Un jardin pour le vivre ensemble au pied des tours
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Un jardin pour le vivre ensemble au pied des tours
Apriles -> Agence des Pratiques et Initiatives Locales ::. Un jardin pour le vivre ensemble au pied des tours Afin de réduire les tensions entre locataires, les habitants d’un ensemble HLM décident de créer le cadre de rencontres apaisées en aménageant un jardin où chacun est invité à partager sa ou ses cultures. Ce carré de pelouse jusqu’alors inutilisé devient le terreau d’une sérénité retrouvée entre voisins. Paris, 19e arrondissement, un immeuble HLM. Passée la porte du 26 rue du Maroc, puis le porche gris abritant les batteries de boites aux lettres, le visiteur débouche sur un site plutôt inattendu. A la place des traditionnels cours de béton ou carrés de pelouse “interdite”, on découvre un jardin foisonnant découpé en plusieurs petites parcelles. “Ici, des fleurs, là, des légumes”, explique Christophe Jibard tout en arrachant les branches de ce qui reste d’un vieil eucalyptus devenu indésirable. “Un fléau, dès que c’est parti, ça n’arrête pas de pousser au détriment des autres plantes”, continue celui qu’on prendrait volontiers pour un jardinier. Christophe Jibard est en fait agent de développement social. Son job, c’est soutenir dans sa gestion et ses activités l’association “Vivre Ensemble à Maroc Tanger”, un groupe d’habitants de deux immeubles, dont l’activité consiste - entre autre - à faire vivre ce qui est communément appelé le jardin partagé. Un morceau de terre cultivé, coincé entre l'immeuble et un terrain de sport où chaque habitant est invité à venir travailler son petit lopin. “Un espace que les habitants, et les femmes en particulier, ont vraiment investit, et qui est devenu un véritable levier de socialisation dans l'immeuble”, témoigne Christophe Jibard. “Grâce au jardin, on vit bien mieux ici qu'avant”, continue-t-il. Il faut dire que cet ensemble HLM de 120 logements sociaux (avec le 27, rue de Tanger tout proche) revient de loin. “Impayés, expulsions, conflits de voisinage autour de l'utilisation bruyante des espaces communs par les nombreux enfants, l'ambiance était très très mauvaise ici à la fin des années 90”, se rappelle Solange Veyre, gardienne de l'immeuble et co-présidente avec une autre habitante, Satankoule Diaby, de “Vivre Ensemble à Maroc Tanger”. “C'est pour réguler ces problèmes que le bailleur, la Régie Immobilière de la ville de Paris (RIVP) a fait appel à l'association ASMAE Soeur Emmanuelle qui avait déjà fait ses preuves dans d'autres ensembles”, explique la gardienne. En 2001, Christophe Jibard, permanent d'ASMAE, prend ses quartiers dans l'immeuble. S’appuyer sur les réseaux existants “L’association de Sœur Emmanuelle intervient en faveur de l’enfance et son action est surtout connue à l’international. Mais nous intervenons également en France”, explique le professionnel. “Sur le modèle de ce que nous faisons dans les pays en développement, nous mettons en œuvre une méthodologie spécifique basée non pas sur les besoins des personnes, mais sur leurs aspirations. Nous ne somme pas directement opérateurs, mais développons des programmes de soutien aux initiatives des habitants”, poursuit Christophe Jibard. “L’expérience nous montre que dans un quartier, un immeuble, l’anomie n’existe pas. Il y a toujours des réseaux non institués sur lesquels on peut s’appuyer”. Pendant plusieurs semaines, Christophe entreprend de mettre à jour ces réseaux en multipliant les rencontres et identifie trois personnes ressources. “Il y avait d’abord Solange, la gardienne, en poste depuis 20 ans, qui constitue une référence pour tous les locataires. Il y avait également le réseau des familles africaines, soninkés, bambaras, peuls, très connectées au pays. Il y avait enfin une locataire, connue par tous les jeunes de l’ensemble pour faire du soutien scolaire de façon informelle dans son appartement dont la porte était toujours ouverte”, se souvient le développeur. Il réunit les têtes de pont des trois réseaux pour une réunion avec à l’ordre du jour, une question : Que pouvons-nous faire afin que les habitants se rencontrent autrement que pour s’affronter ? Il émerge l’idée de repas, ouverts à tous, préparés par les locataires et partagé dans la cour. Un début modeste, mais des convives de plus en plus nombreux au fil des éditions encourage les pionniers à poursuivre l’action. Plusieurs autres réunions se succèdent, les femmes expriment leurs inquiétudes quand à l’avenir de leurs enfants, on envisage de mettre en place une activité de soutien scolaire. Oui, mais avec quels financements ? “J’ai alors présenté les avantages et le fonctionnement du modèle associatif, permettant de récolter des fonds et de développer des activités”, explique Christophe Jibard. En 2002, les statuts de “Vivre Ensemble à Maroc-Tanger” sont déposés en préfecture. L’association officiellement constituée sollicite alors auprès du bailleur de pouvoir bénéficié du local commun résidentiel. Une pièce d’une trentaine de m², désormais dédié aux activités de l’association où se réunit une dizaine de femmes en marge des repas collectifs et où se poursuit la réflexion autour d’un mieux vivre ensemble. “Pour attirer encore plus de monde, pour intéresser les familles de toutes origines, créer de nouvelles occasions de rencontre et faire vivre un collectif, pourquoi ne pas utiliser la pelouse inutilisée pour en faire un jardin cultivé par tous?”, raconte Solange Veyre qui demande au bailleur au nom de l’association de pouvoir en disposer. http://www.apriles.net Propulsé par Joomla! Généré: 22 February, 2017, 18:48 Apriles -> Agence des Pratiques et Initiatives Locales ::. S’enraciner dans son lieu de vie Dès lors, l’association acquiert des outils de base, des graines et des plants. Le terrain est retourné par les jardiniers de la RIVP et l’entreprise collective peut commencer. “Mais les compétences agricoles des femmes africaines n’étaient pas complètement adapté au terrain français. Du coup, un jardinier amateur habitant de l’immeuble s’est mis à échanger ses savoir-faire avec elles. Le groupe a pu apprendre de nouvelles techniques, à son rythme sans se sentir jugé ou inférieur. Ce jardin a permis à tous de s’enraciner dans son lieu de vie”, précise Christophe Jibard. Aujourd’hui, le collectif d’habitant, fort d’un noyau dur d’une quinzaine de personnes s’adresse à plus d’une quarantaine de familles et multiplie ses activités : Animation d’ateliers de danse orientale, organisation de vide grenier, ou de sorties touristiques et culturelles. Du rassemblement de quelques habitants, “Vivre Ensemble à Maroc Tanger”, est à présent une association reconnue, un acteur important du quartier qui a reçu la visite du maire d’arrondissement et même de Sœur Emmanuelle. Autre source de fierté pour Christophe Jibard : “Toutes les femmes du début ont à présent des papiers et ont trouvé un emploi.” Un des plus beaux fruits de ce jardin partagé ? C’est l’intégration. Sébastien Poulet-Goffard http://www.apriles.net Propulsé par Joomla! Généré: 22 February, 2017, 18:48