CASPE logement
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CASPE logement
Il a semblé particulièrement important de dépasser une réflexion à court terme, ou simplement théorique, pour prendre la réelle mesure des enjeux et rechercher des pistes d’actions concrètes. Les paroisses, associations, œuvres et mouvements proches de nos Églises, peuvent utiliser ce rapport pour, à leur tour, engager leur propre réflexion ou action. Cela peut passer par l’organisation de débats internes ou par la mise à disposition de ressources immobilières. De leur côté, les Églises protestantes, épaulées par le Chapitre de Saint-Thomas, joueront pleinement leur rôle de soutien aux initiatives locales. CASPE Commission des affaires sociales politiques et économiques de l’union des Églises Protestantes d’Alsace et de Lorraine conception graphique Une importante réflexion a été engagée par cette commission, mandatée par les Églises, sur la question du logement social. Le présent rapport « Logement : urgence. De l’hébergement d’urgence au logement social » est le fruit de deux années de consultations. - 0610 - crédits photos © Albert Huber - Roland Kauffmann - Centre social protestant - 2006, tous droits réservés Pour répondre aux préoccupations, non seulement de leurs membres mais aussi des citoyens dans leur ensemble, elles se sont dotées d’une commission dédiée aux « affaires sociales, politiques et économiques » : la CASPE. union des Églises Protestantes d’Alsace et de Lorraine Les Églises Protestantes d’Alsace et de Lorraine ont pour tradition d’être pleinement engagées dans la vie de la Cité. Logement : urgence – De l’hébergement d’urgence au logement social – CASPE Logement : urgence – De l’hébergement d’urgence au logement social – CASPE Commission des affaires sociales politiques et économiques de l’union des Églises Protestantes d’Alsace et de Lorraine Président M. Alain Degrémont, enseignant à l'Institut du Travail de Strasbourg Membres (par ordre alphabétique) • M. Jean-François Collange, président du Directoire de l’Église Protestante de la Confession d’Augsbourg d’Alsace et de Lorraine • M. Brice De Turckheim, expert-forestier • M. Richard Fischer, pasteur en charge des relations avec les institutions européennes • M. Pierre Greib, président du Comité de liaison d'associations pour la promotion des immigrés en Alsace (Clapest) • M. Claude Harel, président de l’Entente évangélique de Strasbourg • M. Robert Herzog, professeur de Droit, Chapitre de Saint-Thomas • M. Jean-Michel Hitter, pasteur, président de la Fédération des Œuvres Évangéliques • M. Geoffroy Goetz, pasteur, président du Conseil synodal de l’Église Protestante réformée d’Alsace et de Lorraine • M. Roger Kapp, Home protestant de Strasbourg • M. Jacques Marzolf, avocat • Mme Danielle Meyer-Traber, maire d’Ostwald • Mme Jacqueline Schaditzky, Société évangélique de mission intérieure de Strasbourg (Semis) • M. Alain Spielevoy, pasteur, Mission dans l’industrie d’Alsace du sud (Mias) • M. Gilbert Vincent, professeur de philosophie, faculté de théologie protestante de Strasbourg La CASPE a entamé une réflexion sur le logement, de l’hébergement d’urgence au logement social, afin d’informer non seulement les responsables des Églises, mais aussi les membres des paroisses, sur cette question. Il s’agit d’aider ces derniers dans leur analyse personnelle des situations qu’ils rencontrent sur le terrain et dans leurs actions ou prises de position, tant au sein de l’Église qu’à titre individuel. C’est pourquoi la CASPE, comme l’Assemblée Commune lui en a donné le mandat, à réalisé le document suivant qui pourra vous servir d’outil pour animer une réflexion sur ce sujet dans votre communauté. Il s’agit d’un texte rédigé par les membres de la CASPE qui n’a d’autre ambition que d’être une invitation au débat. Si vous souhaitez organiser des conférences ou des rencontres-débats, une liste de contacts figure également en annexe de ce document. D à l’autre bout de la chaîne, des mesures ont été prises, dans le cadre du « plan Borloo », pour accélérer la construction de logements sociaux. Néanmoins, ces mesures, qui tiennent compte de la gravité de la situation, ne peuvent avoir de l’effet que dans un délai relativement long. Elles ne peuvent pas résoudre du jour au lendemain des situations dont l’urgence n’échappe à personne. e plus en plus de membres de nos Églises sont en contact avec des situations d’hébergement en urgence ou de problèmes de logement dans le parc locatif social : hausses des loyers, augmentation du chômage et de la précarité, pénurie de logement social, avec des listes d’attente pluriannuelles, tous ces facteurs semblent se combiner pour rendre la situation de plus en plus difficile sur le front du logement, de l’hébergement d’urgence au logement social. C’est ainsi qu’au niveau des Églises, diverses actions ont été entreprises au cours des dernières années. Vous en trouverez des échos dans la troisième partie de ce document. Sans qu’elles puissent résoudre définitivement les problèmes, ni se substituer à l’action de l’État, des communes et des établissements semi-publics, ces actions d’Église apportent, dans des cas plus nombreux qu’on ne le pense habituellement, un réconfort et une dignité à de nombreux frères et sœurs en humanité. L’augmentation du nombre de personnes « à la rue » est un phénomène particulièrement visible en hiver, lorsque les médias s’emparent de ce thème sensible dans l’opinion (peut-être en raison de la proximité de Noël). Depuis plusieurs années, le gouvernement répond à cette mise au jour de la situation, par l’organisation d’une « campagne hivernale » : des moyens considérables sont débloqués pour que « personne ne se retrouve à la rue dans le froid de l’hiver ». Mais les moyens fondent en même temps que la neige au sortir de l’hiver… En même temps, nous sentons monter dans le pays une stigmatisation des réfugiés et des étrangers en situation irrégulière, sensés être de plus en plus nombreux, accusés souvent à tort d’être les responsables de la situation difficile dans le cadre du logement ainsi que sur le front de l’emploi. Il y a quelques années, l’État a également mis en place le 115, un numéro d’appel téléphonique unique sur le territoire, pour le signalement des personnes qui sont sans toit. Enfin, 3 La question de l’hébergement d’urgence de place, ou encore par des personnes qui travaillent mais qui ne parviennent pas à obtenir un logement social. 1 Nous avons perçu chez nos interlocuteurs des constats unanimes : une forte dégradation de la situation, surtout depuis 2001, et un engorgement des dispositifs d’accueil, lié au premier chef à la pénurie de logement social et à la hausse des loyers. Les dispositifs d’hébergement temporaire, CHRS (Centres d’hébergement et de réinsertion sociale), CADA (Centre d’accueil des demandeurs d’asile), et même « pré-CADA », ne peuvent fonctionner normalement que si une sortie « par le haut » est possible. L a commission a commencé son travail par la question de l’hébergement d’urgence, en rencontrant des acteurs du terrain : des représentants du 115 (déjà cité plus haut), du CASAS (Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg), du CSP (Centre social protestant) et de l’AAHJ (Association d’accueil et d’hébergement des jeunes – spécialisée dans le logement d’urgence à Strasbourg). Leurs témoignages, souvent chargés d’émotion, ont montré un grand engagement professionnel face à la dure De plus, des incohérences apparaissent réalité sociale et à la montée des situations parfois dans l’action des pouvoirs publics, dramatiques. Ils nous ont aidés à distinguer les compétences (enfance, RMI, familles…) les différents publics concernés par le étant réparties entre des organismes différents, logement d’urgence : accidentés de la vie, fonctionnant chacun dans sa propre logique. intermittents ou permanents de l’exclusion… L’engorgement des Nous avons constaté une Ces publics connaissent tension forte entre ces des situations diverses : dispositifs d’hébergement acteurs de terrain et les chômage de longue durée, pouvoirs publics, tantôt endettement, toxicomanie, n’est pas la conséquence d’un rassurants (comme avec maladies mentales… la publicité autour du Ils nous ont également afflux récent et grandissant 115 qui laisse à penser invités à bien distinguer qu’il y a une solution dans ce public les de demandeurs d’asile. pour chaque demande), « sans-domicile-fixe », tantôt inquiétants (comme des « demandeurs d’asile », ces derniers ne avec le public des demandeurs d’asile). En constituant pas, loin s’en faut, la seule particulier, l’intermittence de la campagne population en difficulté. hivernale est vécue très douloureusement, non seulement par les publics concernés, En effet, toutes les personnes rencontrées mais aussi par les structures d’accueil. nous invitent à tordre le cou aux idées toutes faites sur les demandeurs d’asile. En tout cas, les chiffres sont alarmants : le 115, dans le Bas-Rhin, fait face à 500 appels L’engorgement des dispositifs d’hébergepar jour en hiver, avec le signalement de 300 ment n’est pas la conséquence d’un afflux à 400 personnes nouvelles par mois ! En récent et grandissant de demandeurs d’asile. dehors de la campagne hivernale, une Par contre, il rend leur présence plus visible. demande sur dix y trouve une réponse. Côté financement, les moyens stagnent et les Ces dispositifs, en effet, sont souvent fonds sont parfois mal utilisés, avec de occupés par des personnes dont la place l’hébergement dans des hôtels ou des serait plutôt dans des hôpitaux ou des transports en taxi très onéreux. Pourtant, le cliniques psychiatriques, lesquels manquent 4 problème étant structurel, il semble nécessaire de reconsidérer la gestion de ces crédits. de l’immobilier. Depuis plusieurs années, les difficultés manifestes qu’ont les personnes à faibles ressources dans les grandes agglomérations, à pouvoir accéder aux logements sociaux, ont sérieusement remis en question le rôle joué par le parc social. C’est dans l’aprèsguerre que l’on observe le plus gros effort de construction de logements sociaux (on est passé de 70 000 logements neufs par année en 1948 à 320 000 dix ans plus tard), on observe ensuite une stagnation jusqu’à nos jours, avec un chiffre de 80 000 logements construits Le chien, souvent le dernier compagnon d’une vie de galère pour l’année 2004, mais les prévisions sont toujours supérieures aux réalisations. Actuellement, la France construit beaucoup, mais peu dans le social, malgré une timide reprise. C’est le besoin de logements sociaux qui est le plus criant. La Fondation Abbé Pierre estime à 500 000 le nombre de logements manquants. Il existe aujourd’hui, dans notre pays, près de 4 es victimes des évènements qui ont millions de logements sociaux, mais il y a marqué l’actualité de l’hiver 2005-2006 plus d’un million de demandeurs, selon (celles des incendies dans les squats, celles l’Union sociale pour l’habitat. des émeutes dans les banlieues, et les sansabri morts de froid) sont reliées par un La question du logement social, en Alsace terrible fil rouge : l’insuffisance de logements comme ailleurs, ne se résume pas en une sociaux, qui empêche d’assurer à tous un toit simple équation entre une demande toujours décent et d’obtenir plus de mixité sociale. plus forte et une offre qui se raréfie. Autour Au-delà des plus sinistrés, la crise du d’une moyenne nationale de 69 logements sociaux pour 1 000 habitants, l’Alsace avec logement touche, à des degrés divers, une 54 logements sociaux pour 1 000 habitants, large frange de la population des catégories et la Lorraine avec 66 logements sociaux populaires et moyennes, et en particulier les jeunes. Les origines de cette situation pour 1 000 habitants, sont deux régions qui sont largement connues : un engorgement souffrent d’un parc de logements sociaux des dispositifs d’hébergement, un retard nettement insuffisant. Par ailleurs, dans une accumulé dans la construction de logements région comme l’Alsace qui voit s’accélérer sociaux, une flambée des loyers et des prix son étalement urbain, la ségrégation sociale 2 Le problème du logement social L 5 s’intensifie, comme l’a montré la crise des Cette « insécurité sociale » touche un nombre Un chiffre auquel la Fondation Abbé Pierre de la population grâce à l’exception française banlieues de l’année dernière : cette péricroissant de personnes : plus de 3,5 millions ajoute 35 000 personnes résidant en strucen matière de natalité, vieillissement de la urbanisation produit un véritable tri spatial vivent en France sous le seuil de pauvreté ; le tures d’hébergement, et près de 100 000 population et décohabitation croissante qui des groupes sociaux selon leurs revenus, en taux de chômage est encore de 9,5% de la personnes sans-domicile-fixe. Ces chiffres se traduisent par un nombre de ménages restreignant les secteurs accessibles aux population active ; le nombre de bénéfipeuvent certes prêter à discussion, mais ils plus élevé et un nombre de personnes plus populations à revenus modestes. Il faudrait ciaires de minima sociaux ne cesse de croître ; donnent un ordre d’idée de faible par logement. plus de 11 000 logements sociaux suppléet les salariés subissent le développement la gravité du problème. On doit reconnaître aux Résultat, une crise du logementaires dans le Bas-Rhin et près de 9 000 d’emplois précaires, insuffisamment rémument généralisée où les dans le Haut-Rhin, pour que notre région nérés pour assurer l’accession au logement. C’est à cette crise du logepouvoirs publics une plus pauvres sont les plus respecte les objectifs de Le « mal-logement » rasment, que s’est attaqué mal lotis. On doit reconla Loi SRU (Solidarité et En fait, il y a un lien étroit semble des situations très Jean-Louis Borloo, ministre indéniable volonté de naître aux pouvoirs publics renouvellements urbains), disparates, du sans-logis de la cohésion sociale, en une indéniable volonté de du 13 décembre 2000, qui entre manque de logement aux chambres de bonnes lançant avec la « Loi de mieux faire, et d’avoir mieux faire, et d’avoir se fixait un objectif de exiguës, en passant par programmation pour la d’emblée considéré le loge« mixité sociale », visant et pauvreté : quiconque est les appartements trop cohésion sociale » de d’emblée considéré le ment comme un problème à atteindre en 2020, dans petits pour des familles janvier 2005, un ambitieux majeur. Cependant, malgré les 742 communes de très pauvre ne peut trouver nombreuses. Au total, programme de cinq ans. logement comme un d’importants progrès et plus de 3 500 habitants, selon l’Insee, on compteCette loi comporte un impormalgré l’annonce faite d’une un seuil minimal de 20% de logement, et quiconque rait 3,4 millions de maltant volet « logement », qui problème majeur. rupture radicale avec les de logements sociaux. logés, dans notre pays, est destiné d’une part à politiques précédentes, plun’a pas de logement ne peut soit près de 5% de la pallier l’insuffisance de logements adaptés sieurs facteurs de blocage, source d’autant En fait, il y a un lien aux besoins et aux ressources de nombreux population. Un chiffre d’incertitudes, peuvent laisser craindre que étroit entre manque de obtenir un emploi. ménages, d’autre part à éviter l’exclusion de qui recouvre des situacet ambitieux programme législatif n’ait pas logement et pauvreté : publics défavorisés qui se sont réfugiés dans tions très différentes : l’effet de rattrapage attendu. C’est qu’en quiconque est très pauvre ne peut trouver de l’habitat indigne ou dans des formules personnes vivant en situation de surpeuplematière de logement, il y a souvent eu, par le logement, et quiconque n’a pas de logement d’hébergement temporaire. Pour rattraper ment critique, personnes vivant dans des passé, loin des paroles aux actes. ne peut obtenir un emploi. Aujourd’hui, on des retards en matière de construction de logements dépourvus de confort, personnes trouve même, parmi les sans-abri dormant logements locatifs sociaux, la production logées en habitat de fortune ou provisoire. dans les rues de nos villes, des gens compéeffective passera de 80 000 tents, accompagnés de leurs enfants, et pris en 2004 à 120 000 en 2009 dans un cercle vicieux : ayant perdu leur (soit 500 000 en cinq ans). emploi, ils ont perdu leur logement, mais Cette loi prévoit plusieurs sans revenu assuré, ils ne peuvent dispositions visant à relancer convaincre un loueur de leur signer un bail la construction de logements et, sans bail, ils ne peuvent postuler à sociaux, à redynamiser l’héun emploi ; la rue est leur seul avenir. On bergement d’urgence, et à a lutte contre l’exclusion est devenue assiste ainsi à une véritable « exclusion du favoriser la mise sur le en vingt ans un impératif des politiques logement » pour toute une partie de la marché d’une offre locative publiques, et combattre l’exclusion les population, car il manque surtout des privée à loyer abordable. Une concerne toutes : la politique économique et logements accessibles aux personnes à sociale, la politique de l’emploi, la politique de loi portant « engagement faibles revenus : se loger aujourd’hui, l’éducation, la politique de la santé, la polinational pour le logement », lorsqu’on dispose de peu de ressources, est tique du logement. Cependant, les politiques devrait compléter le dispositif devenu une véritable gageure. Pour sortir de publiques ne sauraient être seules concernées : gouvernemental. ce cercle vicieux, il faudrait modifier les faire une place aux plus faibles, les consiconditions de solvabilité requises pour les dérer dans leur dignité, leur témoigner de la Les politiques publiques locataires, ou encore créer les conditions solidarité, cela n’est pas uniquement l’affaire n’ont pas anticipé le besoin pour qu’ils puissent être considérés au des pouvoirs publics. Leur action reste nécesde logements, lié à des départ comme solvables, et qu’ainsi sans sairement limitée, si elle n’est pas relayée, évolutions démographiques doute ils le deviennent, en se portant garant pourtant plus prévisibles amplifiée, encouragée par ce qu’il est convenu du paiement d’un loyer. Les marchands de sommeil profitent des personnes en difficulté, particulièrement des immigrés qu’un cyclone : augmentation d’appeler désormais la « société civile ». Nos Églises s’engagent : quelques exemples 3 L 6 7 Il y a un peu plus de dix ans, la Fédération des enfants, pour des temps de convivialité, protestante de France prenait l’initiative de pour des aides pratiques à la vie quotilancer un vaste débat autour de cette dienne. L’association chargée de la gestion question dans le cadre d’une campagne du projet s’est ainsi trouvée confortée dans intitulée « Travail Partage Exclusion ». Son son action. À la sortie de la campagne bureau engageait, dans une déclaration du hivernale, les personnes engagées dans cette 5 avril 1994, « les Églises, action ont découvert avec les mouvements, les grouPourtant, des actions horreur les conditions de vie pes locaux à participer à ce qui allaient être celles de débat, à ce mûrissement efficaces sont possibles beaucoup de ces familles, le des consciences… » Un appel plus souvent à Strasbourg, qui demeure d’une brûlante à plusieurs niveaux. une vie au jour le jour, dans actualité. une errance à durée indéterminée entre hôtels et centre d’accueil Comment agir en matière de logement ? La d’urgence, avec parfois des situations de première idée qui nous vient à l’esprit est familles séparées. C’est pourquoi à la sortie que nous ne sommes pas armés pour agir de la campagne hivernale de 2006, après une dans ce domaine : le problème paraît trop deuxième année de soutien des résidents de grand pour nous. Pourtant, des actions l’hôtel « Arc-En-Ciel », les membres du efficaces sont possibles à plusieurs niveaux. collectif oecuménique ont choisi de Nous savons que beaucoup de projets manifester avec d’autres à Strasbourg, concrets ont été menés par des paroisses ou devant la Préfecture, pour appeler les des œuvres de nos Églises. Il serait impospouvoirs publics à abandonner la logique de sible de tout citer ici. Mais nous pouvons la campagne hivernale et à pérenniser les néanmoins brosser un panorama de moyens d’accueil tout au long de l’année. On quelques expériences caractéristiques qui pourrait citer d’autres exemples, comme nous ont été décrites au cours de notre celui de la paroisse de Sarrebourg en travail de consultation. Moselle, qui participe depuis plusieurs années à l’hébergement d’urgence pendant la période hivernale. avoir payé quelques jours d’hôtel a hébergé la famille dans une pièce attenante à la chapelle, en attendant qu’elle puisse intégrer le dispositif de la campagne hivernale. La paroisse Saint-Matthieu, à Strasbourg, héberge quant à elle des demandeurs d’asile depuis de nombreuses années, dans des pièces de son centre paroissial aménagées à cet effet. Cette action est même intégrée au projet paroissial. Elle est menée en lien avec le CASAS (Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg), une association spécialisée. de dépasser certaines craintes légitimes chez des propriétaires. Les associations et institutions caritatives partenaires des paroisses Ce sont là autant d’actions menées par les paroisses, parfois de façon passagère, parfois inscrites dans la durée. Mais il faut souligner que dans bien des cas des associations spécialisées ont été d’un très précieux secours, grâce à leur expérience de ces situations et leurs capacités d’accompagnement des bonnes volontés. d’asile par les paroisses À l’occasion de la campagne hivernale 2004-2005, s’est ouvert à Bischwiller un accueil d’urgence hivernal dans un hôtel En certains lieux, la problématique du logement alors fermé pour des raisons économiques. d’urgence a surgi à travers la question de Plusieurs membres de la l’accueil des demandeurs paroisse protestante ont …la recommandation d’une d’asile. C’est ainsi, par découvert à cette occaexemple, qu’en novembre sion qu’il y avait des famille par une paroisse 2005 la paroisse de centaines de familles à l’Illberg-Coteaux située la rue en Alsace. Dans ou un pasteur peut parfois à Mulhouse, a été le cadre d’un collectif interpellée par une traœcuménique de soutien permettre de dépasser vailleuse sociale sans aux familles hébergées solution pour mettre dans cet hôtel, un accomcertaines craintes légitimes à l’abri une famille pagnement a été mis en Bosniaque demandeuse place pour l’animation chez des propriétaires. d’asile. La paroisse, après Le rôle du CSP (Centre social protestant) à Strasbourg est exemplaire de ce point de vue. L’association a pu aider plusieurs groupes paroissiaux dans leurs actions d’accompagnement. Des rencontres avec des groupes de personnes engagées pour échanger, pour L’accueil au Centre social protestant, du respect avant tout écouter et pour conseiller se sont souvent Mais l’accompagnement des demandeurs avérées très précieuses, car les difficultés d’asile peut aussi prendre une autre forme : sont réelles. De même, les compétences du celle d’un parrainage. C’est ainsi qu’à CSP en matière de connaissance des circuits Mulhouse, la paroisse Saint-Paul a accompagné de l’aide sociale ou dans le domaine de des familles arméniennes demandeuses l’organisation de campagnes de parrainages d’asile. Outre l’accueil dans la communauté ont permis d’obtenir souvent des résultats cultuelle, le pasteur et certains membres de positifs. À l’inverse, le CSP a parfois interla paroisse ont pu donner au fur et à mesure pellé des paroisses pour obtenir une aide les coups de pouce nécessaires pour la dans des situations bloquées : les paroisses reconnaissance de leur statut de réfugié, la ont quelquefois des possibilités d’héberrecherche d’un emploi et enfin celle d’un gement temporaire ou possèdent des appartement dans le parc locatif privé : la logements locatifs. Outre la mise à disposirecommandation d’une famille par une tion de ces logements pour des personnes aidées par le CSP, les professionnels ont paroisse ou un pasteur peut parfois permettre 8 9 Un accueil d’urgence hivernal à Bischwiller L’accueil des demandeurs exprimé leur besoin d’être épaulés par des équipes de bénévoles, qui puissent se concentrer durablement sur une situation, là où les professionnels doivent sans cesse faire face à de nouvelles situations. …les professionnels ont exprimé leur besoin d’être épaulés par des pour boucler leur budget, elles ne pourront accepter de louer à des personnes en difficulté que si le risque financier est réduit au maximum. équipes de bénévoles… Une œuvre protestante La question de l’accompagnement par des équipes de bénévoles peut d’ailleurs se poser dans d’autres cas : en effet, des propriétaires privés ou publics (par exemple les communes) acceptent plus volontiers de louer des logements à des personnes en situation précaire lorsqu’elles savent qu’un suivi sera accompli par des personnes de confiance. À Ostwald, par exemple, la municipalité met à disposition un logement d’Instituteur non affecté et la paroisse (accompagnée par le CSP) assure le suivi de la famille logée. sur le terrain du logement : le Home protestant Certaines œuvres protestantes agissent encore directement sur le terrain du logement, comme le Home protestant à Strasbourg. Ce dernier est présent dans les différents dispositifs de l’hébergement de l’extrême urgence (comme dans le cas de femmes victimes de violences conjugales) ou de l’hébergement temporaire. Outre la gestion d’un CHRS (Centre d’hébergement et de réinsertion sociale), l’association possède également la résidence sociale « Les Foulons », qui permet des logements d’urgence et d’insertion (pour des personnes qui ne relèvent pas des CHRS mais qui continuent à avoir besoin d’un accompagnement social lié au logement). Il n’est pas rare non plus que des paroisses soient propriétaires de logements locatifs. La même question se pose pour elles que pour les autres propriétaires : alors qu’elles comptent sur les revenus de leur patrimoine Soutenir financièrement les œuvres protestantes qui agissent dans le domaine du logement ou s’engager dans une action bénévole en leur sein, peut donc également devenir une des modalités de l’action concrète des personnes ou des paroisses qui sont sensibles aux difficultés rencontrées par les plus démunis sur le front du logement. L’espace enfant du Home protestant, offrir le meilleur du jeu à tous les enfants 10 Union d’entraide : 60 000 € Les enquêtes montrent qu’un trop grand nombre de personnes vivent encore dans des pour soutenir des projets logements dépourvus de tout confort de base. Elles seraient presque autant à être dans le domaine du logement privées de domicile personnel, sans oublier les SDF (sans-domicile-fixe) qui sont aujourOn le voit, la question du logement social d’hui les figures emblématiques de l’excluen général, du logement d’urgence en partision. La tentation est alors trop souvent, de culier, se pose avec beaucoup d’acuité rechercher des explications simples, comme aujourd’hui. Notre union d’Églises ne saurait la seule présence des personnes issues de rester indifférente devant des situations l’immigration, explications qui ont surtout souvent dramatiques. pour effet d’exonérer Elle ne le reste d’ailleurs Notre union d’Églises ne saurait de toute responsabipas, comme le montrent lité une société dont le bien les exemples cités rester indifférente devant des fonctionnement peut ci-dessus. Mais nous conduire certains à pourrions faire plus et situations souvent dramatiques. l’exclusion. On ne peut mieux encore. D’abord rester insensible face à en sensibilisant davantage de personnes à la cette « question sociale », qui met en cause question et aux efforts nécessaires pour y la façon dont nous vivons notre spiritualité. remédier : en participant à la formation d’une Mais comment ne pas rester paralysés conscience chrétienne plus claire de la devant l’ampleur du problème et rechercher gravité du problème et plus déterminée par la réflexion collective, les moyens de quant à sa solution. Mais aussi en entreprepasser à l’action ? Les propositions qui suivent nant, dans un certain nombre de cas précis, ne sont que des suggestions, quelques telle action spécifique susceptible de pistes d’actions possibles. remédier – ne serait-ce qu’un peu – à la détresse. Pour encourager les efforts dans ce sens, l’Union d’Entraide a décidé d’affecter La responsabilité des une somme de 60 000 € au soutien de propriétaires de logements projets existants ou à naître dans le domaine du logement. Des membres de nos Églises peuvent être propriétaires et cela pose la question de leur responsabilité ou de leurs possibilités au regard de la situation des mal-logés. Les responsabilités particulières de propriétaires de logements locatifs rejoignent pour l’essentiel les responsabilités des propriétaires de tout bien, qu’il soit immobilier ou mobilier, en espèces ou en nature. Le bien algré des progrès considérables donné en location a été constitué par un enregistrés depuis un demi-siècle, le effort d’épargne et l’existence même de ce « mal-logement » persiste dans notre société. bien contribue au bien-être collectif : en L’accès au logement reste toute hypothèse, un foyer …ne pas rester paralysés sera logé. De façon générale une difficulté majeure à laquelle sont confrontés les l’appréciation de ce qui doit devant l’ampleur du plus fragiles, en raison de la être donné à la personne pénurie de logements et de en difficulté est affaire problème… la hausse des prix des loyers. de conscience individuelle, 4 Quelques pistes d’action possibles M 11 indépendamment de la nature du bien possédé. C’est à chacun d’en décider, comme de toute offrande. aussi parfaitement être dissociés, portés en France, venant de très loin, alors par des groupes différents. Là encore, sans tradition urbaine compale recours à des associations ou institutions rable à la nôtre, cette personne ne caritatives, conserve toute son utilité. C’est à chacun On peut, cependant, mettre en saurait faire un exergue quelques points propres usage profitable d’en décider, Le problème de la caution à l’activité de loueur de logedu logement qui ment. Il est évident que celui lui est fourni sans comme de toute à la signature du bail qui donne en location doit un accompagnerespecter la loi, et par là éviter ment très long et offrande. toute discrimination tenant à patient. L’hygiène Il peut arriver également qu’un cautionnement d’autres facteurs que la capacité à honorer le de la ville occidentale modersoit indispensable pour permettre la location paiement des loyers. Peut-être même faut-il ne, des rudiments de gestion d’un logement. Le fractionnement du cautionfaire un pas de plus ici. Celui qui est soucieux d’un budget familial dans une nement, entre les membres d’un groupe de des difficultés des mal-logés ne doit-il pas, à société de consommation, de parrainage, est dans la pratique impossible à capacité égale, favoriser le demandeur qui se nouvelles pratiques alimenmettre en œuvre. C’est pourquoi l’Église trouve dans une situation fragile ? Ne peut-il taires, doivent s’apprendre, propose, avec le Chapitre de Saint-Thomas, pas assouplir dans certains cas des critères de même que les contraintes la mise sur pied du dispositif suivant : de capacité financière généralement justifiés, d’un voisinage urbain et les obligations qui en naissent. • un groupe de soutien se constitue dans mais peut-être excessifs dans une situation Mais un accompagnement est donnée ? Peut-il aider le demandeur de Une chambre du Passavant à Mulhouse, offrir la possibilité de se sentir bien chez soi malgré tout une paroisse et décide de son intervention. tout autant logement à convenablement • le pasteur (ou une personne reconnue par Aide financière pour nécessaire dans d’autres exprimer sa demande, et Il ne peut pas y avoir la paroisse et l’Église) avalise cette intercas de logement d’urgence, peut-être rechercher avec vention et atteste du sérieux de l’engageles personnes en difficulté avec à chaque fois des lui les solutions les mieux de familles logées en ment de chaque personne du groupe. problèmes personnels et adaptées, en faisant inter• le groupe signe un engagement de La mise en œuvre d’un système de parraivenir par exemple le Fonds situation d’urgence sans familiaux connexes : rupture caution, par exemple d’un an. nage pourrait être un complément utile à Social pour le Logement ? conjugale, chômage ou travail • cet engagement est transmis au Chapitre l’action de tels groupes d’accompagnement. Il n’y a pas en la matière un accompagnement précaire, problème de santé avec l’attestation de la personne de Dans une première approche, le parrainage de réponse toute faite. Il ou encore endettement. référence. apparaît comme une nécessité financière, revient à chacun de trouver humain de proximité. • le Chapitre accorde sa caution. un chemin de responsabilité Ce travail d’accompagnement pour soutenir des personnes en difficulté, en • en cas de défaillance, le Chapitre est en fonction de ses marges de manœuvres long et patient peut demander l’engagement raison de ressources insuffisantes. appelé par le bailleur ; il est lui-même personnelles et dans le respect des de plusieurs personnes ou familles qui se couvert par les membres du groupe de personnes rencontrées. relaient auprès de la personne en difficulté. Dans une seconde approche, le parrainage soutien. Constituer ce groupe, s’engager pour donner peut également permettre de créer du lien du temps et de l’attention, est certainement social dans l’espace relaUn tel dispositif présente Accompagnement Dans une première approche, l’avantage de limiter les le premier pas à franchir. Cependant, cet tionnel de la personne accompagnement dans la détresse de l’autre en difficulté et dans la engagements financiers des personnes en difficulté le parrainage apparaît nécessite, pour tous ceux qui voudraient s’y proximité du logement. de chaque membre du engager, de s’inscrire dans un travail de En cela, il permet aussi groupe, tout en constiun meilleur accompagnecomme une nécessité tuant une garantie simple Dans de nombreuses situations, les préparation, pour lequel le soutien d’une ment vers une autonomie pour le propriétaire, ce personnes mal-logées ont aussi besoin association caritative et de professionnels du retrouvée. financière… qui peut rendre alors la d’être aidées sur d’autres plans : aide pour travail social est indispensable. location possible. la vie quotidienne, assistance budgétaire, Accompagnement et par…il permet aussi un meilleur accompagnement d’une recherche d’emploi… Le besoin d’accompagnement est réciproque : rainage peuvent évidemPour la CASPE, Alain Il ne peut pas y avoir de familles logées en bénévoles et professionnels ont également ment se conjuguer, au accompagnement vers une situation d’urgence sans un accompagnebesoin de lieu d’échanges, de ressources, de Degrémont, octobre 2006. sein d’un même groupe ment humain de proximité. Dans le cas, par soutien. Aux paroisses d’imaginer les formes d’aide, mais peuvent autonomie retrouvée. exemple d’une personne ayant obtenu l’asile d’une telle démarche solidaire. 12 13 Annexe : des contacts pour vos débats et vos actions Et maintenant ? Jean-François Collange, président du conseil de l’union des Églises Protestantes d’Alsace et de Lorraine. • CASPE (Commission des affaires sociales politiques et économiques) Alain Degrémont, président – 23 avenue du Général de Gaulle – 67000 Strasbourg tél : 03 88 60 28 74 – mél : [email protected] Les réflexions qui précèdent ont pour but de faire • Le 115 à Strasbourg Patrick KIENTZ, directeur tél : 03 88 34 93 17 – mél : [email protected] mieux prendre conscience d’un des grands problèmes sociaux de notre pays, d’en proposer une grille d’analyse et de suggérer quelques • CSP (Centre social protestant) Jacqueline Schaditzki, conseillère sociale – 16 rue de l’ail – 67000 Strasbourg tél : 03 88 23 33 86 – mél : [email protected] • AAHJ (Association d’accueil et d’hébergement des jeunes) Thierry Houdart, directeur – 2a rue de Koenigshoffen – 67000 Strasbourg tél : 03 88 75 80 05 – mél : [email protected] actions pour y remédier. Plusieurs pistes s’ouvrent alors aux lecteurs de ces lignes : – Lire, prendre conscience et réagir. La CASPE reçoit tout commentaire en ce sens. – Lire, réagir et faire partager les soucis exprimés. Des groupes de réflexion ou des soirées thématiques peuvent être organisés à cet effet. Des membres de la commission sont prêts à participer à ces initiatives, comme d’autres personnes ou organismes compétents présentés en annexe. – Agir en s’inspirant des exemples présentés. – Dans cette optique, si le financement de tels projets nécessitait une aide particulière, l’Union d’Entraide et de Solidarité examinera les demandes, de même que le Chapitre de Saint-Thomas s’il devait s’agir de se porter caution. Ces demandes peuvent être adressées à ces deux organismes soit avant fin novembre 2006, soit avant fin février 2007. 14 • CASAS (Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg) Pascale Adam – 13 rue Saint-Nicolas – 67000 Strasbourg tél : 03 88 25 13 03 – mél : [email protected] • Le Home protestant Christian Krieger, président – 2 rue du bouclier – 67000 Strasbourg tél : 03 88 75 77 85 – mél : [email protected] • Chapitre de Saint-Thomas Raymond Glock, directeur – 1 quai Saint-Thomas – 67081 Strasbourg cedex tél : 03 88 25 90 20 – mél : [email protected] • Fondation Abbé Pierre Logement Défavorisés Délégation Générale – 3 rue de Romainville – 75019 Paris tél : 01 55 56 37 00 • Armée du Salut 12 rue des Cordonniers – 67000 Strasbourg tél : 03 88 32 54 58 • Les Amis des hébergés de l'Arc-en-Ciel Gérard SCHLOTTER – 5 rue du Chevreuil – 67240 Bischwiller tél : 03 88 63 10 17 – mél : [email protected] • Paroisse Saint-Matthieu, Strasbourg 97 boulevard d’Anvers – 67000 Strasbourg tél : 03 88 61 05 44 – mél : [email protected] • Paroisse réformée, Sarrebourg Jacques Bunder, pasteur – 12 avenue Joffre – 57400 Sarrebourg tél 03 87 03 12 11 • Paroisse Illberg-Coteaux, Mulhouse Alain Spielewoy, pasteur – 25 rue George Sand – 68200 Mulhouse tél : 03 89 60 40 04 – mél : [email protected] • Paroisse Saint-Paul, Mulhouse Philippe Aubert, pasteur – 18 rue Hubner – 68200 Mulhouse tél : 03 89 42 06 65 – mél : [email protected]