La dimension salutogène de l`accompagnement entrepreneurial
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La dimension salutogène de l`accompagnement entrepreneurial
La dimension salutogène de l’accompagnement entrepreneurial Résumé : L’accompagnement entrepreneurial connait ces derniers temps une évolution vers des pratiques se voulant plus individualisées, à travers lesquelles une forme de soutien moral vient compléter une offre d’accompagnement plus classique. Cette mutation traduit la nécessité d’adapter l’accompagnement à des besoins plus en phase avec la réalité du terrain. En effet, l’acte entrepreneurial induit des effets négatifs pour la santé, donc pathogènes, et qui, s’ils ne sont pas pris en compte, peuvent aller jusqu’à mettre en péril le capita-santé du créateur d’entreprise et indirectement son projet de création. En parallèle, un ensemble de facteurs de résistance salutogènes (bons pour la santé) et que l’on prête aux entrepreneurs peuvent leur permettre de préserver et développer une bonne santé. Ainsi, si la salutogénèse, théorie fondatrice des actions de promotion de la santé, consiste avant tout à se concentrer sur ce qui génère la santé plutôt que sur ce qui l’affaiblie, les structures d’appui à la création d’entreprise n’ont-elles pas un rôle « salutogénique » à jouer, en apportant aux créateurs d’entreprises un ensemble d’outils leur permettant de réduire les facteurs pathogènes induits par l’acte entrepreneurial, tout en portant leurs attentions sur les ressources et facteurs de résistance leur permettant d’y faire face ? Mots-clés : Accompagnement, créateurs d’entreprise, santé, salutogénèse. Virginie GHARBI Doctorante en Sciences de Gestion-ATER Laboratoire MRM – Montpellier Recherche Management Université Montpellier 1 Espace Richter- Rue Vendémiaire, 34960 Montpellier [email protected] Olivier TORRES Professeur en Sciences de Gestion Laboratoire MRM – Montpellier Recherche Management Université Montpellier 1 Espace Richter- Rue Vendémiaire, 34960 Montpellier [email protected] Introduction De toute évidence, l’importance que revêt l’accompagnement entrepreneurial n’est plus contestée, en témoigne le nombre croissant de recherches orientées sur ce qui est aujourd’hui « un métier, une industrie avec ses méthodes, ses outils, ses standards, ses structures professionnelles ». (Albert, Bernasconi et Gaynor, 2003). Si une première approche descriptive de l’accompagnement a permis de faire état des « bonnes pratiques », d’autres recherches ont étaient plus contrastées en questionnant l’efficacité de ces pratiques et en soulignant, parfois, un écart entre les besoins des créateurs accompagnés et les solutions apportées par les structures d’accompagnement. (Fayolle, 2002). Cette « non-rencontre » traduit aussi la nécessité d’adapter l’accompagnement à des besoins plus en phase avec la réalité du terrain. En effet, de nombreux paramètres légitiment la nécessité d’un accompagnement spécifique. A titre d’exemple, les entrepreneurs allocataires sociaux sont de plus en plus nombreux et sont des individus fragilisés, nécessitant un type d’accompagnement plus individualisé (GEM, 20051; Fayolle et Nakara, 2010). Ces recherches soulignent également l’état de souffrance de ces individus et amènent les chercheurs et praticiens à réfléchir à des nouvelles méthodes d’accompagnement permettant de réduire la dominance du soutien de type « instrumental » sur le soutien « affectif ». (De Briey et Janssen, 2004). Il y a donc, comme le souligne Paturel et Masmoudi (2005), une composante stratégique mais aussi psychologique de l’entrepreneuriat qui doit être prise en compte durant les phases de l’accompagnement et qui atteste de l’importance d’une prise en charge plus individualisée du créateur d’entreprise. De ces réflexions sont apparus des travaux de recherche sur le coaching et le mentorat (Dokou, 2001; Persson et bayad, 2007 ; Couteret et Audet 2006; St-Jean, 2008 ;) mais également sur l’accompagnement psychologique (Khelil, Smida et Zouaoui, 2012), pleinement légitimé durant les périodes de doute auxquelles font face les entrepreneurs (Valéau, 2006 ; St-Jean et Jacquemin, 2011). Cette dernière composante effleure alors un thème encore peu abordé dans le champ de l’entrepreneuriat et de l’accompagnement : celui de la santé (Torrès, 2012). Il est vrai que des travaux de recherche « éclatés » ont souligné l’existence de pathologies liées à l’acte entrepreneurial (Boyd et Gumpert, 1983; Buttner, 1992; Chao, Pauly, Szrek, Sousa Pereira, Bundred, Cross, et Gow, 2007; Grant et Ferris, 2009 ; Eager et Maritz, 2011), alors que d’autres recherches ont permis d’identifier un ensemble de ressources et traits de caractères communs aux entrepreneurs, leur permettant de faire face à des situations de stress. Il y a donc une dimension « salutogénique » de l’entrepreneuriat qui atteste l’existence d’un certain nombre de facteurs pathogènes (qui impactent négativement la santé) et salutogènes (qui conditionnent la bonne santé). La théorie salutogénique est une conception de la santé dont les questions de fond se situent sur la recherche des origines de la santé et des actions à déployer pour la renforcer (Antonovsky, 1996). En d’autres termes, elle met en avant les ressources dont disposent les individus pour préserver et développer leur capital-santé. En ce sens, la salutogénèse constitue le fondement des actions de promotion de la santé. Ainsi, considérant le fait qu’il existe un ensemble de facteurs pathogènes susceptibles d’affaiblir le créateur d’entreprise et son projet de création alors qu’en parallèle, l’individu pourrait mobiliser des ressources lui permettant d’y faire face, les structures d’appuis à la création d’entreprises sont-elles à même de jouer un rôle intermédiaire dans cette conception salutogénique de la santé entrepreneurial ? Sont-elles à même d’apporter aux créateurs d’entreprises un ensemble d’outils leur permettant de réduire les facteurs pathogènes induits par l’acte entrepreneurial, tout en portant leurs attentions sur les ressources et facteurs de résistance leur permettant d’y faire face ? En d’autres termes, l’accompagnement entrepreneurial est-il salutogène ? 1 Global Entrepreneurship Monitor- Rapport (GEM) 2002-2003 sur l’entrepreneuriat en France et dans le monde, 2005. 2 Ce papier sera structuré en cinq parties : dans un premier temps, il s’agira de préciser ce que nous entendons par accompagnement. Nous ferons état de l’évolution des modèles d’accompagnement allant peu à peu vers une individualisation des pratiques, qui pour certaines ont une fonction « bienfaisante » (1). Aussi est-il important de préciser dans une seconde partie le concept de « salutogenèse » afin de poursuivre avec l’identification, à partir des travaux initiés en entrepreneuriat, des principaux facteurs pathogènes et salutogènes de l’acte entrepreneurial. Ces assises théoriques nous permettront de clarifier et d’illustrer l’approche salutogénique de notre étude. (2) La troisième partie détaillera notre méthodologie de recherche (3). Enfin nous présenterons les résultats de notre étude (4) qui seront discutés dans une dernière partie (5). 1. Vers des formes d’accompagnement « bienfaisantes » Si l’efficacité des structures d’accompagnement en termes de ressources apportées aux créateurs d’entreprises n’est pas à contester, le caractère protéiforme et les contingences de l’accompagnement appellent de plus en plus à une réalité « d’accompagner différemment » (Chabaud, Messeghem et Sammut, 2010), notamment en intégrant davantage la composante psychologique et relationnelle dans le processus d’accompagnement. De ce fait, des nouvelles formes d’accompagnement qui intéressent chercheurs et praticiens apparaissent comme des alternatives à l’accompagnement plus traditionnel, jugé insuffisant. On constate alors une évolution des pratiques allant vers un processus d’accompagnement axé sur l’individu et qui cherchent à apporter un soutien moral aux créateurs d’entreprises. Si le mot n’est pas formulé clairement, c’est bien de « santé » du créateur dont il est question. 1.1 Une individualisation des pratiques L’accompagnement apparait souvent pour certains auteurs comme multiple et protéiforme, à tel point que certains d’entre eux utilisent les mots de « nébuleuse » ou « maquis » pour le qualifier. (Paul, 2009; Pezé et Le Roux, 2012). Il s’agit d’un terme générique, d’un arbre qui cache la forêt d’une multitude d’acteurs, de structures, de pratiques et d’enjeux. Les recherches pionnières sur l’accompagnement, à visée descriptive, ont permis de présenter les bénéfices apportés par les structures d’accompagnement en termes de développement économique et création de valeurs, tout en listant les bonnes pratiques et les services à disposition des entrepreneurs hébergés. (Allen et Rahman, 1985; Smilor, 1987; Lumpkin et Ireland, 1988). C’est généralement les concepts de « pépinière d’entreprises » ou « d’incubateurs » qui font échos dans la littérature en entrepreneuriat, notamment par le fait qu’il s’agit des modèles d’accompagnement les plus largement répandus et ceux qui ont éveillé l’intérêt des pouvoirs publics. Alors que le terme anglo-saxon « incubator » est utilisé pour désigner une structure d’accompagnement au sens large, c’est à dire offrant un soutien avant et après la création, il y a, en France, une confusion entre ces types de structures qui apportent leur soutien en fonction du degré d’évolution et de l’activité de la future entreprise. Néanmoins, dans une étude consacrée à l’évolution des structures d’appui à la création d’entreprises, Albert, Gaynor et Bernasconi (2003) parlent de « cloisonnement obsolète » et généralise la notion d’incubateur en décrivant des « structures d’appui à la création d’entreprises qui réunissent des ressources spécialisées dédiées à l’accompagnement et l’assistance des entreprises avant leur création ou dans les premières années de leur vie ». Ils distinguent également cinq principales ressources : un hébergement immobilier, des services administratifs, des actions de conseil, la formation aux divers aspects du management et la mise en relation avec les réseaux d’affaires et financiers. Les auteurs retracent également une évolution dans le modèle économique des incubateurs, ainsi que de leurs objectifs. La fonction première des incubateurs était « d’offrir des conditions l’hébergement favorables aux jeunes entreprises ». Les fonctions de services et de conseils sont venus complétés progressivement l’offre d’accompagnement. Les services 3 généralement proposés correspondent à un objectif de développement économique local avec des bénéfices attendus en termes de création d’emplois et d’attractivité du territoire. Les structures d’accompagnement proposent avant tout un appui technique (Aerts, Matthyssen et Vandenbempt, 2007). D’autres définitions de l’accompagnement vont mettre en avant la relation inter-individuelle entre l’accompagnant et l’accompagné. (Sammut, 2003). En privilégiant une conception de l’entrepreneuriat reposant sur la dialogique individu/création de valeur nouvelle (Bruyat, 1993), Cuzin et Fayolle (2004) définissent l’accompagnement comme une « pratique d’aide à la création d’entreprise, fondée sur une relation qui s’établit dans la durée et n’est pas ponctuelle, entre un entrepreneur et un individu externe au projet de création. A travers cette relation, l’entrepreneur va réaliser des apprentissages multiples et pouvoir accéder à des ressources ou développer des compétences utiles à la concrétisation de son projet ». Nous privilégions également cette approche de l’entreprenariat. Aussi, dans le cadre de notre recherche, la prise en compte de l’individu plus que les ressources apportées ne nous confine pas à un type d’accompagnement « intra-muros » et se veut suffisamment large pour intégrer aussi bien les structures d’hébergement (pépinières, incubateurs, couveuses d’entreprises), que les chambres consulaires, les boutiques de gestion ou encore les plateformes d’initiatives locales. Cette conception de l’entrepreneuriat reposant sur l’individu comme condition nécessaire pour la création de valeur, permet de prendre en compte la diversité des profils de créateurs et des situations, donc la nécessité d’adapter les pratiques. On voit donc apparaitre des études soutenant la nécessité d’adapter l’accompagnement en fonction des besoins des créateurs d’entreprises, besoins qui sont autant d’ordre « instrumental » qu’ « affectif ». (De Briey et Janssen, 2004). Une étude a également traité de l’accompagnement en fonction de l’âge du porteur de projet (Verzat et al, 2010). Dans une étude consacrée à l’accompagnement des entrepreneurs de nécessité, contraints d’entreprendre pour retrouver un emploi, Fayolle et Nakara (2010) décrivent des individus fragiles, psychologiquement vulnérables (l’impact du chômage sur la santé mentale a été étudié par Reichmann, 1991), et posent la question de la pertinence de l’accompagnement actuelle, même dans les structures qui privilégient ce type de public. Cette population d’entrepreneurs est de plus en plus importante (GEM, 2005; Serviere, 2010). Dans ce cas, les besoins d’accompagnement se concentrent davantage sur l’individu, avec une approche psychologique. La logique de l’accompagnement psychologique suggère un mode d’accompagnement plus individuel et personnalisé en raison de la multiplicité des personnalités et du vécu des entrepreneurs. Ce qui rejoint les travaux de Dokou (2001) selon lequel « la prise en compte de l’accompagnement en tant que processus d’apprentissage individualisé de l’entrepreneuriat pourrait améliorer l’efficacité des modes et structures d’accompagnement et aider l’entrepreneur à développer son entreprise ». Des travaux de recherche ont d’ailleurs affermi les besoins d’une relation d’aide psychologique aux entrepreneurs en situation de création, soumis à des phases de doute non négligeables, et durant lesquels les entrepreneurs sont davantage amenés à mettre fin à leur aventure entrepreneuriale (Valéau, 2006; St-Jean et Jacquemin, 2011). Egalement d’après une étude relative aux représentations de la logique d’accompagnement psychologique par les accompagnateurs, Khelil, Khiari, Smida, Zouaoui, et Gomez Mejia (2010) placent la dimension psychologique comme partie intégrante de l’aide apportée aux entrepreneurs. Dans les mêmes orientations, Pluchart (2012), dresse une typologie des principaux biais psychologiques qui affectent l’efficience de l’accompagnement entrepreneurial (au sens de Paturel ; 2000) et souligne la nécessité de privilégier un accompagnement personnalisé de type coaching pour pallier les effets émotionnels. Il fait notamment référence aux conclusions d’un récent rapport ministériel2 qui conclut à la nécessité de se rapprocher d’un accompagnement de type coaching pour « rassurer et motiver les créateurs d’entreprise durant toutes les phases de développement de 2 « Accompagner l’entrepreneuriat, un impératif pour la croissance »-Rapport de Philippe Mathot- Octobre 2010 4 leur projet ». Ainsi, nous sommes passés d’un modèle d’accompagnement quasi-exclusivement technique à la recherche d’un accompagnement plus individualisé, tenant compte de la bonne santé psychologique du créateur d’entreprise, exposé à de multiples exigences. De ce fait, certaines formes d’accompagnement se développent, allant même jusqu’à être employées spécifiquement pour combattre le stress. Une nouvelle phase de l’accompagnement se dessine alors, l’accompagnement « bienfaisant », ou « salutogène ». 1.2 Vers un accompagnement « bienfaisant » Nous l’avons souligné précédemment, les objectifs des structures d’accompagnement se sont diversifiés en même temps que des besoins latents sont apparus. Il a donc fallu réfléchir à un nouveau modèle d’accompagnement plus ouvert à des pratiques individualisées, mettant en avant une forme de soutien moral. Le coaching et le mentorat occupent une place importante dans les travaux de recherche sur les nouveaux modes d’accompagnement des entrepreneurs, et ceci malgré le fait que des critiques subsistent à l’encontre du coaching, appréhendé par Gori et Le Coz (2007) comme une nouvelle forme de contrôle social. Dans une étude relative au coaching entrepreneurial, Bayad et Persson (2007), qualifient cette pratique comme une alternative aux services classiques perçus comme insuffisants. Si dans cette même étude pas moins de cinquante-deux définitions du coaching est recensées dans la littérature, la Société Française de Coaching regroupant des professionnels de cette discipline définie cette pratique comme étant «l’accompagnement d’une personne à partir de ses besoins professionnels pour le développement de son potentiel et de ses savoir-faire ». Dans les mêmes orientations, Couteret et Audet (2006) ont identifié les facteurs-clés de réussite d’une intervention de coaching auprès de jeunes dirigeants d’entreprise en fonction d’une configuration de « conditions gagnantes » favorisées à la fois par l’entrepreneur coaché et le coach, en insistant sur l’importance du directeur de la structure d’accompagnement et de « l’ouverture de l’entrepreneur coaché face au changement ». Le coaching entrepreneurial semble prometteur. Certain considérant cette pratique comme « un complément voire une alternative à un dispositif de formation personnalisée » (Barès et Persson, 2009). Une autre forme d’accompagnement personnalisé que l’on différencie du coaching entrepreneurial, et qui est amplement ignorée par la recherche française, est le mentorat défini comme « l’établissement d’une relation de soutien entre un entrepreneur novice (nommé le mentoré) et un entrepreneur d’expérience (appelé le mentor) » et considéré comme une forme d’accompagnement bienfaitrice, susceptible de réduire les périodes de doute et agir sur l’isolement (St-Jean et Jacquemin, 2011). D’autres recherches vont plus loin dans l’approche bienfaisante du coaching en présentant les avantages d’un « wellness coaching » ou coaching du bien-être comme un outil permettant de mieux appréhender le stress des managers et employés d’une organisation (Wright, 2007). Dans les mêmes orientations, Kram et Hall (1989), identifient le mentorat comme une stratégie d’ajustement, ou stratégie de coping efficace contre le stress auquel sont soumis les managers d’une organisation. Le coping désigne « l’ensemble des processus qu’un individu interpose entre lui et l’évènement perçu comme menaçant, pour maitriser, tolérer ou diminuer l’impact de celui-ci sur son bien-être physique ou psychologique » (Paulhan, 1992). En ce sens, ces pratiques agissent comme des outils bienfaisants. Une étude identifie même un « coaching compatissant » à destination des dirigeants d’entreprises et met en avant les bénéfices attendus « tant sur le plan santé que sur celui du rendement » (Boyatzis, Smith et Van Oosten, 2010). Cette même étude inaugure un type d’accompagnement dont la dimension santé est la fonction première Les orientations de l’accompagnement poursuivent donc l’idée d’un entreprenariat multifacettes qui doit composer entre une dimension stratégique et psychologique. (Fayolle, 2002 ; Paturel et Masmoudi, 2005). Au-delà de la sphère psychologique de l’individu, c’est bien de santé dont il est question, un sujet timidement abordé en entrepreneuriat. L’approche « salutogénique » de 5 l’accompagnement entrepreneurial permettrait ainsi d’ouvrir la voie à une nouvelle dimension de l’entrepreneuriat : celle de la santé. 2. Cadre théorique de l’approche salutogénique Nous soutenons l’idée que des facteurs salutogènes et pathogènes impactent le bien être, la qualité de vie et la santé du créateur d’entreprise (Torrès, 2012). La salutogenèse et la pathogenèse fonctionnant simultanément, une des clés de l’approche salutogénique issue des travaux d’Antonovsky (1996), est d’intégrer deux questions : celles des risques de la maladie et celles des ressources (Lindström et Eriksson, 2012). De ce fait, pour comprendre notre démarche de recherche, il apparait essentiel de définir la théorie salutogénique avant de la projeter dans le contexte entrepreneurial et ainsi identifier les variables qui formulent l’« équation fondamentale de la santé entrepreneuriale » (Torrès, 2012). 2.1 Définition de la salutogénèse La plupart des recherches en santé publique et en promotion de la santé étaient jusqu’alors fondées sur la pathogenése, une conception de la santé axée exclusivement sur la prévention des risques et sur la maladie (le terme se compose de deux mots grecs : pathein : souffrir, et génésis : origine). En d’autres termes, la prévention dans le sens de la pathogenèse consiste à exclure les facteurs pathogènes avec comme questionnements principaux: « comment la maladie se manifeste-t-elle et comment peut-elle être évitée ?». Ce n’est que dans années soixante-dix que la notion de salutogenèse va être développée par Aaron Antonovsky, un sociologue de la santé s’intéressant à la théorie du stress et qui, à contrario de la pathogénèse qui cherche à identifier les déterminants de la maladie, va concevoir une approche salutogenique de la santé, déterminée à identifier les ressources permettant de produire et promouvoir la santé. (salut-genesis, « qui génère la santé »). Antonovsky conceptualise la santé comme un « continuum » entre la santé et la maladie, entre la présence et l’absence de santé sur lequel chaque individu peut être positionné et manifester des composantes « saines » et « malsaines » de façon simultanée. (Figure 1). Si l’OMS définit la santé comme « un état complet de bien-être physique, mental et social qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmités », l’état de santé d’un individu au sens d’Antonovsky est plus complexe et est défini comme « un état, ou une condition de l’organisme humain avec plusieurs dimensions coexistantes » (Lindström et Eriksson, 2012). Les questions de fond se situent désormais sur la recherche des origines de la santé et les actions à déployer pour la renforcer. En France, l’intérêt pour la « salutogenèse » est apparu dans les années 90, avec les travaux en psychologie de la santé qui essaient « de décrire, de comprendre et d’expliquer les différences inter-individuelles en matière de santé, de bien-être, de qualité de vie, mais aussi de maladie (initiation et évolution). Ce champ de recherche s’intéresse à tous les facteurs psychosociaux (environnementaux, dispositionnels ou transactionnels) pouvant protéger ou au contraire fragiliser les individus et étudie, en collaboration avec d’autres disciplines scientifiques les «chemins» qui mènent à la santé et à la maladie ». (Bruchon-Schweitzer, 2001). Il s’agit d’un domaine qui va chercher à identifier « les mécanismes biopsychosociaux qui favorisent ou au contraire freinent le développement de diverses pathologies ou contribuent au bien-être et à la santé ». (Bruchon-Schweitzer, 2001). Il y a donc une dimension salutogénique de la psychologie de la santé qui permet d’appréhender les facteurs psychosociaux jouant un rôle pathogène ou protecteur. La théorie salutogénique, issue des travaux Antonovsky et ceux initiés en psychologie de la santé va donc intégrer les risques de la maladie et les ressources afin d’agir sur les ressources de santé et sur les processus de promotion de la santé. Aussi est-il important d’en préciser les variables afin de les associer au contexte entrepreneurial. 6 2.2 Cadre théorique de la salutogénèse : Deux concepts clés déterminent la salutogénèse à savoir le sentiment de cohérence (Sens of Coherence, SOC) et les ressources de résistances générales (RRG). Le sentiment de cohérence est défini comme une orientation, une prédisposition générale à la vie fournissant « les habiletés nécessaires à la sélection de différentes stratégies de résolution de problèmes afin d’être en mesure de gérer les différents événements de vie qui surgiront inévitablement ».Trois critère composent le SOC : - - La compréhension des événements de la vie (Sense of Comprehensibility). Il s’agit du fait de percevoir les situations, les informations, les expériences de la vie quotidienne de manière compréhensible, intelligible La capacité à gérer ces évènements (Sense of Manageability), c’est-à-dire de pouvoir résoudre les difficultés. Leur signification (Sense of Meaningfulness), à savoir le fait de donner un sens aux évènements de la vie. Quant aux ressources de résistances générales (RRG), il s’agit des ressources internes (par exemple, avoir une bonne estime de soi) ou externes à l’individu (avoir de l’argent, un logement), qui fournissent les conditions préalables au développement du sentiment de cohérence. En parrallèle du SOC et des RRG, d’autres ressources sont également identifiées comme salutogènes par le fait qu’elles se dirigent vers la santé et la qualité de vie. Parmi elles, le lieu de contrôle (Rotter, 1966), l’auto-efficacité (Bandura, 1982), l’optimisme, (Seligman, 2008), le capital social (Bourdieu, 1980; Putnam, 2000), l’autonomie (Chirkov, Ryan, Kim et Kaplan, 2003). Dans leurs travaux de recherche, Schaefer, Coyne et Lazarus (1981) identifient des variables modératrices de stress et qui comprennent le type de personnalité, le taux de décharge de tension (capacité de se détacher des problèmes vécus au travail), et le soutien social apporté par les amis, la famille, et les collègues de travail. 2.3 Dans le contexte entrepreneurial Quelques travaux issus du champ de l’entrepreneuriat ont souligné l’existence de sources de stress liées au comportement entrepreneurial. (Harris, Saltstone et Fraboni, 1999 ; Schindehutte et al, 2006; Wincent et Örtqvist, 2009). Une des recherches pionnières étant celle de Boyd et Gumpert (1984) qui ont identifié des facteurs de stress dans la gestion de la petite entreprise tels que la solitude, les conflits potentiels avec les partenaires, le besoin de réussite, la surcharge de travail, ou encore le sentiment de frustration. Buttner (1992) a également identifié la surcharge de rôles comme un des principaux facteurs de stress des entrepreneurs. Plus récemment, des travaux de recherche se sont orientés sur la conception d’un cadre conceptuel et d’une échelle de stress entrepreneurial (Eager et Maritz, 2011; Grant et Ferris, 2009). Une récente étude a également distingué la surcharge de travail, l’incertitude, la pression des clients et les difficultés de trésorerie parmi les principales causes de problèmes de santé des dirigeants de TPE3. En complément de cette dimension pathogène de l’entrepreneuriat, plusieurs ressources (internes ou externes) que nous qualifions de salutogènes ont été identifiées, notamment à travers les travaux consacrés aux stratégies d’adaptation des entrepreneurs pour faire face à une situation de stress. Le soutien social (Boyd et Gumpert; Perry, Penney et Witt, 2008; Gunnarsson et Josephson, 2011), le sentiment d’autonomie et de reconnaissance, (Brun et Dugas, 2005), la résilience (Bernard, 2008) ont été distingués. A noter également des récents travaux mettant en exergue une meilleure santé des entrepreneurs comparée à celle des employés (Stephan et Roesler, 2010; Torrès, 2012). Ainsi, « La santé des entrepreneurs est 3 Etude IFOP réalisée auprès de 1003 dirigeants de TPE de 0 à 19 salariés du 9 au 18 juillet 2012. 7 soumise à une tension permanente entre des facteurs négatifs pour l’état de santé et des facteurs bénéfiques pour la santé ». (Torrès, 2012). Ces facteurs agissant simultanément nous permettent ainsi d’établir une équation de la santé entrepreneuriale. (Figure 2). Ces assises théoriques nous permettent de soutenir une approche salutogénique de l’acte entrepreneurial. Nous sommes ainsi en mesure de nous interroger sur la place des structures d’accompagnement à jouer dans cette équation de la santé entrepreneuriale. Prêtent-elles attention à la santé de leurs créateurs d’entreprise ? Ont-elles pris connaissance des éventuels effets pathogènes ? Sont-elles à même d’y apporter des solutions ? L’enjeu est tel que la mauvaise santé de l’entrepreneur peut conduire à l’échec (Chao, Szrek, Sousa Pereira et Pauly, 2010). 3. Cadre méthodologique Pour répondre à notre question de recherche, le choix d’une méthodologie qualitative nous est apparu évident, notamment par le fait que les techniques qualitatives sont principalement appropriées dans un domaine recherche encore peu exploité (Miles et Huberman, 2003). Au total, 53 entretiens semi-directifs ont été réalisés auprès de 22 responsables de structures d’accompagnement et 31 créateurs d‘entreprises accompagnés. (Le détail de notre échantillon est synthétisé en annexe). Les structures d’accompagnement sont en grande partie des pépinières et incubateurs d’entreprises innovantes. La durée moyenne des entretiens est de 75 minutes. Ils se sont déroulés en deux temps : nous avons procédé à une première vague d’entretiens avec les responsables de structures d’accompagnement. Cette première phase, que nous qualifions d’exploratoire, nous a permis de rediriger et affiner les thématiques de notre guide d’entretien. En définitive, deux guides entretiens ont été structurés en fonction des deux catégories de répondants. Les entretiens avec les responsables étaient, dans un premier temps, orientés sur les caractéristiques et les modes de fonctionnement de la structure. La thématique suivante revenait sur les facteurs et conséquences pathogènes perçus dans le processus de création d’entreprise. La troisième phase de l’entretien reprenait le même canevas mais dans une approche salutogène. La quatrième phase de l’entretien revenait sur les pratiques d’accompagnement perçues comme agissant sur la santé du créateur d’entreprise. Enfin, la dernière phase de l’entretien interrogeait les répondants sur la pertinence d’un accompagnement prenant en compte la variable santé du créateur d’entreprise. Les thématiques du guide d’entretien des créateurs d’entreprise étaient équivalente à celle des responsables, à ceci près que la première partie était plutôt orientée sur leur parcours, leurs motivations, leurs besoins, et leur appréciation de l’accompagnement reçu. Les entretiens ont été enregistrés et retranscrits intégralement. La méthode d'analyse des données retenue est une analyse thématique de contenu qui consiste « à procéder systématiquement au repérage, au regroupement et, subsidiairement, à l’examen discursif des thèmes abordés dans un corpus » (Paillé et Mucchielli, 2008). Celle-ci permet également de faciliter l’analyse des données qualitatives (Miles et Huberman, 2003). Le codage des données a été réalisé à l’aide du logiciel Nvivo 7. L’utilisation de l’analyse qualitative informatisée nous a permis de gagner en rigueur. Nous avons ainsi procédé à une codification inductive à mi-chemin entre les préceptes de Miles et Huberman (2003) et ceux de la théorie enracinée (Strauss et Corbin, 1998). Cette phase de traitement nous a permis de mettre en évidence un certain nombre de résultats. 4. Résultats L’effet « pathogène » du processus de création d’entreprise se traduit en majorité par le syndrome du « stress ». Nous avons identifié plusieurs « stresseurs entrepreneuriaux » ou facteurs de vulnérabilité déterminés en termes de récurrence. Nous verrons également que les 8 facteurs salutogènes sont majoritairement des traits de personnalité ou facteurs de résistance propres aux entrepreneurs. 4.1 Des situations de stress Le stress est le verbatim le plus récurrent lorsque l’on abordait la question des conséquences pathogènes que pouvait engendrer l’acte de création d’entreprise. Dans le cadre de notre recherche, il est important de préciser que nous parlons de « stress perçu ». Lazarus et Folkman (1984) ont défini le stress comme « une transaction particulière entre la personne et l’environnement dans laquelle la situation est évaluée par l’individu comme débordant ses ressources et pouvant menacer son bien-être ». Ainsi, le stress dépend autant de la capacité à faire face, que de la situation environnementale ou des ressources des individus. Il est cependant nécessaire de préciser que chaque individu réagit différemment à un même stresseur. Il y a donc une dimension subjective du processus de stress qui nécessite que l’on fasse une distinction entre les stresseurs environnementaux objectifs (quantifiable) et l’impact subjectif que produit une situation de stress. (Bruchon-Schweitzer, 2002). Cette notion de subjectivité caractérise le stress perçu qui a permis de découvrir l’impact très significatif du stress sur la santé physique et mentale de l’individu. Parmi les stresseurs relatés par nos répondants : L’insécurité financière : La question financière est une source de stress importante pour les entrepreneurs. Plusieurs réalités se distinguent : - Il y a d’abord la peur de ne pas gagner assez d’argent à la fin de chaque mois, de ne pas pouvoir se verser un salaire fixe. Les créateurs ont tous révélé qu’ils avaient cette inquiétude qui est d’autant plus révélatrice quand le créateur engage souvent son patrimoine personnel. En effet, la création d’entreprise est un processus à travers lequel les barrières personnelles et professionnelles ne sont pas étanches. « Les difficultés financières, c’est la source de tous les stress, nous on a des porteurs de projets qui nous ont indiqué que c'était très difficile pour eux d'un point de vue financier, et du coup cette situation a engendré un mal-être, un mal-être personnel, et bien sûr quelquefois des difficultés qui ont touché leur couple, la famille et que c'était des situations extrêmement difficiles à gérer » - « Il y a encore quelque temps je me réveillais systématiquement à 4h du matin avec ces angoisses de ne pas gagner d’argent ». - Il y a également la peur de ne pas gagner assez d’argent nécessaire à la survie de l’entreprise ou du projet de création. En effet, dans la survie de l’entreprise au démarrage, il y a un poids considérable des ressources financières. (Sammut, 1998). «Moi quand je suis stressé c’est parce que je ne sais pas comment je vais finir le mois, estce que je vais réussir à alimenter la pompe, est-ce que je serai toujours là dans un mois ? Et tous les mois c’est rebelote […] moi si demain je n’ai plus d’argent j’existe plus » - « il n’y a pas ce petit filet de sécurité, on met les gens dans l’insécurité. A partir de là c’est très difficile car vous vous levez vous êtes inquiet, vous vous couchez vous êtes inquiet, angoissé, stressé, vous êtes nerveux, vous devenez impossible à vivre, et on rentre dans la spirale infernale ». La frustration et le manque de reconnaissance: L’aspect financier génère également un état de frustration qui constitue aussi une source importante de stress : 9 - - - - La frustration de ne pas être rémunéré à hauteur de la charge de travail accomplie. En effet, le temps consacré aux projets, aux montages des dossiers de subventions n’est pas garant de succès. La frustration de ne pas être rémunéré à hauteur de son niveau d’étude ou de ses compétences. En d’autres termes, le niveau d’étude ou l’expérience professionnelle n’équivaut plus au niveau de rémunération. Notre échantillon regroupe un certain nombre de salariés en reconversion (15 dont 6 qui avaient des postes à responsabilités), des ingénieurs, chercheurs (9), des jeunes ingénieurs ou docteurs (6) et un indépendant. Le niveau d’étude est élevé. Or, une grande partie de notre échantillon nous a fait part de leur situation précaire, notamment chez les jeunes diplômés. Ils ressentent un sentiment de frustration relatif à leur faible niveau de revenu (qui touche à la reconnaissance également). Ceci entraine également une perte des repères. La frustration due à la baisse de leur pouvoir d’achat. Ceci n’est pas le cas pour la majorité des répondants, néanmoins un nombre conséquent d’entrepreneurs ont dû revoir leurs habitudes de consommation à la baisse. La frustration du « travail alimentaire », accentuée chez les créateurs d’entreprises innovantes. En effet les responsables d’accompagnement insistent sur la nécessité de trouver un emploi « alimentaire » qui va assurer une rentrée d’argent stable. Les entrepreneurs, enthousiastes sur leur innovation, se retrouvent à exercer une activité connexe qui n’est pas leur source de motivation première et qui va finir par prendre le pas sur l’innovation. La pression de l’enjeu : L’enjeu est défini comme ce que l’on peut perdre ou gagner lors d’une action, notamment une somme d’argent. Nous avons vu que l’aspect financier était une source de stress importante, notamment quand il y a un engagement du patrimoine personnel. « J’ai eu des cas de figure très difficile. Un porteur notamment avec une maison sous crédit, 4 enfants, une femme à mi-temps, on a eu des présentions où on ne savait pas si à la fin il n’allait pas se mettre une balle ». Par ailleurs, ce qu’il y à perdre va au-delà de l’aspect financier. En effet, l’enjeu de réussir s’accompagne aussi de la peur d’échouer avec tout ce que cela engendre (peur du jugement, dévalorisation de soi, vulnérabilité). L’image que renvoie l’échec est négative et la « culture de l’échec » n’est pas encore assumée en France. La pression de réussir et celle d’échouer ne sont pas antinomiques pour autant et chez certains individus, la pression constante de réussir est anxiogène : réussir pour subvenir aux besoins de sa famille, réussir pour rassurer ceux qui ont cru au projet (amis, famille, parties prenantes) : « le plus dur à supporter je pense, ce n’est pas de se dire : « est ce que j’aurai de la pression », mais c’est de se poser la question « jusqu’où et pendant combien de temps je vais devoir supporter cette pression? ». La pression de la réussite entraine également un sentiment de culpabilité que nous avons pu observer chez les créateurs d’entreprise : «moi je me dis que je dois absolument travailler pour y arriver, et du coup, si je travaille 6 à 8 h et que je vais au sport pendant 3 ou 4 heures, je me dis aussi que c’est du temps où j’aurai pu travailler. J’ai une espèce de culpabilité qui m’envahit ». La pression de l’enjeu est d’autant plus forte qu’il y a le « facteur temps » qui intervient dans la relation d’accompagnement et qui génère une pression supplémentaire. « On s’est pertinemment que si notre projet ne décolle pas au bout de deux ans, voire trois, le contrat d’accompagnement sera rompu » - « à un moment donné on a des limites, c'est-à-dire que si ça n'avance pas, nous sommes obligés de mettre un terme à notre relation d'accompagnement ».Si l’absence d’accompagnement n’empêche pas la poursuite du projet de création, la majorité de nos répondants n’envisage pas de poursuivre seuls et envisage plutôt le retour à l’emploi salarié. Doutes et incertitude : 10 L’existence du doute entrepreneurial a fait l’objet de plusieurs études (St-Jean et Jacquemin, 2011; Valéau, 2004). Valéau définit le doute comme « une période d’indétermination durant laquelle les motivations et l’implication sont remises en question […] l’entrepreneur n’est plus sûr de vouloir continuer son entreprise ». Il évoque également la vulnérabilité du créateur d’entreprise durant cette phase de transition. Un sentiment d’incertitude sur l’avenir accompagne souvent le doute : « C’est relativement angoissant car on navigue en terre inconnue, on est toujours dans l’interrogation de savoir si c’était une bonne idée » - « là on en est encore au stade projet, et dans cette période-là on doute facilement, c’est vraiment un pari constant, on ne sait toujours pas si on va réussir » - « on y croit plus à certains moments. On ne sait plus où on en est, ça part dans tous les sens, il y a un côté flou ». La saturation cognitive (Cognitive Overflow Syndrome) : La saturation cognitive correspond plus clairement à des situations de surcharge informationnelle (information overload) et qui ont fait l’objet de nombreuses études (Hiltz et Turoff, 1985; Lahlou, Lenay, Gueniffey et Zacklad, 1997; Lewis, 1996). Amplifiées par l’avènement des TIC, ce syndrome se traduit par une situation où l’individu a « l’impression d’être noyés sous des masses d’informations sans avoir le temps nécessaire pour leur administration […] cela oblige les acteurs à consacrer davantage de temps au traitement de l’information au détriment de leur activité » (Autissier et Lahlou, 1999). Ces derniers désignent la saturation cognitive comme une source de stress se traduisant par le sentiment d’être débordé, désorienté par une masse d’information qui empêche l’avancement de son « vrai travail ». Nous avons pu le constater avec les créateurs de notre échantillon qui doivent amasser un nombre important d’informations autant dans la période post-création que dans les premières années après la création. Ceci est d’autant plus signifiant que la démarche d’accompagnement induit de multiples apprentissages qui génèrent un flux d’informations supplémentaires : « au début ce qui m’a stressé, c’est que je me suis senti dépassé, je n’avais jamais créé avant et toute cette masse d’informations en même temps…on se demande si on va arriver à gérer tout ça » « gérer les dossiers de financement, ça c’est usant, c’est constant. Constamment on fait de l’administratif pour aller chercher de l’argent et puis ça demande d’être toujours alerte sur mille trucs en même temps, ça bouillonne en permanence, c’est difficile à gérer […] c’est épuisant ». La saturation cognitive est une charge de travail mentale qui engendre un état de fatigue auprès de nos répondants. Surcharge de travail et conflits de rôles : Les exigences professionnelles, notamment la charge de travail élevée et les conflits de rôles vont être identifiés comme des potentiels stresseurs psychologiques pathogènes (Karasek, 1979). Buttner (1992), va préciser ces conclusions dans le contexte entrepreneurial et va identifier la surcharge de rôle (Role overload) comme l’une des principales sources de stress des entrepreneurs. Nos répondants nous ont tous signalé une charge de travail importante, notamment en termes horaires : « je dirais que pendant deux ans on a quasiment travaillé 7 jours sur 7 » - « Ma femme le sait plus que moi ! Ma charge de travail a augmenté clairement. Entre 50 et 60 heures par semaine ». « Je suis obligé de tout faire sans avoir la possibilité de déléguer. Se retrouver seul à tout faire demande beaucoup d’énergie c’est certain. On n’est pas encore créé, mais dès que j’ai les ressources nécessaires, je vais embaucher ». Ce qui se traduisait aussi par un état de fatigue mentale : « je suis sur une activité disons intellectuelle, j’ai besoin de ma tête et je me suis sentie en zone de surmenage critique à la fin de l’année dernière » mais aussi physique « de temps en temps, à force de tirer sur la machine, le coup de fatigue tombe. Moi cet hiver je ne pouvais plus bouger pendant deux jours, mais je savais que ça allait arriver ». Il y a donc un ensemble de facteurs pathogènes qui sont liés à l’acte entrepreneurial et qui se traduisent pour la plupart par un état de stress et de fatigue. Pour résumé la dimension pathogène de l’acte entrepreneurial, nous pouvons reprendre le discours d’un créateur 11 d’entreprise qui nous disait : « moi je suis stressé parce que je ne sais pas comment je vais finir le mois, parce que je ne sais pas où j’en serai dans 6 mois, je ne sais pas si je vais réussir ou échouer. On est stressé car on est jugé continuellement par tout le monde. On est stressé car on ne sait plus dans quel monde on vit. On est ni dans le public par encore dans le privé, donc on est dans un no man’s land un peu frustrant. Tout est source de stress ». 4.2 Des facteurs de résistance salutogènes : les traits de personnalité et le soutien social A de nombreuses reprises, et sans l’aborder expressément au cours de nos entretiens, les créateurs d’entreprises et responsables des structures d’accompagnement mettaient en avant les aspects positifs du processus d’accompagnement qui prévalent sur les aspects pathogènes : « là on ne parle que de négatif mais heureusement la création ce n’est pas que ça, sinon personne ne créerait, d’ailleurs si je suis toujours là, c’est surtout parce qu’il y a du bon ». Comme le disait un créateur : « malgré tout, nous, on est des winners dans l’état d’esprit et la création d’entreprise, c’est une alternance de claques et de caresses…et les caresses nous font oublier les claques ! ». Derrière ce verbatim se distinguent plusieurs réalités : Des créateurs d’entreprise passionnés : La passion a fait l’objet d’un intérêt particulier en psychologie positive et en psychologie du sport. Vallerand et al. (2003) distinguent deux approches dualistes de la passion : les passions harmonieuses (source de motivation qui amène l’individu à choisir librement de s’engager dans une activité) et les passions obsessives (qui contraignent l’individu à réaliser son activité). Les études révèlent que la passion harmonieuse induit des conséquences affectives et cognitives positives contrairement à la passion obsessive pour qui les conséquences sont négatives. Aussi « plus la passion investie dans une activité est élevée, plus les émotions seront intenses et positives » (Lecoq et Rimé, 2009). Dans le champ entrepreneurial, Cardon, Gregoire, Stevens et Patel (2012), désignent la passion comme une émotion positive qui est le moteur de l’acte entrepreneurial. Nous avons pu constater une passion harmonieuse qui anime les créateurs d’entreprises. (Nous pouvons emmètre l’hypothèse d’une forme de passion obsessive chez l’entrepreneur de nécessité tel qu’identifier par Fayolle et Nakara, 2010). Cela dit, pour la plupart des répondants, la création d’entreprise est le fruit de l’identification d’une opportunité d’affaire qui suggère une forme de passion harmonieuse positive : « Il ne faut pas oublier qu’audelà des aspects stressants, ce sont des gens passionnés. Dans le sport on est sur des métiers de passion. Malgré les difficultés liées à l’entrepreneuriat, ils vont faire quelque chose qui les passionne. C’est une bonne dose de stress en moins.» - « Ma philosophie à moi, ce n’est pas de dire je créé pour être libre et indépendant, pour moi ce n’est pas ce qui m’a motivé, moi c’est vraiment me faire plaisir, faire quelque chose qui me passionne » - « J’adore ce que je fais, c’est une passion. Ce n’est pas tout rose mais développer des projets, travailler dans un milieu qui me plait, ça rattrape tout le reste » - « Je suis un passionné…aujourd’hui pour être créateur il faut être fou ou passionné ». Le lieu de contrôle interne, l’endurance et l’optimisme : Les entretiens auprès des créateurs d’entreprises se concluaient par des questions du type: « si c’était à refaire ? Ou bien « Finalement, regrettez-vous ce choix de création? », « Regrettezvous votre ancienne vie professionnelle ? ». À deux exceptions près, aucun des répondants créateurs ne regrette leur choix de création. Ceci est également dû au fait qu’ils possèdent un lieu de contrôle interne élevé, qui est une caractéristique de la personnalité identifiée comme salutogène (Bruchon-Schweitzer, 2002) et que l’on prête aux entrepreneurs. Le lieu de contrôle interne (Internal Locus of Control) est un concept qui fait partie de la théorie de l’apprentissage sociale de la personnalité développée par Rotter (1966) et qui traduit la croyance d’un individu en sa capacité de contrôler les évènements. Nous confirmons l’existence d’un lieu de contrôle interne de l’entrepreneur, notamment par le fait qu’ils essaient par tous les moyens de trouver 12 une solution à leurs problèmes, et qu’ils assument pleinement leurs choix : « en début de création on m’avait dit, tu es accompagné mais fais attention tu es seul à assumer tes choix, et c’est vrai tous les choix je les assume, au moins si je me plante je sais que c’est de mon fait ». La notion d’indépendance revenait souvent également et traduisait une liberté d’action qui était appréciée. Cependant, cette notion de liberté est relative, certains créateur évoquant la « prison sans barreaux » de Fayolle (2002) : « être indépendant ? Autonome ? Je n’irai pas jusque-là, on se construit notre prison. Il y a des aspects liberté dans le sens où on est seul maitre à bord et on prend les décisions qu’on a envie, on travaille avec des gens qu’on a envie, c’est un espace de liberté qui n’a pas de prix mais après si on veut faire les choses correctement on est vite engouffré dans un engrenage où le fait de vouloir bien faire, gagner la confiance des gens, les satisfaire, c’est vite quelque chose d’emprisonnant ». Enfin dans les traits de personnalité, Kobasa, Maddi et Kahn (1982), identifient une forme de lieu de contrôle interne qu’ils nomment le « hardiness » ou la « personnalité endurante » qui se traduit par la capacité de faire face aux problèmes du quotidien. Il s’agit d’un trait de personnalité qui est identifié comme un facteur de résistance au stress. (Antonowski a également développement une approche similaire à travers la notion du sens de cohérence). Nous avons pu constater le caractère endurant des créateurs d’entreprises notamment par le fait qu’ils rencontrent de nombreux obstacles mais persistent dans leur objectif. Enfin, l’optimisme est un trait de caractère que l’on prête aux entrepreneurs (Ucbasaran, Westhead, Wright et Flores, 2010). Nous avons pu également le constater : « si on n’est pas un peu optimiste, on ne créerait pas ». Selon Bruchon-Schweitzer (2001), l’optimisme est une caractéristique salutogène associée à une bonne santé physique et mentale est reconnu comme un facteur de résistance qui modère l’impact des évènements aversifs. Le soutien social perçu : Notre étude empirique nous a permis de souligner l’importance des relations personnelles (famille, amis) du créateur d’entreprise dans le maintien et le développement de son bien-être. La notion de soutien social perçu correspond au sentiment qu’un individu a (ou non) d’être aidée, protégée, valorisée par son entourage (Koleck, Bruchon-Schweitzer et Bourgeois, 2003). Il se compose du soutien émotionnel, du soutien d’estime, du soutien informatif et du soutien matériel (Bruchon-Schweitzer, 2002). Des travaux scientifiques ont fait le lien entre cette variable qualifiée de modératrice sur l’état de stress et la santé, notamment dans le champ de l’entrepreneuriat (Chay, 1993; Nahum-Shani et Bamberger, 2011). Certaines études ont également montré l’impact du soutien social sur la réussite de l’entreprise (Baron et Markman, 2003). Il existe plusieurs variables (le soutien reçu et perçu, le soutien émotionnel, le sentiment de protection et d’amour, le soutien d’estime, le soutien informatif) qui permettent de mesurer le soutien social. Notre étude empirique nous a permis de mesurer l’importance du soutien familial sur le bien-être du créateur d’entreprise et dans le maintien de son équilibre. Ainsi la plupart des responsables de structures d’accompagnement ont insisté sur le fait qu’un « diagnostic familial et personnel » initial était fondamental : « on insiste sur le soutien familial, sur le projet de vie qu'il y a derrière, il faut qu'ils partent aussi avec ce soutien là dès le départ, l’équilibre familial est tout aussi important que l’adéquation homme/projet »- « un projet qui va réussir est un projet discuté en famille, avec la famille, on peut avoir une écoute, le fait d'exprimer ce que l’on fait,[…] il peut toujours y avoir des personnes de l’entourage qui vont l’écouter et lui permettre de trouver des solutions »- « S’il n’y a pas une adhésion familiale forte, on allume les clignotants, et si on sent que les conditions ne sont pas remplies, on ne le prend pas en accompagnement ». Du côté des créateur d’entreprise, nous avons pu constater que le soutien familial leur était bénéfique : « j’ai eu un apport par mes parents que je remercierai toujours, j’ai la chance d’avoir des parents qui m’accompagnent, qui m’épaulent, qui m’entourent…grâce à eux, j’ai eu un 13 ordinateur, une écoute studio, et rien qu’avec ça j’ai pu bien travailler » - « ma femme et mes enfants m’encouragent, ils sont à 100% derrière mon projet et si je n’avais pas ce soutien de leur part, ça aurait été beaucoup plus compliqué» - « quand on est deux associés, on se soutien mutuellement dans le sens où quand il y a une qui ne va pas bien, il y a toujours l’autre pour remonter le moral et vice versa donc je pense que c’est un avantage. Ce qui est marrant c’est qu’on ne s’est jamais retrouvé toutes les deux avec une baisse de morale, c’était toujours par alternance. Donc l’équilibre qu’il y avait entre nous est primordial »- « j’habite en collocation ce qui me permet de voir d’autres personnes, de parler d’autres sujets. Ça me permet aussi de pouvoir m’exprimer sur mon projet. J’ai également ma compagne qui est compréhensible làdessus. Ça aide énormément dans les petits coups de mou ». Il apparait ainsi que le soutien apporté par l’entourage proche du créateur d’entreprise est indéniable. Par ailleurs, nombreux sont les répondants qui soulignaient l’importance de maintenir un équilibre entre leur vie familiale et leur vie professionnelle : « mon travail n’est pas 100% de mon identité. Je considère que mon couple et ma famille sont tout aussi importants pour mon entreprise. Il s’avère que j’ai plus de temps à consacrer à l’entreprise dans la semaine mais le week-end je n’y consacre aucun temps. Il m’arrive de gamberger dans ma tête mais j’ai tout mon week-end de disponible pour ma famille. Et tous les jours de 18h à 21h je suis en famille pleinement, ces moments sont essentiels pour moi ». Le soutien de l’entourage proche du créateur d’entreprise (famille, amis, associés) apporte un soutien affectif et matériel nécessaire au maintien de leur équilibre. 4.3 Des pratiques d’accompagnement salutogènes ? Dans leur étude consacrée aux représentations de la santé des entrepreneurs, Vollery et Pullich (2010) constatent qu’il y a une confusion générale autour de la notion même de santé. En interrogeant les responsables et créateurs d’entreprises sur les pratiques d’accompagnement existantes en matière de santé des entrepreneurs, nous avons pu remarquer une connotation « médicale » associée à la santé et qui incitait les répondants à nous dire qu’aucun outil existant n’allait dans ce sens, en insistant sur le rôle de la structure d’accompagnement qui est d’apporter un soutien « technique » avant tout. Par conséquent, les premières réactions consistaient à souligner le fait que les structures d’appui à la création d’entreprise n’avaient pas vocation à se substituer aux établissements de santé. C’est au fil de l’entretien que les répondants se rendaient compte de plusieurs actions plus ou moins formalisées permettant de favoriser directement ou non le « bien-être » du créateur d’entreprise. Plus que de « santé » du créateur d’entreprise, c’est donc de « bien-être » de l’individu dont il était question4. Cette approche de la santé nous a permis d’identifier une dimension salutogène de l’accompagnement à travers : Des actions « bien-être » isolées : Ce sont des évènements annuels, des « temps-forts » permettant aux créateurs d’entreprises et employés de la structure d’accompagnement de se retrouver dans un cadre plus convivial. Cela se traduit par la création d’un club de marche à pieds, l’organisation annuelle d’une sortie, la mise en place d’une activité sportive ou culturelle sous la forme d’un atelier d’une demijournée. (Initiation aux arts des cirques, une sortie « bowling », un atelier « musique »). Ces actions sont clairement déployées pour instaurer un climat agréable, renforcer les liens et contribuer au bien-être du créateur d’entreprise : « c’est tout de même plus intéressant de faire des évènements hors champ de la pépinière car ce sont des gens qui n’ont que la création d’entreprise comme point commun mais c’est justement ce point qui fait mal, c’est le point anxiogène. Donc organiser un évènement pour les faire souffler un peu est judicieux, on sort du 4 Cette approche du bien-être rejoint les orientations de l’Organisation Mondiale de la Santé qui a permis d’élargir le modèle médical (fondé sur le diagnostic et le traitement des pathologies) en y intégrant la notion de bien-être, (un concept positif mettant en valeur les ressources des individus). 14 cadre de l’entreprise, on parle d’autres choses… » - « nous ici, on se considère comme un antidépresseur naturel, on fait ce qu’on appelle « les conviviales » que les créateurs adorent. On rassemble les anciens et les nouveaux et ils adorent ça car ils se retrouvent quand même dans un cadre non professionnel. On réunit tout de même entre 50 et 60 personnes, on a des aficionados qui sont toujours là chaque année. Il s'agit de journée soupape de responsabilité ». Une relation accompagnant/accompagné proche du coaching « bien-être » : En effet, le contrat d’accompagnement stipule des rendez-vous réguliers avec un accompagnant référent, ceux-ci considèrent d’ailleurs que cette relation dyadique constitue la colonne vertébrale de l’accompagnement. La plupart des responsables interrogés ont une fonction d’accompagnement est suivent les projets. Ils insistent sur l’importance de la relation de proximité qui va s’instaurer au fil du temps. Une relation fondée sur la confiance, l’écoute, l’empathie, le soutien moral et affectif, les conseils bienveillants : « nous sommes beaucoup dans l’empathie, on sent qu’ils ont besoin de nous voir surtout quand ça ne va pas, quand ça va on les vois moins… c’est par période, avec des facteurs différents, parce que là il y a un dossier à rendre pour le lendemain, parce que le fiston ne fait pas ses nuits,…quand ils ont besoin de parler, ils sont écoutés, ils viennent, ils s’installent. C’est du temps complètement informel, mais c’est de l’accompagnement aussi quelque part […] nous on connait tout d’eux, la famille, les enfants, tout. C’est quelque chose qui joue beaucoup dans la réussite d’un projet, ou du moins dans l’amélioration des conditions dans lesquelles un créateur d’entreprise développe son activité » - « on a forcément ce rôle-là aussi, quand ça ne va pas, on est là. En plus on les suit sur du long terme, on créé des liens affectifs […] ça dépend des porteurs de projets, il y en a qui vont nous tenir au courant très régulièrement, d’autres qu’on ne revoit plus et qui ne jouent pas le jeu » - « Mais ils savent qu’ils peuvent compter sur nous. Cette dimension salutogène comme vous disiez, on le fait peut être en étant juste là, ça passe par de l’humain et de se dire : je ne suis pas seul ». Il y a donc une fonction affective non formalisée qui va apporter un soutien indispensable, notamment dans les périodes difficiles : « en permanence on doit lever les doutes, notre métier c’est de lever le plus de doute possible pour que leur chemin soit éclairé ». Des pratiques d’accompagnement classiques spontanément salutogènes ? Le cœur de métier de l’accompagnement entrepreneurial est de concentrer un maximum de moyens et d’outils afin de maximiser les chances de succès d’un projet et accélérer son développement. L’essence même de l’accompagnement est donc de fournir un ensemble de ressources qui vont contribuer à aplanir certaines difficultés, et ainsi améliorer les conditions de création d’une entreprise : « nous on va leur apporter un certain nombre d’outils qui vont aplanir les difficultés liées à la création d’entreprise et qui sont sources de stress…on n’est pas dans un accompagnement santé pur et dur, ce n’est pas dans notre offre, et ce n’est pas non plus ce qu’on recherche, on recherche certes de faciliter la chose mais en terme d’impact sur la santé ça peut se mesurer sur le sentiment d’isolement par exemple, sur les aider à faire le bon choix…on est là aussi pour leur apporter un certain nombre d’outils qui vont limiter leur stress quelque part ». Les responsables comme les créateurs ont également souligné l’apport de la pépinière d’entreprise en termes de visibilité, de valorisation du projet : « dès qu’on peut, on valorise les projets. Là du point de vue santé il y a un impact…c’est à dire qu’on valorise la réussite d’une entreprise, on la met en avant, ça rebooste les autres. Psychologiquement, quelqu’un gagne un concours ça stimule, ça encourage. Surtout quand ils sont lauréat d’un concours nous on le dit partout, ils font la une des journaux et pour le moral je vous assure que ça rebooste les créateurs. Ils sont contents. On entre dans le cercle vertueux de la réussite » - « après autre point positif c’est que lorsqu’ils entrent chez nous, pour la visibilité, c’est bien. Tous les supports communication mettent vraiment en valeur les projets ». Une pépinière d’entreprise apporte ainsi une meilleure visibilité auprès des parties prenantes, et sont en ce sens des sources de légitimation positives (Cuillère, 2005 ; Messeghem et Sammut, 15 2007). Le fait de se sentir valorisés et reconnus par des professionnels de la création d’entreprise les rassure également : « ici, ils sont les premiers à nous avoir suivi sur le projet. Tout d’un coup, ça fait bizarre de savoir qu’on croit en nous, en notre potentiel, quelque part il y a une forme de reconnaissance qu’on aurait pas eu si on n’avait créé dans notre coin ». Par ailleurs, nous avons pu constater l’apport bénéfique de l’accompagnement sur le sentiment de solitude et d’isolement. En effet, lorsqu’elles ont une fonction d’hébergement, les structures d’accompagnement sont des lieux de vie dans lesquels les temps informels d’échanges vont contribuer à favoriser les relations entre les résidents (notamment par le biais des formations collectives) mais également entre les créateurs et l’équipe accompagnante : « moi par habitude, je fais ce que j’appelle la tournée des popotes : je fais le tour des bureaux, je fais le tour des ateliers pour voir tout le monde. À partir de là, ça permet de les voir, ça permet d'échanger, voire leur implication, les soucis qu'ils ont, en discuter. A partir de là on arrive à avoir leur ressenti beaucoup plus que si on attend dans son bureau en attendant la réunion de suivi mensuel ». Et enfin entre professionnels, puisque l’un des axes principaux de l’accompagnement est le renforcement du réseautage. Il y a donc un renforcement du soutien social non négligeable qui permet aux créateurs d’entreprise de sentir moins isolés et soutenu moralement. (Le sentiment d’isolement du créateur d’entreprise ne fait d’ailleurs pas parti de nos facteurs pathogènes les plus récurrents). Enfin, l’hébergement va permettre le maintien d’un équilibre en cloisonnant la sphère professionnelle de la sphère privée, mais également en participant à maintenir un rythme professionnel : « on travaillait chez nous au départ quand on développait le projet, mais dès qu’on s’est installé dans un bureau, on a fait ce qu’on appelle du co-working, et le fait de travailler avec d’autres personnes, de parler pendant la pause-café ou la pause déjeuné cela a été très bénéfique pour le morale » - « travailler chez soi n’amène rien de bon, j’ai testé au début, c’était infernal, j’avais beau essayer de fixer des barrières il y avait les enfants au milieu qui ne comprenaient pas pourquoi je ne pouvais pas jouer avec eux, […] puis vous finissez par culpabiliser de ne pas leur consacrer du temps, et quand vous leur consacrer du temps, vous finissez par culpabiliser de na pas avoir consacré ce temps à votre projet ». Ainsi, c’est en déployant un maximum d’outils, de moyens humains et matériels autour du créateur et de son projet que les structures d’accompagnement vont contribuer à réduire les sources de stress potentielles issues du processus de création d’entreprises. Il y a donc une dimension salutogène de l’accompagnement qui est à la fois recherchée, non formalisée et spontanée. Après tout, n’est-ce pas l’essence même de l’accompagnement que de stimuler en chacun ce qu’il y a de meilleur ? (Paul, 2002) 5. Discussion/conclusion Au terme de cette analyse, nous avons pu identifier un certain nombre de facteurs pathogènes issus de l’acte entrepreneurial et qui sont sources de stress et de fatigue pour le créateur d’entreprise. En effet, les problèmes financiers, la pression de l’enjeu, la surcharge de travail sont les sources de stress les plus récurrentes lors de la phase de création d’entreprise. Néanmoins, un ensemble de facteurs de résistance et traits de personnalité contribuent à préserver une meilleure santé. Parmi ces facteurs salutogènes, on retrouve la passion, l’optimisme, la persévérance, mais aussi le sentiment d’être entouré et aidé. Ce sentiment rappelle que l’accompagnement entrepreneurial contribue directement ou indirectement au bienêtre du créateur d’entreprise, notamment à travers des actions bienveillantes et conviviales, un coaching proche du soutien affectif, mais également à travers un ensemble d’outils et de ressources plus formalisés et qui vont permettre d’alléger le créateurs d’entreprise de certaines contraintes. Par ailleurs, être accompagné peut apporter une meilleure visibilité, et une forme de 16 reconnaissance. Quand à la fonction même d’hébergement, elle permet de rompre le sentiment d’isolement et cloisonner la sphère privée de la sphère professionnelle. Néanmoins, nous aimerions souligner quelques limites. La première est que notre échantillon se compose exclusivement de créateurs d’entreprises accompagnés. Or, il aurait été intéressant d’y inclure aussi des créateurs d’entreprise isolés qui représentent une part dominante des entrepreneurs (selon une étude de l’Insee 2010, seul 28% des créateurs d’entreprises ont reçu l’appui d’une structure dédiée à la création d’entreprises). On pourrait d’ailleurs penser que les projets sélectionnés sont des projets plus solides et portés par des personnes déterminées et moins fragilisées, d’autant plus qu’aucun des répondants n’a arrêté son projet de création à cause d’un impact trop important sur sa santé. Cependant, nos résultats nous permettent d’affirmer qu’ils sont aussi soumis à des facteurs de stress, chacun réagissant à sa manière. Aussi, notre objectif n’est pas de dresser un tableau idyllique de l’accompagnement. Il faut reconnaître que certaines structures sont des hôtels d’entreprises plus que des pépinières d’entreprises et lorsque l’appui est restreint ou manquant, le caractère salutogène perd tout son sens, on pourrait alors parler d’un accompagnement pathogène qui favoriserait le sentiment d’isolement. Messeghem et Sammut (2007) ont d’ailleurs constaté un risque d’isolement existant lorsque la structure d’accompagnement ne remplissait pas son rôle d’accompagnement. Ainsi, lorsqu’un maximum d’outils et de ressources sont déployés et lorsque la structure d’accompagnement est réellement engagée dans sa mission d’accompagnement, le caractère salutogène est significatif. A partir de là, que faudrait-il faire de plus ? Il est certain que les effets pathogènes de l’acte entrepreneurial ne disparaitront pas, tout comme le stress auquel les créateurs seront soumis à des degrés plus ou moins marquant. Notre objectif n’est pas non plus de nous limiter à une approche manichéenne qui consisterait simplement à dire qu’il y a du bon et du mauvais. D’un point de vue opérationnel, les résultats de notre recherche permettraient de légitimer des actions plus engagées « en faveur de la santé » au sein des structures d’accompagnement. Il est certain que le rôle de l’accompagnement n’est pas de se substituer aux établissements de santé, néanmoins, n’y a-t-il pas des messages à faire passer en termes de prévention santé ? Nous connaissons l’importance de la reconnaissance et de la prévention des maladies professionnelles qui protègent les salariés. Ainsi, il ne s’agirait pas de déployer des actions curatives mais préventives. A partir de là, la théorie salutogénique prend tout son sens et nécessite de prendre conscience « du mal et du bien » pour pouvoir agir et mettre en place des moyens de prévention. La santé du créateur d’entreprise n’est donc pas une zone aveugle de l’accompagnement, mais une zone d’ombre. Si les besoins de santé ne sont pas formulés clairement, ils n’en sont pas moins latents. L’objectif de notre papier était d’informer les praticiens sur l’existence d’un ensemble de facteurs qui contribuent à mettre en péril la santé du créateur d’entreprise et potentiellement celle de son projet de création. Et surtout, il s’agissait de mettre en lumière les facteurs bénéfiques qui font que la création d’entreprise reste une aventure enrichissante et qui nécessitent d’être consolider. Bibliographie ALBERT P., BERNASCONI M., GAYNOR L. (2003), Incubateurs et pépinières d’entreprises: Un panorama international. Economie et Innovation, L’Harmattan. AERTS K., MATTHYSSENS, P., VANDENBEMPT, K. (2007), “Critical role and screening practices of European business incubators”. Technovation. 27 (5), 254–267. ALLEN D.N., RAHMAN S. 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Figure 2 : L’équation de la santé entrepreneuriale L’EQUATION DE LA SANTE ENTREPRENEURIALE FACTEURS PATHOGENES - FACTEURS SALUTOGENES Solitude, Gumpert et Boyd (1984) Sentiment d’isolement Gumpert et Boyd (1984) Incertitude, Say, (1821)-Knight (1921) Surcharge de travail, (Buttner (1992) Saturation cognitive, Hiltz et Turoff, 1985 ; Lahlou et al (1997) Manque de reconnaissance, Brun et Dugas (1999) Stress perçu, Lazarus et Folkman (1984) ; BruchonSchweitzer, (2002) Doute (valéau, 2004) Conflits de rôles : Karasek, (1979) ; Buttner (1992) - 24 Autonomie, Chirkov et al (2003) Optimisme Seligman (2008) Bruchon-Schweitzer (2001) Lieu de control interne, Rotter, 1966) Endurance, Kobasa et al (1982) Flexibilité cognitive, Spiro et Jehng (1990) Efficacité personnelle, Bandura, (1982) Sens de l’engagement (SOC) Antonovsky (1969) Résilience (Bernard, 2008) Soutien social Putnam, (2000) Schaefer et al (1981) ; Chay et al, 1993) Passion, Vallerand et al (2003) ; Cardon et al (2012)