de l’État est
tendancielle sur le long terme, les baisses
récentes intervenues dans les financements
de l’État sont principalement dues à la
crise économique qui a des répercussions
immédiates et importantes sur les finances
de l’État (rentrées en TVA, cotisations
sociales). Les conseils généraux s’affirment
désormais comme le premier partenaire
du monde associatif en termes de volume
de financements en assurant 12 % de son
financement.
L’évolution des modalités des financements
publics au secteur associatif est d’abord
marquée par une contraction importante
de la fréquence des relations financières : les
financements dits « de saupoudrage », mais
qui avaient une forte valeur symbolique de
reconnaissance entre les acteurs publics
et les associations, sont désormais nettement moins nombreux, y compris dans les
municipalités.
Avec la contraction des financements
publics, les acteurs publics ont tendance à
se recentrer autour de leur compétence :
l’action sociale pour les conseils généraux,
l’éducation et la formation pour les régions.
TABLEAU 3
PART DES SUBVENTIONS DANS LES BUDGETS
2011
Rappel 2005
Cotisations
11 %
12 %
Dons et mécénat
4%
5%
Recettes d’activité publiques et privées
60 %
49 %
Subventions publiques
24 %
34 %
Total
100 %
100 %
baisse annuelle moyenne de 3 %. Leur part
dans le budget total a donc considérablement diminué : les subventions publiques
représentent moins du quart du budget associatif aujourd’hui ; elles en représentaient
plus du tiers en 2005.
EN ASSURANT
CHUTE DES SUBVENTIONS
L’accélération de la baisse des subventions
est importante. Ainsi, la part des subventions
dans les budgets a baissé de façon très importante : 17 % en volume en six ans, soit une
de son financement, les conseils
généraux s’affirment désormais
comme le premier partenaire du
monde associatif en termes de
volume de financements.
AUTEUR
TITRE
Viviane Tchernonog
Chercheur au CNRS,
centre d’économie de la Sorbonne,
université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne
* Date d’observation : 2011.
20
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
12 %
La répartition des subventions publiques
entre les associations montre en outre que
celles-ci apparaissent extrêmement concentrées auprès de quelques grandes associations
délégataires de missions de service public.
71 % des subventions bénéficient à environ
27 000 associations, qui sont nombreuses à
vivre de ces subventions. Cette concentration explique que la plupart des associations
fonctionnent sans subventions publiques ou
avec des subventions publiques largement
symboliques (voir tableau 3).
Le volume du travail bénévole a continué
de croître, mais on observe une nette décélération de la croissance de ce volume malgré
une forte augmentation du nombre d’engagements par bénévole. 
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
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DOSSIER
PHOTOGRAPHIE
ÉCONOMIQUE : ENQUÊTE
JOURNAL OFFICIEL
Indépendamment de la composition des ressources financières,
les associations présentent des situations économiques et
financières diverses. Le CNAR Financement, porté par France
Active, propose de les appréhender au travers de l’analyse des
comptes d’associations disponibles au Journal officiel.
I
l est important de rappeler que les
associations qui ont perçu plus de
153 000 euros de dons ou plus de 153 000
euros de subventions au cours du dernier
exercice comptable ont l’obligation, depuis
2006, de déposer leurs comptes sur le site du
Journal officiel1, même si les modalités de
dépôt n’ont été précisées par un arrêté qu’en
20092.
À ce jour, selon nos estimations, seules 8 000
à 12 000 associations ont rempli leurs obligations en déposant leurs comptes, alors
qu’au moins 16 000 associations, soit 9 %
des associations employeurs, auraient dû les
déposer.
L’analyse porte sur un échantillon de 600
comptes d’associations de 2008 à 2010, soit
5 à 8 % des comptes disponibles sur le site
ANALYSE FINANCIÈRE
ÉLÉMENTS DE DÉFINITION
➜ Les fonds propres correspondent à ce qui appartient définitivement ou durablement à
l’association. Ils comprennent notamment le cumul des résultats de l’exercice et des exercices antérieurs, les apports et les subventions d’investissement.
Le montant total des fonds propres se calcule à la lecture du bilan, qui est une photographie
du patrimoine de l’association à un instant donné.
➜ La rentabilité d’exploitation représente le résultat d’exploitation (c’est-à-dire lié à l’activité) ramené au budget d’exploitation de l’association (= résultat d’exploitation / budget
d’exploitation x 100).
Le résultat d’exploitation est le principal indicateur de « rentabilité ». Il se calcule à la lecture
du compte de résultat, qui reprend l’ensemble des produits et des charges réalisés au cours
d’une année. Il permet d’étudier le modèle économique de l’association et de constater si
l’activité de l’association est viable.
22
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
du Journal officiel. Toutes les régions et tous
les secteurs sont représentés – y compris les
organismes de gestion de l’enseignement
catholique (OGEC) et les associations
cultuelles. Il est à noter cependant une
surreprésentation des associations franciliennes, due à une forte représentation des
fédérations et des têtes de réseau.
Les premiers résultats de cette étude
montrent des situations financières très différentes selon notamment les secteurs d’intervention des structures. Parmi les associations
étudiées, c’est-à-dire celles qui détiennent les
budgets les plus importants, quatre catégories ont pu être distinguées.
Cette typologie vise à regrouper les associations présentant des similitudes en termes de
situation financière (basée essentiellement
sur le niveau de fonds propres) et de modèle
économique (basé sur la rentabilité d’exploitation) pour étudier leurs problématiques et
leurs enjeux communs.
SITUATION FINANCIÈRE
RÉPARTITION DES ASSOCIATIONS SELON QUATRE CATÉGORIES
Situation financière + + +
(niveau de fonds propres)
Les rentières
18 %
Modèle économique - - -
Les robustes
18 %
Les équilibristes
40 %
Modèle économique + + +
(rentabilité d’exploitation)
Les souffrantes
24 %
Situation financière - - -
LES « ROBUSTES »
Les associations « robustes », qui constituent
près de 20 % de l’échantillon, ont une très
bonne assise financière, renforcée chaque
année par un résultat net excédentaire. Elles
ont pu se développer ces dernières années et
recruter tout en gardant un modèle économique stable – même si la rentabilité d’exploitation baisse. On retrouve notamment
dans cette catégorie des associations du
champ de l’action sociale et de l’enseignement catholique.
l’insertion et ont à la fois une assise financière insuffisante – moins d’un trimestre de
fonds propres par rapport au budget pour la
plupart – et une rentabilité d’exploitation
négative, voire très négative. Pour améliorer
leur modèle économique, une partie d’entre
elles ont dû débaucher sur la période.
activité n’est donc pas viable. Cette très bonne
assise financière leur permet de dégager des
résultats financiers qui améliorent le résultat
net de ces associations mais qui cachent les
difficultés liées à l’activité. On retrouve dans
cette catégorie le secteur de la santé notamment et toutes les associations cultuelles.
LES « ÉQUILIBRISTES »
On constate également que, pour une petite
moitié de l’échantillon, la situation est suffisante aujourd’hui pour faire face au quotidien. Ces « équilibristes » ont néanmoins un
modèle fragile qui pourrait facilement être
déstabilisé par le contexte actuel incertain. 
LES « RENTIÈRES »
LES « SOUFFRANTES »
Les associations « souffrantes » englobent
celles agissant majoritairement dans le
secteur de la culture, du sport ou encore de
Les associations « rentières » sont les associations qui ont les assises financières les plus
confortables – 80 % ont plus de 90 jours de
fonds propres –, mais qui ne réussissent pas
à équilibrer leur modèle économique. Leur
1. Pour en savoir plus, se reporter au site : www.journalofficiel.gouv.fr > « JO Associations & comptes annuels ».
2 . Arr. du 2 juin 2009 portant sur les obligations des
associations et des fondations relatives à la publicité de leurs comptes annuels, JO du 4, texte n° 1.
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
AUTEUR
TITRE
Maud Leblon
Chargée de mission,
France Active
AUTEUR
TITRE
Fanny Gérôme
Chargée de mission,
développement territorial,
CNAR Financement – France Active
15 avril 2013 - jurisassociations 477
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DOSSIER
SYNTHÈSE DE LA 1re TABLE RONDE
INTERVIEW CROISÉE
“ Les associations doivent réinventer des modèles
socio-économiques moins dépendants de la puissance publique ”
NADIA BELLAOUI
PRÉSIDENTE DE LA CONFÉRENCE
PERMANENTE DES COORDINATIONS
ASSOCIATIVES (CPCA)
CHRISTIAN SAUTTER
PRÉSIDENT DE FRANCE ACTIVE
Les associations sont contraintes d’évoluer
rapidement sous peine d’une perte d’efficacité et de sens de leur action. L’équation
que les associations ont à résoudre est donc
la suivante : comment faire plus avec autant,
ou comment faire autant avec moins ?
Quels sont les besoins du secteur associatif en matière de financement ?
Quels sont les défis à relever pour le
monde associatif ?
N. Bellaoui. Tout en étant l’instrument
d’initiatives collectives de citoyens, les associations sont des actrices économiques à
part entière. Ancrées territorialement, elles
apportent aux populations des services essentiels à la qualité de vie et participent à une
économie de proximité. Pour développer
ces activités, elles ont besoin de consolider
leurs modèles économiques et de s’appuyer
sur des outils financiers indispensables à leur
croissance. Pour pouvoir gérer les décalages
de paiement de leurs financeurs mais aussi
investir et innover, elles ont notamment
besoin de se constituer des fonds propres.
Or, la culture de la subvention est celle du
budget à l’équilibre et ne laisse pas la possibilité aux associations de constituer des
réserves à partir de leurs financements non
consommés.
C. Sautter. Nous sommes dans un contexte
en mutation et face à un paradoxe : les besoins
des services rendus par les associations sont
de plus en plus importants, mais les moyens
financiers pour répondre à ces besoins
croissants sont stables, voire décroissants.
N. Bellaoui. Les associations sont confrontées à d’importantes mutations et subissent
les conséquences de la détérioration des
finances publiques. Elles doivent donc
réinventer des modèles socio-économiques
moins dépendants de la puissance publique.
Nous y travaillons tout en revendiquant la
nos organisations devront se transformer
pour leur faire plus de place. Le deuxième
défi à relever pour l’avenir des associations
sera de réussir à mieux travailler entre elles
et avec d’autres acteurs, à se situer dans une
posture de coopération avec les collectivités
territoriales et avec l’ensemble des acteurs
sur les territoires tels que les entreprises et
universités.
C. Sautter. Les associations doivent faire face
à un recentrage des financements publics
sur certains secteurs, lié aux compétences
d’attribution des collectivités au détriment
d’autres. Leur accès au financement se
fait dans un environnement de plus en
plus concurrentiel. Parallèlement, la situa-
Tout en étant l’instrument d’initiatives
“collectives
de citoyens, les associations
sont des actrices économiques à part entière
légitimité et la nécessité de la contribution
publique à l’action d’intérêt général des
associations. Deux exemples : si la législation
leur est (encore ?) favorable, tout reste à faire
pour développer une culture du don et du
mécénat en France. De même, nous aurons
certainement de plus en plus souvent
recours au bénévolat et si nous pouvons
compter sur l’engagement des Français,
”
tion critique de l’emploi, marquée par
une première baisse de l’emploi associatif
constatée fin 2010, amène à s’interroger sur
les conditions permettant aux associations
d’apporter leur contribution à la création et à
la consolidation d’emplois de qualité.
Enfin, la contrainte de plus en plus forte des
cadres européens oblige à redéfinir la place
des associations dans l’économie. 
L
e poids du secteur associatif dans
l’économie française est toujours
apprécié au regard du nombre d’emplois
qu’il génère (1,8 million de salariés), de
son intervention dans des secteurs d’activité
variés, parfois également de ses 86 milliards
d’euros de budget total, auxquels il
conviendrait par ailleurs d’ajouter toutes
les ressources non monétaires, comme le
bénévolat, malheureusement aujourd’hui
encore très mal valorisées1.
Ces données, même si elles permettent de
mieux appréhender le secteur associatif, sont
encore très insuffisantes pour se représenter
son intervention dans notre économie nationale, et plus encore dans notre économie
locale. Il est donc légitime de s’interroger
sur la place et le rôle des associations dans
le développement des territoires, et avant
tout sur la notion même de développement
local.
LA NOTION DE « DÉVELOPPEMENT
LOCAL »
Le développement territorial est souvent
associé à la question de la croissance, au
calcul du PIB, à la compétitivité productive
des territoires. Une association « abusive »,
selon Laurent Davezies, enseignant en
économie et développement territorial au
Conservatoire national des arts et métiers
(CNAM), « car la part la plus importante
des revenus qui irriguent le développement
d’un territoire ne vient pas de la production
locale mais de l’extérieur : salaires publics,
retraites, prestations sociales, dépenses de
touristes, etc. ».
Le développement local ne peut donc pas
s’expliquer par la seule création de richesse
(PIB), mais par un modèle hybride combinant les revenus liés à la production (vente
ASSOCIATIONS, ACTRICES
DU DÉVELOPPEMENT
DES TERRITOIRES
Quel est le rôle des associations dans le développement
territorial ? Offres, pratiques, initiatives associatives : retour sur
les débats qui ont animé la première table ronde des rencontres
organisées par la CPCA et France Active.
à l’extérieur de biens et de services produits
à l’intérieur du territoire) et les transferts de
revenus qui génèrent de la consommation
locale : par exemple, les retraités dans les
espaces ruraux, le tourisme notamment
dans les zones de montagne et du littoral, les
navetteurs actifs autour des grandes agglomérations, les transferts sociaux, c’est-à-dire
allocations chômage, minima sociaux,
aides au logement ou remboursements de
soins de santé. Il conviendrait également de
retenir d’autres indicateurs comme ceux de
l’empreinte écologique, du développement
humain (santé, éducation, niveau de vie,
etc.), ou encore de santé sociale.
En prenant en compte ces moteurs du
développement local, les collectivités territoriales sont amenées à intervenir dans
plusieurs domaines dans le cadre de leur
politique d’action économique. Cela passe
notamment par le soutien à l’enseignement, le développement de filières d’avenir,
l’appui à la création et au développement
d’entreprises et l’investissement dans l’innovation. Ces différents axes d’intervention
permettent aux collectivités de renforcer le
tissu économique local et donc de consolider et de créer des emplois dans leurs
territoires.
Ces actions ne peuvent être déconnectées
des démarches plus larges des collectivités
visant à renforcer l’attractivité de leurs territoires. En effet, les critères de choix d’implantation géographique des entreprises
reposent largement sur des facteurs tels que
le cadre de vie, les écoles, l’offre culturelle
et sportive ou la qualité des infrastructures.
Quels que soient leurs domaines de compétences, les collectivités interviennent donc
souvent directement sur les questions de
développement économique des territoires
à travers leurs politiques culturelle, de transport, ou encore de logement.
Le secteur associatif, par sa diversité et ses
actions transversales aux enjeux économiques locaux, relève de bon nombre
1. Pour un dossier d’ensemble sur la valorisation du bénévolat, voir JA n° 433/2011, p. 17.
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jurisassociations 477 - 15 avril 2013
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
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25
DOSSIER
de ces politiques publiques. Il est
donc nécessaire que l’ensemble des élus – et
pas seulement ceux en charge de l’ESS ou
de la vie associative – puissent être mobilisés
et qu’ils coconstruisent l’action publique en
direction des associations.
LES ASSOCIATIONS, ACTRICES
DU DÉVELOPPEMENT LOCAL ?
L’une des forces du secteur associatif
est sa capacité « à imaginer le monde
autrement, à être un lieu de formulation
d’utopies », indique Cyril Kretzschmar,
conseiller délégué à la nouvelle économie,
aux nouveaux emplois, à l’artisanat et à
l’économie sociale et solidaire à la région
Rhône-Alpes. Il s’agit en d’autres termes
de construire des réponses nouvelles aux
besoins non satisfaits ou émergents des territoires. Aude Torchy, déléguée générale de
l’AFIP2, rappelle cependant que les associations ne doivent pas oublier de réinterroger
régulièrement leur projet associatif au risque
de ne plus être en phase avec les besoins des
habitants et de ne pas être en capacité de
répondre aux évolutions de leurs attentes.
Pour Laurent Fraisse, socio-économiste au
LISE3, il en découle une fonction d’innovation sociale qui se matérialise par de
nouvelles formes de solidarité, de nouveaux
modes de coopération... et qui doit trouver
un juste équilibre avec le maintien des
services existants. Il précise que « l’innovation sociale ne doit pas être un prétexte à
des politiques d’austérité », permettant de
MÉTROPOLE
NOUVELLE ÉCONOMIE GÉOGRAPHIQUE, FUTUR
ENJEU DU SECTEUR ASSOCIATIF ?
La nouvelle économie géographique à l’œuvre aujourd’hui s’intéresse avant tout à la concentration spatiale et à la mobilité.
Appliquée notamment par la réforme des collectivités et sans doute bientôt par l’acte III de
la décentralisation, c’est l’avènement des métropoles, c’est-à-dire des grandes aires urbaines
qui concentrent tous les facteurs de production (meilleure circulation de l’information, lien
entre offre et demande sur les différents marchés, économies d’échelle, etc.) et les moyens
financiers favorisés par les transferts de compétences de l’État vers ces agglomérations. Pour
l’État, l’enjeu de ces métropoles est essentiellement économique. L’objectif dans la réforme
est de permettre aux grandes agglomérations qui le souhaitent d’assurer leur rayonnement
à l’échelle européenne, voire mondiale.
L’impact de cette nouvelle économie géographique est que les territoires périphériques
(villes petites et moyennes, monde rural, régions industrielles en déclin) vont être en difficulté car, contrairement aux métropoles, il leur sera plus difficile de concentrer et d’optimiser
les facteurs de production.
Va-t-il y avoir de nouveaux enjeux pour le secteur associatif permettant d’éviter une fracture territoriale (associations de prévention, associations socioculturelles pour la politique
de la ville, offre de loisirs en milieu rural, nouveaux services, etc.) et de garantir les équilibres sociaux (intervention auprès des personnes âgées, aide à domicile pour les personnes
dépendantes, etc.) ?
26
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
répondre à la nécessité de faire toujours plus
avec moins de financements publics.
Il est à noter également que ces activités
innovantes pourront ensuite être dupliquées dans les territoires grâce notamment
au rôle de capitalisation et d’essaimage
que doivent assurer les têtes de réseau et les
coordinations.
Laurent Fraisse évoque aussi le rôle important « d’amortisseur et de réparation » du
secteur associatif, même si limiter les associations à ce rôle serait réducteur. Un tissu
associatif riche et dense permet de répondre
aux aspirations des citoyens en contribuant à
l’attractivité des territoires, avec par exemple
des crèches associatives ou des centres culturels, et en proposant aux habitants de s’investir dans la vie locale.
Il ajoute que les associations ont des liens
avec le secteur privé, certaines pouvant
même être amenées à organiser une partie
de la vie économique des territoires. C’est
le cas des associations d’insertion, qui favorisent le développement de compétences
professionnelles de personnes éloignées de
l’emploi, des structures d’appui à la création
d’entreprise, des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE)4 et de leur
capacité à organiser des coopérations entre
tous types d’acteurs économiques locaux.
Au-delà du rôle direct qu’elles peuvent
jouer dans le développement économique,
les associations permettent aux citoyens de
participer et de s’approprier les enjeux de
cet essor ; elles sont d’une certaine façon des
intermédiaires. Gilles Vermot-Desroches,
délégué général de la fondation Schneider
Electric et directeur du développement
durable, insiste sur cette fonction de participation des associations au débat public, à la
prise en compte des aspirations et des préoccupations de la société. « Le secteur asso-
ciatif dit quelque chose de l’acceptabilité,
de l’ambition collective. Il représente une
vision de la société », précise-t-il. Il est représentatif d’une parole citoyenne, qui permet
d’ouvrir le débat trop longtemps tenu par
quelques experts.
Enfin, dans le cadre du mécénat, entreprises
et associations peuvent s’investir ensemble
sur des projets communs. « Le mécénat ne
relève pas du don », souligne Gilles VermotDesroches. « L’entreprise ne remplacera
pas un État nécessiteux. » Les associations
doivent entrer dans une logique de partenariat et de dialogue avec les entreprises5.
Elles doivent s’intéresser à leurs projets et
leurs attentes. À titre d’exemple, la fondation
Schneider Electric soutient une association rhônalpine, Sport dans la ville6, car il
s’agit d’un projet d’insertion professionnelle
plutôt innovant qui répond aux enjeux fixés
par la fondation et qui permet à l’entreprise
de mobiliser ses collaborateurs.
2. Association de formation et d’information
pour le développement d’initiatives rurales.
3. Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique, CNAM / CNRS.
4. Pour plus d’informations, se reporter au site
du Labo de l’ESS : www.lelabo-ess.org.
5. Pour un dossier d’ensemble sur ce
sujet, voir JA n° 476/2013, p. 18.
6. Pour en savoir plus, se reporter au
site : www.sportdanslaville.com.
ENJEUX ET PISTES D’ACTION
Lors de la table ronde, plusieurs enjeux pour
le secteur associatif ont pu émerger.
➜ Faire valoir une vision plurielle de l’économie et renforcer le rôle d’interpellation
sur le développement économique. Pour
cela, et plus largement sur toute la question de la participation au débat public, les
associations devront mieux intégrer dans
leur organisation les nouvelles technologies
(Web 2.0), notamment pour favoriser la
participation des plus jeunes générations.
➜ Mieux se connaître pour faire face
aux mutations à venir. Par exemple, un
diagnostic sur l’emploi dans le secteur
associatif pourra être réalisé afin d’être en
capacité de consolider les emplois et d’améliorer les conditions salariales et de travail.
Géraldine Welter, responsable de la convention « Agir pour l’emploi » à la Caisse des
dépôts, rappelle à ce sujet que cette dernière
soutient des études sur le secteur associatif et
travaille avec un grand nombre de ses partenaires (réseaux, dispositifs locaux d’accompagnement, experts).
➜ Savoir mieux coopérer, apprendre à
travailler ensemble, éviter les concurrences
entre associations sur un même territoire,
développer de nouveaux modes de coopération comme les PTCE. Pour cela, il
convient de coconstruire des réponses en
associant les différents acteurs : associations,
pouvoirs publics et partenaires privés.
➜ Diversifier les sources de financement
et mieux utiliser les ressources internes.
Par exemple, les bénévoles des associations
peuvent être une très bonne porte d’entrée
pour engager une discussion avec les entreprises mécènes. Les associations n’exploitent
pas suffisamment ce lien avec leurs bénévoles issus du monde de l’entreprise.
Au terme de cette table ronde, l’ensemble
des intervenants ont conclu sur le rôle
crucial que joue le secteur associatif dans
l’ensemble du développement local. Il
trouve une large part de son dynamisme
en apportant des réponses aux besoins non
satisfaits des habitants et rassemble des
projets très divers, qui irriguent et favorisent
l’ensemble de l’économie des territoires. Il
devra néanmoins faire face, dans les années
à venir, à d’importantes mutations avec la
nécessité de répondre à des besoins sociaux
croissants alors que les dépenses publiques
sont en baisse. 
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
AUTEUR
TITRE
Fanny Gérôme
Chargée de mission,
développement territorial,
CNAR Financement – France Active
15 avril 2013 - jurisassociations 477
27
DOSSIER
SYNTHÈSE DE LA 2e TABLE RONDE
L
INTERVIEW
“ Il faut un système métropolitain
avec une production de biens et de services
à haute valeur ajoutée ”
LAURENT DAVEZIES
PROFESSEUR AU CNAM,
TITULAIRE DE LA CHAIRE « ÉCONOMIE
ET DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES »
Comment s’est caractérisé le développement local en France au cours des
30 dernières années ?
La mondialisation a déstabilisé les systèmes
productifs locaux et régionaux, mais dans le
même temps, des mécanismes de mutualisation se sont développés. En effet, les
dépenses publiques et sociales, c’est-à-dire
les revenus de redistribution, n’ont cessé de
progresser. Ce sont plusieurs dizaines de
milliards d’euros qui sont transférés chaque
année entre les territoires par un mécanisme
de prélèvements et de dépenses de l’État et
de la Sécurité sociale.
Grâce à ce système de redistribution des
revenus dans les territoires et en dépit de
la concentration productive de certaines
métropoles, les territoires périphériques et
ruraux se sont développés de façon tout à fait
satisfaisante durant les 30 dernières années.
À quelles évolutions assiste-t-on
aujourd’hui en termes de développement local ?
On assiste actuellement à un ralentissement
de ce phénomène qui devrait marquer,
après 30 années de cohésion territoriale,
des disparités entre les territoires les plus
productifs, les plus riches, les plus denses
et les villes moyennes, le monde rural, les
territoires industriels en déclin. En effet, la
crise de la dette et la question des déficits
révèlent la situation très particulière des
budgets publics en France. D’une façon ou
d’une autre, la France va être amenée dans
les années à venir à réduire son déficit et sa
dette soit par une réduction des dépenses
publiques et sociales, soit par une augmentation des prélèvements. Toute modification
de la structure du budget aura des effets très
contrastés sur les territoires.
Quels sont les risques et les opportunités
en matière de développement local en
France ?
De façon générale, les plus fortes progressions du taux de chômage frappent les territoires les plus industriels mais aussi les moins
résidentiels, dans lesquels la consommation
et les emplois « domestiques » sont peu
présents et peu dynamiques.
Cependant, la crise de 2008-2009 n’a pas
spécifiquement affecté les secteurs qui
étaient déjà en difficulté : ce qui a pesé sur
l’emploi durant ces quelques années difficiles a moins été l’accélération des destructions que le coup d’arrêt donné aux créations d’emplois. L’essentiel des destructions
d’emplois enregistrées sur 2008-2009 est le
fait des secteurs industriels qui continuent
leur déclin au même rythme, mais le plus
gros du choc sur l’emploi, spécifiquement
lié à cette crise, est subi par les secteurs les
plus dynamiques du pays.
Une différence importante entre les secteurs
pérennes et les secteurs industriels en difficulté tient au fait que les premiers réagissent
fortement aux turbulences conjoncturelles
mais disposent d’une capacité de « résilience » qui leur permet de rebondir avec la
reprise de la croissance. Les seconds perdent
des emplois qu’ils ne retrouveront jamais : ce
qui est perdu est perdu.
Quant aux opportunités, c’est à nous de
les créer. Il nous faut un système métropolitain qui fonctionne et qui permette de
maximiser les avantages des métropoles en
matière de production de biens et services à
haute valeur ajoutée. Notons également le
fort potentiel de la France dans le domaine
touristique ou encore le développement
d’activités productives dans les territoires
résidentiels, comme la Côte d’Azur. 
➜ POUR ALLER PLUS LOIN
Laurent Davezies a publié La République et ses territoires : la circulation invisible des richesses (Seuil, 2008)
et La crise qui vient, la nouvelle fracture territoriale
(Seuil, 2012).
es associations évoluent dans un
monde de plus en plus concurrentiel,
y compris dans des secteurs qui leur étaient
jusqu’alors réservés. De plus, elles doivent
faire face à des contraintes de reporting et
de contrôle renforcé liées à leur financement par la puissance publique. Elles sont
ainsi conduites à se doter d’outils de gestion
toujours plus complexes. Les tensions sur
les financements publics et la limitation
des marges de manœuvre budgétaires, la
contraction de certains marchés renforcent
cette nécessité et poussent une partie
du secteur à s’interroger sur son modèle
économique.
Si nul ne doute de la capacité des associations à mettre en place une gestion rigoureuse et à développer des outils pertinents
pour le pilotage de leur activité, reste à
savoir si un modèle économique propre aux
associations peut encore exister dans un tel
contexte et si les associations peuvent éviter
l’isomorphisme institutionnel ou entrepreneurial. Leur intégration à des dynamiques
de développement local comme productrices de biens et de services ou comme
actrices de l’attractivité des territoires laisset-elle la place à un modèle spécifique ou
les rabat-elle systématiquement vers les
modèles de l’entreprise marchande d’un
côté, du service public de l’autre ?
La deuxième table ronde réunie lors de
la journée France Active – CPCA sur ce
thème, le 22 janvier dernier, a permis de
mettre en lumière le caractère pluridimensionnel de cette question pour les associations en la traitant non pas uniquement
sous l’angle de la gestion économique et
financière, mais en examinant ce qui fait la
spécificité du secteur du fait de sa relation
particulière aux pouvoirs publics nationaux
et locaux, d’une part, et de la dimension
QUELS MODÈLES
ÉCONOMIQUES
ASSOCIATIFS AU SERVICE
DES TERRITOIRES ?
Entre le modèle de l’entreprise marchande et celui du secteur
public, l’association doit promouvoir son propre schéma. Au-delà
de l’angle économique et financier, c’est l’occasion de mettre en
avant les particularités du secteur.
d’engagement citoyen consubstantielle au
fait associatif, d’autre part.
A été posée la question de l’accompagnement des mutations auxquelles les associations doivent faire face1 et des espaces de
négociation qui peuvent être mis en place
localement pour favoriser la construction de
modèles à la fois solides sur le plan économique et dynamisants pour l’implication
citoyenne.
APPRENDRE À GÉRER COMME
DES ENTREPRISES ?
Les associations sont régulièrement appelées à progresser en matière de gestion. Le
contexte économique tendu et la montée
des risques ainsi que la raréfaction des financements publics convergent sur ce point.
L’État comme les collectivités territoriales
accompagnent ce mouvement en attribuant
des moyens aux dispositifs locaux d’accompagnement ou en soutenant les démarches
des fédérations pour outiller leurs adhérents.
Si cette nécessité ne fait pas débat, dans un
contexte où, comme le rappelle Isabelle
Eynaud-Chevallier, directrice adjointe à
la Direction générale de l’emploi et de la
formation professionnelle, « il faut accroître
la capacité des associations à résister aux
chocs », la question est de savoir si l’on
dispose des cadres de référence les mieux
adaptés aux spécificités des associations.
Philippe Eynaud, responsable de la chaire
des sciences de gestion à l’IAE de Paris,
estime qu’un cadre de gestion propre au
secteur doit être construit, qui n’abolit pas
le quantitatif mais le complète pour tenir
compte des dimensions liées à l’ancrage de
l’association dans son environnement et à
ses relations au territoire.
En effet, les sciences de gestion ont été
construites essentiellement pour accompagner le développement de l’économie
marchande. Elles ne permettent pas d’appréhender des données caractérisant
1. Pour un dossier d’ensemble sur ce
sujet, voir JA n° 465/2012, p. 17.
28
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
15 avril 2013 - jurisassociations 477
29
DOSSIER
une entité économique,
“ Avant d’être
une association est un ensemble
certains échanges non monétaires ou
la dimension de l’engagement citoyen. « On
a besoin de produire du chiffre pour éclairer
le débat. Les sciences de gestion permettent
également de définir un ensemble d’indicateurs pertinents facilitant le dialogue
avec la puissance publique autour de l’allocation de moyens liés à la mise en œuvre
d’une politique publique. Mais le risque
serait de n’avoir qu’une vision financière.
Pour avancer dans le domaine associatif,
il faut s’inscrire dans le concept d’une
économie plurielle, permettant de marier
les différentes logiques, celle de l’échange
marchand, celle de la réciprocité et celle
de redistribution en dépassant le sophisme
économiste décrit par l’économiste hongrois
Karl Polanyi, qui réduit l’économie à sa
dimension d’échange marchand. »
Michel Dinet, président du conseil général
de Meurthe-et-Moselle, appelle le secteur
associatif à ne pas systématiquement s’inscrire dans des modèles issus de l’économie
marchande en devenant des « associations
lucratives sans but », au risque d’oublier
l’histoire dont elles sont issues et ce qui fonde
leur projet. Il faut pour cela que leurs partenaires publics ne les entraînent pas dans une
logique uniquement de prix de journée ou
de simple courroie de transmission pour la
mise en œuvre de leurs politiques.
des réponses en vue de s’adapter à un cahier
des charges. Dès lors, on peut imaginer
le développement progressif de normes
et d’indicateurs de gestion de plus en plus
convergents.
L’idée d’avoir un seul modèle par secteur
d’activité, permettant de définir des ratios
universels, peut paraître séduisante pour
des intervenants financiers qui cherchent
à gagner du temps dans l’appréciation du
dossier, mais la pratique montre qu’elle est
erronée. Suivant que l’association agit dans
un territoire dans lequel les partenaires
publics sont dans une logique de mise en
concurrence ou agissent dans un cadre très
contractualisé, l’analyse du risque sera totalement différente.
Comme le souligne Denis Dementhon,
directeur du développement territorial du
réseau France Active, cela implique, pour
un opérateur financier susceptible d’apporter des moyens financiers sous forme de
prêts ou de fonds propres, que l’analyse d’un
dossier ne pourra se faire qu’au cas par cas et
sur des critères qualitatifs : l’environnement
de l’association et son rapport au territoire
fondent sa solidité au moins autant que le
niveau de ses fonds propres ou l’équilibre de
ses comptes.
COURSE À LA TAILLE
OU COOPÉRATIONS ?
VERS UN MODÈLE UNIQUE ?
L’une des tendances observées par les études
sur le monde associatif2 est le basculement
accéléré au cours des dernières années
d’une relation contractuelle négociée entre
les associations et les pouvoirs publics vers
une relation de prestataire de services. Le
développement des appels d’offres et de la
mise en concurrence pousse à un formatage
Pour le secteur médico-social, Bruno Coste,
directeur de l’Uriopss Ile-de-France, pointe
néanmoins une tendance lourde, liée au
renforcement des mécanismes descendant
d’allocation de moyens par la puissance
publique. Sans imposer systématiquement
des fusions d’associations, les agences régionales de santé (ARS) demandent aux acteurs
de coopérer et de travailler en réseau. Face
à cette demande formulée dans un souci
d’efficacité et de rationalisation, deux attitudes sont observées : soit les associations
choisissent la fusion ou la croissance externe,
soit des structures plus petites cherchent à
construire des coopérations en préservant la
« biodiversité associative ».
L’Uriopss est amenée à accompagner
certains adhérents dans ces différentes
voies, mais son directeur estime qu’il n’y a
pas de voie unique et que, dans certains cas,
« il vaut mieux avoir un banc de poissons
réactifs qu’une baleine un peu lourdaude.
Certaines structures grandissent beaucoup
trop vite et ne consolident pas suffisamment,
et l’on risque d’avoir peut-être quelques
mauvaises surprises ».
Philippe Eynaud rappelle qu’il ne peut y
avoir de modèle unique d’évolution : des
restructurations ou évolutions peuvent
prendre des formes variées, allant de simples
regroupements jusqu’à des fusions, en
passant par la mise en place de moyens en
commun. Si des facteurs économiques
globaux plaident pour de tels regroupements, il ne faut pas en sous-estimer les coûts
cachés : la création d’une nouvelle entité
ou le rattachement à une plus grande structure peut faire perdre la relation privilégiée
qu’entretenait une association avec ses partenaires du fait d’une histoire commune, elle
peut émousser l’engagement citoyen bénévole qui conditionnait la qualité et la dimension humaine du service rendu...
Plusieurs exemples de coopérations peuvent
être mis en avant : l’Uriopss Ile-de-France
a créé une centrale de référencement
commune à ses adhérents, qui permet
de peser sur les coûts de certains achats.
Plusieurs acteurs du secteur culturel
de Saint-Étienne – certains associatifs,
d’autres à but lucratif – ont créé un pôle
de parties prenantes qui se réunissent
pour résoudre un problème sur un territoire
territorial de coopération économique
(PTCE) et participent à la mise en œuvre
de la politique culturelle de l’agglomération. Isabelle Eynaud-Chevallier rappelle
que ce type de coopération n’est pas l’apanage du secteur associatif. On observe les
mêmes mécanismes entre les entreprises
de certains territoires fortement marqués
par un secteur d’activité : les chocs de la
concurrence extérieure obligent celles-ci
à sortir de leurs logiques de concurrence et
à inventer des coopérations pour conquérir
de nouveaux marchés par des actions
collectives.
RAPPORT AU TERRITOIRE
Mais le territoire, espace possible de coopération, peut devenir un lieu de compétition
avec la tendance à multiplier les appels
d’offres et l’érosion du mode de la subvention qui prévalait largement jusqu’à ces
dernières années.
Pour Michel Dinet, avant d’être une
entité économique, une association est
un ensemble de parties prenantes qui se
réunissent pour résoudre un problème
sur un territoire. Si l’on stérilise la capacité
d’initiative avec l’inversion de la logique des
appels à projets, le secteur associatif perd sa
capacité à produire des réponses nouvelles
et adaptées.
Sur un secteur comme l’éducation populaire, le conseil général de Meurthe-etMoselle propose que son intervention
financière repose sur un « socle de sérénité, qui permet de reconnaître le fait associatif en tant que tel. Sur cette base, on
peut construire des projets en commun
en refusant par choix l’appel à projets ou
l’appel d’offres, en se basant sur l’histoire de
l’association ».
Sur ce champ comme sur l’ensemble des
secteurs d’intervention du conseil général,
le soutien aux projets est déterminé dans le
cadre de conférences territoriales auxquelles
sont associés les élus locaux et le secteur
associatif.
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
➜ Renforcer et professionnaliser l’accompagnement. L’État et les collectivités terri-
QUELLES PISTES POUR CONSOLIDER
LES MODÈLES ÉCONOMIQUES ?
toriales soutiennent l’accompagnement des
associations par le biais des dispositifs locaux
d’accompagnement ou en apportant des
moyens aux fédérations associatives. Ces
moyens doivent être maintenus et portés
au bon niveau pour accompagner des
tendances lourdes du secteur. Leur accompagnement doit lui-même être ajusté aux
réalités associatives et à leurs évolutions, ce
qui suppose d’avancer dans la connaissance
des modèles économiques associatifs et dans
les sciences de gestion.
Les participants à la table ronde ont évoqué
plusieurs pistes, au-delà des propositions
formulées par la CPCA et France Active.
➜ Faciliter l’accès à des moyens d’investissement. Les fonds propres des associa-
➜ Articuler les politiques de l’emploi
avec les besoins du monde associatif.
La politique de l’emploi constitue l’un des
modes d’action de l’État en direction des
associations. Certains secteurs d’activité
investis par le secteur associatif ont encore
des potentiels de création d’emplois liés à
l’augmentation des besoins sociaux ou vont
avoir à faire face à des besoins de renouvellement de générations. Les différents dispositifs tels que le contrat de génération pourront apporter des réponses aux associations,
sous réserve qu’ils soient articulés avec une
réflexion globale de gestion prévisionnelle
des emplois et des compétences. Celle-ci
doit être conduite par secteur d’activité et au
niveau de chaque région. Les acteurs associatifs pourront s’appuyer sur les services de
l’État qui disposent de moyens pour accompagner ces démarches.
2. V. Tchernonog, « Le Paysage associatif
français », enquête CPCA – CNAR Financement, 2012 ; voir en p. 19 de ce dossier.
30
”
tions sont trop souvent insuffisants pour leur
assurer une résistance aux risques et leurs
capacités d’investissement ne permettent pas
toujours de porter les enjeux de développement auxquels elles ont à faire face. On peut
construire des solutions propres à l’économie
sociale en travaillant sur des outils de financement avec les banques ou les financeurs
de l’économie solidaire. Il faut également
trouver les moyens de mobiliser les outils de
financement du développement élaborés
pour le secteur marchand : la Banque
publique d’investissement (BPI) ou le Fonds
européen de développement régional
(FEDER) devront pour cela intégrer des
critères d’intervention permettant aux associations de les mobiliser. L’accès à ces moyens
dépendra in fine de la capacité qui sera laissée
aux associations de dégager des excédents
de gestion dans le cadre de leur activité pour
consolider leur assise financière. 
AUTEUR
TITRE
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
Denis Dementhon
Directeur du développement
territorial, France Active
15 avril 2013 - jurisassociations 477
31
DOSSIER
SYNTHÈSE DE LA 3e TABLE RONDE
E
INTERVIEW
“ L’engagement citoyen est
facteur de respiration démocratique ”
MICHEL DINET
PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL
DE MEURTHE-ET-MOSELLE
En quoi les associations contribuent-elles
au développement des territoires ?
Les associations sont évidemment moteur
de la dynamique qui est créée sur un territoire en termes de développement mais
sont également créatrices d’activité dans le
domaine économique, dans le domaine
de la culture, du sport et de la science. Par
conséquent, elles sont un moteur en même
temps qu’elles sont initiatrices et créatrices
de richesses humaines et de richesses
marchandes.
Comment les départements peuvent-ils
encourager le développement des activités associatives ?
Depuis longtemps, nous avons considéré,
au conseil général, que les associations
n’avaient pas à répondre à des appels d’offres
ou appels à projets divers, mais qu’elles
devaient être considérées comme des partenaires à part entière du département. Nous
avons donc mis en place un financement
dit « de sérénité », complété ensuite par
des financements sur projets. Cela permet
de faire face à la houle avec une certaine
solidité.
Quelles sont les complémentarités entre
les actions de l’État, des collectivités et
des associations ?
La solidité d’une république décentralisée repose sur trois piliers essentiels. Le
premier pilier est celui d’un État fort, avec
des compétences régaliennes bien identifiées. Le deuxième pilier est celui des
collectivités locales, qui doivent être plus
respectées qu’elles ne l’ont été car elles
peuvent apporter une partie des réponses
aux problèmes de nos concitoyens mais
également aux questions de développement
local. Les collectivités régionales, départementales, communales et intercommunales
sont ce deuxième pilier. Et il y a un troisième
pilier qu’on oublie trop souvent, c’est celui
de l’engagement citoyen. Cet engagement
est fondamental car il est facteur de respiration démocratique et il est moteur d’innovation et d’invention sur les territoires.
Dans le cadre des travaux relatifs au projet de
loi sur la décentralisation, quand je participe
au groupe qui va retravailler sur la place et
la relation des associations avec l’État et les
collectivités, ou quand j’entends François
Lamy, ministre délégué à la Ville, parler
d’un réinvestissement de la politique de la
ville dans le cadre d’une politique nouvelle
basée sur le territoire, je me dis que tout cela
va dans le bon sens. Mais pour l’instant, je
ne vois rien apparaître de solide dans les
textes préparatoires à la troisième étape
de la décentralisation quant à la parole et
à l’engagement citoyens. Or, cette question me paraît fondamentale. Pour des
raisons démocratiques et pour des raisons
d’efficacité. 
Les associations sont évidemment moteur de la dynamique
“
qui est créée sur un territoire en termes de développement
mais sont également créatrices d’activité dans le domaine économique,
dans le domaine de la culture, du sport et de la science
”
32
jurisassociations 477 - 15 avril 2013
n France, l’intérêt général est un des
pivots de l’action publique, dont il
fonde la légitimité. Depuis la fin des années
1970 et la décentralisation, l’État, qui en
était l’incarnation directe, n’a plus le monopole de l’intérêt général. Il le partage avec les
acteurs de la société civile, parmi lesquels les
associations occupent une place déterminante. La puissance publique leur reconnaît
une capacité à faire remonter des besoins
sociaux, à innover, à mobiliser des citoyens
et à agir en proximité tout en dépassant des
intérêts particuliers. Comme le souligne
Brigitte Giraud, vice-présidente de la
CPCA, « le modèle associatif français a cette
particularité de s’inscrire comme contributeur à l’intérêt général ». Et c’est au nom de
l’utilité sociale des associations que l’État
et les collectivités territoriales accordent à
ces dernières des aides publiques, délivrées
jusqu’à maintenant principalement sous la
forme de subventions. Par cet acte unilatéral,
ils leur laissent le soin d’initier, de définir et
mettre en œuvre leurs projets, auxquels ils
choisissent d’apporter un soutien financier.
MARCHÉ INTÉRIEUR VS INTÉRÊT
GÉNÉRAL
« Cette vision n’est pas partagée au plan
européen », constate Brigitte Giraud. En
effet, au sein de l’Union européenne, la
notion d’intérêt général se réduit essentiellement au champ économique. Le secteur
des services d’intérêt général y est libéralisé
et soumis aux lois du marché unique. À
l’origine, les aspects sociaux ne sont pas une
préoccupation majeure du traité de Rome.
La Communauté économique européenne
a été fondée sur le principe de libre circulation des biens, des services, des capitaux et
des personnes (les « quatre libertés »). Les
EUROPE ET TERRITOIRES :
QUEL CADRE POUR
SOUTENIR LES ACTIVITÉS
D’INTÉRÊT GÉNÉRAL ?
La charte des engagements réciproques, signée en 2001 entre
l’État et la CPCA, inscrit les associations comme des acteurs clés
de la mise en œuvre de l’intérêt général. Mais quelle est la place
réservée à ces initiatives collectives et citoyennes au sein de l’Union
européenne ? Leur capacité à favoriser la cohésion sociale et
territoriale est-elle reconnue à Bruxelles ? Éléments de réponse.
libertés fondamentales d’établissement et
de prestation de services sont donc considérées comme des raisons impérieuses d’intérêt général. Pour éviter les distorsions de
concurrence, l’Union européenne interdit
les aides d’État à des opérateurs privés dès
lors qu’elles affectent les échanges entre les
États membres. Dans ce contexte, comment
faire en sorte que la spécificité associative
française dans la mise en œuvre de l’intérêt
général soit respectée alors que la réglementation européenne ne tient compte ni de la
non-lucrativité, ni du statut des associations ?
Pour la Commission européenne, dès lors
que les associations échangent des biens et
services sur un marché, elles sont considérées comme des opérateurs économiques
comme les autres. Ces dernières années,
certains ont vu dans cette réglementation
sur les aides d’État une impossibilité de
continuer à pratiquer le financement des
associations sous la forme de subventions,
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
pourtant gage de reconnaissance de la
capacité des associations à contribuer à des
missions de service public. La première des
conséquences a été la recrudescence des
appels d’offres, mettant les associations en
concurrence, les fragilisant dans leur capacité à répondre aux besoins sociaux et à être
porteuses d’initiatives. Pourtant, une autre
lecture du cadre européen est possible.
MARGES DE MANŒUVRE
Contrairement aux interprétations qui ont
pu être avancées, la législation européenne
offre des marges de manœuvre importantes
aux États comme aux collectivités locales.
Elle admet que la règle d’interdiction des
aides d’État ne doit pas empêcher un opérateur d’accomplir, pour le compte de la
collectivité, un service d’intérêt économique
général (SIEG). Dans sa jurisprudence,
la Cour de justice de l’Union euro-
15 avril 2013 - jurisassociations 477
33
DOSSIER
LA PAROLE
À...
NICOLE
ALIX
ADMINISTRATRICE DÉLÉGUÉE,
CONFRONTATIONS EUROPE
péenne1 a précisé qu’une collectivité
pouvait verser une aide à un opérateur privé
en compensation d’un service public, sans
être soumise au contrôle de la Commission,
dès lors que certaines règles sont respectées :

l’association doit vraiment être en charge
d’une obligation de service public clairement définie ;

les paramètres de calcul de la compensation doivent être préalablement établis,
en toute objectivité et transparence, ce qui
suppose un acte de mandatement ;

la compensation ne peut dépasser ce que
coûte l’exécution de ce service public mais
un bénéfice raisonnable est autorisé ;

si le choix du « prestataire » n’est pas réalisé
dans le cadre d’une procédure de marché
public, le calcul de la compensation doit être
déterminé sur la base d’une analyse des coûts
qu’une « entreprise moyenne, bien gérée et
adéquatement équipée » aurait proposés.
ASSOUPLISSEMENTS
Parallèlement, les crises successives traversées par l’Union européenne depuis 2007
ont profondément modifié le cadre conceptuel de la politique européenne de libre
concurrence. Le dogme de l’efficience
des marchés a montré ses limites et des
appels se sont fait entendre pour replacer
la politique de concurrence dans un cadre
élargi, intégrant une dimension sociale. La
question du contrôle des aides d’État a été
reposée à l’aune de cette préoccupation,
les crises ayant remis au centre du débat le
rôle moteur des investissements publics
dans la croissance. Dans ce contexte, la
Commission européenne s’est employée
à assouplir et clarifier les implications des
règles applicables au sein des États membres
afin de garantir que les services d’intérêt
1. CJCE 24 juill. 2003, aff. C-280/00, dit « arrêt Altmark ».
2. Pour un dossier d’ensemble sur ce
sujet, voir JA n° 458/2012, p. 17.
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jurisassociations 477 - 15 avril 2013
général pourront remplir leurs missions et
contribuer à offrir une meilleure qualité de
vie aux citoyens européens. Sous la pression des acteurs publics et des associations,
la Commission européenne a produit un
ensemble de textes législatifs et réglementaires venus préciser sa législation et dont le
dernier en date est le « paquet Almunia »,
adopté fin 20112. « Nous avons plaidé pour
que ces règles sur les aides d’État ne s’appliquent que lorsqu’il y a un impact sur le
commerce entre États membres », indique
Anne-Laure de Coincy, secrétaire général
adjointe du Secrétariat général des affaires
européennes (SGAE). Cette revendication a été entendue à Bruxelles et prise en
compte dans les nouvelles règles du « paquet
Almunia » : le seuil de minimis en dessous
duquel la législation européenne ne s’applique pas a été relevé à 500 000 euros sur
trois ans pour les SIEG, contre 200 000 euros
auparavant. « C’est une première reconnaissance importante et qui peut apporter une
simplification dans les pratiques », ajoute
la représentante du SGAE. En dessous
de 500 000 euros, seul le droit français
s’applique pour les SIEG. Les aides sont en
effet réputées ne pas affecter les échanges.
Au-dessus de 15 millions d’euros, les aides
doivent être notifiées à la Commission européenne. « Mais de nouveaux secteurs ont
été officiellement exemptés de notification
par la législation Almunia, quel que soit
le montant des financements », se réjouit
Anne-Laure de Coincy, qui fait ici référence aux aides versées à des services sociaux
d’intérêt général (SSIG) « répondant à des
besoins sociaux dans le domaine de la santé
et des soins, de l’aide à l’enfance, de l’accès
au marché du travail, du logement, de la
réinsertion, de l’aide aux personnes vulnérables et favorisant leur inclusion sociale ».
C
onfrontations Europe vise à impliquer les acteurs économiques et
sociaux les plus divers dans la construction
d’une Europe compétitive et solidaire. Car
l’Union européenne ne peut pas être qu’une
Union monétaire. Nous avons besoin d’une
stratégie européenne de compétitivité et
de solidarité, avec des coopérations industrielles européennes, une volonté de s’unir
pour l’emploi et l’inclusion sociale, ainsi
que de promouvoir les indispensables biens
publics et services d’intérêt général. C’est
seulement ainsi qu’on peut contrebalancer
une vision trop « juridique » de la politique
de concurrence, compétence exclusive de
la Commission européenne. Concernant les
services d’intérêt général, il a fallu attendre
près de 15 ans et une prise de conscience
via la directive Bolkestein (dir. 2006/123/CE du
Parlement européen et du Conseil du 12 déc. 2006
relative aux services dans le marché intérieur)
pour que les acteurs du social s’approprient
les enjeux. Sous la pression notamment du
Collectif SSIG, des assouplissements ont
été obtenus fin 2011 avec le « paquet Almunia » : il témoigne d’une compréhension progressive par la Commission de la nécessité
d’assouplir les règles, notamment pour les
services sociaux et les petits services. Mais
les SSIG restent cloisonnés dans un champ
d’exception, traités comme des défaillances
de marché – qui demeure l’idéal type même
lorsqu’il n’y a pas d’opérateurs commerciaux
sur le secteur – ou comme des défaillances
des États : les associations sont très peu
regardées comme des initiatives de citoyens
groupés qui essaient de construire collectivement des réponses à leurs besoins sociaux.
Comme nous avons, en France, une longue
tradition de travail partenarial entre les acteurs associatifs et les pouvoirs publics, nous
vivons les règles européennes comme un
appauvrissement de la richesse de ces relations. Pour d’autres pays, cela peut être perçu
“Montrons à l’Europe que les biens publics
et les solidarités sont utiles et non contraires
à l’économie de marché ! ”
comme une nouveauté. C’est toute la difficulté de l’Union européenne. Les institutions
européennes ont tendance à essayer de faire
des « moules », comme en témoignent des
expressions comme « one size fits all » (« modèle unique ») et « common framework »
(« cadre commun »). Le danger de simplifier
les règles serait de tendre à une uniformisation. Or, il faut s’ancrer dans les richesses
culturelles : la réponse européenne ne peut
pas être un modèle moyen pour un citoyen
moyen avec des besoins moyens. Il faut à la
fois construire encore plus ce cadre collectif,
mais ne pas en faire un dispositif qui lamine
les forces existantes. Entre norme et créativité, les associations ont un vrai rôle à jouer
et des modèles spécifiques à promouvoir.
D’où l’importance qu’elles fassent entendre
leur voix au niveau européen. Pour cela,
elles doivent acquérir une vision prospective des enjeux européens et promouvoir les
alliances, les confrontations avec les autres
acteurs politiques, en ayant conscience des
autres modèles, anglo-saxon, nordique ou
latin. Cela suppose qu’elles soient très au
clair sur leur identité, sans camper non plus
dans une logique corporatiste. Pour éviter la
barrière de la langue – plutôt que d’associations, on parle dans certains pays d’ONG, de
société civile, de nonprofit organizations –, le
plus efficace serait de chercher « la preuve
par l’exemple ». Et travailler parallèlement
à un « droit positif » des services d’intérêt
général dans lequel les associations auraient
toute leur place. Les Italiens, par exemple,
ont introduit dans leur Constitution un principe de subsidiarité horizontale qui consacre
les initiatives groupées, dans une vision positive de la subsidiarité. Pour réenchanter l’Europe, il faut montrer que les biens publics et
les solidarités non marchandes sont utiles et
non contraires à l’économie de marché ! Une
condition pour éviter que le territoire ne se
transforme en espace de compétition.
Ces aides doivent respecter l’ensemble
des règles rappelées plus haut, qui « sont
des règles classiques de bonne gestion de
la dépense publique », mais elles n’ont pas
besoin de recevoir une autorisation préalable de la Commission avant d’être mises en
œuvre.
MANQUE D’APPROPRIATION
« Cette nouvelle législation comporte
des avancées significatives pour le monde
associatif », reconnaît la vice-présidente de
la CPCA. Elle admet qu’une compensation financière versée par une collectivité
publique à un opérateur économique en
contrepartie d’un service d’intérêt général
n’est pas contraire à la libre concurrence.
En théorie, cette clarification aurait dû
permettre aux pouvoirs publics de continuer à soutenir les actions d’intérêt général
mises en œuvre par les associations par le
biais de subventions. Pourtant, les confrontations quotidiennes des associations avec
la pratique de marchés publics montrent
qu’il n’en est rien. L’examen des motifs invoqués pour justifier ces recours aux marchés
publics amène au constat suivant : ces règles
européennes continuent de souffrir d’un
manque d’appropriation. « Les collectivités territoriales rencontrent des difficultés
à appréhender le droit de l’Union européenne », s’alarme Brigitte Giraud. Ces
règles sont prises pour prétexte pour lancer
des appels d’offres, bridant les répondants
de toute capacité d’innovation et les confinant dans un rôle de prestataire. Une situation encouragée par le climat de recherche
d’économies budgétaires, le marché public
étant perçu comme un moyen d’optimiser
les coûts et de rationaliser les dépenses.
MANQUE D’AMBITION
De plus, en dehors de la complexité des
textes, de l’imprécision de certaines notions
et du manque d’opérationnalité, cette législation a manqué d’ambition. Adoptée suite à
une large consultation des parties prenantes,
elle a maintenu l’exigence de mandatement
sans pourtant mieux en préciser le contenu.
Comme aucun cadre législatif national
homogène de mandatement des services
sociaux ne permet aux collectivités de
bénéficier des dispositions protectrices des
traités, il revient à ces dernières la responsabilité de procéder à ce mandatement. Or, il
s’agit d’un outil juridique qu’elles ne se sont
que peu approprié. Faute d’en maîtriser les
tenants et aboutissants, elles continuent de
privilégier le marché public pour sécuriser
juridiquement leurs relations partenariales.
Autre effet limitant : le seuil fixé à 500 000
euros d’aide sur trois ans (166 000 euros par
an) reste largement insuffisant pour l’essentiel du secteur associatif subventionné. Par
exemple, le budget moyen des associations
de l’action sociale et de la formation est
de 560 000 euros par an, dont la moitié au
moins provient de financements publics.
Le seuil de 500 000 euros d’aide sur trois ans
est donc très vite atteint pour les associations
de ces secteurs. D’autant que la tendance
actuelle au regroupement d’associations
restreint davantage le nombre de structures
se situant sous ce seuil. Un seuil de 800 000
euros par an aurait été plus adapté3 puisqu’il
aurait permis « de couvrir l’ensemble
3. Comme l’a souligné le Comité des régions dans
un avis rendu en janvier 2012 (avis 2012/C 9/09 sur
les règles de l’UE en matière d’aides d’État applicables aux services d’intérêt économique général).
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
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DOSSIER
Si l’on peut se féliciter de constater que
“
l’entrepreneuriat social ait le vent en poupe à
Bruxelles, il importe de rester vigilant quant
aux valeurs et pratiques qu’il renferme
des structures de proximité de moins
de 20 salariés qui ne disposent pour seules
ressources que des compensations octroyées
par les autorités publiques ».
”
« analyse plus économique de l’impact sur le
commerce extra et intracommunautaire qui
ne soit pas seulement défini par un seuil ».
(FESE), a posé les premiers jalons d’un
futur marché européen pour le fonds d’investissement social5.
LOBBYING
VIGILANCE
Il n’en reste pas moins que, pour le monde
associatif, ces questions de la réglementation européenne ont eu le mérite de rendre
nécessaire une parole politique forte sur les
spécificités du monde associatif, notamment
au niveau européen. « Cette réglementation est arrivée de manière brutale dans le
monde associatif », souligne Brigitte Giraud,
pour qui « parvenir à faire du lobbying au
niveau européen peut être une ambition de
progression ». Un effort de lobbying d’autant
plus crucial que, aujourd’hui, les entreprises
d’économie sociale courent le risque de
n’être considérées par l’Union européenne
qu’à travers leur capacité à jouer un rôle
dans l’accroissement de la compétitivité
et leur efficacité économique. En effet, au
sein de l’Union européenne, c’est d’abord
la notion d’entrepreneuriat social qui creuse
son sillon. L’année 2011 a été marquée
par une recrudescence de l’intérêt de la
Commission européenne pour l’entrepreneuriat social. Tout d’abord, la refonte de la
politique de cohésion sociale et territoriale
européenne pour 2014-2020 est caractérisée
par une programmation de nouveaux financements européens pour l’entrepreneuriat
social. D’autre part, l’entrepreneuriat social
a été intégré comme l’un des 12 piliers de
l’Acte pour le marché unique (« Single
Market Act ») adopté en avril 20114. Plus
récemment, une proposition de règlement
datant du 7 décembre 2011, concernant les
fonds d’entrepreneuriat social européens
Si l’on peut se féliciter de constater que l’entrepreneuriat social ait le vent en poupe à
Bruxelles, il importe de rester vigilant quant
aux valeurs et pratiques qu’il renferme.
Entendue au sens anglo-saxon du terme,
cette notion pourrait n’être qu’un prolongement philanthropique de l’économie capitaliste : c’est en s’appuyant sur des grandes
entreprises expérimentant des pratiques
boursières à risque que l’entrepreneuriat
social viendrait servir l’intérêt général. Par
ailleurs, il faut être attentif à ce qu’il ne soit
pas envisagé comme un outil de correction
des dégâts sociaux et environnementaux
des modes de production capitalistes, sans
pour autant s’attaquer à leurs causes. Loin
d’être un projet économique et social à
part entière, la vigueur de l’entrepreneuriat
social entendu ainsi dépendrait de l’accroissement des dégâts sociaux et environnementaux. En s’appuyant sur la générosité des très
riches et les classes moyennes en tant que
donateurs et sur les pauvres et les très pauvres
en tant que bénéficiaires, il comporte le
risque de substituer une solidarité privée à
la solidarité publique. En ce sens, il n’est pas
porteur de la même logique d’émancipation
et de transformation sociale qui sous-tend
l’action du monde associatif. D’où l’enjeu,
conclut Brigitte Giraud, « d’arriver à ce que
les spécificités françaises de l’histoire du
mouvement associatif puissent être prises en
compte, comme le permet la réglementation européenne ». 
INTERVIEW
“ Nous travaillons à une remise à plat
de l’ensemble de la fiscalité des associations ”
PROPOSITIONS
Pour le SGAE, l’appropriation de ces règles
et de la procédure de mandatement apparaît comme le défi majeur à relever. « Nous
partageons ce souci de faire de la pédagogie
auprès des acteurs publics, et notamment
des collectivités territoriales », souligne
Anne-Laure de Coincy. Un travail interministériel sur la réalisation d’un guide a été
mené en 2012, soumis à consultation du
Collectif SSIG et élaboré avec les collectivités. Ce guide sera rapidement mis à
disposition sur tous les sites Internet possible
afin que « les ministères et les collectivités
territoriales s’en emparent ». Pour le monde
associatif, l’enjeu de sécurisation nécessite
que l’on aille plus loin en dotant la subvention d’une valeur normative. Cela implique
que l’on inscrive la subvention dans la loi
sur l’ESS en préparation. Sur ce point, la
position de la CPCA est confortée par l’élue
de la région Centre à la tribune, MarieMadeleine Mialot, qui insiste pour que « la
loi favorise l’initiative associative ». Au-delà
de la légalisation de la subvention, les intervenants de cette table ronde s’accordent à
reconnaître la nécessité de créer des cadres
facilement utilisables par les acteurs. Pour
Brigitte Giraud, cela nécessite une méthode
simple pour justifier auprès des financeurs
publics que la subvention, au-delà du
« bénéfice raisonnable » que permet la réglementation sur les aides d’État, ne génère
pas la surcompensation qu’interdit cette
même réglementation. Pour le SGAE, un
autre enjeu est désormais de travailler à une
4. Commission européenne, communication au
Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des
régions du 13 avril 2011, COM(2011) 206 final.
5. Commission européenne, proposition de
règlement du Parlement européen et du Conseil
relatif aux fonds d’entrepreneuriat social européens du 7 déc. 2011, COM(2011) 862 final.
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AUTEUR
TITRE
Marie Lamy
Conseillère technique,
CPCA
BENOÎT HAMON
MINISTRE DÉLÉGUÉ À L’ÉCONOMIE SOCIALE
ET SOLIDAIRE ET À LA CONSOMMATION
Dans le contexte économique actuel,
l’économie sociale et solidaire (ESS) peutelle être un levier de croissance pour la
France ?
Nous souhaitons doter la France d’une
politique de croissance favorisant la biodiversité économique ; l’économie sociale et
solidaire en est un pan essentiel. Le soutien
au développement des acteurs associatifs
nécessite une clarification de leur cadre
fiscal. Or, le crédit d’impôt compétitivitéemploi (CICE)1, mis en place afin de
relancer la croissance, s’appuie sur l’impôt
sur les sociétés (IS), auquel seules 13 % des
associations sont soumises. Nous avons par
conséquent pris une mesure spécifique en
faveur des associations exonérées de l’IS.
Il s’agit d’une hausse de l’abattement sur la
taxe sur les salaires, passant de 6 000 à 20 000
euros, pour un effort de 314 millions d’euros
au budget de l’État. Nous souhaitons
étendre cette mesure en direction des plus
grosses associations, qui sont directement en
concurrence avec le secteur lucratif. Cela
se fera dans le cadre d’un travail partenarial
avec les acteurs associatifs, auquel la CPCA
sera bien entendu associée.
Mon collègue du budget, Bernard
Cazeneuve, est lui aussi mobilisé. Les
inspections des finances et des affaires
sociales travaillent à une remise à plat
1. Voir JA n° 474/2013, p. 6.
2. Circ. NOR PRM/X/10/01610/C du 18 janv.
2010 ; pour un dossier d’ensemble sur
le sujet, voir JA n° 432/2011, p. 18.
3. Centre de recherche pour l’étude et l’observation
de l’ensemble de la fiscalité des associations. De plus, un groupe de travail interadministrations a été mis en place afin de
sécuriser juridiquement leur financement
public, en tenant compte des contraintes
du droit européen. Enfin, j’ai engagé une
simplification de la circulaire du 18 janvier
20102 en y associant le ministère en charge
de la Vie associative.
Que comptez-vous faire en matière d’emploi pour le secteur associatif ?
L’ESS constitue un véritable gisement
d’emplois. Le Crédoc, dans son rapport
de janvier 2013 sur les besoins de maind’œuvre, évalue à 114 000 le potentiel de
recrutements pour cette année sur des postes
non qualifiés et durables3. Le programme
des emplois d’avenir est en phase de déploiement dans le secteur associatif. En 2013, ce
sont 50 000 emplois d’avenir qui seront créés
dans l’ESS. En matière de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et de
formation professionnelle, les partenaires
sociaux et les organismes paritaires agréés
de l’ESS sont mobilisés. Enfin, je souhaite
que mon projet de loi sur l’ESS facilite
davantage l’accès à la commande publique
aux structures de l’ESS, notamment aux
entreprises d’insertion par l’activité économique.
La Banque publique d’investissement
(BPI) ouvrira-t-elle de nouvelles perspectives de financement pour les acteurs
associatifs ?
Oui, 500 millions d’euros de la BPI seront
consacrés à l’ESS. Nous avons aussi fait
en sorte que les acteurs de l’ESS soient
présents dans les instances de gouvernance
de la BPI, à savoir le conseil national et les
comités régionaux d’orientation. Nous veillerons également à mobiliser rapidement
les crédits du programme d’investissements
d’avenir. La BPI prendra la suite et complétera l’action des structures qui financent déjà
l’ESS.
Menez-vous des initiatives au-delà du
seul cadre national ?
Je souhaite exporter à l’échelle européenne
et internationale les efforts que nous
menons. Au niveau européen, nous plaidons pour la reconnaissance des statuts des
acteurs de l’ESS. Dans le cadre de l’OCDE,
la France a décidé de revenir au sein du
programme LEED4 pour porter une voie
alternative. Plus largement, je souhaite
engager un maximum de partenariats de
coopération. L’un des enjeux est de valoriser la singularité de la France, qui dispose
d’un tissu associatif dynamique, créateur de
richesse citoyenne et économique. 
des conditions de vie (Crédoc), « Étude des
besoins en main-d’œuvre dans le secteur de
l’économie sociale et solidaire », janv. 2013.
4. Développement économique et
création d’emplois locaux.
Article extrait de jurisassociations n° 477 du 15 avril 2013. Reproduction interdite sans l’autorisation de Juris Éditions © Éditions Dalloz – www.juriseditions.fr
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