Le rouge est mis - Accueil SPAEN-La Hague

Transcription

Le rouge est mis - Accueil SPAEN-La Hague
LH, le 09/01/2013
Labo-Contrôle
de Marche:2
Le rouge est mis
Il y a un phénomène qui tient
probablement à la faculté
d'adaptation de l'Homme à son
milieu, c'est celui qui consiste à
atténuer, puis finalement ignorer
ce avec quoi on vit tous les jours.
C'est un des grands dangers
de l'industrie nucléaire, qui fait
qu'on finit par ne plus s'émouvoir de situations ou de circonstances qui font dresser les cheveux sur la tête de la première
personne extérieure qui l'apprend.
La quotidienneté du danger le banalise. Mais elle ne
l'élimine pas !
Les analystes des laboratoires travaillent en Zone 3
(zone 800, couleur jaune) en permanence.
C'est leur lieu de travail. Les boîtes à gants (en plexi, où on manipule manuellement les contenants des prélèvements à analyser, et les
produits chimiques, contaminants, irradiants ou non nécessaires aux
analyses), ou les chaînes blindées (où on fait la même chose avec
des pinces au bout d'une tige traversant la paroi blindée, en regardant
par une vitre au plomb plus ou moins épaisse en fonction des produits traités et de leur activité.) sont situées en Zone 3. L'intérieur
des ces chaînes blindées et boîtes à gant est donc de la Zone 4 (900,
rouge). Les analystes n'en sont séparés que par les sas d'introduction
de matériel ou d'échantillons qui doivent être en dépression.
Même le bureau de chef de quart, qui s'apparente par la fonction à
la salle de contrôle des autres ateliers, est situé en Zone 3.
C'est de là qu'il valide les demandes de prélèvements provenant des
ateliers, et dans l'autre sens, qu'il contrôle et valide les résultats des
analyses entrés dans le réseau informatique par les analystes qui les
ont effectuées, pour que ces résultats apparaissent sur l'écran de l'atelier demandeur.
Mais c'est également de là qu'il surveille l'arrivée et le départ des cruchons, et qu'il pilote éventuellement en manuel le réseau de transferts pneumatiques internes du labo quand il y a un problème.
Là aussi que se prennent les consignes en début de poste, là que se font les réunions de management visuel,
là que sont situés les postes réseau qui permettent de consulter sa messagerie...
Bref, c'est là, en Zone 3, que les analystes passent 90% de leur poste, ce qui les oblige, pour satisfaire à un besoin naturel ou aller prendre leur pause-repas, se rendre à un RDV médical ou avec la hiérarchie, de circuler
plusieurs minutes entre deux sas de contrôle SPR, déposer leur masque dans un râtelier situé à l'extérieur de la
zone après avoir débadgé leur Dosicard. Et enfin déboucher à l'air libre. Et refaire le même circuit à l'envers
pour retourner au poste de travail.
La dégradation des conditions de travail n'est pas nouvelle,
mais elle a tendance à empirer ces derniers mois.
Il y a déjà belle-lurette que c'est la croix et la bannière pour faire nettoyer les vitres blindées de boites à pinces, ou d'en faire remplacer l'éclairage intérieur, quand ce n'est pas l'éclairage des salles elles-mêmes.
Mais en plus de se crever les yeux à travers des vitres quasi opacifiées, les salarié(e)s doivent manipuler
avec des pinces dont les mécanismes datent de la construction de l'usine. Elles se bloquent, se grippent, et provoquent à la longue des TMS* dont les agents n'osent même pas parler, pour ne pas être arrêté et ne pas bloquer les congés des collègues, ou risquer de devoir changer de poste pour raisons médicales !
Le rouge est mis, 1957, Gilles Grangier, Michel Audiard
2.57.95
*Troubles Musculo-Squelettiques
Retrouvez l'USA/SPAE sur internet :
http://spaen.lahague.free.fr
2.75.93
Le matériel vieillit, mais le Labo ne s'arrête jamais !
On ne peut donc pas faire de campagne de maintenance ou de remplacement du matériel obsolète
ou défectueux, alors on travaille avec, et on soufre avec pendant des mois,
en priant chaque jour qu'il finisse par casser, pour enfin être remplacé !
Du coup, en cas de dysfonctionnement,
on s'adapte.
Venez essayer de manipuler un cruchon de
quelques grammes que vous discernez à peine,
contenant les précieux millilitres nécessaires à
l'analyse (toujours urgente !), avec des pinces
qui ne serrent pas, et qui se bloquent
dans toutes les directions!
Il faut des tonnes de patience, d'expérience
et de souffrance physique au quotidien pour ne
simplement pas le laisser tomber
ou le renverser !
Un sas d'introduction de chaîne est contaminé
régulièrement ?
"Personne ne trouve d'où ça vient", alors on décide de ne plus s'en servir...qu'une fois par jour !
Evidemment, c'est moins dangereux une
seule fois au lieu de trois. Tant pis pour celui
sur qui ça tombe, qui doit entrer les réactifsétalons dans la chaîne"
Il fera peut-être partie de ceux qui sont en- Ne parlons pas de la qualité des gants ou prégants,
voyés pour contrôle au médical, avec inter- qui se déchiraient une fois sur deux quand on les
diction de zone, et 15 jours de" sac de enfilait, ou qui, taille unique et ambidextres, devaient convenir à la petite collègue menue comme à
sport" à la sortie"
la grosse brute aux pattes de terrassier !
Voilà qui arrangera toute l'équipe, privée en Trois ans d'attente pour venir au bout des stocks,
plus d'un collègue dans l'effectif...
et avoir enfin des gants de différentes tailles….
On ne doit pas arrêter ! Alors, on se débrouille, car il faut que ça marche.
Devant l'impossibilité de faire dépanner des matériels indispensables assez vite pour satisfaire l'insatiable appétit de résultats des ateliers de production qui peuvent tout exiger, les salariés du labo s'improvisent mécaniciens ou hydrauliciens, démontent, remontent, réparent, et y passent des postes de nuit… alors
que dans le reste de l'usine, quand on est en panne, on fait une DP, et on attend la maintenance !
Quand des analystes se plaignent du mauvais fonctionnement évident d'une pince, il faut parfois des
délais incroyables, et au final, il arrive même que l'intervenant tant attendu "estime" qu'elle marche assez
bien comme ça ! Le Mode Dégradé devient le quotidien, la réparation n'intervient qu'en cas de blocage...
Normal ? On voit ça, ailleurs dans l'usine ?
Pourtant, une chaîne avec une pince manquante ou défectueuse est quasiment inutilisable...
Quelle pression est-elle mise sur la hiérarchie du labo, pour qu'il fonctionne en autonomie, sans
moyens ? Où, à la Hague, accepterait-on de travailler dans des conditions comme ça ?
Et pour partir en fin de poste?
On sort d'une zone 3, donc il faut se contrôler
au premier sas sortie.
Mais la moitié du temps, un CMP sur deux est
en panne, et le CV28, qui seul permet un contrôle
complet sérieux quand on quitte une zone active
porte un vieux tarlatane avec la mention "HS: DP
faite le…" avec une date qu'on a peine à lire tant
elle … date !
Et aujourd'hui, pas de chance, tous les
contrôleurs affichent "Défaut" !
Alors tant pis, on se contrôlera à la sortie de la
zone 2. On enfile les quelques dizaines de mètres de
couloir (comment faire autrement, il n'y a pas d'autre
sas ?), on ouvre 3 portes avec des mains potentiellement contaminées (puisque pas contrôlées), et on arrive dans le sas sortie zone 2.
Et là, bien sûr, tous les contrôleurs affichent
"Défaut".
Normal, R1 cisaille. C'est le radon, ou le krypton* !
Alors, on appelle le SPR, qui enverra un agent
passer un contrôleur en mode dégradé (tiens, ça
aussi?)... Et, encore une fois, on attrapera le bus si
on peut ! . (Merci SSV!).
*ou toute autre bonne raison...
En attendant, rappelons que les analystes travaillent en Zone 3 100% du temps, et que les portes inter-zones servent en principe à assurer le confinement qui nous protègent de la contamination… quand elles sont fermées !
UNSA/SPAEN :
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