Henri de La Tour d`Auvergne - Pagesperso
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Henri de La Tour d`Auvergne - Pagesperso
CORRESPONDANCE INTIME DE HENRI DE LA TOUR D’AUVERGNE DUC DE BOUILLON (1555 - 1623) Présentée et annotée par Jean Luc TULOT -=- Dans sa récente mise au point sur le parti protestant au XVIe siècle Hugues Daussy souligne combien Henri de La Tour d’Auvergne, vicomte de Turenne puis duc de Bouillon, comme les deux autres grands du parti protestant : le duc Claude de La Trémoille et le prince Henri Ier de BourbonCondé, a peu attiré l’attention des chercheurs1. Il faut l’avouer le portrait que nous disposons de Henri de La Tour d’Auvergne est très orienté. Il a, certes, laissé des Mémoires, rédigées à l’âge de 54 ans et six mois à l’attention de son fils aîné, Frédéric-Maurice, publiées pour la première fois en 16662. Mais ces Mémoires couvrent seulement les années 1565 à 1586 et par leur contenu orientent le lecteur vers l’image que la duc de Bouillon a entendu donner de lui. Pour les années allant de 1587 à 1623, Henri de La Tour d’Auvergne est surtout connu par les portraits qu’ont dressé de lui ses adversaires politiques : Sully, Rohan, Richelieu,… ou des personnes : du Maurier, de Thou,… qui l’avaient côtoyé. Ces descriptions ont été synthétisées par son premier biographe, l’abbé Marsollier, qui a fait de Henri de La Tour d’Auvergne un personnage machiavélique par excellence3. Ce portrait a été repris par les frères Haag dans l’article qu’ils lui ont consacré dans La France protestante4, ainsi que par les autres auteurs, attachés surtout, à l’exemple de Sully5 et de Saint-Simon6, à faire de Henri de La Tour d’Auvergne le prince des ingrats face à l’image sublimée du bon roi Henri ! En 1875, Paul Marchegay a commencé à lever le voile sur la vie intime de Henri de La Tour d’Auvergne en publiant les neufs lettres qu’il adressa entre 1595 et 1597 à sa jeune belle-sœur, Charlotte-Brabantine de Nassau, conservées dans le chartrier des La Trémoille7. L’année suivante Auguste Laugel a poursuivi cette tentative en publiant quelques extraits de ses lettres à son épouse écrites en 1602 et 1603, conservées aux Archives nationales de France dans la série R2 538. Plus de cent ans vont s’écouler avant qu’un nouveau pas soit fait dans la connaissance d’Henri de La Tour d’Auvergne. En 1982, Henri Zuber, dans le cadre d’une thèse de l’Ecole nationale des Chartes, sortant de ces sentiers battus, a entrepris une réévaluation de ce personnage historique sur les plans militaires et diplomatiques à partir d’un corpus de 940 lettres recensées dans des sources manuscrites et imprimées françaises, mais aussi anglaises, hollandaises et allemandes9, ignorant 1 Hugues DAUSSY, “ Protestants et politique au XVIe siècle : état de la recherche et perspectives ”, B.S.H.P.F., Tome 150, janvier-mars 2004, p. 15-32, p. 23. 2 Ces Mémoires ont été plusieurs fois rééditées. Pour notre part nous avons utilisé l’édition de Baguenault de Puchesse de la librairie de la Société de l’Histoire de France publiée en 1901. 3 J. MARSOLLIER, Histoire de Henry de La Tour d’Auvergne, duc de Bouillon, Paris, 1719. 4 Frères HAAG, La France protestante, Slatkine reprints, Genève, 1966, 10 vol, tome VI, p. 384-406. 5 SULLY, Mémoire des sages et royales oeconomies d’Estat…, Ed. Michaud et Poujoulat, Nouvelles collections des Mémoires relatifs à l’Histoire de France, Didier et Cie, Paris, tome XVI et XVII, 1857. 6 SAINT-SIMON, Mémoires, Éd. Y. Coirault, La Pléïade, 1983-1988, 8 vol, tome II, p. 827-851. 7 Paul MARCHEGAY, Lettres d’Elisabeth de Nassau, duchesse de Bouillon à sa sœur Charlotte-Brabantine de Nassau, duchesse de La Trémoille de 1595 à 1628, Les Roches-Baritaud, 1875, 137 p. Les neuf lettres sont datées des 10 juin 1595, 16 octobre 1595, 23 décembre 1595, 23 février 1596, 28 mai 1596, janvier 1596, 10 mars 1597, fin mars 1597 et 20 juillet 1597. 8 Auguste LAUGEL, “ Le duc de Bouillon d’après des documents inédits ”, Revue des Deux-Mondes, XLVIe année, troisième période, tome XVIII, 1876-6, p. 897-920. 9 Henri ZUBER, Recherches sur l’activité politique de Henri de La Tour, vicomte de Turenne, puis duc de Bouillon (15731623), Thèse de l’école nationale des Chartes, 2 vol, 1982. toutefois les lettres du duc de Bouillon conservées dans le Fonds La Trémoille, non publiées par Paul Marchegay. En 1985, Frank Delteil, secrétaire général honoraire de la Société d’Histoire du Protestantisme Français, a la suite de la parution de cette thèse, dont il avait été l’inspirateur, a entrepris de dresser un bilan sur le point des connaissances sur Henri de La Tour d’Auvergne, mais son décès a interrompu cet examen à l’année 159010. Tous ces ouvrages ont toutefois le point commun de se concentrer uniquement sur la personnalité publique d’Henri de La Tour d’Auvergne et d’occulter totalement l’homme privé. Rompant avec cette attitude, dans le fil de ma transcription des lettres de Charlotte-Brabantine de Nassau à son époux Claude de La Trémoille et à son fils Henri, j’ai voulu savoir quelles étaient les relations de Henri de La Tour d’Auvergne avec celle-ci. Et du 30 janvier au 23 avril 2000, j’ai effectué la transcription de ses 140 lettres conservées aux Archives nationales de France dans le Fonds La Trémoille à la côte 1 AP 43411. La transcription, étendue sur les années 1999, 2000 et 2001, des quelques 400 lettres adressées par Elisabeth de Nassau à sa sœur Charlotte-Brabantine de Nassau, m’a incité à rechercher les lettres de celles-ci adressées à son époux12 et des lettres de celui-ci à celle-ci. Pendant le premier trimestre 2002, j’ai complété mon recueil des lettres intimes de Henri de La Tour d’Auvergne en y joignant les sept lettres à son épouse, adressées à celle-ci dans les années 1594, 1595 et 1596, conservées aux Archives nationales de France dans le Fonds Rohan-Bouillon à la côte 273 AP 180. Poursuivant ce travail, du 24 avril au 22 mai 2004, j’ai ajouté la vingtaine de ses lettres conservées dans la série R2 53 des Archives nationales13. Auguste Laugel en 1876 avait publié dans la Revue des deux Mondes quelques passages des lettres de cette série écrites en 1602 et 1603. Selon l’inventaire donné par Henri Zuber, il ne me resterait à me procurer et à transcrire qu’une lettre de Henri de La Tour d’Auvergne à son épouse en date du 23 juillet 1616, conservée à la Bibliothèque nationale dans le fichier Charavay. Pour compléter les blancs existant dans cette correspondance, j’ai ajouté des copies de lettres de Henri de La Tour d’Auvergne conservées dans un registres de correspondance de Henri de La Trémoille et quelques unes de ses lettres conservées dans des Fonds d’Archives aux Pays-Bas, en Allemagne ou dans le Journal de Pierre de L’Estoile ou dans les Mémoires du maréchal de La Force. Notons pas ailleurs que dans leurs lettres Elisabeth de Nassau et Henri de La Trémoille mentionnent l’envoi à Charlotte-Brabantine de Nassau de copies de lettres adressées par le duc de Bouillon, au Roi, forme de communication indirecte dont la pratique mérite d’être soulignée. L’un des apports les plus intéressant apporté par cette ensemble de lettres est celui de nous renseigner sur l’état de santé de Henri de La Tour d’Auvergne pendant les dernières années de sa vie. Les historiens lors qu’ils décochent des flèches contre le duc de Bouillon touchant son peu de d’empressement à rejoindre Henri de Rohan et les Rochellais en 1621 et 1622 semblent n’avoir jamais réalisé qu’il n’était plus le fringant cavalier compagnon d’armes d’Henri de Navarre, mais un vieux Monsieur âgé de 66 ans qui depuis 1616 était perclus de gouttes et qu’il fallait porter sur une chaise. De ce fait le 28 novembre 2004, j’ai joint à cette édition les lettres que ses enfants Frédéric, Elisabeth, Henriette et Charlotte écrivirent à leur mère alors à Turenne où tous quatre donnaient des nouvelles de la santé de leur père pendant les années 1617, 1619 et 1620. 10 Frank DELTEIL, “ Henri de La Tour, duc de Bouillon, recherche récente et compléments ”, B.S.H.P.F., Tome 132, janvier-mars 1986, p. 79-98. 11 Sur ces 140 lettres la majorité est écrite à la IIe duchesse de La Trémoille Charlotte-Brabantine de Nassau. Trois sont adressées à la Ière duchesse de La Trémoille, Jeanne de Montmorency, huit au duc Claude de La Trémoille et une douzaine à son neveu Henri de La Trémoille. 12 Deux lettres d’Elisabeth de Nassau à son époux datées des 24 novembre 1608 et 13 décembre 1617 sont conservées à la côte 273 AP 179 dans le Fonds Rohan-Bouillon et une lettre en date du 9 mars 1612 à la côte 1 AP 334/150 dans le Fonds La Trémoille. L’on remarquera qu’elle écrit à son époux sur le même ton qu’elle écrit à sa sœur. 13 Les lettres de Henri de La Tour d’Auvergne à son épouse sont datées des 11 août 1595, 13 janvier 1599 (illisible), 27 août 1599, 4, 19 et 23 décembre 1602, 5, 8 janvier, 15 février, 15, 27 mars, 4, 29 avril, 15 mai, 8, 20 août, 3, 10 septembre, 3 octobre, 4, 8, 18, 22 décembre 1606, 25 avril 1614 et d’un mardi matin de cette année 1614. 2 Cette correspondance intime de Henri de La Tour d’Auvergne fait découvrir la profondeur de ses sentiments envers son épouse, ses enfants et aussi l’amitié qui l’unissait à son cousin Claude de La Trémoille, les liens d’affections et de confiance qu’il avait avec sa jeune belle-sœur, CharlotteBrabantine de Nassau, et le rôle qu’il joua dans la formation de ses neveux Henri et Frédéric de La Trémoille. Ces lettres permettent également de découvrir la profondeur de sa foi et que le personnage réel était bien loin de l’abstraction composée par les historiens depuis quatre siècles. * Je remercie particulièrement pour leur collaboration le pasteur Denis Vatinel, la Société d’Histoire du Protestantisme Français, les Archives nationales de France, la Bibliothèque nationale de France, le Dienst Van Het Koninklijk Huis de La Haye, les Bayerisches Hauptstaatsarchiv de Munich et le personnel de la Bibliothèque municipale de Saint-Brieuc. Ce travail, en dépit de sa forme rédigée, n’est qu’une ébauche évolutive en fonction des nouveaux documents que je peux découvrir sur Henri de La Tour d’Auvergne. Je saurais gré à ses éventuels lecteurs d’excuser toutes les imperfections qu’il comporte et les remercie par avances pour l’aide qu’ils pourraient m’apporter pour l’améliorer. HENRI DE LA TOUR D’AUVERGNE (1555 - 1623) Henri de La Tour d’Auvergne, IVe duc de Bouillon, prince souverain de Sedan et de Raucourt, vicomte de Turenne, de Castillon, de Lanquais, d’Olliergues, de Limeuil, de Fay, dé Sévissac, de Saint-Bonnet, de Novatelles, du Croc et Ferrières, premier maréchal de France, fut avec d’Epernon et Joyeuse des quelques chanceux qui purent bâtir la fortune de leurs maisons lors de la loterie que fut que les guerres de religion14. Selon son premier biographe, l’abbé Marsollier, il fut : “ un des plus grands capitaines et des plus habiles politiques de son temps ”. Un membre du lignage des Montmorency Henri de La Tour, né le 28 septembre 1555, au château de Joze près de Clermont, était le fils de François de La Tour, IIIe du nom, vicomte de Turenne et d’Eléonore de Montmorency. Par son père, il était apparenté à la reine Catherine de Médicis et par sa mère il était le petit-fils du connétable de Montmorency. Henri de La Tour d’Auvergne, perdit sa mère à l’âge de deux ans et son père à l’âge de 4 ans et fut élevé par son grand-père le connétable de Montmorency. Dans ses Mémoires, il compte ses débuts à la Cour à l’âge de 10 ans15. A l’âge de 14 ans, Henri de La Tour s’attacha à François de Valois, duc d’Alençon et resta à ses cotés pendant six ans. Un Protestant politique Henri de La Tour d’Auvergne se convertit pendant l’été 1575. Conversion politique pour beaucoup, pourtant à la différence de nombre de ses contemporains, il resta protestant et mourut en cette religion. Le vicomte de Turenne devint un des principaux lieutenants du roi de Navarre, ce qui ne l’empêcha pas de participer en 1581 à la malheureuse expédition de François de Valois aux Pays-Bas où il fut fait prisonnier et gardé en captivité pendant 2 ans et 10 mois. Enfin libéré, il rejoignit le 4 août 1584 le roi de Navarre, qui le fit premier gentilhomme de sa chambre et chef de son conseil privé. 14 “ Turenne, for rank, ability and wealth was, perhaps, the Protestants most obvious leader, and he was skillful and ruthless in promoting his own interests ”, N. M. SUTHERLAND, The Huguenot struggle for recognition, Yale University Press, 1980, p. 287. 15 Henri de LA TOUR, Mémoires, op. cit., p. 5. 3 Pendant les années 1585 à 1587, Henri de La Tour d’Auvergne fit office de lieutenant-général en Guyenne pour Henri de Navarre. Il combattit à Coutras où son rôle fut modeste, son corps de cavalerie ayant été enfoncé par Lavardin. Après la bataille, il conduisit aux royalistes les corps de Joyeuse et de son frère, ses parents. Sully dans ses Mémoires accuse Henri de La Tour d’Auvergne, au lendemain de Coutras, d’avoir avec son cousin Claude de La Trémoille fomenté les jalousies de Henri de Bourbon-Condé contre le roi de Navarre et de l’avoir sollicité pour se rendre chef absolu dans les provinces d’Anjou, Poitou, Aunis, Saintonge et Angoumois16, oubliant que le vicomte de Turenne n’était par un familier du prince de Condé et avait été jusqu’alors peu en relation avec son cousin le duc de Thouars. En 1588 et 1589, Henri de La Tour d’Auvergne était en Languedoc et n’eut guère d’occasion d’être en relation avec lui. “ Un protégé ” d’Henri IV Souffrant des séquelles d’une blessure, le vicomte de Turenne n’était pas aux cotés de Henri de Navarre lorsque celui-ci succéda à Henri III après son assassinat par Jacques Clément. Il ne fut pas non plus à Arques (15-25 septembre 1589), ni à Ivry (14 mars 1590). Le bruit de sa mort courut même. Il se remit toutefois et put rejoindre en litière le 30 août 1590 le Béarnais sous les murs de Paris. Celui-ci l’accueillit avec d’autant plus de joie qu’il lui emmenait un millier de cavaliers et 4 000 fantassins. Considérant qu’il fallait mieux avoir le vicomte de Turenne parmi ses amis, que le compter parmi ses adversaires, Henri IV favorisa sa carrière pour mieux le contrôler et le tenir loin de ses possessions du Limousin et de son cousin Claude de La Trémoille. Il lui confia en 1590-1591 une mission diplomatique auprès du duc de Saxe, du Landgrave de Hesse et de l’Electeur palatin pour rassembler une armée. Au retour, il lui fit épouser le 19 novembre 1591 Charlotte de La Marck, fille de Henri-Robert de La Marck (1529-1574), IIe duc de Bouillon et de Françoise de BourbonMontpensier, héritière de son frère Guillaume-Robert de La Marck (1562-1588), IIIe duc de Bouillon. Poursuivant ses faveurs, en 1592, Henri IV lui conféra la dignité de maréchal de France. L’union de Henri de La Tour d’Auvergne et de Charlotte de La Marck fut brève. Elle décéda le 15 mai 1594, à l’âge de 19 ans, après avoir donné le jour le 8 mai à un fils mort né. Par testament du 10 avril 1594, elle légua à son époux ses terres souveraines : le duché de Bouillon et la principauté de Sedan17. Le comte de Maulévrier, Charles-Robert de La Marck, oncle de Charlotte de La Marck et le duc de Montpensier contestèrent ce testament et Henri de La Tour d’Auvergne dut solliciter l’appuis de Henri IV pour en obtenir l’application. Lors de son séjour à la Cour Henri de La Tour d’Auvergne y rencontra la princesse d’Orange, Louise de Coligny qui y était venue avec ses deux belles-filles, Elisabeth et Charlotte-Brabantine de Nassau, pour y régler ses affaires. Henri de La Tour d’Auvergne qui désirait passionnément pouvoir fonder sa maison sollicita la main d’Elisabeth. Sa dote était modeste, mais par ce mariage, il s’alliait à une maison souveraine alliée avec toutes les cours princières d’Allemagne. Louise de Coligny saisit tout l’intérêt politique de cette proposition, le 10 septembre 1594, elle écrivait à Maurice de Nassau que Monsieur de Bouillon : “ … m’a fait entendre le désir qu’il a de prendre alliance avec vous, épousant votre sœur Isabelle. C’est une alliance que je l’ai assuré que de votre côté vous auriez extrêmement agréable et que vous en sentiriez fort honoré, comme à la vérité c’est le seigneur de France le plus estimé et le plus digne et accompagné de si grands mérites que ses amis et ses ennemis même publient ses louanges. Il m’a priée d’en sonder votre volonté devant que lui même vous en écrive. Je vous supplie donc me le faire entendre, afin que si vous trouvez bon cette recherche, il vous fasse lui-même savoir combien il le désire, et vous supplie de tenir ceci fort secret, d’autant que si le mariage a chance de se faire, le moins que l’on en pût ouïr parler est le meilleur, d’autant qu’il se 16 SULLY, Mémoire des sages et royales oeconomies d’Estat…, op. cit., tome XVI, p. 64, colonne 2. 17 Le testament de Charlotte de La Marck est conservé dans la Fonds Rohan-Bouillon aux Archives nationales à la côte 273 AP 176. Il a été publié par Pierre CONGAR, “ Le Testament de Charlotte de La Marck ”, Annales Sedannaises d’Histoire et d’Archéologie, N° 58, septembre 1968, p. 7-14. 4 trouveroit des personnes qui ne demanderoient pas mieux que de le traverser pour empêcher toujours l’union des gens de bien, et je vous supplie donc de m’envoyer incontinent un laquais pour en savoir votre intention ”18. Le 4 octobre 1594, elle ajoutait : “ Monsieur mon fils, Monsieur de Bouillon dépêche exprès ce gentilhomme vers vous pour vous avertir de la recherche qu’il fait de vostre sœur Isabelle, vous supplier de l’avoir agréable, et que par son retour vous nous en envoyez votre consentement. Il n’est point de besoins de vous dire son mérite et le rang qu’il tient en ce royaume et combien votre sœur sera heureuse avec un tel seigneur, si c’est choses que vous ayez agréable. Je n’ai pas estimé en devoir écrire à Messieurs des Etats, puisque vous êtes sur les lieux pour leur en pouvoir communiquer ce qu’il me semble que vous devez faire. J’en écris seulement à Monsieur de Barnevelt, afin que par le retour de ce gentilhomme, j’en sache leur résolution avec la votre. Vous verrez par les lettres du Roy et celles de Monsieur de Montpensier comme c’est choses qu’ils désirent de moi et d’elle. Nous ne voulons consentir qu’à ce qui sera trouvé bon par vous et par Messieurs des Etats, mais nous nous assurons bien que vous ne pouvez sinon avoir agréable une telle alliance. Faites-nous-en donc bientôt savoir votre volonté, car il est besoin que le mariage s’achève promptement, et je le désire plus que personne parce que mon retour dépend de là ”19. Louise de Coligny, ayant réglé ses affaires, était revenue à La Haye où eut lieu la cérémonie de fiançailles. Au mois de février 1595, elle conduisit Elisabeth de Nassau à Sedan. Le mariage y fut célébré le 16 février 1595, outre Louise de Coligny, Elisabeth de Nassau était assistée de son cousin le comte Philippe de Nassau et de Louis de Chézelles, sieur du Perron, conseiller et chambellan du duc de Montpensier20. Henri IV continua à tenir Henri de La Tour d’Auvergne, devenu duc de Bouillon, loin de ses possessions du Limousin, en lui donnant un commandement en 1595 dans le Nord et l’Est de la France, puis en lui confiant une mission diplomatique en 1596 à Londres puis à La Haye21. Un des chefs du parti huguenot Le 24 janvier 1596, Mayenne s’était rallié, il ne restait plus qu’un seul chef ligueur en Bretagne : le duc de Mercoeur avec lequel des pourparlers de paix étaient entrepris, Henri de La Tour d’Auvergne avait perdu de son utilité pour Henri IV et celui-ci ne lui confia pas de fonctions en 1597. Ce répit était le bienvenu pour Henri de La Tour d’Auvergne parce qu’il lui permettait de rétablir l’ordre dans ses affaires domestiques et aussi de vivre avec sa jeune femme dont il était très amoureux et dont il désirait avoir un fils. Au printemps 1597, Henri de La Tour d’Auvergne emmena son épouse à Turenne où il n’était pas revenu depuis sept ans. C’est alors qu’ils apprirent qu’Amiens était tombé aux mains des Espagnols. A la grande satisfaction de son épouse22, le Roi ne lui ayant pas destiné d’emplois, Bouillon ne jugea pas utile de rejoindre l’armée qui avait entrepris le siège de cette place, refusant de ne s’y trouver qu’en qualité de volontaire. Au début de l’année, Henri de La Tour d’Auvergne avait été contacté par un envoyé de l’assemblée protestante “ d’Aurival ”, apparemment un pseudonyme sous lequel se cachait Agrippa d’Aubigné. Considérant qu’à l’assemblée protestante “ il y avoit d’étranges esprits, & qui iroient bien loins, s’ils n’étoient retenus par des personnes d’autorité ”23, il rejoignit le 26 juin 1597 à Châtellerault son cousin, Claude de La Trémoille et les partisans de celui-ci qui étaient engagés dans les 18 Paul MARCHEGAY et Léon MARLET, Correspondance de Louise de Coligny, princesse d’Orange (1555-1620), Slatkine reprints, Genève, 1970, p. 112-113. 19 Ibid., p. 114. 20 Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, Paris, 1708, 2 vol, tome II : Preuves, p. 796. 21 Henri ZUBER, “ La noblesse protestante (1584-1598). Histoire politique des rapports entre Henri IV et les grands réformés ”, in Avènement d’Henri IV quatrième centenaire, Colloque III – Pau-Nérac 1989, Henri IV le Roi et la reconstruction du royaume, Association Henri IV, J & D Editions, Pau, 1989, p. 81-82. 22 Lettre non datée de la fin du mois de mars 1597 d’Elisabeth de Nassau à sa sœur Charlotte-Brabantine. Archives nationales, 1 AP 333/13 23 J. MARSOLLIER, Histoire de Henry de La Tour d’Auvergne, duc de Bouillon, op. cit., Livre V, p. 220. 5 négociations préparatoires à l’Edit de Nantes. Cette venue provoqua une vive inquiétude parmi les représentants du Roi. Schomberg, l’un d’entre eux, supplia le 28 juillet 1597 Henri IV de “ tirer Bouillon et La Trémoille près de lui et promptement et à quelque prix que ce puisse estre, car la moindre longueur ou accroche fera un mouvement dans vostre estat ”24. La chute d’Amiens tira cette épine du pied du souverain en enlevant aux huguenots le moyen de pression que constituait la guerre avec l’Espagne. Pour sa part, Henri de La Tour d’Auvergne après que les articles constituant la base de l’Edit de Nantes eurent été arrêtés, retourna à la fin du mois d’août à Turenne pour retrouver son épouse dont il souhaitait passionnément avoir un fils. Bouillon revint au mois de janvier à Châtellerault. Considérant que les jeux étaient désormais faits, avec son cousin Claude de La Trémoille, il alla au devant du Roi le 28 février 1598 à Tours. La, ils le prièrent “ d’excuser le passé, & d’attendre d’eux pour l’avenir toute obéissance ”25. Ils retournèrent alors à Châtellerault où Claude de La Trémoille épousa Charlotte-Brabantine de Nassau. Les deux cousins rejoignirent ensuite Henri IV à Angers et étaient à ses cotés lors de la signature de l’Edit de Nantes. Dans sa lettre du 10 mai 1598, Villeroy note à ses collègues Bellièvre et Sillery que Monsieur de Bouillon “ s’est très bien remis auprès du Roy ”26. Un chef de famille Elisabeth de Nassau donna à Henri de La Tour d’Auvergne neuf enfants dont sept parvinrent à l’âge adulte. Louise, leur premier enfant, est née à Sedan au mois d’octobre 159627. Elisabeth de Nassau au printemps 1597 quitta Sedan pour s’établir à Turenne. A la suite des absences répétées de son époux, c’est seulement en 1601 qu’elle donna le jour à son second enfant, Marie née le 17 janvier à Turenne. A la fin du mois de février 1603 elle donna le jour à Turenne à un fils qui ne vécut pas. Au cours de l’été 1603, Elisabeth de Nassau quitta Turenne pour revenir à Sedan où elle donna le jour à six autres enfants : Julienne-Catherine (27 novembre 1604), Frédéric-Maurice (22 octobre 1605), Elisabeth-Charlotte (juillet 1607), Henriette-Catherine (février 1609), Henri (4 septembre 1611) et Charlotte probablement en 1613 à l’âge de 36 ans. Un mécontent professionnel Au lendemain de la signature l’Edit de Nantes, Henri de La Tour d’Auvergne participa à l’agitation nobiliaire. Sommé le 18 novembre 1602 par Henri IV de venir se présenter devant lui pour se justifier de son attitude dans la conspiration de Biron, après avoir protesté devant la chambre de l’Edit de Castres, il rejoignit au mois de janvier 1603 à Heidelberg son beau-frère l’électeur Palatin et ne revint à Sedan qu’au mois de novembre 1603. Après avoir éliminé Claude de La Trémoille affaiblie par la goutte par les pressions psychologiques auxquelles il le soumettait, Henri IV mit fin en 1605 et 1606 aux velléités d’indépendance de Henri de La Tour en marchant sur ses places de Turenne et de Sedan. Bouillon 24 Bibliothèque nationale, Mss. N. A. F. 7191, ff. 289-290. 25 Lettre de Villeroy du 7 mars 1598 à Bellièvre et Sillery in Mémoires de Messieurs de Bellièvre et de Sillery, contenant un journal concernant la Négotiation de la Paix traitée à Vervins l’an 1598, entre Henry IV, Roy de France & de Navarre, Philippes II, Roy d’Espagne & Charles-Emmanuel, Duc de Savoye, Paris, chez Charles de Sercy, 1676, 2 vol, tome I, p. 210. 26 Ibid., tome II, p. 125-126. 27 Louise, dite Lolo, mourut de la petite vérole et du pourpre ensemble à Paris le 6 décembre 1607. Louis CAPPEL, Sur la douloureuse et non jamais assez regrettée mort de… Mademoiselle Louise de La Tour, fille aînée de Monseigneur le duc de Buillon, décédée à Paris, le jeudi 6 décembre 1607 … complainte élégiaque en vers féminins, Sedan, 1608, in-4°, 7 p. et Pierre de L’ESTOILE, Mémoires et journal depuis la mort de Henri III (1589) jusqu’en 1611, Ed. Michaud et Poujoulat, Mémoires relatifs à l’Histoire de France, Nouvelle collection, Didier, Paris, tome XV, 1857, p. 443. Etienne Balluze qui fait une erreur dans l’année du décès de Louise, indiquant 1606 au lieu de 1607, précise qu’elle fut portée à Sedan pour y être enterrée au mois de décembre “ ensuivant ”. Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, Paris, 1708, 2 vol, tome I, p. 442. 6 comprit l’avertissement, ne rechercha pas l’épreuve de force, fit sa soumission et se montra désormais docile. Soutien de la duchesse de La Trémoille Les historiens du protestantisme ne connaissent en ce premier quart du XVIIe siècle qu’une figure protestante féminine d’importance : Catherine de Parthenay28, incarnation, avec ses fils Henri et Benjamin de Rohan, de la défense du protestantisme au besoin par le recours à la force. Mais il existait une autre grande figure féminine du protestantisme dans le grand ouest de la France : la duchesse de La Trémoille, Charlotte-Brabantine de Nassau. Princesse d’Orange, elle avait des conceptions politiques très différentes de la poitevine Catherine de Parthenay, elle considérait que les vrais ennemis des protestants étaient l’Empereur et le roi d’Espagne et non le roi de France et que les troubles religieux dans le royaume l’empêchaient d’intervenir contre eux. Sur le plan intérieur, elle menait une politique de terrain et veillait à ce que dans chacune de ses terres, qui s’étaient agrandies en 1606 de l’héritage de la Maison de la Laval, il y ait des lieux de cultes et des pasteurs, ce dont il faut l’avouer les Rohan soucieux avant tout de leur présence militaire en Poitou, ne prêtaient guère d’attention aux protestants résidant en Bretagne dans leur marquisat de Blain et leur duché de Rohan, se reposant sur les seigneurs locaux pour assurer le culte. Henri de La Tour d’Auvergne soutenait la position de sa belle-sœur. En 1611, peu satisfaite de la tournure des événements lors du synode national de Saumur, puis du synode provincial de Thouars, elle lui confia ses deux fils. L’année suivante, mécontente de l’influence qu’exerçait Henri de Rohan, sur La Sauzaye le gouverneur de Taillebourg, pourtant un ancien compagnon d’armes de son mari, Charlotte-Brabantine le démit de ses fonctions. “ …Madame de La Trimouille, qui alloit en Poitou et Saintonge, pour y régler quelques affaires domestiques, se rendit le 27 ou le 28 de ce mois [de novembre 1612] à Taillebourg, qui est une place forte sur la rivière de Charente, à trois lieues de Saint-Jean-d’Angély. Sur ce que la Reine lui avoit dit qu’un nommé La Sausaye y commandoit, et qu’il étoit de la faction de M. de Rohan contre le service de Sa Majesté, elle trouva moyen de le faire sortir du château avec ses soldats, et de s’y loger elle-même. Six heures après avoir fait ce coup, plusieurs gentilshommes de Saint-Jean d’Angély s’y rendirent sous prétexte de la visiter ; mais elle, qui craignit, qu’ils ne voulussent la débusquer de ce poste, comme cela pouvoit bien être, leur fit dire qu’elle étoit si fatiguée de son voyage, qu’elle ne se trouvoit pas en état de les recevoir. Cependant elle pourvut à la sûreté de la place, y mit une autre garnison, et se retira au bout de quelques jours. ”29 Henri de La Tour d’Auvergne soutint l’action de sa belle-sœur en s’opposant de plus en plus à Henri de Rohan et en l’accusant de faire de la ville de Saint-Jean-d’Angély, dont il était gouverneur, un camp retranché. Le testament de Henri de La Tour d’Auvergne Henri de La Tour d’Auvergne fit son testament à Sedan le 17 mai 1613 à Sedan. Dans ce document qui a été publié par Etienne Baluze30, il met en relief l’affection qu’il portait à son épouse et l’importance qu’elle avait pour lui : “ Je veux que ma chère & fort aymée femme jouisse sans rendre compte de tout le bien de mes enfans jusques à cinq ans après mon décèds & qu’elle ait leur tutèle & éducation, déclarant que je me repose entièrement sur sa prudence & très grande amitié que je sçay qu’elle porte à mesdits enfans. Je la fais aussi tutrice & exécutrice de mon testament, & lui laisse la liberté entière d’ordonner de mes funérailles & de récompenser mes serviteurs selon ce qu’elle le jugera raisonnable & qu’elle aura cogneu que j’auray estimé leurs services, selon la qualité d’un chascun, sur ce que j’auray laissé à mon fils aisné ”. 28 Nicole VRAY, Catherine de Parthenay, duchesse de Rohan, protestante insoumise (1554-1631), Perrin, 1998. 29 PONTCHARTRAIN, Mémoires, Ed. Michaud et Poujoulat, Nouvelle collection des mémoires relatifs à l’Histoire de France, tome XIX, Didier et Cie, Paris, 1857, p. 322. 30 Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, op. cit., tome II : Preuves, p. 799-800. 7 Dans un paragraphe suivant, il ajoute : “ Je prie ma femme de donner ses pleurs à l’asseurance que j’ay d’aller au ciel jouir d’une félicité éternele, penser à l’éducation de mes enfans avant toutes choses en la crainte de Dieu & en l’instruction de la vraye religion, dont nous faisons profession, & en laquelle nous voulons mourir, & en l’obéissance & fidélité du Roy, sans prendre autre maistre ny reconnoistre autre service contre celuy-là , & à nos chers enfans d’estre obéissans à ces choses & rendre à leur mère l’obéissance que Dieu leur commande & qu’ils luy doivent, pour l’avoir trouvée doüée de grâce & suffisance incomparable en l’amour qu’elle leur porte & au soin & peines qu’elle a prise à les eslever ”. L’on notera que dans son testament, il n’oublia pas les La Trémoille et précise que : “ Voulons & entendons que si nos dits enfans venoient à mourir sans enfans ; que tous & uns chascuns nos biens viennent à la ligne de La Trimoüille, nos cousins & qu’ils prennent nostre succession …. ”. Enfin, Henri de La Tour d’Auvergne prévit une dotation pour l’Eglise de Sedan : “ Nous donnons quatre mille escus pour estre mis à rente à l’académie de Sedan pour y entretenir un professeur en théologie, & aux pauvres deux mille escus pour y estre mis à rente, laquelle sera distribuée par l’advis & conseil des modérateurs & consistoire ”. A nouveau comploteur Pendant les premières années de la régence, Henri de La Tour d’Auvergne soutint Marie de Médicis, d’autant qu’elle avait écarté du pouvoir Sully son ennemi de toujours. En 1611, il vendit sa charge de premier gentilhomme de la chambre à son favori, Concini, moyennant une somme substantielles de 64 000 Ecus, en 1612 il fut chargé d’une ambassade en Angleterre. En 1614, toutefois la duc de Bouillon rompit avec la Cour et participa aux mouvements de contestation nobiliaire menés par le prince de Condé et devint alors la cible favorite des pamphlétaires de la reine31. Il tira un profit certain de ce bascule d’alliance et avec le produit des sommes qu’il reçut, il étendit son emprise dans le sud-ouest de la France en achetant en 1615 la vicomté de Castillon et en 1616 le comté de Nègrepelisse. Emprises qui par ailleurs lui permettaient de disputer à Sully et à son gendre, Henri II de Rohan, la direction du parti protestant. A ce propos, Arnaud d’Andilly dans son journal note que M. de Sully avoit marchandé la terre de Négrepelisse et que son acquisition par le duc de Bouillon “ causa de la brouillerie entre eux ”32. Les premières attaques de la maladie Dans sa lettre du 28 novembre 1612, à sa belle sœur Henri de La Tour d’Auvergne, mentionne qu’il venait d’avoir une petite attaque de goutte, “ mes j’espère que ce ne sera rien ”. Elisabeth de Nassau dans sa lettre du 13 novembre 1613 fait état d’une seconde crise sérieuse de son mari : “ …quy a esté contraint de garder le lict aujiurduy pour se resentir tousjours de ses goutes quy ne luy ont doné guère de relâche. Il craint bien qu’elles ne le quitent de lontemps ”33. En 1614 et 1615, Henri de La Tour d’Auvergne semble t-il souffrit épisodiquement de la goutte. Cette maladie tendit à devenir chronique à partir de 1616, dans sa lettre à sa sœur du 15 février de cette année la duchesse de Bouillon mentionne “ que ses goutes le travaillent ”34. Au mois de juin en plus de ses gouttes, il souffrait de la gravelle35. Cette état de santé est probablement une des raisons pour laquelle à la suite de l’arrestation le 1er septembre 1616 du prince de Condé, Henri de La Tour d’Auvergne au lieu de l’épreuve de force 31 Hélène DUCCINI, Faire voir, faire croire. L’opinion publique sous Louis XIII, Coll. Epoques, Champ Vallon, 2003, p. 315. 32 Cf. M. BOUCHITTÉ, Négociations, lettres et pièces relatives à la conférence de Loudun, Collection de documents inédits sur l’Histoire de France, Paris, 1862, p. 677. 33 Archives nationales, 1 AP 334/162. 34 Archives nationales, 1 AP 334/186. 35 Lettre d’Elisabeth de Nassau à sa sœur du 20 juin 1616. Archives nationales, 1 AP 334/189. 8 préféra se retirer à Soissons puis gagna Sedan. Redoutant probablement que Marie de Médicis réitère la manière dont avait procédé Henri IV en 1605, ses jambes ne le portant plus du fait de la goutte, il envoya au mois de novembre 1616 son épouse tenir Turenne36 pendant que lui restait à Sedan. Elisabeth de Nassau arriva avec sa fille Marie à Turenne à la fin de l’année. Le 20 janvier 1617, Frédéric, son fils aîné, lui écrivait : “ Monsieur mon père me fit hier estre son secrétaire ayant un peu la goute à la main, mais il se porte aujourdui bien, Dieu mercy. Il s’en est allé pourmenés dans son carrosse avec mon frère qui se porte bien et aussi toutes mes sœurs ”. Ce bon état de santé ne dura pas. Après la mort de Concini, ses gouttes l’obligeant à se faire encore porter, Henri de La Tour d’Auvergne dépêcha au début du mois de juin son fils aîné, Frédéric, à Paris pour aller assurer Louis XIII de sa fidélité37. Frédéric rejoignit ensuite sa mère à Turenne. Le 5 octobre 1617, le jeune prince de Sedan fut solennellement reçu à Martel, la principale ville de la vicomté de Turenne38. Elisabeth de Nassau à son retour à Sedan au mois de janvier 1618, constata les progrès de la maladie chez son mari. Dans sa lettre du 15 de ce mois à sa sœur, elle écrit qu son Monsieur “ à bien la goute à une main ” ce qui l’empêcha d’aller au prêche39. Dans la lettre suivante, elle ajoute qu’elle se fortifie de façon qu’il ne peut écrire et qu’il ne bouge presque point de la chambre à cause que “ le fret est fort grans ” et qu’il vient souvent en son cabinet. Dans sa lettre du 23 avril 1618, elle mentionne qu’il “ demeure tousjours bien foible de ses gouttes et ne peut bouger d’une chaise et s’y fait porter pour faire la Cène ”40. Dans sa lettre du 12 juin 1618, elle note une amélioration : il marche un peu41. Le mariage de Marie Henri de La Tour d’Auvergne maria au mois de février 1619 à Sedan sa fille aînée, Marie, à son cousin-germain le duc Henri de La Trémoille, mariage que sa femme et sa belle-sœur avaient convenu dès la naissance de celle-ci en 1601. La même année, il accepta la proposition que lui fit le marquis de Duras de marier son fils, Guy-Aldonce, à sa quatrième fille, Elisabeth42. Compte tenu de leur jeune âge, leur mariage ne fut célébré qu’en 1624. Pendant l’été 1619, Elisabeth de Nassau mena sa fille aînée, Marie, à son mari à Thouars, puis prit le chemin de Turenne avec son petit troupeau composé de ses filles Julienne et Elisabeth et de son plus jeune fils Henri. Son absence se prolongera pendant dix-huit mois. Frédéric, Henriette et Charlotte étaient restés avec leur père à Sedan. Par leurs lettres à leur mère, nous connaissons l’état de santé du duc de Bouillon. Le vieux Monsieur de Sedan 36 La Cour a cette occasion accusa la duchesse de Bouillon de tenter de susciter aux pays de La Marche, Bas Limousin et provinces voisines une assemblée des réformés pour les inciter à prendre les armes. Hélène DUCCINI, Faire voir, faire croire. L’opinion publique sous Louis XIII, op. cit., p. 297. 37 Lettre d’Elisabeth de Nassau à son neveu Henri de La Trémoille du 4 juin 1617. Archives nationales, 1 AP 334/198. 38 Abbé Lucien LACHIEZE-REY, “ Deux entrées solennelles à Martel au début du 17e siècle ”, Bulletin de la Société des Etudes du Lot, tome CII, juillet-septembre 1981, p. 248-252. 39 Archives nationales, 1 AP 334/208. 40 Archives nationales, 1 AP 334/217. 41 Archives nationales, 1 AP 334/219. 42 Dans sa lettre du 14 juin 1617 écrite de Castillon à sa soeur, Elisabeth de Nassau mentionne que le marquis de Duras “ m’a fort parlé pour son fils d’une de nos filles. Je l’ay veu il est fort gentil et promet beaucoup. Il est de sa religion et riche. Une maison fort [ancienne] et il est seul. Mon Monsieur me mande agréer la recerche ” (Archives nationales, 1 AP 334/199). Mention qui dans cette union future donne l’initiative au marquis de Duras plus qu’au duc de Bouillon. 9 Les contemporains d’Henri de La Tour d’Auvergne semblent n’avoir jamais réalisé qu’il avait vieilli. A Catherine de Médicis qui le pressait en 1619 de prendre son parti contre son fils Louis XIII, il fit répondre : “ qu’il estoit vieux & incommodé de sa personne, content de sa fortune, & assez bien à la Cour pour n’en avoir point de mauvais traitemens à appréhender, qu’il luy seroit mal aysé se priver du repos dans lequel il vivoit pour s’engager dans un nouveau party périlleux & pénible ”43. Les lettres que Frédéric-Maurice de La Tour et ses soeurs Henriette et Charlotte adressèrent à leur mère dans le second semestre de l’année 1619 alors qu’elle était à Turenne, font apparaître que son état de santé s’était considérablement dégradé. Henriette dans sa lettre du 1er septembre 1619 mentionne qu’il va dîner en salle appuyé sur deux gentilshommes, qu’il soupe dans sa chambre. Dans sa lettre du 30 novembre, Frédéric, faisait état de l’espérance de son père de faire le voyage du Limousin pour voir ses amis et serviteurs. L’état de santé duc de Bouillon se dégrada au mois de décembre. Le 23 décembre 1619, Frédéric écrit à sa mère : “ Je me resjouis bien fort d’entendre de bonnes nouvelles de vostre santé et vous pouvoir mander la continuation de celle de Monsieur mon père, lequel a veu le commandement que vous me faictes en vostre lettre de prendre un soing particulier que l’on ne luy serve point de viandes qui luy soyent mauvaises. Il vit d’un bien plus grand régime que quand vous partites. Il soupe fort peu et tousjours en sa chambre ”. Dans sa lettre, du 2 février 1620, Frédéric continue la description du régime draconien que poursuit son père : “ Monsieur mon père vit à cest heure d’un fort grand régime. Il mange des pruneaux en se mettant à table le soir, ne mange quairre que d’une viande et pour son dessert que du biscuit et point du tout de fruict, et prend de la poudre digestive ”. Le 25 mai 1620, Frédéric eut la joie d’annoncer le meilleur état de santé du duc de Bouillon : “ Vous pouvant mander avec grande joye la guérison de Monsieur mon père, s’estant pourmené tout ce matin en carosse, y ayant desjà trois jours qu’il sort ”. Dans sa lettre du 28 décembre 1620, Frédéric mentionne à sa tante la duchesse de La Trémoille que l’état des mains de son père ne lui a pas permis de lui écrire. Dans la dernière lettre qu’il écrivit le 13 janvier 1621 à sa mère avant son retour à Sedan, il essaie de rassurer celle-ci : “ Je vous puis asseurer que depuis que Monsieur mon père est tombé malade, il n’a pas encore si bien dormi que la nuict passée. Il ne luy reste, Dieu mercy, aucune douleur, mais seulement l’incommodité qui l’empesche d’escrire ”. En dépit de son régime, Henri de La Tour d’Auvergne ne put retrouver l’usage de sa main. “ Il n’écrit plus de sa main, c’est ce quy l’empaiche de vous rendre ce devoir ” écrit Elisabeth de Nassau dans sa lettre du 25 septembre 1621 à sa soeur44. Les années de guerre Henri de La Tour d’Auvergne de Sedan suivait avec inquiétude la conduite de l’assemblée protestante réunie à Loudun, la seconde guerre de la mère et du fils et enfin l’affaire de Béarn. Dans la dernière lettre qu’il écrivit de sa main à Charlotte-Brabantine de Nassau le 22 novembre 1620, il écrit : “ Dieu veuille préserver son Esglise du mal qu’il paroist estre concerté et deslibère contre elles. Maintenant que la Cour est à Paris, je pouré mieus an voir les actions, n’aïant eu nul avis tant qu’elle a esté eslongnée. La desclarassion vérifiée au parlement est fort expresse, j’ay veu le temps qu’en pareile cas on ut fet antandre ces raisons an obéissant et randus tous debvoirs de subjects, et cepandant on ce fut mis autens moins convenables de se garder contre une ressolution géénrale de ruiner l’Esglise de Dieu ”. Désormais c’est par le canal des lettres de son épouse à sa sœur qu’Henri de La Tour d’Auvergne livre son opinion à la duchesse de La Trémoille. Henri de La Tour d’Auvergne en 1605 et 1606 avait su éviter l’épreuve de force contre Henri IV en ouvrant à temps les portes de Turenne et de Sedan. De ce fait, il ne pouvait que désavouer la 43 Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, op. cit., tome I, p. 441. 44 Archives nationales, 1 AP 335/312. 10 décision des faucons de l’Assemblée de La Rochelle de s’engager dans la rebellion armée contre Louis XIII. Ceux-ci lui renvoyèrent la balle en cherchant à le compromettre en le nommant le 10 mai 1621 commandant d’un département s’étendant sur la Normandie, l’Ile-de-France, le Berry, l’Anjou, le Maine, le Perche, la Touraine et en lui confiant le commandement général des armées en quelque province qu’il se trouva45. Sachant qu’il ne pouvait plus se déplacer par ses propres moyens l’ont ne peut que saisir la dérision contenue dans cette désignation. L’on reste toutefois confondu devant le fait que les historiens modernes n’aient pas perçu la manipulation dont il était l’objet au travers des siècles, mais il est vrai qu’aucun d’entre eux n’a ouvert le couvercle de la marmite du Fonds La Trémoille. Henri de La Tour d’Auvergne suivant la ligne de conduite définie par sa belle-sœur, CharlotteBrabantine de Nassau, rechercha une solution négociée. Craignant que son neveu Henri de La Trémoille soit tenté de suivre Henri II de Rohan à l’automne 1621, il l’invita à le rejoindre à Sedan. Au cours de l’année 1622, avec son neveu, par des moyens parfois tortueux il rechercha une solution négociée. Ainsi le 1er juin 1622, il écrivait à Henri II de Rohan : “ Monsieur, Ce gentilhomme allant vers Monsieur de Lesdiguières, j’ay estimé le devoir faire passer vers vous sur le mesme subjet pour lequel je l’envoye vers luy, qui est pour vous convier à ne vous lasser point de poursuivre le repos de l’Estat et celuy de nos Eglizes, dans lequel repos il paroist beaucoup d’avantages pour tirer nos Eglizes de plusieurs dangers qui les menacent et à pouvoir donner au Roy une confiance d’obéissance en laquelle son authorité soit conservée et ses sujetz assurez en ses bonnes grâces. Ce gentilhomme vous dira mes méditations pour jouir et tost et seurement de ce bien commun et général à tout le Royaume. Je remettray donc à luy à vous en discourir ce que je me prometz qu’il fera seurement et suffisamment. Je vous suplie donc de le croire et vous assurer que je demeureray, Monsieur, Vostre plus humble serviteur. Henri de la Tour ”46. Pendant l’été 1622, Henri de La Tour d’Auvergne avec son neveu Henri de La Trémoille se livra à une opération de kriegspiel en invitant le comte Mansfeld à faire un mouvement de diversion sur la frontière avec son armée pour obtenir un relâchement de la pression de l’armée royale sur Montpellier47. Mais l’armée de Mansfeld et l’armée que le duc de Nevers avait levée pour la contenir transmirent une épidémie de dysenterie à Sedan et aux campagnes environnantes. Aussi le duc de Bouillon, loin de prendre les armes comme il s’était engagé auprès de Henri de Rohan, usa de tous ses talents diplomatiques pour faire entrer Mansfeld au service des Provinces-Unies et l’éloigner de Sedan48. Dans sa lettre du 24 août 1622, Elisabeth de Nassau relate l’événement à sa sœur avec un certain décalage qu’il convient de noter (Mansfeld au service du roi de France) : “ J’aurois bien à vous dire des chose, mon coeur, sy j’en avois le loisir, mais je vous fais ce mot fort à la hâte. Tout ce que je vous diray donc, c’est que l’armée du conte de Mansefelt s’en alla hier et qu’elle s’en va trouver Messieurs les Estas. Elle a esté plus de quinse jours aus environs d’ycy et de Mouson et nous a fait mille maux. Nous avons des vilages fort ruinés. Il y ont pillé et volé et tué. Il y a eu grand mutinerye quy a fort diminué l’armée, comme nous la pensions engagée au service du Roy, nous n’avons seu qu’il avoit pris la résolution de la mener au Païs-Bas, ce quy ne fera pas sans dificulté, car l’on les atent aus pasage et l’armée de Don Cordua quy a esté à Moy plus de huict jours, quy est seulement à trois lieues d’ycy, est partye ce matin pour leur empaicher leur dessain quy n’est pas petit. C’est un estrange stratagème du conte de Mansefelt d’estre venu en France pour s’en aller où il va … 45 Léonce ANQUEZ, Histoire des assemblées politiques des réformés de France (1573-1622), Slatkine reprints, Genève, 1970, p. 341-342. 46 Bibliothèque nationale, Fr. 4102, f° 62, copie. 47 Il est possible que le duc de Bouillon en mettant en place cette opération ait voulu réagir au sac le 11 juin 1622 de sa ville de Négrepelisse par l’armée royale en représaille du massacre, pendant l’hiver par les habitants de cette ville de la garnison royale qui y avait été placée. 48 Cf. la relation de cette opération manquée donnée par Georges SERR, Henri de Rohan. Son rôle dans le parti protestant. Tome II, 1617-1622, Société de l’Histoire “ du Protestantisme Français, Paris, 1975, p. 539-541. 11 Dieu mercy, mon Monsieur se porte assés bien et s’est promené toute ceste après-dîné en carosse et nous aussy, ce que je n’avois fait il y a trois semaine, car nous n’osions sortir. Il y avoit reistre de tous cotés”49. Le 13 septembre 1622, un mouvement de l’armée du duc de Nevers sur le territoire de la principauté de Sedan jeta l’alarme dans la ville : “ … mon Monsieur monta à cheval avec bonne compagnye. Monsieur vostre fils y estoit, et toute la noblesse quy est ycy et nostre fils et la garnison sortit, mais Dieu mercy, on ne leur donna pas ocasion de faire d’acte d’ostilité. Dieu say sy nous en estions en alarme et sy j’en jette bien des larmes, mais par sa bonté tout revient sain et sauf, et mon Monsieur se portant fort bien pour avoir fait une telle courvée que de monter à cheval, par un chaut, plus grand que je ne l’ay veu de…, de tout cest été. Depuis, il s’est un petit resenty de sa goute à la cheville du pied droit ”. C’est par cette dernière remarque touchante par sa tendresse qu’Elisabeth de Nassau clôt la relation de ce qui fut la dernière équipée guerrière de ce vieux soldat, dans sa lettre du 19 septembre 1622 à sa soeur50. C’est avec soulagement que Henri de La Tour d’Auvergne accueillit la nouvelle que la paix avait été signée le 18 octobre à Montpellier. Le 9 novembre 1622, il écrivait à Henri II de Rohan : “ Monsieur, J’ay esté bien joyeux d’aprendre la publication de la paix qu’il a pleu au Roy donner à son Royaume pour laquelle, comme vous savez outre mes vœux et mes souhaits, j’ay de bonne heure porté ce que j’ay deu et peu. Dieu veuille qu’elle soit longue et dure ainsy qu’un chacun l’espère et le désire. Ceux-là sont dignes de grandes louanges qui y ont contribués leurs bons offices et leurs conseilz d’une part et d’autre. Le public leur en a obligation et à vous particulièrement qui y avez utillement travaillé. J’envoye vers le Roy pour m’en conjouir ainsy que tous ses bons subjetz et serviteurs et j’ay donné charge au Sr. Le Comte de vous tesmoigner de ma part le gré qui vous en est deub et vous assurer de mon service à touttes les occasions, où je le vous pourray rendre avec autant d’affection que je suis, Monsieur, Vostre plus humble serviteur. Henri de la Tour ”51. Les derniers mois A la Cour courait le bruit que Louis XIII avait la volonté de s’emparer de Sedan. Henri de La Tour d’Auvergne le 10 février 1623 envoya son fils aîné, Frédéric, assurer le souverain de sa fidélité et lui porter des lettres de sa part et aussi pour nouer des contactes avec Richelieu l’homme montant. Dans ses lettres, Frédéric conte comment il fut chaperonné par le duc de Montmorency leur allié et présente les personnages qu’il rencontra. Le compte rendu qu’il fit de sa rencontre avec le cardinal de Richelieu dans sa lettre du 6 mars 1623 est lourd des problèmes qu’il rencontra avec celuici par la suite : “ J’ay veu M. le cardinal de Richelieu qui a grande autorité par la Royne mère, et luy dis que Monsieur mon père ne luy avoit point escrit en resjouissance de son cardinalat, parce qu’il avoit résolu de me faire faire ce voyage et que je l’en asseurerois, qu’il désirerois qu’il fust dans les affaires que ce seroit un bien pour le Royaume. Il ayme grandement a estre flatté ”. Au début du mois de mars l’état de santé de Henri de La Tour d’Auvergne se dégrada. Il mourut le 25 mars 1623 à Sedan à l' âge de 67 ans. Il revint à son épouse “ aussi ambitieuse et guère moins 52 habile que lui ” d’assurer l’avenir de leur maison. LES CORRESPONDANTS DE HENRI DE LA TOUR D’AUVERGNE 49 Archives nationales, 1 AP 335/356. 50 Archives nationales, 1 AP 335/359. 51 Bibliothèque nationale, Fr. 4102, f° 68, copie. 52 SAINT-SIMON, Mémoires, Ed. Yves Coyrault, tome II, p. 839. 12 Jeanne de Montmorency, Ière duchesse de Thouars Jeanne de Montmorency, née en 1531, était la seconde fille du connétable de Montmorency et la tante de Henri de La Tour d’Auvergne53. Pour consolider son système d’alliance le connétable l’avait mariée en 1549 à Louis III de La Trémoille, vicomte de Thouars. Elle lui donna six enfants mais seuls vécurent les deux derniers : Charlotte-Catherine (1565) future princesse de Condé et Claude (1567) futur IIe duc de Thouars. Louis III de La Trémoille, devenu duc en 1563, et son épouse restèrent fidèles au catholicisme. Son mari étant mort le 25 mars 1577 de la goutte lors du siège de Melle, Jeanne de Montmorency, dans la mesure du possible, s’employa à préserver Thouars des belligérants des deux bords. C’est avec un certain déplaisir qu’elle vit ses deux enfants se convertir au protestantisme. L’accusation portée contre sa fille d’avoir empoissonné en 1588 son mari le prince de Condé fut pour elle une cruelle épreuve et elle s’employa par tous les moyens à la défendre. Elle mourut le 3 octobre 1596 à Sully-sur-Loire. Le duc Louis-Charles de La Trémoille a publié en 1895 sa correspondance54. Les trois lettres de Henri de La Tour d’Auvergne à sa tante Jeanne de Montmorency, conservées dans le Fonds La Trémoille, ne sont que des lettres de civilité fort banales. Il est possible que l’échec de son projet de mariage avec la jeune Charlotte de La Trémoille échafaudé en 1578 par Catherine de Médicis ait contribué à cet état de choses55. Claude de La Trémoille, IIe duc de Thouars Claude de La Trémoille, IIe duc de Thouars, prince de Talmont, comte de Guines, Taillebourg et Bénon, baron de Sully56, l’Ile-Bouchard, Berrie, Mauléon et Doué, seigneur de Mareuil, d' Onay, La Chaize-le-Vicomte et Sainte-Hermine, cousinant avec les plus illustres lignages du royaume et notamment avec les Bourbon-Montpensier et les Montmorency, était le plus puissant seigneur protestant du Poitou et de Saintonge, sinon du royaume après les Bourbon-Vendôme. Du fait de cette puissance territoriale, héritée de ses pères, il était moins manoeuvrable que ses condisciples dont la fortune dépendait de la grâce du souverain. Pour cette raison et probablement parce qu’il jugeait qu’il n’avait pas pour lui l’utilité politique de son cousin, Henri IV en dehors du commandement d’une compagnie, ne lui donna aucune fonction de commandement en chef. En 1595, il lui conféra la paierie, sachant que cette dignité lui causerait plus de désagréments que d’avantages par les dépenses qu’elle impliquait57. Eclipsé par son cousin-germain, Henri de La Tour d’Auvergne, Claude de La Trémoille, en dehors de la notice que lui consacrent les frères Haag58, n’a suscité l’intérêt d’aucun chercheur français, ceux-ci souscrivant en apparence au jugement de Pierre de L’Estoile : “ grand seigneur et grand terrien et hors cela (dit quelqu’un) rien... ”59. Claude de La Trémoille, né le 20 décembre 1567 à Thouars, était le dernier-né des six enfants de Louis III de La Trémoille et de Jeanne de Montmorency. Il était devenu l’héritier du nom à la suite de la mort en bas âge de ses trois frères aînés. Il était âgé de 9 ans, lorsque son père mourut de la goutte le 25 mars 1577 lors du siège de Melle. Sa mère, Jeanne de Montmorency, lui fit débuter sa carrière militaire sous les ordres de leur parent le duc de Montpensier. En 1585, pour des raisons que nous n’avons élucidées, soit parce que la faveur royale était monopolisée par d‘Epernon et Joyeuse, 53 Françoise KERMINA, Les Montmorency. Grandeur et déclin, Perrin, 2002, p. 127. 54 Louis-Charles de LA TRÉMOILLE, Jeanne de Montmorency, duchesse de La Trémoille et sa fille la princesse de Condé, 1575-1629, Nantes, 1895. 55 Henri de LA TOUR, Mémoires, op. cit., p. 130, note 1. 56 La baronnie de Sully appartenait aux La Trémoille depuis 1382. Claude de La Trémoille la vendit le 15 juillet 1602 à Maximilien de Béthune, marquis de Rosny pour la somme de 126 000 livres. 57 Notons toutefois que Henri IV à l’exception des titres accordés à des membres de la famille royale ou à des princes étrangers (Beaufort, Vendôme, d’Aiguillon, Fronsac, Montpensier) pendant ses vingt et un ans de règne n’a érigé que quatre pairies : Thouars (1595), Biron (1598), Rohan (1603) et Sully (1606). 58 Frères HAAG, La France protestante, tome VI, p. 413-420. 59 Pierre de L’ESTOILE, Mémoires et journal depuis la mort de Henri III (1589) jusqu’en 1611, Ed. Michaud et Poujoulat, Mémoires relatifs à l’Histoire de France, Nouvelle collection, Didier, Paris, tome XV, 1857, p. 381. 13 soit par opposition aux Guise, il rejoignit les forces de Henri Ier de Bourbon, prince de Condé. Cette alliance fut renforcée par le mariage le 16 mars 1586 à Taillebourg du prince de Condé avec sa soeur Charlotte-Catherine. La mort, le 5 mars 1588, du prince de Condé lui donna l’opportunité de jouer un rôle dans le parti protestant60 et au cours de l’été 1588 il franchit le pas et alla au prêche. Comme le souligne Winifred Stephens, Claude de La Trémoille a été lent à changer son opinion, mais une fois qu’il eut adopté la Religion, il devint un pilier de la foi. Il n’était pas seulement un protestant politique, par la ferveur de sa foi et la rigueur de sa pratique religieuse, il ressemblait aux puritains anglais. Ses deux plus intimes amis furent Duplessis-Mornay et Agrippa d’Aubigné. Pour Henri de Navarre, qu’il considérait comme un opportuniste sceptique, il n’avait guère de sympathies61. Partisan d’un protestantisme intransigeant, à la suite des promesses faites aux catholiques par Henri IV dans sa déclaration de Saint-Cloud du 4 août 1589 et aussi par le fait que le souverain ne lui avait pas donné la charge de colonel-général de ses chevau-légers, il retira ses bataillons de l’armée royale62. Ce mouvement d’humeur passé, il participa aux cotés du Béarnais à la bataille d’Ivry (14 mars 1590), au second siège de Paris (mai-août 1590) et au combat de Fontaine-Française (5 juin 1595). Par la suite, Claude de La Trémoille se détacha pratiquement de la cause royale et devint un des chefs du parti protestant demandant la promulgation d’un Edit garantissant leur droit de célébrer le culte et leur sécurité. Par son mariage, le 11 mars 1598, avec Charlotte-Brabantine de Nassau, fille de Guillaume le Taciturne et de sa troisième épouse Charlotte de Bourbon-Montpensier, il s’allia au réseau international des grands du parti protestant. De cette façon, il pouvait faire sienne les prétentions de ce réseau contre les pouvoirs des monarques et des empereurs. Les assemblées politiques protestantes réunies à Saumur, Loudun, Vendôme et Châtellerault dans les années 1595-1598 se tinrent à proximité des principales possessions de Claude de La Trémoille. En juillet 1596, notamment, il présida brièvement l’assemblée réunie à Loudun. Dans toutes ces assemblées, il avait des membres de sa clientèle : Agrippa d’Aubigné, Odet de La Noue sont les plus connus. Dans le discours qu’il fit circuler au lendemain de la signature de l’Edit de Nantes, Claude de La Trémoille rappela aux délégués que le parti était sans chef et que le choix était entre leurs mains, soit élire un nouveau protecteur soit laisser l’assemblée elle-même être le leader du mouvement. En même temps, il signala qu’aucun noble français disposait des moyens suffisant pour être leur protecteur, tout en laissant les délégués de prendre librement leur décision, il attira leur attention qu’une alternative pouvait être cherchée auprès de la Maison de Nassau63. Claude de La Trémoille fut suspecté par Henri IV d’avoir trempé en 1602 dans la conspiration de Biron et dut solliciter le pardon royal64. Il le mécontenta en soutenant pendant le séjour qu’il fit à Paris du 22 novembre 1602 au 16 février 160365 la cause de duc de Bouillon qui s’était réfugié auprès de son beau-frère l’Electeur Palatin. Ce soutient ruina son ambition de devenir gouverneur du Poitou, en remplacement de Jean de Chourses, seigneur de Malicorne, gouverneur depuis 1585. Henri IV préféra nommer à ce poste le 16 décembre 1603 son indispensable collaborateur Maximilien de Béthune, marquis de Rosny66 et ordonna à celui-ci de veiller étroitement sur les agissements de Claude 60 Mark GREENGRASS, France in the age of Henri IV, Longman, second Edition, 1995, p. 95-96. 61 Winifred STEPHENS, The La Trémoille Family. From the Crusades to the French Révolution, Houghton Mifflin Company, Boston and New York, 1914, p. 99. 62 Jean-Pierre Babelon a vu dans cette attitude, l’ambition de Claude de La Trémoille de se faire descerner le titre de protecteur des Eglises réformées abandonné par le Béarnais. Jean-Pierre BABELON, Henri IV, Arthème Fayard, 1982, p. 458. 63 Janine GARRISSON, L’Edit de Nantes, Arthème Fayard, 1998, p. 261-264. 64 Mark GREENGRASS, France in the age of Henri IV, p. 231. 65 “ Mémoire justificatif ou exposé de sa conduite dans l’affaire du duc de Bouillon, adressé par Fr. d’Aerssen aux EtatsGénéraux ” cité par S. BARENDRECHT, François van Aerssen, diplomaat ann het Franse hof, Universitaire Pers Leiden, 1965, p. 73. 66 Bernard BARBICHE et Ségolèbe de DAINVILLE-BARBICHE, Sully, Arthème Fayard, 1997, p. 155. 14 de La Trémoille. Lors de la visite que Maximilien de Béthune fit à Thouars du 14 au 16 juillet 1604 lors de sa prise de fonction dans son gouvernement, il exhorta Claude de La Trémoille à vivre dans la fidélité au Roi. La Trémoille lui promit de se rendre à la Cour, mais il était trop affaibli par la goutte et ce mal associé à la pression psychologique auquel le soumettait Henri IV, l’emportèrent dans la nuit du 24 au 25 octobre 1604. Elisabeth de Nassau, duchesse de Bouillon Elisabeth de Nassau, née le 26 mars 1577 à Middelbourg, était la seconde des six filles que Charlotte de Bourbon-Montpensier donna à Guillaume d' Orange, prince de Nassau67. Sa mère étant décédée le 5 mai 1582 et son père ayant été assassiné le 10 juillet 1584, elle fut élevée avec ses soeurs Louise-Julienne, Charlotte-Brabantine et Emilia-Secunda par sa belle-mère Louise de Coligny. Lors du voyage que cette dernière fit à la Cour de France en 1594 elle l’accompagna avec sa sœur Charlotte-Brabantine, a cette occasion elle fit la connaissance de Henri de La Tour d’Auvergne et l’épousa l’année suivante. Ce mariage fut heureux comme en témoigne la naissance de leurs neuf enfants. Pas la correspondance d’Elisabeth de Nassau à sa sœur Charlotte-Brabantine de Nassau, nous connaissons les sentiments qu’elle portait à son mari. La trentaine de lettres de Henri de La Tour d’Auvergne à Elisabeth de Nassau qui courent sur les années 1594 à 1614 éclairent les sentiments que celui-ci lui portait. Elles mettent premier lieu en évidence la profondeur son amour. “ Je meurs d’envie de vous voir ” lui écrit-il à plusieurs occasions. L’on notera que comme son cousin Claude de La Trémoille, la cérémonie de mariage célébrée, alors qu’il est obligé de rejoindre l’armée, il la charge de veiller sur les fortifications de Sedan et sur la moisson (lettre du 11 août 1595). En 1599, alors qu’il était en service à Paris auprès de Henri IV, elle met de l’ordre dans les affaires de la vicomté de Turenne (lettre du 13 janvier 1599). A nouveau en 1602 et 1603, elle devra assurer seule la gestion de la vicomté, à la suite de sa fuite hors du Royaume. A partir de 1606, Elisabeth de Nassau passera une partie de l’année à Sedan pendant que son mari est à la Cour. Entre 1614 et 1620, elle fera trois longs séjours à Turenne et en Périgord, suppléant son mari cloué par la goutte à Sedan. Dans cette correspondance informelle, à coté de préceptes politiques ou économiques, Henri de La Tour d’Auvergne fait état des achats de tissus, de vêtements qu’il à fait pour son épouse, des costumes des pages mêmes. Il ne manque pas de s’inquiéter pour ses enfants, principalement de Marion, la future troisième duchesse de La Trémoille. Dans sa lettre adressée le 4 décembre 1602 de Briatexte, il a ses mots : “ La petite Marion me bailla ung beser an partant de tout son cœur ”. Les trois lettres d’Elisabeth de Nassau à son époux que nous avons à ce jour retrouvées et que nous avons fait figurer dans ce recueil montrent qu’elle écrivait à celui-ci sur le même ton qu’elle écrivait à sa sœur Charlotte-Brabantine. Dans sa lettre du 13 décembre 1617, elle donne un compte rendu de la visite qu’elle fit à Marie de Médicis à Blois qui est révélateur de son acuité politique. Charlotte-Brabantine de Nassau, IIe duchesse de Thouars Charlotte-Brabantine de Nassau, née le 27 septembre 1580 à Anvers, était la cinquième des six filles de Guillaume de Nassau et de Charlotte de Bourbon-Montpensier donna à Guillaume d' Orange, prince de Nassau. Comme nous l’avons écrit, ci-dessus, elle fut élevée avec ses soeurs LouiseJulienne, Elisabeth et Emilia-Secunda par sa belle-mère Louise de Coligny. Charlotte-Brabantine avait quatorze ans lorsque sa soeur, Elisabeth, épousa en 1595 Henri de La Tour d’Auvergne, veuf de leur cousine Charlotte de La Marck. 67 Elisabeth de Nassau est un personnage peu connu en dehors de l’édition sommaire de ses lettres à sa sœur par Paul MARCHEGAY, Lettres d’Elisabeth de Nassau, duchesse de Bouillon à sa sœur Charlotte-Brabantine de Nassau, duchesse de La Trémoille de 1595 à 1628, Les Roches-Baritaud, 1875, 137 p. L’historienne Néerlandaise Johanna W. A. Naber (18591941) a repris les publications de Marchegay pour la rédaction du chapitre qu’elle consacre à Elisabeth de Nassau dans sa biographie des princesses d’Orange en France. Johanna W. A. NABER, Prinsessen van Oranje en hare Dochters in Frankrijk, Haarlem, 1901, p. 24-42. 15 Dans son essai sur l’épistolaire, Geneviève Haroche-Bouzinac souligne que pour qu’une correspondance ait quelque chance de s’accomplir dans la durée, il lui faut un destinataire à la hauteur, en qui il reconnaisse son alter ego68. La dizaine de lettres que Henri de La Tour adressa à CharlotteBrabantine de Nassau alors qu’elle n’était que Mademoiselle d’Orange révèle que déjà il lui portait une grande affection et considération. L’on remarque notamment que c’est lui qui lui proposa le 20 juillet 1597 le mariage avec son cousin-germain Claude de La Trémoille, duc de Thouars. “ C' est un mari qui se présente, des meileures maisons, et en extractions et en biens, de France, qui est M. de La Trémouille. Soudain que je lui pourrai dire que vous n' êtes point liée ailleurs, vous aurez l' ambassade pour prendre temps et lieu de vous voir. Certes il faut que vous le veniez chercher, ne pouvant, ni le temps ne sa personne, faire le voyage vers vous ; s' il le pouvoit il le feroit ”69. Henri de La Trémoille poursuivit sa correspondance avec Charlotte-Brabantine de Nassau après son mariage. Il fut très sensible en 1603 au fait qu’alors qu’il s’était réfugié à Heidelberg, elle rendit visite à Turenne à sa femme qui était sur le point d’accoucher. Dans la lettre de condoléances que Henri de La Tour d’Auvergne adressa à CharlotteBrabantine de Nassau au lendemain de la mort de son mari, il témoigne de l’affection qu’il éprouvait envers celui-ci qu’il considérait comme un second moi-même. Au lendemain de la mort de son mari, Charlotte-Brabantine de Nassau eut à régler la succession de son mari, à recueillir l’héritage de la Maison de Laval à la suite de la mort de François de Coligny le 3 décembre 1605 en Hongrie, à veiller à ce que ses enfants soient élevés dans la Religion réformée. Pendant toutes ces années, elle bénéficia d’un appuis constant du duc de Bouillon. Pendant l’époque de la régence de Marie de Médicis, ce fut le tour de Charlotte-Brabantine de Nassau de soutenir le duc de Bouillon engagé dans les mouvements de contestations menés par le prince de Condé. En 1619, le mariage de son fils Henri de La Trémoille et de Marie de La Tour d’Auvergne scella l’union entre les deux familles. Charlotte-Brabantine de Nassau, comme le duc de Bouillon, refusa de s’engager dans la première guerre de religion du règne de Louis XIII. Les archives des Rohan-Bouillon n’ont pas conservé la lettre qu’elle adressa à sa soeur à la mort de Henri de La Tour d’Auvergne. L’on ne peut que conjecturer que ce fut pour elle une épreuve très rude. Les archives des Rohan-Bouillon ne conservent à la côte 272 AP 179 que deux lettres de Charlotte-Brabantine de Nassau à Henri de La Tour d’Auvergne. Elle lui adressa la première de Paris le 1er février 1598 de Paris lors de son arrivée en France.. “ Monsieur, j’ay bien à vous demander depuis que je suis en ce païs, mais vous savés qu’en ce lieu on ne faict point ce qu’on veut, car les conpanies qui viennent voir Madame ma belle-mère ne nous donnent pas une heure de repos, certes, j’en suis si lasse qu’il n’est pas posible de le pouvoir dire et encore sy en ces conpanies, il y en avoit où vous Monsieur ou Madame de Buillon, alors il n’y auroit garde de m’ennuïer, mais tout ce que je verer devant de l’avoir veue, ne fera que m’ennuïer. Le Roy me faict aser bonne chère. Je crois que Madame ma belle-mère vous mandra ce qu’il luy aura dict, plus particulièrement que je ne saurois faire. Monsieur de Montpensier me l’a faict fort bonne ausy, mais il se plaint un peu de ce qu’on a tant mis à l’avertir, mais il dit cella en riant, mais toutefois je vois bien que cella l’a un peu fâché. Il est si bon qu’il oublie bientôt le mal qui veut. Voilla tout ce que je vous puis dire Monsieur pour à cette heure. Le loisy ne me permest point de vous entretenir plus lontemps. S’il faut que je vous asure que vous n’aurrer jamais plus de puissance sur personne que vous en avez Monsieur sur, Vostre très humble et très obéissante seur. Charlote de Nassau ” 1600 La seconde lettre de Charlotte-Brabantine de Nassau à son beau-frère est une lettre non datée de “ Monsieur, 68 Geneviève HAROCHE-BOUZINAC, L’épistolaire, Collection Contours littéraires, Hachette, 1995, p. 81. 69 Archives nationales, 1 AP 434/20 bis. 16 J’ay faict ce que vous m’avez commandé. Je ne say si vostre jugement est ausy bon en chose frivolle, comme il l’est en chose de conséquence et comme il sera au chois que vous ferer d’un honnette jendre. Il ne poura jamais mériter ma chère Lollo70. Que je ne say si elle endura que on l’apelle comme cella à cette heure que on parlle de la marier. Je loue Dieu de la bonne résolution que vous avez prise de demeurer près de ma chère seur, chachant que cella luy raportera du contentemant extrême, non pas pour ce que vous penser. Je vous suplie très humblement que l’honneur de vostre amitié me soit conservée. Cet la chose du monde qui m’est la plus chère et qui est désiré avec plus d’afection de vostre très humble seur à vou faire service. Charlote de Nassau ” Ces deux lettres, très banales, font toutefois apparaître que Charlotte-Brabantine de Nassau écrivait à son beau-frère avec la même franchise qu’elle écrivait à sa sœur. Sa remarque dans sa première lettre : “ Je ne say si vostre jugement est ausy bon en chose frivolle, comme il l’est en chose de conséquence ” révèle qu’il ne l’intimidait nullement. Henri de La Trémoille, IIIe duc de Thouars Henri de La Trémoille est né le 22 décembre 1698. Par leur correspondance nous savons que la duchesse de Bouillon et la duchesse de La Trémoille dès la naissance de Marie de La Tour d’Auvergne en 1601 échafaudèrent le projet de la marier à son cousin-germain. Lorsque son fils aîné eut quatorze ans, Charlotte-Brabantine de Nassau, pour le soustraire à l’influence des faucons du parti protestant, le confia au duc de Bouillon. Celui-ci l’emmena avec lui lorsqu’il effectua à la fin du mois d’avril 1612 une mission en Angleterre, auprès du roi Jacques Ier. C’est de Sedan qu’Henri de La Trémoille partit au printemps 1614 pour son périple à travers l’Allemagne, l’Autriche, la Hongrie, le Nord de l’Italie et la Suisse. A son retour en France en 1615, mécontent d’être écarté de la présidence de l’ordre de la noblesse des Etats de Bretagne par Marie de Médicis au profit de Henri de Rohan, il rejoignit son cousin germain le prince de Condé dans son mouvement de contestation. Au lendemain de la signature de la paix de Loudun, il alla à Paris avec son oncle le duc de Bouillon. Il était avec lui au temple de Charenton lorsque le 1er septembre 1616 leur parvint la nouvelle de l’arrestation du prince de Condé. Tous deux quittèrent précipitamment la capitale. Revenu à Thouars, Henri de La Trémoille au mois d’octobre au grand mécontentement de sa mère, avec un corps de 100 cavaliers, soutint La Rochelle menacée par le duc d’Epernon. En 1617, pour la première fois, il présida l’ordre de la noblesse aux Etats de Bretagne en temps que baron de Vitré. Au mois de janvier 1619, Henri de La Trémoille se rendit à Sedan pour y épouser sa cousine, Marie de La Tour d’Auvergne. La cérémonie fut célébrée en février 1619 à Sedan. A la suite de l’évasion de Marie de Médicis, à la requête du roi, il dut rapidement quitter Sedan pour rejoindre la Cour. Pendant l’automne 1619, il présida pour la seconde fois l’ordre de la noblesse aux Etats de Bretagne réunis à Vannes. En 1620, mécontent du peu de cas que la Cour et le souverain faisaient de lui, Henri de La Trémoille rejoignit Marie de Médicis alors que les jeux étaient faits. Il resta à sa mère et à DuplessisMornay de solliciter le pardon du Roi. Echaudé par cette expérience, en 1621 il céda aux pressions de sa mère, de sa femme, de son oncle le duc de Bouillon, de son intendant d’Irais, du maréchal de Lesdiguière et du souverain lui-même et ne rejoignit pas les Rochelais et Henri de Rohan dans leur rébellion. Craignant toutefois qu’il n’en soit tenté, le duc de Bouillon l’invita à la rejoindre au mois d’octobre à Sedan. Pendant toute l’année 1622, Henri de La Trémoille soutint les efforts de son oncle 70 Dans sa lettre adressée le 5 octobre 1600 de Lanquais à sa sœur Charlotte-Brabantine, Elisabeth de Nassau l’informait de la demande en mariage de sa fille aînée Louise, dite Lolo, par le comte d’Auvergne pour son fils aîné, ce qui fait présumer que cette lettre non datée, conservée dans le Fonds Rohan-Bouillon, est de cette période. 17 pour trouver des solutions pour favoriser la paix. Lorsque le duc de Bouillon mourut en 1623, ce fut pour lui comme la mort d’un second père. Frédéric de La Trémoille, comte de Laval Si nous ne possédons pas de lettres du duc de Bouillon à Frédéric de La Trémoille, la personnalité de celui-ci doit néanmoins être évoquée. Si Henri de La Trémoille est l’exemple du bon fils écoutant sa mère, son oncle, sa tante et éventuellement son épouse et sa bru. Frédéric de La Trémoille, de trois ans son cadet, est l’exemple de l’adolescent à problèmes. Défiguré par un bec de lièvre, Frédéric de La Trémoille fut en raison de cette infirmité trop choyé pendant sa petite enfance. Arrivé à l’âge de l’adolescence, il prit conscience de sa disgrâce physique et aussi du fait que c’était son frère aîné qui détenait le pouvoir effectif. La correspondance de son précepteur, Berthold, fait apparaître qu’il prit le parti de contester toute autorité. Ses relations furent particulièrement tendues avec son oncle pendant le séjour qu’il fit à Sedan durant le dernier trimestre de l’année 1617 alors que sa tante était absente. A son retour, celle-ci sut rétablir le calme71. Son esprit de contestation, son manque de contrôle de soi ruinèrent sa carrière. Du fait de son manque de discipline, pendant les années 1621 et 1622 qu’il passa aux Provinces-Unies, son oncle Maurice de Nassau ne lui conféra aucun commandement. Ses prises de position en faveur des Rochelais en 1625 et en 1628 lui interdirent toute carrière en France. En 1630, il rompit avec sa mère. Réfugié aux Provinces Unies, il se mit à dos les Etats et ses parents et partit en 1634 en Italie. Tel un héros de roman picaresque, il mourut en 1642 à Venise des suites d’un duel maudissant son frère et sa bellesoeur. 71 Cf. Mark MOTLEY, Becoming a French aristocrat. The Education of the Court nobility, 1580-1715, Princeton University Press, 1990, p. 49-52 et 85. 18 HENRI DE LA TOUR D’AUVERGNE AU MIROIR DE SES LETTRES Henri de La Tour d’Auvergne comme nous l’avons souligné dans l’introduction est surtout connu au travers des témoignages que nous ont laissés Sully, Rohan, Richelieu ses adversaires politiques, du Maurier, son ancien secrétaire, le mémorialiste Pierre de L’Estoile, thuriféraire d’Henri IV et Saint-Simon qui détestait les La Tour d’Auvergne en raison de leur prétention au titre de prince. Ces auteurs ont dressé de lui le portrait d’un ambitieux, un “ malcontent ” professionnel72, expert dans l’art de faire avancer ses propres intérêts au travers de ceux de la cause huguenote73. L’abbé Marsollier, le premier biographe d’Henri de La Tout d’Auvergne, s’il ne dissimule pas la complexité de sa personnalité, souligne toutefois ses qualités : excellent capitaine, grand politique et habile négociateur, en bref : “ un grand homme selon le monde ”74. Sa correspondance avec sa bellesoeur, Charlotte-Brabantine de Nassau, et son neveu, Henri de La Trémoille, si elle confirme certains points des accusations portées contre lui, fait apparaître aussi des aspects inconnus de sa personnalité. L’épistolaire Henri de La Tour d’Auvergne a une écriture très ferme, mais à laquelle il faut s’habituer pour la déchiffrer. Son style est sobre et précis. Son orthographe est meilleure que celui-ci de son épouse et celui de sa belle-sœur. Dans ses mémoires, Henri de La Tour d’Auvergne mentionne qu’il eut un précepteur qui lui enseigna le latin et la géographie, mais que sa grand-mère le congédia par crainte de la Religion. Henri de La Tour d’Auvergne vint à la cour des Valois dès l’âge de 10 ans où il apprit les manières du monde. Fait prisonnier le 15 août 1581, il profita pendant les 2 ans et 10 mois que dura sa captivité dans la forteresse d’Hesdin pour compléter sa formation en lisant les auteurs anciens (Homère, Thucydide, Plutarque, Platon, Virgile, Ovide, Tite-Live, César, Cicéron, Suétone, Sénèque,…), du Moyen-Age (Commynes) et aussi contemporains (Rabaissais, Guichardin, Ronsard, Desportes,…). Devenu duc de Bouillon, il créa à Sedan une Académie qui fut un des grands foyers de la culture protestante française au XVIIe siècle75. Vostre bon frère Les lettres de Henri de La Tour d’Auvergne à Charlotte-Brabantine de Nassau par rapport à celles que lui adressèrent son fils ou sa belle-fille, nous révèlent une autre facette de la personnalité de celle-ci : la grande dame de l’aristocratie qui par ses qualités est le pendant du gentilhomme, reflet de la donna di palazzo définie par Castiglione dans le Courtisan76, mais aussi résultante du discours protestant plus égalitaire que celui tenu par les catholiques envers les femmes. Comme nous l’avons souligné dans le précédent chapitre, le duc de Bouillon a reconnu en sa belle-soeur son alter ego. Souvenir également de l’éducation qu’il reçu à la cour des Valois, ses lettres sont empreintes d’intimité, de délicatesse envers cette femme de 25 ans sa cadette qui aurait pu être sa fille. Il s’inquiète de sa santé, de celle de ses enfants, donne des nouvelles de celle de son épouse et de 72 N. M. SUTHERLAND, The Huguenot struggle for recognition, Yale University Press, 1980, p. 287. 73 Mark GREENGRASS, France in the age of Henry IV, op. cit., p. 96. 74 Abbé MARSOLLIER, Histoire de Henri de La Tour d’Auvergne, duc de Bouillon, op. cit., Livre VIII, p. 103. 75 Frank DELTEIL, “ Henri de La Tour, vicomte de Turenne, humaniste et protestant ”, B.S.H.P.F., Tome 115, avril-juin 1969, p. 230-254. 76 Baldassare Castiglione, Le Livre du Courtisan, Ed. Alain Pons, GF-Flamamrion, 1991, Livre troisième, p. 227 - 320. Publié en 1528 à Venise, traduit en français en 1537, le Courtisan fut le bréviaire de l’homme et de la femme de Cour dont il traçait le modèle. Cf. Madeleine LAZARD, Images littéraires de la femme à la Renaissance, Coll. Littératures modernes, PUF, 1985. 19 leurs enfants. Sans réserves, il lui compte ses tourments, sollicite ses avis, lui demande d’intervenir en sa faveur. Elisabeth de Nassau dans sa lettre du 3 novembre 1608 confie à sa soeur Charlotte-Brabantine la qualité que son mari appréciait le plus chez elle : “ Il vous est obligé de vos libertés qu’il aprouve, autant qu’il déteste les cérémonyes entre personne qui s’aiment sans feintisse ”77. Vostre bon père Henri de La Tour d’Auvergne devint père seulement en 1596, à l’âge de 41 ans. Il attendit neuf ans pour avoir enfin un fils. Il manifesta toujours le plus grand intérêt pour ses enfants, ses neveux et sa nièce78. Dans les lettres qu’il écrivit en 1602 et 1603 à son épouse alors que Henri IV le poursuivait de son ire, il n’oublie pas d’avoir une pensée pour son petit peuple. Henri de La Tour d’Auvergne accueillit à Sedan le futur électeur palatin Frédéric V, ses neveux Henri et Frédéric de La Trémoille. Dans les quelques lettres à Henri de La Trémoille qui sont parvenues à nous il use de la correspondance didactique. L’on notera qu’il le juge sans complaisance. Dans une lettre de septembre 1607, il souligne les difficultés d’Henry alors âgé de 9 ans pour apprendre : “ les longueur luy lase l’esprit et la cantité d’estude luy surcharge la mémoire, chose dangereuse et où l’on doit aporter grande prudance pour donner aus esprits les besoins quy leurs convyennent et que il ne se desgoutent ”. Dans sa lettre du 13 mai 1619, il n’hésite pas à le tancer : “ Vos ocupassions rendent vos lettres sy peu expliquées, que l’ingnorance an quoi elles lessent ceus à quy elles s’adressent, qu’on ne vous y peut satisfaire, ainsy que je désire faire à tout ce où je pourré servir à vostre grandeur ”. Le protestant La conversion de Henri de La Tour d’Auvergne au protestantisme est un fait controversé. Michel Cassan dans sa récente thèse sur le protestantisme dans le Limousin souligne l’importance des considérations matérielles et politiques dans sa conversion79. Dans ses Mémoires, Henri de La Tour d’Auvergne déclare que Dieu se révéla à lui à la fin de l’été 1575 à la suite d’une fièvre continue qui lui dura bien seize jours80. Sa détention aux Pays-Bas de 1581 à 1583 l’affermit dans sa nouvelle religion et à la différence de nombre de ses contemporains, il resta protestant. Dans le préambule de ses Mémoires, le duc de Bouillon invite son fils aîné à se faire “ soigneusement instruire en la vraye religion ”. Ses lettres font apparaître que cette recommandation n’est pas une clause de style. Sa foi s’exprime dans nombre d’entre elles, notamment dans les lettres qu’il adressa à son épouse en 1602 et 1603 lors de sa fuite à Heidelberg ou à Charlotte-Brabantine de Nassau à la suite de la mort de son mari. Le Feudataire 77 Archives nationales 1 AP 333/104, citée par Jonathan DEWALD, Aristocratic experience and the origins of modern culture. France, 1570-1715, University of California Press, 1993, p. 196. 78 Sur ce point Cf. Maurice DAUMAS, Le mariage amoureux. Histoire du lien conjugal sous l’Ancien Régime, Armand Colin, 2004, p. 159. 79 Michel CASSAN, Le temps des guerres de religion. Le cas du Limousin (vers 1530-vers 1630), PUBLISUD, 1996, p. 102. 80 Henri de LA TOUR, Mémoires, p. 88-89. 20 Par son père, Henri de La Tour d’Auvergne, était vicomte de Turenne aux marges du Limousin et du Quercy, sur un territoire qui correspond au sud du département de la Corrèze et au nord du département du Lot. La vicomté limousine, la plus peuplée, comptait trois villes : Beaulieu, Argentat et Turenne, capitale politique de la vicomté. La vicomté quercinoise, moins peuplée, comptait également trois villes : Martel, Saint-Céré et Gagnac81. La vicomté de Turenne était réputée souveraine et conférait à son titulaire, sous la suzeraineté nominale du Roi, des droits régaliens. Surtout la vicomté était totalement exempte des impôts royaux. Turenne possédait également des terres en Basse-Auvergne, actuel département du Puy-deDôme. Il s’agissait dans l’élection de Clermont : de la baronnie d’Olliergues, de Bourg-Lastic, La Chabesse, Olmet, Marat, La Chapelle-Agnon, Augerolles, Geraut, Saint-Beausire, Le Bassinet, Orléat et Saint-Gervais-sur-Meyrmont et dans l’élection de Riom : de la baronnie de Montgascon, de la ville de Maringues, Jose et le Chastel d’Emezat. En héritant en 1588 de son cousin catholique, Galliot de La Tour de Limeuil, Henri de La Tour d’Auvergne devint comte de Limeuil et de Lanquais au Périgord dans l’actuel département de la Dordogne. Son mariage en 1591 avec Charlotte de La Marck, le fit duc de Bouillon, prince de Sedan et de Raucourt. La correspondance d’Henri de La Tour d’Auvergne, complétée par celles de son épouse et de sa belle-soeur, la duchesse de La Trémoille, nous fait découvrir comment il compléta son emprise terrienne dans le sud-ouest de la France, grâce aux gratifications qu’il reçut sous la régence de Marie de Médicis. Avec le produit de la vente de sa charge de premier gentilhomme de la chambre à Concini, il acheta en 1611 la baronnie de Didonne à sa belle-soeur la duchesse de La Trémoille avec promesse de la rétrocéder à son neveu Henri de La Trémoille lorsque celui-ci serait majeur. En fait Didonne constitua une partie de la dote de Marie de La Tour d’Auvergne. Henri de La Tour d’Auvergne poursuivit son extension dans le sud-ouest de la France en achetant le 2 janvier 1615 la vicomté de Castillon pour la somme de 246 000 livres à EmmanuelPhilippe de Savoie, marquis de Villars, seigneur catholique qui n’avait que faire de cette place forte protestante82 et le 18 juin 1616 pour la somme de 110 000 écus le comté de Nègrepelisse dans la basQuercy, aujourd’hui département du Tarn-et-Garonne, à Henri de Beaumanoir, marquis de Lavardin, fils aîné du maréchal de Lavardin. En 1620, Henri de La Tour d’Auvergne poussait son neveu à acheter à la branche catholique des La Trémoille le marquisat de Royan, place stratégique qui contrôlait l’estuaire de la Gironde. Les négociations étaient bien avancées, mais la guerre en 1621 ruina ce projet. 81 Françoise de Noirfontaine, “ Les privilèges de la Vicomté de Turenne ” in Jean-Pierre BARDET, Dominique DINET, Jean-Pierre POUSSOU et Marie-Catherine VIGNAL, Etat et Société en France aux XVIIe et XVIIIe siècles. Mélanges offerts à Yves Durand, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2000, p. 421. 82 Fernand GUIGNARD, Histoire de Castillon-sur-Dordogne, Paris, 1912, p; 204. 21 LETTRES A JEANNE DE MONTMORENCY Ie DUCHESSE DE LA TREMOILLE Les Archives des La Trémoille conservent trois lettres de Henri de La Tour adressées à sa tante Jeanne de Montmorency, Ière duchesse de La Trémoille. La première de la fin des années 1570, la seconde de 1581 et la troisième de 1588. L’on remarquera que dans ses trois lettres le vicomte de Turenne ne dispensât à sa tante que des protestations d’affections n’impliquant en fait aucun engagement réel de sa part en la faveur de celle-ci. 1 19 décembre 157? - Turenne à Mme de La Trémoille Madame, je n’ay voulu faillir de vous faire la présente par Pulon présent porteur, qui est à moy, pour me ramantevoir an vos bonnes grâces et vous suplier m’y vouloir tousjours tenir comme vostre humble nepveu et qui désire le plus vous faire tout humble service en tout ce qu’il vous plaira me commander ; et vous priant me faire cest honneur que de me mander de vos nouvelle par led. Prulon, auquel j’ay commandé de vous dire bien au long des miennes, qui m’en gardera de vous faire la présente plus longue, en m’en remettant sur luy qui pour vostre recomandation bien humblement à vos bonnes grâces et prier Dieu qu’il vous donne, Madame, une parfaicte santé, heureuse et longue vye. A Turenne, le XIXe de dessambre; Vostre humble nepveu à vous faire service. Turenne Archives nationales, 1 AP 434/7 2 9 janvier 1581 -Coutras83 à Mme la duchesse de La Trémoille Madame, j’ay receu celle qu’il vous a pleu de m’escrire par ce gentilhomme et vous suplie de croire que je ne m’estimeray jamais si heureus, que quant vous me ferez c’est honneur que de me porter de vos commandemans, ausquelz je randray toute ma vie telle obéissance, que vous sçauriez la désirer de vostre très humble et affectionné nepveu et serviteur. Ced. gentilhomme vous dira ce que j’ay peu faire pour l’affaire pour lequel vous l’aviez envoyé et comme je n’ay rien eu en sa grande recommandassion, en ayant parlé souvent à Monsieur84 et au Roy de Navarre. Si bien que je me rapporteray à ce qu’il vous en sçaura bien descouvrir. Il me reste seulemant à me conjouir avec vous de la grâce qu’il a pleu à Dieu de nous faire de nous donner la paix laquelle a esté publiée85 et est on après /2/ à la faire entretenir et exécuter du mieux que l’on peult, à prié à Dieu qu’il nous la veille donner bonne et durable et nous oster de tant de maux que nous aportent ces misérables guerres. Pour la fin, Madame, je vous supliray me faire cest honneur de me tenir en vos bonnes grâces et vous asseurer que vous tirerez tousjours de moy tout le service, le respect et l’obéissance que vous sçauroit rendre vostre propre fils, vous besant très humblemant les mains et priant Dieu, Madame, vous donner en santé, très heureuse et longue vie. A Coutras, ce 9e janvier 1581. 83 Turenne avait accompagné à Coutras le Roi de Navarre venu dans cette place pour y approuver la paix de Fleix mettant fin à la septième guerre de religion. 84 François de Valois (1554-1584), duc d’Anjou, turbulent frère de Henri III, avait favorisé la paix .pour satisfaire sa volonté de se créer une assise territoriale aux Pays-Bas. Turenne fut de ceux qui l’accompagnèrent en 1581. Mal lui en pris, il fut fait prisonnier en avril par les troupes d’Alexandre Farnèse sous les murs de Cambrai et interné pendant deux ans et dix mois à Hesdin. 85 Le traité de Flex a été signé le 26 novembre 1580 et entériné par Henri III le 26 décembre. 22 Vostre très humble et obéissant nepveu et serviteur. Turenne Archives nationales, 1 AP 434/8 3 mars 1588 - Sans lieu à Mme de La Trémoilley duchesse de Thouars Madame, ce mot ne sera que pour vous assurer de la continuassion de mon humble affection à vostre service, à laquelle je désireroys vous pouvoir autant rendre de tesmognange par les effects que je vous puis assurer qu’elle est très véritable ; les accidants qui survyennent coup sur coup, apportent des longueurs & des difficultés aux affaires de Madame la princesse86, mays s’il m’est permy de vous en dire mon avis, il me semble qu’il ne les fault précipiter, ains attandre quel cours prendrons les affaires & se gouverner selon qu’on verra estre le plus à-propos87, et n’ayant maintenant autre subject pour allonger la présente, que pour vous asseurer que j’apporteray tousjours la mesmes affection que j’ay faict jusques icy aux affaires de Madame et à tout ce quy touchera son service, je vous baiseray humblement les mains & demeureray pour jamays Madame, Vostre bien humble neveu à vous fère service. Turenne Archives nationales, 1 AP 434/9 86 Suite à la mort soudaine du prince de Condé le 5 mars 1588 à Saint-Jean d’Angély, son épouse Charlotte-Catherine de La Trémoille, fille de Jeanne de Montmorency, avait été suspectée de l’avoir empoisonné et avait été emprisonnée, sur l’ordre de Henri de Navarre. Jeanne de Montmorency mobilisa tout le lignage pour la faire libérer. Malgré cela Charlotte-Catherine de La Trémoille resta plusieurs années en prison sans que son procès soit instruit. Elle revint au catholicisme dans les dernières années du XVIe siècle. 87 L’attentisme que préconisa Henri de La Tour d’Auvergne dans cette lettre, ne dut guère satisfaire sa tante. 23 LETTRES A CLAUDE DE LA TRÉMOILLE, IIème DUC DE THOUARS ANNEES 1594 - 1598 Les Archives de La Trémoille détiennent quelques lettres de Henri de La Tour écrites dans les années 1594-1597 à son cousin Claude de La Trémoille. Ces années correspondent à la période ou Claude de La Trémoille mécontent de l’abjuration de Henri IV et du peu de cas que celui-ci faisait de ses services se retira à Thouars, raison sans doute pour laquelle ces lettres ont été conservées. Dans sa première lettre, Henri de La Tour informe Claude de La Trémoille de la mort du fils que lui avait donné sa première épouse Charlotte de La Marck. Cette mort fut suivie une semaine plus tard par le décès de celle-ci. La mort de son épouse va obliger Henri de La Tour de se rapprocher d’Henri IV, car le comte de Maulévrier, Charles-Robert de La Marck et le duc de Montpensier, les plus proches parents de Charlotte de La Marck, contestaient que celle-ci ait fait de son époux son principal héritier. Henri de La Tour, ayant besoin d’une représentation à Sedan, y épousa le 15 février 1595 une cousine de sa femme, Elisabeth de Nassau, fille de Guillaume le Taciturne et de Charlotte de Bourbon-Montpensier. Pendant la campagne de 1595, Henri de La Tour après quelques succès relatifs ne connut que des déboires. Il fut plus heureux en 1596, année où à la suite de la prise de Calais par les Espagnols, il négocia avec la reine Elisabeth d’Angleterre un traité d’assistance. A son retour, il ne resta pas à la Cour et rejoignit sa jeune épouse à Sedan. A la fin du mois d’août, il dut retourner en Angleterre puis se rendre aux Provinces Unies ce qui l’empêcha d’assister à la naissance de leur premier enfant. Pendant le mois de février 1597, il se rendit avec son épouse à Turenne où il n’était pas allé depuis sept ans. Ils venaient d’y arriver lorsqu’ils apprirent la nouvelle de la prise d’Amiens par les Espagnols. Henri IV ne lui ayant pas proposé d’emploi dans l’armée assiégeant Amiens, il ne s’y rendit pas. Au mois de juin, il se rendit à Châtellerault où siégeait l’assemblée protestante et où il retrouva Claude de La Trémoille. Sa présence inquiéta beaucoup les représentants du Roi qui lui prêtèrent les plus noirs desseins. A la fin du mois d’août, il retourna au Limousin retrouver son épouse dont il désirait passionnément avoir un fils. Henri de La Tour d’Auvergne revint au début de l’année 1598 à Châtellerault et prit part aux travaux de l’assemblée jusqu’à ce que le souverain le convoqua auprès de lui pour aller à Nantes signer l’Edit mettant fin aux guerres de religion. Les quelques lettres de Henri de La Tour à Claude de La Trémoille nous font saisir son attitude pendant quelques épisodes de sa vie à la veille du décès de sa première épouse (lettre du 8 mai 1594), de la campagne de 1595 (lettres du 24 mars et du 4 juin). Dans sa longue lettre, non datée de 1596, il s’emploie à justifier auprès du duc de La Trémoille la conduite qui fut la sienne pendant les premiers mois de l’année. Pour 1597, aux cotés d’une lettre assez elliptique du 4 mars, sont conservées deux lettres codées. Pour 1598 sont conservées deux lettres du duc de Bouillon aux échevins de Poitiers. 4 8 mai 1594 - Sedan à M. de La Trémoille Monsieur, vous aurés sceu l’esxtrémité de la maladie de ma famme, aïant esté plus de quinse jours que chasque heure du jour et de la nuit estoit veue, de ceus quy sont près d’elle, pour estre la dernière qu’elle passeroit an ce monde. Dieu a ouy nos prières despuis deus jours, lesquels nous donne quelque espérance de la nous lesser ancores an ce monde. Elle est accouchée et son fis mort, ce qu’elle 24 ne sait ancores88. Sa malladie me retiendra issy plus longtemps que je n’usse fet, ne la pouvant quiter, que je ne la voye an meilleur estat. Je fet les afaire demandé, ainsy que les (illisibles) m’y ont convié, et non celle que je le pouvois fair le meilleur. C’est à cest heure qu’il nous faut desplloyer et sagesse et vertu de magnangnité pour avoir nostre condission asseurée. Assurés-vous /2/ que toutes les actions visent là et que je né autre chemins à mes actions que celluy par lequel le public de la Religion trouverra sa garantie contre ce quy le menasse. J’anvoye vers Monsieur de Monpansier. Nous ne pouvons plus guières tarder que nous n’ayons Messieurs de St-Germain89 et de La Forest90. Croyés que rien au monde ne vous peut estre sy fidellemant voué et lié à vous servir, honorer et aimer plus fort, que moy quy vous bèse ung million de foys les mains. C’est Vostre humble cousin à vous faire afectionné servisse. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/15 5 24 mars 1595 - Sedan au duc Claude de La Trémoille Monsieur, vous me montrés trop de tesmoignages de vostre amitié, pour mériter sy peu an vostre andret, an ne trouvant ocasion digne d’acompagner ma volonté an la fidelle affection qu’elle porte à tout ce quy vous peu estre utille et honorable. Je me fusse volontiers trouvé à la Court et l’arivée de La Sausaie91 pour vous servyr, cuidant92 que la nescessité que me mande estre dedella aus afaires du Roy, luy ferait acepter ce que nul autre ne peut faire que vous. C’est ung grand malheur que nos assamblées ne se puissent faire avec la sagesse et l’union qu’il est nescessaire d’y aporter, et que les réïtérans se sont autant d’ocasions d’acroytre et aucmanter les jalousies du Roy, quy nous faut estyndre autant que nous pourrons et sy les choses à la généralle se manquent avec ces brygues particullières, il vaudroyt mieus la sursoyr. Je feray passer vers vous celluy que qy anvoyeré. Sçouvenné-vous que pour vostre nepveu93 et pour vous, il faut hautoriser la noblesse et mesme an la patrie où vous estes. Prenons garde de nous atyrer plus de haine contre le party, qu’il n’an pourra porter et de faire chose quy le désunissent plus tost que de l’unir. Vous sçaurés les plintes publiques de ceus qui estoyent de qualité à la Court, lesquelles continuent soyt que de vrais ils an soyent ofancés ou bien que le faire partyre leur fasse espérer plus de fassillité /2/ à faire leurs afayres an montrant n’avoir ocasion d’estre forte joints an party, nos afères publiques ne paroyssent point ans estrangers que byen, et tiennent que les seuls conseils que nous pouvons avoir sont de nous tenir joints au Roy et avec lesquels ils nous peuvent avilir et seullemant de leurs entrrecis. Je partis de la Court avec le mécontantemant du Roy qu’il a exagéré de plusieurs choses, desquelles ung autre seroyt loué. Passyance l’armée espagnolle est à deus lieus de la France, mes je ne croy pas qu’elle antre qu’ils n’ayent points sis mille suisses quy sont levés et quatre ou cinc mille espagnols quy ne sçauroyent venir de deus moys. Monsieur du Maine est à Laon. Il s’an va à Rins où Monsieur de Lorrene se doybt trouver. Là se prandra ressolussion de toutes leurs afayres. 88 Charlotte de La Marck première épouse de Henri de La Tour d’Auvergne est décédée le 15 mai 1594 à l’âge de 19 ans, après avoir donné le jour le 8 mai à un fils mort né. Claude de La Trémoille était un des deux exécuteurs testamentaires que Charlotte de La Marck avait désigné dans son testament du 8 avril 1594. 89 Gabriel de Polignac, sieur de Saint-Germain-de-Clan, un des principaux nobles huguenots de Saintonge. 90 Moïse Suzannet, sieur de la Forêt-Brédurière, un huguenot du Poitou, entré au service du duc de Bouillon. 91 La Sausaie était un gentilhomme de Claude de La Trémoille qui le nomma gouverneur de Taillebourg. 92 Cuidant c’est-à-dire croyant, pensant 93 Henri II de Bourbon-Condé, né en 1588, fils posthume de Henri .Ier de Bourbon Condé et de Charlotte de La Trémoille. 25 Je n’ay rien obmis de tout ce que nous avions discouru et avec espérance de fruit. Vous aurés à toutes ocasions de mes nouvelles et vous debvés contiuer à m’aimer comme vous mesmes, n’y aiant rien au monde quy vous honore comme je fais, ny quy avec plus de passion vous veulle servir. Je vous bese ung million de fois les mains. C’est Vostre humble cousin à vous faire afectionné servisse. Henry de La Tour A Sedan, ce 24e mars. Archives nationales, 1 AP 434/14 6 4 juin 1595 - Sedan au duc Claude de La Trémoille Monsieur, je me resjouis de vous sçavoir près du Roy et m’atriste bien fort de la crainte que jé de ne vous voir à l’honneur de Dieu, donnés m’an le moyen. Je m’an vais an Picardie, où l’on tient que les ennemis veulent ataquer Le Castellet94. Nous avons eu de l’exercisse à une mauvèse petite plasse que Verdugo avoit assiégé avec plus de catre mille hommes de pied et de douse cens chevaus. Ils ne l’ont point prise et sont deslogés devant nous. Vostre cousin fera chose que vous et plusieurs contris ne cuides estre de son humeur, mes quoy qu’il fasse, il n’y a rien au monde qu’il aime, et honore à l’esgal de vous, à quy je bése ung million de fois les mains. C’est Vostre humble cousin à vous faire servisse. Henry de La Tour A Sedan, ce 4e juing. Archives nationales, 1 AP 434/16 7 4 mars 1596- Sedan au duc Claude de La Trémoille Monsieur, assurés-vous que j’ai singullière rescommandassion, tant ce quy vous tousche et travaille et travailleré à vous faire réussir le fet particullier duquel nous avons parlé et n’y aspargneré ny temps ny moyens. Du Mourier95 vous fera sçavoyr au long de mes nouvelles et de ce que je juge de nos afaires. Festes-moy porter des vostres et de celles de della et vous assurés que vous n’avés amy au monde quy vous ayme à l‘esgal de moy quy vous bèse ung million de fois les mains. C’est Vostre humble amy à vous servir. Henry de La Tour A Sedan, ce 4e mars96. Archives nationales, 1 AP 434/10 8 Eté 1596 à M. de La Trémoille 94 Philippe III avait ordonné au comte de Fuentés, gouverneur des Pays-Bas, d’envahir la Picardie. Le Catelet et La Capelle tombèrent entre les mains des Espagnols en juin, Doullens le 24 juillet 1595 et Cambrai le 7 octobre. 95 Benjamin Aubery (1566-1531), sieur du Maurier, un huguenot, chargé d’affaire du duc de Bouillon auprès de Henri IV. 96 Cette lettre elliptique ne portant pas de millésime, nous ne saurons jamais avec certitude où la situer. 26 Monsieur, j’estois en peine pour n’avoir ressu aucunes de vos lettres depuis nostre séparassion de Folambray97 quoy qu’il fut venu plusieurs des vostres en ceste Cour. J’ay bien fort approuvé l’assemblée en tous ses remèdes convenables pour obtenir du Roy l’exécution de ses promesses aux choses concernant le repos de ceulx de la Religion, aïant jugé nécessaire que les moiens propres fussent jugés par un, par un chacun afin que la France fut plus esmé par le nombre, d’y pourvoir et aussy que plusieurs l’obligeassent en y portant leurs opinion de les maintenir et ay veu qu’un consentement naturel, ne le porteroit qu’à ce que la Religion les obligeoit et non à quelque avantaige d’en particulière et qu’estant mené par chose le juste que nous ressentirions les effets de la main de Dieu semblables à ceulx du passé. Mon opinion n’est donc guère changé, ny ma résolution à porter aux plaisir ce que je tiens an despost de la main de Dieu pour on service et le maintien des siens. Mon debvoir me mena au camp de La Fère98 pour recepvoir les commandemens du Roy, ainsy que, par deux ou trois despesches, il me l’ordonnoit. Le siège de Calais arriva et mesme debvoir m’obligea à ne l’abandonner. Le voïage d’Angleterre se déllibéra et s’exécuta en mesme jour99 où le prosfict, et présent et à venir de ceulx de la Religion, me le feit plus gaiement entreprendre. Le succès en a esté agréable au Roy, qui a toutes sortes de nécessités sur les bras, lesquelles m’arrestent, veu que je n’ay nulle générale ni solussion, qui m’en puisse retiré, me randant tous les jours contre mes passions première, qui me mesnroient au galot au souvenir du mauvais traictement que j’ay receu et du peu d’espérance que j’ay d’avoir du ga[...] et que je fais, mais considérant que la cause de Dieu est simple et que quoy que je trompasse les hommes d’une apparence de zelle public et de Religion, que Dieu manifesteroit en me chastiant l’hypocrisie de mon coeur et aurois attiré beaucoup de mal sur toutes les Eglises. Le Roy trouve juste le remède à nos plaintes, se plainct luy mesme de la longueur que l’on y apporte, sçait que d’y estre esmer luy /2/ est nécessaire pour l’en faire souvenir parmy tant d’autres affaires qu’il a et veut le faire sans délay. Ceste déclarassion avec beaucoup de preuve qu’il en rand doibvent amener Messieurs de l’assemblée d’en atendre les esfects pour satisfaction à toutes sortes de personnes de l’intégrité de leurs intentions. J’ay veu vous tesmoigner tousjour qu’il n’y avoit personne au monde qui vous fut plus affectionné que moy, ni qui rendit plus de véritable effects de son intention que moy, que vostre grandeur m’estoit plus chère que la mienne et lors que je verray certainement le chemin que vous y voudrés tenir, j’y rendray ce que vous a promis Vostre humble cousin à vous faire afectionné servisse. Henry de La Tour Jé esté contrint de faire copier ma lettre par ce qu’elle estoyt sy mal escrite que je crins que ne la puissiés lyre100. Archives nationales, 1 AP 434/17 9 1er février 1598- Châtellerault à? Messieurs, j’ay resceus vostre lettre, je vous puis asseurer que je n’ay auscune trouppes qui tienent la campagne, ayant il y a longtemps licencié sellon que le Roy m’avoit commandé >>>> >>>> pour son service. Je tiens fort raisonable que les >>>> de vostre ville soit conservé en >>>>>> du passage élogné de toutes trouppes de gens de guerre et que vous soyez soulager de telles incomodités, puisque>>>>>> >>>>>>> >>>>>> voir naistre là occasions pour vous pouvoir servir & procu>>>> à 97 Dans cette petite ville de Picardie, Mayenne avait fait le 24 janvier 1596 sa soumission à Henri IV. 98 Pour répondre à la chute de Cambrai, Henri IV avait entrepris au mois de novembre 1595 le siège de La Fère, place fort que Mayenne avait livrée à l’Espagne. La Fère se rendit le 22 mai 1596. 99 A l’annonce de la prise de Calais le 25 avril 1596 par les Espagnols, Henri IV décida d’envoyer le duc de Bouillon en Angleterre pour obtenir l’appui de la reine Elisabeth. Le traité fut signé le 24 mai 1596. 100 Seul la formule de politesse et cette annotation sont de la main du duc de Bouillon. 27 son >>>>>, à quoy je vous tesmoigneray les effects de mon affection en vostre particulier lorsque vous le voudrés promectre en >>>> >>>>>>> à tout les subjects du Roy, quand je verray que mes soings >>>>> >>>>>>>pour vous servir >>>> >>>>>>> soulagement, j’espère qu’il adoucira les souffrances du pauvre peuple ne seront plus sy rigoureuse qu’elles ont esté, par le bon ordre que Sa Majesté metra en ses affaires & particullièrement au paiement de ses gens de guerre, à quoi elle travaille autant qu’elle >>>>> le >>>>>et >>>>>>>> de ses bons subjects. Assurés-vous, je vous supplie, que vous n’avés amy en ce monde quy s’employe plus volontier que moy és choses où vous >>>> >>>>>> >>> en >>>> >>>, après vous avoir humblement baise les mains, je prieray Dieu, Messieurs, qu’il vous tienne en sa sainte garde A Châtellerault, ce premier février 1598. Vostre humble et affectionné amy à vous fère service. Henry de La Tour Messieurs encore que je n’ay aucunes trouppes sur, je ne laisse de vous envoyer une lettre que vous pourrés >>>>>>>>>>>>>>>>>>> quy >>>>>>>>>> Archives nationales, 1 AP 434/12 10 11 février 1598- Châtellerault à Messieurs les échevins (?) de la ville de Poitiers Messieurs, je sçay combien le Roy affectionne la ville de Poictiers et combien il chéri le repos et soulagement de ses subjects quy y sont. C’est pourquoy ayant sceu que vous esties logés avec des trouppes és environs, je vous y bien vouleu faire celle-ct, pour vous donner cest advis de l’intention de Sa Majesté ; vous assurant qu’elle n’entend qu’auscune trouppes quy se lèvent marchant pour son service, aprochant lad. ville, n’y prenne auscun logis és environs d’icelle et que vous luy ferés ung service fort agréable de vous en esloigner le plus que vous pourrés et de ma part de vous en prié de toutte mon affection, en me voulant promettre que ma présente recommandation aura quelque pouvoir en cella sur vous. Je ne vous feray plus longue lettre, me recommandant ç vos bonnes grâces, je suis Vostre humble et afectionné amy.101 Henry de La Tour A Châtellerault, ce 11e feb. 1598 Archives nationales, 1 AP 434/13 101 Seule la formule de politesse est de la main du duc de Bouillon. 28 LETTRES A ELISABETH DE NASSAU ANNÉES 1594 – 1596 Le Fonds Rohan-Bouillon à la côte 273 AP 180 conserve quelques lettres adressées en 1594, 1595 et 1596 par Henri de la Tour d’Auvergne à Elisabeth de Nassau. Henri de La Tour d’Auvergne après la mort de sa première épouse Charlotte de La Marck, se rendit à Paris pour obtenir l’appui de Henri IV contre les prétentions du comte de Maulévrier et du duc de Montpensier. Lors de ce séjour à la Cour, il remarqua une jeune cousine de son épouse : Elisabeth de Nassau qui était venue en France avec sa belle-mère Louise de Coligny et sa jeune sœur Charlotte-Brabantine. Henri IV vit tout l’intérêt politique qu’il pouvait tirer de ce mariage et l’appuya. Le 6 octobre 1594, Henri de La Tour d’Auvergne demanda à Maurice de Nassau, chef de la Maison de Nassau, la main de sa demi-sœur Elisabeth. Pendant le reste de son séjour Henri de La Tour d’Auvergne traita ses affaires pendantes. Le 11 octobre, il fut reçu maréchal de France par le parlement. Le 24 octobre, il signa un accord avec le duc de Montpensier où moyennant la cession de Jametz et de quelques autres terres, celui-ci renonçait à tous ses droits sur Bouillon, Sedan et Raucourt102. Enfin, le 25 octobre, le Roi lui conféra le commandement de l’armée de Champagne. Au début du mois de janvier 1595, Henri de La Tour d’Auvergne à la tête de l’armée de Champagne s’empara des places d’Ivois, La Ferté-sur-Chiers et Chauvency. Il fut rejoint en cette place par la comte Philippe de Nassau à la tête de 3 000 hommes de pieds et de 5 cornettes de cavalerie. Elisabeth de Nassau arriva enfin à Sedan. Le 16 février 1595 le mariage fut célébré par le pasteur Jean Tenans. Henri de La Tour d’Auvergne la quitta à la fin du mois pour se rendre à Paris auprès du Roi. Au printemps 1596, Henri de La Tour d’Auvergne fut envoyé en Angleterre pour conclure avec la reine d’Angleterre un pacte de défense contre l’Espagne. Après de dures négociations un traité fut conclu à Greenwich (16/24 mai). A la fin du mois de mai, il retourna auprès de sa jeune épouse qui était enceinte de quatre mois. Henri de La Tour d’Auvergne à la fin du mois d’août fut envoyé à nouveau en Angleterre pour la ratification du traité de Greenwich. Le 1er septembre, il rencontra la reine Elisabeth. Le 8 septembre elle ratifia le traité conclu au mois de mai. Henri de La Tour d’Auvergne espérait retourner à Sedan pour assister à l’accouchement de son épouse, mais pressé par les commandements “ absolus et réitérés ” du Roy, il dut le 16 septembre s’embarquer pour la Hollande. Pendant que son époux négociait un traité à La Haye, Elisabeth de Nassau accoucha seule à Sedan dans le courant du mois d’octobre d’une fille : Louise. Le 4 novembre, elle comptait à sa sœur comme elle fit “ des couches aussy tristes qu’il s’en fit jamais, éloignée de tout ce que j’aimais le mieux au monde ”. La contagion sévissant, elle ne vit “ personne durant ce temps ”103. Henri de La Tout d’Auvergne revint en France au mois de novembre et rejoignit le 11 décembre à Rouen Henri IV. 11 xx octobre 1594 - Paris à Madamoyselle Isabelle de Nassau Ma Mestresse, 102 Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, op. cit., tome II : Preuves, p. 794-795. 103 Lettre du 4 novembre 1596 d’Elisabeth de Nassau à sa sœur Charlotte-Brabantine. Archives nationales, 1 AP 333/11. 29 Je eu ce bonheur de rancontrer Monsieur de Monpansier104 près du Roy quy m’a fort […] aime, que de m’avoyr adverty d’une despesche, qu’il vous fet, pour vous assurer de la continuassion de mon très fidelle servisse, et de la plainte que je fes de n’avoir nuls de vos commendemens, par lesquels je puse vous tersmoigner que je né rien de cher que vostre bonne grasse et l’observassion exacte de vos volontés. Ce prince me montre infinies preuves de son amitié. Il a résoulu [de m’aider] estant très afectionné serviteur. J’ata[nds] Vassignac105, espérant qu’il m’assurera au temps qu’il plera à Madame vostre bellemère et à vous de servir à quelque espérance que vous pourriés bientost voir Monsieur vostre frère106, mes je ne vous [puis] an assurer. L’admiral de Nassau ne viendra point107. Le Roy a fet fort bonne chère à vostre cousin. Arestés an vostre mémoire le souvenir de mon afection et pour vous mesmes et non par mes mérites, vous vous santirés obligée de m’aimer, heur108 sans lequel je n’en veus recepvoir d’autre et avec celluy là nul autre ne me peut estre desnié, vous besant mille et mille fois les mains à quallité de Vostre très humble et très obéissant serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 273 AP 180/1 12 Henri de Bourbon, duc de Montpensier à M. le prince Maurice de Nassau Monsieur, ayant sceu de Monsieur de Bouillon, mon cousin, le désir qu’il a d’estre favorisé de vostre alliance et continuer le contentement qu’il luy a pleu recevoir de la mienne par le mariage de Mademoiselle Elisabet, vostre sœur, ma cousine ; je n’ay voulu faillir de rendre ce respect à l’honneur qu’elle a de vous estre si proche, d’en défférer la résolution à vostre avis, comme y ayant le principal intérest et auquel elle aportera toujours l’obéyssance qu’elle doit. Ne voulant toutesfois, Monsieur, obmettre à vous représenter combien la personne d' ’n tel seigneur nous doit estre chère et que son mérite est, ce me semble, préférable au plus grand Prince du monde, outre que sa Maison est tellement recommandée en la France qu’elle y est mise et estimée entre les plus grandes. Vous avez tant de cognoissance de sa qualité et valeur, que je panserois offenser vostre bon jugement si je m’essayois de vous en ogmenter la bonne opinion. Je vous supplie donc très-humblement, Monsieur, après toutes ces considérations qui, je m’assure, seront bien receus de vous, d’avoir agréable la perfection de ce mariage, j’apporte tout le consentement que je puis, croyant aussy que, s’il vous plaist d’y apporter le vostre, celuy de ma dicte cousine vostre sœur s’y conformera avec contentement, pour recognoistre assés le bonheur qu’elle peut recevoir en la compagnye d’un si digne et galant Seigneur, que je n’ayme certes moins qu’un propre frère, et le tenant en cette qualité, j’estimeré aussy pour le plus grand bien qu’il me puisse arriver qu’avec vostre permission il s’unisse avec ce que j’ayme autant qu’une propre sœur, dont je luy rendré tous les signalés effects qu’il me sera possible en cette occasion. Escusez, je vous supplie, Monsieur, mon importunitée et croyez, s’il vous plaist, que je désire en toutes choses vous tesmoigner que vous êtes non seulement un des Princes (car le nombre en 104 Henri de Bourbon (1573-1608), paire de France, duc de Montpensier, seigneur de Champigny-sur-Veude, gouverneur et lieutenant-général pour le Roi en son duché de Normandie, fils de François de Bourbon, duc de Montpensier et de Renée d’Anjou, était le cousin-germain d’Elisabeth de Nassau, fille de Guillaume le Taciturne et de Charlotte de BourbonMontpensier. Le duc de Bouillon avait signé avec lui un accord touchant la succession de Charlotte de La Marck dont il était également cousin. 105 Gédéon de Vassingnac, sieur de Creysse, un huguenot, d’une des plus anciennes familles du Limousin, était un homme de confiance du duc de Bouillon. Il fut impliqué dans la conspiration de 1605 et fut condamné à mort par contumace. Il s’était opportunément réfugié à Sedan et fut compris dans les lettres d’abolition accordées le 6 avril 1606 au duc de Bouillon par Henri IV. 106 Maurice de Nassau (1567-1625), stadholder des provinces de Hollande, Zealande, Gueldre, Utrecht, et Overijssel, fils de Guillaume le Taciturne et de sa seconde épouse Anne de Saxe. 107 Justin de Nassau (1559-1631), né de la liaison de Guillaume le Taciturne avec Eva Elinx. 108 Heur : bonheur. 30 est trop petit), mais unes des personnes du monde à qui je veux rendre autant de services et estre estimé de vous, Monsieur, pour, Vostre bien humble allyé et serviteur. Henri de Bourbon e A Paris, ce 5 octobre 1594. Archives de la Maison d’Orange-Nassau 109 13 10 janvier 1595 - Avançon110 à Madamoyselle Isabelle de Nassau Ma Mestresse, C’est à ce coup que je me promets de jouir de vostre désirée présance. Je usse anvoyé plus de gents, mais [vous] n’avés point d’ennemis sur le chemin. Pour la parade, excusés, m’an alant, après demin, commencer la >>>>>>> où je trouveray mille ocasions à […] joure afaire de tout ce que je pou[rrois] avoir d’hommes. Commandés au […], à Vassignac tout ce qu’il faudra qu’ils fassent pour bien servyr Madame la princesse et Madamoyselle d’Orange. S’il m’est possible, je vous iray recepvoir à Châlons111. Mandésmoy toutes vos volontés, n’aîant nul autre désir que les suivre et vous tesmoigner combien parfetement je vous sçay aimer. J’espère que vous voirés M. vostre frère. Tout aussy tost que j’an seray assuré, je le vous manderé. Quel contantemant sy nous pouvions estre honoré de sa présence à nos nopces. Je feray commanser nos annonces dimanche. Sy vous escrivés à Monsieur de Monpansier, supliés le d’anvoier à Sedan celuy qu’il veut faire trouver à nos nopces, pour lesquelles je voudrois fort que vous me mandissiés précisémant vostre avis /2/ de la fasson que vous désirerés que l’on s’y gouverne et de la despanse que l’on y fera. Vous serés servye ainsy que vous le désirerés. Vous me ferés plésir de n’user point de discression an cella d’autant que vous plère est ce que je souhete. Il y a longtemps que du Maurier112 a vos perles. Commandés-luy de les vous anvoyer. Je m’esbaïs que mon homme que j’avois anvoyé à Turenne, lorsque j’estois à Paris, ne soit ancores de retour. Il ne peut plus tarder. Je ne sçay sy mon cœur, mes yeux ou ma langue pourroit assés esprimer l’heur que je me promets an vostre compagnie, et le debvoir qu’ils randront de pourvoir et prévoir à tout ce quy sera de vostre contantement, afin que nos afections unies elles s’antrehaydent à aucmanter les plésirs des choses agréables et à surporter les annuieuses, fruits que l’on ressant habondamment lorsque Dieu estant sa bénédiction an randant deus âmes sesparées unies. Venés-donc prandre possession de ce que vous vous aquiterés avec assurance, que vous le posséderés antièremant. Je vous bese mille et mille fois les mains. C’est Vostre très humble et obéissant serviteur. 109 Cette lettre a été publiée par Guillaume Groen van Prinsterer, Archives ou Correspondance inédite de la Maison d’Orange-Nassau, 2e série, tome II : 1584-1599, 1857, p. 324-325 110 Avançon au Sud-Ouest de Rethel. 111 Châlons-sur-Marne. 112 Benjamin Aubery, sieur du Maurier, un huguenot, né en 1566 au château du Maurier près de La Flèche (Sarthe), après avoir été au service du prince de Condé et de Duplessis-Mornay, devint en 1592 l’intendant de Henri de La Tour d’Auvergne. Sur le plan personnel, les deux hommes ne parvirent jamais à s’entendre. Leurs divergences politiques étaient flagrantes, le duc prônait le devoir de révolte et le droit des Grands de conseiller le Roi, du Maurier prêchait l’obéissance et la soumission à un Roi absolu représentant de Dieu sur terre. Du Maurier quitta le service du duc de Bouillon après la soumission de celui-ci en 1606. Il lia alors sa fortune à celle de Sully. Après la disgrâce de celui-ci, il fut ambassadeur à La Haye de 1613 à 1624. Il mourut dans sa maison du Maurier le 10 août 1636. Claire MARTIN, Craindre Dieu et servir le Roi. Benjamin Aubery du Maurier (1566-1636), ambassadeur protestant du Très chrestien, thèse de l’Ecole des chartes pour obtenir le diplôme d’archiviste paléographe, 2003, 3 vol et « Protestantisme et diplomatie à l’aube du Grand Siècle : Benjamin Aubery du Maurier (1566-1636), ambassadeur de Louis XIII à La Haye », B. S. H. P. F., tome 151, avril-juin 2005, p. 265-297. 31 Henry de La Tour e A Avançon, ce 10 janvier. Archives nationales, 273 AP 180/4 14 xx janvier 1595 - Sans lieu A Madamoyselle d’Orange Ma Mestresse, Sy mes lettres me font ce bon ofisse que de vous estre agréables et qu’elles vous peuvent a[ssurer de] la croyance de la fidellité de mon servisse [et vous] rendre pour bien heureuses, an satisfesant à ce que je désire plus que ma vye. […] les croye mériter ce bien là de vous re[…] pouront obtenir que par vostre seulle libérallité, estant les choses vraiemant données que nous ne méritons pas, comme de toute présomption. Je ne vous représen[terais] rien du mien, mes tout du vostre par vous convier à m’aimer au constant donc la divers[…] pleses vous à me reconnoître pour mien, ce qui toutes fois est vostre et annuiés vous en vos condission présente, qui vous presse de la >>>>> pour bientost lier nos âmes, par lequel […] nous jouissions d’ung antier contantement. J’ay grand anvie d’aprandre vostre partemant pour Paris, afin que Madame vostre belle-mère puisse bientost avoir fet ses affaires, m’estant avis que Vassignac ne peut plus guières demeurer. Je seray, s’il plest à Dieu, après demin bien près des troupes que meine vostre cousin113, où, soubs vostre aveu, j’espère que sy nous trouvons les ennemis, que le bras de vostre serviteur se fera santyre et qu’ils connoîtront que Dieu l’aime. Favorissés de vos veus et l’aimer comme il vous a pleu le luy prometre. Vous besant ung million de fois les mains, c’est Vostre très humble et obéissant serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 273 AP 180/2 xx février 1595 - Sans lieu à Madamoyselle Isabelle de Nassau Ma Mestresse, Toutes les cérémonies, que vous avés désirés, ont esté gardées et y a on satisfet par le rettour de Vassignac, quy vous porte des lettres et s’il vous plest prandre la peine de jester les yeux sur les inco[nvénients] vous voyrés que tout ce réussy [selon] mon désir et vous, je croiré sellon, le vostre, puisque vous m’avés fet cest honneur de me le dire volontiers, que j’espère vous acroytre par la fidellité de mes servisses et mes dé[sirs] à ne despandre que de vous et avoir pour seul object vostre volonté. Le conte Philipe et moy parlasmes tout l’après disné de vous, à quy je fes querelle sy vous prenés plus long terme pour partir que le quinsiesme de ce moys. Quoy dis-je querelle, ma Mestresse, il failloit vous faire ceste ofance pour vous la resparer an vous supliant me pardonner sy l’amour m’a randu sy osé, mes vostre bonté me garantira de l’apranttissage de vostre courous plustost que vous de ma témérité, de laquelle il m’a faillu estre acompagné pour vous dire que je suis et seray jusques à la mort, Vostre très humble et obéissant serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 273 AP 180/3 113 Le comte Philippe de Nassau-Vianden, cousin de Maurice et d’Elisabeth de Nassau, rejoignit au début du mois de janvier 1595 Henri de La Tour d’Auvergne avec une troupe de 3 000 hommes de pieds et 5 cornettes de cavalerie. Il mourut le 2 septembre 1595 des suites d’une blessure reçue lors d’un combat contre les troupes espagnoles. 32 15 xx février 1595 - Sans lieu à Madame la duchesse de Bouillon Ma Mestresse, Le temps qu’il fit, le jour que je perdis vostre présence, m’esllonsna le courroux du ciel contre moy, d’abandonner celle qu’il a tant aimée, qu’il luy a voulu donner ce qu’il avoit conservé despuis sa créassion114. La crainte de la continuassion de son courroux et le désir de revoir ce pourquoy je vis, m’a fet plus aiséemant prandre le moyen que la sayson m’osfre d’atandre les esfects de mars pour rasproscher mon cœur de son cœur. Je seray aujourdui à Ivois pour y establir, là et aus autres garnisons115, les moyens pour metre toute l’armée à couvert, jusques à ce que la riguer de l’iver soit passé. Sy mes mandemens peuvent quelque chose pour essaimer les forces. M. du Perron n’aura repos qu’il ne soit arivé, et moy que je ne vous tienne antre mes bras et rameine avec moy tous ceus que M. de Bours116 a désiré. Que je ne sois eslongnée de vostre souvenir et de l’assurance que je vous ay supliée d’avoir qu’il n’y a nulle autre amour comparable à celle qui vous a vouée Vostre très humble et très obéissante $$$$ $$$$ $XX$ $XX$ $$$$ $$$$ Archives nationales, 273 AP 180/5 16 11 août 1595 - Montreuil117 à Madame de Bouillon Vos dernières lettres m’ont resjouy y aïant apris le commancement de vostre guérison. Je croy que les ennemys ne viendront point issy, quy sera cause que je vous voire bien tost, s’il plest à Dieu. Je ne vous diray pas quelles sont les nescessités par dessa, mes je vous assure qu’elles y sont telles qu’elles ne se peuvent dire plus grandes. Mandés-moy comme vont nos fortifications et la moisson ; et vous ay anvoyé des lettres pour nos capitenes de chevaux léger afin qu’ils servent della s’il an est besoing. Monsieur de Monpansier est à Roan, quy y a esté fort bien ressu. Nous n’avons point de nouvelles du Roy, ny de Holande. J’esperois qu’en estant prosche, que nous an auryons à toutes heures et avis, mes je n’ay aucunes lettres il y a plus d’ung mois. Vostre frère est à La Haie. Je croy que Madame l’Eslectrisse sera fort marrie de n’avoir eu qune fille118. Je fort gouverné Madame de Chastillon quy s’en va à La Roschelle. J’espère que ceste année sera la pri de nos misères. Adieu $ $XX$ $ 114 Le 16 mars 1595, Louise de Coligny écrivait à Guillaume de Nassau : “ Vous avez déjà entendu comme vostre cousine et chérubine a changé de nom, le 16 du mois passé, et est à présent Madame la duchesse de Bouillon, fort heureuse et fort contente, pour avoir un mari qui en toute sorte lui rend preuve de la plus parfaite amitié qu’il lui porte ”. Paul MARCHEGAY et Léon MARLET, Correspondance de Louise de Coligny, princesse d’Orange (1555-1620), op. cit., p 122. 115 Le duc de Bouillon avait pris Ivois, La Ferté-sur-Chiers et Chauvency entre le 14 et 24 janvier 1596. 116 Josias de Montmorency, seigneur de Bours, 117 Montreuil (Pas-de-Calais). 118 Le 10 juin 1596, Louise-Julienne de Nassau avait donné le jour à Heidelberg à sa seconde fille, Catherine-Sophie, décédée célibataire le 28 juin 1626. 33 A Montreuil, ce 11e aoust. Archives nationales, R2 53 17 9 septembre 1596 – Londres A Madame de Bouillon Je vous assureré que la cérémonie du sermant de la ligue fut fet hier119, avec tant de desmonstration de joyes et d’honneur qu’il ne s’an peut dire devantage. Je dînay avec la Roine et le long du dîner me parla souvant de vous et sy mignardemant, qu’elle m’an fit rougir. Je dispute pour ne passer an Holande et dans la fin de ceste sepmayne partir pour vous aller trouver, avec ung désir incroyable de vous voir. Je vous rescommande mes fortificassions. Sy vous avés afayre d’argent, mandés à du Maurier de vous an fayre tenir jusques à mille escus, et luy mandés que il le fasse du premier qu’il recepvera et de celuy que je luy ay commandé de monoyer. Pressés et M. Destivaus120 et les ouvriers de vier de diligence. Je n’ay eu nouvelles de vous depuis le petit pasqué. Pischemin m’a assuré avoir veu Menou quy l’a assuré que vous vous portiés bien, quy m’est ung fort grand contentement de l’antandre. Je te prie, mon cœur, songés à vous pour l’amour de moy. Je croy que vous aurés à cest heure toutes les fammes quy vous font besoing et que Madame de Pesch est /2/ à Sedan et n’ay eu nulles nouvelles de Hollande, despuis mon arivée en ce lieu, de quoy je suis an peine. L’on dit issy qu’il vient des forces au Roy d’Espaigne d’Italie. Vous le sçaurés, car il faut qu’elles passent par la Lorrene par les premières que vous m’escrirés. Mandés-moy l’estat de mes fortificassions et de la santé de la ville. Je vous donne le bonjour, c’est X e A Londres, ce 9 septembre. Archives nationales, 273 AP 180/8 18 15 septembre 1596 - Londres A Madame la duchesse de Bouillon Mon espérance m’a es[té] rompeus […] prosséder, ravi an [l’espérance] de la chose qui [m’estois le plus cher] quy estoit de vous retorner voir avant vos cousches, mes les commandements du Roy, sy absolus et réitérés sy souvant, que je ne puis me garder de passer an Hollande. Certes, mon cœur, vos doulleurs et mes amuis tiendront compagnie, sinon que Dieu vous donra délivrance et contentement et moy une longue espasse de [temps] avant que mon esprit soit souvent […] de ces craintes. Je me promets que [vostre] amitié sera conduite par le discours que vous avés sur la connoissance que ma condission m’atache à certins debvoirs publics, que je ne puis cesser, quoy que mes afections me poussent à satisfayre à vos désirs. Je prie Dieu que ceste lettre vous ariveroit encore irressolue de n’acroitre vostre travail du desplesir de ne m’y voir point. Je m’assure que je ne tarderé, sy le vent le permet de me resjouir de vostre bonheur et randre ceste /2/ joie commune aus vostres, parmy lesquels je […]. 119 Le reine Elisabeth avait fait le serment le 8 septembre 1596 de ratifier le traité de Greenwich conclu le 26 mai 1596. 120 Louis Destivaulx, sieur de Voncq, un huguenot, était entré en 1572 au service de Henri-Robert de La Marck comme archer. Il était en 1587, capitaine d’une compagnie d’arquebusiers à cheval dans l’armée des reîtres commandée par Guillaume-Robert de La Marck. Il succéda en 1590 à Christophe de Chézelles dans la fonction de gouverneur de Sedan. Il mourut en 1598. 34 Je pars demin d’issy pour partir an Hollande. J’y ay ressu et beaucoup d’honneur et beaucoup de tesmoignage d’amitié. La Roine m’a donné ung fort beau bufet de vesselle dorée. Elle m’a dit vous vouloir ancores donner quelque souvenance121, mes je ne veus point cella. Vous m’ass>és tel plésir de me mander quel est le changement de ma cousine de Roquefeuil, ou an la religion, ou vous encore, mon petit cœur, que soudain que vous serés acouschée, sans atandre de vos lettres, sinon vostre soin qu’un homme parte pour me venir adverty et quoy quy soit venu, sera très bien venu, certes, sy mes pansées vous estoyent connues, vous les voiriés perpétuelles vers vous. Courage-donc et bannisés toutes sortes de larmes et de craintes. Bon jour, c’est $ $XX$ $ e A Londres, ce 15 septembre. Archives nationales, 273 AP 180/6 LETTRES A MADEMOISELLE DE NASSAU ANNEES 1595- 1598 A la suite de son mariage en 1595 avec Elisabeth de Nassau, Henri de La Tour d’Auvergne adressa neuf lettres à sa jeune belle-soeur Charlotte-Brabantine de Nassau. Comme nous l’avons dit dans l’avant propos, ces lettres ont été publiées en 1875 par Paul Marchegay122. 19 10 juin 1595- Abbeville à Mlle d’Orange Madamoiselle ma soeur, je ne vous donneré cest avantage d’avoir manqué à une seulle aucasion de vous assurer de mon servise que je ne le fasse et serois bien plus aise sy quelque digne esfect s’osfroit de vous tesmongner que nul autre plus que moy ne vous peut estre tant aquis. Vous aurés tant de nouvelles de vostre sœur, que je ne vous an manderé point. Plut à Dieu que quelque digne subject vous apelast dessa la mer. Je n’aurois an nulle contre chose tant de contantemant qu’en celle là sy elle s’osfre Dieu sçait sy je la leure perdre. Aimés-moy tousjours ainsy que vous le l’avés promis et vous serés servie de Vostre humble frère à vous faire afectionément servisse. Henry de La Tour A Abbeville , ce 10e juing. Archives nationales, 1 AP 434/25 20 Fin juin ou commencement de juillet 1595 à Mlle de Nassau Madamoiselle ma soeur, l’assurance qu’il vous plest de me donner de vostre bonne grasse m’est sy chère, que j’estimeré mes actions très heureuses lorsqu’elles pourront servir à vous tesmongner le désir que je de vous faire servisse. Je suis marry que l’exemple de la petite Esquencour123 soyt si 121 Elisabeth de Nassau était la filleule d’Elisabeth Ière d’Angleterre. 122 Paul MARCHEGAY, Lettres d’Elisabeth de Nassau, duchesse de Bouillon à sa sœur Charlotte-Brabantine de Nassau, duchesse de La Trémoille de 1595 à 1628, Les Roches-Baritaud, 1875, 137 p. 123 Paul Marchegay pensait qu’il s’agissait probablement de Claude Averoult, femme de Benjamin de Montmorency, seigneur d’Esquencourt, morte après la naissance de son sixième enfant. 35 souvent proposé à vos yeus pour l’assurance qu’il vous donne aus rigueurs du mariage, quy vous doit en fayre trouver l’atante plus longue. Sans railler, oposés-vous au partemant de Madame vostre belle-mère, quant vous devriez faire la mallade ; et cependant aimés-moi ainsi que ma fidelle afection vous y convie, et croyés que je recercheré vostre contantemant aussy curieusement que celluy-là de vostre humble frère à vous faire service. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/22 21 16 octobre 1595 - Authie124 à Mlle de Nassau Madamoyselle ma soeur, je ne sçay que vous ofrir pour vous pouvoir tesmongner combien je chéris et estime la part que vous m’assurés me donner an vos bonnes grasses, lesquelles je me conserveray par le soing que je veus prandre de faire les choses quy vous pourront le plus plaire. Vous aurés des nouvelles de vostre soeur, que j’espère voir dans cync ou sis jours. Je la solissiteré à n’estre sy paresseuse anvers vous, qu’elle m’assure aimer plus qu’elle mesme. Je ne vous puis dyre des nouvelles des dammes, n’an voyant, mes je croy qu’elles se pourroyent rassambler à Amiens cest hyver. Commandés-moy et vous serés servie de Vostre humble frère à vous faire servisse. Henry de La Tour A Atie, ce 16e octobre. Archives nationales, 1 AP 434/26 22 23 décembre 1595 - Sedan à Mlle de Nassau Madamoiselle ma soeur, si les souhets avoient lieu, je changerois de moyen pour vous assurer de la puissance que vous avés sur moy ; et, au lieu de ce foyble papier, ma bouche vous exprimeroit les afections que je de vous compleire. Je voudrois qu’outre mon désir que quelque digne subject vous conviast d’estre Francese. Il y a deus mois que je suis issy, ne pouvant faire estat du temps que j’y pourré desmeurer. Puisque vous le croyés bon mary, je vous assureré que je m’aime mieus issy qu’ailleurs. Les ennemis nous menassent du siège, où vostre soeur veut être, et a desjà fait ung bastion des hotées de terre qu’elle a porté, quy est bien un autre poids que le mortier duquel M. Constants125 vous a tant loué l’axion. Si vous ne m’aimés bien fort, je vous renonce, et que vous ne vous assuriés de mon servisse avc la fidélité de votre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 23e dessembre; Archives nationales, 1 AP 434/23 23 124 125 Près de Doullens en Picardie. Gouverneur de Marans en Aunis. 36 23 février 1596 - Sedan à Mlle de Nassau Madamoiselle ma soeur, vous rofrir sy souvant ce quy est à vous, samble n’estre bienséant, mes puisque me privés de vos volontés et que je ne trouve de quoi vous servir, il faut que je me serve de ce foyble moyen pour vous assurer que il n’y peut avoir chose tant à vous que moy. Vostre soeur vous dira de ses nouvelles, mes je vous an diray de M. de Monpansier qui est ung inconstant amoureus. Ayant esté sur le point d’espouser Madamoyselle de Longueville, au mesme instant l’on lui a parlé d’une italienne, quy a tellemant esbranlé ceste première amour que je ne sçay si je le vous puis dire amoureus. Je désirerois de tout mon coeur qu’une bonne ocasion vous rapelast an France, ne cuidant que nulle autre terre ne soit indigne de vous avoir. Nous sommes privés il y a longtemps de vos nouvelles. L’adresse de Paris est sûre, quoiqu’elle soit longue. Usés de moy et de tout de que je puis comme du vostre, et vous aurés les servisse que vous a promis cely qui vous bése ung milion de fois les mains. C’est Votre humble frère à vous faire servisse. Henry de La Tour A Sedan, ce 23e febvrier. Archives nationales, 1 AP 434/21 24 28 mai 1596 - Gravesende à Mlle de Nassau Madamoiselle ma soeur, ce ne sera pas pour ce coup que j’auré ce contantemant de vous voir, mais je suis en espérance d’y rescouvrer bientost. Vous sçaurés des nouvelles de vostre soeur, des quelles je m’assure que vous serés bien aise, elle aura eu des vostres par le laquais de Madame la princesse126 ; je croy ne la voir de deus mois. Nou avons fort veu la court d’Angleterre127, où je n’ay pas veu de sy belle fille que vous, n’aiant pu croyre que vous soiés devenue sy grande comme l’on m’a dit. Vous avez perdu Madame votre grand-mère128. Je croy que vos yeus en seront bientost essuiés, sans cette croyance je vous consolleroys. Si le servisse que je désire vous faire n’estoit rescompansé de vostre amitié, je vous acuseroys de mauvés naturel, n’aïant pansée plus ordinayre qu’à connoître ce quy pourroit plaire. Je vous bése ung milion de fois les mains. C’est Vostre humble frère à vous faire service. Henry de La Tour A Gravesende, ce 28e may. Archives nationales, 1 AP 434/24 25 janvier 1596 à Mlle d’Orange, Madamoyselle ma soeur, ce m’a esté ung extrême plesir d’avoir sceu de vos nouvelles et d’avoir veu que je soys continué an vos bonnes grasses, lesquelles j’estime tant que l’eslongnement m’an 126 Louise de Coligny, princesse d’Orange. 127 L’ambassade du duc de Bouillon en Angleterre, puis aux Pays-Bas, eut pour résultat une ligue offensive et défensive entre ces puissances et Henri IV contre l’Espagne. 128 La duchesse de Montpensier, Catherine de Lorraine, est morte le 6 mai. 37 seroyt insurportable. Aimés-moy donc comme vous me l’avés promis, et vous serés servie de moy jusques au tombeau. Je vous assure que vostre soeur n’a contantemant esgal à celluy qu’elle reçoit an aïant de nouvelles, c’est pourquoy je vous exorte à ne l’an priver. Ne lassés-vous à luy escrirre ; j’espère la voir bientost. Je vous suplie me commander comme à celuy quy vous est tout aquys, vous bésant mille fois les mains. L’on me mande que Monsieur de Monpansier129 se marie avec Madame. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/27 26 10 mars 1597 - Turenne Mademoiselle ma soeur, n’accusés pas mon oubliance, mais la perte de mes lettres qui m’ont privé du moyen de vous rafreschir les assurances que je vous ay données de mon servisse, estant marry que les ocasions ne puisse seconder ma volonté pou vous estre aussi utile comme je m’y sans obligé par l’estime que je fais de tant de perfections qui vous possédent. J’atans votre soeur ici. Tout les anvirons jusques à la mer l’atandent pour la randre juge des sincérités de notre noblesse, qui veut desployer tout ce qu’ils on d’art et de gentillese pour lui tesmongner qu’elle est la bien venue. Les villes parent leurs portes et les habitans leurs coeurs pour en dire de mesme. L’er qui est bien froit, aiant ma robe de loup vous escrivant ceste lettre, sera reschaufé /2/ par les feus tesmoing de leur alégresse. Que le Verhot130 soit tesmoing que ceus qu’ils ont fets à son mary, pour l’aliance, doit porter anvie et se resjouir de ce que ceste gentille princese sera si bien ressue ; mes que seroit-ce sy le rossignol chantant nous amenoit, c’est Brabantine, pour luy chanter son hymen. Passiance, c’est trop dit. Vous n’orés que cella pour ce coup, avec assurance que vous pouvés tout sur moi, quy vous bése mille fois les mains. C’est vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Turenne, ce 10e mars. Archives nationales, 1 AP 434/20 27 fin mars 1597 - Turenne Mlle de Nassau Madamoiselle ma soeur, combien de fois avés-vous dit : “ n’esse pas une chose estrange de n’avoir aucunes lettres de Monsieur de Bouillon. Je suis ressolue de ne luy plus escrire ”. Tous ces sermans cesseront par la preuve que ceste cy vous randra qu’il n’y a rien soubs le ciel quy vous honore à l’esgal de luy, ni duquel les pensées soyent sy souvant arestées à connoitre les moyens qu’il a de vous servir. Ung paquet perdu m’a fet acuser de paresse, et despuis mon eslongnemant an ce lieu où toutes choses estoyent arestées pour tesmongner à vostre soeur l’honneur et la bien voullance que toutes cs provinces luy randent, adoussissant par là l’aspresté de l’hiver durant lequel elle a fet son voyage et amoyndrissant la hauteur des montagnes ennemies de son carosse, elle bien venue et tous deus cerchons les plus dous plésirs pour nous garder de nous ennuyer. Combien de fois désirons-nous de vous voir près de nous an pareil exercisse ! Vandame vous contera toutes nouvelles et de celles de vostre niesse quy croit an beauté, creignant qu’elle fera cascher le soleil par sa beauté /2/. Il nous tarde fort que nous ne l’anvoyons, et 129 Ce projet de mariage du duc de Montpensier avec la soeur de Henri IV, n’aboutit pas. Le duc épousa le 15 mai suivant Henriette de Joyeuse. Catherine de Bourbon épousa en 1599 Henri de Lorraine, duc de Bar. 130 Le plus beau quartier de La Haye à cause de la largeur des rues et des arbres qui y sont plantés. 38 que je ne vous puise estre aussy utille comme je panse vos mérites m’y obliger. Croyant que je ne pourai vous randre servisse quy ne soit infiniemant moindre qu’infinimant vous surpassés tout le reste du monde. Je vous bése mille et milles fois les mains an callité de Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Vostre soeur est issy auprès de moy, quy fet la poste. Archives nationales, 1 AP 434/28 28 20 juillet 1597 - Châtellerault à Mlle de Nassau Mademoyselle, je este paresseus à vous escrire et non à vous servir, et an ce de quoy je panse vous tesmongner quelle a esté tousjours mon afection de vous servir. C' est ung mary quy se présente, des meilleures maisons, et en extraction et en biens, de France, quy est M. de La Trimoille. Soudain que je lui pourré dire que vous n' êtes pas liée ailleurs, vous aurez l' ambassade pour prandre temps et lieu de vous voir. Certes, il faut que vous le veniés chercher, ne pouvant, ni le temps ny sa personne, faire le voyage vers vous ; s' il le pouvoit il le feroit. Vostre soeur quoy que preste d’acouscher se trouverra à vostre dessante. Madame notre chère belle-mère ne voudra vous lesser courré la fortune de ce duel sans vous y assister. Vous estes la dernière, elle continueera à s’aquérir /2/ une immortelle obligassion sur nous tous. Vous aurés bientost des nouvelles de vostre soeur ; Dieu sçayt quelle joye quand vous vous resverrés. Il y a fallu ceste nouvelle pour la consoller de la crainte de vostre niesse, aïant la peste tué le fis de Monsieur Destivaus131 dans le chasteau ; mais j’epsère que le petit mesnage se sauvera. Que l’on me mande bientost des nouvelles, afin que cessy ne trayne, cuydant que vous n’an mourrés. Je vousdrois fort que tout doussemant vous conussiés s’il y auroyt moyen, ou par don ou sur ce que vous aurés, de faire mener à vostre serviteur sis canons. Avisez y sagement, estant chose qu’il désire. Certes, ma chère soeur, il me tardera plus qu’à vous que je vous voye dans le lit132. Aimés-moy et vous assurés de mon servisse. C’est Vostre humble frère à vous faire service. Henry de La Tour A Châtelleraut, ce 20e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/20 bis 29 20 juillet 1597 - Châtellerault à M. le comte Jean de Nassau133 Monsieur, s’offrant une occasion de marier Mademoiselle de Nassau avec Monsieur de La Trémouille, il a désiré estre assuré de ses parens, si ceste recherche leur seroit agréable, et m’ayant prié de leur en escrire avant que si engager, je l’ay voulu satisfaire, vous faisant celle-cy, pour vous supplier, comme à l’ung de ceulx à qui ceste honeur doibt estre déféré, de m’en vouloir mander vostre volonté. C’est ung parti avantageux, tant pour la qualité de la perssonne, de sa vertu, que de sa maison. 131 Louis Destivaulx, sieur de Voncq en partie, avait débuté sa carrière sous les ordres du duc Henri-Robert de La Marck. En 1590, à la mort de Christophe de Chézelles, il était devenu le gouverneur de Sedan. Il était marié à Philippe de Vandrehart également d’une famille au service des La Marck. Il mourut au mois de janvier 1598. 132 Henri IV n’accepta qu’avec réticence le mariage de Charlotte-Brabantine de Nassau avec Claude de La Trémoille. Il fallut que Louise de Coligny intervienne en personne. Le contrat fut signé le 11 mars 1598 à Châtellerault et la cérémonie religieuse célébrée le soir même. Les futurs n’avaient eu guère le temps de se rencontrer. Le 13 mars, le duc de Bouillon écrivait à Duplessis-Mornay : “ Les noces sont faites, mais non accomplies, s’y étant passé plusieurs jolies contestations ”. 133 Jean VI de Nassau (1536-1606), comte de Nassau et de Dietz, staathouder de Gueldre et de Zutphen, frère cadet de Guillaume-le-Taciturne, oncle d’Elisabeth et de Charlotte-Brabantine de Nassau. 39 Je recherche en toutes occasions ce que je panse, pour honorer et avancer ceux qui sont de la Maison de Nassau, cuidant le devoir, par l’honeur de l’aliance, que j’y ay pensé. J’atendray de vos nouvelles, Monsieur en intention de vous fère voir toute ma vie que je suy, Monsieur, Vostre humble nepveu et serviteur. Henry de La Tour A Chastelerault, ce 21e juillet 1597. Koninklijk Huisarchief, A 11-XVIIG-2134 1598-1601 Le mariage de Claude de La Trémoille et de Charlotte-Brabantine de Nassau fut célébré à Châtellerault le 11 mars 1598 en présence du duc de Bouillon. Le duc de La Trémoille dut quitter rapidement les bras de sa jeune épouse pour rejoindre Henri IV où celui-ci signa l’Edit mettant fin aux guerres de religion. Au mois de juin, le duc de La Trémoille dut se rendre à Paris pour obtenir les lettres de jussion pour sa pairie. Il les obtint le 3 juin. Mais leur vérification par la parlement par “ haine de la religion ” fut remise après la vérification de l’Edit135. Au mois d’août, il se rendit à Pougues-les-Eaux pour prendre les eaux. Il invita son épouse à aller en leur baronnie de Sully-sur-Loire. Le 22 décembre 1598, Charlotte-Brabantne de Nassau donna le jour à son premier enfant : Henri qui fut baptisé seulement le 15 mars 1601. Le 20 juin 1599, Henri de La Tour d’Auvergne et son épouse vinrent voir le duc et la duchesse de La Trémoille à l’Ile-Bouchard et s’entretinrent avec eux des affaires du parti protestant136. Le 25 juin le duc et la duchesse de Bouillon partirent à Pougues où ils furent rejoint par la princesse d’Orange. Le 7 décembre 1599, Claude de la Trémoille fut reçu en la paierie par le parlement de Paris137. La veille, il avait appris la naissance de ss fille Charlotte. 30 8 juin 1598 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, Tout ce que vous m’ordonnerés sera fet, je travaille pour le Sr. de La Breschetière et y travailleré de tout mon pouvoir. Nous vous souhetons souvant issy où l’on ne dort guières. J’é eu des nouvelles de vostre soeur quy va tous les jours à cheval voysiner. La petite se porte bien. Elle l’a seuvrée sans qu’elle an aye fet cryé chère. Ce sera une terrible commère : elle mort, elle esgratigne tout le monde. Je désire fort que le fruit de vostre vantre soit meilleur. Je vous bése les mains an calité Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Paris, ce 8e juin. Archives nationales, 1 AP 434/39 134 Cette lettre a été publiée par Guillaume Groen van Prinsterer, Archives ou Correspondance inédite de la Maison d’Orange-Nassau, 2e série, tome I : 1584-1599, op. cit., p. 383. 135 Lettre du duc à son épouse du 27 juin 1598, Paul MARCHEGAY, Lettres de Louise de Coligny, op. cit., p. 102. 136 Lettre du duc à Duplessis-Mornay du 20 juin 1599, citée par Henri ZUBER, Recherches sur l’activité politique de Henri de La Tour, op. cit., tome II, p. 81. 137 Paul MARCHEGAY, Lettres de Louise de Coligny, op. cit., p. 14. 40 31 15 juillet 1598 - Paris Mme de La Trémoille Madame ma soeur, J’use d’ung trop long sillance pour ne crindre qu’il n’anjandre an vostre esprit quelque doute du servisse que je vous voué sy n’a a il rien quy me possède tant que l’anvie que j’ay de trouver des ocasions capables de vous continuer les tesmoignages de ma fidellité. Vostre mary vous mande des nouvelles de la Court, quy est assés agitée de brouilleries, antre lesquelles il a quelque fois part. Il s’an va à Sully où il assure vous debvoir faire venir. Je le conforte an ce désir autant qu’il an est possible. Cella me pouvant donner moyen de vous voir. Aimés vostre frère quy vous aime plus que luy mesme. Vostre niepce, à ce que me mande la petite sœur, est la plus jollie au monde. Je meurs d’anvie de la voir. Toujour, chère soeur Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Paris, ce 15e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/37 32 Sans date ni lieu à Mme de La Trémoille Madame, vous avés trop de soing de ce quy me tousche. Je ne partiré de ce païs, sans vous aller beser les mains et vous rofrir de nouveau le tout de moy qui est plus à vous qu’à tout le monde. Vous ne me mander rien de l’espérance où vous estes. Je m’an resjouis desjà par espérance sy c’est ung fis. Nous l’avons desjà marié, vostre cher mary et moy, avec la petite. Ranvoyé le nous bientost à Sedan qu’il s’an retourne avec beaucoup de contantemant. Il veut vous faire aproscher de Paris. Tous les mois nous vous voirons. Sy je ne vous escris plus souvent, ce n’est pas oubliance, mes pour ne sçavoir que vous mander. S’il vous plest commander à Beaumont d’avoir soing du courtaut138 >>>> et de faire garder jusque à ce que il l’aille quérir et la pinture de ceste belle piesse. Je vous bése mille et mille fois les mains. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/38 33 13 janvier 1599 – Paris à Madame de Bouillon139 Vous m’accuserés de paresse de vous lesser sy long temps sans de mes nouvelles. Les commodités ne sont présente et aussy je ne sçay que vous mander, ancores que je >>>>> que vous aurés l’alarme que je vous diray sy après que l’on a leue issy. Pour le >>>>>, je suis d’avis que vous en avés : an anvoyés point, servés vous des lettres que je vous ay anvoyées ainsy que vous le voirés à propos. Pour Des Chans, il n' a que >>>>> et faut que par >>>>> qu' il >>>>> c' est à >>>> que il contribue aus frais des prossés quy feroit >>>>>>>> de ces dits arrérages pour nos baurnages. Je suis d’avis que vous an usiés an la plus >>>>> que vous pourrés pour la cause >>>>> de nos droits >>>> >>>> de ne faire saisir que ceus >> vous serés bien prudes et 138 Cheval à oreilles et queue courte dont on se servait pour les voyages. 139 Cette lettre griffonnée à la hâte par Henri de La Tour d’Auvergne est très difficilement visible. 41 de ne faire des prossés, d’éviter ceus du >>>>> de >>>>>>>>> ont mande que >>>>> les titres. Il faudroy pris >>>>>> les nostres cuidant que nous an aurons besoing issy. Il faut presser >>>> et le tenir de >>>>>>. Je ne feray rien autre à quy >>>>>touscher les /2/ placards de St-Céré vous avés >>>>> demander à >>>>>> de restrancher les pannaus d’Oliergues, nous avons peu de >>>> . A>>>>> me demande la ferme, il me faudra anvoyer quelqun an ce païs là >>>>>> >>>>> faire a mes créanciers >>>> >>>>>> de leur faire obliyer les fermiers de nos terres d’Auvergne jusques à la >>>>> >>>>> des deus années que je leur doits payer et par mesme moyen pour >>>> à >>>>>>> deus lesser la ferme de >>>>>>>> pourveu qu’il se charge de la garde de la >>>>aysoit et qu’il nous baille de >>>>>>> >>>>>>>> L’on vous a anvoyé tout ce que vous avés demandé et le fit on partir hier avec les rouliers. Ce laquais vous porte de >>> pour vostre estr>>> et pour la petite je n’anvoye rien, mes quy atant >>> fort peu. Je n’ay ancore >>>>>> estrenes du Roy. L’on a esté an très grande alarme d’ung >>>> an ceste ville. Cella a esté >>>>>>>>, mes sans assurance sinon que l’on a mis l’Esdit sur le bareau de /3/ il est bien a >> qu’il ne sorte ny sy tost ny sy >>>>> qu’il >>>>>>>>> de >>>>>> de vous voir tout aussy tost que je verré nostre espr>>>>>>> >>>>prest par. Avisés donc à vos affaires an estat pour ne desp>>>>>>> par vostre absance, mais >>>>> issy >>>>>pauvre vie >>>>> se >>>>>>> >>>>>>> le plus tost le me >>>>>< et >>>>>>>>. Je vous donne mille bonjours, mon cœur, et je prie >>>>>>>> en l’espérance de vous voir bien tost. C’est $ $XX$ $ e A Paris, ce 13 janvier. Archives nationales, R2 53 34 printemps 1599 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, J’é veu les avis que vous avés eus de Madame l’Electrisse. Je croy que il seroit à propos que vous, Monsieur vostre mary et moy escrivissions à Monsieur le prince d’Orange, luy mandant les partages quy se sont fet an Holande. L’aceptassion qu’il a feste des terres du conte an don et non comme héritier et qu’en toutes ces choses on ne voit nulle part réserves pour Madame l’Eslectrisse et ses soeurs, laquelle nous nous prometons se fut jointe à ceste despesche, pour luy prier de vous dire la rayson de ces choses, ne désirant poursuivre ce quy vous peut apartenir qu’en vandant ce quy sera du nostre autant qu’il nous sera possible, porte à la conservassion de sa /2/ maison et à luy déferér tout l’honneur et respect qu’il nous sera possible ; et croy que il seroit à propos que le Sr. Bourron140 portast cest despesche et an remetre la meilleure partie an croyance évidant que il faut mesnager ces choses avec divers respects. Vous y donnerés vostre sage jugemant et Monsieur vostre mary. Il n’y aura aucun dellay au payemant des catorse cents escus, lorsque vous aurés achevé de recepvoir les trois mille. Je vous suplie de le faire andosser sur le constract et me tenir an vos bonnes grasse. Vostre soeur n’a que fayre de mon ordonnance ne trouvant rien de mauvé de tout ce qu’elle veut fayre, mes je sçay bien qu’elle ne peut partir de cheus elle devant /3/ la St Jehan à cause de Monsieur d’Argenton. Commandés et vous serés servie de Vostre humble frère et fort afectionné serviteur. Henry de La Tour 140 Gilles de Bourron, gentilhomme du duc de La Trémoille, chargé de ses affaires en Cour. 42 A Paris, ce jour de Pâques. Archives nationales, 1 AP 434/33 35 Sans date - Pougues à Mme de La Trémoille Madame, Il y a mille ans que je n’aye eu de vos lettres, de croire que vous ayés oublié de m’aimer et moy de vous vouloir servir, vous ne le croirés pas, ny moy aussy n’y ayant personne du monde quy vous soyt sy aquis que je suis. Je n’eus point plus de regret au monde que de ce que je vous suis sy innutille. Je me resjouis de vostre contantemant et de celluy de Monsieur vostre mary, quoy que vostre soeur me le resprosche an m’acusant de mon absance. Je la voyré aus vins ou possible plus tost, més la sans faillir, s’il plest à Dieu, an ayant tous deus grands besoing. Ce voyage ne me donne pas espérance de vous voir, sy ce n’estoit que vous voulussiés voir Sully, et de là il n’y auroit pas grand chemin à faire141 pour vous rancontrer toustes deus avec Madame la princesse d’Orange. Je croy que toutes considérassions lessées, que vostre bon mary vint voyr le Roy, avec lequel il y a tous les jours autant subjects de mécontantemant, ainsy que /2/ Monsieur Constants vous le dira. Aidés à ce qu’il prenne ceste ressolussion et que il essaye à surmonter ung peu ses incommodités pour satisfaire à cella comme très nécessere. Je voudrois pouvoir à le servir comme j’an ay afection ne m’assurant pas plus que je l’ayme et vous et vostre petit ; certes, sy vous fisiés le voyage de Sully, vous seriés fort honneste famme. Je vous bése mille fois les mains. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Je vous aurois escrit pour le recepveur de Mauléon, mes vous ne m’y avés point fet de responce. Je vous suplie d’avancer cest afaire. Archives nationales, 1 AP 434/35 36 3 juillet 1599 - Pougues142 à Mme de La Trémoille, Madame, je vous jure que toutes les persuasions dont je me suis pu aviser n’ont esté espargnées pour envoyer votre soeur à vous aller voir ; més de se discommoder, point de nouvelles. Je luy ay promis de m’an aller avec elle jusque à ce que vous vous sespareriés ; elle a esté de ces fammes quy ne contredisent, més qu’ils font ce qu’elles veullent. Elle se persuade que de Lancays143, elle vous ira voir et jouyrés toutes deus plus long temps de vos présences. Je seray privé de ce bonheur de vous revoir, et elle, par despit de moy, dès le jour que nous partirons d’issy, où nous sommes avec fort mauvés temps, n’ayant pas commancé ancores à boyre. J’escris à Monsieur vostre mary, et luy eusse escript d’Orléans sinon que je ne vy rien de pressé, d’autant que le Roy s’an alloyt à Paris ; et cuide qu’il ne sera à Bloys guière plus tost que le vintiesme de ce mois, d’où il vous privera de la présence de ce que vous aymés tant, an luy mandant de le venir 141 Sully-sur-Loire est à 90 km de Pougues-les-Eaux. 142 Cette lettre a été publiée par Paul MARCHEGAY dans les Lettres de Louise de Colligny, princesse d’Orange à sa bellefille Charlotte-Brabantine de Nassau, duchesse de La Trémoille, Les Roches-Baritaud, 1872, p. 107. 143 Lanquais en Périgord, dans le département de la Dordogne, était venu dans le patrimoine des La Tour d’Auvergne au XVIe siècle à la suite du mariage de Marguerite de La Cropte, dame de Lanquais avec Gilles de La Tour, sieur de Limeuil, frère cadet d’Antoine de La Tour, vicomte de Turenne. Henri de La Tour d’Auvergne en avait hérité en 1588 43 trouver. Je le satisfis tout ce quy se peut, à mon retour de l’Ille-Bouchar144, an luy esclercissant infinies impressions qui c’estoit imaginées. Il désire voir ce cher mary et me promets que l’un et l’autre an aura contantemant. J’é anvoye vostre Wifer à Paris ; je crois que du Maurier145 ne vous servira, et le petit nepveu, comme je l’usse fet sy je fusse allé à Parys. Vostre belle-mère n’est ancores issy. Paris s’abandonne mal vollontiers. Nostre petite se porte bien et sommes de bon acort, més ce n’a esté sans peine. Vostre soeur a eu querelle avec Petit Jehan de ce qu’il nous avoyt logé an deus logis sesparés, n’ayant ces cartiers fort mals propres. Pour le payemant des arrérages dont Monsieur Constants146 vous a parlés, disposés de moy comme de ce quy est plus à vous qu’a soy, et quy vous randra à toutes ocasions tous les servisses que vous a promis. Vostre humble frère et serviteur; Henry de La Tour e A Pougues, ce 3 jullet. Archives nationales, 1 AP 434/31 37 27 août 1599 - Blois à Madame de Bouillon Aïant anvoye une depesche du Roy à Monsieur de Châteauneuf et au présidant de Brosse pour ampescher l’establissement des Jésuystes, je l’ay voulu faire passer vers vous, plus pour me raporter de vos nouvelles que pour vous dire des myennes, vous ayant escrit hier par ung laccai quy est allé à Limoges. Je croy que le Roy s’an ira demin à Chenonceau voir… 147 et en partir de là à Orléans voir Madamoyselle d’Antragues148, cuidant que tost après il retournera issy et puis nous sçaurons ce que nous ferons. Monsieur le prince d’Orange part ce jourduy149. Le Roy l’a convié (?) à la chasse et le conte de Bauveau. Le cerf fit une fort grande trete. Ils couchèrent tous deliers où ils ont ung peu desfrayé le compagnie de rire. Vostre frère aisné part de là fiés et croit que c’est la grandeur de vostre Mayson, que le prince Morisse peut demeurer gouverneur du pais que tiennent /2/ les Estats, que la Religion i demeurant et que luy seroit gouverneur de quelque province an ce cas. Je vous diray que ce fut de Luxembourg. A tout cella, je ne voy pas grande aparance. Les aferes des estats fleurissent et leur armée de mer, qui estoit allé an Espangne, a pris la Grande Canarie où ils ont batu la forteresse, donné deus assauts et l’ont prise o$ ils ont lessé bon nombre d’hommes et s’y fortifient et le reste de l’armée est allée vers Calient. Il leur est revenu des vesseaus des Indes quy ont raporté pour quinze cent mille escus d’espisseries. Mandés-moy ce que l’en fera pour les Jésuistes et sy le Roy y sera bien obéy, comme de ce que vous aprandrés du pays/ Ceste assinassion sur feu n’est point entre les mains du >>>>>>> /3/. Sy vous ne la trouvés, il an faudra faire faire une autre. Il n’y aura rien de perdu. Je vous anvoye deus 144 Le 20 juin 1599, le duc de Bouillon était venu voir à l’Ile-Bouchard le duc et la duchesse de La Trémoille pour s’entretenir avec eux des affaires du parti protestant. Lettre du duc de Bouillon à du Maurier citée par Henri ZUBER, Recherches sur l’activité politique et diplomatique de Henri de La Tout… , op. cit., tome II, p. 81. 145 Benjamin Aubery, sieur du Maurier, secrétaire du duc de Bouillon. 146 Jacques de Constant ou Constans (1547-1521), sieur de Chalié et des Ouches, gouverneur de Marans, poète dans sa jeunesse, ami d’Agrippa d’Aubigné. 147 Pressé Henri de La Tour d’Auvergne n’a pas fini sa phrase. Bassompierre dans son journal mentionne que Henrir IV alla à Chenonceaux voir la reine Louise de Lorraine, veuve de Henri III. BASSOMPIERRE, Journal de ma vie, Ed. marquis de Chantérac, Renouard, Paris, 4 vol., 1870-1877, tome I, p. 77. 148 Henri IV était au début de ses amours avec Henriette d’Entragues. 149 Philippe-Guillaume de Nassau (1554-1618) après avoir été retenu vingt-neuf ans prisonniers en Espagne, avait été libéré en 1595 pour diviser la maison d’Orange. Son frère cadet Maurice était le chef de famille et sa sœur Marie administrait ses domaines. En 1598, il obtint du roi d’Espagne la restitution de ses terres d’Orange. Désormais, prince souverain, il se heurta à son frère Maurice qui contrôlait les Provinces-Unies. Ce n’est pas avant 1609 que Henri IV parviendra à les réconcilier. 44 pères de gans de Trois que Monsieur le prince d’Orange m’a données. S’ils m’ussent estés bons >> ne les ussés pas et je te prie ne pers nulle ocasion de me mander de vos nouvelles. Vous aurés eu vos soyes par Monsieur de Vau. Je te donne petite vilayne mille bon soirs. Je croy que nous verrons issy Monsieur de La Trémoille. C’est, $ $XX$ $ e A Bloys, ce 27 aoust. Archives nationales, R2 53 38 14 septembre 1599 - Blois à Madame de la Trémoille Madame, Je suis bien fort vostre serviteur et sy je me bande bien fort contre vostre contantement an conseillant à Monsieur vostre mary de ne nous lesser sy tost, j’espère qu’il nous croira plus que vous sy vous este an colère ne le soyés que contre vostre soeur. Elle seulle anpesche que nous ne nous vissions. Vous avés eu fort bon esprit, les premières disficultés venant d’elles et les dernières de moy. Certes, il y aura bien des arrérances sy vostre sœur, mais sinon, aimés-moy comme la personne du monde quy vous est le plus aquyse et quy souhete et veut le plus servir à vostre contantemant. Je vous bese ung milier de fois les mains. Cest, Vostre humble frère et serviteur. Henri de La Tour A Blois, ce 14e septembre; Archives nationales/1 AP 434/40 39 octobre 1600 - Lanquais à Mme de La Trémoille Madame, il vous seroit annuieus de vous obliger à chose quy divertis vos jens à l’arivée de ce Monsieur mary, nous nous an allons à Turenne faire rostyr des chataygnes, feulleter papiers, faire nos hommages et recercher nos droits. Nous ne serons cheus vous qu’envyron le temps de vos cousches. Sy bien que nous aurons vos trois petits tous au mesme temps devant nous. Vostre sœur se porte fort bien, Dieu mercy. Il y a du plaisir à santir sa petite créature. Elle a esté anrumée, mes elle est à la fin. Vous avés ocasion de m’aymer, car nul au monde ne peut vous estre plus afectionné que je suys, ny plus désireus de vous servir, Monsieur vostre mary et Messieurs vos anfants que moy, quy vous bése ung million de fois les mains. Vous vous anquérés s’il vous plest de la sotise de vostre soeur escrite aus tabletes dont vostre cher Monsieur ut le lecture. Je vous bese ung million de fois les mains. C’est Vostre humble frère et serviteur; Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/32 40 14 novembre 1600 - Turenne à Mme de La Trémoille Madame, 45 Vous aurés tant de nouvelles par vostre soeur que ce seroit follie à moy de vous an mander. Elle se porte bien. Elle devient pesante et ne fet pas grand exercisse. Nostre petite nous fet rire et souvant. Les nouvelles que nous avons eues de Hollande sont fort vielles, mes les choses ny vont pas trop bien; La nescessité y est fort grande. Je désire fort sçavoir combien les eaus auront porté d’amandemant à Monsieur vostre mary150. Il y an y a au Rouergue quy ont fet des miracles à des gousteus que je veus mal et je les vois infiniemant mieus. Je vous promets que vous este fort assurée de mon servisse et que vous croyés bien que toutes choses vous manqueroit plustost que ma fidélité à vous an randre sur ceste vente. Je vous béseré avec toute humilité les mains an calité de Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Turenne, ce 14e novambre. Archives nationales, 1 AP 434/34 41 8 mars 1601 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, Je veu la Court desja trois jours, an laquelle je n’ay pas veu grande cérémonie, n’ayant vue la Roine assise, mes toute de debout, Mademoiyselle de Guise près d’elle quy travaillois à des bandes de caneva pour une tapisserie. Le Roy se promèna par la chambre avec elle. Madame de Verneuil y est venu une fois, laquelle fit rougir la Roine aussy tost qu’elle la vit, et puis elle la vint antretenir. Ladite marquyse a fort souvant des piques avec le Roy, quy voit souvant La Bourdaisière151, mais rien encore. Hier au soir, la dite marquise luy dit : “ Vous voulés aller à la guerre ce soir ! Vous estes un vaillant homme quy ne fetes rien, ne tue ny ne blesse personne ”. Le soir, le Roy demeure an la chambre de la Roine demi-heure, et puis san va à la ville où La Varenne seul l’accompagne. Aus habits, je n’y ay rien reconnu de changé. Peu de fammes, et moins que n’an voyoit Madame. Mille bruilleries : la marquise de Guercheville mal avec sa mestresse152 ; la seignora Léonor mal avec le mestre ; peu de serviteur dans ceste mayson de /2/, de calité. La Roine à une fasson libre, n’ayant ancore guère estudié à celle de Royne ; fort gaye et fort triste. Il n’y a issy lieu d’y voir sesjourner beaucoup de fammes que je connoys153. Monsieur de Monpansier s’an va, à Champigny, au commancemant de l’esté où il veut voir vostre soeur. Cella viendroit bien à propos pour vostre batesme. Je feray despescher vos lettres de naturalité154 et tout ce quy sera an mon pouvoir que je jugeray estre propre pour vous servir, désirant le vous tesmongner à toutes ocasions. Je vous bese ung million de fois les mains. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Paris, ce 8 mars. Archives nationales, 1 AP 434/42 150 Claude de La Trémoille au mois de septembre 1600 avait fait une cure thermale à Barbotan en Gascogne. 151 Marie Babou de La Bourdaisière une des nombreuses maîtresses d’Henri IV. 152 Antoinette de Pons, marquise de Guercheville, dame d’honneur de la Reine. Cette rumeur était fausse Marie de Médicis n’aura jamais d’autre dame d’honneur que Mme de Guercheville. 153 Paul Marchegay a publié le premier paragraphe de cette lettre dans les Lettres de Louise de Colligny, princesse d’Orange, op. cit., p. 24, note 5. 154 Charlotte-Brabantine de Nassau obtint ses lettres de naturalité en 1608. Archives nationales, 1 AP 361. 46 1602 Cette année est marquée par la conspiration du maréchal de Biron et du comte d’Auvergne. A la suite des dénonciations du Sieur de La Fin, Henri IV soupçonnait tous les grands de son royaume de vouloir comploter contre lui. Le Poitou et le Limousin s’agitant à la suite de la pancarte pour l’imposition d’un sol par livre, il se rendit au printemps à Blois, Tours et Poitiers où il resta deux mois. Henri de La Tour d’Auvergne après avoir séjourné à Sedan et Paris au début de l’année, avait retrouvé le 16 mai son épouse à Thouars puis avait rejoint la Cour à Poitiers155. Alors qu’il sollicitait son congé à Henri IV pour rejoindre sa femme à Turenne, le souverain l’interrogea sur les rumeurs de complots qui courraient et lui demanda “ s’il n’en estoit pas comme les autres ”. Bouillon répondit à cela “ qu’il y avoit grand subject de mescontentement de ce qu’un seul commandoit à tous les estats du royaume, et que donnant ordre à ce poinct là, toute la délibération des seigneurs seroit aisée à appaiser, au reste ne demandant tous que le service de Sa Majesté ”156. Henri IV revint à Fontainebleau au mois de juin. Le 16 de ce mois, il fit arrêter le maréchal de Biron et le comte d’Auvergne pour conspiration avec l’Espagne. Si Biron fut exécuté le 31 juillet, le comte d’Auvergne fut libéré le 2 octobre. Il avait “ bien purgé sa conscience ” entre les mains du chancelier Bellièvre, de Sillery et de Rosny157 et beaucoup de grands tremblèrent pour leur sécurité, notamment Claude de La Trémoille et Henri de La Tour d’Auvergne. Si le premier, poussé par son épouse, sollicita le pardon royal, le second, qui était alors à Turenne, n’agit pas de même. Il savait que le souverain le soupçonnait d’avoir voulu soulever tout le Limousin et les huguenots de France, aussi refusa t-il de répondre à sa convocation adressée le 18 novembre et après avoir traversé tout le midi, en criant partout son innocence, rejoignit son beau-frère l’électeur palatin à Heidelberg. Là il obtint l’appuis des princes allemands et même de la reine d’Angleterre qui exprimèrent au roi de France leur surprise et incrédulité. Pour rendre plus compréhensible les péripéties du duc de Bouillon pendant ces années nous avons ajouté aux lettres contenues dans le Fonds La Trémoille quelques lettres que Henri IV et le duc de Bouillon s’échangèrent. 42 18 novembre 1602 – Fontainebleau Henri IV au duc de Bouillon Mon amy, Ce jour d’huy seulement les gens de mon conseil ont achevé de recevoir les dépositions de ceulx qui ont esté ouys sur la conspiration du duc de Biron, par les quelles ayant sceu estre fait mention de vous, j’ay voulu, pour l’affection que je vous porte et pour le soing que j’ay ay tousjours eu de vostre bien et honneur, vous en advertir incontinent par ce porteur, que je vous envoye exprès pour cest effect, et sur ce, vous faire sçavoir, encores que je n’adjouste foy à telle accusation (spécialement quand je me représente combien je vous ay chéry et favorisé, et de quelle sorte je me suis tousjours fié en vous et sy souvent aussy esprouvé vostre fidèlité) néantmoins importer tant au bien de mon royaulme et au vostre mesme, que la chose ne soit promptement vérifiée, que je veulx et vous ordonne par la présente, que vous me veniés trouver en ce lieu, soudain que vous l’aurés receue, pour vous justifier ; et j’adjousteray encore, que je vous conseille et prie comme vostre bon maistre et vray amy (vous ressentant et tenant innocent, comme je crois que vous estes), de n’y faire faulte et n’y user d’aulcune remise et longueur ; car ce faisant vous préviendrés et estoufferés la maulvaise opinion que les bruits de ce qui se passe pourroient imprimer de vostre intégrité ; vous mettrés aussy tant plus mon esprit et le vostre en repos, selon mon désir, et je vous asseure que je favoriseray très volontiers vostre justification et innocence, comme vostre bon mestre et amy, 155 Henri ZUBER, Recherches sur l’activité politique de Henri de La Tour, op. cit., tome II, p. 85. 156 Pierre-Victor PALMA CAYET, Chronologie septenaire, contenant l’histoire de la paix et les choses les plus mémorables advenues depuis la paix de Vervins (1598) jusqu’à la fin de 1604, “ Nouvelle collection des Mémoires relatifs à l’Histoire de France ”, Ed. Michaud et Poujoulat, tome XIII, Didier, Paris, 1857, p. 182-183. 157 Ibid., p. 206. 47 Henry De Fontainebleau, le xviije novembre 1602. 158 Recueil des lettres missives de Henri IV 22 novembre 1602 - Turenne au Roy Sire, je ressens à grand honneur le commandement qu’il plait à Vostre Majesté me faire, et à grand malheur que je sois accusé envers Elle et son Royaume. Vostre croyance, ne se laissant surprendre et ma gardant, comme il luy plait m’asseurer, les offices d’un maistre et amy, je promets que Vostre Majesté cognoistra que je n’ay jamais eu, non effect, mais seulement pensée qui se trouvast à Vostre Majesté faire desservice. Je fus party avec Richart, mais mon indisposition ne me permit de courir la poste, mais je partiray, sans délay aucun, le xxvje de ce mois, pour aller à plus grandes journées, et prendray la poste aussy tost que je seray hors de ceste traverse où les portes seront tournées ; ayant mon contentement, qui ne me lairra en repos que je ne l’aye satisfaict en …, en recevant les tesmoignages de Vostre Majesté, qu’en désire Son très humble et très obéissant, très fidelle subject et serviteur. Henri de La Tour. A Turenne, le xxije novembre. 159 Recueil des lettres missives de Henri IV 43 30 novembre 1602 – Saint-Céré au Roy Sire, Ayant appris par celle de la main de Vostre Majesté, du 18 de ce mois, que j’avois esté accusé par ceux qui ont esté ouys par son conseil, sur les conspirations de feu M. de Biron, et qu’elle me commandoit de partir incontinent pour m’en aller justifier, je fis partir tout aussitost celuy qui estoit venu, avec response à Vostre Majesté que je partirois soudain pour l’aller trouver, ce qu’estant tout prest de faire, il m’est venu advis certain quels sont mes accusateurs. Cela, Sire, m’a occasionné de changer ceste résolution, et faire très humble remonstrance à Vostre Majesté pour la supplier de mettre en considération, que les perfidies et desloyautés contre vostre personne et Estat très avérées de mesdits accusateurs les rendent du tout incapables de m’accuser ; et à plus forte raison de me convaincre. Ils n’ont et ne peuvent avoir pour leurs accusations que des langues menteuses, lesquelles ne leur ayant servy pour exécuter leurs intentions, les accompagnants des effeets desquelles ils ont estés empescher par vostre bonheur et prudence, il les employent en vous rendant suspect le second officier de vostre couronne, vostre serviteur domestique qui n’a jamais cherché de gloire en ce monde, que ce qui luy en découle par vostre faveur et bonne grâce, et qui vous a si longuement servy. Il est à croire qu’ayants dessein de me nuire, ils auront esmus vostre courroux contre moy par les plus horribles crimes qu’ils auront peu inventer. Me feroient-ils, Sire, ministre de ce qu’ils peuvent avoir promis aux ennemis de vostre Estat, d’aider à luy faire mal, n’en pouvant meshuy suborner d’autres ? Ils veulent accuser de ceux lesquels mesme en tels affaires, on leur innocence toute prouvée par infinies circonstances ci-joinctes avec eux, qu’il n’ait à croire qu’ils puissent avoir eu la mondre apparence de bien pour aller au contraire. C’est mal recognoistre vostre miséricorde, de demeurer toujours criminels en ne faisants que changer de crime, de laquelle la grâce ne leur pourroit servir, veu que depuis ils ont porté faulceté. 158 Jules BERGER de XIVREY et Joseph GUADET, Recueil des lettres missives de Henri IV, Coll. des documents inédits de l’histoire de France, Imprimerie nationale, Paris, 1843-1876, 9 vol, tome V, p. 696-697. 159 Ibid., p. 711. 48 Je vous diray, Sire, comme disoit le psalmiste à Dieu : “ Seigneur, n’approche point de moy que je ne sois renforcé ”. Aussi, Sire, je crains vostre visage ayant receu telles personnes à m’accuser, puis que Vostre Majesté m’en demande justification, qui est ce qui m’a retenu, et non que ma conscience me pique d’un souvenir de faute digne d’un tel examen. Puisque cela importe à vostre service, il est raisonnable aussi pour satisfaire à Vostre Majesté, son royaume et mon honneur, et oster le deshonneur de Dieu par le scandale qu’auroient ceux de mesme religion que moy, si mon crime n’estoit puny et mon innocence cogneue. Pour à quoy parvenir, Sire, je m’asseure que Vostre Majesté ne me voudra rendre privé de la liberté dont jouyssent tous vos subjects de la Religion, pour y procéder et d’autant plus tost que nuls autres juges ne peuvent estre plus intéressés en ces affaires, puis qu’il s’agit de la diminution de vostre royaume pour l’apporter à l’agrandissement de celuy d’Espagne. En quoy tous vos subjects ont une commune perte ; mais ceux de la Religion, mesme desquels les chambres sont composées, en ont une spéciales ; ce qu’ils ont tousjours estimé plus cher que leurs vies, qui est la perte de leur exercice. Ils seront donc plustost juges sévères que nous s’ils y voyent de ma faute ; ils se tourneront plustost à me hayr qu’un autre duquel ils n’auront pas tant attendu le contraire que de moy. Là donc, je supplie Vostre Majesté de renvoyer mes accusateurs et mes accusations, me tardant d’avoir ce poids que me donnent les calomnies, et que Vostre Majesté soit suffisamment satisfaite de mon innocence, pour laquelle accélérer, je m’en vois me rendre à Castres pour y attendre la vérification de ma faute où innocence. Jugeant que le temps que j’usse mis à aller trouver Vostre Majesté n’ust fait que prolonger l’affliction et vif ressentiment de mon âme demeurant accuser puisque Vostre Majesté eust eu à me renvoyer aux chambres pour me condamner ou absoudre qui sont les juges que vostre édict me donne ? Qu’il luy plaise donc soulager mon esprit fort promptement mon esprit en me donnant les moyens de luy faire cognoistre mon innocence, et que par ceste preuve elle demeure asseurée de la continuation de mes fidelles services, et moy de ses bonnes grâces, qui seront par dessus toutes choses désirées de vostre humble, très obeyssant et très fidelle subject et serviteur. Henry de La Tour A St-Céré, le dernier novembre 1602. Chronologie septenaire de Palma-Cayet 160 44 4 décembre 1602 – Briatexte161 à Madame de Bouillon Mon Cœur, je passay la journée d’hier sans vous escrire. Je vous voulois ranvoyer d’Anterac, mes mullets n’ari>>>>,>>>je ne pus le despescher ne luy pouvant bailler de l’argent à Villemur le lieutenant général, les deus procureurs consuls et Monsieur Beraut me vindrent trouver avec toutes les ofres de la ville que je pouvois espérer. Je leur fis antandre l’ocasion de mon voyage qu’ils trouvèrent sy à propos qu’ils connurent que l’esprit de Dieu me guidoit ; et qu’en se fet toutes les Esglises estoyent plus interressées que moy, que leur ville y porteroit tout ce quy estoit deus qu’ils escriroient à ceus de Castres à ce qu’ils ne fissent rien rien contre les termes de l’esdit, quoy qu’on leur put commander que eus, et s’assuroyent toutes les Esglises se joindroyent en cella, le conseil de la province s’assamble, le sinode provincial s’assamblera pour desputer vers leurs desputés, anfin, je trouve que mon Dieu se prespare, leurs cœurs aussy qu’il me l’avoit fet espérer. Je m’an vois ce jour dui moyennant son aide, consillier à Castres où est Monsieur de Vantadour /2/. 160 Pierre-Victor PALMA-CAYET, Chronologie septenaire, op. cit., p. 206-207 et Jules BERGER de XIVREY et Joseph GUADET, Recueil des lettres missives de Henri IV, op. cit., tome V, p. 715-717. 161 Briatexte commune du Tarn. 49 Sy je puis je vous despescheray quelqu’un dès demin sinon ce sera après demin. Je trouve Bellujon très afectionné et sa famme ancores plus je luy anvoye vostre lettre d’issy ne la luy ayant pu bailler par ce qu’elle estoit dans mes cosfres. Je désir fort sçavoir commant vous vous portés et tout nostre petit peuple. La petite Marion me bailla ung beser an partant de tout son cœur. Je prie Dieu qu’il soit tousjours nostre garde et que nous nous disposions de plus an plus soubs sa durté, $ $XX$ $ e Briateste, ce mercredy 4 dessembre. Archives nationales, R2 53 162 45 19 décembre 1602 – Castres à Madame de Bouillon Mon Cœur, vous verrés ce qu’à produit mon sesjour an ce lieu et la satisfaction que je donnée à l’esprit des plus farousches pour croire mes acusateurs aussy ramplis de meschansté que moy de preudhommie. Je pars pour m’an aller an bas Languedoc d’où vous aurés de mes nouvelles, espérant que le Roy observera son Esdit et par conséquant la justisse me sera ouverte. Pourvoyés à toutes mes affaires. Sy La Grange vient qu’il ne fasse pas autre. Je vousdrois avoir l’argent de Oliergues et de Croc pour satisfaire les très pressés afaires que nous avons à Paris, d’où je n’ay eu nulles nouvelles ny des vostres. Il y a quelque temps et ce m’est une fort grande obligassion dues à La Fiu qu’il avise de faire tenir à Sedan l’argent quy reste du troisième cartier de ma compagnie et s’il avoit levé le 4e qu’il fit tout tenir à Sedan et au plus tost. Il nous faut assurer que Dieu ne nous deslivre point qu’il aura soing de nous pour changer /2/ nos tristesses an joye ce qui conduira mes affaires à nostre bien. J’escris à Lolo. Je désire fort qu’elle se souvienne du commandemant, que je luy fis an partant, afin qu’elle comprenne à cest heure et tousjours. Dieu me fasse tousjours antandre vostre bon portemant et deslivrance de ce quy sera le plus expédiant pour nous. Bonjour. C’est $ $XX$ $ e A Castres, ce 19 dessembre. Archives nationales, R2 53 46 22 décembre 1602 – Montpellier à Madame de Bouillon Vous aurés maintenant de mes lettres moins souvant m’eslongnant du corps de vous, mes m’an aproschant de l’esprit, me représentant vos soussis et le mal qu’il vous peuvent faire. Au mesme temps, je voy les assistances que Dieu continue à m’envoyer, m’ayant randu jusques issy toutes choses favorables. Ces tesmongnages singulliers de sa faveur vous seront communs, et nous randront, nous et nostre famille, assurés soubs sa sauvegarde, que de nouveaus cantiques que nous luy debvrons randre ! A quoy je vous exorte, mon cœur, et m’y préparant pour de plus an plus me debvra son servisse. Plusieurs raysons me tirent d’auprès de vous et m’an eslongnent, m’assurant qu’elles vous ayderont à vous resjouir et non vous atrister de nostre absance, qui nous randra ung singulier plesir 162 La première page de cette lettre a été publiée par Auguste LAUGEL, “ Le duc de Bouillon d’après des documents inédits ”, Revue des Deux-Mondes, XLVIe année, troisième période, tome XVIII, 1876-6, p. 916. 50 lorsque Dieu voudra de nouveau nous rassambler. Je le prie que ce soit avec heureus accroissemant de ce que nous désirons et vous /2/ et moy. Je trouve beaucoup de bonnes volontés an tous ces cartiers, telles que je les usse sçeu désirer. Je m’an vois au Dauphiné ; de là vous aurés, s’il plaist à Dieu, de mes nouvelles. Je livreray à Cavante mil Francs pourveu que ce vous soit argent contant et qu’on le vous porte. J’envoye ung petit de poudres pour Lolo. Il n’y a point de raysins de Damas, mes j’anvoye de la passerelle pour Marion. Je ne suis pas d’avis que vous m’anvoyer aucune lettre après moy, d’autant qu’elle ne me trouveront pas. Remets an Dieu et nous et mes affaires et à nous an donne issue à sa gloire et à nostre bien. Bonjour, mon cœur. $ $XX$ $ e A Montpellier, ce 23 dessembre. Il sera bon de prandre les vantes de Lestange. Archives nationales, R2 53 163 1603 Henri de La Tour d’Auvergne était arrivé à Genève le 3 janvier. Il se rendit au mois de février à Heidelberg, puis à la mi mars à Hanau et revint à la fin du mois à Heidelberg. Elisabeth de Nassau, enceinte, était restée à Turenne. Au mois de février 1603, elle reçut la visite de sa sœur, Charlotte-Brabantine, venue de Thouars l’assister pendant son accouchement. Elle donna le jour à un fils qui mourut quelques jours après sa naissance. La duchesse de La Trémoille la quitta le 19 mars. Considérant que l’affaire Bouillon risquait de disloquer le front de ses alliances traditionnelles et de favoriser la revanche espagnole, Henri IV renonça au printemps 1603 d’aller plus loin d’autant qu’il avait d’autres chats à fouetter164. Mais il gardait l’oeil sur Bouillon et son beau-frère La Trémoille. Elisabeth de Nassau au mois d’août 1603 prit le chemin de Sedan. Elle passa par Thouars et Saumur où elle rencontra Duplessis-Mornay et son épouse. Henri de la Tour d’Auvergne pour sa part revint à Sedan au mois de novembre. A la fin de l’année 1603, Claude de La Trémoille ne put réaliser son ambition de devenir gouverneur du Poitou. Le gouverneur de cette province, Malicorne165, était âgé et n’avait plus la vigueur nécessaire pour y maintenir son autorité, mais au lieu de La Trémoille trop puissant dans cette partie de la France, Henri IV préféra nommer, le 16 décembre 1603, son indispensable collaborateur : Maximilien de Béthune, marquis de Rosny. 47 5 janvier 1603 – Genève à Madame de Bouillon Mon Cœur, je m’assure que vous serés fort ayse d’avoir de mes lettres d’issy, où je me suis randu dès le 3e de ce mois avec Valigny, Valens et Bonaventure et trois d’Orange, où je sesjourne ung jour et de là je partis. 163 A l’exception du paragraphe faisant référence au mille Francs, à Lolo et à Marion cette lettre a été publiée par Auguste LAUGEL, “ Le duc de Bouillon d’après des documents inédits ”, op. cit., p. 916-917. 164 Cf. Jean-Pierre BABELON, Henri IV, Les tristesses de l’année 1603, p. 896-901. 165 Jean de Chourses, seigneur de Malicorne, un catholique, avait été nommé gouverneur en 1585. 51 J’an ay randu grasse à Dieu, ayant fet la Cène aujourduy an une debvossion extraordinayre ; y parast pour la délivranse très miraculeuse que Dieu leur donna le 24e de l’autre mois, ayant le Sieur d’Orbigny, lieutenant-général an l’armée de Monsieur de Savoye, resconnu ung lieu pour poser une escalade, où il y fut dressé trois eschelles l’espasse d’une heure et demie sans qu’il y ut alarme aucune ; durant ce temps il n’y monta qu’environ trois cents hommes, le gros de leurs troupes atandant que ceus-ci leur ouvrissent une porte. Anfin, l’alarme se prant, peu d’hommes vont où estoit le péril et les ennemis. Ce peu de gents font quiter l’escalade et metent an route ceus quy estoient antrés ; quelques huns se pressipitent et d’autres furent pris. Dieu y a besongné, par toutes raysons humaynes ils debvoient estre perdus. Ma venue leur a esté an consolation, et y désirent mon séjour, ce que volontiers je leur acorderois, si je voyois qu’ils y ussent de l’utillité, pour sçavoir ce que l’on doit à la cité et au peuple que Dieu y a rescovré /2/. Je m’an vois vois Monsieur l’Eslecteur ; du sesjour que j’y feray je ne le puis juger166. Je vous anvoye mon trin et selon ce que je feray, je vous manderay ce que je voudray qu’il fasse. Je suis avec grande atante de sçavoir de vos bonnes nouvelles et de tout nostre petit peuple, auquelle j’anvoye ce que j’ay trouvé issy de plus jolly. Je ne vous dis rien de mes afaires, d’autant que je n’an sçay point l’estat. Il faut tascher qu’à Paris nos créansiers ny pressipitent rien pas saysies ou autremant, je voudrois que Croc fut desja an argent. Certes, mon cœur, je tant de tesmongnages singuliers de l’assistance de Dieu qu’il n’est pas possible que nous luy puissions randre grasses aproschant de ce que nous luy debvons. Je me promets que vous m’ayderés à l’an remercier. Faites part de ces nouvelles où vous jugerés estre à propos. Je vous donne le bon soir. $ $XX$ $ e A Genève, ce 5 janvier. Archives nationales, R2 53 48 8 janvier 1603 – Genève à Madame de Bouillon Mon Cœur, despuis mon autre lettre escrite Bourron est arivé. Ayant trouvé que je satisfeit à ce que tout le monde a desyray, je le ranvoye et m’an vois non à Sedan sy tost, mes cheus vos aliés d’où je prandray là visée du reste de mes comportemans. Ce me sera ung plaisir de sçavoir Madame de La Trémoille près de vous et anvers elle une fort grande obligassion. Il fant que vous retr[ou]viés toutes les instructions, créances, lettres. Feites an copies au particulliers sur >>>, fet les copier et s’il est possible autantiques tant de la Basse Guienne, que Saintonge et Poitou et La Rochelle. Il faut que Madame de La Trémouille vous aide à cella. Je croy qu’on vous an anvoyast de Languedoc. Vous mettrés tout ansamble et par une sure ocasion, vous me les anvoyerés. Pour nostre afaire /2/, je ne sçay que vous an dire, sinon qu’il faut les allonger. Sy vous pouviés faire abiller les pages de la chambre, je le voudrois bien, sinon il faudra me les anvoyer avec le reste du trin, lorsque je le vous manderay. Monstrés la lettre de Desmerlier à La Fin en le convainquant de mansonge, m’ayanr assuré que s’il étoit payé ainsy qu’il le doit pour an >>>>> le fond. Je voudrais qu’il alast à Paris poursuivre le paiemant de la compagnye d’autant que je me promets qu’on ne la luy refusera. J’anvoye ce que je promis à vos filles, auquelle je donne le bon jour. Je n‘ay trouvé ce que je croiois. Bon jour mon cœur. C’est. 166 Cette premier partie de la lettre de Henri de la Tour d’Auvergne a été publiée par Auguste LAUGEL, “ Le duc de Bouillon d’après des documents inédits ”, op. cit., p. 917. 52 $ $XX$ $ A Genesve, le 8e janvier. Archives nationales, R2 53 49 12 janvier 1603 – Genève à un sien ami Monsieur, ainsi que Dieu m’avoit protégé lorsque vous me laissâtes commencer mon voyage, il me l’a continué en m’ayant fait passer la rivière de l’Izère contre toute apparence humaine. Le matin que je partis d’Orange, j’envoyai le Sieur de Laren pour aviser quelle rumeur il y avoit en Valence et Romans, et se devoit trouver à un rendez-vous que je lui avois donné. Aussitôt qu’il fut à Valence, le passager le fut arrêter et envoya soudain à ceux de Romans l’ordre de faire ôter les bateaux du long de la rivière ; à quoi ils commirent vingt et cinq arquebusiers, qui allèrent le dimanche à ceux qui étoient les plus hauts, attendant d’ôter en redescendant les autres. Ce dimanche, sans qu’un gentilhomme de la Religion me voulant mener plus droit, il perdit le chemin à deux lieues de sa maison, et nous fit coucher en une grange dans la montagne, nous fussions arrivés au port du Perier à même temps que les arquebusiers. Le lundi, je passai audit port un peu avant que ces arquebusiers fussent redescendus pour en ôter les bateaux ; n’ayant trouvé ledit Laren où il nous devoit attendre, pour nous assurer s’il y avoit passage ou non, nous fûmes perplexes. Enfin, Dieu me mit au cœur de ne rester, ains à continuer notre voyage que j’ai fais jusques ici très heureusement ; et d’autant plus qu’à mon arrivée, j’ai trouvé ces seigneurs prêts à faire la Cène, à laquelle je participai ; rendant en mon particulier grâces d’avoir été garanti avec eux, de leur plus que miraculeuse délivrance, ayant M. de Savoie tenté une escalade le 22e du passé, entre la porte Neuve et la Monnoie ; ayant bien su que tout un grand pan de cette courtine demeuroit toujours sans sentinelle, son chemin ouvert pour conduire ses hommes, sa descente au fossé facile, trois échelles sont dressées ; en l’espace d’une heure pour le moins, ils pouvoient faire entrer tout ce qu’ils vouloient, n’y ayant nulle alarme : par là passa deux rondes qui ne connurent rien de ce qui étoit entré et, ni de ce qui entroit. La troisième laissa un homme avec celui qui portoit son fallot ; ayant ouï quelque chose, il s’approche pour voir ce que c’étoit ; il est pris et tué ; celui qui portoit le fallot prend l’alarme et commence à la donner : les Savoyards vont prendre assaillir le corps de garde à la porte Neuve, lequel étant foible ne combattit point : le sentinelle qui étoit haute abat un râteau où il fut porté et un pétard ; au lieu où l’escalade étoit donnée, qui s’appelle la Corraterie, la muraille de la ville est située en éminence de la plaine de dehors ; il y a depuis ladite muraille quatre-vingts pas sans maisons, lesquelles sont assises en lieu élevé par-dessus la muraille de la ville, de bien trente-cinq pieds, et sont toutes lesdites maisons jointes de façon qu’elles sont comme une seconde muraille ; mais elles avoient chacune sa petite porte de derrière pour se servir de cette place contre la muraille ; outre cela il y a deux portes grandes, l’une à l’endroit de la tour de la Monnoie, et l’autre au droit de la porte Neuve, dont l’une n’étoit fermée : les Savoyards ouvrirent de quelques maisons les portes de derrière, et furent dans lesdites maisons par lesquelles ils entroient au coeur de la ville par la place de NotreDame. L’alarme donnée chacun y accourut ; les Seigneurs rallièrent ce qu’ils purent à la maison de ville pour fortifier ceux qui assailloient les ennemis, qui n’étoient à beaucoup près pas si forts, parce que n’ayant pu ouvrir la porte Neuve pour faire entrer le gros de leurs troupes, la peur accoutumée à ceux qui combattent contre droit, les saisit ; et ne s’aidèrent de leurs maisons qu’à garder que le saut de la muraille ne leur fût plus mauvais. Cette alarme a fait désirer mon séjour à ses Messieurs, plus long que j’étois délibéré à le faire, cuidant que cela donneroit quelque joie à leur peuple, et pourroit leur aider à s’empêcher des divers desseins que l’on tient que M. de Savoie a encore sur cette cité. Le sieur de Bourron est arrivé avec lettres de MM. de La Trémouille et de Saint-Germain, portant que le Roi vouloit qu’il sût tout ce que j’avois fait. Je m’en vais en Allemagne voir mes alliés ; et de là avec leur avis prendre les voies pour la continuation de mon voyage ; et cependant servir à Dieu et à ses Eglises sans intermission, lequel pris, Monsieur, vous donner sa grâce. A Genêve, ce janvier. 53 Mémoires du maréchal de La Force 167 50 13 janvier 1603 – Genève à M. de La Trémoille à Paris168 Monsieur, j’ay suivy vostre conseil avant qu’avoir veu le Sr. de Bouron169. Je n’ay jamais eu pensée de mettre au devant de mon innocence et justification aucune sorte de désobéissance ny altérer rien au préjudice du repos de la France et cuide que Sa Majesté cognoistra que mes effects et action l’ont autant fait paroistre que les advis, qu’on luy a donnés au contraire, doivent estre recognuz pour faux. Vous sçaurez la procédure du Sr. du Passage esloigné des asseurances que me devoit donner le Sr. Bouron. Je séjourne icy pour ayder à ceste cité de quelques périls présens, desquels ils ont advis de se prendre garde. Je m’en vay voir noz alliez attendant les justes résolutions qu’il plaira au Roy de prendre pour sa satisfaction et mon honneur. Je ne m’advanceray à Sedan que je n’aye sa volonté, pour lequel je vous supplie de parler à ce qu’il plaise d’y ordonner le payement de ma compagnie, cela me regarde mais les effects promis par la protection du lieu, sans lesquels j’aurois de grande despanse à la conserver. Vous me faites paroistre que vous considerez assez mes ennuis qui par vostre tesmoignage d’affection se soulagent et par les tesmoins que ma conscience me fournit, mais je désire très fort que la calomnie soit cogneue, à cela je vous supplie d’ayder. Les peines qu’il vous plaist donner à Mme vostre femme seront, à mon advis, soulagez pas la cognoissance qu’elle aura que sa présence sera un fort remède pour soulager les peines, non petites, de ceste chères sœur, qui et moy luy aurons et à vous une éternelle obligation pour vous en rendre à tous deux très fidèles services. Je vous baise un million de fois les mains. C’est Vostre humble frère à vous faire obéissant service; Henry de La Tour Ce 13 janvier 1603. Bayerisches Haupstaatarchiv, Fürstensachen 1024a,f° 75 51 15 février 1603 – Heidelberg à Madame de Bouillon Mon Cœur, vous aurés sceu de mes nouvelles de Genève, maintenant vous an sçaurés d’issy. Je prie Dieu qu’il vous donne ou aye donné la deslivrance que je vous souhete. Je vous antretiendray premièremant de ce lieu et de ce quy vous y tousche. Les paroles me manquent pour vous dire ce que c’est que de Madame l’Eslectrisse. Certes, elle est toute à admirer ; aussy. Dieu l’acompagne visiblemant. Tout ce quy samble le pouvoir to[u]rne à fascherie. Elle est sy sage qu’elle le tourne an joye. Elle amande sa condission par les moyens qu’il samble que quelques ungs veulle tenir pour l’ampirer ce n’est que aman de Monsieur l’Eslecteur et 167 Cette lettre conservée dans les archives des La Force a été publiée par le marquis de La Grange dans son édition des Mémoires de Jacques Nompar de Caumont, duc de La Force maréchal de France et de ses deux fils les marquis de Montpouillan et de Castelnaut, Charpentier, Paris, 1843, 4 vol, tome I, p. 346-348. 168 Entre le 22 novembre 1602 et le 16 février 1603 Claude de La Trémoille résida à Paris pour se justifier auprès d’Henri IV. Pendant ce séjour, avec l’aide de François van Aerssen, l’ambassadeur des Provinces-Unies des Pays-Bas, il s’employa à défendre la cause du duc de Bouillon. S. BARENDRECHT, François van Aerssen, diplomaat ann het Franse hof, op. cit., p. 59-74. 169 Gilles de Bouron († 1611) était un des hommes de confiance de Claude de La Trémoille. Celui-ci l’avait chargé de porter au duc de Bouillon une lettre où il lui faisait part du déplaisir d’Henri IV devant sa conduite et l’incitait à aller à Sedan. 54 d’elle tous avance que nulle autre sorte de bénédiction ne paroist tant an ceste mayson que de ce quy elle y est nuls visses que les familliers desquels nous fismes avec Mademoyselle d’Orange la description commune de ne dire pas /2/ ce que l’on veut quant on la >>>>, monstrer nulle joye, ne se lesser seigner, ouïr le medessin et ne faire rien de ce qu’il dit, ne vouloir pas commander à ung vallet. Voyla ce que nous trouvasmes. Elle a trois fis et trois filles170. L’aîné est bien fort esveillé, fort crintif, le second comme Marion et l’autre dans le berceau. Les trois filles très jolies. Elles sont toutes trois habillées et an public sont aus tables, quy durent plus de deus heures et par tout ailleurs an public. Elles ont leurs grasses et cérémonyes toutes formées ainsy que les pkus grandes la sçauroyent avoir. Hors de là ce n’est qune fort bien séante gaieté. Elles seront bien belles. Mon cœur est à la seconde. Il me samble qu’elle a bien fort du visage de la marquise de Verneuil aussy poupin. Pour Madamoiselle d’Orange, elle ne ressemble à pas /3/ une de toutes vous autres171. Elle a la taille belle. Elle parle gras, acommodant bien son humeur à celle de ce païs. Je veu tout son mesnage. Elle a force piesses de pierreries selon l’usage du païs, pour tout ce qu’il porte sur la teste. Ce sont certenes espesses de guirlandes de perles qu’ils metent sur leurs cheveus par dessus le moule. Elle est habillé à la Francese et Madame l’Eslectrisse à l’Alemande leurs meules bien bas. Je la désire marier à ung de nos seigneurs de la Religion. Je luy souheterois plus vostre compere pour certenes raysons que veus sçavés. La petite Daverly est avec elle et une fille de Chandur. Madame l’Eslectrisse a la fille de vostre nourisse. L’on espère de vous voir issy et Madame de La Trémoille. Monsieur l’Eslecteur m’a convié par diverses fois de vous y faire venir. Il faut >>>cher se relesver pourvoir ainsy, que vostre bon esprit vous donra moyen de ce faire à nos affaires et vous /4/ sçaurés la ressolussion que je feray pour mes affaires, desquelles grasses à mon Dieu sont commes estre telles que mon intégrité leur an donne subject. La Royne d’Angleterre a escrit au Roy ainsy que je lusse sceu désirer sans quelle ayt eu de ma part informassion ny prière de quelque chose. Je croy avoir bientost des nouvelles de Holande. Je escrit seullemant à Madame vostre belle-mère, n’ayant voulu escrire à personne plus que je ne voyt quel changement portera la despesche que je fis par Bourron de Genesve. Je me promets que ceste bonne sœur sera près de vous, de quoy je luy ay une estroite obligassion et à Monsieur son mary quy fet force de me monstrer son bon naturel et très solide amitié. Les afliction sont le vray aymant quy sespare les fortes d’avec les fausses. Tout va, Dieu mercy, bien à Sedan. Je croy /5/ que vous aurés fet habiller les pages de la chambre. Si vous ne l’avés fet, feites le, je vous prie, jugeant que sans me les faire venir, je vous manderay de les anvoyer au Roy. Je cuide avoir suivy ung chemin, quy est aprouvé de mes amis >>>>>> quel je donne avec ma sûreté tout loysir d’examiner le vray d’avec le faus et me fais des amis et me confirme ceus que j’avois des long temps fets les bonnes chères de ce lieu vont donne quelques incommodités mes je les sur porte an m’y acommodant autant que je puys. Vous aurés bientost après celle-cy plus au long de mes nouvelles ne vous pouvant assurer de là. Je dresseray mes voyle pour randre plus utillemant mes afections au servisse de Dieu et de son Eglise. Adressés tout ce que vous m’anvoyrés à St-Dan ; là ils sçauront commant me les faire tenir. J’atandre dans vint jours ou vint-une de vos nouvelles /6/. Dieu nous le dénit telle que nous les souhetons. Ceste court est fort grande y ayant se[p]t princes, les ambassadeurs de l’Ampereur, du Roy et de divers princes. De grandes affaires sy trectent, auquelles je sers pour avanser, ce quy est juste et à l’honneur de Dieu. La lettre de Lolo a esté lue aujourduy à table où tous l’ont voulu voir et l’ont louée. Je ne croy pas m’eslongner que je ne voye le conte de Hanau et vostre sœur172 et possible Monsieur le conte 170 Louise-Julienne (1594-1640), future comtesse de Zweibruecken, Catherine-Sophie (1595-1626), Frédéric (1596-1632), le futur roi de Bohême, Elisabeth-Charlotte (1597-1606) future Electrice de Brandebourg, Maurice-Christian (1601-1605) et Louis-Philippe (1602-1655), futur comte de Simmern. 171 Emilia-Secunda de Nassau était alors âgée de 21 ans. Elle épousa le 24 juin 1616 Frédéric-Casimir, comte palatin de Zweibruecken-Landsberg. 172 Philippe-Louis II, comte de Hanau-Münzenberg (1576-1612) et Catherina-Belgica de Nassau (1578-1648). 55 Jehan, vostre oncle173. Son fis aîné174 est issy, quy a esté an Suède où le mariage de Monsieur de Roan est rompu. J’ay veu Monsieur de Nevers à Strasbourg, de quoy j’ay esté fort esdifié. Il s’an retournoit avec quelque crinte, le Roy luy ayant aussy mandé qu’il estoit des acusés. Monsieur d’Espernon est dans la ville de Mets et les Srs de Sobolle dans la citadelle sans porte pour aller des ungs aus autres. Le Roy /7/ y a anvoyé ces jours passés La Varenne pour acommoder le tout. Il ne samble pas que le Roy s’alarme pour ces contestassions les poynts d’estat sont aujourduy sy deslicats que je n’y puis pesnétrer. Dieu les sçait et connoist les hommes et à les cœurs des rois dans sa main sans [] sauvegarde. Je vous rescommande et le suplye qu’il continue à m’y tenir pour servir à sa gloire et que nous et nostre postérité y soyent tellemant conservés que nos jours finissant nous le glorifions de tout nos forces. Je vous donne le bon soir et à mes deus filles. Je seray bien aise que Lolo m’escrive. Je croy qu’on luy aura baillé ce que j’acheté à Montpelier. $ $XX$ $ e A Heidelberg, ce 15 febvrier. Archives nationales, R2 53 52 15 mars 1603 – Hanau à Madame de Bouillon Mon Cœur, je vous fais ceste-cy an atante de recepvoir des vostres, quy me sont d’autant plus désirable que j’espère qu’elles me donneront assurance de vostre bon portement et deslivurance. Je vous ay fet une despesche de Heidelberg, par laquelle vous aurés su ce que j’y reçois toutes les preuves d’amitié que j’an usse sceu désirer et n’ay qu’à voir commant j’an vousdray user rien ne me sera refusans. J’aye eu des nouvelles de Holande. Monsieur le prince Morisse dict anvoier quelq’un vers moy pour m’ofrir tout ce que je pourre desirer de luy. Je m’an suis venu voir Monsieur et Madame la contesse de Hannau, et d’issy m’an iray voir Monsieur le conte Jehan, vostre oncle à Dillenburg, et m’an retourneray retrouver Monsieur l’Eslecteur à Heidelberg pour faire quelque chose an mes affaires, de quoy je vous donneray avis. J’atans du Maurier quy ne m’a rien mandé du trin que prenne mes affaires particullières et ancores moins de celles quy me sont publiques. Je luy avois mandé de mesme de vous an tenir advertie afin que vous /2/ avisiés aus moyens que vous aurés d’y pourvoir. Je croy que vous n’aurés pas vandu vos bleds an aucun ban pour les voir à sy vil pris pardessa. Sy une mesdiocre vante s’osfre il ne la faut lesser perdre et s’il faut vandre des terres et regarder moins a la juste valleur que on n’ut fet lorsque j’avois plus de moyens extraordinaire de pourvoir à nos debtes. C’est pourquoy, je vous semons de recercher tous moyens pour faire de l’argent. Avec cella nous contanterons nos créanciers et passerons l’injustisse de ce temps avec plus de tranquilité d’esprit que ceus quy l’exercent pour la desperanse qu’il y aura antreus et moy aus tesmongnages de nos constanses. Sedan est bien, je puis y aller et seul et acompagné et refuse diverses assitances, que la continuassion du mauves treitemant me tireroit hors de blasme d’an user. J’atans quelqu' un /3/ des vostres pour escrire à plusieurs amis, quy ont pris soing de m’an assurer, les prier de se contenter tels et de me croire que le pouvant que je m’an seroy point ingrat. Madame la contesse de Hanau n’est point issy là. Madame et sa fille aisnée la retienne a une autre mayson. Je crois fort de ne la voir, ny Monsieur le conte, vostre >>>>, qui est fort malade. On atant le Roy à Mets et dit-on qu’il an doit auter tous les gouverneurs. Ceus de Genesve font la guerre contre la bénédiction du pape. Il est aujourdhui le 15e où vous estes aller plus long que vous ne pansiés 173 Johann VI de Nassau (1536-1606), comte de Nassau et Dietz. 174 Guillaume-Louis de Nassau (1560-1620), comte de Nassau. 56 où vous n’avés qune fille pourveu que vous vous portiés bien Dieu soit loué de tout. Je vois force >andre par dessa. Je une grande obligassion à vostre bonne sœur aussy pour elle bien vous que je luy suis sy acquis que il ne se peut pas davantage je luy escris tant. Plus je connois Madame l’Eslectrisse et plus je loue et admire ses vertus. Sans doute c’est une perle antre les fammes. Je passe fort après diner avec elle et vostre sœur. Mandés-moy commans se porteront nos filles. Je dis toute trois je me rescommande aus deus et à vous. Je vous donne milles bons jours. $ $XX$ $ e A Hanau, ce 15 mars. Archives nationales, R2 53 53 15 mars 1603 - Hanau à Mme de La Trémoille Madame, Je ne sçay commant vous remercier de tant d’obligassions qu’il vous a pleu nous despartir an la peine que vous avés prise de faire tant de chemin, et en sayson sy mauvaise, pour assister vostre soeur an ses couches. Il y avoit longtemps que tout ce que nous avions étoit vostre, et que nous ne pouvions avoir rien de si cher que ce qui se pourroit tourner à quelque usage propre à vous donner du contentemant... Nous sommes fort innutiles, et ne pouvons qu’ofrir que des peines à recepvoir, à ceux quy nous ayment. Cella est le vray examen des bonnes et non fintes amitiés, ainsy que Monsieur vostre mary et vous le nous feites espérimanter. Vous recepvrés maintenant nos afections, desmeurant s’il vous plest assurée que vous pouvés tout sur celluy quy vous bèse ung million de fois les mains. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Hanau, ce 15e mars. Le Sr. du Plessis175 vous dira des nouvelles de vostre paranté et des honorables qualités de Madame l’Eslectrisse, à quy je suis antièremant obligé. C’est la mailleurs famme que j’aye jamès connue et la plu sage. Archives nationales, 1 AP 434/29 54 24 mars 1603 - Hanau à Mme de La Trémoille Madame, Mon hapréhansion, ma consolassion de celle que Dieu à garantie surpasse de beaucoup mes annuis, lesquels ne sont toutes fois petits mes an celluy quy abat et redresse ainsy qu’il est expédiant pour sa gloire à les finir de vous dire les obligassions que je vous ay il ne me seroit pas possible vous voullés continuer à assister ceste soeur à laquele je voy renouveler de jour à autre le santiemant de sa perte et mon absance, laquelle ne sera longue n’ayant rien tant au coeur que de la revoir. Je vous suplie atirer plustost Monsieur vostre mary que d’abandonner celle quy vou aime tant. De Heidelberg vous aurés un plus ample despesche et luy portera ordre pour partir. Je finis an vous assurant que je suis et seray 175 Zacharie du Bellay (1574-1644), sieur du Plessis-Bellay, était un autre homme de confiance de Claude de La Trémoille. Le 16 mars 1603, Henri IV ordonna “ de le prendre et s’en saisir entre Paris et Touars ” sur son chemin du retour. SULLY (Maximilien de Béthune, duc de), Mémoire des sages et royales Œconomies d’Estat domestiques, politiques et militaires de Henry le Grand,… op. cit., tome XVI, p. 417. 57 Vostre humble frère et serviteur; Henry de La Tour A Hannau, ce 24e mars. Archives nationales, 1 AP 434/30 55 27 mars 1603 – Heidelberg à Madame de Bouillon Mon Cœur, je vous ay despesché quelcin, j’espère que Dieu vous aura resdonné vostre première santé, quy est ce que je souhete le plus et que vous donniés vos annuits aus mieus, saschant que plus sansiblemant je ressant les vostre d’autant que je vous aime plus que je ne m’ayme. Vous aurés du Maurier quy vous portera des afaires où vous ferés ce quy sy pourra et remestre le reste alors que nous pourrons myeus. Je meurs d’anuye de vous voir. Je voudrois que ceste bonne sœur voulut estre de la partie pour dyverses raysons, mes principallemant pour fermer la porte à la compagnye de vos aflictions. Je reçois issy toutes les assistantes que j’an désire et Dieu m’a donné la possession de l’amitié de ce prince plus grande que je n’usse sceu la désirer. Resjouissés vous, je me porte, Dieu mercy, fort bien. J’ay Monsieur Tillenus près de moi. Vous aurés de mes nouvelles le plus souvant que je pourre. Je vous donne le bonjour. $ $XX$ $ e A Heidelberg, ce 27 mars. Archives nationales, R2 53 56 4 avril 1603 – Heidelberg à Madame de Bouillon Mon Cœur, je vous ay mandé que du Maurier vous iroit trouver pour vous porter des afaires auquelles vous remesdierés autant que la saison et les moyens vous an seront donnés. Je désire de tout mon cœur de vous voir, cest pourquoy vous terrés les choses ou vous jugerés de l’incertitude et du temps à les faire. Vous sçaurés le bon estat de ma santé, les grands et singuliers tesmongnages que je ressoys issy, dont vraye et antière amitié les assistances que Dieu me monstre an me fesant surporter mes peines avec repos an l’esprit, soulagés les vostres et commancés à fuir du playsir que nous avions de nous revoir. J’escris à Monsieur de Monpansier pour avoir ung passeport pour sortir vos hardes hors du Royaume. Vous voirés de vos ouvrages ce que vous vousdrés porter et sy vous ne pouvés le tout disposer le reste de fasson que sy on les veut mander qu’ils soyent a part. Il vous faudra faire d’Osquerques ce que nous an avons avisay . Je vous donne le bon jour de toutte les afections de mon âme an grande atante de sçavoir de vos nouvelles. C’est $ $XX$ $ e A Heidelberg, ce 4 avril. Archives nationales, R2 53 57 58 Sans date – Heidelberg à Mme de La Trémoille, Madame, Je me réjouis d’avoir sceu vostre bon partemant et de la joye que vous aurés eue de voir vostre soeur. Je m’assure que vous la trouveriés fort aimable. Je suis fort en peine de n’avoir sceu des nouvelles de Turenne il y a longtemps. J’apréhande que ce chaud n’aye fet quelque malade, autre mon petit trésor que j’ay là. Tout le vostre se porte bien, à ce que m’a mandé Monsieur vostre mary. Je leur désire une telle continuassion de santé que tout mal s’esloigne et d’eus et du père et de la mère. La Cour ne s’aprochera de vous que après les couches de la Reyne. Pour vos afaires, je croy qu’il ne se faut mesler des afaires des terres de Prinsé que an commun nous ne nous soyons tous ressolus de ce qu’il nous faut faire pour faire la succession, afin d’esviter que an fesant quelques actes de héritière nous n’ayons tous les créanciers sur nos bras, et pour ce faire il faudroit anvoyer vers Madame l’Electrice afin de prandre d’elle et le lieu et le temps pour rassambler pourra…, feroit fort bien cella, mes ces afaires le retiendront issy jusque à la fin du mois d’aoust. Je vous suplie de m’an mander vostre volonté et vous assurer antièremant de mon servisse, comme n’ayant rien au monde n’est quy soit plus aquis. Je vous bese très humblement les mains. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/41 58 18 avril 1603 - Heideberg à Henri IV176 Sire, Si je sçavois que le silance dont j’use depuis mon départ de vostre royaume avoit esté aussy aggréable à V. M., comme j’ay connu que mes lettres qui me précède et départ luy ont desplaisanter, mon debvoir m’obligeroit de les continuer à définir soigneusement tout ce qui la pouroit offenser, comme aussi ça esté la seulle cause qui a retenu ma plume, mais ne me trouvant moings perplex au moyen que je doibt tenir pour retrouver l’honneur de vostre bonne grâce. Sire, que je suis affligé de l’avoir perdue et désireux d’estre remis en la possession de cette félicité. Asseuré en mon ami de n’avoir mérité tant de malheur. J’ay creu debvoir derechef protester de mon zèle très entier et constant à vous rendre, Sire et à vostre royale postérité ce que Dieu, la nature et l’honneur commande à un fidelle suject et ancien serviteur de rendre à son Roy et son maistre ; espérant que quant la souvenance de ma fidellité aura dissipé ces nuages de soubçon et de mesfiance en vostre esprit et asseuré V. M. de ce qu’elle peut attendre à l’advenir, j’espérimenteray les rayons de vostre royalle bonté, d’autant plus doux que les ténèbres de leur eslongnement, me sont tristesse a fascheuses. Cependant, je ne peux faire autre chose qu’apporter de la patience à mon innocence, résignant la conduite de cet affaire à celluy auquel V. M. faict connoistre d’avoir aggréable son entremise et d’autant plus tost qu’il a et son illustre prédécesseur, tousjours faict paroistre d’aymer la France et vostre personne. Sire ay-je creu qu’elle aura aggréable cette honorable délégassion qu’on faict vers elle sur mon subject, me disposant de recepvois ce que la Providence, Dieu et l’Equitté de V. M. ordonnera pour la conservassion et déclarassion de l’honneur et intégrité de celluy qui maintenant levé les mains au ciel et prie le créateur, 176 Les archives des La Trémoille conservent la copie de cette lettre du duc de Bouillon à Henri IV. Henri Zuber mentionne qu’une copie en est également conservée au Public Record Office de Londres, State papers 78/49, fol. 46. 59 Sire, d’affermir de plus en plus son trosne et d’y establir vostre postérité en toute prospérite. A Heidelberg, ce 18e d’apvril 1603. Archives nationales, 1 AP 434/11 59 29 avril 1603 – Heidelberg à Madame de Bouillon Mon Cœur, vous aurés eu diverses lettres de moy, vous ayant escrit souvant despuis que vostre laquais ariva. Je prie Monsieur de St-Germain de vous donner avis de ce que fera l’ambassade de Monsieur l’Eslecteur, duquel je reçois tant et plus de singuliers tesmongnages de son afection anvers moy et la cause commune. Sy vous debvés à une sœur je ne doits pas moins à l’autre. Je croy qu’on ne vous aura refusé le passeport pour vos hardes. Je ressu une de vos lettres par laquelle je apris vostre rechute, mal de gorge et g>>>>>. Judit la porte. Je n’ay eu nulles lettres de vos frères. Vous voirés la copie de celle que Monsieur l’Eslecteur a fete au prince Morisse. Si les lettres des gouverneurs et Esglise de nos terres n’estoyent allées. Feites les anvoyer le Le ct Chobourg a fet païer son voyage sur le deniers qu’avés otés pour l’antretenemant de nos maysons. Je croy que ce seroit bien fet dans jeter quelques plintes quy alassent jusques à luy. Je suis fort /2/ ayse que Monsieur de Mareval vous aye anvoyé son fis. Je me sans fort obligé à ce gentilhomme des bons tesmoingnages qu’il m’a randus de son amitié. Je voudrois avoir son fis près de moy pour luy faire voir ce païs. On a escrit issy qu’on avoit fet raser la citadelle de Condom et que il y a ung gentilhomme et ung prestre pris à Agen acusés d’avoir voulu atanter contre le Roy. Mandezmoy ce que vous an sçaurés. Je ne vous diray point sy j’ay anvie de vous voir, vous an debvés estre toute assurée et vous souvenir que Dieu visite ceus qu’il aime, mes que il ne les abandonne point. Je escrit despuis que je suis sorty de France dans plusieurs livres. Dieu esprouve, mais il n’abat pas Henry de La Tour. Mon cœur cesse les ennuis et oublie nostre perte et fortifiés-vous an l’assurance que Dieu ne nous a monstré tant de singullières faveurs pour /3/ nous denyer ce quy nous sera expédiant pour paraschever nostre course an le glorifiant, nostre lignée croîtra quant il an sera temps et le Seigneur desmeurera juge esquitable, nonobstant les iniques jugemants des hommes177. An luy remetés vous et pourvoyés au mieux an nos affaires. Sy vous feite de l’argent, ne vous an desgarnissés pas du tout. Il vous faut pourvoir à St-Jehan, luy lesser plus tost à prandre quelque chose par les mains de nostre conseil et luy lesser espérer que je l’anvoyere quérir. On peut presparé desja vostre logis. Issy les petites princesses s’atandent d’estre bien ajolivées par vostre venue. Toutes sortes de coifures, bouquets et chesnes leurs sont nouvelles. On ne porte point de miroirs issy, ny fort peu de choses pandue à la cinture. Il y a deus mois qu’il n’a pleu issy et y fet ung chaut très grand. Il y a eu de la gellée, il y a /4/ dis ou douse jours. Mon trin est fort petit et ne le veus croistre. Vous aurés sceu mon avis pour les pages de la chambre. Je croy que vous les aurés anvoyés. Il vous faudra vandre vos vins à Lanquais et vos foins à Turenne. Je désire que vous me donniés avis au temps de vostre départ et des affaires qu’aurés feite avant vostre partemant. Je vous donne milles bons soirs et désire autant de fois chaque iournée de vous voir. $ $XX$ $ A Heidelberg, ce 29e avril. 177 Ce paragraphe de cette lettre a été cité par Auguste LAUGEL, “ Le duc de Bouillon d’après des documents inédits ”, op. cit., p. 919. 60 Il vous faudroit aviser de restourner d’Auvergne les Vic de Comblat et s’il y a des unformassions festes contre luy et la anvoyer à Sedan. Archives nationales, R2 53 60 1er mai 1603 - Heidelberg à Mme de La Trémoille Madame, Nous vous avons tant d’obligassions, vostre soeur et moy, que nous ne sçaurons jamais suffisammant les resconnoistre. Il vous plaira prandre assurance que nos plus véhémants souhets sont que nous puissions vous servir et q’usiés avec toute autorité de ce quy sera nostre. Je croy que vous aurés bientost vostre soeur à Touars, pour vous dire adieu et prandre les bons conseils de Monsieur vostre mary et vostre. Monsieur et Madame l’Eslectrisse ont une anvie très grande de vous voir. Plût à Dieu vos afaires vous le permissent que vous puissés venir. Je sçay bien que Monsieur vostre mary et vous an anriés du contantemant >>>, mais vous feroyen à venir et retorner. Je ne vous sçaurois dire les vertus de Madame l’Eslectrisse. Je le dis sans flaterie, je n’usse pas cru qu’elles se fussent pu assambler an voie mesme personne. Je luy ay des obligassions extrêmes et à Monsieur son mary. Vous aurés sceu l’ambassade /2/ du conte de Solmes vers le Roy. Venés et mener vostre cher fis. Je convirois Monsieur vostre mary, mes je juge bien que cella ne se peut. Madame, suplées par les esfets de vostre bon naturel à mon desfaut et vous contanter de la volonté quy me durera jusques au tombeau de vous faire très fidelle servisse. Je vous bèse ung million de fois les mains, priant Dieu, Madame, vous donnerai santé heureuse et longue vie. A Heidelberg, ce premier de may. Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/36 61 15 mai 1603 – Heidelberg à Madame de Bouillon Mon Cœur, Quillin est arivé icy à huict heurs. Nous ne parlons plus de tristesse, mes commansions que nous aurons an nous restrouvans. Je satisfit à tout ce que je pu vous donner avis. Je croy que sy ceste cy ne vous trouve partie, qu’il seroit bon que vous fissiés ung tour jusques à Lanquais et vers P>>>>> et St-Céré afin de voir tout le monde. On m’escrit de Paris que les choses s’adoussissent. Je leur an donneray tout loysir. Vous vous estes gouvernée pour les pages tout ainsy que sy vous ussiés parle à moy toute la plus grande sagesse an nos affaires est la sûreté de nos maysons et faire de l’argent pour apayser nos créansiés et an avoir comme je vous ay mandé avec vous. Pour les batus et autres affaires, je m’an remets à vous quy m’avés fet plaisir de faire couvrir la salle de la terrasse. Quilin m’a dit que Guischar est ung mauvés garçon et met chuiries crintes de luy dans l’esprit de ma fille, luy disant qu’il a des desmons et asujestit la fantaisie de ceste fille. Cella est très dangereus et mesmes à son naturel. Anquérés vous an songneusemant et s’il est qu’il ne parle aucunemant à elle et /2/ qu’il ne la fasse escrire que davant vous. En outre vous vous souviendrés dung cosche, l’argent pour habiller les pages qu’avés baillé à La Fillolie pourroit an faire une partie. Je vous ay fet deus despesches despuis que du Maurier est party d’issy. J’espère que vous les aurés ressues. On vous atant à Sedan avec une grande joye. On travaille fort à vostre bastion, y fesant plus de despanse ceste année quans autres. 61 Je vousdrois bien que vous puissiés venir an compagnye de Madame de La Tremoille. Madame l’Eslectrisse le désire et Monsieur l’Eslecteur aussy. Il n’y a jour qu’il ne me demande quant vous viendres. Je croy que Monsieur de Monpansier aura anvoyé pour avoir vostre passeport. Je tousjours plus d’anvie de vous voir et ne vis jamais toutes les fascheries qu’on me peut donner plus au dessoubs de moy, que maintenant que Dieu continue à me faires santir les esfets de son assistance an ne m’abandonnant et me soustenant à mesure qu’il me >>>>> à nous et aus nostres de le servir sans cesse. Sy vous n’avés baillé les deus lévriers anglés, anvoyés les moy, ce sera ung beau présent pour Monsieur l’Eslecteur. Bonjour mon cœur, $ $XX$ $ e A Heidelberg, ce 15 may. Que dites vous de l’ipocrisie de Vandamme quy anvoya ung homme à son mary avec une lettre pleine d’amour luy disans qu’elle mourra s’il ne la va quérir, qu’elle ne peut vivre sans luy >>>>>> este le >>>>>>> du pr>>>>>>>> quy rammenrés ces flammes. Osquerques est acouschée, grosse ou an mal d’anfant commant an ferés vous. Il faut une gouvernante à ceste fille sy celle là ne peut venyr. Il faut avoir celle dont je vous ay parlé. Elle est fort honneste famme et que vous ac>>>> bien mes j’aimerois mieux que ce fut Osquerques. Ainsy que je le vous ay mandé pour la recepte des deniers, il vous faut ordonner celluy ou ceus quy bailleront les aquits mes il faut que tout l’argent soit mis dans le chasteau avec diverses … dans un cosfre, auquel il y aura deus ou trois serrures et divers an auront les clef afin de ne passer point par les contes d’ung recepveur. Je trouve fort ce que vous voulés faire pour Marion. Il ne luy faut changer de rien bon pour celle que j’aime bien fort et plus que moy. Sy vous pouviés faire venir la religieuse, ce seroit ung grand plaisir a tous vos parans. Il se marie une de vos cousine à ung conte et une autre, petite-fille du conte Jehan, au Landgrave178. Nassau se peuple fort quant est issy de la part de Monsieur le prince Morisse. Vous connoissés l’ambassadeur. Archives nationales, R2 53 2 août 1603 - Heidelberg Copie de la lettre de M. de Bouillon à Monsieur de Bellièvre Chancelier de France179 Monsieur, j’ay connu que jusques icy tous mes déportemens ont dépleu au Roy et que mes accusateurs demeurent jouissant de l’advantage qu’ils ont cuidé recueillir de me priver de sa bonne grâce, mal plus grand que l’accusation, d’autant qu’à celuy-cy j’ay ma conscience qui me donne de suffisans tesmoins de mon innocence, ce qui me le fait porter avec patience, mais la perte de la bonne grâce de mon maistre ne m’en laisse point sachant qu’il ne peut avoir contre sa coustume si fort allumé son couroux vers moy que je ne luy aye despleu. Les maistres sont les vrays juges sy les serviteurs le servent à leur gré. Et quoy que je pourrois asseurer que je n’ay jamais eu aute intention, sy faut-il que je ne l’aye pass eu bien suivre. Si mes accusations sont vrayes d’autant que j’ay c’est honneur d’estre le premier mareschal de France, premier gentilhomme de la Chambre du Roy auquel il a départy ce qui vaut mieux que les biens à savoir des honneurs et queje suis François. Je me reconnois du tout indigne de miséricorde ny de clémence et s ”il n’y avoit point de juge qu’on me portast mes charges prouvées j’attacherois au pied ma condamnation. Je ne mériterois non plus de vivre que je ne m’essayerois de le faire ny d’user d’aucun moyen pour garantir de peines celuy qui par tant de forfaicts les auroit 178 Julia de Nassau-Siegen (1587-1643), fille de Jehan VII de Nassau, comte de Nassau-Siegen et petite-fille de Jehan VI de Nassau, l’ancien, épousa en 1603 Maurice de Hesse-Cassel (1572-1632), veuf de d’Agnès de Solms-Laubauch. 179 Une copie de cette lettre est conservée dans le registre de correspondances du duc Henri de La Trémoille pour les années 1640-1650. Henri Zuber mentionne que l’original de cette lettre est conservé à la Bibliothèque nationale, fr. 15894, f° 565. 62 méritées. Les services que j’ay rendus au Roy et à son royaume me seroient autant de tesmoings pour agraver ma faute, comme ils m’ont esté tesmoins de me faire départir pas Sa Majesté tant d’honneur pour les avoir méritez. Je concluds avec tous ceux qui m’accusent que s’ils disent vray, que le Roy ne doit non plus ucer de clémence envers moy, que je me seroit rendu indigne de la recevoir, indignation du Roy en cele pour laquelle n’estant que trop manifeste ne peut estre que je n’aye failly contre mon maistre mais tout ainsy que les crimes ne méritent l’usage de la clémence s’ils se prouvent ; à ces /2/ fautes se peut joindre avec la dignité du maistre le pardon et au serviteur de le requérir, ce que je fay par vostre bouche, Monsieur, et par ce mien escrit. J’espère que mon maistre sera marry, de quoy je luy auray donné occasion de me haïr, pour au lieu de l’honneur que j’ay receu par longues années en le servant le plus près de sa personne que je me suis tant oublié que de luy desplaire. Cella ne peut avoir esté reconnu de moy que je n’aye senty de véhémentes passions et afflictions qui par le radoucissement de son visages envers moy en recevant mes humiliations et recognoissances vostre charge, Monsieur, la fidellité et affection que portez au Roy et celle que des long temps vous m’avez tesmoigné, m’ont fait adresser à vous me promettant que le Roy l’aura agréable et que tel affaire est digne de l’usage de vostre probité et amitié envers moy ; Je vous baiseray humblement les mains, priant Dieu, Monsieur, vous savoir en sa sainte garde. Vostre bien humble à vous faire service. Henry de La Tour e A Heidelberg, ce 2 jours d’aoust 1603. Archives nationales, 1 AP 397/II/133-134 1604 A Sedan, Henri de La Tour d’Auvergne, soutenu par les princes allemands, essayait de négocier avec le Roi son retour en grâce avec le Roi, comme le prouve sa lettre du 7 septembre 1604. Mais ce retour en grâce était rendu difficile par un nouveau complot formanté cette année là par la marquise de Verneuil pour obtenir la reconnaissance d’une promesse de mariage et de faire de son fils un dauphin en lieu et place du futur Louis XIII. Ce complot échoua comme celui de Biron et à nouveau le comte d’Auvergne qui en était membre se montra très bavard. Henri IV soupçonnait Claude de La Trémoille d’être compromis dans cette affaire et ordonna à Rosny, le nouveau gouverneur du Poitou de le surveiller étroitement. Au mois de juillet 1604, Rosny à l’occasion de la prise de possession de son gouvernement180, vint à Thouars visiter Claude de La Trémoille. Lors de cette rencontre qui se tint du 14 au 16 juillet, il l’engagea à se rapprocher de la Cour. Mais les jours du duc de La Trémoille étaient comptés. Une crise aigu de gouttes l’emporta dans la nuit du 24 au 25 octobre 1604181. Quelques semaines après le décès de son mari, CharlotteBrabantine de Nassau eut la douleur de perdre sa seconde fille, Elisabeth, âgée de 4 ans. A l’occasion du décès du duc de La Trémoille, Henri de La Tour d’Auvergne écrivit à Charlotte-Brabantine de Nassau des lettres très fortes où il l’incita à se soumettre à la volonté de Dieu et à se ressaisir pour l’amour de ses enfants. 7 septembre 1604 - Sedan182 à Henri IV 180 E. LOUIS, “ Voyage de Sully en Poitou (juillet 1604) ”, Revue du Bas Poitou, 1890, p. 348-354. 181 Mme de Mornay dans ses Mémoires décrit les derniers instants du duc de La Trémoille. Henriette de WITT (Née Guizot), Mémoires de Madame de Mornay, Paris, 2 vol., 1868-1869, tome II, p. 53-57.. 182 Cette lettre a été publiée par Guillaume GROEN van PRINSTERER, Archives ou Correspondance inédite de la Maison d’Orange-Nassau, 2e série, tome II : 1600-1642, p. 324-327. Henri Zuber signale qu’une copie en est également conservée à la Bibliothèque municipale de Poitiers, Ms 298 (66), f° 148. 63 Sire, après avoir très soigneusement recerché la cognoissance de ces horribles crimes dont la faulce imputation m’a causé tant de vrays malheurs, desquels je répute à bon droit pour le plus grand et insupportable l’esloignement de vostre présence et l’interruption du fidel service que je doibs à V. M., Dieu m’a enfin envoié ceste consolation par M. de Monlouet, qui m’a apprins en particulier ce que le bruiy commun du monde m’avoit appris qu’en général et confusément ; de quoy je rens grâce à Dieu de m’avoir par ceste cognoissance spécilae facilité le moyen de satisfaire V. M. plus spécialement, espérant qu’il disposera les oreilles et le cœur de mon Roy et maistre pour donner favorable créance à la véritable justification de son très humble serviteur. J’entens donc par la bouche dudit Sr. de Monlouet que je suis accusé d’avoir eu intelligence avec le Maréchal de Biron. Que j’ai traité avec luy ou avec autres pour recepvoir argent du Roy d’Espagne. Que j’étois délibéré de quitter ma religion. Que j’avois entrepris de traiter la paix entre le Roy d’Espagne et les Estats. Que j’avois cognoissance d’une conspiration contre les personnes de V. M., de la Royne, de Monseigneur le Dauphin. Que je voulois faire prendre les armes à ceus de la Religion, et me faire chef de party. Que je faisois levées de gens de guerre secrétement et sans vostre authorité. A toutes ces horreurs et énormités et autres qui en aprochent, je dis et proteste devant Dieu et les anges que, si jamais ma pensée, ma langue, ma main, mon cœur ou la moindre partie de mon corps et de mon affection ont esté infectées ou tant soit peu atteinte, je veux et dois estre tenu pour le plus desloyal homme de la terre, indigne non seulement de sentir la clémence de V. M., mais d’en veoir la face, voire de mettre le pied sur la terre de son obéissance, comme pollué par moy en tant de sortes, que tout ce qu’il y a de sang dans mon corps ne sçauroit laver ny expier les taches d’une si horrible et infâme gratitude envers mon Roy, mon maître et seul bienfaiteur après Dieu ; toute grâce, pour signalée et assurée que V. M. me la peut départir ne le pouroit servir que d’alongement de supplice, que la conscience la plus cautérisée du monde ne lairroit de donner sans relasche à un tel monstre d’homme. De rechef, Sir, je prens à tesmoing le scrutateur des cœurs, que je suis totalement innocent des crimes et autres, pour petit qu’ils peuvent estre, suppliant V. M., au nom de Dieu, protecteur de l’innocence et père de la vérité, de vouloir plutost adjouster foy à ce juste et véritable serment fait par un très fidèl subject et serviteur, qu’aux calomnies de ceux que leurs déportemens monstrent n’avoir ny Dieu à craindre, ny Roy à servir, ny loy à garder. Cependant, Sire, comme je suis aussi net de toutes ses ordures qu’homme de vostre royaume, et n’ay non plus besoin de l’usage de vostre clémence que je redoubte la justice, je ne suis ny présomptueux ny si ignorant de l’infirmité humaine en général, ou de la mienne en paeticulier, que je n’advoue et recognoisse ingénuement pouvoir avoir offensé vostre personne en diverse sorte, et me trompant au jugement que V. M. pourroit faire de quelques miennes action, comme d’avoir craint sa présence, de m’estre présenté à une justice devant que d’en avoir le consentement et approbation spéciale par vostre propre bouche, m’estimant assez muny et authorisé de ce faire par celle qui est portée par l’édict de vostre M., d’avoir peu tenir quelques propos à Monsieur le comte de Saint-Paul, qui révoquoient en doubte vostre bonté pour le regard de traictement de quelques uns, d’avoir dit que je ne verrois vostre face qu’en peincture ; mot qui a esté représenté à V. M. en sens du tout contraire à mon intention, l’aïant plustost proféré par forme de complainte et de prédiction de la durée de mon malheur par celle de vostre courroux, que par quelque désir ou dessein de ma volonté, qui ne peult estre si brutalle que de refuser sa propre félicité ; J’ay sceu aussi que V. M. s’est aussi offencée d’une lettre que j’ay escrite aux églises sur le fait de Monsieur Renaud183 ; vostre bonté a reluy en l’usage de 183 Antoine Renault, ministre de Bordeaux, avait été chargé par le synode national de Gap de faire approuver par les Eglises réformées de Suisse et d’Allemagne les modifications apportées à l’article 31 de la Confession de foi définissant le pape comme l’Antéchrist et la condamnation de la doctrine de la justice passive du Christ enseignée par Piscator et dans le même temps travailler à un rapprochement avec les luthériens. Mission qui provoqua le mécontentement du Roi. Françoise Chevalier, “ L’ambassade d’Antoine Renault auprès des Eglises sœurs de Suisse et d’Allemagne (1603-1607), B. S. H. P. F. , tome 147, octobre-décembre 2001, p. 579-627. 64 l’observation de ses édicts, ainsi que je conviois vos subjects, Sire, de s’y retirer. Ma crainte de l’interruption de vostre édict me peut avoir poussé à les exciter pour le maintenir par termes dont V. M. a esté offencée ; j’en suis très marry, n’ayant eu l’intention de conduire vos subjects à autre mouvement qu’à l’obéissance qu’ils vous doibvent. Je croy et recognois franchement que telles choses auront d’autant plus desplu à V. M., que j’ay eu l’honneur de la servir [premièrement] ; j’en gémis en mon cœur et en suis fort désplaisant, la suppliant très humblement de me les vouloir pardonner, et me redonner l’honneur et unique bonheur de son amitié, se contentant de ceste longue et sérieuse repentance que j’en ressens avec les autres malheurs qu’elle m’impose, et attribuant ces faultes à imprudence ou précipitation, ou mesme à une très grande confiance de vostre bonté, expérimentée par moy en tant de sortes. Daignez recepvoir de moy les services que mon Dieu, ma naissance, ma conscience et singulièrement vos bienfaicts m’obligent à vous rendre et continuer, non avec plus de fidélité, ne pouvant rien adjouster à ceste qualité, mais avec plus de circonspection et soin de n’irriter plus à l’advenir en sorte quelconque celuy duquel je ne puis [que] vivre et mourir, Vostre très humble et très obéissant et fort fidèle serviteur. Henri de La Tour 62 24 septembre 1604 - Sedan Madame, Vous me tesmoignés trop de bonne volonté par la souvenansse qu’il vous a pleu avoir de moy, ainsy que Valigni me l’a raporté. Je n’ay rien quy vous puisse obliger à cela. C’est donc de vostre bon naturel quy est surpassant tous les servisses que je vous sçaurois randre. Je mande à Monsieur vostre mary ce qu’il y a issy de propre pour l’instruction de Monsieur vostre fis. Il a la conscience et la science très aprouvée, l’antrejant est le seul que je luy souheterois pour la conclusion. Je croy qu’il n’y aura grand disficulté, cuidant qu’il se contantera de ce que vous jugerés resonnable et, pour cest esfet, je vous suplie me mander ce que vous voudrés donner et sy je le puis à moins, je le feray. Aussy s’il n’y a cesses je le vous manderay vous suppliant m’an mander vostre volonté et sy vous voudrés qu’il vous aille trouver, ou sy nous aurons ce cher nepveu et que vous voulliés qu’il vous atande issy. Je croy que vostre soeur vous mande que lorsqu’il vous plera anvoyer Le Page an Alemagne, il sera ressu cheus Monsieur /2/ le prince Christien d’Anhalt184, quy est ung second moy mesme, et où il sera fort bien. Je prie à Dieu donner bonne et heureuse issue aus cousches de vostre soeur185. Elle se porte, Dieu mercy, bien et pesante comme celle quy ne fet nul exercisse. Elle aura à ce printemps vos deus soeurs de Hanau186 et d’Orange187 et vostre niesse de Hanau188 desmeurera avec elle. Nostre troupe sera plus alemande que Francese. Aurons-nous ce bonheur de vous voir ? Vous trouverés Sedan bien changé. Je ne seray contant que je ne vous voye anscsamble toutes les soeur, et que je vous tesmoygne que vous n’avés de Le 20 avril 1604, Henri de La Tour d’Auvergne avait écrit une lettre aux Eglises réformées de la province de Guyenne où il avait pris la défense du pasteur bordelais. Bibliothèque nationale de France, Ms : Nouvelles Acquisitions Françaises 7161, ff. 145-148. 184 Christian I von Anhalt (1568-1630), prince d’Anhalt (1603), conseiller de l’électeur palatin Frédéric IV, forma une alliance protestante contre les états catholiques de l’Empire et obtint des succès limités avec la constitution de l’Union évangélique (1608). Il arrangea l’élection de Frédéric V au trône de Bohême alors que Ferdinand de Hasbourg était élu empereur. Il ne put réunir les aides escomptées et fut défait lors de la bataille de la Montagne Blanche. Banni par l’Empereur, il obtint son pardon en 1624. 185 186 Elisabeth de Nassau attendait sa fille Julienne-Catherine, future comtesse de Roucy. Catherina-Belgica de Nassau (1578-6148), épouse de Philippe-Ludovic II d Hanau-Müzenberg (1576-1612). 187 Emilia-Secunda de Nassau (1581-647). 188 Charlotte de Hanau-Müzenberg (1597-1649). 65 serviteur plus fidellemant aquis que moy, quy vous bese très humblemant les mains priant Dieu, Madame vous donner heureuse et fort longues vie. A Sedan, ce 24e septembre. Vostre humble frère et afectionné serviteur. Henri de La Tour Je croy que si la charge de Mademoiselle Doucherne venoit de trop grand coût qu vous seryés fort bien servye d’elle. La nostre à mon avis sera fort bonne famme et bien songneuse. Lolo189 commanst à le faire paroistre. Archives nationales, 1 AP 434/56 63 1er novembre 1604 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Nous n’avons retrete an nostre affliction qu’en la connoissance quy nous assure que Dieu fet toutes choses pour le bien de ceux quy le craignent. Il à retiré à luy vostre chère moitié et mon second moy mesme, luy bien heureus et nous retenans nos peurs avec le renouvellemant de nos regrets par son absence, debvans, avec humilité, nous submestre à ce quy n’a remède pour la continuassion de vos plintes. Je voy ceste tant chère amitié sesparée au milieu de vos jeunes ans, ravy de vos costés, ce suport sy dou et tant utille à ses chers anfans, vos plus frans parans et serviteurs innutilles et au partie leur intervanssion plustost nuisible q’utille an une sagesse où la franchise des amitiés est sy rare, la haine publique regardant, desjà d’ung oeil de travers, l’aide et susport que ces jeunes plantes peuvent porter à l’esglise de Dieu. Tout cessy vous monstre, Madame, le monde contrère et vous retire à ceste singulière piété quy se resluy an vous, pour mettre des tout vostre assurance an Dieu quy ne vous descevra point. L’estat où est vostre soeur, m’a fet luy celler ceste irréparable perte, m’assurant que vous jugerés que l’annuy avec lequel elle la recepvra aucmanteroit la vostre pour le danger auquel elle et son fruit pourroit tomber sy elle la sçavoit avant que d’estre deslivrée. J’envoye Valigny vous porter non mes consolassions, mes mes regrets quy n’atindront jamès à la perte que j’ay faite. Vous ofrir de assurance et à vos chers anfans le tout de moy et pour vous servir et que je ne regarderay aucune chose qu’à ce quy /2/ vous sera plus utille, ne regardant mes biens, la conclusion de mes afaires an rien sy contrère qu’en cella, qu’elle me priveront de vous rendre autant de servisse que je m’y sans obligé. J’atandré le retour de ce porteur, avec des crintes de vostre santé et des regrets que je ne pusse courir vers vous. Sy le hasart de cette vie voir, sa perte, vous pouvant servisse, me plairoit plus de le faire an souvenir ce que nous avons perdu, que de vous desmeurer innutille. Dieu vous consolle, Madame, et vous acompagne de son saint esprit pour vous envaïr de constance et de conseil parmy tant d’aflictions et vous fasse la grasse de conserver mes jours à son servisse et à porter mes actions à satisfaire à la confiance que mon second moy mesmes m’a fet paroistre d’avoir an mois ; à quoy avant que faillir, je supplie à Dieu de m’ôter le vie, priant Dieu, Madame, vous donner très heureuse et fort longue vie. Vostre très humble frère et fidelle serviteur Henry de La Tour Sedan, ce 1er novembre 1604. Archives nationales, 1 AP 434/43 64 189 Louise dite Lolo fille aînée du duc et de la duchesse de Bouillon. 66 30 novembre 1604 - Sedan Madame; La nature nous aprant de nous afliger et abatre sens ses ressentiemans des pertes samblables à la vostre, laquelle pour mieus parler ne peut recepvoir de comparaison pour le mérite et vertu de la compagnie qu’avec eslongnée avec l’esprit et l’escolle crestienne an avés esté honorer et la sainte profession qu’avés faite de resconnoistre. Dieu tout bon vous doit reslever et vous dis ceus de la foy. Ce cher mary bien heureus dans le respos esternel et vous disposer et vos annuits dans ceste certitude que ceste sesparassion est juste et tournera au bien de vous, Madame, quy le creigner, pliyés donc comme par sces tens autres après vous. Il m’a faillu faire sous ceste volonté sainte et me résoudre d’atandre mon heure destinée avec passiance an randant ce quy me reste au servisse de l’Esglise, au vostre et à celluy de vos chers anfans, pour lesquels, Madame, vous debvés vous conserver et n’acroistre pas vos aflictions, vos doulleurs, an sorte que vous vinsiés à leur manquer. Vous debvés plus que tout à votre resconnoistre combien de pertes ils recepvroyent an vous. An continuant vos annuits, vous irrités Dieu contre lequel vous desputés. Vous vous despartés de la direction de vos afaires /2/ quy an recepvront des inconvenians quy pas cy après seront fort malaisés à resparer au non de Dieu et sy l’honneur que me faites de m’aymer, peut tenir quelque plasse, apaiser vos annuits et panser à vostre santé et nous donner cet assurance an nos esprits, que ausy puissions vois ces jeunes plentes eslevées, maintenues et conduite par vous au chemin salutaire pour leur âme et l’honorable pour leurs corps. Je voudrois avoir autant de bonheur et de sagesse an mes conseils, comme ils auront de la fidellité pour les voir randre aussy utilles que je les désire puisqu’il vous le plaist. Je fet ung petit mémoire de ce quy me semble sur ce que Valligny m’a dit de voste part. Ce quy restera, je y satisferé sur le retour des incésentes lequel vous raportera ung notable contantemant à vos doulleurs et vollonté à les soulager. Avant l’arivée Des Masures, j’avois donné avis à Madame l’Eslectrice de vostre perte, laquelle Monsieur son mary et elle ont suporté avec grande tristesse. Ils fesoyent une despesche vers /3/ vous et vous anvoyoyent ung homme comme il vous plaira le voir par sa lettre que je vous envoye. Honorés-moy, Madame, de ceste ferme assurance que je vous seray à jamès très fidelle. Je vous assureray du bon portemant de vostre soeur qui ascouscha très heureusemant le 27 de ce mois, antre trois et catre heures du matin, d’une grosse fille190. Elle a eu des tranchées, mes elle luy sont presque toutes cessées. Son travail fut fort court et peu douloureus. Il luy reste du soussy de n’avoir eu de vos lettres. Nous luy avons cellé la triste nouvelle, m’assurant que son deuil luy ut porté du presjudisse ; ce quy luy aiderast autant à le susporter seroit sy an la saschant vous la puissiés assurer de vostre consollassion. Je prie à Dieu qu’il nous an donne le moyen et de vous randre jusques au tombeau nos fidelles servisses comme s’y sent abligé, vostre humble frère et serviteur. Hanry de La Tour A Sedan, le 30e novembre. Archives nationales/1 AP 434/44 65 14 décembre 1604 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, La continuation de vos annuis metent tous ceus quy vous aiment an une très grande peine, que vous ne courroussiés Dieu contre vous et que ne vous aidiés an vous nuisant à vostre santé d’avancer la ruine de vos chers anfants. Pour l’amour d’eus et de tous ceus quy vous aiment, desposés vos cris dans le volonté de Dieu, quy ne fet rien que justemant. 190 Julienne-Catherine de La Tour, née le 27 novembre 1604, future comtesse de Roucy, fut baptisée le 22 juin 1605 par M. du Tillay. 67 Vous aurés par ce gentilhomme quy vous est anvoyé de Leurs Altesses palatines tesmongnages du santiemant qu’ils ont de vostre perte er de l’afection qu’ils vous portent, Madame, et à vos chers anfants. Desmasures vous dira quelle est leur afection et l’assurance que debviés prandre de ces bons parans. Nous avions cellé jusques à hier à vostre soeur vostre perte. Cella luy a esté sy dur, que je ne puis vous dire avec combien de doulleur, elle a suporté ceste nouvelle et combien à tous moments, il samble qu’elle s’inscinue dans vos tristesses, resconnaissant vostre amitié et naturel, vers ce que vous avés perdu. La Masure l’a veue quy vous dira la tendreur de son amour et servisse vers vous. J’ay discouru avec La Masure de tout ce que je panse pouvoir par mes avis soulager vos /2/ deshhirassions et conseils ne me permest rien avoir tant désiré de moy que je pusse vous randre les servisses, auquels je me sans très estroitement dédié. Mon âme lors seroit déchirée des prainsipaus annuits qu’elle soufre de ce voir privée des moyens de satisfaire a aucuns de vos commandemants. Acceptés mon afection, Madame, avec ceste impuissance, estant fermenant persuadée que jusques au tombeau je vous seray très fidelle, vous besant ung milion de fois les mains, priant Dieu, Madame, vous donner très heureuse et fort longue vie. A Sedan, ce 14 démbre. Vostre humble frère et très afectionné serviteur. Henri de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/45 66 22 décembre 1604-Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vous avez rayson de dire que je ne [le] veus pas, l’amour de vos chers anfans et la tendre amitié que je vous porte, me feroyent recepvoir an vostre perte l’impossibilité de la surporter. Cessés là violance de vos annuits et fortifiés vous par la science que vous avés que ceste [chère] moitié a eu ceste confiance an vous assurée que vous seriés ung assure asille pour la conservassion de vos tendre anfants, m’ayant souvant dit que pour leur bien vous leur estiés plus nescessaire que luy. Obéissés-luy donc et que vostre amour vers luy paroisse plus an luy obéissant à ce quy vous est tesmoygné de son atante que non pas an vous habandonnant, seul santiment de vostre perte. Dieu demande de vous cest acoisemant afin que vous le lessiés, vos anfants le demandent de vous afin qu’ils soyent nourris par vous Madame, pour le louer et servir à ses Esglises. Vous [verrés] par celluy que Monsieur et Madame l’Eslectrisse vous ont anvoyés l’assurance que debvés avoir an leur amitié et combien ils patissent avec vous pour la perte que ils ont feste. Je croy qu’il vous faudra faire ung présent d’une chesne de cent escus à ce gentilhomme, le faire desfrayer et le traiter comme ambassadeur représentant ung grand prince. Assurés-vous de tout ce qui /2/ est céans : nos vies, biens sont à vous et aus vostre, ceste afection ne soufrira jamés diminussion, et me promets que Dieu me fera la grasse de surmonter tous les obstacles qu’on voudra porter pour ampescher que nos servisses ne vous soyent utilles ; vous bésant ung million de fois les mains, priant Dieu, Madame, vous donner son assistance pour soulager vos annuits et surmonter toutes les fascheryes de vostre coeur. A Sedan, ce 22e débre. Vostre bien humble frère et fort afectionné serviteur. Henri de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/46 1605 A nouveau cette année les nuages s’amoncelèrent sur le tête du duc de Bouillon. Henri IV le soupçonnait de vouloir constituer une union protestante à son profit. Au bruit que la 68 clientèle de Bouillon se soulevait dans le Limousin, le souverain se décida d’agir énergiquement. Alors que ses diplomates rassuraient les princes allemands, Henri IV au mois de septembre marcha vers cette province avec une armée de 7 000 hommes. Cette opération fut une promenade militaire parce que Bouillon avait donné l’ordre d’ouvrir les portes des châteaux de la vicomté de Turenne. Il était trop fin politique pour lutter par les armes contre le souverain. Dès le 20 septembre 1605, il adressa à celui-ci une lettre de soumission demandant son pardon. Six de ses partisans furent exécutés, les autres avaient pu se réfugier en Espagne. 67 3 mai 1605 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Il me samble que vous avés fet ung bon acort avec Monsieur de Montatère191 et que ancores qussiés obtenu les brevets du Roy pour le payement de la garnison comme vous le désiriés. Cest acort vous rand ceste afaire hors des broulleries de la Cour. Dieu veulle bénir vostre voyage et nous donne tant d’heur et d’honneur que de vous voir céans. Je m’assure que vous este munie d’une ressolussion antièremant chrestienne et d’une sainte amour vers Monsieur vostre fis, pour ne vous lesser directemant, ny indirectemant obliger à chose quy sesparast sa nourriture du chemin que Dieu veut qu’il trouve, que feu Monsieur son père a sy souvant tesmoygné, qu’il vouloit qu’il suivoit et que vous, Madame, par vostre vertueux exemple luy sçaurés faire tenie avec vos journalières instructions. Ceste ressolussion ne doit estre esbranlée, ny par autorité par respect de paranté, ny d’abscence par considérassion de biens ou de peines, ains aller avec assurance que Dieu vous fortifiera et par ceste juste volonté amotira les ressolussions et finesses s’il y an y a de ceus quy voudroyent vous contrindre an tromprie pour vous an faire despartir /2/. C’est trops parler à vous à quy Dieu a donné tant de grasses. Nous sommes assuré d’avoir ceste chère Electrisse et ses autres sœurs, quy par espérance jouisse desjà de vous. Commant blasmer an vous ce désir de voir ce quy vous est sy prosche et commant vous an refuser la permission, veu que ceste ocasion, avec assurance, ne paroystra samblable de nos vues. Quelle joye ou plustost quel resnouvellemant de tristesse de ne jouir tous ansemble. Nous le trouverons à dire le souvenir de son heur, arester nos plintes et faudra posséder l’heur de ceste tant chère rancontre, comme ayant esté l’ocasion préparer de Dieu pour le plus souverin remesde pour soulager vos resgrets et les nostres. Vous aurés les lettres de ceste grande Eslectrisse resquérant avec vous afin que son respect et humble suplicassion vous fasse permetre de vous voir, ces gents et heurs prascrits à toute conversassion, adjouster vostre santé, ayant les eaus de Spa tout autre vertu que celle de Pougues. L’expérience que j’an ay faite me fet vous an assurer et les ay issy aussy bonnes que sur le lieu. Et ne me /3/ restera qu’à vous ofrir un biens et une amour quy ne peut estre esgalée de nul quy vive, et aimers vos chers et biens aimés anfants : la prospérité de tous m’estant aussy ou plus chère que des miens, vous baisant très humblement les mains, priant Dieu, Madame, vous donner toute sortes de prospérités temporelles et spirituelles. A Sedan, ce 3e may. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/47 68 5 juillet 1605 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, 191 Jean de Madaillan († 1627), seigneur de Montataire, était le gouverneur de Thouars. 69 Je suis fort marry que vostre soeur et moy ne puissions satisfaire aus choses que luy avés escrites et fet dire pour n’avoir point, sur quelques points, pu ainsy que l’ussions désiré, comprandre vostre intansion, n’ayant rien au monde que je désire tant de vous randre et à vos chers anfans le servisse que je vous ay voué. Vous avés esté souhétée et ressouhétée à tous momans pour servir de la meilleur plus dousse et fassille conversassion de personnes que vous ayés jamés reçu ; ceste ocasion est passée, Dieu an ofrira une autre lorsque vous y panserés le moins. Je commande à ce porteur de voir vos chers anfans avant que revenir afin de me raporter l’estat de leur santé. Sy vous jugés que cella se puiss faire, il me seroit impossible de vous dire de quelles et combien de personnes vous vous debvés servir que je ne sceusse jusques où vous vous estes obligée, à ceus quy vous servent despuis la mort de Monsieur vostre mary. Pardonnés-moy sy je vous conjure à préférer la religion de vos chers anfans et /2/ leur bien, à toutes choses quy se pourroit ofrir pour eus et pour vous, non que je doute, an aucune fasson, de singulières grasses desquelles Dieu vous a dosté et de vostre piété et zelle, quy vous rande honorée et estimée des plus meschans, mes je m’assure que vous santés et connoissés qu’on n’oubliera artifisse pour vous faire despartir de ce nostre St debvoir et, certes, il vous faut avoir une ordinaire mésfiance pour s’en dire, et les choses quy vous seront dites et par quy elles vous seront dites. Le diable se vêt souvant an ange de lumière et les loups prennent la peau des brebis pour tromper le berger. Pardonnés donc à mon afection et vous assurés de mon servisse avec toute fidellité, vous aimant plus que moy mesme et vous le puis jurer que vous este tousjours présente an ma mémoire et le seray tant que je vivray sans discontinuassio. Je vous bése ung milion de fois les mains. C’est Vostre humble frère et afectionné serviteur. Henry de La Tour e A Sedan, ce 5 jullet 1605. Archives nationales, 1 AP 434/48 1606 Au printemps, Henri IV avec une forte armée marcha sur Sedan. Le duc de Bouillon le 2 avril 1606 lui remit la place entre les mains. Le souverain installa une garnison à Sedan. Il fit une entrée triomphale à Paris avec le duc de Bouillon derrière lui. A la Cour, Henri de La Tour d’Auvergne trouva une cause à défendre : à la suite de la mort du jeune comte de Laval, François de Coligny, en Hongrie à la fin de l’année 1605 la duchesse de La Trémoille et sa belle-soeur la princesse de Condé revendiquaient l’héritage de la Maison de Laval pour leurs fils en tant que descendants de Francois de La Trémoille et d’Anne de Laval. Pressé par son épouse, il soutint sa belle-soeur. L’on sait que Henri IV qui n’aimait guère le jeune prince de Condé se prononça en faveur de la duchesse de La Trémoille. A la suite de la présence à Paris de Henri de La Tour d’Auvergne et de Charlotte-Brabantine de Nassau, nous ne disposons d’aucune lettre de celui-ci à celle-ci pour l’année 1606. Par contre, nous disposons de 11 lettres écrites par le duc de Bouillon à son épouse allant du 8 août au 22 décembre. Au début du mois de juillet, Elisabeth de Nassau accueillit à Sedan sa sœur, CharlotteBrabantine. Les deux sœurs partirent ensuite à Spa prendre les eaux. Elles revinrent à Sedan au mois de septembre. Henri IV le 3 octobre autorisa le duc de Bouillon à aller voir son épouse à Sedan. Le 22 octobre, ils firent baptiser à Sedan leur fils Frédéric-Maurice. Charlotte-Brabantine de Nassau était la marraine avec sa nièce Louise de La Tour d’Auvergne qui représentait Chrétienne, la soeur de l’Electeur palatin. Les parrains étaient : l’Electeur palatin Frédéric IV, représenté par son ambassadeur le comte Otto de Solme, le prince Christian d’Anhalt, représenté par le baron de Dona et Maurice de Nassau, prince d’Orange, représenté par M. de Nétancourt192. 192 L’acte de baptême de Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne a été publié par Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, op. cit., tome II : Preuves, p. 804. 70 69 8 août 1606 – Paris à Madame de Bouillon Mon Cœur, sy je puis, je vous anvoiré tout ce que vous avez désirés. Je suivray vostre avis pour le mandat de Maringues. J’atans les députés de Turenne, où l’on m’assure sur la dernyère despesche que j’ay ressue qu’ils commancent à resconnoistre qu’ils me doivent contanter. Je suis après à faire descharger Monsieur Sardyny de sa caussion an fesant que quelque ungs qu’y ont de l’argent rachetent de mes rantes et an feront le raschat au dernyer sens quy me deslivrèrent d’ung cart des intérêts. Madame du Mayne est une moqueuse et chicaneuse. Elle demande compossision et prédis que je ne la refuseray pas lors qu’elle me fera voir commant elle me voudra payer à cella on ne me dit rien quy vaille puisque on dit amen. Pour ce dû que vous me mandés, vous pourrés retirer ces rantes dont nous parlasmes ayant à causer sy vous an pourrés tirer quelque compossission et pour cella il vous faudra parler vous mesmes à ceus à quy elles sont deues. J’anvoye le passeport de Madame de La Trimoille. Elle voira la modificassion quy y est a présent, quy monstre les >>>tes de ces gents. Et pour mon opinyon, je ne suis pas d’avis qu’elle parte de Sedan. Pour vostre voyage, j’en ay fort bonne espérance, mes il me faut voir ung peu d’avantage la poursuite des affaires de Monsieur le prince d’Anhalt auquel j’ay parlay pour le batesme. Je feray de luy tout ce que je voudray. Je veu vos pierreries bisayé, desquelles est presque tout perdu, sy bien que sy je croyois à mon avis et celluy des orfeuvres, je les feres presque toutes mestre au autre œuvre à sçavoir an chesne, boutons et grande anseigne. Vous m’an /2/ donnerés vostre avis, cepandant je fes faire des patrons de chesne pour aviser la plus praticable et après cella fet nous aviserons ce que feront du reste. Je trouve issy une grande rumeur des mescontentemans que le Roy ut à Villers-Coterets de Madame de Longueville. La cause visible estoit sur les rancs. An quy on disoit s’estre opiniatré par l’avis de Monsieur d’Espernon, lequel je trouveray an sa mayson à Fontenay et non issy, ains que j’y armay à mon jugemant. Il y avoit quelque autre subject, cella dure ancores. La marquise de Verneuil est issy. Le Roy la voit assés visiblement. Elle se résout, pour obéir au Roy, quoy que ce ne soit pas sa volonté de se marier, mes dit vouloir bien faire achepter cella des maris. On a parlé de Monsieur de Nemours, duc de Monbason, marquis de Ceuvre et Termes auquel on areste plus de croyance. Veut randre Verneuil et ses meubles à la Roine, quy va tous les jours dîner an diverses maysons avec le Roy et la duchesse de Mantoue193. La marquyse voyant La Varenne luy dit : “ Je vous vousloit marier et avec quy avec Madame de Fontene ”. La compagnye atandant la Royne de ceste ellection quelque temps. Et dit-elle c’estoit pour ny avoir rien plus prosche que les chevaus de louange avec les cosches d’Orléans. Tousjours quelques querelles, grande challeurs, aucmantassion de peste, mes non sy grande qu’on la croyt. Le batesme à Fontenebeleau dans la cour. Je voyre sy demain j’aure ancores a adjouster /3/ quelque chose. Je ne sçay sy les abricots seront estés bien portés. Vous me résoudrés pour vostre chesne. Pour la faire digne de vous, il y faut employer tout ce que je mis sur le mémoire, sauf les grandes pierres des piesses contenues au mémoire que je vous anvoye. Mandés-moy sur ce vostre volonté. Je te donne mille bonjours. Bonjour $ $XX$ $ e Ce 8 aoust. Mes très humbles bèses mains à la très bonne sœur, que je suis son serviteur fidelle, qu’elle feroit mieux de prandre des eaus avec vous à Sedan que d’aller à Spa. Mandés-moy sy vous an prandrés. Archives nationales, R2 53 70 193 Eléonore de Médicis, sœur de la Reine, épouse de Vincent de Gonzague, duc de Mantoue. 71 20 août 1606 – Paris à Madame de Bouillon Mon Cœur, je veu par vostre lettre que vous avés pourveu à ce quy estoit nescessaire pour la sûreté de vostre voyage, laquelle je désire à Madame vostre sœur et à vous comme aus personnes du monde que j’ayme le plus. Je croy que vous aurés trouvé des inconvéniens dites toutes deus an allant et sur les lieus à prandre des eaus quy vous auront fet désirer de n’avoir bougé de Sedan. Je vous ay mandé la permission de vostre voyage d’Alemangne et ay fet plus, car j’an ay donné avis à Madame l’Eslectrisse. Le Roy a esté troys jours hors de ceste ville à la chasse, où j’ay esté. Il se résout de faire le batesme le premier du mois quy vient à Fontenebeleau. Je vais faire ung neu et ung bouton de vostre chesne pour le vous anvoyer. Je fis rompre ceste anseigne du butin baillé une coste et ung de ses prims lettres desquels il choysira ce qu’il luy faut pour sa besongne. Les desputés de Quercy sont arivés aussy mal instruits qu’il est possible. Ils n’avoient aporté aucune lettre, ni fet paroistre d’aucun acte de leur desputassion. Je les ranvoye avec charge de cotiser et lesser lever les denyers imposés par le Roy ; et que antre cy et la fin de l’année je leur donneray pouvoir d’assambler les Estats pour aviser avec moyens de faire cesser ceste impossission. J’atans ceus de Limousin lesquels, je croy, viendront myeus insformés. Je suis tous jour après à faire descharger Monsieur Sardyny et à rachepter quelques rantes et à payer des debtes à quoy je porte tout l’ordre qu’il m’est possible. Je fais cercher ung chaspeau pour le petit. S’il s’an trouve, il an aura par ce cosche. Je mande à Stasquin de m’anvoyer les procurassions /2/ de Despaynis. Pour Userche, je vous ay escrit au long pour ce fis du conte et ce quy sera ocassions d’an faire ainsy, quy est le chemin qu’il m’y faict tenir je seray ung petit an peine jusques à ce que je sasche vostre retour. Je ne voy rien issy où je puisse servir Madame de La Trémoille. Le jeune Montmartin194 ne m’est ancores venu voir. S’il y vient, je luy parleray pour ce qu’il a avec celuy quy est dans Vitré pour y an tempérer les choses au contantemans de Madame leur mestresse. Je crins que Monsieur de La Noue ne fasse continuer la chambre et par conséquant le présidant. Je fais ce que je puis pour luy faire changer ceste ressolussion. Vincent aproche une partye de son esprit, à borre aussy bien que respudi. Je vous anvoyeray vostre lit et le damas pour le petit joly garçon. Fectes mes excuses à Madame vostre chère sœur que je bèse et rebèse ung million de fois comme le plus fidelle serviteur quelle aye ; et à vous je vous donne mille bons soirs, acompagne d’ung grand désir de voir réunies quy ne sera pas sy tost. $ $XX$ $ e A Paris, ce 20 aoust. Archives nationales, R2 53 71 3 septembre 1606 – Fontainebleau à Madame de Bouillon Mon Cœur, je vous escris bien marry de n’avoir leu lettres que je croy estre arivées hier à midy à Paris venant de vous. Monsieur de Rignac y est, quy est usé de ceste nonchalance. Je croy qu’il n’en sera pas de mesme pour vostre lit quy doit partir mardy pour vous estre randu. 194 Philippe du Matz de Montmartin, vicomte de Terchant, a qui Charlotte-Brabantine de Nassau avait fait donner la charge de lieutenant au gouvernement de Vitré, se rendit à Paris au début du mois de septembre 1606. Il était en très mauvais termes avec Jean Nouail, sieur du Jaunay, le capitaine de la garnison du château de Vitré que la duchesse de La Trémoille avait également confirmé dans ses fonctions. 72 Sy ce beau temps ne vous a fet alonger les vint jours que vous voulés demeurer an vostre voyage des bains, ceste-cy vous trouvera au retour, que je désire estre avec l’antière garison de Madame de La Trémoille. Je croy que vous sçaurés les temps et le lieu où vous pourrés voir Madame l’Electrisse et aurés ressolu le temps de vostre partement. Tout le monde se rassamble issy pour le batesme et l’acroissement de la contagion a Paris an fet sortir plusieurs. J’anvoye ce laquais afin de me servir de la commodité de mes mulets pour me raporter de l’eau de Spa, laquelle je désire que Bonne, luy mesme, soit sur le lieu pour la faire prandre, bouscher et faire conduire jusques à Sedan et à faire la charge des mullets au mieus quy se pourra pour ampescher qu’il n’an meslangoient antre cy et Sedan. Je vous prie donner bon ordre à cella, ressantant mes indispossissions an estat qu’elles pourront recepvoir beaucoup d’amandemant des dites eaus, mes il faut faire porter des grandes et petites bouteilles et telle cantité que /2/ j’an puisse boire vint jours à catre vint des >>> par jour sans les petites bouteilles, quy serviront à mestre dans mon vin, de fasson que la charge des deus mulets que l’on a mandé de ranvoyer n’estoit trop grande, il faudroit les faire suivre de quelque charge donné afin de n’an avoir point défaut. Après le batesme, je vous manderay toute la cérémonye afin de satisfaire à vos curiosités. Je acheté des boutons, une dousayne et demye quy me coûte près de mil escus. Vous aurés bientost le pastron de vostre chesne pour an juger. Voissy le temps quy aprosche de couper des bois. Il vous faut firmer à ung pris et au cas que vous n’an ayés cella ne les outrer point et les lesser une [] année sans an vandre. On m’a mandé que voyant se randu disfissille. Feites-moy sçavoir ce quy an est, afin que sellon cella je le fasse sçavoir issy et s’il fet quelque bisarerye dites le luy franschemant, me prometant qu’elle ne sera pas aprouvée issy. Ranvoyés moy tost ce laquais. Je vous donne le bon soir et la très pouvre et bien aimée Madame de La Trémoille. C’est $ $XX$ $ e A Fontenebeleau, ce Dimanche 3 à sis heures du soir195. Archives nationales, R2 53 72 10 septembre 1606 – Fontainebleau à Madame de Bouillon Mon Cœur, vos dernyères, quy me furent rendues hier par le capitaine Ceullin, m’ont fort resjouy d’avoir sceu le bon portement de Mme de La Trémoille et vostre pront retour à Sedan. Le batesme ne se ferra qu’à la fin de ceste sepmaine196 et soudain après la duchesse de Mantoue s’an va et aussy tost toute la compagnye se sesparera et la Cour desmeurera fort petite quy fera un sesjour issy et aus anvirons. La peste aucmantant bien fort à Paris, quy me fit estre d’opinyon qu’on doit an tout desfandre les voitur du presche ne se pouvant continuer qu’avec grand péril pour nostre petit troupeau. Toutesfois, je remets cela à vous de voir sy les coschers pourront trouver ung tel reglemant qui en plur>>>t à l’inconvénian de leurs antrées au plusieurs logis. Je croy que Madame de La Trémoille sera toute ressolue au voyage d’Alemangne, quy n’a nulle rayson pour quoy elle an dusse perdre la commodité. Le plus tost le faire sera le meilleur pour jouir du beau temps, là vous resoudrés le batesme de nostre petit qu’on debvra faire aussy tost que vous serés retournée afin de jouir de la présence de Madame de La Trémoille. Vous pourrés faire donner la commission par de là, sy vous y voyés quelqu’un capable ou bien lui faire anvoyer au jeune baron Chauveau quy est issy pour s’y trouver. Vous ferés tous les 195 Le duc de Bouillon avait écrit : A Paris, ce d… avant de le rayer. 196 Louis XIII et ses sœurs Elisabeth et Christine furent baptisé le 14 septembre 1606 à Fontainebleau. 73 complymans quy se doyvent faire par delà, et pourrés tenir Monsieur le prince Morisse averty du jour que prandrés et pour moy, je croy que je m’y pourre trouver. Pour vous anvoyer quelque chose pour les petits princes, il m’est fort disfissille à cause de la contagion et de la presse de toutes sortes sortes d’ouvriers. Monsieur le prince d’Anhalt et moy parlasmes du lieu de sa desmeure, il n’an trouva de plus propre que le ranvoyer à Sedan pour ung an et après le faire venir à Paris. Il y fera ce qu’il pourra, n’ayant rien à combatre que l’opynion et jalousie du père, quy ne sçait où mestre son fis pour ne le crindre an vostre voyage. Vous aviserés avec Madame /2/ commant elle voudra que vous serons pour cella qu’elle désire. Le prince d’Anhalt me dit que on pourrait destiner son antrennemant sur l’argent que nous leur debvons, lequel estant desboursé leur sera de moindre considérassion que sy il le failloit tirer de la bourse. Sellon que je scauré que dire résoudrons pardella sur ceste derrnière, j’an parleray au Roy afin de le luy faire trouver bon. Je croy vous avoir mandé que j’ay anvoyé à Madame l’argent pour racheter vostre diamant et an faire le payemant à ceste foire de Francfort mes d’autant que vous avés les papiers, sans lesquels je crains qu’ils ne le veule, sont baillés et que vous ne pouvés estre de retour pour les anvoyer suremant par nos marchans. J’ay mandé à Madame que vous les luy porterés et que cependant elle nous fit ceste faveur de retirer le diamant et prometre de faire remestre les dits papiers dans le temps qu’il luy plairoit prandre. Ce que je cuide qu’elle aura fet. Ouvrés hardiemant toutes les lettres qu’on m’anvoyra d’Alemangne. Je ne vous puis rien anvoyer de vos hardes que le batesme ne soit fet et incontinant vous aurés tout sauf ce quy pendra pour vostre chesne quy est commancée. Je vous an feray voir le premier neud quy an sera fet. Je change les deus diamans et le ruby quy estoyent an ung mesme chastau contre une plume de diamans belle pour mestre sur le bras et y ay adjeusté quelque chose que je lerray à vostre bon jugemant d’estimer ce qu’il y a de plus. Je me trouve ung peu ampesché commant vous anvoyer vos besognes ne trouvant néanmoins /3/ ung meilleur moyen que par le cosche, lequel je feray acompagner pour luy passer les bois de claye et vous aurés à anvoyer quelqun au devant de luy jusques à La Rouyère dunn le mardy. Je feray bien accommoder le tout de fasson que rien ne se gastera. Sy Madame de La Trémoille avoit faute d’argent, sy vous ne l’an pouvés acommoder, mandés le moy et n’y pouvant commandés an cestte de faire bien foueter gran il n’est subject auprès de flamme. Et mandés moy, comme par l’avis des plus antandus, les afaires des Vénissiens et du pape s’aygrissent. Le siège de Rinberg nous tient an désire de les >>>> mant. Monsieur de St-Angel y est et blessé dans la cuisse. Monsieur le prince Morisse partoit de Wesel pour s’aler loger près du camp des ennemis. La Roine est grosse de deus mois et la contesse de Moret197 aussy. La Court est grosse mes non au pris de ce que l’on estimoit qu’elle le doit estre. J’ay peur que Maran n’aura reçu sy je ne vois à Paris. J’atans mes eaux quy me feront, à mon avis, ung très grand bien. Je ne sçay sy vous trouverés vostre lit bien fet, pour le mieu est-il bon. Vous n’aurés, à mon avis, quune autre fois de mes lettres avant vostre partement, cuidant que vous debvés premièremant an donner avis à Madame l’Eslectrisse afin qu’elle se trouve à Caseloutren198 au temps que vous prandrés il ne faut pas faillir à l’heure de l’assinassion. Je vous donne le bon jour et Madame de La Trémoille recepvés les assuransses de mon inviolable servisse. $ $XX$ $ e Ce 10 septembre de Fontenebeleau. 197 Jacqueline de Bueil, parente de la princesse de Condé, Charlotte de La Trémoille, qui en 1604 avait succédé pour un temps à la marquise de Verneuil dans le lit d’Henri IV qui pour cette raison l’avait fait comtesse de Moret. Elle donna en 1607 le jour à un fils Antoine qui fut le comte de Moret. 198 Kaiserslautern. 74 Archives nationales, R2 53 73 3 octobre 1606 - Fontainebleau à Madame de Bouillon Mon Cœur, vous n’aurés que ce petit mot pour vous dire que j’ay eu un congé pour vous aller voir aussy tost que je sçauré le jour que vous serés à Sedan. Lile est venu de Touars, m’a porté une lettre de Chauveau pour me prier d’empescher qu’on ne demandas par surprise le priuré de Touars dont le prieur a esté tué. Il fit cella et n’an arivera aucunemant. Je vous ay mandé que Madame m’anvoyast des lettres pour le Roy et Monsieur de Sully touschant son afayre et que j’aviseray d’y fraper coup comme à mestre son afaire entre les mains de quelques plus propre que le baron Chauveau. Je la serviray fidellemant. Monsieur l’Eslecteur aura de l’argent, estant le Roy fort contant de luy. Leurs Majestés me disoyent hier l’anvye qu’ils auroyent de voir ceste digne princesse. Vraimant je leur an ay bien dit ce que j’an croy. Mandés-moy donc de vos nouvelles et me croyés desjà joyeus de l’espérance que j’ay de t’embrasser et nostre petit ménage que je considère moins d’autant qu’en vostre amitié toutes mes afections sont comprises, ne les regardant d’estre sesparés, mes an vous an quoy vous tenés ung bien petit de la divinité. Je suis fort an peine de Jullienne. Dieu la nous veulle randre. Monsieur Louis n’y a pas fet grand chose. Je vous donne le bon jour. $ $XX$ $ A Fontenebeleau, ce 3e octobre. Par mon allée à Sedan je porteray de quoy contanter tout le monde. Archives nationales, R2 53 74 4 décembre 1606 – Paris à Madame de Bouillon Mon Cœur, je m’assure que vous este navrée de n’avoir point eu de de mes lettres par le dernyer cosche. Il ne vint issy que le dimanche et j’eus vos lettres que le lundy fort tard. N’ayant eu le temps d’anvoyer les myennes pour estre issy le mardy avant qu’il respartit, je vous respondray par celle-cy à toutes les deus. Je plains vos maus et d’autant plus que vous ne cerchés les moyens de les vous aleger, soit an vous donnant quelque plaisir soit en vostre vivre lain>>>>> et le plesir que vous donne nos anfants vous doyvent soulager les peines qu’avés à les porter. Vous pouvés seulle par vostre exemple ancourager nos filles à la langue alemande. Je vous ranvoye la lettre quy n’est de la main de Madame l’Eslectrisse. J’apréhande fort d’avoir bien de le peine à la bien servir, ainsy que je le désire. Je ne my espargneray pas. Les rumeurs continues an ceste ville vers ceus de la religion, me font suspandre l’avis que je donnois de faire venir le petit prince issy. Pour le gentilhomme nomme Proster, je l’ay veu, mes je ne l’ay assés anté pour an dire mon opinion. Il ne peut pas estre pire que l’autre. Pour le prisonnier, je feray venir le président pour luy an parler et par l’autre casche on aura les charges. Sy vous ne consolés Chommaret, il surenchéra Juquy est bien vai. Mme Bellugon n’est pas issy. Le Roy a respondu à Madame la princesse d’Orange, la douayrière, pour le ranc de Madame de La Trémoille que si autres de sa mayson avoyent eu le tabouret qu’elle l’auroit, mes sy elle ne l’avoit 75 eu qu’il ne luy donneroit pas. Monsieur le prince d’Orange est issy /2/ et sa famme199, quy n’a pas grande anvye de partir sy tost qu’il le désir. J’ay mis les papiers du prinsse de >>>>>> antre les mains de Monsieur de Lorme pour vérifier sy ces papiés ont esté aquités. Pour les afaires de Monsieur l’Eslecteur, je n’y espargnerait ny soing ny diligence. Gueretin est à mon avis bon homme, mes peu inteligent et peu capable. Je n’y vousdrois pas que cest avis fut donné de moy pour ne me faire des ennemis il va quelques messager au Landgraff despuis trois mois et ny an est allé qu’il d>>>>>. Je donne avis de la despesche qu’il a aporté pour ceste pauvre famme qy aporteray ceus à quy il sera de mon pouvoir. On m’a dit que Monsieur de Seully a fet donner ce quy an apartint au Roy à une des fammes ou sa famme. Vassignac m’a mandé qu’on avoit le mach>. Cella est bien a>>>>> à ce qu’il vous mande, vous a dit vray que vos coyfures n’ont esté feites par la bonne ouvrière. Quoy qu’on m’ut assuré que le contract ne fut lu avant le Roy, quy ne voulut dire par la grasse de Dieu prince d’Orange, ainsy qu’il a esté mis. Pour de l’argent, il faut presser le procureur et dire au bailif de faire quy requyère les contrintes. Je vous feray tenir anviron mil escus vers Noël quy se prandront à Chalons sur l’assiniassion du dernyer cartier de ma compagnye dans dis ou douse jours. J’an feray despescher /3/ l’ordonnance sur le trésorier de l’ordinaire. Vous aurés par ce cosche ce qui s’est pu acheter aujourduy de ce qui est contenu an vostre mémoire. Pour vos boutons, il faut dire sur quelle estofe vous les voulés mestre avisés de faire aller vostre travail jusques an mars. Je parlay à Monsieur de Russy pour >>>>>. Il dit prou, mes il n’a pas anvye de faire grand chose sur les disficultés qu’il alesgue. Il s’an va bien tost pour voir ce que fet Monsieur de Nevers, duquel il y a bien du mescontantemant. Vous l’aurés à La Cassine bientost. Sy vous alloit voir, feites luy bonne chère avec un petit trin quy est le trin de pes. Vous an pourrés dire quelque chose à Monsieur de Netancour200, afin qu’il y soit présparé. On atant issy des nouvelles de Olande. Vostre frère fort blasmé d’avoir levé le siège de Grolle201. Arsens an a escris assés désavantageusement. Dieu est sur tout, croyés qu’il faut une grande sagesse pour se bien gouverner. Le Roy me tesmoigne toutes les bonnes volontés quy se pourront dire. J’escris à nos filles et loue et aime bien le stille de Marion. Dieu vous garde mon cœur et la petite troupe. $ $XX$ $ e A Paris, ce 4 décembre. Archives nationales, R2 53 75 8 décembre 1606 – Paris à Madame de Bouillon Mon Cœur, j’atans de vos nouvelles. Samedy, je vous anvoyé des miennes par le dernyer cosche. Le Roy est à la chasse et cousche dehors et je suis demeuré par son commandemant pour quelque affaires. Les rumeurs de ceste ville seront plus grande possible par les bruits qu’elles ne sont. An esfet Monsieur de La Noue an a parlé au Roy avec aygreur, desquels il s’est santy ofansé. Les ennemis de la vérité ne se lassent de travailler à l’oprimer. 199 Philippe-Guillaume de Nassau (1554-1618), prince d’Orange, frère aîné de la duchesse de Bouillon, venait d’épouser le 23 novembre 1606 à Fontainebleau Eléonore-Charlotte de Bourbon-Condé (1587-1619), fille de Henri Ier de Bourbon-Condé et de Charlotte de La Trémoille, nièce de la duchesse de La Trémoille. 200 Louis Ier de Nettancourt, un huguenot, que Henri IV avait nommé gouverneur de Sedan le 5 avril 1606. 201 Maurice de Nassau peu désireux de rencontrer Spinola avait préféré lever le siège de Grolle. 76 Je voy le Roy de jour à autre plus ressolu à l’observassion de l’Esdit. On a refusé à La Roschelle ung jésuiste anvoyé pour y prescher les avants nonobstans qu’il ut lettres du Roy pour l’introduire. On atant issy les desputés de Olande leur propossissions doivent à mon avis la matière de leur response. Je n’ay nulle nouvelles d’Auvergne ny de Limousin. Je cuide que Monsieur Doully ne veut pas revenir. C’est une chose estrange de la fasson qu’on sert aujourduy. J’auré bien de la peine pour les affaires de Monsieur et de Madame l’Eslectrisse, estant les choses issy au matière d’argent très disfissille. Je travaille à tout ce que porte vostre mémoire pour le vous faire faire. Vostre belle-mère est encore malade d’ung grand rume. Elle fet ce qu’elle peut pour ne viellir point, mes cependant elle se passe bien fort. Elle a esté broullé avec /2/ Madame la Princesse pour des suites qu’elle fit au Roy au retour de Vallory. On croit Madame vostre belle-sœur grosse. Madame de Nevers est à Soissons. Madame de Longueville est bien fort broullée et samble qu’elle cerche plus a estre broullée. Qu’autrement je désire de tout mon cœur d’aprandre vostre bon partemant et vous tesmoigner par toutes sortes de debvoirs que je vous ayme autant que moy. Bonsoir. $ $XX$ $ e A Paris, ce 8 décembre. Archives nationales, R2 53 76 18 décembre 1606 - Paris à Madame de Bouillon Mon Cœur, Bernar arriva hier. Dieu soit loué de vostre bon portemant et de celluy de nostre petit troupeau. Le petit se fet bien gentil. Le Roy m’a promis qu’il sera le premier an degré et an réception auprès de Monsieur d’Orléans202 s’il y an y a et lorsque leurs aages le leur permetra. Je vous anvoye ce qui est fet de vostre mémoire. Je crois que vos botines ne seront pas bien feites. Les jaretières sont ung peu trop fortes. Je vous ay mandé pour une amarre quy vous servira de manteau que vous aurés pour la première voiture. J’ay ung cavecon payé quy est bien joly. Je n’ay pas garde d’oublier Maryon. Je vous anvoye une petite espée pour le petit prince. Elle m’a couté carante escus. Je ne panse pas vandre mon diamant quoy qu’il soit estimé plus qu’il ne me coûte . J’ay vu aujourduy Messieurs le prince de Condé et de Monpansier, Monsieur le prince d’Orange et sa famme, Mesdames les princesses de Condé et d’Orange la douairière. Je ne suis point party d’issy ancores que le Roy aye esté tousjours à St-Germen, où l’on vouloit faire revenir Monsieur le Dauphin et Mesdames, mes la peste est au vilage. Je crois que nous aurons trouvé issus an l’affaire où ceste pauvre famme, quoy que Boschet n’an fet pas ung fors >> >>> et crinte qu’il a d’estre desmis de son ofisse. Je m’estonne fort que vous n’avons point de nouvelles de Mme l’Eslectrisse. Ses affaires sont retardées à l’occasion de la malladie du corps et de l’esprit de Monsieur de Sully quy afady d’avoir l’isnnoncense, l’esprit est malade à trasmer des choses qu’entendrés sy après /2/ ce quy sera dit à vous. Pour moy, je me porte, Dieu mercy, bien. Le Roy me tesmoignant beaucoup de bonne volonté et de confiance et suis an fort bonne odeur issy, où je feray tout soing de me comporter avec la prudence requise. Les pointes du Roy amène mon esprit - quy sont très grandes - pour la ressolussion que monstre >>>>>mant la Roine de ne vouloir consantir à ce qu’il désire d’elle touchant la marquise, laquelle est an grand soupson de sa personne et le Roy mesme a opinion qu’on y veut atanter. On croit que la princesse de Conty - Monsieur de Sully fortifiant la Roine an ceste f>>>>> de la princesse. Le Roy ne le celle pas à cest…, desclare la vouloir oter près de la Roine et ces parans au contrère que cella ne peut ariver sans ung grand deshonneur à toute leur mayson. Le Louvre ne contient fort peu le 202 Nicolas, premier duc d’Orléans, second fils de Henri IV et de Marie de Médicis, naîtra le 13 avril 1607. Il mourra dans la nuit du 16 au 17 novembre 1611. 77 Roy, seullemant quelques petites heures de la nuyt. Madame de Longueville a fet suaurt. Monsieur de Nevers ariva avant hier, a veu le Roy quy ne fut pas contant an tout et quy luy dit : “ Je ne l’ay pas ranvoié et sait bien que je luy ay fet fort bon ofisse ”. Je vous assure, mon cœur, que ces brouilleurs sont fort annuyeuses à tous ceus quy aiment le Roy et la Roine. Pour Monsieur de Nettancour c’est ung terrible brouillon. Il se trompera le premier. Son tavois ne fera rien issy de tout ce qu’il pansoit. Ce fut moy quy ampescha qu’il ne vont. Le Conte me mande des rapors que Servoles luy a fets et se met an peine de peu de chose. Parlés luy an afin qu’il aille selon mes instructions. Et croyés que tout ce que nous pouvons désirer an nos affaires est en très bon estat et espère que vous auray autant d’années d’heur que vous an avés eu de mal heur. Bon jour mon cœur. $ $XX$ $ e De Paris ce 18 décembre. Archives nationales, R2 53 77 22 décembre 1606 – Paris à Madame de Bouillon Mon Cœur, j’anvoye ce laquais à Marion pour luy porter ung perroquet que Monsieur de Sigougne luy donne. Il m’a assuré qu’il est fort bon. Je ne l’ay eu qu’aujourduy, c’est pourquoy je ne puis pas tesmoigner sy parle bien. Il me samble bien prou. J’anvoiré leurs estrenes par le cosche je croy qu’elles les trouveront bien belles. Le Roy part demin pour aller à St-Germain et delà à Rigny et à Annet. Je partiray d’issy sur la fin de la sepmaine quy vient pour l’aller trouver et commanser l’année de mon excersisse. Nous avons continué jusques à cest heure les broulleries que je vous ay escrites, lesquelles commancent à s’apaiser, Dieu mercy, n’estant pas croyable comment elles donnent clameurs à tous ceus quy sont près du Roy et de la Reine et quy les amènent sans escatur ces choses poussent plus avant au mal qu’on ne le pourroit pas immaginer. Monsieur le prince d’Orange et Mme sa famme sont partis aujourduy203. Elle an a ung regret très grand et qu’elle a fet paroistre et il ne samble plus qu’il n’estoit à désirer pour les acheminer tous deus au contantement qu’on leur doit désirer. Monsieur de Lesdiguyères a fet fort grande instance pour faire que Mondit Sr. prince d’Orange met ung gouverneur dans Orange de la Religion, cella luy ayant esté promis par le Roy et par le dit /2/ prince. Ils an vindront à des paroles assés aigres. Le Roy a vuidé cella par ung commandemant qu’il a fet au dit prince de maintenir l’esglise d’Orange, au dit prince et qu’aussy qu’il vouloit qu’il desmeuroit libre dans sa maison où ils le vouloit conserver comme son bon parant. Le dit prince a esté fort bien assisté de moy, quy ay eu de la peine à luy faire juger que telles plintes tiroyent à conséquance pour son respos. Son esprit ne va pas aus artifisses de ce temps. Sans doute, il aura de la peine à se maintenir cheus luy s’il n’y porte une grande discression. On atant de jour à autre Monsieur de Busanval204. Par sa venue on verra les mouvemans du Roy pour l’assistance qu’il voudra donner aus Estats. L’acort de Monsieur de Nevers est fet. J’an ay esté prinsipal autreméteur au gré du Roy et au sien. Je n’ay point eu q’une lettre de Mme de La Trimoulle despuis son partement. J’an atans à toute heure. Je croy que la princesse de Conty s’eslongnera ung peu de ceste grande assiduité qu’elle randoit près de la Reine. Monsieur de Sully a esté malade et assés, cragnant une exgumante. Il fit issy les plus 203 Dans sa lettre du 25 décembre 1606 à Charlotte-Brabantine de Nassau Louise de Coligny fait également état du départ de Paris du prince d’Orange et de sa femme le vendredi 22 décembre après dîner. 204 Paul Choart, sieur de Buzanval, ambassadeur de France auprès des Etats. 78 grands /3/ bruillus qu’il est possible sans geler. La maladye y continue et est fort à crindre un renouveau. La plus grande part du mémoire que vous m’avés donné est acomplis. Vous aurés de plus belle futaine par le cosche. Pour ce >>>>>>>>, je le feray payer à Chalons au premyer jour. Sy Desmerlier205 vous an parle, dites-luy que je vous ay mandé que j’ay donné ordre pour le faire payer. Je vous donne le bonsoir. C’est. $ $XX$ $ e A Paris, ce 22 décembre. Archives nationales, R2 53 1607 le duc de Bouillon séjourna sagement à la Cour. Cette servilité eut sa récompense : Henri IV par brevet du 2 juin 1607 donna satisfaction à sa prétention au titre de prince étranger en réglant son rang au dessus du duc d’Uzès le plus ancien des ducs et paires et en lui rendant en 1608 sa principauté de Sedan. Au mois de juillet, Elisabeth de Nassau donna le jour à une fille : Charlotte, future Mlle de Bouillon. A la fin de l’été 1607, Charlotte-Brabantine de Nassau, devant se rendre dans son comté de Laval et dans ses terres de Bretagne, confia sa fille, Charlotte, à la princesse d’Orange, Louise de Coligny qui la présenta à la Cour avant de l’emmener avec elle en 1608 aux Provinces Unies. Elisabeth de Nassau au mois d’octobre rejoignit son époux à Paris avec ses enfants. La peste sévissait dans le capitale. Louise sa fille aînée en décéda le 6 décembre206. 78 Avril 1607 Madame, Ny moy, ny ma maladie ne méritoit pas le soing qu’il vous plaist me dire. Je me fis hier seigner. J’ay des sueurs toutes les nuits sans fiévre ny altération. Cest des réflexions quy se purgent [bien]. Je ne tiens point la chambre. Je [n’est] que faire de mon apotiquaire, ny moy, ny tout ce quy an […] ne sçaurons faire chose a [que je ne] me sçante plus obligé qu’à vous servir. J’us avant hier de fort bonnes nouvelles de Sedan, mon petit ayant demeuré trois jours sans mal. J’atans un laquais. Que icy vostre soeur est fort anrumée. Monsieur de Tou207 a fet [un] bon coup an vos afaires qui [a] fet mestres ce conte au jour. Vostre [avocat] pourra asseoir plus de jugement aus moyen d’acorder qu’il ne fet, resconnoissant les moyens qu’avés de contredire le reste de ce compte ; tascher de voir l’original. Je ne [pense] vous estre ancores nescessaire. Es[t-ce] que Mme de Fervaques208 se tro[uve trop] esloignée de ce qu’elle s’estoit pr[omise. Elle] aura de la peine à se raproscher ce qu’on luy rendra. Donner vos [commandemants], Madame, aviser que ces termes d’a[vantages] vous amusent pour vous faire perdre au parlemant à lesser changer la char[ge]. Mandésmoy quant vous voudrés rendre/2/. 205 Philippe Desmerliers était le secrétaire et conseiller du duc de Bouillon. Il mourut en 1627 à l’âge de 77 ans. 206 Louis CAPPEL, Sur la douloureuse et non jamais assez regrettée mort de … Mademoiselle Louise de La Tour, fille aînée de Monseigneur le duc de Buillon, décédée à Paris, le jeudi 6 décembre 1607 … complainte élégiaque en vers féminins, Sedan, 1608, in-4°, 7 p. 207 Jacques-Auguste de Thou, premier président au parlement de Paris, l’un des principaux négociateurs de l’Edit de Nantes. Il appartenait au courant de pensée dit politique selon lequel la religion n’a pas à intervenir dans l’affaire de l’Etat. Cf. Janine GARRISSON, L’Edit de Nantes, Arthème Fayard, 1998, p. 160. 208 Anne d’Allègre, veuve en premières noces de Paul de Coligny, comte de Laval et baron de Vitré, avait épousé en secondes noces le maréchal de Fervaques. 79 Le Roy se met à sa diète lundy ou mardy. Tout le monde s’an ira. Sy vous prenés ce temps là, vous ferrés vostre cour à vostre cousine an sis jours, quy est le temps que vos afaires vous permestront à mon avis y demeurer. Sy vostre prossés est sur [le b]ureau, il nous faudra bien tous cella à solliciter et n’oublier personne. Monsieur Villequier est mort ce matin n’ayant esté que ce jour malade. Je ne sçay sy vous n’aurés pas là quelques raisons. Je ne parleray à Mme la princesse que vous me le mandyés. Elle fet bien court issy. La Roine se porte le mieus du monde et tous Messieurs et Mesdames. Sa Majesté a donné ung petit cheval marin à vostre soeur quy a ceste propriété d’empescher que le let aus cousches ne fet mal, ny ne donne de fièvre. Je le luy ay anvoyé. Vous aurés à [présent] sceu que Mme de Monpansier [a fai]lly de mourir d’une expugnant[ion]. Elle an est garye. Vous me ferés [cet] honneur d’estre assurée de la fidellyté de vous servir. Cet Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Fontainebleau, [ce ...] apvril. Archives nationales, 1 AP 434/51 79 26 mai 1607 - Fontainebleau Madame, Je ne sçay pas pourquoy je suis hacablé, ny ce quy peut y avoir en ma lettre quy mérite cella, je suis an peine pour vous, sy vous ne sçavés ce quy aura esté réssolu au sinode tenu à Touars pour refuter au sinode national. D’autant que le Roy a sceu, à ce que m’a dit Monsieur de Sully, qu’il avoit esté tresté an diverses provinces des choses pour les représenter au sinode nassionnal quy estoyent puremant politiques et nouvelles quy ofansoyent le Roy. Si cella avoit esté fet à Touars, je craindrois que le Roy an fus ofancé et sy vous suivés les ressolussions, vous feriés ce me samble bien d’an escleray issy. J’atans de sçavoir quant il vous plaira que je vous assure servir pour vos afaires avec Madame la Princesse. Le nepveu de Monsieur Assil (?) fit hier la révérance au Roy et trouve bon que je fisse antandre à Sa Majesté son afection. La Roine dit qu’elle vous an feroit la guerre. Il brusle pour vous, ne prenant pour refus, vostre ressolution à ne vous marier. Il m’a fallu luy promestre que je vous an parlerais, lorsque j’auré l’honneur de vous voir. J’avois creu que Monsieur de La Noue209 feroir ung tour jusques issy, s’il an avoit quelque ocasion publique. Je croy qu’il ne serait mal à profit. Je vous suplie de mander quelqu’un chose à vostre soeur de ce que vous jugés qu’elle pourra faire et vous assurer de moy comme d’une personne quy vous ayme plus que soy. C’est Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Ce 26 may à Fontenbleau. Archives nationales, 1 AP 434/131 80 23 juin 1607 - Sedan Madame, Je compatis à vostre doulleur, comme y estant asuré par des santiemans naturels tels que plus sansiblemant que pour moy je ressants vos crintes, que j’espère que Dieu aura terminées avant que 209 Odet de La Noue, seigneur de Montreuil-Bonnin, fils de La Noue-Bras de Fer, une des figures éminentes du Protestantisme Poitevin, ami de Claude de La Trémoille. En 1606, il était intervenu en faveur du duc de Bouillon auprès d’Henri IV. Il mourut en 1618. 80 celle-cy tombe antre vos mains, par le rescouvremant de la santé de Monsieur vostre fis, estimant que les sueurs qu’il a eues l’auront garanty. Mon sesjour issy m’est peu agréable, absant de l’honneur de vostre présenc et la vue de ma moitié aux estrême impuissance atandroye de vos nouvelles. Vos afaires à Paris vont bien. On avance ce que l’on peut vostre prossés de Monfort; ainsy que je le vous le diray s’il vous plaist. Nous avons eu le prieur de La Haie d’Anglès du Roy. Le prestre estoit mort trois semaines avant qu’on an ut /2/ nouvelles à Paris, cella pouroit bien quelque fois porter du danger. Je finiray par une prière véhémantes à Dieu de vous deslivrer d’annuy et vous donner et aus vostres toutes sortes de bénédictions et à moy moyen de vous randre toutes sortes de fidelles servisses vous besant bien humblemant les mains an calité de Vostre humble frère et fort obéissant serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 23e juing. Archives nationales, 1 AP 434/118 81 24 juillet 1607 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Ce que nous avons fet, ne nous a pas samblé à vostre soeur et à moy digne de vous an advertir plustost, la mère et la fille se portent, Dieu mercy, fort bien210. Vous avés tant pris de peine pour ce meschant afaire de chevaus, que je ne puis jamés dignemant la resconnoistre. Estoit-il resonnable dans altérer vostre santé, d’an perdre ceste dousseur naturelle quy vous acompagne, an vous passionnant contre les juges quy ne prévoyent la justisse de ma cause, sellon vostre intanssion, vraimant, ma chère Dame, c’est bien pour jamés me randre incapable de vous randre servisse, quy esgalle vos bons ofices. Pour la vie et jusques au tombeau, vous ordonnerés ce quy vous plaira sur mes anfans, quy auront ma volonté préparer à les mehner à une parfait obéissance de vos commandemans. Je suis sur mon retour près du Roy, où je crois estre dans le 10e du mois quy vient, et vostre soeur quelque temps après, que je croy desiroit bientôt au plus /2/ près de celluy que vos afaires vous devront pour revenir. A Paris, je veu des prières que j’ay bien fort estimées de Monsieur vostre fis, soit an son zelle, soit an son jugemant et la lettre de Monsieur son frère. Par trop polir ces petites disgressions sur ce cinq de Josef et sa suivante à la reprandre, cella mérite bien une bonne louange et ambrassade lorsque ils auront l’honneur de vous voir. Je crins que la multitude d’afaires que vous aurés eu, nuisent à vostre santé à quoy vous debvés, Madame, avoir esgard sur toutes choses, d’autant qu’en vous réside le bonheur ou le malheur, le bien ou le mal de Messieurs vos anfans. L’on vous anvoye des eaus de Paris, sy on eut sceu vostre volonté, on vous les ut fet conduire où il vous ut pleu. Vous escuserés bien voste soeur, sy elle ne vous escrit. Elle s’assure que vous ne doutés pas de son afection à vous servir et de la mienne à vous demeurer tousjours. Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 24e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/109 82 210 Elisabeth de Nassau venait de donner le jour à son septième enfant : Elisabeth-Charlotte, future Mlle de Bouillon. 81 Sans date - Paris à Mme de La Trémoille Madame, je sceu, par le Sr. Bourron, vostre heureuse arivée an vostre mayson et le bon estat auquel vous avés trouvé tous Messieurs vos anfans, de quoy je loue Dieu de tout mon coeur, le priant de vous continuer et à eus ses saintes bénédictions spirituelles et temporelles. Nous sommes arivés il y a trois jours issy. Je fus hier voir Monsieur le présidant Forget211 quy m’acorda volontiers Monsieur Narin pour raporter vostre prossés. Je croy que les sacs luy seront randus demin, ayant esté temps de luy an parler, car Monsieur de Fervaques l’en pressoit fort. Je croy que Madame vostre belle-mère vous aura mandé la responce qu’elle a eu du Roy et de la Royne. C’est à vous Madame à prouver ainsy qu’il an a esté usay par le passay. Je me promets que vous n’aurés pas oubliay, sy vous avés Monsieur ou Madame de StGermain212, de leur parler du mariage de Monsieur le baron de La Force213 et sy vous l’avés fet, que je sçauré la response qu’ils vous an auront faite, sy leur particulier an afectionnant de marier leurs anfants, ne les ampeschent. Je croy qu’ils doivent ambrasser ceste aliance pour y avoir ce que juge qu’ils ne pouront trouver tant ansamble ailleur an esgart à la Religion, à la maison, à la personne aus biens et à l’aliance où certe tout se rancontre pour leur contantemant, se pouvant assurer que Monsieur de La Force voudra cercher leur amitié /2/ par dessus toutes autres choses, que sy an l’administrassion des biens, il s’y put passé chose quy put achever les afections, je m’assure qu’ils an feront ce qu’ils trouveront résonnable et qu’on ne vousdra an aucune fasson leur an donner de la fascherie. De cessy, Madame vous le mesnagerés par vostre sagesse et l’afection que je vous ay veue d’obliger ladit Sr. de La Force, vous supliant de m’an mander ce que vous y aurés arrivé, afin que il puisse faire finalemant de ce quy san doit espérer. On dit que Mme de St-Germain a une fascheuse et dangereuse maladie s’il an >>>>>oit, ce que je prie à Dieu ne vouloir, ceste afaire seroit plus disfissile, ne saschant quels seroyent les parans de Mlle de Saveille. C’est pourquoy, je vous suplie permestres au plus tost l’ocasion de sçavoir la volonté de Monsieur et de Madame de St-Germain. Pour de nos nouvelles, elles sont, Dieu merssy, fort bonnes. Toutes vos soeurs se portent fort bien. La mienne est bien langoureuse, à son acoutumé, lorsqu’elle est an l’estat de grossesse. Vous me ferés cest honneur de croire que nulle personne quy vive ne sçauroit davantage désirer de vous randre servise et aus vostres que fet Vostre bien humble frère et fort afectionné serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/92 83 Sans date à Mme de La Trémoille Madame, Nous ressumes hier au soir vos lettres, nous vous sommes trop obligés de tant et tant de peine, qu’il vous plaist prandre. J’atans Justel214, ces Messieurs quy l’honneur et le deshonneur des personnes 211 Jean Forget, président à mortier au parlement de Paris, frère du secrétaire d’Etat Pierre Forget, sieur de Fresnes. 212 Anne d’Albin de Valzergues la seconde épouse de Gabriel de Polignac, sieur de Saint-Germain, de son premier mariage avec Jean de La Rochefaton, sieur de Saveilles, avait eu une fille : Jeanne. M. et Mme de Saint-Germain n’agréaient pas ce projet de mariage pour des raisons différentes. Gabriel de Polignac aurait voulu marier sa belle-fille à son fils né d’un précédent mariage. Anne d’Albin pour sa part avait quelque peu spolié les biens de sa fille et ne tenait guère à rendre compte de sa tutelle.. 213 Armand de Caumont, baron de La Force, était le fils aîné de Jacques-Nompar de Caumont (1558-1652), marquis de La Force, gouverneur du Béarn et vice-roi de Navarre et de sa première épouse Charlotte de Gontaut-Biron. Il ne put épouser au début de l’année 1609 Jeanne de la Rochefaton qu’après l’intervention du Roi. Leur fille, Charlotte, épousa en 1653 le maréchal de Turenne, fils du duc de Bouillon. 214 Christophe Justel, né en 1580, secrétaire et homme de confiance du duc de Bouillon. Il a publié en 1645 une Histoire généalogique de la maison d’Auvergne, Paris, 2 volumes, in-folio. 82 an leur mains an usent trop lissancieusemant. Je ne me plus jamés davantage an ma maison. Vous ne me mandés rien de vostre prossés. La Cour alant à Fontenebleau, sy je vous puis servir, je seray bientost à vous. Je suis Vostre très humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/97 84 Sans date à Mme de La Trémoille Madame, Vous prenés trop de peine pour nous, mes gents mal avisés ont abusay de vostre bonté et de vostre santé. Vous l’avés randu. C’est à moy de vous dire que il y a long temps que je suis tout à vous et que je ne puis estre mené par quelque autre désir que ce soit quy n’aille bien cest-cy après celle-cy que je vous dois randre. Vostre soeur vous espliqua mes annuis, quy tant au silance sur l’afaire dont Madame ne vous a escrit et a desposer antre ses mains. Seulles vostre volonté et qu’elle an soit autant de celle de l’autre, sans luy faire connoistre qu’elle suivit la vostre, pour peus après cercher les moyens d’assurer la condission de ce que vous aimés et l’anscherisemant de la vostre. Autant qu’il sera possible, vous ferés, s’il vous plaist, Madame, mestre le dessus à la lettre du présidant Forget, ne saschant s’il prant quelque autre tiltre. Je suis et seray jusque au tombeau Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/119 85 6 septembre 1607 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, La sufisante curiosité de Monsieur Bouron me sera une légitime escuse si je n’alongeray ma lettre an la ramplissant de nouvelles quy seroyent superflue là où il est. Vous sçaurés la bonne santé de Mlle vostre fille, quy fit hier la révéranse à la Roine et au Roy215, quy luy firent fort bonne chère. On prit une heure où il n’y a nulle ocasion de cérémonye ; de là, elle fut menée, par Mme vostre bellemère, cheus Mme de Monpensier où je la vis. Je croy qu’elle ne reverra plus la Cour qu’an disant à chose quy doit estre bientost, sy Mme la princesse d’Orange part dans la sepmaine quy vient, ce que je ne crois pas216, ayant ancores à faire le marché et payer une terre ce quy ne se fet pas sy tost quelque fois, qu’on le puisse et a été trouvé meilleur par nos avis quy nous apartiennent, de ne point parler du rans de Mlle vostre fille qu’autremant et cepandant ne luy fusse de presjudisse, ny ouy parler que Mme vostre belle-mère serés randu an quelque peine pour ce qu’elle aura à faire an Holande avec les anfans de la princesse de Portugal217. Sy on m’an parle, je luy an diray ce que j’an juge, m’estant avis qu’elle a des raisons pour ne lesser disputer cella. 215 Dans sa lettre du 11 septembre 1607 à la duchesse de La Trémoille (Archives nationales, 1 AP 346/29), Gilles de Bourron mentionne que c’est le mercredi 5 septembre 1607 que la princesse d’Orange présenta Charlotte de La Trémoille au Roi et à la Reine. C’est ce qui nous a permis de déterminer la date de cette lettre non datée du duc de Bouillon. 216 Le duc de Bouillon avait raison, Louise de Coligny prise par ses affaires et aussi retardée par la rigueur de l’hiver ne partit pour les Provinces Unies que dans la seconde quinzaine du mois de février 1608. Lettre du 16 février 1608 de Villeroy au président Jeannin. Président JEANNIN, Négociations (1598-1609), Ed. Michaud et Poujoulat, Nouvelle collection des mémoires relatifs à l’Histoire de France, tome XVIII, Didier et Cie, Paris, 1857, p. 278. 217 Emilia de Nassau (1569-1629) demi-soeur de Charlotte-Brabantine de Nassau avait épousé Emmanuel d Portugal (15681638), fils de d’Antonio, bâtard du Portugal. 83 Nous aurons /2/ issy Monsieur de Monpansier quy n’est guyères sin. Il me contoit hier à Mme vostre belle-mère et à moy des gentillesses de Messieurs vos anfants, remarquant ung peu de tristesse à Monsieur de La Trémoille, qu’il atribue aus trop longues estudes qu’on luy fet faire ; et dit que Le Plessis218 luy disoit qu’il les luy failloit ainsy longues pour les luy faire retenir et que souvant après avoir estudiay trois heures, il n’avoit rien retenu. Cella me feroit croir que les longueur luy lase l’esprit et la cantité d’estude luy surcharge la mémoire, chose dangereuse et où l’on doit aporter grande prudance pour donner aus esprits les besoins quy leurs convyennent et que il ne se desgoutent219. Je croy que vostre soeur vous escrit le fléau dont [Dieu] visite sa mayson220, quy me gardera de vous an dire les particuliarités. Quant à vos affaires, je croy qu’en serés informé plus particulièremant, quy m’enpeschera de vous an escrire, d’afirmer par une assurance de vous vouloir demeurer Madame jusques à la mort Vostre plus humble frère et fort afectionné serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/49 86 17 octobre 1607 à Mme de La Trémoille Madame, J’ay ressu ce jourduy vostre lettre par Monsieur le présidant de Nétumières221, auquel j’ay ofert tout mon petit servisse, suivant ce qu’il vous plairoit m’ordonner. Par luy ay-je apris vos peines et combien vostre vertu est honorée et ce d’autant plus que les exemples d’une samblable ne leur a pas esté connue. Je suis fort en peine de Messieurs vos anfans pour les maladies qui les anvironnent. Je croy que vostre veue y sera très à-propos afin que vous jugiés ce quy se debvra faire pour leur conservassion. Vous aurés esté advertie du retardemant de Mme la princesse d’Orange et une fort grande incertitude de son partemant. J’atans demin vostre soeur à Fresne et après demain issy, d’où elle vous mandera toutes nouvelles. Elle trouvera la Cour fort petite et languira bien fort en vous atandant. Je m’assure que tout vostre soing est à terminer afaires aussy se sera vostre soulagemant à vous, Madame, qui les prenés trop à coeur et an sorte que vostre santé an est fort souvant incommodée. Pansés à la vous conserver et à vous assurer sur la fidellité de mon servisse quy ne vous sera non plus espargnée que ce qye je demandré à la conservassion de la vie de celluy quy vous est Vostre obéissant frère et serviteur. Henry de La Tour e bre Ce samedy, 17 oc Archives nationales, 1 AP 434/117 1608 Henri IV deux ans avant les termes de l’accord conclu en 1606, rendit Sedan au duc de Bouillon. L’Abbé Marsollier à ce propos souligne que le Béarnais connaissant les desseins du duc de devenir le chef des réformés en France, avait considéré qu’il était plus sage de le fixer à Sedan à la périphérie du Royaume qu’à Turenne dans le coeur de la France, à proximité des provinces où les 218 Zacharie du Bellay, sieur du Plessis-Bellay, était devenu en 1605 le gouverneur de Henri de La Trémoille. 219 Cette remarque fait beaucoup penser à Montaigne. 220 Gilles de Bourron dans sa lettre du 11 septembre 1607 mentionne qu’une épidémie de dysenterie sévissait à Sedan. 221 Paul Ier Hay (1560-1634), un catholique, un des principaux vassaux des La Trémoille en leur baronnie de Vitré, baron des Nétumières à Erbrée, président au parlement de Bretagne, conseiller d’Etat. 84 huguenots étaient les plus nombreux. Même, “ il ne trouvoit pas qu’à Sedan il en fût encore assez éloigné ”222. Au mois de juillet, le duc et la duchesse de Bouillon reçurent la visite de Mlle d’Orange, EmiliaSecunda de Nassau et de son neveu Frédéric et de sa nièce, Elisabeth-Charlotte, les enfants du prince Palatin. Le 27 juillet, ils firent procéder au baptême de leur fille, Charlotte, née au mois de juillet 1607. Le parrain fut le jeune prince Palatin et sa soeur la marraine. Charlotte-Brabantine de Nassau cédant à la volonté du Roi était enfin venue à Paris avec son fils aîné, Henri. Le séjour de celui-ci à la Cour fut bref. Héroard dans son journal mentionne que le 17 juin M. de La Trimouille prit congé du Dauphin “ pour s’en retourner à cause des nigeries que lui faisoint Mrs de Vendôme. Il y avoit demeuré deux jours et en debvoit demeurer dix ou douze223 ”. Au grand regret de sa soeur, Charlotte-Brabantine de Nassau ne put venir au baptême de sa nièce Charlotte à Sedan, Henri IV ayant décidé de faire débuter son fils, César de Vendôme, dans sa charge de gouverneur de Bretagne à l’occasion de la session des Etats de cette province qui se réunissaient cette année-là à Rennes224. Pour affirmer le rang des La Trémoille en Bretagne, qui par ailleurs étaient vicomtes de Rennes, il était indispensable à la duchesse d’être présente lors de l’entrée de César de Vendôme dans cette ville. 87 18 mars 1608 - Melun Madame Je ne mérite pas ce soing qu’il vous a pleu d’avoir de m’anvoyer ce laquais pour me dire de vos nouvelles et la veue qu’avés faite de Madame de Fervaques. Je croy qu’il vous faut vivre avec elle sans aparance d’annnymosité et vous tenir bien avertie de ne vous lesser surprandre. Je fais response que je vous suplie faire rendre. Suremant nous ne bougerons de la chasse. Le Roy doit estre de retour à Paris mercredy. La Roine a des nausées225 quy l’ampeschent de vous faire de long discours et ne déclare trouver cella estrange. Je me souhete mille fois le jour près de vostre soeur pour ayder à soulager ces annuis à cause de la maladye de son fis, Dieu nous an donne bonne issue. Honorés-moy d’une entière confiance de la fidellyté du servisse que vous vous raudra Vostre humble frère et très fidelle serviteur. Henri de La Tour A Meslin, ce 18e mars. Archives nationales, 1 AP 434/52 88 29 mars 1608 - Dammarie-Les-Lys à Mme de La Trémoille Madame, Me voissy party de Fontenebleau pour aler voir ma tant aymée famille. Le Roy m’a tesmongné beaucoup de confiance, an prenant congé de luy, et d’avoir agréable quelque mois de séjour à Sedan. La recerche de Monsieur le Prince de Mlle du Maine ne luy agrée pas, ainsy qu’il s’an est lessé antandre expressément à Monsieur Desgullon. 222 Abbé MARSOLLIER, Histoire de Henry de La Tour d’Auvergne, duc de Bouillon, Livre V, p. 148. 223 Madeleine FOISIL (Direction), Journal de Jean Héroard, médecin de Louis XIII, Arthème Fayard, 1989, 2 vol, tome I, p. 1449. 224 Jean-Paul DESPRAT, Les bâtards d’Henri IV. L’épopée des Vendômes. 1594-1727, Perrin, 1994, p. 129. 225 Marie de Médicis accoucha le 25 avril 1608 de son troisième fils, Gaston, duc d’Anjou puis duc d’Orléans en 1626. 85 Je n’ay point parlé à Monsieur de Villeroy de ce que desiriés, ayant cru que ce seroit an vain, d’autant qu’il ne voudroit prandre connoissance de cella que sur ung commandemant du Roy. Je croy qu’il vous faut faire sçavoir à Monsieur le Chancelier que ce ranc ne se donne par escrit, ce quy vous sera fort aise, et tascher que par les tesmoygnages verbale, il fasse son raport au Roy an donnant son avys an vostre faveur. Je ne sçay sy vous aurés sceu que Mme de Montpensier venant à la communauté et ne veut abandoner Mlle sa fille, sy on la croit et se veut retirer à Champigny an une vye solitaire226. Vous jugerés Madame ce que cella pourra faire de bien ou de mal. Je voudrois que les mesdessins vous obligeassent de prandre ancores des eaus de Spa pour avoir l’honneur de vous voir à sadan et là et partout ailleur vous randre ce que vous doit Vostre bien humble frère et afectionné serviteur. Henry de La Tour e A Damemarie, ce 29 mars. Archives nationales, 1 AP 434/90 89 Sans date227 à Mme de La Trémoille Madame, J’estime que Monsieur de Villeroy vous mandera ce que le Roy aura dit sur vostre voyage, qu’il a trouvé mauvès ; ne luy an ayant demandé congé, comme vostre soeur l’a fet. Qu’il ne vous failloit pas acoustumer à cella et est touché sur l’absance de Monsieur vostre fis d’auprès Monseigneur le Dauphin et de sa nourriture. Ledit Sr. de Villeroy y a randu tous debvoir pour adoussir Sa Majesté. On luy adjouste ce que j’ay pu. Vostre retour, vous resparera cella aiscemant, an n’y retournant plus. J’espère que nous vous revoirons dans le mois de jullet, auquel temps vos afaires nescessiteront vostre retour. Je vous anvoye une lettre de Monsieur Constans par où vous verrés un jugemant sur les exercisses de Monsieur vostre fis, auquel, à vous et au petit bien aimé, je souhete toutes sortes de bénédictions, vous besant bien humblement les mains an calité de Vostre bien humble frère et très obeissant serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/91 90 3 juin 1608 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame C’est pour vous continuer les ofres de mon fidelle servisse, me presvenir de vostre contantemant d’avoir Messieurs vos chers anfants près de vous, vostre santé vous apelle à Spa et mes désirs issy pour vous y faire servisse. Je ne trouve à cella tant de dificulté estimant qu’il vous y faut aller comme ny an pansant et sy vous reconnoissés qu’on an lesve la teste, alors vous y gouvernerer sellon les observassions dues à la saison. Vostre soeur à ung commansemant de grossesse fascheus, plus que nul autre que je luy aye veu ; Monsieur Louis ne fit cas de cella. Ordonnés, commandés et vous serés servie de Vostre humble frère et fort fidelle serviteur. 226 Henri de Bourbon, duc de Montpensier, était décédé le 27 février 1608, à l’âge de 35 ans. Sa veuve, Henriette de Joyeuse, se retira avec sa fille Marie, âgée de deux ans, en son château de Champigny-sur-Veude. 227 Cette lettre doit être de la seconde quinzaine du mois de juin 1608, Elisabeth de Nassau dans sa lettre du 7 juillet 1608, évoque ce départ brusque de la Cour: “ Mon cher Monsieur trouve que vous ne pouvés, ny devés partir sans prandre congé de Leur Majesté ” (Archives nationales, 1 AP 331/91). 86 Henry de La Tour A Sedan, ce 3e juing. Archives nationales, 1 AP 434/96 91 24 novembre 1608 - Sedan228 Elisabeth de Nassau à son époux Monsieur, Le temps ne m’aprend point à suporter pasiament vostre absence, c’est une leçon quy ne m’est point pratiquable, mes encore n’esse pas là où consiste mon principal tourment, c’est, mon cher Monsieur, en la vigueur de mon apréantion quy croit et a fortifyé à mesure que j’approche du terme où je dois mestre au monde une petite créature ne jugant point que mes forces sufisent pour s’y mestre heureusement si je ne jouis de vostre chère présence, quy seule me peut donner du courage. Je l’ay tellement abatu que sy vous ne me secourés j’y sucomberay mon cœur, je vous ay menassé que la préfasse de toutes mes lettres seroient sur ce suiet quy ocupe tellement mon esprit que je ne pense et ne songe qu’à cela, la nuict mesme s’en est passé avec inquiétudes, n’estant avis que vous en alliés passer la mer et faire un grand voiage, certe, mon cher Monsieur, je ne vous dis rien au regart du travail que me donne mes craintes, je vous conjure donc au non de Dieu de les avoir présentés, et sur ceste /2/ assurance, je changeray de discours pour vous dire l’état de nos enfans. Pour le petit garson, c’est à souhait, Dieu mercy. Pour nos filles c’est toutes trois enrumée. Samedy au soir Marion estoit sy abatue et émeue, que j’en fus en paine et mesme la nuict qu’elle se plaignoit fort de fasson que je n’y eus guère de repos, mais, Dieu mercy, le matin elle se trouva sans fièvre, mes touse forts, comme aussi ses seurs. Je ne le veus pas atribuer au campot que je leur ay donné par ce beau temps pirs au changement, car depuis vandredi le temps est fort à la pluye, sy vous eussiés fait un petit de diligence en vostre voïage vous n’ussiez eu que du beau, mes vos petites journées vous en auront fait avoir du lait. Samedy, je receus celle quy vous a pleu de m’écrire de Chalons. Je loue Dieu d’aprendre vostre bonne santé, mes je suis bien marye que vous vous este destourné du chemin de Paris puis que le Roy y est. Petit Piere m’a assuré vous avoir aussy veu par de là, la maison de Monsieur de Lope et que vous vous portiés bien. Dieu par sa bonté vous y vueille conserver. Je trouve à grand marché les vins que vous m’avés fait acheter à Chalons s’y sont tant soit peu bons j’ay mis les cent escus entre les mains de Demerchers et pris receu. Gérar /3/ m’a tenu conte des deux cens. J’auray encore du vin d’Allemagne, mes rien, motus de quatorse sous le pot mes il sera bon a ce que mande le marchan qui an envoye esprès craignant quy me fallut passer à la mercy de ceux de ceste ville. Monseigneur le Prince ne fut point hier au presche, quy m’enpaîcha de le faire venir dîner en salle. Je le fus voir après dîné et fus bien une heure et demye en sa chambre, j’y fus sans fille et sans nièce. Je m’enquis de M. Colbe, comme quoy il estoit contant de luy et trouve qu’il en estoit fort satisfait. Il vous escrit de son stille. Le baron d’Augne n’y estoit point et estoit allé au quatessime il ne fait pas oublier de luy ennoier on porter quelque chose mes quoy je ne say pas bien. J’aimerois mieux quelque chose de garde que d’usage ordinaire de sorte tablette ou speaumes luy seroient, je croy bien agréable. L’on vous envoye force nouvelle de Vipart, mes ce que me mande Monsieur de Nassau gouverneur de Bréda n’y répont point, car il semble qu’il croit la tresve et me dit que cela estant que Monsieur le prince d’Orange se résout de se tenir à Bréda et y faire venir Madame sa femme. Madame de Chalons m’est venue voir bien marrye de ne vous avoir trouvée ycy, elle implore vostre faveur envers Monsieur le prince d’Orange et m’a /4/ dit qu’elle vous en ecriray. Elle mérite certe que nous la servions. Elle est party fort contante, ayans à ce que m’a dit Lecu. Vous aurés trouvé deça rumeur, 228 Il s’agit de la première des deux lettres d’Elisabeth de Nassau à son époux qui est conservée dans le Fonds RohanBouillon des Archives nationales à la cote 273 AP 179. 87 touchant Madame la princesse de Conty quy s’en devoit venir en Lorraine. Je croy que les choses seront apaisée, il a receu un gratification entière de Monsieur de Guise en vostre considération, j’ay bien envye de savoir en quel lustre vous trouverés qu' est Madame de Poiene sy cest en guise de duchesse. Maher ariva hier La bonne princesse ne vous escrit point et me mande fort peu de chose. Son Altesse est tousiours ataché en la chambre et elle a un service très pénible mes agréable, je ne suis pas sy heureuse de vous en randre un pareil quant vous vous trouvés mal. Je vous ramenteray la permition que désire avoir Madame de Ste-Croix pour me voir sans barre afin que vous en parliés. Mademoiselle d’Orange désire aussy savoir y elle vous doit envoier copye de ces lettres d’Envers et sy elle doit écrire à Monsieur de Vileroy. Elle demande le solde vostre promesse quy est un double l’once doit asembler pour aviser au pont. Ceste après-dînée à ce que m’a dit Monsieur Le Comte qui vous en randera conte l’on a fait venir des (illisible) de Maisière et autres lieus. La bonne Madame de La Trimoille m’a envoyé du gruau. J’en ay fait d’excellent. Elle continue à me dire quelle se désire à mes couche et moy que c’est à la condition que je vous ay mandée /5/ qui est de vous avoir aussy, mon cher Monsieur. Elle me mande que les marchans de Laval ont envoyé ces toilles, cepandant l’on a rien receu. Je ne say sy son les gardes à Paris jusque à ce que Tobye aye envoyé du velours. Je me fais acroire que sy je vous suplie de commander que l’on le sache. Elle partoit pour retourner à Touars et me mande que Monsieur de La Mote vous doit mandés ce qu’on sait de la cane de Monfort, Il me tarde bien de savoir vostre arrivée à Paris et la bonne chère que l’on vous aura faite. Mes surtout sy vostre grosse femme aura l’honneur de vous revoir à son entière besogne, mon cher Monsieur, souvenés-vous donc bien d’elle qui ne pense rien qu’a vous. Féderic ne vous oublye pas aussy et devient tous les jours olus joly. Il a bien tost donné un copu de sa main, mes il n’a fait nule opiniatreté depuis vostre partement. Il vous veut écrire, se dit il et vous porte souvent des lettres à Fontainebleau. Je trouve qu’il engresse quoy qu’il cause et court perpétuellement. Tous ces beaux jours il n’a point dormy après dîné. Il flate plus que de coutume. Sans mentir, je le trouve fort aymable. Mes sy ne m’est il point cher aupris de vous mon cœur. C’est la vérité. Adieu. C’est S e $XX$ A Sedan, ce 24 novembre 1608. Archives nationales, 273 AP 179 1609 Le duc de Bouillon arriva le 2 janvier à Sedan. L’on peut présumer qu’il assista à la naissance de sa fille, Henriette, future marquise de La Moussaye. Mais les archives de La Trémoille ne conserve pas de lettre de lui relatant cet événement. Henri IV souhaitant faire de Bassompierre son premier gentilhomme de la chambre à la place du duc de Bouillon, envoya un gentilhomme lui en parler. Le duc de Bouillon vint à Paris pour négocier cette affaire. Malheureusement, Bassompierre omis de lui rendre une visite de courtoisie et le duc en fut mécontent et refusa de lui vendre sa charge229. Bien plus, il ruina le projet qu’avait Bassompierre de se marier avec sa petite-nièce Charlotte de Montmorency, en suggérant au souverain de lui faire épouser le jeune prince de Condé. L’on sait que Henri IV était tombé amoureux de la belle et que craignant que son amitié avec Bassompierre soit ruinée, il l’invita à renoncer à cette union230. Le 2 mars fut signé le contrat de mariage entre le prince de Condé et Charlotte de Montmorency. Le mariage fut célébré en mai. Le duc de Bouillon avait passé la belle saison à Sedan où un très fort rhume retarda son retour à la Cour jusqu’en septembre. Bassompierre compte dans son journal comment le duc intervint auprès du souverain pour dénoncer les volontés hégémoniques de l’Espagne, et comment par jeu, il prit le parti contraire231. 229 Sous la régence, le duc de Bouillon vendit cette charge à Concini; 230 BASSOMPIERRE, Journal de ma vie, op. cit., tome I, p. 210-216. 231 Ibid., p.252-254. 88 Dans ses lettres de novembre et décembre, Henri de La Tour d’Anvergne compte raconte comment le jeune prince de Condé, refusant de jouer le rôle du mari cocu, emmena sa jeune épouse aux Pays-Bas. 92 8 février 1609 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, J’ay lessé vostre soeur an bonne santé et tout son petit peuple. Je me resjouis an l’espérance de vostre promte venue et le seray dasvantage sy je suis si heureus que de vous pouvoir randre quelque servisse. Je vous ay desjà dit que le Sr. de Bourron m’ayant demandé sy je serois d’avis que vous menissiés Monsieur vostre fis, que j’avois respondu par ung scillence232. Ce que je vous redits parce qu’on m’a dit qu’il san estoit allé an opinion que j’usse desclaré la mienne. Il est an ung point pous ses estudes où je croy qu’il luy est besoing de franchir avant que de l’an divertir. Nous sommes après le mariage de Monsieur le Prince233. C’est toute mon occupassion et de panser aus moyens de randre mes actions sy conformes à l’obéisance de tous vos commandement que vous ayés tous subject de croire que par dessus tout je suis et seray jusques au tombeau. Vostre très humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour er A Paris, ce 8e feb . Archives nationales, 1 AP 434/50 93 28 mai 1609 -Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Nous voissy assailly de la petite vérolle. Le baron de Courtaumer234 l’a aussy et avec grand aparance, je dois crindre que d’autre l’auront. Je suis sans mes dessin et avec peu de moïen d’an avoir quy me fet rescourir à vous afin que par vos peines vous sescouriés les nostres, pour avoir permisssion du Roy à M. Louis de venir issy lors qu’il sera mandé de moy ou que nous anvoiés M. Carré235 par le cosche. Je luy an escris et luy ferés bailler ma lettre sy vous ne vous servés de l’autre espédiant. Je n’ay rien a adjouster sinon vous assurer de moy comme de Voste très humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 28e may. Archives nationales, 1 AP 434/98 94 25 juillet 1609 - Sedan à Mme de La Trémoille 232 Charlotte-Brabantine de Nassau craignant que Henri IV ne fit élever son fils aîné dans la religion catholique à l’exemple du jeune prince de Condé, hésitait à l’emmener à la Cour. 233 Le prince de Condé épousa le 17 mai 1609 Charlotte-Marguerite de Montmorency. 234 Jean-Antoine de Saint-Simon († 1er septembre 1629), baron de Courtaumer et seigneur de Sainte-Mère l’Eglise en Normandie. 235 Peut être un membre de la famille Carré de Châtellerault. 89 Madame, je vous anvoye la procurassion qu’avés désirée. Je me resjouis fort de la faveur qu’avés eut an vostre voyage, espérant que vous trouverés vos chers anfans an toute santé, laquelle je leur souhete autant ou plus qu’aus miens. Vous sçaurés sy le Sr. Tirsay voudra acepter la condission que vous luy avés oferte. Il sera bien mal aysé de trouver ung pressepteur, quy aye la piété que vous luy désirés et qu’il pusse bien antandre sans antregent, n’y ayant guère d’escolle où tout ansamble, ces deux choses se rancontrent parmy ceus quy parlent latin. Je n’ay rien à vous ofrir, estant ma condission telle que au temps quy court et quy vont de moy ne se trouve propre pour estre mis an usage, quoy que je ne dessireroy jamès rien plus que de vous randre les servisses esgaus aus assurances que je vous an ay données, me prometant que vous m’aunorés tousjours et que vos chers anfans se nourriront au souvenir qu’ils n’auront rien tant à eus que ce quy despand de moy. Vous besant ung million de fois les mains an calité de Votre humble frère et fort afectionné serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 25 jullet. Archives nationales, 1 AP 434/129 95 27 juillet 1609 - Sedan Mme de La Trémoille Madame; Mon mal m’a resdoublé par le desplaisir que j’ay de ce qu’il me prive d’estre près de vous pour solissiter vostre prossés. Je suis an une fort grande atente d’an sçavoir l’issue que je vous souhete meilleure que pour moy quy suis atascher par ung très meschant rume quy m’a tousjours aucmanté despuis vostre partemant, de sorte que je ne puis mestre ung pied l’ung d’avant l’autre. Sy vous ne croyés avoir ung pouvoir absolu sur moy vous auriés tort, comme je l’aurois très grand de desfaillir à vous randre ce que vous doit Vostre plus humble frère et obéissant serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 27e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/106 96 15 août 1609 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Justel ariva hier au soir. Vostre soeur est debout, mes bien anrumée. Nous craignions nostre petit qui traine. Angélique s’an va avoi la rougeolle. Sy ces maladies n’ampeschent, vostre soeur fera le voyage. Vous voirés ce que j’ay de travailler. Ce quy est le plus inportant, c’est l’allée du nonce et de l’ambassadeur d’Espangne en l’armée, quy dispute que la dite armée se fet par tous ces princes contre les nostres. Dieu veulle que noste prince n’y trampe, sans doute il faudra pour l’Espagnol de quelque prou, les mariages ne se faisant. On m’a despuis le partemant de Justel d’aller à Nevers, mes je me suis excusay. Sy les fautes feites donnent mau de nous plus faire q’y voudray à temps sy sans croire conseil on veut continuer à faillir, on n’y peut avoir trop peu de part. Je suis Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 15e aoust. Archives nationales, 1 AP 434/93 90 97 18 août 1609 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vous aurés si plaist à Dieu vostre soeur le 26 ou 27e de ce mois, estimant qu’elle pourvoira mieus aus afaires dosmestiques que moy, quy desfandrois aus publiques an ne m’esloignant de ces cartiers où ung chascun est an expectassion où fraperont les premiers coups de ceste armée au feste pour favoriser les dessaings du pape suivant les choses contractées an une ligue catholique de laquelle le roy d’Espagne est chef. Ceste armée doit faire monstre près Mastric le 23e de ce mois par la lettre qu’il a plu à la Roine. Il samble que Sa Majesté n’an juge l’amploy que pour Julliers et il y a aparance que ce sera plustost contre la ville d’Ais quy doit estre mise au ban de l’Empire, duquel le roy d’Espangne sera exécuteur. Juliers est bien pourveu. Messieurs les Estats intéressés à la maintenir fayble, le prince de Brandebourg, l’Electeur, et foyble les princes de l’Union sont mal unis et pauvres. L’excecussion contre ceste ville colore de quelque justisse ancores qu’il est certin que leurs sousfrances ne viennent que pour estre de la Religion /2/. Ce sera les premiers esfets de ceste sainte armée que nostre France voit sans jalousie de l’accroissemant de nostre voysin, quy an poura an nostre [juge]mant, cella est, est ung peu estrange que les contantemans que ceus de la Religion en donne à Leurs Majestés ainsy qu’elles l’ont tesmoigné dehors et dedans nure pu an une chose de peu servir quelle est désirée du général recepvant ceste gratificassion de changer le lieu de l’assamblée ce sont froissé d’un quy me fait crindre plus de mespris que de bien voullance. J’atans de sçavoir ce qu’on aura ressolu à Nevers. Je vous suplie s’il ya moyen de faire rétablir les jugemans de mon prossés avec Monsieur de Vantadour236 jusques à l’arivée de ma famme, quy sollicitera ne désirant rien plus que de vous randre le servisse que vous a vous Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour Ce 18e aoust. On m’assure que le nonce et l’ambassadeur résidant d’Espagne à Bruxelles marcheront avec l’armée. Archives nationales, 1 AP 434/115 98 18 septembre 160? - Etampes à Mme de La Trémoille Madame, L’arivée de Benouil m’a esté par della toutes les joyes que jus jamés je n’ay q’une crinte, que ce bon commansemant n’aye esté suivy de quelque excédant Dieu parachesvra, s’il luy plaist ce qu’il a bien commansé que vous devons nous plus qu’on ne vous puit servir. J’ay u la coquelusche, j’an suis antouré quoy que ma tenue au lit huit jours, m’ayant beaucoup plus abatu que je ne l’avois esté à Hommois. Je vous suplie, sy vous escrivés an Alemagne, festes mes excuses de ce que je n’ay escrit il y a longtemps sur mes maladies et sur ce que je ne pouvois rien mandé. Que je n’aye veu l’ambassadeur d’Angleterre, mes meintenant je me prandré à faire une bonne despesche. Il me faut voir Madame vostre belle-mère pour aviser au fet de nos batesmes à Seudan. Je vous an donnerais avis. Je ne passeray jours à Paris quy ne me dure ung mois de sérieus amploye est à vous randre ce que vous doit Vostre humble et très obligé frère et serviteur. 236 Les Vantadour et les Turenne étaient les deux grands lignages nobles du Bas-Limousin. 91 Henry de La Tour bre A Estampes, ce 18e sep . Archives nationales, 1 AP 434/138 99 4 novembre 1609 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, Excusez-moy sy je ne me ramantois vers vous, pour vous comformer les veus de mon servisse, quy n’aurés jamés plus d’objet plus puissant que les commandemants qu’il vous plaira me donner. Nous avons célébré le jeune, ouy trois presches de Messieurs du Moulin, Le Faucheur et Durant237 quy font l’action avec ung cuisante mal commun d’avoir pénestré jusques à la division de l’âme. Cependant le Roy tenoit la campangne. Je ne sçay où, ny an quel habit, accompagné de cinc amis, comme : M. de Vandosme, les d’Elbenes238, Jon, de Monsieur le chevalier du Guet et Radelle239. Je ne sçay sy de la veue ils satifiront leur curiosité, mes an parler, il ne fut génnéreus. Sa Majesté est à Fontainebleau et sera issy maintenant. Vos gens de Laval sollissitent et croy qu’ils feront leurs afaires, assurés que je leur suis fort inutille. J’atans des nouvelles de vostre soeur aujourduy. Je n’ay ouy parler d’acort par le présidant Janin, aussy ne luy an aye parlé, estimant qu’on an a assés dit pour les y anvoyer, sy ils an ont aussi. Le marquis de Noirmoutier m’a dit un fois ou deus qu’il me feroit voir /2/ ces presséances. Il ne l’a fet. je croy que tout le monde vous atend. Je n’ay rien gasté an l’afaire auquel vous me par>>ses Madame et m’avés escrit et sy j’an ay parlé ung mot au Roy quy me tesmoingna ne l’agréer guères, despuis je n’an ay ouy parler. Mme vostre belle[-mère] m’a mandé que son fis seroit issy cest iver, mes ceus quy sont venus les derniers de ce païs là, disent que son voyage estoit fort incertin. Monsieur le Prince a fet ces jours là St-Hubert à Berteuil où le conte de St. Pol et cent ou sis-vints gentishommes se sont trouvés. Le bruit est qu’il doit revenir issy et que le Roy luy a convié. Vous aurés sçeu le départ du prince de Ginville240 pour avoir desclaré au Roy qu’il désiroit espouser la contesse de Moret241 et puis s’an estre retourné/3/, plus sur le mescontentement de ces parents que par sa faute, sy bien que quy a pris a pris et luy est à Ginville. La Roine se porte bien, je luy parleray du tabouret à la première ocasion. Madame de St-Luc est très mal de son acouschemant qu’elle a heu, ayant fallu tirer son anfant de force, mort et elle est an grand péril242. Dieu donne à vostre soeur la deslivrance que nous souhetons et me rande propre à vous 237 Pierre du Moulin, Samuel Durant et Michel Le Faucheur les trois ministres de Charenton. 238 Alexandre d’Elbène, Florentin, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi, fut colonel de l’infanterie italienne en France et premier maître d’hôtel de la Reine. 239 Fontenay-Mareuil dans ses mémoires compte que Henri IV, “ ayant été averti par M. de Traigny, gouverneur d’Amiens, qu’il mènerait Monsieur le Prince qui aimait fort la chasse faire la Saint-Hubert à une maison qu’il avait auprès de la forêt ... et que Mme sa mère et sa femme y seraient ”, il décida “ de s’y en aller accompagné de M. de Vendôme, des deux frères d’Elbène qui étaient fort de sa confidence, du capitaine du Jon et du chevalier du Gué, tous déguisés et lui particulièrement vêtu en valet de chien, où ayant vu Mme la Princesse à une fenêtre, en passant d’une chambre à l’autre, et durant le dîner, sans être reconnus... ”. 240 Claude de Lorraine, prince de Jainville ou de Joinville, troisième fils du duc de Guise, futur duc de Chevreuse. 241 Jacqueline de Bueil, comtesse de Moret, maîtresse de Henri IV dont Claude de Lorraine était également l’amant. Bassompierre dans son journal (tome I, p. 254) rapporte que : “ M. de Chevreuse, descouvert de voir en privé Mme de Moret, dit au Roy qu’il la vouloit épouser: ses parents accomodèrent cette affaire, et luy s’en alla en Lorraine, d’où il ne revint qu’après la mort du Roy ”; 242 Henriette de Bassompierre, première épouse de Timoléon d’Espinay, marquis de Saint-Luc, soeur de Bassompierre. Celui-ci écrit dans son journal (tome I, p. 254) : “ Ma soeur de Saint-Luc accoucha d’un enfant mort, et elle le suivit dix jours après dans ses couches, dont je pensay desespérer de desplaisir ”. 92 faire servisse et que les ocasions me soyent telles comme ma très fidelle afection sera de vous servir, vous bésant bien humblemant les mains an calité de Vostre humble frère et obéissant serviteur. Henry de La Tour bre A Paris, ce 4e no . Archives nationales, 1 AP 434/53 100 28 novembre 1609 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, J’ay ressu vostre lettre par ce messager. Vous debvés estre assurée que je n’oublieray rien de tout ce que je pourrés pour servir ceus de Laval an leur afaire, an quoy je vois beaucoup de gents intéressés antr’eus. Esmiru m’avoit mandé vouloir parler à moy, mes il n’y est venu. Je l’envoie cercher des aujourd’hui. Je n’ay veu le marquis de Narmoutié, mes il dit souvant me vouloir mener ceus de son conseil pour me parler de cest afaire. La Roine acouscha, jeudy à onse heures du soir, très heureusement d’une fille243. Lorsqu’on pourra parler à elle, je luy diray ce qu’il vous a pleu me mander. Je croy qu’on ne peut sans une manisfeste injustisse desnier à ceus de Vitré leur temple. Vous aurés sçeu comme ung sursi a esté pris a Poitier pour ces brouilleries. On assure le voyage de Bretangne arivant, la raison y doit nescessiter le Roy chascun luy pousse, mes il n’y a ancore rien d’assurer. Nous avons veu issy Monsieur le Prince quy n’est party plus satisfet que lors qu’il y est venu. Il a promis à la Roine d’amener Madame sa famme dans /2/ douse jour244, sçavoir s’il le fera. Je n’an voudrois assurer. Je l’ay fort peu veu. Il à une estrange afaire sur les bras et à ung estrange esprit pour si conduire s’il an arive du bien je seray fort trompé, Dieu veulle que je le soie. Je ne voy point de mesme, je crins qu’il donne plus à ses plaisirs qu’il ne faudroit245. J’ay veu Monsieur de La Noue, hier au soir, quy me samble n’incliner au voyage de Monsieur vostre fils. Je desmeure tousjours an mon opinion que vous l’ameniés et n’y voy aucune aparance que n’an desmeuriés la mestresse. Tout ce porte bien à Sedan, Dieu mercy. Mon dristour (?) est gaillard. Je suis extrêmemant à vous et tout ce que je puis faire ne m’agrée à l’esgal de ce que je fais pour vostre servisse, vous besant très humblement les mains. C’est Vostre humble frère et obéissant serviteur. Henry de La Tour bre A Paris, ce 28e no . Archives nationales, 1 AP 434/121 101 5 décembre 1609 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, J’ay parlay à Lesmirus avec lequel il ne faut rien atandre que par ung payemant qui se réduise plus pour luy que autremant; Ceus de Vitré me sont venus voir. Leurs partis se sont inscrit an faus 243 Henriette, née le 25 novembre 1609, troisième fille d’Henri IV et de Marie de Médicis, future reine d’Angleterre. 244 L’on sait que Henri IV était tombé amoureux de la jeune Charlotte-Marguerite de Montmorency, âgée de 14 ans. Pour pouvoir en faire sa maîtresse le souverain l’avait mariée le 17 mai 1609 à son cousin Henri de Bourbon (1588-1646), troisième prince de Condé qui était homosexuel. Mais celui-ci refusant de jouer le rôle du mari complaisant avait refusé de ramener sa jeune épouse à la Cour. 245 Le 29 novembre 1609, le prince de Condé emmena son épouse aux Pays Bas. 93 pour eslongné le jugemant; Vos advocats disent n’avoir afaire que je vois le présidant qu’on n’aye produit ce qu’ils resentiront jusques à Noël et par ainsy vous n’aurés à venir que sur le fin de janvier. S’il survient quelque chose vous an serés avertie. Escrivés à Mme de Guercheville et je feray suivre vostre lettre. Le partemant de Monsieur le Prince, avec Madame sa famme, a fort troublé la Cour aprè avoir esté à Landrecy où ung exempt des gardes luy fit commandemant, de la part du Roy, de revenir. Il luy dit que il estoit cheus ung autre prince /2/ souverin que le Roy pour quoy il ne craignent point de ne satisfaire au Roy. L’archiduc246 l’a anvoyé quérir par une bonne escorte de cavalerie et infanterie au dit Landressy. On n’a encores nouvelles quelle response l’archiduc aura fete à Monsieur de Praslin quy estoit allé le desmander de la part du Roy. C’est maintenant tout ce quy tient les esprits arestés. Le Roy se monstre fort ofansé, mes chascun estime que chasque jour portera son conseil pour deslibérer sellon les esvénemans. Vous aurés sceu Madame qu’il a esté pris force gents vers le Châtelleraudais quy auront à mon avis >>>>>>>>>>>>>>>>>>>> ceus quy cerchent à brailler. J’ay bien quelques petites penes pour l’afaire de Monsieur le Prince, mes la netteté de mes actions me fet surmonter tout cella. Vous me fites grans honneur lorsqu’il /3/ vous plust m’assurer de vos bonnes grasses, n’ayant rien an quy je m’estime plus honoré et heureus que lorsque je puis vous randre quelque servisse vous bessant très humblement les mains, priant Dieu, Madame, vous donner heureuse et fort longue vie. A Paris, ce 5e decbre. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/54 1610 Le 14 mai, Henri IV fut assassiné par Ravaillac, le 15 mai la régence fut confiée à Marie Médicis. Celle-ci pour assoir son pouvoir ouvrit largement l’accés du Conseil d’Etat aux grands. Parmi eux se comptait le duc de Bouillon. Henri de La Tour d’Auvergne n’avait pas pardonné à Sully son attitude en 1605 et 1606, aussi dès son entré au Conseil, il lui chercha querelle au sujet des dépenses de l’artillerie. En plein conseil, ils en faillirent même venir aux mains. La Reine dut intervenir pour que les deux adversaires se réconcilient. Au mois de septembre, Henri de La Tour d’Auvergne vendit sa charge de premier gentilhomme de la chambre du Roi au favori de la Reine, Concini, pour la somme de 64 000 écus. C’est probablement avec cette somme qu’il put acheter à la duchesse de La Trémoille la baronnie de Didonne afin de permettre à celle-ci de dédommager la marquise de Mirebeau, fille d’Andelot pour sa renonciation à ses droits sur l’héritage de la Maison de Laval. Dans l’acte de vente le duc de Bouillon s’engageait à rétrocéder cette terre à son neveu Henri lorsqu’il serait majeur. A la fin du mois de septembre Henri de La Tour d’Auvergne prit congé de la Reine “ avec permission d’aller jusqu’à Heidelberg en Allemagne, visiter et consoler l’électrice palatine sa bellesœur à cause de la perte qu’elle avoit faite de M. l’électeur palatin, qui étoit mort le 13 dudit mois ”247. En chemin, le duc de Bouillon visita le duc d’Epernon à Metz “ ce qui fut d’autant plus remarqué qu’ils avoient fait paroître n’avoir pas été de bonne intelligence ensemble ”248. 102 3 janvier 1610 - Sedan Madame, 246 L’archiduc Albert (1559-1621), fils de l’empereur Maximilien II, gendre du roi d’Espagne Philippe II, gouverneur des Pays-Bas. 247 PONTCHARTRAIN (Paul Phélypeaux, sieur de), Mémoires, Ed. Petitot, Coll. des Mémoires relatifs à l’histoire de France, tome XVI, Paris, 1822, p. 422. 248 Ibid., p. 426. 94 Vous fustes servie pour vostre lettre à Mme de Guercheville, tout aussy que vous m’ordonniés, mes le gentilhomme quy la porta ut le landemin ung coup d’espée aus genous quy luy ôta le moyen d’aller demander response. Je cuidois à vous avoir escrit, mes il me souvient bien l’avoir dit dit à Chauveau249. Je ne sçay pas si ceus de Vitray auront eu arrest. Je vis Monsieur de Vic250, avant partir, quy m’a dit son opinion quy leur estant fort favorable. Je croy qu’on vous conviera de venir à Paris. Vous y trouverés Monsieur le conte Henry251 ainsy que me le mande Mme sa mère. Je souhet de tout mon coeur qu’il soit sy sage que de servir cette porte que sçavés le temps quy pourra sescouller avant vostre arivée, mes pourra /2/ aporter quelque chose pour servir de raison, sy vous deviés amener Monsieur vostre fis, de quoy je ne seray paresseus d’observer jugeant assés combien cella vous tousche. Je seray chère Madame à Paris dans le 16 au 17e de ce mois où je m’estudieray de vous randre toutes sortes de servisses, vous besant très humblemant les mains. C’est, Vostre humble frère et afectionné sertiteur. Henry de La Tour er A Sedan, ce 3 jan . Le bon Monsieur de La Forest arive aujourd’huy qui vous avoit fet >>> >>>>>. Archives nationales, 1 AP 434/130 103 10 janvier 161? - Sedan à M. de La Trémoille Monsieur mon cher nepveu, rien ne m’est plus cher que vous, que j’ambrasse par espérance de toutes mes afections, que vous suivray la piété et singullières vertus de feu Monsieur vostre père et de Madame vostre mère ; la crinte de Dieu et son servisse debvans estre les guide de vos pas. Et avec quelle joye vous voiray-jen sy ce n’est des ieus du cors, c’est bien de ieus de l’esprit. Continuer à m’aymer, estant assuré que je vous aime et honore à l’esgal de, de mon fis, vostre cousin, quy portera l’arquebuse lorsque vous commanderés à une armée, et petit soldat fera son aprantissage sous vous, quy aurés pour anseigne la parolle de Dieu. Je vous bèse et rebayse mille fois, Adieu, cher anfant, que je prie à Dieu de combler de ses saintes bénédictions et du ciel et de la terre. Vostre bien humble oncle à vous faire servisse. Henry de La Tour er A Sedan, ce 10e jan . Archives nationales, 1 AP 434/146 104 22 avril 1610 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je vous anvoye la lettre qu’il vous a pleu désirer de moy. Vos actions, an la conduite des afaires de Messieurs vos anfans ont, assés d’aprobassion sans vouloir avoir la mienne, mes pour vous obéir cuidant ne pouvoir faillier puisque vous le commandés. Vostre soeur vous mande toutes nouvelles. Je croy que le duc Frédéric palatin sera issy d’avant la St-Jehan. Monsieur de Villeroy m’ayant mandé qu’il croyoit que le Roy l’acorderoit à la prière du Sr. Berstel de la part de Leurs Altesses. Que bonheur sy vous venés à Spa et ancores plus grand, sy je puis vous randre tous les servisses que vous a promis et vous doit 249 Pierre Chauveau était l’un des secrétaires et conseillers de la duchesse de La Trémoille. 250 Méry de Vic, seigneur d’Ermenonville, un conseiller d’Etat. 251 Frédéric-Henri de Nassau, demi-frère d’Elisabeth et de Charlotte-Brabantine de Nassau. 95 Vostre bien humble frère et vrémant serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 22e apvril. Archives nationales, 1 AP 434/108 1611 Henri de La Tour d’Auvergne va être l’homme de la Cour. L’année commença par la démission le 26 janvier 1611 de son vieil adversaire Sully de sa charge de Surintendant des finances. Henri de La Tour d’Auvergne aspirait à devenir le chef du parti protestant et proposa ses services à la Cour pour la prochaine assemblée protestante qui devait se tenir à Saumur du 27 mai au 12 septembre. Sur la promesse du gouvernement du Poitou, alors entre les mains de Sully, il promit de servir la Cour “ autant que son honneur et sa conscience lui pourraient permettre ”252. Mais, il dut déchanter, il ne fut pas élu président de l’assemblée comme il l’escomptait, les députés lui préférèrent Duplessis-Mornay et il vit s’élever un nouvel adversaire à la direction du parti réformé en la personne de Henri de Rohan, le gendre de Sully253. Henri de La Tour d’Auvergne quitta Saumur, pleinement conscient que le parti protestant avait rejeté sa prétention à en devenir le chef. Malgré cet échec, il fut bien reçu à la Cour : le chancelier Villeroy et le président Jeannin vinrent le visiter en corps et la Reine lui donna un hôtel au faubourg Saint-Germain. Comme “ il lui était impossible de guérir un mal dont il ne connoissoit pas la cause. Et aimant sa femme, ses enfants et sa maison, il prit occasion, y ayant six mois et plus qu’il n’avoit été chez luy, d’y aller faire un tour ”254, d’autant que son épouse y avait donné naissance, le 4 septembre 1611, d’un second fils, Henri, le futur maréchal de France255. C’est alors que parvint à Sedan le bruit que lors du synode provincial tenu au mois de novembre à Thouars en présence de Henri de La Trémoille, avait courut une rumeur prêtant au duc de Bouillon l’intention de vouloir changer de Religion256. Apprenant que ce bruit s’était développé sans que son neveu réagisse, Henri de La Tour d’Auvergne ne manqua pas de faire part de son mécontentement à la duchesse de La Trémoille. A la suite de cet incident, celle-ci, craignant que ses deux fils ne soient l’objet de pressions à Thouars, décida de les lui confier. 105 25 août 1611 - Saumur à Mme de La Trémoille Madame, Pour obéir à vostre commandemans, je vous anvoye ce laquais quy vous porte des lettres de Paris et de Sedan où estoit Mme de Roan quy avoit fort fatigué vostre soeur, y estant arivée à dis heures et ne se couschèrent qu’à minuit257. 252 François-Annibal d’ESTRÉES, Mémoires... sur la Régence de Marie de Médicis (1610-1616), Edition de la Société de l’Histoire de France, Renouard, Paris, 1910, p. 44-45. 253 Henri de Rohan (1579-1638), duc de Rohan, prince de Léon, était allié par sa grand-mère Isabelle d’Albret à Henri IV. En tant que baron de Léon, Henri de Rohan disputait aux La Trémoille, barons de Vitré la présidence de l’ordre de la Noblesse aux Etats de Bretagne. 254 François-Annibal d’ESTRÉES, Mémoires, op. cit., p. 61. 255 Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, op. cit., tome I, p. 457-458. 256 Lettre de Duplessis-Mornay du 25 novembre 1611 à Charlotte-Brabantine de Nassau. DUPLESSIS-MORNAY (Philippe), Mémoires... contenans divers discours, instructions, lettres & depesches par luy dressées ou escrites aux Roys, Reines, Princes, Princesses, Seigneurs plusieurs grands personnages de la chrestienté, depuis l’an 1600 jusqu’à l’an 1623, Louis Elzevier, Amsterdam, 1652, 2 vol, p. 332-334. 257 Catherine de Parthenay était venue à Sedan pour négocier un projet de mariage entre sa fille Anne de Rohan et FrédéricHenri de Nassau qui n’aboutit pas. 96 Nous n’avons rien eu de la Cour où Monsieur Bullion258 escrit à Monsieur de Villeroy pour vostre passage, ainsy que vous l’avés désiré. Messieurs vos anfants partirent mardy. J’entretins Le Plessis longtemps et à Monsieur de Trimouille, devant son gouverneur, je luy fis une rude resprimande de sa pressomption. Il me tesmoigna s’en debvoir souvenir. Je n’escris plus à Sedan. Sy vous y escriviés, je crois qu’il faut mander que vous m’estimés party. Je crins ne pouvoir estre à Sedan au temps que /2/ nous aurons pris avec Mme de Roan. Ce sera à vous Madame de donner resmesde à toutes ces disficultés pour prandre le temps où nous pourrons joindre toutes ces pierres, lier la fascheuse afaire où nous sommes. Je feray tous ce que vous m’ordonnerés, n’ayant rien tant à coeur que de vous faire servisse très fidelle ainsy que le vous a promys Vostre humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour e A Saumur, ce 25 aoust. Archives nationales, 1 AP 434/104 106 Sans date - Montrevault à Mme de La Trémoille Madame, Mon malheur veut que le mauvés temps m’a retardé d’ung jour, de fasson que tout présentemans vostre laqués vient d’ariver et moy d’ung cart d’heure plus tost de passer que je me voy privé de vous randre ce servisse pour samedy matin, mes sy tant est que vous jugés mon servisse utills et qu’il y aie moyen de retarder pour jusques à lundy me le mandans je n’y faudray et seray dimanche259 à Paris. Là, j’escris à M. Mirou. Vous ferés de ma lettre ce qu’il vous plaira et de moy tout ce que jugerés estre propre pour vostre servisse. Cest Vostre plus humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Montreveau, tout comme, ce jeudy à catre heure du soir260. Archives nationales, 1 AP 434/94 107 24 novembre 1611 - Sedan Mme de La Trémoille Madame, J’anvoye Le Vasseur pour tesmoigner mon ressantiemant commun au deuil de la perte de Monsieur, frère du Roy261. Je fis estat de partir dans le milieu du mois quy vient. Vostre assemblée de Touars a esté tenue. Monsieur de La Trémoille a ouy et n’a rien dit an oïant mesdire de moy ; au moins, à cella la nature luy debvoit ouvrir la bouche. Bessay a presidé, certes. Madame a ceste occasion, je vous suplie de monstrer que vous ny Messieurs vos anfants n’estes pas neutres et à cest esfet, les anvoier quérir plus tost sera le meilleur. 258 Claude de Bullion (1569-1640), conseiller d’état, marié à une nièce du chancelier Brulart de Sillery, encore à laurée de sa carrière qui le mènera à la surintendance des finances en 1632. 259 Le duc avait commencé à écrire same[dy] avant de le barrer. 260 Aucun élément ne permet de dater cette lettre écrite de Montrevault dans le Maine-et-Loire. 261 Nicolas, premier duc d’Orléans, second fils d’Henri IV et de Marie de Médicis, né le 13 avril 1607, est décédé dans la nuit du 16 au 17 novembre 1611 à l’âge de 4 ans. 97 Monsieur Rivet et tous gents de bien voiront que ceus quy braillent n’ont point Dieu, ny son Esglise. Durant et vous savés la junesse de Messieurs vos anfants, croître avec ce fet, asure randre leur condission, serve à ainputé excuses. Sy je vous an parle /2/ ainsy, mon afection à vous servir et qui me tire à ce vif santiment de me voir eschafaudé an la mayson et à la veue de ceus que j’onore et aime passionnémant. Vous y pourvoirés donc, sy vous plaist, avant q’une telle mauvese coutume ne prenne plus de rassine. Vous avés vostre chambre, j’espère que vous y aurés justisse, à quoy je vous iray servir de bon coeur, comme an toutes autres choses que vous me commandés, vous besant bien humblement les mains. C’est. Vostre plus humble frère et serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 24e no . Archives nationales, 1 AP 434/101 1612 Après avoir espéré recevoir en vain le gouvernement de Poitou, Henri de La Tour d’Auvergne réalisa que la Reine n’avait jamais eu l’intention de le lui donner. Au lieu de cela, elle le chargea à la fin du mois d’avril d’une mission diplomatique en Angleterre, officiellement pour informer le roi Jacques Ier de la portée des mariages de Louis XIII avec l’infante d’Espagne et de sa soeur, Elisabeth, avec le prince des Asturies, mais en fait pour persuader le roi d’Angleterre de condamner l’assemblée de Saumur et l’attitude du duc de Rohan262. A cette occasion, il emmena avec lui son neveu Henri de La Trémoille. Le 13 juin, le duc de Bouillon revint d’Angleterre et rendit compte de son ambassade le 16. “ On apprit avec plaisir ”, nota Pontchartrain dans ses Mémoires, “ que le roi de Grande Bretagne était le mieux intentionné du monde pour entretenir la bonne amitié et les alliances qu’il y avoit entre les deux couronnes ”263. “ En cet temps là ”, écrit Bassompierre “ se fit une estroitte union de M. le Prince, MM. de Nevers, du Maine, de Bouillon et du marquis d’Ancre et la reine se jetta entièrement de ce costé là ”. Les ministres : Brulart, Jeanin et Villeroy étaient discrédités, “ tout se faisoit selon le désir de ces cinq personnages ”264. Le duc de Bouillon qui avait reporté la rancune qu’il éprouvait contre Sully sur Henri de Rohan, dressa Marie de Médicis contre lui, lui disant que Saint-Jean-d’Angély dont il était le gouverneur devenait un camp retranché. Le choix d’un nouveau maire mit le feu aux poudres. Les dames de Rohan furent retenues à Paris, les pensions de Henri de Rohan et de son frère ainsi que le paiement des garnisons dans leurs places de sûreté furent suspendues. Rohan riposta en convoquant à La Rochelle une assemblée du cercle de la Saintonge et des provinces voisines qui rédigea une liste de griefs où elle exprimait la crainte d’un retour des persécutions. La renaissance des intrigues de Condé et des Grands obligèrent Marie de Rohan à mettre un terme à cette épreuve de force à la fin de l’année. Elle libéra les dames de Rohan et rendit ses pensions à Henri de Rohan et à son frère265. Dans ses deux lettres du 19 et 22 novembre à sa belle-soeur, Henri de La Tour d’Auvergne ne manque de critiquer son rival, lui reprochant notamment son manque de clairvoyance politique, ne sachant notamment pas sortir d’une crise au temps opportun. 262 Jack Alden CLARKE, Huguenot warrior : The life and times of Henri de Rohan (1579-1638), Martinus Nijhoff, The Hague, 1966, p. 39. 263 PONTCHARTRAIN (Paul Phélypeaux, sieur de), Mémoires, Ed. Petitot, Coll. des Mémoires relatifs à l’histoire de France, tome XVII, Paris, 1822, p. 5. 264 Maréchal de BASSOMPIERRE, Journal de ma vie, Ed. marquis de Chantérac, Renouard, Paris, 4 vol., 1870-1877, tome I, p. 311. 265 Cf. Georges SERR, Henri de Rohan. Son rôle dans le parti protestant (1610-1616), Aix-en-Povence, 1948, p. 78-112. 98 108 26 janvier 1612 – Sedan Elisabeth de Nassau à son époux266 Monsieur, C’est à moy à quy il ne seroit pas pardonable sy je perdois une seulle occasion sans vous écrire, sans atendre donc et comme vous aurés de mes lettres par le Sr. de Coutures quy m’est venue voir et m’a dit comme il ne manquera pas de vous aller baiser les mains et très humblement remercier de celle qu’il a optenue de vous en sa faveur. J’eus hier l’honneur d’en recevoir des vostres par le palfrenier quy a a amené le beau cheval d’Espagne que je n’ay pas encore veu, car tout hier je fus empaichée et encore plus fâchée d’une jolye bien grande qu’a fait Jaque, mon cusisinier quy s’est trouvé après minuit en la chambre de nostre fille auprès de Judic quy estoit au lict ; et cela il 2/ y a quatre ou cinq jours lorsque j’eus cest accès de fièvre et y fut trouvé par Marguerite et Bonne. Ce m’a tellement fâchée que au mesme instant je leur fis donner leur congé à tout deux commandant à Jaque de l’épouser à quoy in n’a fait nul refus y aïant lontemps qu’il l’y avoit promis. Le contrac de mariage fut dès hier passé quoy que tous deux hors de mon service ils porotestent fort de n’avoir pas fait plus grand mal que celuy que l’on a veu, mes je l’ay creu assés grand pour les punir comme j’ay fait car ce n’estoit pas la première fois quy luy estoit arivé de la venir voir à ceste heure indue, mes je n’en avois rien seu sur ce qu’elle avoit tant promis de n’y plus retourner. La chose a esté tant diveulguée que j’ay creu encore qu’il l’épouse que je devois pour l’exsemple ne les soufrir plus céans car sy j’eusse fait les nosse je ne tenois pas la punition assés grande. Ceste broulerye /3/ m’a fort fâché, car je ne croiois seulement que ceste fille s’oublat jusque là, au contraire j’en avois bonne opignion et la trouvois à mon gré et me sembloit qu’elle estoit pour bien servir nostre fille. Elle a une grande repentance de sa faute et tous deux à ce que l’on dit et font pityé à ceux qu’elles voient et font des sermens horibles quy n’a pas eu seulement intension de mal faire mes qu’ayant un petit bue quy n’a point pensé au respec quy devoit en la chambre de ma fille, mes assure que s’avoit esté fort sage et qu’il l’a tousjours aymé. Pour le penser l’istoire seroit bien plus longue sy je vous en disois toute les circonstances, mes, mon cher Monsieur, je croy vous en inportuner trop mes. Je vous suplye me mander sy j’ay bien fait en la procédure que j’ay tenu. Je suis en l’atende de l’arivée du coche pour ce que c’est Samedy pour l’argent de cest armurier. Je le puis faire donner en prenant celuy de ma dépense nons sans incomodité. Vous m’aviés mandé mon cher Monsieur que vous m’en envoiriés et /4/ semble quy me faudroit donner, mes ce ne sera pas toute la somme, car pour quinse jour je croy que l’armurier se passera de cent escus et cepandant vous commanderés, sy vous plaît, à Fournier d’envoïer les quatre cent. Je suis extrémement ayse que vous espérés de faire réformer la protection, comme aussy sy j’aprens que le conte de La Marc se mette à la raison. Je vous suplye me mander sy vous entendés que que l’on presse Tobye Dusat jusque là que de vendre sa marchandise. Vous ne m’avés pas mandé aussy vostre volonté touchant les clefs que Rochecoube prétens durant la suspention de Chaomaise. Je commence à bien espérer de nos afaires commeunes sy vous vous en mellé, je vous suplye dont très humblement de ne vous lasser. Toute la petite troupe se porte extrëmement bien et atent leurs étrenes en grande dévotion. Pour moy, mon coeur, je trouve tousjours et suis tousjours préoccupée de mon insidieu mal, quy me fait vous faire un vrai brouilion tant j’ay de hâte de me coucher. Adieu mon cher Monsieur que j’ayme mieux dix mille fois mieux que moy. C’est $§$§$ A Sedan, ce 26e de janvier 1612, 266 Cette lettre d’Elisabeth de Nassau à son époux est conservée dans le Fonds La Trémoille parmi des lettres adressées à sa sœur Charlotte-Brabantine. 99 ce samedy. Archives nationales, 1 AP 334/145 109 Sans date à Mme de La Trémoille Madame, J’avois sy peu d’anvie de partir de cheus moy q’ung avis venant de moindre lieu que celluy que Justel m’a aporté m’y ut fassillemant aresté, n’en douté point, mes tout l’hiver on me fet de mauvèses aferes. Il y a longtemp le baron de Corna, la facture des caiers vont avec une sy fassille preuve pour m’an descharger que cella de soy mesme se ruinera. Je n’ay guiéres acoutumé d’avoir mauvès visage de mes ministres, mes jé une science d’aprouver tout ce qu’ils font et y plier les éspaules, me prometant que mes servisses surmonterons tout cella de m’an retorner. Je ne luy du ny sans me mestre an esvidant péril de fortifier davantage les callomnies que de les assoupir. J’ay lessay mon petit troupeau an bonne santé. Dieu les y mantienne et donne le moien de vous randre le servisse à quoy est obligé Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Faire, ce jeudy à sis heures du soir. Archives nationales, 1 AP 434/114 110 10 avril 1612- Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Tout est an bonne santé, aussi vostre bien aîmé et moy, nous nous gouvernons bien. Justel vous dira de ses estudes et le subject de son voyage. Vous le croirés, sy vous plait, et me tiendrés pour Vostre humble frère et fidelle serviteur; Henry de La Tour A Sedan, ce 10e apvril. Archives nationales, 1 AP 434/86 111 19 novembre 1612 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je ressus hier vos lettres par le Sr. Chauveau que je n’avois garde de n’exécuter venant de vostre part. Aujourd’huy la Roine a ressu celles de Monsieur du Plessis, par le Sr. Marchant. Monsieur Filipeau a fet sçavoir à la Roine le contenu de celles que luy escrivés, de quoy Sa Majesté a ressu contentemeant et vous an sçait gré. La lettre de Monsieur du Plessis a esté bien ressue et peut croire qu’il recepvra d’issy tesmoignages de bonne volonté. Vostre lettre m’a dit son désir à bien vivre avec moy, qu’il n’aprouve les prossédures qu’on tien par ceus de nostre religion, qu’il estime le naturel de Monsieur de Roan bien, mes asissté de mauvés conseil, qu’il désire le racommodemant de ces afaires. Quant à ce quy me regarde, vous sçavés combien, fassillemant, je me porteray à luy tesmoigner une fransche et sincère amitié et à donner au public l’avantage et profit qu’il peut recepvoir d’une bomme et sincère communicassion de nos avis, pour y porter une droite suite des moyens pour y parvenir. 100 Il est aisé à voir que les /2/ prossédure des nostres ne sont ny justes ny prudantes, que les remèdes iront plus difissilles à trouver autant le temps qu’on donra à les y porter. Le Sr. de Rouvray267 aporte de la matière à y travailler et plus abondant qu’aucuns n’an ussent esté d’avis. Il s’est fet des plintes du clergé sur ce mot. De prestandus mals informés estimant que cella aloit à une l>> pour tens. M. d’Espernon fet plinte comme pour l’interest général des catoliques des choses qu’on concédoit an la faveur de M. de Roan. Le nonce et l’ambassadeur d’Espangne s’an lessent antandre et an plus fors termes de l’avancemant qu’il se donne au trecté d’Angleterre quy est sur l’articulassion des audissions de ministre à ministre des deus couronnes. Cella doit bien faire voir qu’on n’a dessing à nous mal faire, sinon celluy que si voulant persuader ceus quy an veulent faire leur prétexte pour couvrir leurs mauveses intanssions. Il nous faut jouir des avantages que nous pouvons rescentir dans une légitime obéissance due au lois de nostre Estat et suis isselles nous randre mambres propres à y servir et non à le destruire. Je suis tout persuadé du bon naturel de Monsieur de Roan, mes il suit mauvés conseil, comme tout présentemant avoir /3/ escrit issy qu’il ne trectera, sy le marquis de Rouy n’est mis dans Châtelleraut. Jugés, Madame, sy Monsieur de Roan peut ou doit limiter an luy les droits du public. Cella est insuportable et san trouverra plus des nostres quy ne le trouveront à son particulier que de ceus quy luy voudront l’imiter. Les plus avertis follies sont les meilleures et grande sagesse d’an sortir lorsqu’on le peut. L’ocasion san ofre, il ne la faut perdre. Achevés ce pourquoy vous estes allée et vous assurés de mon servisse, quy vous sera tousjours fidélemant randu comme vous an a assuré il [y] a longtemps Madame, Vostre bien humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour A Paris, ce 19e novbre. Archives nationales, 1 AP 434/57 112 22 novembre 1612 - Paris à Mme de La Trémoille Madame, Vous avés très bien feit et an este fort louée, à ceus quy y ont voulu cercher quelque blasme contre vous, n’ont eu vois que pour se taire. Assurés vostre maison pour l’esglise, la patrie et pour vous et revenés vous an. Le voyage de M. de Rouvray et de M. du Plessis aura fet son oberastion avant que vous recepvrés ceste cy. J’apréhande diverses chose que Monsieur de Roan ne soit mestre de ses intérests. Ceus de ses amis an fesant une part qu’il aura malaisémant pouvoir de les contanter en satisfesant à ce quy leur fet besoin et moins à leurs espérances. Ce à quoy suivant ces demandes, issy on ne les trouvera convenir à ce que la dignité du Roy peut permettre. Il s’est faict des mescontantemens des catoliques, car les articles qu’aportes le Sr. de Rouvray quy me fet crindre qu’ils seront subjects a estre innfondés et afoyblis pour les randre de la valleur que je dis audit Sr. qu’on ne les estimoit an rien faire plus pour nostre général que l’en n’avoit fet par le passé. Les afaires prennant plus de tranquilité qu’elle n’ont fet il y a quelque temps. Toute sortes d’afaires sont commises à Monsieur le Prince par le commandemans de la Roine, si cella ung chascun se sousmet, les ministres ainsy que les autres. M. d’Espernon se porte mieus, mes il n’a son /2/ esprit contant du peu d’antremise qu’il a aus afaires quoy que n’an avons non plus que luy. 267 Jacques de Jaucourt (1574-1637), sieur de Rouvray, conseiller du roi en ses conseils, ancien de l’Eglise de Châtillon-surSeine, député général des Eglises réformées de 1611 à 1616. 101 Vous aurés sceu la mort du prince de Guales268, mort ou laquelle il s’est fet plusieurs pertes sous la main de Dieu. Il avoit fait arester nos plintes. Je crois que le mariage de M. l’Eslecteur269 ne recepvra pour cella aucun ampeschement valique et tous ce qu’il a concluct a failly de se perdre et y a eu force choses inutilles. Le carosse quy se fet issy, sera cher et de peu d’usage non plus que les autres hardes Vous me mandier sy vous aurés agréable que Bellefontene recepvant ung soldat quy commandera sous luy à Chastillon, que vous luy désirez qu’il garde la capitenerie270. Le maréchal de Fervaques et sa famme ont donné une requeste pour an faire dire. Je tascheray d’empescher qu’elle ne soit représenté que vous m’ayés, Madame, mandé vostre volonté pour la chanlue (?). Je ne say comme elle est, sinon que le présidant Séguier n’y est pas. Chauveau vous dira quelque chose d’une lettre de M. /3/ de Parabère. Il m’an a anquis. Je ne luy an ay rien dit, quoy que j’ay bien veu qu’il ut désiré m’an faire parler, son esprit et le mien ne sinpatisant an cella. Il ne s’y fera rien que ce que vous y ferés, sans aide de personne. Sy vous puissiés rantenir Bessay271, Chesmes, qu’il vont avec vous lorsque viendrés issy, se seroit bien fet sy vous voyer que cet esprit Genevois, voullant essaier leurs forces. Pourvoyés bien à vostre maison fortes que celuy qu’y levrés prenne intelligence avec nous. Le peus sy vous pouvés quelque chose vers Candelay272, amployés-vous y, sy vous plaist, soit pour le sesparer d’avec ces zèlés, soit pour luy faire prandre rescompanse de sa plasse. J’ay eu du petite ataque de goute, mes j’espère que ce ne sera rien. Vous aurés une lettre de vostre cher fis, je luy ay fet respensé. Je crois que vous me voudrés regarder, Madame, pour vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour bre A Paris, ce 28e no . Archives nationales, 1 AP 434/58 1614 La lune de miel du duc de Bouillon avec la Cour ne dura guère. Il était aux cotés du prince de Condé lorsque celui-ci, le 18 février, publia un manifeste contre les mauvais conseillers de la régente et sa politique étrangère et demanda la convocation des Etats généraux. Les provinces ne furent guère sensibles à l’appel de Condé. Au début du mois d’avril, une conférence fut réunie à Soissons. Marie de Médicis le 14 avril chargea le duc de Ventadour, les présidents Jeanin et de Thou de négocier avec les princes. La paix fut signée le 15 mai à SainteMénehould. 450 000 livres furent donnés aux princes pour leurs frais. C’est dans ce contexte qu’Henri de La Trémoille entreprit au mois de mai, avec son gouverneur Zacharie du Plessis-Bellay, son Grand tour en Europe qui pendant douze mois va le mener en Allemagne, Autriche, Hongrie, Italie et Suisse. Le duc de Vendôme persistant dans la désobéissance, la Cour quitta Paris le 5 juillet pour se rendre en Bretagne pour la réunion des Etats de cette province. Venant par Orléans, Blois, Tours, elle fit un crochet par Poitiers et arriva à Nantes le 11 août. Les Etats de Bretagne désavouant Vendôme supplièrent la Reine de lui retirer le gouvernement de la province. Celle-ci, après avoir hésité, 268 Le prince de Galles, Henri, fils aîné du roi d’Angleterre Jacques Ier Stuart et d’Anne de Danemark, est décédé subitement le 6 novembre 1612. 269 Frédéric V (1596-1632), l’électeur Palatin, neveu du duc de Bouillon, fils de Frédéric IV et de Louise-Julienne de Nassau, épousa 14 février 1613 à Whitehall Elisabeth d’Angleterre (1596-1662), fille du roi Jacques Ier. 270 M. de Bellefontaine, un normand de Condé-sur-Noireau, vétéran des guerres du Béarn, avait été nommé en 1608 par l’assemblée de Gergeau, gouverneur de Châtillon-en-Vendelais, en remplacement de Maurice de Beaurepaire, seigneur de Pierrefitte. Frères HAAG, La France protestante, tome II, p. 122.. 271 Jonas de Bessay, sieur dudit lieu, gouverneur de Talmont. Membre actif du parti protestant, il participa aux assemblées de Châtellerault (1605), Gergeau (1608), Loudun (1619) et de La Rochelle (1620). 272 M. de Candelay était le gouverneur de Royan, ville appartnant à la branche catholique des La Trémoille.. 102 soucieuse de ne pas ressouder la coalition des princes, lui laissa son gouvernement et ses charges. La Cour regagna Paris. Le 26 octobre les Etats généraux, réclamés par Condé, débutèrent à Paris au couvent des Grands Augustins. Pendant ce temps, à la fin du mois d’août, Elisabeth de Nassau avec ses trois filles aînées, partit pour Turenne où elle arriva à la fin du mois d’octobre. Elle se rendit à Lanquais à la fin du mois de décembre. 113 13 février 1614 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’anvoye le Sr. de Luqe à Paris pour mes afaires domestiques, et luy commande de vous servir aus vostres, ainsy que luy en donnerés. Monsieur le Prince sera, Dieu aidant, demin à Mesières et les autres qu’on dit estre unis avec leurs trins, de là il sortira quelque chose qut fera sçavoir nos désirs à l’accomplissement de la pes et dignité de l’Estat. Que pour moy, je vous assurerés ainsy que tous nous autres but, comme aussy de pouvoir ampescher que sous feins prétextes on la veuille rompre an nous an acusant le voyage de Monsieur de Vandôme n’aura eu lieu. Dites, je vous suplie à Monsieur de Tou qu’il conserve tousjour Monsieur le cardinal an l’esquité et esgalité où je l’ay veu et que sans feu ny armées il faudra que plusieurs maus a l’estat soyent amandés. Tout se porte bien céans. Monsieur de La Trimoille ne tousche pas du pied an terre qu’il ne soit relesvé. Il y a du notable changemant /2/ à son acheminemant au bien. Pour le petit, je l’ambrasse fort hier pour s’estre avec ressolussion lessé brûler la moustache an jouan à fougues. Voila an quoi nous annuyons les soirées. Je suis Vostre plus humble frère et plus fidelle serviteur. Henry de La Tour er. A Sedan, ce 13e feb Archives nationales, 1 AP 434/59 114 24 février 1614 – Mezières à Mme de La Trémoille273 Madame, J’ay receu vostre lettre par le Sr. Chaveau et entendu sa créance par où vous me dites de travailler à ce qu’on donne contentement à la Reyne sur la citadelle de ceste ville. Je désire fort qu’un chascun sache et considère la conduite qu’on y aporte si Sa Majesté mesmes se veut donner le loysir. Je m’asseure quelle cognoistra combien de respect et d’obeissance on luy veut rendre et que les véhémences du conseils de ceux qui veulent dans les malheurs de l’Estat couvrir ceux qui peuvent mériter ont faict naistre les difficultez qui se sont présentées en cet affaire. Je ne vous allegueray pas les préparatifs faicts pour s’armer, les despenses jettées dedans et dehors le Royaume de tous tant que nous sommes de deça non les gardes ordonnées. La science que je laissay à Paris qu’icy on s’assambleroit sans troupe ny armée qu’estans assemblez on sçauroit ce qu’on vouloit, et les causes de nos desparts de la Cour, dans lesquelles j’asseurois qu’il n’y auroit rien contre /4 bis/ l’authorité de Leurs Majestez leur service et la tranquilité de l’Estat. Les voicy armez, la citadelle est fermée mémoires sont pris des gentisshommes qui portent l’ordre de ce refus y paroist une disposition à les secourir, enquérir des moyens d’y recevoir de la cavallerie on s’enquiert soigneusement de ceus de dedans s’ils avoient commandement de faire ce qu’ils faisoient peur s’ils 273 Cette lettre du duc de Bouillon à la duchesse de La Trémoille nous est connue par une copie conservée dans un registre de correspondance de Henri de La Trémoille. 103 l’eussent ou ne procéder aucunement à les en tirer, mais se plaindre et attendre la raison qu’on en eust voulu faire. De tout cecy, je ne veux me servir, pour blasmer les conseils encores qu’il y auroit bien lieu de ce faire, non plus que faire servir ces choses à fortifier les raisons de n’avoir peu recevoir un lieutenent des gardes dans la citadelle, mais seulement de ce qui suit, Monsieur de Nevers274 envoye le chevalier de La Brosse vers la Royne l’advertir de ceste désobéissance l’asseurer comme il le pouvoit d’y faire obéir le Roy et de recevoir et exécuter ses commandements. Ledit chavalier donne ses lettres, expose sa créance conforme et encores plus espédie, et la donne par escript. Ceux de dedans sortent et en advertissent Monsieur de Nevers rafraischit en mesmes asseurances, au lieu de les recevoir, ont faict partir /4 ter/ sur la despesche de La Brosse de la cavallerie pour si la citadelle n’estoit rendue avoir d’assister et encourager ceux de dedant. On envoye Monsieur de Praslin qui advoue sa desobéissance. On despesche quantité de commissions. On prépare de l’artillerie. La Royne dit qu’elle meine le Roy avec elle pour se faire obéir. Pourquoy cela puisque l’obéissance est offerte devant depuis la paix n’est ce pas pour effacer la cause de ceste obéissance qui avoit son effect sur le devoir que volontairement Monsieur de Nevers rendoit au Roy et au contraire le laisser attribuer à ces bateurs d’estrade au lèvement des forces et qui plus que tout cela a la veue des faces courroucées de Leurs Majestés puisque on asseuroit la condition, n’estoit-elle pas à estimer et l’embrasser non seulement pour la place, mais pour donner ceste bonne nouvelle à tous le Royaume imbue au contraire et à Leurs Majestez, ceste preuve que ces Princes ne veulent, ny ne peusent qu’à servir et obéir Leurs Majestez, cela répugnoit aux causes de l’armement, ouvroit le chemin àn la confiance et au /5/ raprochement, mais il portoit du soubsçon à ceux qui ont besoin de se cacher et authoriser dans les divisions. Ainsy donc, on n’a voulu une obéissance libre, on l’a voulu forcée. On l’a demandée avec soubçon et apparence qu’elle seroit ruineuse en la tournant contre la seurté de tant de personnes de qualité qui sont icy fortifians le dire, qu’on faict par peur et non pas de voir les choses, qui sont requises, cella receu par ceste main eust faict demander un autre puisque les menaces en auroient esté la cause. Les raisons de s’armer par en exemple fortifier et la poursuite de nos ruines, conclue entre ceux qui estiment ne proffiter de celles de l’Estat que les nostres n’ayent précédé à quoy ils ont raison, n’y ayant au reste des subjects du Roy, personnes plus intéressées que ce qui est icy à son service. On dit obéissez, nous le voulons, mais on ne veut pas laisser voir que le faisons parce que nous le devons, mais qu’on nous y a forcez par ces funestes volontaires et non nécessaires armes, qui feront plus d’opposition que de rapeler les personnes à leur devoir que la Majesté du Roy où elle servira, saisie grè à ceux qui la recognoistront qu’un chascun soit rapellé aux places qu’on doibt tenir que les /6/ maux de l’Estat soient recognus. Les remèdes aportez les bouches libres à les dire et communiquer qu’on ne subtilise par qui les ouvertures en sont faictes puisque seroit violence elles se font et qu’à ces remèdes il n’y paroit rien de nouveau rien qui n’aye esté souvent très utile à la France qu’on oste les armes et que par la justice armée de l’authorité royalle, chascun soit maintenu en son debvoir nous n’ayons pont d’armes seulement une raisonnable prévoyance de n’estre commis à la violence des armes et des conseils qui ont pour but de leur fortune n’estre ruine ainsy non la citadelle de Mezières sera subnille, mais nos personnes et nos vies Madame, nul autre plus que moy ne plaint le mal que je voy, et n’a moins de visée à y recognoitre du proffit. Le mal n’est point icy pouvant s’asseurer qu’on n’y veut que le repos et obéir et veu tout ce qu’on désire et désirera se trouvera dans les limites de l’authorité royalle à la pais de l’Estat, mais si on continue à vouloir commencer par nous pour afoiblir ces choses, nous nous y opposerons comme vrais et bons François. Messieurs vos enfants se portent /7/ bien, Henry est bien joly et Eric estudie fort bien et prend plaisir à me blasmer. J’en fais gloire, mes actions feront preuve de mes intentions. Le mot n’est pas icy encor un coup où j’ay escript ce qu’on juge convenir aux affaires. On dit qu’on accepte les Estatz que n’avise ou à convenir de l’estat où l’on demeurera entre cy et là et de choses qui doivent estre préparées pour cela et possible que Dieu nous rendroict tous si sages que nous tomberions d’un mesme advis, à faire les choses que les Estatz pourroient faire moyen, si le pouvions tenir, qui seroit pour se terminer à un contentement de tous, d’estimer que la force et les armes desmeslent ceste fusée, cest erreurs en faict et en droict, je sçay ce que c’est, c’est pourquoy j’en parle 274 Charles de Gonzague (1580-1637), duc de Nevers et de Rethel, proche voisin du duc de Bouillon. 104 si asseurément. Dieu en ordonnera sa volontés et s’il luy plaist je la suivery avec honneur, Madame, tenez-moy pour Vostre plus humble frère et plus fidelle serviteur. Henry de La Tour e A Mezières, ce 24 febvrier. Archives nationales, 1 AP 397/II/4-7. 115 Sans date à Mme de La Trémoille Madame, J’ay esté quelque temps sans vous escrire à cause des ocupassions que nous avons et aussy que j’ay estimé plus convenable de faire voir la raison de nos prosséders par les esfets que par les parolles pour se justifier et acuser ceus quy nous blasment. Je sçay bien que le but où l’on vist n’a qu’à viser esviter la ruine de l’Estat et à y afermir ung repos dans lequel la dignité roïale soit gardée et, pour moy plus que toute autre chose, que Dieu soit servy et son Esglise assurée. Je m’an vais à Soissons275 conférer avec les desputés de la Reine sur les moyens quy s’y doivent tenir. Je soubscriveray tousjours à toutes les afaires où Monsieur le Prince d’Anhalt interviendra, et seray pront à vous faire servisse. Monsieur vostre fis se porte bien, ne soyés an soing de luy. C’est Vostre humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/123 116 6 avril 1614 - Rethel à M. de La Trémoille Monsieur, je suis extrêmement marry de ne vous pouvoir dire adieu276, mes l’inconstance des ressolussions de Monsieur le Prince an sont causes. Je vous assureray d’ung servisse à vostre honneur et grandeur quy areste mes pansées à toutes les choses quy vous pourrons servir. Vous aurès dans peu de temps à estre garant de la meilleure partis de vos acti[o]ns. Sy elles ne sont acompagnées de piété et d’honneste humilités, vous desplairés à Dieu et aus hommes et ceste antrée au monde ocupera longtemps les esprits où l’espérance du bien ou du mal qu’ils aurait conceu de vous desplaises vous et aus parolles discours et actions exorbitantes au extraordinayres d’autant qu’elles sont tousjours acompagnées de présomption ou d’une douteuse vérité, retirés suivant vos inclinassions à Dieu quy vous donra l’issue et l’antrée de vos deslibérassionss à vostre pouvoir. Prenés conseil d’autruy et desfiés vous des vostres, métés pour but aus choses humaines de les randre conduites sellon la justisse et l’honneur. Et me veuillés aimer et me donner souvant de vos nouvelles, avec croyance qu’obient en tout vous m’estes aussy cher que moy mesmes. Vous baisant humblement les mains. C’est Vostre bien humble oncle à vous faire servisse. Henry de La Tour A Rethel, ce 6e apvril 1614. Archives nationales, 1 AP 434/143 117 275 Les princes avaient accepté l’offre transmise par de Thou de se réunir à Soissons avec le Reine. Celle-ci se fit finalement représenter par le président Jeannin. 276 Henri de La Trémoille et son frère Frédéric étaient à Sedan chez leur oncle. 105 13 avril 1614 - Soissons277 à Mme de La Trémoille Madame, J’ay veu qu’on a dit à la Roine qu’on continuois le travail à Mesieres. J’ay dit à Monsieur de Nevers ce que vous m’an mandiés. Il m’a continué l’assurance de la science que j’avois qu’on n’y travaille plus, ny on ny travaillera suivant ce qu’en a promis Monsieur le Prince. Je mène quelques infanterie pour sa garde et nos compagnies d’hommes d’armes, vous assurant qu’il n’y a heure qu’à luy et autres ils n’ayent avis de se prandre garde son afection à voir l’Estat an repos l’amenais issy, sy on disfère l’anvoy des desputés. Je me crins qu’ung peu quy sont portés au mal à de voir les sevisses à la main n’ayant de qu’ils désirent. Pour moy j’ay ung avantage que les plus malissieus esprits et plus blamantes langues, mes actions nous avoir pu trouver que la recherches du trouble à l’Estat me pus porter avantage à eus de se taire et à moy à poursuivre le bien et de vous desmeurer Vostre plus humble frère et serviteur. Henry de La Tour Soissons, ce dimanche à cinc heures du soir. Archives nationales, 1 AP 434/122 118 17 avril 1614- Soissons278 à Mme de La Trémoille Madame, Je vous anvoye la lettre pour M. Lebret, je désire qu’elle vous puisse servir pour les afaires généralles. La pais ou la guerre consiste an l’exercisse en des choses quy son général, mai ont estés accordées pour m’endormir une ansiété an laquelle, sans péril, nous puissions avoir quelque sûreté quelles s’exécuterons sy le public à son estandus an la puissance du bien que luy trouverer. Fiés vous an moy, que le particulier n’interronpra pas notre repos quoy qu’on puisse dire ny publier an contrère. Je vous rends milles grasses de la certificassion qu’il vous a plu donner. Monsieur vostre fis ne se porte bien, sy bien que vostre soeur le désire. Il est violant an ses exercisses. Je voudrois fort que Monsieur du Plessis passat issy an alant à Sedan et vous veu, s’il y avoit moyen avant que partissiés de Paris puisque la peste fait fuire an donnant du public. Elle sera plus aisée que faire autremant. J’ay peu veu Monsieur de St-Germain et aparé avec des prèsjugés fermes et qu’ils le ferment à ne donner rien ailleurs. Le temps et les esvénemans parleront avec luy, et moy poureray an>cecy, ce quy luy est aussy connu que j’ay vol>>>>>>> qui est sa vertu et à vous très >>>>>>>. Vostre très humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour e A Soissons, ce 17 april. Archives nationales, 1 AP 434/112 119 20 avril 1614 - Soissons à Mme de La Trémoille Madame, 277 Dans sa lettre du 31 mars 1614, à sa sœur Charlotte-Brabantine, Elisabeth de Nassau fait état du voyage à Soissons de son époux : “ Il part aujourduy pour son voïage de Soison ” Archives nationales, 1 AP 334/164. 278 Condé et le duc de Nevers avaient concentré leurs forces à Soissons. 106 J’ay la mesme intanssion au bien que vous m’avés tousjours veue. La nescessité ne diminue, mes ocmante à le procurer. An ceste poursuite, il n’y a que peines, pertes et blasmes. Il faut soufrir cela pour parvenir au reste ainssy que je l’ay pratiqué souvant. J’an recepvray ce que j’an atant sy le public est contant. On dit ce que vous requérés est bon, mes les moïens que vous tenés ne sont pas bons. Le premier vient de nous et le second de la contrinte qu’on nous donne par les moyens injustes et armés, qu’on tient pour nous suprimer et pour randre vaines nos réquississions au public des demandes particulières pour nous rien faire, mes quelles soient susfisantes de rompre an anchère, cella est fais comme le diable ny an ung ny an aucun ! On ne dit pas que nous demandons ung establissemant de conseil pour principalle sûreté de la conduite des afaires antre cy et les Estats et les mais changent pour ung bruit par ung raport le jugemant qu’ils doyvent faire de mes /2/ actions à moy dont par celle là de les satisfaire et à eus sy leur plaist de les atandre quelles vont au bien qu’elle n’an doyvent douter par le dire de personne quy rient jaunes, vérité au ceur. Et l’instant, j’ay ressu vostre lettre. J’escris à Monsieur Le Bret s’ils commancent à confisquer mon chariot et mes mousquets. C’est ung notable esfet pour Monsieur vostre fis >>>> au m’a fet des interogatoires hors sa commission et m’assure eslongnés de vostre pansée. J’ay mandé an Guïenne à ceus quy sont dans mes maisons de faire ce que nos Esglises feront et deslibereront. Vostre soeur vous aura mandé les fortes volontés de Monsieur vostre fis. Vous y aurés quelque considérassion sellon mon jugemant à plus tost le faire partir est le meilleur. Je suis Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour e A Soissons, ce 20 april. Archives nationales, 1 AP 434/136 120 25 avril 1614– Soissons à Madame de Bouillon Mon Cœur, je crois que ceste-cy s’an ira aussy tost à vous qune que je vous ay escrite ce matin par ung que Monsieur du Maisne doit anvoyer pour quérir trois cent mousquets. J’ay esté à Rethel, où l’on m’a dit que j’aime trop la pes et issy l’on m’a dit que je ne la veus pas, voila comme sont traités les gents de bien. J’ay su à mon retour que Messieurs de Vantadour279 et Janin sont partis maintenant pour aller à Paris estimant, comme je le croy, qu’ils y coucheront les affaires et pour lever les mefiansses qu’on donne à la Roine que l’on veut continuer à brouiller M. du Mayne. Il pourra faire ung tour en ma >>>> comme d’y aller, mes je n’y ay pas trouvé de lien. Ils ont fet prandre le Sr. >>>>> à Orléans, quy avoit une copie de la lettre qu’il a escrite d’issi au Roy son maistre, laquelle Le Blan a esté porté. Il avoit aussy ung de ces Messieurs mes que vous avés. Je désire fort que le dit Blan soit revnu >>> croy que le dit hom ne dit son voyage et ne mete son retour an danger. C’est pourquoy, je vous prie d’anvoyer un homme à Bruxelles porter la lettre que j’escris au Sr. Trumbul, mes vous escrirés à Monsieur la prince d’Orange faignant quelque afaire et aura le messager bien casché ma dite lettre afin de se servir de l’autre pour leur donner passage et donnant la vostre à vostre /2/ frère, il luy dira avec discression qu’il a l’autre recpevant son commandemant pour ce qu’il an aura à faire. 279 Anne de Lévy († 1622), duc de Ventadour, fils de Gilbert de Lévy, comte de Ventadour et de Catherine de Montmorency, était le cousin-germain du duc de Bouillon. A la différence de celui-ci, il resta catholique. Il fut un “ politique ” sur lequel Henri IV s’appuya pour contrôler le Limousin dont il fut gouverneur avant de devenir lieutenant-général en Languedoc. Il épousa sa cousine-germaine Catherine de Montmorency, fille d’Henri de Montmorency et d’Antoinette de La Marck. Anne de Lévy fut un des apôtres de la contre-réforme catholique dans le Limousin. Il fonda notamment en 1617 un séminaire pour obtenir un clergé de qualité. Son fils aîné, Henri, fut l’un des fondateurs de la Compagnie du Saint-Sacrement. 107 Je trouve fort bon que vous escriviés à Monsieur le prince Morisse sur l’avis que vous avés eu, afin de voir sy prandra considérassion dessus, auquel aussi je n’ay rien adjouste depuis. Nos mousquets ont estés près et croy je randus au >>>>>, ainsy me la on assure. Je vous anvoye une lettre pour Madame, que je voudrois fort luy estre randu seuremant. C’est une des choses que je désire le plus que nous ayons l’honneur de la voir et vostre sœur cheus nous et quelque espasse de temps il m’est >>>>> que les affaires soit an public, soit an particulier méritoyent prou que Monsieur l’Eslecteur nous tesmognant se souvenir de nous. Dites au capitaine Bilot de dire aus cordiers de faire trois mil livres de mesche. Il dit qu’ils an veulent trois sols et demy. Faites essayer de l’avoir à trois sols, sinon je ne prandray celle-cy. Vous parlés an gros. J’estime qu’il an fera recouvrir de bien à beaucoup mes leur pris, mes an ce cas il an faudroit voir pour l’espreuve /3/ et connoistre sy elle seroit aussy bonne que celle de Sedan. Sy l’on a donnés les mousquets qu’on me mande, ce quy an reste et les quantité qu’on leur vous les >>>>>>. Festes presser nos moissons, quy travaillent aus arches puis qu’ils ont de l’argent et que je les ay assurés qu’il ne leur manqueroy pas. J’escris à nos anfants. Je croy que Fryt sera capitaine de cent hommes d’armes. Je m’assure bien issy mes il faut andurer cella, parler et plaire à l’avenir. Je vous donne le bon jour. C’est $ $XX$ $ A Soissons, ce 25e apvril. Archives nationales, R2 53 121 Sans date à Mme de La Trémoille Madame, escrivés aus desputés généraus à ce qu’ils ne consantent la continuassion de la chambre, afin que Monsieur de Tou y antre, quy me l’a promis. Je fes ung petit abrégé de nostre estat à vostre soeur. Ce matin il a esté pris des moines espagnols, acusé par ung espagnol de faire ung sort contre la Roine. Ils servent ceus aujourduy. Je croy que je sens des seuls pour avoir de l’argent. La marquise d’Espinay280 fut festé hier Madame de Pompadour281. Le reine Marguerite282 luy an fit milles resprosches. Elle luy fit huit responces qu’elle avoit aprises de son mary, quy randit la dicte reine satisfecte. Je me plains autant que de mes goutes, Madame de ne vous servir sans vous et à Messieurs vos anfants. Je crins que Monsieur de La Trémoille ne se trouve mal, vostre soeur m’ayant mandé qu’il avoit pris mesdessine283. Je né que faire de sollissiteur pour partir, nul ne le désire tant que Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/137 122 280 Françoise d’Espinay épouse d’Henri de Schomberg. 281 Marguerite de Rohan-Guémené, seconde épouse de Léonard-Philibert; vicomte de Pompadour, veuve en premières noces de Charles marquis d’Espinay. 282 Marguerite de Valois (1553-1615), première femme d’Henri IV. Elle s’était fait construire un palais sur la rive gauche de la Seine, au Pré-aux-Clercs, face au Louvre. 283 Dans sa lettre du 27 avril 1614 Henri de La Trémoille informe sa mère “ j’ay commencey dès aujourd’huy à me purger ” (Archives nationales, 1 AP 393/42), ce qui fait présumer que le du duc de Bouillon écrivit cette lettre quelques jours plus tard. 108 18 mai 1614 à Monsieur de La Trémoille Monsieur, je suis fort an peine de vostre mal. Vous vous este my an frais incontinans après vostre purgassion. J’espère que ce gentilhomme vous trouvera bien. Le lit et prest à partir. L’assurance de la pes, vous doit faire commancer et continuer vostre voyage plus gaiemant284 et couvrir vos paines à y faire profis. Je prie à Dieu qu’il vous ramplisse de ces grâsses et vous comble de ses bénédictions et qu’à vostre retour, l’âge, le voyager, vous acroisse an bonnes inclinassions, qu’on vous remarque et vous corrige de toutes les mauveses qu’on crint et me donne le moyen de vous tesmoigner la vraye et parfecte afection que vous porte Vostre humble père et serviteur. Henry de La Tour Ce 18 mai 1614. Archives nationales, 1 AP 434/145. 123 25 mai 1614 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon à MM. des Estats Hauts et Puissans Seigneurs, Monseigneur le Prince envoyant exprès vers vous le Sr. de La Grange285 l’un de ses conseillers et secrétaires pour vous informer particulièrement de tout ce qui s’est passé en ces dernières occurances esquelles il a esté assisté de plusieurs autres princes, officiers de la couronne et principaux seigneurs de ce royaume de moy particulièrement qui y estoit obligé pour le service du Roy et le bien de l’estat, j’ay estimé debvoir joindre à ce qu’il vous escrit et qui vous poura estre représenté, par ledit Sr. de La Grange, le tesmoignage qui est deu à la vérité contre la calomnie dont quelques particuliers servans à la passion d’autruy ont tasché parmy nous de noircir la pureté et sincérité de nos bonnes intentions, desquelles quand vous serez informez au vray et sans déguisement et que les justes causes de nostre esloignement de la Cour et la suitte de nos procédures vous seront cognues, je m’asseure que vous en ferez tout autre jugement qu’il semble que vou n’avés fait cy-devant sur les premiers raports qui vous en ont esté faits. En quoy Hauts et Puissans Seigneurs vous me pardonnerez s’il vous plaist si je vous dis que la chose dont il s’agissoit principalement assavoir la surséance des mariages d’Espagne en laquelle vostre République avoit un si notable intérest et la qualité des personnes qui la demandoyent méritoient bien d’estre mis par vous en plus grande considération, cela pourtant n’altère en rien leur bonne volonté et affection, laquelle ils continueront à vous tesmoigner ainsy qu’ils ont tousjours fait par le passé en toutes les occasions qui s’en pouront offrir pour le bien du public et de vostre Estat en particulier pour la conservation duquel je contribueray de ma part plus qu’ancore autre y estant plus obligé par divers respects, mais principalement pas la considération de la religion, et par les tesmoignages que vous m’avez toujours rendus de vostre bonne volonté ainsy que je feray de mon service à toutes les occurances qui le vous deront désirer et demeureray pour jamais Hauts et Puissans Seigneurs, Vostre….. Archives nationales, 1 AP 497/II/135 124 11 juin 1614 - Sedan à Mme de La Trémoille 284 Henri de La Trémoille partit pour son grand tour le 17 mai 1614. 285 La Grange était le secrétaire du prince de Condé. 109 Madame, Je me souviens avoir veu une de vos lettres par lesquelles vous mandiées ouïr tant de choses que vous ne sçavés auquelles donner croyance. J’ay eu aujourdui trois diverses despesches de Paris et une de Monsieur le Prince, là je voy que les afaires vont en mal, mès ce mal par causes avec les avis sy contrères que je ne sçay où les prandre. J’estime que le voyage de Monsieur de Vantadour est mal antrepris et que les responses de Monsieur le Prince seront condissionnées pour mon allée à la Cour. Je voudrai y aller pour remercier et non pour solliciter ; ce dernier m’estant mal séant et néantmoins l’obscassion nescessaire pour moy et pour autruy. Le présidans Janin est celuy à quy je dois requérir, cella quy est peu, Villeroy pourra il ordonner contre l’ordre et continué aus afaires à sa fantaisie et nos conclussions soumises à sa haine. Cella est innouy, nonobstant sy on me conseillé d’aller, je le /2/ feray soubs l’une de deus conclusions, à sçavoir bien certin de ce que j’y feray ou trouveray ou d’y avoir mon antremise sesjour et partemant asuré. Je crins, sy Dieu n’a pitié de nous, que nous voions force mains auquels demin pourra qy voudrois remescher, mes la volonté s’estoufe dans mon courage par la mallisse de ceus quy font les afaires. Je me crins qu’à nostre assamblée il n’y aye de la division ou des ressolussions sy foybles qu’il faudra pâtir an s’y assujestissans, ce que les mesdiocremans fors rejoindront avec les plus violans pour n’avoir les bras croisés à la persécussion quy est à la porte, lors qu’on oubliera à nous crindre, crinte de quoy on ne se doit pas abuser, mes en user commes gripes. De voir le mareschal de Laverdin286 me revenant trouver afin qu’il me puisse me réduire, ce qu’il vous a dit, à quoy je vous suplie le faire flater avec assurance de tout servisse de la part de Vostre très humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 11e juing. Archives nationales, 1 AP 434/71 125 12 juin 1614 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Créance ariva lundy et le messager n’ariva que mardy. J’escris au trois frères de la Maison de Guise et à la mère287 et donne charge au Gripel288 de les voir. J’ay veu ce que M. Janin vous a dit et ce que Monsieur le Prince vous a escrit. Par là vous avés pu voir combien ont esté faus les bruits que j’estois mal avec luy et combien fausses les raisons de ceus qui m’estimant seul >>>>>>>>> honteuse disent que je >>>>> recercher ung acommodemant dommageable au public et à nous. Pour respondre à M. de B>>>>>>>; je reprendray à dire du Sr. Janin quy ne m’a escrit qu’il est nescessaire que j’aille à la Cour. Mon allée doit avoir ung but, quy ne peut estre meilleur que de donner ung avancemant aus afaires du général, par lesquelles l’hautorité du Roy soit apurée et le repos de l’Estat afermy, rien de sy propre pour cella que de faire qu’ung chascun y trouve le sien. C’est à quoy je vise. Je sçay les divers doutes qu’a eu Monsieur le Prince, qu’on cerchast celluy des autres et que le sien desmeurast an arière, lorsqu’il a esté besoing de terminer les mouvemans de son esprit. C’est qu’il croyoit que ceus quy y travaillèrent le faisoyent pour leurs commodités, ancores qu’il aie chose qu’il a 286 Jean III de Beaumanoir (1551-1614), marquis de Lavardin, maréchal de France. 287 Catherine de Clèves avait donné quatre fils à Henri de Guise : Charles duc de Guise, Louis, cardinal de Guise, archevêque de Reims, Claude prince de Joinville, futur duc de Chevreuse et François, chevalier de Guise, tué le 1er juin 1614 par l’explosion d’un canon. 288 Fils (?) de Louis Regnault, sieur de Gripel, capitaine d’Oliergues, qui avait été exécuté à Limoges le 15 décembre 1605 pour avoir conspiré contre Henri IV. 110 desirée /2/ grandemans. Il a maintenant à voir son antrée à la Cour. L’establissemant de ce qu’il aura à faire soit an son sesjour à la Cour, soit an son absance. Resconnoistre l’ordre qu’on veut prandre pour la tenue des Estats comme à prévoir ung arrest. Pour tout cela, je sçay bien qu’il montra au première générassion mon avis et ce qu’il y pourroir avoir à le mes>>>>>> que ce soit moy après qu’il auroit eu quelque connoissance de mon jugemant de la fasson qu’il y faudroit parvenir et il a quoy san debvoir obtenir ceste personne estant sy considérable. Il est donc utille de s’y garder de la confiance, mais luy aider à donner sa vois et son consantemant à ce quy sera jugé utille. Sy donc je vais à la Cour, soit apellay de la Roine, soit de moy mesme, j’iray sans ung certain science de son intansion et par conséquant j’y seray d>>>>> de ce qu’il aprouvera on inprouvera et luy donray à la fantaisie que q’y cercheray mes advantages, elle presjudisse des siens. C’est pourquoy, je vous suplierois de dire à M. Janin, que j’estime mon allée à la Cour, avant que d’avoir veu Monsieur le Prince /3/, non seullement infructueuse, mes présjudissiable pour qu’elle le pourra mestre an mesfiance, que du costé de la Reine on luy veut ôter tous les siens et que ce soubson ne luy fasse prandre d’autres conseils quy ne guaderont possible tant à son propre bien que ceus que je luy pourré aider à prandre, aussy Madame il n’y a que peu de jours sur le bruict qu’on ut qu’il y avoit de la l’humeur et des mescontantemans contre moy, qu’on montroit condammant, qu’on s’an voulut servir, resmarquant ancors combien inperieusemant, or ce quy a esté acoutumé. Le Sr. de Villeroy fet sollissiter celle du paiemant de ma compagnie. C’est pourquoy, je desire qu’il soit trouvé à propos que je voye Monsieur le Prince avant qu’aler à la Cour et qu’y allant je puisse satisfaire à l’utillité qu’on pourra espérer de ma venue, vous supliant faire antandre ou possible voir à Messieurs de Busamaud et Vigueur. Ce que je vous an mande, afin /4/ qu’an comprenant mes raisons, ils les fassent valoir à lever les mallissieuses interprestassions qu’on y pourra donner. Je donne avis audit seigneur Prince de ce mien prosséder, afin que j’ais son avis aussy tost ou peu après que j’auray sceu comme cessy aura esté pris pour Messieurs du cercle. Il faut prier Dieu de nous faire la grasse de trouver de remesdes dedans nous, pour esviter la diversité des chemins que l’on tient an la conduite de nos afaires, mes quelque fautes que puissons faire, quelques manbres de conséquanse, nous ne desvons aproscher qu’on y porte plus que la comminicassion et non jamès venir à l’esfet. La raison est que ils ne se contanteroyent d’oster la partie ulcérée, mes après celle-là ils viendroyent aus plus sains, et tout homme jugeroit mourir an la religion s’il le croit, autremant an jugemant icy desfaut qui luy n’a an l’essay de la mesme rigueur que ceus quy l’ont préssédé, plindre avec eus que tout le monde ne soit sage quy les faut ramener par dous moyens et non les traîner, que les humeurs ne sont ancores ployables à ces coups de cavesson. Que dis-je. Monsieur de /5/ Rouvray le sçait mieus commant il se doit dire et faire que moy, cepandant l’on tient ancores force armes levées en face des compagnies quy sont james servit et celles de ceus de la Religion en leur disnée. L’antretien certes, Madame, ou ne fet guières le bien parce que c’est le bien mes contant qu’on trouve que plus au moinson y a d’intérest. Je proteste que je n’ay autre désir que voir Leurs Majestés contantes, le repos de l’Estat assuray et d’estimer au païs quy ce bien là se trouverra desmeurant an atandant org ordre crintif quan ne le veuille qu’autant qu’il conviendroit à ne lesser condission d’aucun assurée qu’autant qu’il plaira à quelq’un. Je vous envoye une lettre pour Monsieur de Tou, quy a plus de bons désirs que d’ouvertures pratiquables à les faire réussir. Je suis Vostre bien humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 12e juing. Archives nationales, 1 AP 434/60 126 3 juillet 1614 - Sedan à Mme de La Trémoille 111 Madame, Je ranvoye Le Gripel avec la despesche qu’il vous communiquera. Certes, cest estat a bien du mal dans luy. Nous tandons les ungs et les autres à le randre misérrable et là où vous estes, je me résous à aller an la garde de celluy quy me garday jusques à cest heure. J’ôteray par mon allée la raison à ceus quy veulent persuader que nous avons ung dessmy de brouiller. Je me deslivreray de ce dessein de voir leurs maître sy nos mains donne du désir aus remèdes, j’y seray propre à y servir et de vous randre toute sortes de servisses à moy qui vous le doit Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 3e jullet. Festes-mes excuses à Monsieur de Tou. Archives nationales, 1 AP 434/89 127 8 juillet 1614 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’anvoye Le Grispet vers Monseigneur le Prince, estant arivé quatre heures après Monsieur de St-Germain, lequel ses peur>>>>>>> ancores demain, resconoissant que mon partemant à présent rancontreroit une concurance d’afaires quy randroit au moins mon arivée à la Cour innutille, sinon dommageable. Monsieur du Maine comencera les afaires ou ne les commencera, sy le premier il y aura assés de loisir de s’an aller con>>>>>> sy le dernier. Je verray sy l’on y cerchera les remesdes ou sy l’on voudra aigrir les choses, sy les remestent, je verray sy m’y jugeront propre. Sy l’aigreur, il y a aparanse que je ne l’adoussirois pas. J’ay des personnes mals veuillans quy aurons suspect ce quy viendra de moy et nul tant biens voullans au public quy veullent rien hasarder pour le maintenir plus an l’ung. Par Monsieur de St-Germain, vous serés informée du tout, désirant q’ung chascun le soit que je ne plindrois ma vie pour la mannutansion de la pes et que connoissant y pouvoir servir, je le feray de coeur et d’afection, ainsy que de vous tesmoingner que je seray jusques au tombeau Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour Ce 8e jullet à Sedan. Monsieur de St-Germain partira bien contant. Archives nationales, 1 AP 434/132 128 11 juillet 1614 - Sedan Sedan Madame, Hier ariva Bruss, quy me porte une chose conseillée et désirée que l’acommodassion de Monsieur de Vandosme, laquelle n’a pas aresté Leurs Majestés, les conseils desquels ny ceus de Monseigneur le Prince à quy an juge comme je fais par ce quy san voir ne pouront sambler que pressipités les ungs toutes fois plus dangereus pour la disférance des qualités. La Cour, armée, est à Orléans, sy Monsieur du Maine raporte satifaction, pourquoy ne l’avoir atendue, sinon pourquoy aller au devant de ce quy fera santir nostre foyblesse. Je ne croy que l’histoire, ny nostre mémoire, n’an fournisse pareils exemples. S’il n’y a une grande trahison, il faut que ceus quy ont donné ces conseils, ny autres ne soyent plus résolus à an donner. J’atandray l’issue de la nesgossiassion de Monsieur du Maine, par le retour du Gripel, pour me résoudre à mon partemant. Mes voissy quy au général et à mon particulier doit bien donner à panser, 112 quy est la provision venue d’Espangne et l’ordre d’armer au païs, an raportant cela à nos aliansses et à l’intansion de Villeroy, le public et moy avons bien a panser. Monsieur de Rouvray doit se servir de cella pour craindre et, par sa crinte, faire voir à nos Esglises que nous debvons prandre des conseils de prudans et aprouvés. Je me crois selon ce que j’aprans des desputassions aus provinces qu’il n’y aie plus d’ingnorance et de dessins privés que otremenant à l’assamblée généralle quy sera ung grand mal, n’estant notre party propre à se manier dans l’agitassion de telle tempestes des nostres et de nos enemis. J’estime que Monsieur de St-Germain convient avec /2/ mes deslibérassions, soit par une conformité de jugemans ou soit qu’il estime ne m’an pouvoir faire despartir, ne s’estant pas amusay à malesquer des raisons. Au contrère certes, Madame, la fasse de ceste saison nous menasse d’une grande et périlleuse suite d’afaire, pour lesquelles esviter, ung chascun doit contribuer jusques à sa propre vie. Ce que je feray volontiers lorsque je voiré où qu’on me donnera les moyens d’y servir. Ce qu’a présent, je ne voy pas par la puissance qu’ont ceus quy ne veulent que la ruine de l’Estat et quy improuvent ceus quy vient de moy et ne conssois pas que ceus quy recgnoissent le mal assument tout le bien qu’ils se veullent afermir pour le procurer pour peu de dommage qu’il leur an put ariver estant de mauvés asprits quy pansent profiter de la ruine de l’Estat que sy on n’est ressolu à ne s’estonner de leur opossission, on y sucombera par l’intérest qu’il sont à ne se lesser diminuer leur passion, plus d’afection à servir. J’atendray ou qu’on m’y preste la main, ou que je juge que je luy puis porter. Peu de jours, nous feront voir plus à cest heurs, comme pour lors je vous tesmongneray Madame la continuassion du servisse de Vostre plus humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 11e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/61 129 Eté 1614 – Sedan à Madame de Bouillon289 Mon Cœur, vous m’avez bien mis an peine de la rechute de nostre petit, mes plus qui avoit percé une dent. J’espère que c’est l’autre quy luy abime cests douleur. Vous me ferés grand plaisir de m’an donner des nouvelles. On vous anvoye force des choses dont la famme de Gobaille290 s’estoit chargée. Vous aurés deus dessus de manchons an Alemangne tous quite pour les changer quant vous viendrés issy. On a levé un peu san faut toutes les estofes qu’avés demandées. Ung tailleur fet le fraises et celuy de Madame de Montmorency, Chatalieu, s’estoy promis sa besongne assurémant pour le retour de ce cosche, mes l’autre ne le peut avant le retour de celuy quy partira mardy. Faites là dessus vostre conte pour vos pages. Ils auront du velours et des mesmes couleurs qu’ils portent, ceste escarlate ne me plaisant pas. Quant vous viendrés issy, vous passerés pour une princesse estrangère. Je donneray ordres pour vos paremans. Je vous anvoiray mil escus avant que partiés. Je vous anvoye des petits boutons que j’ay trouvés à fort bon marché >>>>> et une trompe pour quy vous plaira. J’atandray à faire response à Madame par vous. nous travaillons pour la chambre. Je n’escrivis à Madame vostre sœur, me remestant sur ce contantement /2/ qu’avés d’estre anssemble. Mandés-moy comme se plaist Monsieur de La Trimouille et quels excercices il fet. Avisés au reste des choses qu’il faudra pour vostre voyage. Je vous anvoiré de bon plomb. Il faudra que Le 289 Cette lettre non datée dut être adressée par la duc de Bouillon à son épouse alors qu’elle faisait étape à Paris en attendant de partir pour Thouars et de là à Turenne. 290 Samuel Gobaille était le concierge de l’hôtel du duc de Bouillon rue de Seine à Paris. 113 Conte l’anvoye quérir. Il ne sçaurois estre à Chalons d’ung mois comme tous ses ouvrier à desgouter leurs travaus. Je vous donne mille bons jours. C’est. $ $XX$ $ Ce mardy matin. Archives nationales, R2 53 130 24 août 1614 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vous aurés bientost vostre soeur avec trois filles291. Son petit garsson s’est trouvé bien anvieus. Vous verrés ce que j’escris à Monsieur de Rouvray, si Messieurs les Estats ne pourvoye au mal quy nous menasse nous an aurons après divers refus d’aller à Nevers, me plaignant des mauveses prosséders. On m’a assuré vouloir donner quelque chose à mes conseils et que ne voulant aller sy loing, je veuille me trouver à my chemin cheus Monsieur de St-Phalle292, à quoy j’ay consanty, et pour cella je pars, Dieu aidant, mardy avec vostre soeur à Semuy293, nous séparer et dans onse ou douse jours rentré issy. Je fais response à la Roine, la remerssiant du soing qu’il luy plaist me tesmoigner avoir de ma conservassion, luy dis ung mot de cest armemant de Flandre et de mon voyage pour nostre assamblée. Vous verrés, sy vous plaist, ce que j’an dis à Monsieur de Rouvray294, plus du particulier que du public quy gaste tant, tant de bonnes choses que vous vousdrés : pansions, corruptions assés sy on les veut, mes de l’avanstage pour l’esglise je ne voy pas cella. Vous aurés vostre bien aimé, ce luy sera de l’heur que le voyés et à moy sy vous estes bien assurée que je luy donne tout ce que je croy luy estre propre. Cest espris à besoing d’une grande conduite et quy satisfasse à sa /2/ pressomption. Je vous supplieray, Madame, me faire l’honneur de faire porter tel des miens quy sera par della pour estre samedy au soir ou dimanche avans midy audit St-Phalle295 avec toutes les nouvelles et avis qu’on me vousdrois donner pour conduire mes conseils afaire. Le bien que je désire pour cest esfet, il vous faudroit voir, Madame, mes ceus quy voulant le prou et sçavent juger commant an ceste mauvese saison, il le faut faire. Que Monsieur de St-Germain a de fausses maximes, lesquelles il chérit et aime trop. C’est beaucoup qui connoissent ceste probité que lorsqu’il connoîtra le mal qu’il ne le suivra pas. Que ce seroit une bonne chose sy on peut faire voir à Monsieur de Lesdiguière les prossédures de ceus quy l’ont servy an ces ocasions. Le mémoire de Milan n’a q’une fin, de voir Monsieur de Savoye assaily par le Roy d’Espangne. Cella s’il est, c’est quelque chose, mes combien plus considérable la sousfransse de ceus de nostre religion et combien doit-on considérer que lesser faire le roy d’Espangne dessa et della, ce n’est point /3/ la coutume de la France. Pour la perdre, il faut qu’il y aie de nouveaus conseils quy ainsy que les passes l’ont consacrée an faisant autremant296 auquel les gents de bien seront heureus de n’estre acusés par la postérité d’y avoir participé. 291 Elisabeth de Nassau à la fin du mois d’août 1614 ou au début du mois de septembre 1614 entreprit, avec ses trois filles aînées : Marie, Julienne et Elisabeth, un voyage dans leurs terres de Limousin, Périgord et Guyenne. Elle revint à Sedan au début du mois d’août 1615. 292 Georges de Vaudrey, comte de Saint-Phale, un membre de la noblesse seconde de Champagne. En 1597, il avait eut une grave querelle avec Duplessis-Mornay et avait été depuis exclus des faveurs royales. 293 Semuy près d’Attigny dans le département des Ardennes. 294 M. de Rouvray député général des protestants avec La Milletière de 1611 à 1616. 295 Saint-Phal commune du département de l’Aube. 296 Le duc avait écrit d’abord: “ que ceus-cy la perdent ”. 114 Ce petit voyage m’est dur pour rompre ma dousse oisiveté, mes il me servira d’une petite diversion pour ne trouver si estrange l’esloignemant de ce que vous voirés, à elle donc à vous dire le surplus et à moy à vous randre tous les servisses que vous doit Vostre très humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 24e aoust. Archives nationales, 1 AP 434/66 131 23 septembre 1614 - Sedan à Monsieur Hum297 Monsieur Hum, je vous fais ce mot pour vous donner advis du voyage de Monsieur Tilenus à Saumur pour l’assoupissement du differens d’entre luy et Monsieur du Moulin. Il vous advertira de son passage à Orléans, pour aussi en vous y rendant au jour qu’il vous donnera y apporter tout ce que le roy de la Grande Bretagne, vostre souverain, vous a donné charge pour terminer led. différent afin que Dieu en soit glorifié et son Eglise bien ediffiée à l’advancement de laquelle je contribueray tousjours tout ce qui sera de mon pouvoir et à vous en particulier à toutes sortes d’occasions je vous tesmoineray mon entière affection, priant Dieu, Monsieur Hum qu’il vous ayt en sa sainte garde. Vostre afectionné à vous servir. Henry de La Tour De Sedan, le xxiij septembre 1614. Koninklijk Huis Archief, Inv. 11, XVII D-8, ad 1615 Castillon, près de Libourne, sur le rive droite de la Dordogne était une citadelle du protestantisme. Soucieux d’accroître son emprise dans le sud-ouest, Henri de La Tour d’Auvergne acheta le 2 janvier 1615 pour la somme de 246 000 livres cette terre à Emmanuel-Philibert de Savoie, marquis de Villars, peu soucieux de conserver cette ville à majorité protestante298. Dans le seconde quinzaine du mois d’avril, Elisabeth de Nassau visita cette place avec son neveu Henri de La Trémoille qui l’avait rejoint à Lanquais, achevant son Grand Tour. Pendant que son neveu rejoignait sa mère à Paris, Elisabeth de Nassau retourna à Lanquais puis à Turenne. Elle revint à Sedan au début du mois d’août. Henri de La Tour d’Auvergne au début de l’année 1615, selon le témoignage de Pontchartrtain, gardait le plus souvent le lit se plaignant de la goutte, mais encore plus de ce qu’on ne lui laissait pas faire les fonctions qu’il prétendait devoir être attachées à sa charge de premier maréchal de France299. Le 5 mai, il quitta la Cour et s’en alla du coté de Sedan300, puis rejoignit le prince de Condé, les ducs Longueville et du Maine qui avaient avaient également quitté la Cour pour manifester leur opposition contre la politique extérieure de la Reine-mère et marquer leur opposition aux mariages espagnols. Le 9 août, Condé lança un nouveau manifeste. Sans se laisser démonter, Marie de Médicis décida d’entreprendre le voyage vers Bordeaux où elle arriva le 7 octobre. Le 9 novembre l’échange des princesses eut lieu sur la Bidassoa. Le 25 novembre fut célébré à Bordeaux le mariage de Louis XIII et d’Anne d’Autriche. Pendant ce temps 297 Cette lettre dont seules la formule de politesse et la signature sont de la main du duc de Bouillon, est conservée dans les archives royales de la Maison d’Orange-Nassau à La Haye. 298 Fernand GUIGNARD, Histoire de Castillon-sur-Dordogne, Paris, 1912, p. 204. 299 PONTCHARTRAIN (Paul Phélypeaux, sieur de), Mémoires, op. cit., tome XVII, p. 66. 300 Ibid., p. 80. 115 Condé que Henri de La Trémoille avait rejoint dans l’inconscience de ses 17 ans, ravageait le Poitou avec ses partisans avant de solliciter une trève. 132 7 juin 161? - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Il ne nous failloit point de remerciemans pour les soings que vous dites qu’avons eus de vous les obligassions qu’avons à ressantir vivemant. Tout ce quy vous arive sont trops plus grandes que les debvoyrs que pourons randre pour le vous tesmoigner. Vos désirs, ainsy que Monsieur Brus les nous a fet antandre, et les miens se sont trouvés conformes. Les estimant ainsy que je le dois, ce qu’il vous fera antandre et combien nous nous avansons au delà de l’estat présent de nos affaires, vous supliant de ne mespriser ce que je luy ay dit, sur ce qu’on a fet dire à Monsieur vostre fis. Assurés-vous de mon servisse quy par les esvénemans ne peut recepvoir aucune aliénassion an la volonté que j’ay de vous an randre. Vous besant avec youte humilité les mains. C’est Vostre très humble frère et obéissant serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 7e juing. Archives nationales, 1 AP 434/113 133 20 juillet 1615 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Voaus aurés souvant de nos lettres, je suis an soing sy la Roine ne sera alé à Blois à la prière de la princesse de Conty301, mes passay oustre à Tours ou Poitiers. Nos assemblées provinssialles auront esté tenues partout et creus. Jé une desputassion anvoyée à la Cour pour le changemant du lieu de Grenoble302. Vous aurés bientost Monsieur Edmond303. Par le retour de la Roine, on voira ce qu’on à espérer de la conduite des afaires. Je me promets qu’on trouve mon dellay d’aller à la Cour resonnable. Nous sommes assailis de la rougeolle quy n’a ancores nulle malignité. Dieu nous an garde et me donne le moyen de vous faire autant de servisse comme le désire Vostre humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 20e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/105 134 30 juillet 1615 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame 301 Louise-Marguerite de Guise (1577-1631), fille d’Henri de Guise et de Catherine de Clèves, veuve de François de Bourbon-Condé (1558-1614), prince de Conty. 302 L’assemblée protestante ouverte à Grenoble le 16 juillet 1615, se déplacera à Nîmes, Montauban puis La Rochelle. 303 Sir Thomas Edmond (1563-1639), habile diplomate anglais, fut plusieurs fois ambassadeur en France. 116 Ce m’a esté une chose nouvelle que d’avoir apris par vostre lettre et celle de M. de La Forest, vostre conférance avec la Raine-mère, suivant la charge que le Roy vous an avoit donnée, n’aïant nullemant apris qu’y dussiés aller. C’est une mauvese chose que Monsieur de Blinville304 n’aie secondé vos parolles. Ce m’est ung grand contantemant que la Raine an donne une si paisible aprobassion à mes ouvertures. Elles n’ont eu nulles suites ny agréssion du coté de la Cour qu’au premier bruit faus quy a couru de moy ils n’aient oubliay mes avis et ranversé le peu d’acheminemant qu’il y avoit an mes afaires, cella est peu si on ne jouoit à renversser l’Estat et nul ny va plus diligemmant que celluy quy y peut avoit interest. Il faut atandre sa guairisson par la grandeur de sa maladie et non d’ailleur et lors estant à cest estat, l’an avertir plustost ce sera an vous. Dieu ny les hommes ne le peuvent conseiller maintenant ny qu’on s’an doive soussier. L’on me doit mestre /2/ des garnisons tout autour de moy quy n’ay pas ung homme plus que n’y an avés vus, que Dieu monstreroit nous assurer sy nous songion y comme vrais fidelles le doivent à ce que l’assamblée fut bien tenue et que les intérest de l’Eglise et de l’Estat presvallussent par dessus les corruptions pour cella, je contribueray tout ce quy est de moy, comme à vous randre le servisse que je vous dois. Vostre plus humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 30e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/62 135 Premiers jours d’août 1615 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vostre soeur est arivée et nous a trouvé tout an arme. Dieu les nous veuille faire d>>> au bien de son esglise et de l’Estat. Nous avons eu nouvelles de Grenoble quy ont donné avis de la desputassion qu’ils ont faite à Monsieur le Prince par le Sr. de Venevelles305. Ils doivent estre confortés er fortifiés à ce qu’ils y trouvent de bonnes resolussions. A cest esfet, j’ay anvoyé ung nouveau pouvoir à Monsieur de La Forest, dusquel je vous anvoye copie, estimant que Monsieur vostre fis an anvoye ung de mesme. Ce sera fort bon et je voye que les afaires vont une grande longueur de meaus, Dieu nous an deslivre. Plus les mauvés conseillers voirons dépossession et plustost les remesdes seront estimés, autremant ils iront se sciamans dans les ruines publiques. Honorés-moy d’une assurance antière que je vous seray tousjours Vostre très humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/64 136 8 août 1615 - Nouvion-le-Comté à Mme de La Trimoille Madame, 304 Jean de Warignies († 26 février 1628), seigneur de Blainville, conseiller d’Etat, premier gentilhomme de la Chambre du roi, maître de sa garde robe, lieutenant au gouvernement du bailliage de Caen. C’était un ami de Concini, notons qu’après la fin tragique de celui-ci, il réussit à se maintenir. En 1620, notamment il fut plusieurs fois envoyé auprès de Marie de Médicis pour ménager sa réconciliation avec son fils. 305 Paul d’Espaigne (1582-1617), sieur de Venevelles, était député du Maine à l’Assemblée de Grenoble. Celle-ci, le 12 août 1615, le chargea de répondre au message que leur avait adressé le prince de Condé de faire tout ce qui lui serait possible pour le conservation des Edits et pour ce qui les regarderait “ en général et en particulier ”. Paul d’Espaigne rapporta la réponse du prince à l’assemblée le 1er septembre 1615. 117 J’ay ressu hier deus de vos lettres, l’une du 15 et l’autre du 21 quy me suit venues de Paris par Sedan, ansamble une de Monsieur vostre fis. Vous n’aurés veu lors la desclarassion de Monsieur le Prince. Despuis, il s’est mis à la campangne. Dans trois jours, nous nous joignons avec Messieurs de Longueville306, du Maine307 et Luxembourg308 et trois regimans d’infanterie de estrangers. Amsamble nous aurons plus de seise cents chevaus et près de sis mille hommes de pied nous serons plus fors de cavallerie que ce quy nos est oposé. Les afaires vont à une dangereus cours pour l’Estat. Monsieur vostre fis et vous Madame aurés eu des nouvelles de Grenoble par Monsieur de Loudrière309 et aurés sceu la dispossission de ceste compagnie quy voudrés finir tost nos maus. Il fant fortifier Monsieur le Prince, afin que la Roine compare la fassilité qu’elle a de le contanter an accordant les choses publiques qu’il demande ou les maus quy suivent an les luy refusant, de le voir maintenir ces armées quy les alumeront par tout le reste de la France. Pour Monsieur vostre fis, il me paroist ny raison publique ny dosmestique quy ne luy conseillent d’acuser et avec le plus de /2/ puissance qu’il pourra et faut trouver là et ne se peut ailleurs l’acroissemant de la condission tant aus desputés que autres incommodité de ses affaires, quelque petit rai[s]on quy s’an présentast d’ailleurs, il ne sçauroit estre de durée et sans blasme. Voilla mon avis auquel je porte plus de considérassion que pour moy, y resgardant songneusemant ce quy luy tousche. Je ne suis pas instruit du particulier pour vous dire où il agira, c’est à voir où il y a la plus grande presparassion. Vostre soeur est an bonne santé à Sedan avec sa petite troupe. Croiés-moy pour vous estre la personne du monde sur quy vous avés plus de pouvoir, vous desmeurant Vostre très humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour 310 Au camp à Nouion, près La Fère , ce 8e aoust. Archives nationales, 1 AP 434/63 137 4 décembre 1615 - Saint-Jean d’Angély à Mme de La Trémoille Madame, J’ay ressu une de vos lettres par les mains de Monsieur Brus. Despuis que nous sommes arivés an ce païs, je vous an ay escrit deus, mes l’une ne vous a esté portée, ains m’a esté randue. Je vous diray que Monsieur de La Trémoille se porte bien et sans flater son conportemant n’est plus mauvés. Je luy randray tousjours comme pour moy les choses quy tourneront à sa grandeur et bonheur. Je suis an une extrême peine y ayant sis semaines que je n’ay point de nouvelles de vostre soeur. Dieu luy donne la continuassion de en >>> grasses et à tout son petit peuple. Vous sçaurés par le Sr. Chauveau l’estat où il a lessé la Cour et celuy où nous sommes. Nous anvoyons voir le Roy le suplier de donner la pet à son royaume. M. l’ambassadeur de la Grand Bretangne et Monsieur de Nevers venus issy /2/ nous assurer de la part de Leurs Majestés qu’elles la doneront sy an venant pour leur tesmongner le samblable de nostre costé et voir sy on entrera an une conférance pour y parvenir Dieu la nous donne bonne chascu an a bon besoing. Madame quels prossédure tiens Monsieur du Plessis où il m’est avis qu’il desfaut et an religion et an prudanse. J’ay veu ce que je n’usse jamés cru, car il ne fet ny pour luy ny pour le bien de l’estat 306 Henr II d’Orléans (1595-1663), duc de Longueville, fils de Henri I d’Orléans et de Catherine de Gonzague. Il épousa en premières noces Louise de Bourbon, fille de Charles de Bourbon, comte de Soissons et d’Anne de Montafié. 307 Henri de Lorraine, duc du Maine et d’Aiguillon (1578-1621), fils du duc de Mayenne, époux de Henriette de GonzagueClèves, soeur du duc de Nevers; 308 Henri de Luxembourg († 23 mai 1616), duc de Piney. 309 M. de Loudrière avait été envoyé par l’assemblée de Grenoble par devers MM. de Rohan, Soubise, de La Trémouille, Sully, Châtillon, Parabère et Duplessis. 310 Nouvion-le-Comté près de La Fère dans l’actuel département de l’Aisne. 118 toute conservassion trouvée ou recherche dans telles formes est ruineuse an ce quy ne scervieré les ungs et pert les autres, à ceus là il fet paroir des désirs avec peu d’esfet pour changer leurs cœurs, et à nous il nous dessoblige d’une commune conservassion, quoy que je sasche de mauvés vers moy sy ne l’arrest à désirer qu’il voye sans présocupassion où il va n’a il pas choisy an vous ung bon et honorable antremeteur /3/. M. Rivet, certes, est bien hardy an ces jugemens. L’ambission et la gloire sont mauvés conseillers, Dieu n’a garde ! Ma santé et mes dessins portés à bien finir ces afaires an sorte que nos Esglises aient desjà sûreté, l’Estat du repos et nous science qu’an vivant sous les lois de l’Estat, qu’elles nous seront ung asille contre les conseils de Paris. Tenés-moy an vos bonnes grasses et vous assurés de mon servisse, le surplus au Sr. Chauveau. C’est Vostre bien humble frère et serviteur. Henry de La Tour bre. St-Jan, ce 21e des Archives nationales, 1 AP 434/65 1616 La Cour réserva une suite favorable aux ouvertures de paix faites par le prince de Condé et choisit la ville de Loudun, proche de Thouars, comme lieu des pourparlers de paix. Le duc de Bouillon s’installa à Berrie entre ces deux villes, “ pour mesnager sa santé en attendant la conférence ”311. La conférence s’y ouvrit le 15 février. Charlotte-Brabantine de Nassau était alors en Bretagne à Vitré, elle reçut une lettre de Marie de Médicis l’invitant à la rejoindre à Tours où celle-ci s’était établie avec la Cour. La conférence se prolongea pendant les mois de mars et d’avril. Un traité de paix fut finalement conclu le 3 mai 1616312. La paix de Loudun mit temporairement fin aux conflits qui opposaient les princes à la Régente, en satisfaisant l’aspiration du prince de Condé d’avoir une place au conseil du Roi. Ce nouvel épisode de contestation du pouvoir par les grands est toutefois important parce que les protestants s’allièrent imprudemment à Condé, confirmant alors un personnage alors absent de la scène politique, Louis XIII, et beaucoup d’autres, dans la croyance qu’ils constituaient un danger perpétuel pour l’Etat313. Au lendemain de la signature de la paix de Loudun, le duc du Maine, le duc de Bouillon et Henri de La Trémouille se rendirent à Paris pour aller saluer “ Leurs Majestés ” de la part du prince de Condé. Ils arrivèrent dans la capitale le 20 mai et selon Arnaud d’Andilly, ils furent bien reçus314. Au cours de l’été 1616, Concini, le favori de Marie de Médicis, obtint le renvoi des vieux ministres d’Henri IV et les remplaça par une équipe nouvelle constitués de serviteurs personnels de la Reine-mère. Mécontents de cet état de chose, pendant le mois d’août le prince de Condé et le duc de Bouillon se rapprochèrent du duc de Guise pour éliminer l’Italien. Le duc de Bouillon aurait même évoqué, lors d’un entretien, la possibilité de déposer Marie de Médicis et Louis XIII au profit du prince de Condé315. Marie de Médicis, mise au courant des tractations des princes, ordonnât leur arrestation. Seul le prince de Condé fut arrêté le 1er septembre. Pontchartrain dans ses Mémoires rapporte que le duc de Bouillon revenait du prêche de Charenton “ ayant dans son carrosse M. de La Trimouille ” lorsqu’on lui rapporta cette nouvelle. “ Incontinent, il s’arrêta, et, ayant un peu pensé, se résolut de monter à cheval, comme aussi fit ledit sieur de La Trimouille, et de s’en aller du coté de Soissons ”. 311 Lettre de Duplessis-Mornay du 29 janvier 1616 à M. de Thou. DUPLESSIS-MORNAY (Philippe), Mémoires... contenans divers discours, instructions, lettres & depesches par luy dressées ou escrites [...] depuis l’an 1600 jusqu’à l’an 1623, op. cit., tome I, p. 892-893. 312 Cf. M. BOUCHITTÉ, Négociations, lettres et pièces relatives à la conférence de Loudun, Collection de documents inédits sur l’Histoire de France, Paris, 1862. 313 Robin BRIGGS, Early modern France, 1560-1715, Oxford University Press paperback, Second edition, 1998, p. 83. 314 Ibid., p. 677. 315 RICHELIEU, Mémoires, Ed. Michaud et Poujoulat, Paris, Firmin Didot, 1837, tome I, p. 119. 119 Sur le chemin ils rencontrèrent le duc du Maine qui leur proposa de marcher sur le Louvre, mais le duc de Bouillon l’en dissuada “ lui représentant que leur parti était trop peu assuré pour cela, qu’il eut fallu s’y être préparé, que ce seroit s’aller faire prendre ou tuer, ou mettre la tête sur un échafaud ”316. Les princes se réunirent à Soissons chez le duc du Maine où tous leurs fidèles, leurs alliés et clientèles vinrent les rejoindre.. Mais ne se sentant pas assez fort pour tenir tête à l’armée royale rassemblée autour de Villers-Cotterêts, ils trouvèrent plus adroit de négocier par l’intercession du duc de Guise. Le 6 octobre un traité fut conclu garantissant les promesses du traité de Loudun. Le duc de Bouillon peu soucieux de revenir à Paris se rendit à Sedan où il entra en contacte avec le duc de Nevers qui, seul, continuait les hostilités. Pour se justifier, il fit courir le bruit que le marquis de Spinola317, de connivence avec le comte de Maulévrier, projetait d’attaquer Sedan au printemps et envoya au mois de novembre son épouse à Turenne pour mobiliser le parti protestant en sa faveur318. 138 Sans date Madame Je vous anvoye ce laquais, m’aïant samblé que la voye du cosche est trop tardive pour les diverses et signalées afaires quy sont sur le tapis. Je vous anvoye la copie des articles de Monsieur du Coudray319, avec ma laconique response, afin que vous jugiés la méthode qu’il tente à me persuader de suivre leurs conseils dans lesquels ils ne m’y font paroistre honneur, utillité, ny sureté et moings de religion, d’autant qu’elle n’est là an aucun souvenir. Vous vous servirés, sy vous plaist, de la science que je vous ay doné aus ocassions propres à les rendre capables. Que ces Messieurs dont ils me parlent, ont autant de besoing pour se garantir d’inconvéniants de moy que j’an ay d’eus. Que l’usage de leur puissance aura bientost l’estat pour instruit, que ce qu’il porte est pour eus les ministres bâtissent sur ung sans fondemant d’estimer qu’il y aie de la dessunion de Monsieur le Prince. Sa venue issy, nostre communiquassion de la suite de nos prosséders leur tesmoigne assés du contraire. Je vous suplie voir le présidant Janin, luy ramantevoir les choses quy me touschent dequoy les miens luy parleront particulièremant. Je vous anvoye ung mémoire afin que vous veuillés an exprimer au particulier ainsy que vous le jugerés convenable et au Vasseur et au Gripel d’an faire la poursuite /2/. An parlant audit présidant de ce particulier, vous luy pourrés dire que vous sçavés qu’on me donne des avis qu’on vise à me mal faire, que sy cella me donne de la mesfiance, qu’il faut juger que je ne manqueray ny de conseil ny d’amis pour y pourvoir, que cella sera assés considérable pour n’estimer que plusieurs icy participe sy rejesté cella par une nesgation généralle, contantés vous, si vous plaist, Madame, luy respondre que vous vous contantés de luy an dire ce que vous estimiés de luy an donner avis. Sy vous dit que on aie du soupson de moy que je veulle tenir les afaires an suspans, que j’aie quelques choses nouvelles ordonay venant en mon esprit. Que je panse à la ruine de Monsieur de Villeroy ! Que j’ay bien tesmoigné le contraire. Qu’il sçay pour le luy avoir dit, qu’il failloit terminer ces esmeutes et ny plus revenir, m’osfrant d’y contribuer tout ce quy seroit an mon pouvoir. Que les nouveautés m’on tousjours desplu, n’ayant trouvé rien de plus dur an la pasion du gouvernement q’ung chascun pour prudance qu’il aye randu à sa conduite, n’a jamés esté trois mois an ce qu’elle assure qu’il pourvoye à cella il me trouveroit le plus aisé à contanter. Que la ruine /3/ de Monsieur de Villeroy n’est pas poursuivi par moy, quoy que 316 PONTCHARTRAIN (Paul Phélypeaux, sieur de), Mémoires, Ed. Petitot, Coll. des Mémoires relatifs à l’histoire de France, tome XVII, Paris, 1822, p. 161 317 Ambrogio de Spinola (1569-1630), un génois, commandant général de l’armée espagnole aux Pays-Bas. 318 Pontchartrain dans ses Mémoires souligne que Madame de Bouillon ne craignit “ point la rigueur de l’hiver et du mauvais temps pour s’acheminer de Sedan en Limousin, pour visiter toute la noblesse du Limousin, Saintonge, Guienne, Quercy, Poitou ”, op. cit., tome XVII, p. 179. 319 Jean Rochelle, sieur du Coudray, échevin de La Rochelle, conseiller à la Chambre de l’Edit au parlement de Paris. 120 je croy avoir de fort argumant, que ces conseils vont à celle de l’estat et que homme sciencé qu’il a dit vouloir la mienne et sy tost que je n’estoit pas presque hors de la Cour, je sçay qu’on a cerché la conduite de ma vie. Les plus avanturés afaires de ma maison donne de véhémans conseils à la Roine, luy faisant hapréhander ce quy estoit de conduite et de puissance an moy pour la servir. Pour tous cela, je n’ay point voulu que le public pâtit n’estant pas juste et qu’aussy pour dire vray, Madame, je sçay bien que moiennant l’aide de Dieu, je feroy tomber sur la teste de ceus quy entreprandront ma ruyne, la leur. Et vous pourrés, Madame, luy dire de considérer la forme de leur prossédé, à sçavoir les douteuses exéccussions de ce quy a esté promis au dessarmemant. On le vist à la longueur pr>ante des articles à les sin>> : le restablissemant aus charges, l’anvoy aus princes et estats estrangers, la deslivrance d’Amboise sçavoir discours, cercher de l’aide pour disso>>>> le logis de leurs forces an Champangne et mener vers les lieus quy tesmoignent debvoir plus crindre la recherche qu’ils font de diviser les ungs et faire d’autres unions. Tout cella n’et ce pas nourrir la mesfiance et non rassurer l’estat quy fit cella sinon /4/ ceus que l’on peut juger avoir besoing d’assurer leur particulier, semés les doutes au public par luy faire voir qu’ils doivent prandre le chemin, dont il convint avec moy à Sainte-Ménéhoul, à sçavoir de lever les mesfiansses qu’on voulut esbranler ny les esdits, ny les condissions des particuliers acommoder par la Roine. Ung chascun donne plasse à tous d’avis les afaires diversemant, néantmoings selon les qualités et expériance ainsy qu’il y a diversité d’afaire pour y amployer et >>>>> et vivre, par ainsy chascun seroit amploié et hors de puissance de ceus quy ont donné ces violent conseils. Pour moy, Madame, vous luy pourrés dire que je suis à la Cour avec plasse assurée ou an ma maison. Avec la conduite des afaires ainsy establies, je seray fort contant et qu’autrememant se détachant de la peine, ils an auront toujoure une bonne part ici. Monsieur du Maine sera bientost là, Le Gripel le verra et, sy vous plaist, il vous communiquera ce qu’il an aprandra, afin qu’il puisse faire parler sy vient à propos de ce quy me regarde comme de chose sans laquelle il ne demeurera certain. Je m’assure qu’il ne m’y refusera aucun bon ofisse. J’escris à Monsieur de Tou la lettre que vous verrés sy vous (la fin de la lettre manque). Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/99 139 8 juin 1616 - Paris Mme de La Trémoille Madame, Vos labeurs, créance et diligence ont estés biens ressues issy, ainsy que je crois que Monsieur de Nés vous mandera, nous atandons les desputés. Je croy qu’on aura la disficulté de l’ofisse de conseiller. Aujourd’huy l’afaire de Monsieur de Longueville est convenue320, il n’y faut plus que exécussion. On atant et désire Monsieur le Prince issy avec ardeur321. Dieu luy donne de quoy satisfaire à l’atante publique et à moy de rescouvrie ma santé pour du repos à ma maison et vous pouvoir randre les servisses conformes à mon afection. Vous aurés veu Monsieur vostre fis quy lessa les afaires an l’atante de mieus aller que par le passé. Je suis Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Paris, ce 8e juing. Archives nationales, 1 AP 434/95 320 Henri II d’Orléans, duc de Longueville, avait pu obtenu l’échange de son gouvernement de Picardie pour celui de Normandie. 321 Le prince de Condé vint à Paris le 29 juillet 1616. 121 140 9 juillet 1616 – Paris à Monsieur Rivet pasteur de l’Eglise réformée de Touars322 Monsieur, j’ay receu vostre lettre du xxiiije du passé dont je vous remercie. Vous m’obligerés bien fort de continuer & me faire part de ce qui se passe par de là ainsi que je vous en prie et particulièrement au synode de vostre province qui se doibt tenir à St-Maixent. Le peu d’ordre qui s’est trouvé par deça aux affaires fait qu’il y a de la longueur aux expéditions, mais le délay ne procède pas de mauvaise volonté, au premier jour on doibt faire la nomination & les instructions des commissaires qui doibvent aller dans les provinces afin de les envoyer au plustôt. L’affaire dont m’escrivés pour le réstablissement de ces archer du prévost de Touars ne reçoit point de difficulté, cela estant expressément porté par l’Edict. Je favoriseray celuy qui en faict icy la poursuite bien volontiers & en toutes occasion où j’auray moyen de vous servir, je vous temoigneray que je suis avec entière affection, Monsieur, Vostre plus afectionnée à vous faire service. Henry de La Tour De Paris, le ix juillet 1616. Depuis ma lettre escrite, la nomination des commissaires a estée faiste et les intantion d>>>> on les fera aussi bientost. Demain ou après demain, on baillera l’assignation à M. du Candal. Koninklijk Huis Archief, Inv. 11, XVII D-8, ad 141 23 septembre 1616 - Coudun323 à M. de La Trémoille Monsieur, je fus fort mairy de vostre partemant, sans que j’usse le moyen de vous voir, n’y vous pouvoir rien mander de certin. Les afaires estans desmeurées fort inréssolue jusques à aujourduy que nous sommes convenus d’une contre desclarassion à celle du 7e où le Roy resconnoist nostre innossance, comme par la première. Nous estions acusés, nous y avons porté ce que nous avons pu, quant ung chascun juge que le retour de Monsieur de Guise et de ses frères à la Cour, le trecté sesparé de Monsieur de Longueville, par le ministère de Madame la contesse de Soissons324, ôtoit le pouvoir de faire plus. Ceste desclarassion sera demain portée au Roy par Monsieur de Guise, quy doit revenir lundy, si le Roy l’agrée et maintenant la faire publier au parlemant, après cella je m’an venois à Sedan et avant partir, je vous despescheray le Sr. de Fourchefière, quy vous resoudra de tout ce quy se sera fet, vous aiant bien voulu par avance vous doner ce mot d’avis. Vous besant les mains aussy humblemant que je puis. C’est Vostre bien humble oncle et serviteur. Henry de La Tour bre A Coudun, ce 23e sep . Archives nationales, 1 AP 434/142 142 322 Cette lettre dont seules la formule de politesse et la signature sont de la main du duc de Bouillon, est conservée dans les archives royales de la Maison d’Orange-Nassau à La Haye. 323 Coudun commune du département de l’Oise. 324 Dans les premiers jours du mois d’août le duc de Longueville, mécontent de Concini, s’était emparé de Péronne sous le prétexte que la garnison y était très faible et qu’il gardait la place au nom du Roi et dans le seul but de sauvegarder ses intérêts. La comtesse de Soissons, belle-mère de Longueville, le convainquit de remettre la place. 122 27 septembre 1616 - Soissons325 à M. de La Trémoille Monsieur, j’ay retenu le Sr. de Fourchefière jusques à ce que je vise la fin du pourparler avec Monsieur de Boissise326 avec l’antremise de Monsieur de Guise qui a fet ung tour jusques à Paris et an revint hier et aujourduy Monsieur de Boissise a raporté la desclarassion dont nous estions convenu et néantmoins changée. A Paris nous l’avons contestée et an avons fet changer quelques termes que nous ne sçavons sy on la trouverra bonne an la forme convenue à tous esvenements ainsy qu’ils la donneront. Elle sera ressue estimant qung chascun jugera et nostre innosscense et nostre amour à retarder et ampescher les confusions où l’on veut préssipiter ce roïaume. Je m’an vais à Sedan où je voiré sy pour mon regar on voudra observer le tresté de Loudun. J’estime Monsieur que vous debvés songneusemant conserver vos amis et que voir Messieurs de La Rochelle, avec les bons avis de Monsieur de Loudrière, vous sera utille. Leur tesmongnant combien vous vous voulés porter fidèlemant à leurs interest. Sy Monsieur de La Forest n’est près de vous, je vous suplie l’anvoier quérir pour y recepvoir la lettre que je luy escris ; le priant de me venir trouver après qu’il aura veu Monsieur de Chastillon. S’il est an vostre païs, j’espère que Dieu ouvrira des moyens inconnus aus hommes pour la deslivrance de Monsieur le Prince et que je vous pourré randre des servisses esgales à l’afection de Vostre bien humble oncle et serviteur. Henry de La Tour bre A Soissons, ce 27e sep . Archives nationales, 1 AP 434/141 143 11 décembre 1616 - Sedan à M. de La Trémoille Monsieur, ce m’a esté ung très grand contantemant d’avoir sceu de vos nouvelles et sy bonnes qu’il y a ocasion de sçan resjouir à tous ceus que vous aiment, et nul pour cella ne me surpassera. Nous sommes issy veillant et priant contre tant de choses, quy nous menassent, lesquelles seront limitées ainsy qu’il plairé à Dieu, puis que c’est Monsieur de La Forest pas les mains duquel ceste lettre vous sera randue. Je remestray à sa susfisance ce quy seroit trop long à l’escrire, me contantant de vous assurer d’une parfecte volonté de vous desmeurer Vostre bien humble oncle et afectionné serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 11e décbre. Archives nationales, 1 AP 434/140 144 14 décembre 1616 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon au Roy327 325 Après l’arrestation du prince de Condé, les opposants à Concini s’étaient rassemblés à Soissons chez le duc de Mayenne. 326 M. de Boissise était un conseiller d’Etat qui avec de Thou, Janin et Bullion, avait négocié, au nom du Roi, avec les princes en 1614. 327 Les copies de cette lettre du duc de Bouillon à Louis XIII, ainsi que la lettre suivante du duc à Marie de Médicis et la réponse du souverain au duc en date du 27 décembre 1616 nous sont conservées dans un registre de correspondance de Henri de La Trémoille. Henri Zuber dans son catalogue des lettres du duc de Bouillon mentionne qu’elles ont été publiées dans le Mercure François, tome IV (1616), p. 335-354 (sic). Elles témoignent de l’inquiétude du duc de Bouillon et expliquent pourquoi il les adressa à Charlotte-Brabantine de Nassau. Ce fait est révélateur de l’importance qu’il attachait à convaincre la duchesse de La Trémoille de sa politique. 123 Sire, N’ayant jamais eu autre but en toutes mes actions, que de vous rendre le très humble service qu’un fidelle subject doit à son Prince et Vostre Majesté ayant tesmoigné par sa déclaration du dernier septembre qu’elle estoit bien informée de la sincérité de mes intentions, aussy bien que des autres princes et seigneurs qui s’estoient retirez d’auprès de Vostre Majesté. J’avois espéré que je recevrois les tesmoignages de vostre bien veillance accoustumée par l’exécution du traicté de Loudun en ce qui me touche principalement pour la protection de ma souveraineté de Sedan ; néantmoins, Sire, je n’en ay ressenty jusques icy aucun effet : au contraire il semble qu’on veille prendre occasion de mal interpréter mes actions, et en donner de mauvaises impressions à Vostre Majesté par ce que je pourvois soigneusement à la seureté d’une place de telle importance que celle-cy afin de me la conserve et aux miens pour le service de Vostre Majesté et de la France en la protection de laquelle elle est il y a plus de six vingt ans et par esfet à vos voisins l’envie qu’ils ont d’y entreprendreet par ce moyen accroistre leurs limites de mes ruines sur la frontière de vostre Royaume ; ce qu’ils tesmoignent assés ouvertement et font cognoistre qu’ils n’en attendent que l’oportunité, n’y ayant sorte de mauvais traictement, que ceux qui viennent en ce lieu ne reçoivent passant par les pais des archiducs de Flandre, qui en sont proches ou par deffences expresses et rigourosités le passage leur est empesché contre la liberté commune du commerce, à quoy il semble mesme que les ambassadeurs de vostre estat contribuent, voir qu’ils en sont les principaux promoteurs, estant bien adverty des mauvais offres qu’ils me rendent tous les jours en divers endroits /143/. Ces choses, Sire, me donnent de justes deffiances, me voyant d’autre costé environné de puissantes forces et de garnisons extraordinaires, les quelles depuis quelque temps, sans aucune aparente nécessité ou a fait advancer en voste frontière de Champagne, avec intention de me nuire plustost que de m’assister, si j’estois en cette nécessité. Et d’autant, Sire, que cela se fait, comme je ne doubte point contre vostre intention, j’ay estimé en devoir donner advis à Vostre Majesté et la suplier ainsy que je fais très humblement d’y pourvoir par sa prudance, et son authorité suivant sa royalle protection, et avoir agréable qu’au besoin j’use en cet endroit de remèdes et moyens lagitimes que la nature permet à un chacun pour sa propre deffense et considérasion , demeurant toutesfois ainsy que je feray toute ma vie dans les termes de la fidelle sujection et obéissance que je doits à Vostre Majesté laquelle je prie Dieu, Sire, Conserver longues années en toute prospérité et santé pour le bien et tranquillité de vostre Royaume et la seureté de vos loyaux et fidelles subjects et serviteurs. Vostre très humble, très obeissant et très fidelle subject et serviteur. Henri de La Tour. e De Sedan, le 14 décembre 1616. Archives nationales, 1 AP 397/II/142-143 145 14 décembre 1616 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon à la Royne Madame, Envoyant ce gentilhomme au Roy pour luy donner advis des justes deffiances qu’on me donne tous les jours des desseins que les voisins ont d’entreprendre sur cette place afin qu’il plaise à Sa Majesté y pourvoir et donne rl’ordre nécessaire pas son authorité. Je suplie aussy très humblement Vostre Majesté de luy donner en cet endroit les conseils d’une bonne mère, qui affectionne son Estat /144/, et ne soufrir que ceux qui n’en ayment la grandeur s’acroissent par ma perte au dommage de la France, laquelle a intérest à ma conservation, puis que j’ay l’honneur d’estre en la protection de la Couronne et que je n’ay autre pensée ny intention que de rendre au Roy, ainsy que j’ay toujours fait, une fidelle et volontaire obéissance et à Vostre Majesté le respect et très humble service que je luy doibt et de demeurer, Madame, 124 Vostre très humble, très obéissant et très fidelle serviteur. Henri de La Tour. De Sedan, ce 14e décembre 1616. Archives nationales, 1 AP 397/II/143-144 146 27 décembre 1616 - Paris Copie de la lettre du Roy à Monseigneur le duc de Bouillon328 Mon cousin, Ayant reçu le 21e de ce mois vostre lettre du 14e je vous escris celle-cy pour y respondre et commenceray par vous dire qu’il me semble que comme vous ne pouvez ignorer les occasions que j’ay de tenir des forces en ma province de Champagne et de les avoir fait acheminer au lieu où elles sont à présent. Vous ne devez aussy doubter que ce ne soit par mon commendement, fondé sur la cognoissance que j’ay de ce qui se passe en ladite province et ailleurs contre mon service et sur le résolution en laquelle je doy estre d’y pourvoir comme ile est nécessaire pour la conservation de mon authorité et le repos public de mon Royaume. En quoy il ne se fait rien au préjudice du traicté de Loudun, ny de ma déclaration du dernier jour de septembre. Mais puisque vous me ramentenez l’un et l’autre, je vous veux bien faire voir que c’est vous qui y avez contrevenu et contrevenez encores, et qui par vos déportemens qui m’ont donné juste suject de deffiance, avec ce que le duc de Nevers a entreprins contre le respect qui m’est deub en ladite province, m’avez contrainct d’y envoyer de gens de guerre. Toutes ces entreveues et autres fréquentes allées et venues que je suis bien adverty qui se sont faites respendont-elles aux protestations /145/ tant de fois réitérées de renoncer à toutes associations et intelligence tant dedans que dehors mon Royaume, et s’en despartir entièrement avec vous pour envoyer en Holande et en divers lieux d’Allemagne des gens pour essayer de descrier mes affaires, et faire des pratiques au préjudice d’icelles, et qui eon eu charge de vous, comme il se vérifie par lettres que vous avés escrites à aucuns de mes ambassadeurs, d’enlever quantité d’armes et faire passer des gens de guerre à Sedan, d’où l’on en a veu aller en grand nombre en aucuns lieux de mon Royaume, qui ont esté establi en garnison sans ordre ny commission de moy. J’ay seu combien de personnes vous avés en mesme fin envoyés en Liège, et ce qui faisoit encores le baron de Pesche quand il fut tué il y a peu de jours par un gentishomme du païs, qui faisant honte a plusieurs François naturels, n’a peu suporter le mespris que ledit baron faisoit de mon nom et authorité cela ne suffit-il pas pour vous faire cognoistre que ce sont vos actions mesmes et non l’interprétation qui y est donnée, qui m’apporte de la desdiance et du mescontentement et que si mes ambassadeurs n’ont consenty à ce que vous désiriés voire s’ils y ont esté contraire. Ils ont fait leur debvoir et vous ne pouvés avec raison vous en plaindre ; veu que ce ne sont pas choses comprises soubs la liberté du commerce, mais plustost actes d’hostilité, qui semblent tendre à autre…, à autre desseing qu’à la conservation de vostre place, puis qu’elle n’a point esté attaquée, et n’a mesmes esté aprochée d’aucun soldat de ma part, ny d’autre que je sache. Mais ce soupçpn a encores esté augmenté de ce qu’au mesme temps j’ay esté adverty que cont les loix anciennes de mon Royaume, et mes déclarations nouvellement publiées, il sa faisoit des levées de gens de guerre en ma province de Champagne et en avoit esté mis en plusieurs de mes places /146/ sans commandement de moy, contre ma volonté et toutes ls formes accoutumées et mesmes de nuict et par surprise, de sorte que grand nombre des habitans de la ville de Ste-Menehoult se voyant traictez et violentés de telle sorte, ont abandonné leurs demeures, et se sont retirez es autres villes voisines où ils sont encores pour la plus part. Voilz donc les choses qui (mont fait résoudre d’envoyer des forces en ladite Province pour empescher les entreprises qui eussent peu s’y faire plus avant contre mon anthorité et le repos de mes sujects et tenir la main à l’execution des jugemens des commissaires que j’ay envoyés sur les lieux pour informer de ces contraventions a mes ordonnances et faire le procez à ceux qui se trouveront coupables par les formes ordinaires de la justice, de laquelle 328 La réponse de Louis XIII à la lettre duc de Bouillon du 14 décembre 1616 a été également publiée dand le Mercure François, tome IV (1616), p. 354-358. 125 j’ay voulu suivre les voyes encore que ce mal semblast avoir besoing de plus promps remèdes :mais j’ay esté bien ayse de donner loisir à ceux qui ont failly de ce recognoistre n’ayant autre but que de remettre un chacun en son devoir. En quoy par le bon advis de Madame ma mère, j’ay usé d’une modération qui n’est pas ordinaire ; de sorte qu’il s’en faut beaucoup que vous ayés aucun subjest de plainte, ou deffience ny prétexte pour couvrir les actions par lesquelles vous m’en donnez à bon droit, et dont vous vous devez abstenir et néanmoins vous passé encores plua advant, car vous me priés à la fin de vostre dite lettre d’avoir agréable qu’au besoin vous usiés de remèdes et moyens légitimes que la nature permet à un chacun pour sa propre desfence et conservation ; ce que je ne puis bien entendre. C’est pourquoy, je désire que vous me le déclariés plus inteligiblement et cependant, je vous veux bien advertir que les moyens légitimes que vous pouvez avoir de vous conserver sont de vous adresser à moy de qui vous devez atendre la conservation de ce que vous possédez par la grâce et bien ait du feu Roy mon très honoré Seigneur et Père, que Dieu /147/ absolve, en vous comportant en mon endroit comme vous y estes tenus, ce que voulant croire que vous ferez. Je prie Dieu qu’il vous ait, mon cousin, en sa saincte garde. Louis Potier e A Paris, le 27 jour de décembre 1616. Archives nationales, 1 AP 397/II/144-147 1617 Le duc de Nevers avait pris la tête du parti des Grands, dénonçant le pouvoir du maréchal d’Ancre seul responsable, selon lui, de la mise au pillage des finances royales. Le pouvoir royal réagit avec autorité. Pendant que Henri de Rohan et Duplessis-Mornay maintenaient les huguenots, illégalement réunis en assemblée politique à La Rochelle, dans la fidélité au Roi, trois armées entrèrent en campagne. L’armée de Champagne commandée par le duc de Guise attaqua les places du duc de Nevers menaçant à l’occasion celles du duc de Bouillon, la seconde armée commandée par le maréchal de Montigny opérait dans le Nivernais et le Berry contre la duchesse de Nevers et la troisième armée, sous les ordres du comte d’Auvergne, contrôlait le Perche et le Maine, agités par le duc du Maine. Alors que trois armées royales s’employaient à réduire les grands, le 24 avril 1617, l’assassinat de Concini fit apparaître un nouveau personnage sur le devant de la scène politique : le Roi en personne. La Reine-mère partit en exil à Blois, les anciens ministres furent rappelés et Luynes, le favori du souverain, reçut les dépouilles de Coligny. Le duc de Bouillon, avec les ducs de Vendôme et de Mayenne, fit le 5 mai “ la révérence au roy qui les receut fort bien ”329. Lucide, Bouillon constata : “ La taverne est la même, il n’y a que le bouchon de changé ”. Conscient, de la ruine de son crédit et qu’il n’était plus qu’une figure du passé, il se retira à Sedan où il se montrera dorénavant beaucoup plus discret. Il est vrai qu’il était de plus en plus handicapé par la goutte. C’est avec beaucoup de craintes que Henri de La Tour accueillit la nouvelle de la déclaration du Roi du 25 juin ordonnant au pasteur du Béarn de restituer à l’Eglise catholique les anciens biens de celle-ci qui leur avaient été attribués du temps de Jeanne d’Albret. Pendant toute l’année 1617, Elisabeth de Nassau était restée loin de Sedan. Arrivée à Turenne à la fin de l’année 1616, an mois de février 1617, elle se rendit dans le comté de Nègrepelisse que son mari avait acheté le 18 juin 1616 au marquis de Lavardin. A la fin du mois de mars, elle alla à Castillon où elle passa deux mois. Dans le courant du mois de juin, elle se rendit à Lanquais où elle demeura tout le mois de juillet. Elle revint alors à Turenne où elle accueillit son fils aîné, FrédéricMaurice, à la mi-août. Le 5 octobre, celui-ci fut reçut solennellement à Martel330. Elisabeth de Nassau prit le chemin du retour dans le courant du mois de novembre. Elle s’arrêta chez sa soeur à Thouars, 329 Maréchal de BASSOMPIERRE, Journal de ma vie, op. cit, tome II, p. 129. 330 Abbé Lucien LACHIEZE-REY, “ Deux entrées solennelles à Martel au début du 17e siècle ”, Bulletin de la Société des Etudes du Lot, tome CII, juillet-septembre 1981, p. 248-252. 126 visita à Blois la Reine-Mère Marie de Médicis et arriva à Paris le 17 décembre. Elle vit la Reine et partit pour Sedan le 2 janvier 1618. 147 2 janvier 1617 – Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je vous supplie très humblement de m’excuser si j’ay si long temps tardé à vous escrire ; c’est faute de commodité. J’ay esté bien aise quand j’ay entendu par le messager que vous vous portiez bien. Monsieur mon père se porte fort bien. Dieu mercy comme aussi mon frère et mes sœurs qui ont esté toutes un peu malades, hormis ma sœur Charlotte, mais elles sont guéries. Je vous envoye pour estraines le thème que j’ay faict le dernier jour de l’an sçachant que vous n’aurez rien plus agréable, que d’entendre l’avancement que je fay en choses bonnes et principalement en la piété. Dieu m’ayant faict la grâce que de me faire participant de sa Saincte Cène à ce nouvel an, laquelle je le supplie me continuer toute ma vie /2/ en l’obéissance que je vous doibs, comme estant, Madame, Vostre très humble et très obéissant fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour Archives nationales 273 AP 180/FM1 148 6 janvier 1617 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon au Roy331 Sire, Je croyois par mes lettres du 14e du passé avoir assés fait cognoistre à Vostre Majesté la sincérité et intégrité de mes intentions : mais je recognoy avec un estrême desplaisir, par celle qu’il vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire du 27e du mesme mois, qu’il vous reste encore en l’esprict quelque mauvaise impression de mes actions, lesquelles quoy que j’aye essayé par tout moyens de vous rendre agréables, mes ennemis tâchent toujours sans respect de desguiser par leurs artifices et calomnies accoustumées afin de me mestre en soupçon et rendre odieux et des effets de vostre royalle protection, lesquels quoy que j’aye desjà recherchez avec la révérance et humilité que je doibts, néanmoins V. M. ne m’a point encore fait cet honneur de me faire cognoistre sa volonté : mais me commandant de m’adresser derechef à elle pour attendre les moyens de ma conservation, il semble qu’en effet elle me le refuse, prenant pour véritables les sinistres inpressions que je luy donne de mes déportemens, lesquels luy estant représentez au vray sans passion ny animosité elle n’y remarquera qu’une sincère affection et vraye fidellité envers vostre personne et vostre estat, tant s’en faut qu’elle en doibve prendre aucun juste suject et vostre deffiance. Il y a trois mois, Sire, que je suis retiré en ma maison pour y jouir de la douceur du repos qu’un /148/ homme de mon aage peut recevoir en sa famille : et pour garder envers mes amis et voisins la bienséance convenable à mon debvoir et à ma qualité, je les ay quelques fois visitez et fait visiter particulièrement le duc de Nevers à cause de la proximité de ses maisons et de la mienne. En quoy, Sire, n’ayant eu aucunne deffence particulière de V. M. de le voir, ny veu aucune déclaration public contre luy qui m’en deust empescher je n’ay point estimé en ce faisant avoir donné juste suject de desfiance, moins contrevenue au traicté de Loudun, ainsy que V. M. ou plustost ceux qui la conseillent semblent vouloir inférer par ses lettres, sinon que toute sociétté civile soit aujourd’huy interdite ente vos subjects et réputée à crime en vostre Royaume. D’ailleurs je n’ay point recogneu qu’il ait rien 331 Cette lettre du duc de Bouillon à Louis XIII est conservée dans un registre de correspondance de Henri de La Trémoille. Elle a été publiée dans le Mercure Françoys, tome IV (1617), p. 2-10. 127 entrepris contre le respect qui est deu à vostre authorité dans son gouvernement, n’ayant remarqué en ses parolles et en ses actions que fidélité et affection à vostre service et une prompte obéissance à vos commendemens. C’est pourquoy, Sire, encor que je ne doubte point que les gens de guerre qui sont à présent en vostre province de Champagne ny ayent esté envoyés par vostre commandement. Je n’ay point toutefois jusques icy recognu qu’il y ait en nécessité de ce faire, pour le bien de vostre service, mais pour m’arrester seulement à ce qui me touche, et en esclaircir au vray Vostre Majesté, je voy par des lettres qu’on luy a voulu persuader que j’ay des intelligences hors de Vostre Royaume ; et que j’ay envoyé des gens en Holende et en Allemagne pour y descrier ses affaires et faire des pratiques au préjudice d’icelles, qui est une calomnie manifeste laquelle se descouvrira évidemment s’il plaist à V. M. sa faire informer de la vérité, par les Princes mesmes et Estats d’Allemagne et des Païs-Bas, qui sont estroitement alliés de vostre couronne ; et s’enquérir deux si oncques de ma part leur ont este baillées lettres, ou tenu propos contre le bien de vostre Estat et le debvoir d’un très humble et fidelle subject et serviteur et je m’asseure qu’elle reconoistra que l’alliance que j’ay l’honneur d’avoir avec lesdits Princes, ne m’a rien fait désirer ny requérir d’eux que la seule continuation de /149/ leur amitié, laquelle aussy mes ennemis vous veulent rendre suspecte. Voilà, Sire, quelles sont mes assications et inteligences dedans et dehors vostre royaume, à quoy in adjouste que j’ay donné charge d’enlever quantité d’armes et faire passer grand nombre de gens de guerre à Sedan, et que cela se vérifie par lettres que j’ay escrites à aucuns de vos ambassadeurs. Mais si ces lettres sont représentées, elles justifieront le contraire. La vérité est, Sire, qu’au commencement du mois de novembre j’escrivis à Bruxelle à Monsieur Péricard, ambassadeur de V. M. près les archiducs de Flandre pour savoir de luy, si depuis vostre déclaration du dernier septembre, il auroit eu quelque commendement de V. M. de faire empescher le passage par le païs desdits archiducs à ceux qui venoient en mes terres et de les faire mal traicter et molester, ainsy qu’on faisoit lors et qu’on a toujours continué depuis, contre la liberté commune du commerce, ne pouvant croire qu’ayant l’honneur d’estre en la protection de vostre couronne, ce mauvais traictement fut fait sous vostre nom, à mes sujects et à ceus qui traficquent avec eux, et luy fis cognoistre que si telles antreprises continuoient je serois contrainct de recourir à vostre authorité pour user des moyens lesquels en ce cas sont permis aus souverains, désirans auparavant savoir si cela se faisoit de son seu et à sa poursuitte, sinon je le priois d’employer l’autorité de sa charge pour l’empescher à l’advenir, puis qu’il alloit en cela du bien du public et du service de Vostre Majesté ; à quoy il me fit response par ses lettres du 6e dudit mois que l’advis qui luy avoit esté donné de l’enregistrement de ladite déclaration en vos cours de parlement n’avoit esté accompagné d’aucun commandement de V. M.qui peust altérer sa foy et sa parolle et qu’en particulier il seroit très mary de m’offencer. S’il a raporté autre hose à V. M. je l’accuseray ouvertement de calomnie et d’imposture, dont j’ay de quoy le convaincre par ses propres lettres et néantmoins, Sire, si pour conserver ma place, contre les desseins et entreprises des estrangers, j’avois esté contrainct de faire ce dont on essaye, contre toute aparance de raison de vous donner des soupçons et desfiances de mes actions, je n’estime point que j’en peusse encourir aucun /150/ blasme de V. M. n’y qu’on peust prendre pour acte d’hostillité, ainsy qu’on luy fait dire par ses lettres, si de bonne heure je recherchois des moyens légitimes et convenables pour pourvoir à la deffence et seureté d’icelle avant qu’elle soit attaquée et oster l’envie à ceux qui auroient volonté de me nuire et néanmoins, il ne se trouvera point que j’aye autre garnison en madite place que celle qui a accoustumé d’y estre pour la garde d’icelle, et que V. M. m’avoit fait espérer de m’y entretenir. Quant à ce qu’on vous a voulu persuader, Sire, aussy calomnieusement que malicieusement qu’il est sorty grand nombre de gens de guerre de ma ville de Sedan qui ont esté mis en garnison en quelques lieux de vostre royaume, cela est si grossier que je ne peux croire qu’il y ait aucun si impudent d’oser soustenir à V. M. une imposture si manifeste et laquelle se peut vérisfier trop aysément. Et pour ce qu’on adjouste du baron de Pesche je n’ay eu aucune cognoissance de ce qu’il faisoit en la ville de Liège lorsqu’il y a esté assassiné et ne se trouver point qu’il ait jamais esté employé pa rmoy en quelque façon que ce soit et V. M. me pardonnera s’il luy plaist si je dis comme son très humble serviteur que ce n’est point par de tels assassinats que le nom et l’authorité de V. M. doivent estre maintenus estant bien dangereux de confirmer et authoriser par c’est exemple l’usage trop ordinaire de ceux qui se commettent impunément en vostre royaume sur vos subjets par les estrangers mesmes au mépris de vostre authorité et de vostre justice. Ces choses, Sire, estant bien considérées par V. M. j’oze me promettre de sa bonté et équité quelle ne fera aucun 128 sinistre jugement de mes actions et que recognoissant la vérité parmy les prétextes, à la confusion de ceux qui par malice et calomnie ont accoustumé de lles desguiser elle m’estimera digne d’un meilleur traictement que celuy que je reçois et me continuant sa royalle protection me fera jouir des effets d’icelle, puisque je n’ay donné aucun subject ny prétexte légitime de me le refuser. C’est de peus, Sire, que je l’attends aussy ne me suis-je point jusques icy adressé à autre qu’à vous. Je ne l’ay point recherchée ailleurs et derechef je m’adresse à V. M. suivant son commandement, avec le mesme révérance et humillité que j’ay desjà fait ci-devant et la suplie très humblement /151/ de me faire cognoistre sa volonté, et ce que j’ay a attendre de ladite protection, puisque les desseins que les Estrangers ont projectés contre cette place continuent, et m’oblignent de porvoir de bonne heure à ma seureté. Il me reste, Sire, d’esclaircir V. M. ainsy qu’il luy plaist me commander par ses lettres, de ce que j’ay entendu quand je l’ay supliée d’avoir agréable qu’au besoin j’use des remèdes et moyens légitimes que la nature permet à un chacun pour sa propre desfence et conservation. La nature aprend à un chacun de conserver le sien, et l’oblige de laisser à sa postérité, que si par violance on le veut opprimer, s’il est en subjection, il a recours à son souverain qui le doibt garantir et protéger contre toute opression et c’est pour cela que Dieu a mis les roys au monde s’il est seulement an protection, il s’adresse à celluy qui la luy a promise lequel venant à l’abandonner il use des moyens qu’il peut trouver ailleurs pour opposer une juste desfence à une injuste violance. J’ay ce bonheur, Sire, d’estre nay vostre subject et en ceste qualité je ne peux et ne doibs attendre que de V. M. seule la conservation de ce que je possède en France par la succession de mes ancestres, qui me l’ont laissé et transmis de père en fils, par une longue suitte de siècles, avec des marques de grandeur d’une des anciennes et plus illustres maisons de vostre royaume. J’ay aussy l’honneur d’estre en la protection de vostre couronne à cause de ma souveraineté de Sedan, laquelle avec les places qui en dépendent, ayant toujours esté confirmée depuis le roy Charles VIII et entretenue de bonne foy par les Roys vos prédécesseurs je n’estime pas que V. M. la voulust rompre à présent en faveur de vos voisins qui n’ayment ny la France ny la grandeur de vostre Estat pour en m’ostant les moyens de la conserver pour vostre service ainsy que j’y suis obligé leur facillités par ma foiblesse l’occasion d’y entreprendre. Je say bien, Sire, que c’est le désir de quelque uns de ceux qui vous conseillent aujourd’huy, mais /152/ j’espère que V. M. ne prestera l’oreille à de si mauvais conseils, si préjudiciables à vostre service, et a la réputation de la France que si après m’estre mis en tout debvoir et recherché les moyens de me maintenir par vostre seule authorité. J’estois si malheureux que mes ennemis eussent le pouvoir de me desrober vos bonnes grâces, vostre affection, vostre foy et vostre promesse, pour m’esposer et abondemment à une servile et estrangère domination, au lieu de vostre drace et libre protection. C’est en ce cas, Sire, que la nécessité de ma conservation me fait suplier V. M. d’avoir agréable que j’use des moyens que la nature perme à un chacun pour sa propre desfence. Si on m’attaque, j’opposeray l’assistance de mes subjects de tous mes amis, et de ceux que le droit du sang y oblige naturellement et n’obmettray rien pour me conserver, sans toutes fois faire préjudice au service que je doibs à V. M. et à la France, par le traicté de vostre protection, ny au debvoir d’un fidelle subject envers sa patrie, dont pour considération quelconque je ne me départiray jamais, ains demeurereay jusques au dernier soupir de ma vie, Sire, Vostre très humble très obéissant et très fidelle subject et serviteur. Henry de La Tour e De Sedan, ce 6 janvier 1617. Archives nationales, 1 AP 397/II/147-152 149 20 janvier 1617 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame 129 Monsieur mon père me fit hier estre son secrétaire ayant un peu la goute à la main, mais il se porte aujourdui bien, Dieu mercy. Il s’en est allé pourmenés dans son carrosse avec mon frère qui se porte bien et aussi toutes mes sœurs. Je pense que cest hyver se passera sans gelée. Il n’en a point faict depuis que vous estes parties. Il a pleu tous ses jours passés, mais il faict à cest heure beau temps. J’ay envoyé vostre lettre à Madame la comtesse de Roucy. Madamoiselle de Roucy est desjà fiancée. Monsieur le comte de Roucy n’est pas encore de retour. Je luy ay aussi escrit ce que vous m’avez /2/ commandé. Il me tarde fort qu’il ne soit icy sur ce je suis, Madame, Vostre très humble et très obéyssant fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour. De Sedan, ce 20e janvier 1617. Archives nationales 273 AP 180/FM2 150 xx xx 1617 – Sedan Elisabeth-Charlotte de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, J’ay crainct iusqu’icy de prendre la hardiesse vous escrire à cause que Baron n’ayant loisir, nous monstrer que fort peu souvent ie n’avensoy point, comme ie mets peine de faire à cet heure, que par le commendement de Monsieur mon Père Beaumont nous monstre. Ce net encore guère bien en effet mais iy mettray toute la peine qui me sera possible pour vous rendre agréable Madame, Vostre très humble et très obéissante fille et servante Elisabet-Charlotte de La Tour Archives nationales 273 AP 180 151 18 février 1617 - Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon au Roy332 Sire, M’estant plusieurs fois adressé à V. M. par mon devoir e par un commendement àfin de recevoir de vostre main royalle les effets de la protection que de longtemps par traicté solennel, il a pleu aux Roys vos prédécesseurs et à V. M. octroyer à mes prédécesseurs, Princes souverains de Sedan et à moy, contre toux ceux qui voudroient entreprendre en quelque façon que ce soit sur cette souveraineté : Et ayant donné advis à V. M. des desseins et entreprises que les estrangers, qui n’ayment la grandeur de vostre couronne y projettent depuis quelque temps, je me promettois de vostre bienveillance ce que la justece de ma demande, la réputation de la France et la nécessité de ma conservation m’en faisoit espérer, mais au contraire j’ay veu une déclaration publique /153/ soubs le nom de V. M. par laquelle sans expression de cause (aussy n’en pouvoit-on trouver de légitime), je suis déclaré criminel de lèze majesté et des auparavant Sire, et depuis ladite déclaration les gens de guerre qui ont esté mis en garnison et environs de madite souvairaineté particulièrement du sieur de Vaubecourt ont exercé indifferemment toutes violences et actes d’hostillité sur mes subjects. Ce que j’ay suporté jusques à présent avec une grande patience pour la seule révérance et respect que je dois à V. M. près delaquelle tout libre et seul accès m’estant desnié. Je vous suplie très humblement, Sire, me permettre de me plaindre en public du tort et de l’injustice qui m’est faite soubs vostre nom par ceux qui abusent de vostre authorité avec telle licence qu’il font cognoistre assés évidemment par leurs 332 Cette lettre du duc de Bouillon à Louis XIII est conservée dans un registre de correspondance de Henri de La Trémoille. 130 déportemens qu’ils n’ont autre but ny dessein que la dissipation de vostre estat et l’entière ruine de vos bons et plus fidelles subjects et serviteurs, qui ne se veulent soubmettre à leur tiranie, les prétextes qu’ils prennent, Sire, par ladite déclaration pour rendre coupable Messieurs les ducs de Vendôme, de Mayenne et marquis de Coeuvre sur ce qu’ils ont levé des gens de guerre ; fait fortifier leurs places et payer de vos deniers les garnison qu’ils ont mis en icelle afin de les pouvoir desfendre et conserver soubs vostre authorité et pour vostre service, contre les jours, ne me regardent ny peuvent toucher en aucunne façon et néanmoins ils sont si injustes et passionnez d’e faire un crime commun, et si injustes et passionnez d’en faire un crime commun et sens distinction me rendre coulpable de ces choses, ausquelles si la mesme raison de ma conservation m’obligeoit et que pour oster la facilité de semblable entreprises j’ettois contrainct d’augmenter ma garnison, fortifier les places de ma souveraineté et levés des deniers sur mes subjets, je ne serois obligé d’en rendre raison n’y prendre ailleurs ordre ny commission pour ce faire, et cette différence n’ayant esté faite par ladite déclaration plus par dessein et malice que par ignorance /154/ C’est un témoignage asseuré de la hayne qu’ils me portent principallement à cause de la Religion dont je fay profession et qu’ils n’ont autre but par une telle injustice que de vous faire rompre le traicté de ma protection afin de m’exposer et les églises qui sont recueillies soubs mon authorité à la violance et oppression de tous ceux qui y voudroient entreprendre et d’autant, Sire, que par ladite déclaration, ils senblent m’imputer que contre vostre service, je me suis joinct et associé avec lesdits Princes et avec Monsieur le duc de Nevers, s’il plaist à Vostre Majesté distinguer les causes de leurs prétextes elle recognoittra qu’ils ne me peuvent blasmer avec raison d’aucune action publique ny particulière qui contrevienne à l’obeissance que je dois à Vostre Majesté comme vray et naturel françois, ny au debvoir et fidellité d’un premier officier de vostre couronne, mais voicy mon crime, sùir, c’est que j’ay esté parler du mareschal d’Ancre et de ses adhérans, que j’ay touché cest ulcère d’où découlent tous les maux qui travaillent aujourd’huy vostre royaume, que je e suis joinct avec lesdits princes aux très humbles remonttrances qui vous ont etté faites pour descouvrir ces playes aux yeux de Vostre Majesté et la suplier d’y appliquer les remèdes que toute la France attend avec souspirs de vostre main salutaire et ne permettre que l’innocence de Monsieur le duc de Nevers fust oprimée par l’injustice et violance dudit maréchal d’Ancre, puis qu’il s soubsmettoit à se justifier, soit près de vostre personne ou en vostre cour de parlement contre les calomnies dont il s’est servy pour le rendre coulpable, n’ayant désiré pour c’est effet que le seur et libre accès que touts subjects doivent attendre de leur Prince. Ce sont ces remonstrances, Sire, lesquelles furent aussitost suprimées afin qu’elles ne vinssent à vostre cognoissance, qui ont attiré cette déclaration sur moy aussy bien que sur les autres princes, seigneurs et officiers qui y sont sompris, avec lesquels je suis et demeureray très estroitement joinct et associé et avec tous autre qui se porteront au restablissement de vostre authorité et la conservation de vostre royaume contre ledit mareschal d’Ancre et ce fauteurs et adherans, lesquels ayans en le pouvoir de faire violer la foy /155/ Publique, font cognoistre par leurs effets qu’ils en ont encore assés pour contraindre vostre volonté, a rompre et abandonner ma protection, laquelle mettant déniré ouvertement quoy que je me sois mis en tout debvoir de la rechercher, et qu’au contraire on exerce des actes d’hostilité sur mes subjects. Je suis foréc et containct d’opposer la force à la force et user de toutes voyes et moyens légitimes, pour empescher les ennemis de vostre estat, domestiques ou estrangers de triompher de la ruine de cette place si importante et si utille à vostre service et à la France, pour laquelle je la conserveray, avec l’ayde de Dieu, et j’espère qu’il estendra sa bénédiction sur ma juste deffence contre une telle opression et fera tomber sur les autheurs de nos misères la ruine qu’ils prétendent de vostre Estat et de vos plus fidelles serviteurs tel que je seray toujours, ainsy que la nature et mon devoir m’y obligent, et ne tiendray jamais ma vie bien employée que lorsque je pourray tesmoigner à Vostre Majesté avec combien d’affection et de fidellité, je suis, Sire, Vostre très humble très obéissant et très fidelle subject et serviteur. Henry de La Tour De Sedan, le xviij fébvrier 1617. Archives nationales, 1 AP 397/II/152-155 131 152 21 mars 1617 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Les lettres de Mlle vostre fille sont anvoier avant pour estre plus certin de l’estat de vostre santé quy lesse par le doute qu’en avons, vostre soeur et moy, en très grande fascherie. J’espère que Dieu nous an relesevra par le rescouvremant de vostre santé, ce qu’atandrons de sçavoir avec l’inpassiance qu’en peuvent santir ceus quy vous honorent et aiment plus que nuls autres, Dieu donc sy luy plaist vous soulagera et me donra le moien de vous tesmongner que je suis et seray jusques au tombeau Vostre très humble frère et fort obéissant serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 21e mars, jeudy. Archives nationales, 1 AP 434/83 22 mai 1617 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je vous supplie très humblement de m’excuser si par celle-cy je responds à deux de vos lettres n’ayant point sceu de commodité pour vous escrire et vous remercier très humblement de l’honneur qu’il vous a pleu me faire en establissant Monsieur de La Forest pour mon lieutenant à Castillon suyvant la volonté de Monsieur mon père. J’ay faict response à celle qu’il m’en avoit escrit et luy ay tesmoigné le contentement que j’en recevoy. Nous avons participé à la joye que vous avez eue commune avec tous les bons François de la délivrance de la France par la mort du marquis d’Ancre. Et pour moy je m’en prometz une bien grande, Dieu nous ayant donné la paix, de vous revoir bien tost en bonne santé quoy atendant je demeurereay toute ma vie, Madame, Vostre très humble et très obéissant fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tout De Sedan, ce 22 may 1617. Archives nationales 273 AP 180/FM3 153 Sans date - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je ne puis estre sans peine de vous sçavoir malade et que je ne désire d’aprandre le rescouvremant de vostre santé333, pour laquelle vous debvés cercher au corps les remesdes plus propres et adoussir les fascheries de vostre esprit par vostre prudance. Monsieur vostre fis vous va trouver334, an quoi je puis protester devant Dieu et devant vous, luy avoir randu les soings propres à vous donner de la satisfaction, et à luy l’avancemant aus bonnes meurs que vous avés estimé à quoy il pouvoit estre conduyt issy. Ce que je crois que trouverié esloigné de vostre atandu dont je seray très marry ; acusans non mon afection, mes mon insusfisante avec vray peu de la véhémance de son humeur quy a besoing d’une veillante hauctorité pour luy ôter 333 Charlotte-Brabantine de Nassau était à Vitré où elle se préparait à accueillir les membres du XXIIe synode national des Eglises réformées. Dans la première quinzaine du mois de mai, elle fut travaillée d’une défluxion sur le visage et sur les dents. 334 Après avoir été à La Rochelle puis à Taillebourg Henri de La Trémoille rejoignit sa mère au début du mois de juin. 132 les forces violentes, quy le portent à faire plustost qu’à panser. Madame redonnés-vous de la santé et luy et Monsieur son frère pouront avoir, par vostre sagesse, la conduite la plus utille qu’il puisse recepvoir de quelques autre part qu’elle leur puisse venir. Honorés-moy d’une antière croiance que plus que tout autre, je vous seray Vostre plus humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/126 154 28 juillet 1617 - Sedan à M. de La Trémoille, Monsieur, Je n’ay pu, jusques à cest heure, prandre la plume pour faire response à la lettre qu’il vous a pleu m’escrire, ne sachant commant je trouverois ny des remerciemans, ny de prières quy puisent satisfaire aus peines qu’il vous a pleu prandre pour vostre cousin et luy et moy vous an randrons servisse luy sy plaist à Dieu longtemps et mon afectionemant durant les jours quy me restent. J’ay issy Monsieur l’Eslecteur quy vous y souhete. Je croy que vous voiés avec impassianse tant distandure an la campagne et que le vostre ny soit. Je désire fort de voir les afaires de nos Esglises bien assurées. Messieurs de Bourdeaus ont leurs peines de la mort du capitaine Blanquet, telles antreprises des ungs contre nos esdits, des autres sans hauctorité publique, donne quelque crints, que je suporte aiscémant dans l’asil de ma maison desmeurant très desirans de vous tesmoigner que je suis Vostre obéissant oncle et serviteur Henry de La Tour A Sedan, ce 28e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/67 155 5 août 1617 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je vous suplie de vouloir faire recepvoir deus mil mousquets avec leurs fourchetes et bandoulières à La Rochelle et les faire porter à Taillebourg à cest esfet tout aussy tost que ceste-cy vous sera donnée. Voullés mander à Monsieur Hersons le non de celuy quy à La Rochelle aura charge de les recepvoir auquel vous anvoirrés sy vous plaist la procurassion pour le ressépissé que je vous anvoie afin que celuy quy les anvera aie son aquit. J’estime que la garde de ceste marchandise ne faschera à Monsieur vostre fis, estant besoing que cella soit tenu secret. Il faut, s’il vous plaist, Madame que vous donniés tost avis à Monsieur Hersan afin qu’il ne perde la commaodité de les faire charger pour La Rochelle. L’afaire du Béar[n] est très fascheuse. J’an escris au Garde des seaus335 avec crinte de dire trop ou trop peu, mes je cru ne debvoir refuser cella à ces troupeaus afligés. Vous sçavés comme l’on me trete quy doit bien aider à tirer de là une conséquanse que le public y a intérest. Je ne sçay quand vous partirés et sy vous irés an Bretangne ou au Poitou. Madame la duchesse de Lamsberg a perdu son anfant336 et elle assés mal. Les Espagnols font forces levées dont j’anvoie les 335 Guillaume du Vair, ancien premier président au parlement de Provence, entré dans les ordres et devenu évêque de Lisieux, fut garde des sceaux du 25 avril 1617 à sa mort le 2 août 1621. 336 Emilia-Secunda de Nassau, duchesse de Landsberg, avait accouché d’un fils le 14 août 1617, mort le landemain. C’est cet événement qui permet de dater cette lettre. 133 avis forts certins. Dieu nous pourvoie de zelle à son servisse, de prudanse an la conduite politique et de courage pour faire sans crinte ce quy est bon. Je suis Vostre humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 5e aoust. Archives nationales, 1 AP 434/128 156 19 septembre 1617 - Sedan Madame, Justel m’a raporté plus de doubtes que de certitudes. Il est bien mal aisé, qu’après ung sy grand orage, les afaires aient tout le calme qu’on leur peut désirer, mes il faut bien espérer cella m’est assés aisé à faire an pouvant posséder avec sûreté ma maison. Je ressu la lettre dont vous me fettes mansion de Mme vostre belle-mère, n’estant la response à la vostre, je cru n’y avoir rien à dire. Par la vostre, vous me parlier de Monsieur vostre petit fis, devant l’anvoier issy passer son iver, mes il me sambloit que m’an remarquiés l’anpeschemant, an me disant qu’il interromptoit son exercisse de monter à cheval, à quoy Monsieur de Pluvinel337 disoit avoir besoing de le continuer. Vostre lettre par Justel m’an parle plus absoluemant. Je vous diray mes considérations sur lesquelles vous ordonnerés celle de n’avoir à cest heure ny à mon avis n’auray que l’hiver ne soit fort avancé aucune sortes d’exercisse. J’apréhande le resnouveslemant de mes qintes quy ne me donnait à autruy, ny a moy mesme, mes à la doulleur. J’atans Monsieur le duc Louis338. Ces deux esprit sans directeur /2/ ne faroient pas ce qu’il faut et aussy ne profiteroient, et je ne pourrois y aporter ce que vous atandriés de moy. Cella me fet crindre la perte de son temps et mon desplaisir, parmy ma retenue des qintes. Je fais refaire la procurassion pour les mousquets, an quoy j’ay estimé faire quelque chose à vous plaire que de me servir de Tallebourg à les garder à La Rochelle, il s’y an descharge souvant. Sy donc cella ne vous plaist, je vous suplie me le mander afin que je donnasse autre avis à Monsieur Hersens, sinon vous l’avertirer à quy il aura à les faire donner. Vous me festes beaucoup d’honneur et à ma fille de luy désirer ce qe vous me mander et la considérassion que portés à son bien estre. Je ranvoie à vostre soeur lorsqu’elle aura ce bien de vous voir, d’an prandre vos avis et vous communiquer les siens sur l’estat de nos afaires quy ont leurs considérassions ainsy que je me promets que le jugerés. Vous expérimantés comme moy, Madame, la froideur des biens fets quy est une grande aide ôtée au souslèvemant de nos afaires. Tout se porte fort bien céans. Je feray passer quy à Paris pour prandre ce qu’il vous plaira luy donner pour vostre soeur, ne me restant que vous assurer du servisse de Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 19e sep . Archives nationales, 1 AP 434/103 157 4 octobre 1617 - Sedan 337 Au vu de cette lettre Charlotte-Brabantine de Nassau avait placé son fils Frédéric dans la plus ancienne et plus célèbre académie parisienne, celle d’Antoine Pluvinel (1555-1620). Frédéric fit un plus long séjour à l’académie de Pluvinel pendant le second semestre 1619 et les premiers mois de l’année 1620. 338 Ludwig-Philipp von der Pfalz (1602-1655), futur comte de Simmern, Sponheim et Lautern, huitièmer et dernier enfant de l’Electeur palatin Frédéric IV et de Louise-Julienne de Nassau. 134 Mme de La Trémoille Madame, Vous sçaurés, par ce gentilhomme, la bonne arivée an ce lieu de Monsieur vostre fis, où il luy sera randu, par moy, tout ce quy sera an mon pouvoir pour satisfaire à l’atante qu’avés que ma conversassion luy pourra estre utille339. Monsieur de La Trémoille me demande mon avis an sa conduite340. On la peut mieus donner, aujourduy, an se taisant qu’en parlant. Si les Estats ont tant de grans, il luy faudra une judissieuse conduite. Je croy qu’il y aura quelqu’un de la robe, desputé du Roy. Sy celluy a de la bonne volonté, il doit tascher à la conserver ou à se l’aquérir afin d’avoir son aprobassion et consulter souvant avec luy, an mesnageant prudammant les choses où le Roy, où ce païs, pourront avoir divers buts et aus intanssions privées des autres, n’y prandre part qu’en celles dont il pourra voir l’isseu ainsi que le commancemant. Monsieur de Sully sera trompé, s’il n’est amploié sur l’autre subject. Vous serés les deux soeurs amiable quy desirés le bien estre an toutes fassons aus ungs et aus austres avec quelque /2/ esgalité dans elle. Vous resglerés vos ressolussions auquelles je croy que Dieu y assistera de tout son saint esprit. J’auré Monsieur le duc Louis dans le 25e de ce mois. Madame la princesse de Brandenburg est bien acouschée, mes l’on ne me dit pas de quoy341. Il y a assés de temps que je n’ay eu aparanse de médisante, ny plus d’anvie de vous tesmoigner Madame que je suis Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 4e oc . Archives nationales, 1 AP 434/77 158 13 novembre 1617 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’anvois à la bonne soeur pour luy donner mon avis sur ce qu’elle doit faire an son chemin. Tout ce porte bien céans, où Monsieur le duc Louis est arivé. Je n’obmets aucune chose quy pusse servir à vostre cher anfant qui a souvant besoing d’autre susfisance que la mienne. Je doute fort aprandre l’issue des Estats an Bretangne342. J’escris, à Monsieur vostre fis, mon avis sur quelque points où il me le demandoit. J’estime qu’il aura ressu ma lettre pour s’an servir, s’il les à trouver bons. Je me souhete près de vous, mes mon corps n’est plus portatif, aïant depuis huit jours la goute au pied avec peu de douleur, mes me gardans de marcher. Sy vous ne m’aimés, vous avés tors, car je vous suis fort fidellemant acquis. C’est Vostre bien humble frère et serviteur. 339 Par la correspondance de Bethold, le précepteur de Frédéric de La Trémoille, l’on sait que les rapports entre le duc de Bouillon et son neveu furent souvent orageux. Frédéric, il faut l’avouer, était un adolescent psychotique rejetant toute autorité autre que celle de sa mère. Il était réprimandé journellement par son oncle pour sa mauvaise conduite et exhorté sur le fait que la vertu et la courtoisie sont les véritables voies vers l’honneur. Mark MOTLEY, Becoming a French aristocrat. The Education of the Court nobility, 1580-1715, Princeton University Press, 1990, p. 49. 340 Henri de La Trémoille s’apprêtait, pour la première fois de sa vie, à présider l’ordre de la Noblesse aux Etats de Bretagne réunis à Rennes. 341 Elisabeth-Charlotte (1597-1660), troisième fille de Frédéric IV et de Louise-Julienne de Nassau, avait épousé le 24 juillet 1616 à Heidelberg Georges-Guillaume von Hohenzollern (1595-1642), qui deviendra électeur de Brandebourg en 1619. Le 13 septembre 1617, elle avait accouchée à Berlin de son premier enfant, une fille, prénommée Louise-Charlotte, future duchesse de Courlande. Elle décéda le 29 août 1676 à Mitau. 342 Les Etats de Bretagne où le duc de La Trémoille présidait l’ordre de la noblesse se tinrent à Rennes du 26 octobre au 13 novembre 1617. 135 Henry de La Tour bre A Sedan, ce 13 no . Archives nationales, 1 AP 434/134 159 28 novembre 1617 - Sedan Mme de la Trémoille Madame, J’ay ressu une de vos lettres de Rennes, par laquelle je vous ay sceue plus malade qu’on ne vous avoit feite. Je prie à Dieu que la veue de la bonne soeur vous donne tous les soulagemans qu’elle et moy vous desirons, me souhestant an vous escrivant cesle-cy à Touars et que vous pussiés toutes estre santées issy. Je souhete fort que la tenue des Estats soit faite avec la satisfaction que je désire à Monsieur vostre fis. Tout ce porte bien céans. Henry a eu la petite vérole assés peu, sans an avoir gardé le lit. C’est ung joly anfant. Je n’obmets, ny n’obmestray aucun debvoir à randre à celluy qui est céans et tant plus que je connoistré an avoir besoing et tant plus j’ocmanteray mon soing, an aiant bon besoing d’une plus sufisante personne que moy quy me plairés tousjours bien fort à vous faire servisse. Le Sr. Bertolle343 vous escrira plus particulièremant, quy arestera ma plume an l’assurance, Madame, que la volonté de vous faire servisse ne sera jamés arestée de Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 28e no . Archives nationales, 1 AP 434/133 160 13 décembre 1617 - Saint-Laurent des Eaux344 Elisabeth de Nasau à son époux345 Monsieur, Encore que ces lettres n’ariveront à Paris qu’un jour ou deux devant moy et qu’elles trouveront le coche de Sedan party, je ne laisseray de vous randre conte de mon voiage jusque ycy espérant quy ce pourra ofrir quelque occasion extraordinaire par quy Le Vasseur vous les poura envoyer. Je vous diray donc, mon cher Monsieur, que j’ay fait mon voïage heureusement jusque en ce lieu. Nostre bien aymé Fédéric n’a point manqué au randé vous que je luy avois donné dimanche dernier à Tours, où j’ay passé sans rien acheter, ne pouvant rien faire qu’avec loisir, tant j’ay l’esprit lourt. D’Emboise, je viens dîner à Blois. Afin d’avoir moyen de faire ma court, j’envoye savoir de Madame de Guercheville346, l’heure que je pourois avoir l’honneur de voir la Roine mère. Elle me manda que ce seroit comme elle seroit revenue du sermon. Je luy avois fait dire, par l’avis de la bonne seur, Madame de La Trémoille, que j’avois ma fille avec moy et que je m’assurois que la Roine mère la traiteroit comme elle avoit fait 343 Bertolle ou Berthold, originaire de Silésie, était le précepteur de Frédéric de La Trémoille. Il était entré au service des La Trémoille en 1611. Ses lettres à Charlotte-Brabantine de Nassau sont conservées aux Archives nationales de France dans le Fonds La Trémoille à la cote 1 AP 354. Elles ont été exploitées en partie par Mark Motley. Une lettre du philologue Johann-Philippe Parens du 19/9 septembre 1635 à André Rivet, nous apprend qu’il mourut le 20/10 juillet 1635 à Berlin “ après avoir esté malade d’une fiebvre chode dix-sept jours ”. B. U. Leyde, BPL 2211a/ 119. 344 Saint-Laurent-des-Eaux sur la Loire au nord-est de Blois et de Mer. 345 Il s’agit de la seconde des deux lettres d’Elisabeth de Nassau à son époux conservé dans le Fonds Rohan-Bouillon. L’on notera le long compte rendu qu’elle fait de sa visite à la Reine mère. 346 Mme de Guercheville, était dame d’honneur de Marie de Médicis depuis 1600 et l’avait suivi dans son exil à Blois. Elle était le premier personnage de sa suite. 136 d’autrefois et du temps du feu Roy. Madame de /2/ Guercheville dit qu’elle s’en souvenoit bien plus que cela ne fut an une fois et y faisoit des dificultés et assura que cependant elle feroit ce qu’elle pouroit afin que j’en use du contantement sur quoy l’on la suplia d’en savoir la volonté de la Roine mère quy luy comanda de me faire dire qu’elle m’en vouloit donner et que j’estois la bien venue. Je m’y en allé sur les quatre heure avec nostre fils. Je la trouve dans son cabinet quy me fit l’honneur de me faire fort bon visage, et, soudin, s’asit sur un petit lict et comanda que l’on me donna un siège et dit aussy à nostre fille de s’asoir, ce qu’elle fit auprès de Madame de Guercheville, quy se mit en lieu où la Roine mère ne la pouvoit voir et nostre fille estoit en veue. J’eus l’honneur d’estre près d’elle deux heure, comme nostre fils y eust esté demy, cardeure je luy demande permition qu’il alla voir le château, ce qu’elle trouva bon. Elle me dit qu’elle croioit que vous l’aymiés bien et luy demanda s’il avoit grande envye de vous revoir et tout plain d’autre petite chose, puis il s’en alla et je demeuray près d’elle quy me tesmoignoit un visage fort contant. Je la trouve aussy belle que je l’avois jamais veue. Je luy dis ce que vous m’aviés commandé sur quoy elle me dit qu’elle se souvenoit de vos conseils, qu’elle voudroit /3/ les avoir crus. Je luy dis que vous les luy aviés donné comme ayant beaucoup d’afection à son service, et comme estant son très humble serviteur et que vous le seriés tousjours. Elle me fit un grand mercy fort doux mais demeura fort retenur et regardoit fort d’un coté et d’autre, elle me demanda sy je savois bien que Madame la princesse estoit assurément grosse, et puis me dit la Bastille sera cause qu’elle aura un fils ou une fille. Elle fera ce bien là. Je luy dis ou y seroit lei grand, elle me dit aussy que Madame la contesse estoit allé à Rouan y mener Monsieur son fils, et qu’elle ne l’avoit point voulu qui le y qu’elle avoit seu que l’o luy avoit voulu oter et qu’elle se servoit de l’exsemple, qu’elle avoit devant ces jeux et qu’elle faisoit bien. Elle me dit aussy qu’il n’ay avoit que peu de prince a Rouan près du Roy que Monsieur de Guise y estoit allé pour y demander justice d’un exsempt des gardes quy l’avoit acusé et Monsieur dEpernon de vouloir faire tuer Monsieur de Luines et qu’elle s’étonoit que la punition que l’on avoit fait de celuy quy avoit usé d’une semblable calony contre M. de Vandome ne l’avoit randu plus sage et disoit-il se fera pendre comme l’autre et puis me dit que Monsieur d’Epernon n’avoit bougé de Paris, que la Roine y estoit /4/ encore malade, et qu’elle n’iroit pas à Rouan c’est ce qu’elle me dit de plus particulier tout le reste fut discours fort commeuns. Elle m’usa de ceste gratification que de me dire qu’elle ce fut allé promener sy ce n’ut esté qu’elle me vouloit voir, et quelle estoit demeuré pour cela, me parla fort de son bâtiment, de parcs et que je serois bien sa voisine. Comme je luy disois qu’elle se portoit sy bien, elle me disoit qu’elle pensoit à sa santé, qu’elle en avoit le loisir et qu’elle s’en trouvoit fort bien. Elle fit l’honneur de recongnoistre nostre fille pour sa filleule et en dire du bien. Comme je luy parle de recevoir ces commandemens, elle ne me dit point vous revoiray-je encore n’y rien quy m’obliga à demeurer au contraire elle m’avoit dit qu’elle estoit en dévotion et soudin me dit qu’elle me prioit de faire ces recommandation au Roy de voir Mesdames et leur dire comme elle se portoit bien de fasson que je ne l’ay veue qu’uns fois et n’y ay point fait de séjour afecte, mais je n’ay pas seu aussy grand chise de ses sentimens, mais j’ay eu l’honneur d’une fort bonne chère. Elle n’avoit que Madame la marquise de Guercheville dans son cabinet et ses filles. Et Madame de Mariliac, quy là est Madame de >>>>, y estoit, quy se dit bien vostre servante. Elle m’a veu en mon logis et me tesmoignoit /5/ qu’elle eust fort désiré que jusse fait plus de séjour auprès de la Roine mère et qu’elle say bien qu’elle l’eust eu agréable, mais qu’elle ne commande jamais à personne de demeurer, elle me demanda fort sy je ne trouvois point qu’elle m’eust fait bonne chère, et que tout ceux quy estoient dans le cabinet le remarquoient bien, il n’y avoit pas beaucoup de gens il y avoit un prince Italien parant de la Roine mère, frère de Madame de Pomprensy, qui estoit près de ces filles. Je ne le remarque point, mais mes demoyselle quy eurent la favrur d’entrer au cabinet me le dirent, il y avoit quelque avis ou ses gentisommes et deux ou trois hommes d’église quy avoient de grans manteaux le petit marin fit tout voir le château à nostre fils quy prenant congé de la Roine mère. Elle luy dit ! “ Servés bien le Roy ”. Comme je fus de retour en mon logis, j’y trouve Madame de Bresieu à quy je dis comme je la pensois trouver auprès de la Roine, sur quoy elle me conta qu’en peu de temps les choses estoient bien changés et que la Reine mère avoit commandé à son fils de se défaire de sa charge347 et à elle de ne la plus voir et quy recevoient cela après l’avoir servye le plus fidellement du monde et que son fils ny avoit point épargné sa vye. Je luy demande la cause de cela. Elle mr dit que c’estoient des calomnies, 347 M. de Bressieux était le premier écuyer de Marie de Médicis. 137 et que l’on avoit /6/ dit à la Roine mère que c’estoit tesmoigné contraire au rétablisement de M. l’évesque de Luçon et qu’il avoit employé ses amis afin que cela ne fut point ou quoy elle dit que l’on luy fait un extrême tort. Elle dit que la Roine mère luy faisoit espérer qu’elle luy fera randre ce qu’il a acheté son estat quy n’est pas peu de chose cela monte soisante mille escus. L’on se plaint à moins de perte. Ceste dame me prya de vous assurer de beaucoup d’afection à vostre service et quelle n’oubliroit jamais les obligations qu’elle vous a. Comme j’estois prète à monter en carosse j’ay veu une dame que je n’avois point encore veue quy est Madame de Roche-Baron quy a l’honneur de vous apartenir et d’estre, se dit-elle, fort vostre servante. Elle se loue fort des bons ofices qu’elle a receu de vous et après m’avoir protesté d’un grand resentiment, elle m’a fait avec larmes de grande doléance du tort que l’on faisoit à sa fille de s’y vouloir randre, quoy que chacun recongnoisse qu’elle estoit innocente de l’acusation que malheureusement l’on avoit inventé ; et dit que la Royne mère luy a dit qu’elle savoit bien qu’elle l’estoit et que la haine avoit atiré cela sur elles, qu’elle le feroit cougnoistre à tout le monde qu’elle en avoit un grand déplaisir, mes qu’elle ne la pouvoit plus /7/ garder, de fasson qu’elle se loue de la bonté de la Roine mère, mais elle dit que l’on la contraint à faire ce qu’elle fait, qu’elle voit bien que ce n’est point de son mouvement, mais pour plaire à ceus quy veulent mal à sa fille. Cependant, le blâme que l’on luy donne n’est pas de petite conséquence, car il va à son honneur de fasson qu’elle m’a instament pryé que, comme vostre parante et servante, je fisse suplier Madame la marquise de Guercheville d’intercéder pour elle vers la Roine mère, et luy dire que sy j’usse seu cela devant que de luy avoir fait la révérance que j’eusse pris la hardiesse de luy en parler. J’ay cren ne luy devoir point refuser cest ofice et y ay envoye mais je n’ay point eu de réponse guère favorable, car Madame de Guercheville m’a mandé que la Royne mère avoit résolu ceste afaire et qu’elle savoit bien qu’elle n’y changeroit rien, qu’elle ne feroit que la fâcher de luy en parler et que cela ne serviroit de rien qu’elle auroit touiours en grande considération. Ce quy luy seroit en grande considération ce quy luy seroit recommandé de ma part, force belles parolles sans efet en ce suiet où elle ne manque point de pouvoir, car l’on croit, qu’elle en a un fort absolu et qu’elle fait tout ce qu’elle veut enfin l’on tient qu’elle posède, du tout la Roine mère il ne faut rien oublier. Je vous dire donc comme j’ay veu la cordonnière de Loudun, quy me fit de grande révérence et dit que sa grande /8/ vous veut force bien pour toute les dames et filles et m’ont fait fort bonne chère et ont esté fort honnestes, mes pour les gentisomes, je ne me puis louer de pas un. Voilà comme tout s’est passé à Blois, mais je ne vous ay point dit comme à Loudun et à L’Ile-Bouchart les deux pasteurs de ces lieux là, quy sont fort des amis de Monsieur Tilenus, sont fort scandalisés de certains thèmes quy aproche fort de la créance des arméniens. Ils disent que cela fera recevoir un grand préjudisse à nostre académye et quy n’ira plus d’écoliers, j’ay creu, vous en devoir donner avis et cependant je priray Dieu d’arester le cours de ce mal et me faire la grâce de vous revoir bien tost en bonne santé, mon cher Monsieur. Que ce contantement est désiré de moy ardamment. Je m’atens bien d’avoir l’honneur de trouver de vos lettres à Paris et vos comandemens pour ma conduite quy est toute ma consolation en l’apréantion où je suis, quy me faut faire ma court, je n’y auray nulement l’esprit, car il sera tout auprès de vous mon cher Monsieur et de la petite famille que je meurs d’ennuye de voir et de vous dire de vive vois le bon comportement de nostre bien aymé Federic quy a une grande joye de voiager avec moy, quy presse aller vous donne cent mille bonsoirs. Mon cher cœur, mon tout, c’est $ Y $ A St-Lorans-des-Eaux, ce 13e de décembre 1617, ce mercredy. C’est Guy quy porte ceste despeche à Paris, où je l’envoye pour vous faire préparer le logis, sy cela n’est déia fait. Je m’en suis souvenue bien tart. Je vois demain coucher à Orléans. Archives nationales, 273 AP 179 1618 est une année où se posent les jalons des crises à venir. Les faveurs qui s’abattent sur Luynes et sa famille irritent les grands qui se rapprochent de la Reine-Mère exilée à Blois. Les protestants pour leur part craignent les sentiments catholique du Roi. Le 23 mai à Prague, les 138 protestants de Bohême en défenestrant les représentants de l’Empereur Mathias provoquèrent la guerre qui pendant trente ans ravagera l’Allemagne. Le duc de Bouillon souffrant de plus en plus en plus de la goutte restait cantonné à Sedan. A la fin de l’été, il reçut la visite de la duchesse de La Trémoille en route pour La Haye où l’appelait la succession de son frère aîné le prince d’Orange, Philippe-Guillaume, décédé le 20 février. Elle emmena avec elle son fils cadet, Frédéric. Pour sa part, son fils aîné, Henri, était à la Cour pour demander au souverain l’autorisation de se marier avec sa cousine germaine Marie de La Tour d’Auvergne. 161 15 janvier 1618 – Sedan Berthold à Madame la duchesse de La Trémoille348 Madame, Je crain bien par les lettres précédentes vous n’ayez eu quelque appréhension pource que je vous avois escrit de la blessure de Monseigneur le Comte, mais maintenant luy vous escrivant luy mesmes, ie ne doubte point que vous ne le croyez en bonne santé comme il est grâces à Dieu, se comportant d’ailleurs d’une façon que l’on ne s’en sçauroit pas aisément plaindre, et néantmoins telle que difficilement l’on pourroit trouver plaisante. Car depuis quinze jours en ça qu’il a cogneu que Monsieur de Buillon ne luy veut pas permettre les promenades avec les autres, ny l’exercice de monter à cheval comme il l’en avoit fait prier, il s’est résolu quoy que i’en aye peu faire, de demeurer en sa chambre depuis le matin jusques au disner et depuis midy jusques au soupper sans hanter personne, afin que l’on n’ait occasion de rapporter rien de luy à Monsieur de Buillon ; et afin de ne s’y ennuyer pas par trop, il se met à lire dans son Philippe de Comines349 ou bien à peindre tout ainsi, comme s’il estoit prisonnier, et ce n’est pas que ie ne le pressasse assez de sortir et d’aller veoir quelqu’un, mais il me respond, que Monsieur de Buillon l’en tanceroit. Je ne sçay pas ce qui en est, au moins Monsieur de Buillon a fait une reigle que les autres après disner doivent jouer et se pourmener jusques à trois heures, mais pour luy il l’envoye aussi tost en sa chambre, ce que d’autrefois luy eust fait mal, mais mantenant luy est un commandement du tout agréable de façon que ie suis du tout asseuré que si Monsieur de Buillon au soir luy vouloit commander la mesme chose aussi tost après le soupper il en seroit bien aise, d’autant qu’en l’humeur fascheuse qu’il est à ceste heure il luy est difficile de converser avec les autres sans faire quelque chose qui soit trouvé mauvaise. Ainsi il luy arriva l’autre soir que Monsieur le duc Louys luy vint faire quelque peu de mal en jouant avec son chapeau et luy ne le voulant supporter le luy rendit aussi en jouant avec quelque mot d’injure ce que fut incontinent rapporté à Monsieur de Buillon, encor que Monsieur le duc Louys ne s’en plaignit point n’y s’en sentit offencé. Toutesfois cest affaire là a esté accommodé le mieux que l’on /2/ a peu et tellement que tout le monde est content hormis que c’est accident a confirmé la résolution de Monseigneur le Comte de ne hanter plus quères icy l’un ny l’autre, principalement puisqu’il luy semble que Monsieur de Buillon l’en voit volontiers esloigné. Or, Madame de Buillon ayant cogneu ceste sienne condition et veu avec combien de retenue il vivoit avec Monsieur son oncle, m’a fait l’honneur de me faire appeler aujourd’huy en son cabinet, m’asseurant que vostre volonté estoit de luy dire comme si c’estoit à vous mesmes ce que jugeois de l’humeur de Monseigneur le Comte et les moyens que l’on pourroit tenir pour luy faire recevoir du bien et à vous du contentement. Là-dessus j’ay pris la hardiesse de luy dire quasi une demi-heure durant premièrement les causes d’où peuvent estre procédé, ses fautes passées puis après son humeur 348 Les rapports entre le duc de Bouillon et de son neveu Frédéric de La Trémoille furent tendus pendant son séjour furent très tendus. Berthold, son précepteut, adressa cette lettre à la duchesse de La Trémoille au plus fort de la crise. 349 Philippe de Commynes (1447-1511), seigneur d’Argenton-le-Château, conseiller de Louis XI et Charles VIII, fondateur du genre des mémoires historiques, s’adressant à un public de grands seigneurs et de gouvernants pour qui seule compte la réussite. Marie-Paule CAIRE-JABINET, L’histoire en France du Moyen Age à nos jours. Introduction à l’historiographie, Champs Université, Flammarion, 2002, p. 65-66. Il est plaisant de voir que Frédéric avait pour livre de chevet les Mémoires de l’adversaire de son ancètre Louis II de La Trémoille. 139 et inclination naturelle, et finalement le moyen et la conduite que j’ay tousjours trouvé la meilleure auprès de luy, laquelle toutesfois estoit un peu différente d’avec celle de Monsieur de Buillon350. Je ne sçay si ce discours peut avoir agréé à Madame de Buillon au mains Monseigneur le Comte a cogneu dès ce soir que l’on avoit parlé de luy a Monsieur de Bouillon, lequel l’a caressé beaucoup outre l’ordinaire et luy a quasi fait promesse qu’il le feroit monter à cheval, encor que pour le présent leur académie n’en est pas la mieux garnie. Mais pour ne vous importuner d’avantage ie finirai ceste-cy priant Dieu, Madame qu’il espande sur vous et les vostres le thrésor de ses bééndictions temporelles et spirituelles Vostre très humble, très obéissant et très fidèle serviteur. Berthold De Sedan, ce 15 de janvier 1618. Archives nationales, 1 AP 354/4 162 4 septembre 1618 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je vous anvoie le Sr. Rambur351. Ainsy que me l’avés commandé, vous trouverés les afaires an Olande an fort bon trin, Dieu mercy celles d’issy sont où vous les avés lessées. Je ne voy pas que Monsieur vostre fis soit mal à la Cour, aus choses quy sont an ma connoissance. Nostre public ne requiert pas son absance, ny aussy son particulier n’est foible pour se lesser tirer hors de chemin de piété. C’est ce que ma connoissance généralle m’an fet dire, bien qu’elle vous a plu. Honorés-moy de la croïance que je suis Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 4e sepbre. Archives nationales, 1 AP 434/88 163 24 septembre 1618 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je ne puis que je ne vous tesmoigne par ce peu de ligne, combien je ressans et porte de peine de vostre maladie quy ne sont que de m’y soulager, n’ayant apris pas vos dernières à vostre soeur que vous ussiés respris vos forces. Sy je ne vous ramantois sy souvant les ressantimans de mon afection à vostre servisse, ne doutés pas Madame qu’il y aye personne sous le ciel quy vous an veulle randre de plus fidelle et s’eslongner mieus d’une assurée obéissance à vos commandemans. Je veus espérer que par les premières sçaurons vostre parfaiste guérison. J’ay admiré la gentillesse de vostre tant aimé à exprimer ses amours. Cella surpasse, de bien loing, le mérite de sa mestresse. Je prie à Dieu qu’il donne à Monsieur son frère et à luy la grasse d’estre longtemps sous vostre sage et vertueuse conduite et qu’ils ayent les honneurs que vous leur presparés par le mérite antre autres qu’ils s’anquyèrent par une sy bonne nourriture. 350 Mark Motley a souligné comment la duchesse de Bouillon intervint pour mettre fin à la “ head-on dispute ” entre le duc et son neveu, y voyant la touche féminine dans l’éducation des adolescents. Becoming a French aristocrat, op. cit., p. 51-52. 351 Abraham Rambours (1590-1651) était le ministre de Sedan. Le duc de Bouillon l’avait envoyé en Hollande pour participer au synode de Dordrecht qui devait se prononcer entre les Gomariens et les Arminiens. Cf. Lettre de Catherine de Parthenay à Charlotte-Brabantine de Nassau du mois de novembre 1618. 140 J’estime que je me randeray à Paris au temps des plaideurs où je me promets /2/ l’honneur de vostre présence et là vous rofrir la continuance de mon fidelle servisse. Vostre soeur, me dit vous mander ce qu’avons fet pour l’Escossois et comme nostre petit mesnage se porte, quy me gardera de de resdite, vous besant très humblemant les mains, priant Dieu, Madame, vous donner très heureuse et très longue vie, Vostre très humble frère et fort obéissant serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 24e sep . Archives nationales, 1 AP 434/139 1619 Le 18 février fut célébré à Sedan le mariage de Henri de La Trémoille et de Marie de La Tour d’Auvergne en présence de Charlotte-Brabantine de Nassau. Celle-ci au lendemain de la cérémonie retourna à Paris. Il est vrai que le royaume avait été secoué, le 22 février, par l’évasion spectaculaire de Marie de Médicis de Blois pour aller se réfugier à Angoulême chez le duc d’Epernon. Louis XIII décida d’agir et constitua trois armées. L’une en Champagne pour tenir en respect le duc de Bouillon et le prince Charles de Lorraine suspectés de prendre partie pour la Reine-Mère, une seconde en Guyenne et une troisième commandée par Schomberg qui marchait à petite étapes vers le Poitou et la Saintonge, siège des possessions des La Trémoille. Le 30 avril la paix d’Angoulême mit fin à la première guerre de la mère et du fils. Pendant l’accalmie de l’été alors que le duc de Bouillon restait à Sedan, la duchesse de Bouillon conduisit sa fille aînée, Marie, à Thouars puis alla à Turenne avec ses deux filles, Julienne et Elisabeth, et son plus jeune fils Henri. Alors que la méfiance subsistait toujours entre Louis XIII et sa mère, la fin de l’année fut marquée par deux événements : l’ouverture à Loudun d’une assemblée protestante le 26 septembre352 et le 20 octobre la libération du prince de Condé qui depuis trois ans se morfondait à la Bastille. 164 4 mars 1619 - Sedan au Roy353 Sire, J’ay receu avec l’honneur que je dois porter à ce qui vient de Vostre Majesté, l’envoy qu’il luy a pleu faire vers moy du Sieur de La Chesnaye, avec une lettre qu’il m’a rendue en datte du 26 février, en laquelle il est faict mention d’une précédente de deux jours, laquelle me disoit le départ inopiné de Bloys de la Royne, mère de Vostre Majesté, que je n’ay point receuë ; n’ayant appris cette fascheuse nouvelle que par la venuë dudit Sieur de La Chesnaye, lequel estant doué de très bonnes qualités, entre-autres d’une très longue & fidèle /4/ dévotion à vostre service, Vostre Majesté me témoigne & m’asseure, par ce choix qu’il luy a pleu faire, de sa bonne volonté ; qui est un thrésor que je désire posséder plus que nulles autres richesses. Vostre Majesté me commande de luy donner mes advis sur les occurrences présentes. Je n’ay peu, en y obeyssant, estre blasmé de présomption, mais bien d’ignorance ; pour le peu ou point de cognoissance que j’ay des affaires. Mon affection à vostre service, & la fidélité que je luy dois conduisant ma plume, sera s’il plaist à Vostre Majesté supporter le reste. Au départ de la Royne, mère 352 Sur l’assemblée de Loudun Cf. les Frères HAAG, La France protestante, Tome VI, p. 203-208. 353 Par sa lettre du 5 mars 1619 (Archives nationales, 1 AP 393/50), Henri de La Trémoille envoya à sa mère une copie de cette lettre que le duc de Bouillon adressa au Roi par l’intermédiaire de François Vasselot, écuyer, sieur de La Chesnaye, un huguenot poitevin, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi.. C’est pourquoi nous la publions ici, d’après l’édition qui fut publiée en 1619 à Sedan sous le titre : “ Lettre et advis envoyé au Roy par Monsieur le Mareschal de Bouillon ”. Elisabeth de Nassau dans ses deux lettres du 4 mars 1619 à sa sœur Charlotte-Brabantine fait également allusion à cette lettre. 141 de Vostre Majesté, il y a d’abord un déplaisir à tous bon François, de voir de l’altération à la commune & naturelle intelligence qui semble devoir estre perpétuelle entre Vos Majestez. Mais ainsi que cela donne un vif déplaisir, aussi s’adoucit-il au mesme instant sur l’asseurance qu’on prend, que tant par /5/ loy de Dieu, que par celle de nature, Vos Majestez ne peuvent demeurer séparées d’affection ; vous Sire, de bon Roy & de bon fils, elle non seulement de mère, mais de très humble subjecte. Vostre Majesté a peu voir par la lettre qu’elle luy a escrite de Loches, que deux passions, ainsi qu’elle vous dit, l’ont faicte sortir de Bloys avec péril. La première, la cognoissance qu’elle a de plusieurs choses qui concernent Vostre Majesté. L’autre la crainte de sa vie, laissant & sousmettant à vostre choix & volonté les moyens qu’elle doit tenir pour les luy faire entendre, par ce moyen Vostre Majesté demeure, sans contrainte, juge de ses actions, afin qu’en prenant les advis utiles à vos affaires, elle rejette ceux qui n’y conviendront. Sire, la France plus que nul autre Royaume a esté agitée de pareils & soudains accidents, & de beaucoup plus forts. Mais aussi plustost qu’ailleurs ont-ils esté /6/ consolidez, sans y appeler les armes, qui sont tousjours dommageables, principalement dans l’Estat, que j’ose dire, en avoit moins de besoin qu’en nulle autre saison. Ainsi, Sire, par une main Royale, puissante, juste & douce, V. M. doit tirer profit de cecy, & jugeant ce qui défaut à une asseurée tranquillité en laquelle vostre authorité soit gardée, les loix du Royaume maintenuës, vos Edicts de Pacification entretenus, les infractions réparées, la desfiance de vos subjects ostée, & vos bien-faicts & honneurs départis à la qualité, & au mérite de ceux que V. M. choisira pour les donner. Ainsi, Sire, vous jouyrez d’une immortelle gloire, & vostre Royaume d’une très asseurée félicité. Et j’estime qu’on peut conseiller V. M. de se servir des armes, que par personnes qui visent à une dissipation & à égaler leur obeïssance à l’égalité qu’ils cuident prendrent dans le fer, qui est une intention détestable /7/, qui aura le ciel pour juge & son supplice à la terre. De mesme ceux qui offrent leur service pour avoir de quoy deservir, dont il y a bon nombre. Sire, oyez la Royne, vostre mère, par personnes fidèles & suffisantes, oyez les désirs communs de Vostre Estat, & y donnez ce qui y conviendra, & en ce faisant s’il y a aucuns qui sous de belles apparences, ayent de mauvaises intentions, elles le montreront, & serviront à démonstrer vostre puissance, & vostre justice à les faire chastier. En quoy Sire, vous serez servy de bons subjets, ainsi qu’ils y sont obligez. Pour mon regard, à qui il reste peu de vie, & moins de santé, je porteray tout ce qui est en moy & aux miens sans excuse pour servir, & affermir vostre authorité avec une asseurée paix , & courir de toutes mes forces avec une parfaite obéissance à vos commandemens, sur ceux qui oseroient y porter de l' opposition, le nombre desquels /8/ sera petit s’il y en a ; ne voyant dans les intentions & volontez des principaux corps de vostre Royaume, tant d’une que d’autre Religion, qu’un désir de joüyr de la paix , estimant, comme il est vray, que la guerre ne feroit que ruiner & les âmes & les corps ; & au contraire la paix leur donnera un usage pieux & Chrestien. Je me suis estendu sur ces choses avec ledit Sieur de La Chesnaye. C’est pourquoy je supplie très humblement V. M. de l’oüir & de l’en croire, & me tenir pour très entier au service de V. M. sans rien recognoistre au contraire, & en la vraye obeïssance que doit à vos commandemens, Vostre très humble serviteur & subject. Henry de La Tour De Sedan, ce 4 mars 1619. Bibliothèque nationale, NUMM 100209 165 Sans date - Sedan à Mme de La Trémoille Madame; J’espère que ceste-cy vous trouverra à Paris, où j’anvoie Justel pour le subject qu’il vous dira. Vostre aprosche nous donra cest honneur d’avoir fort souvant de vos nouvelles. J’an aprans une quy m’annuie, que vous remestés les afaires de Monsieur vostre fils antre ses mains ; lesquelles se 142 trouveront, selon mon jugemant, bien souvant lasses du temps qu’il faudra les y avoir pour les biens faire, ces ocupassions dosmestiques ne soufriront quy les donne ailleurs ou les publiques et importantes afaires le pourront apeller, n’estimant pas que vous vous santiés soulagée des veillés et soins quy avés randus, sy an les lessant vous les voiés despérir. L’afection singulière que j’y porte et à tout ce quy vous tousche m’an fet parler, désirant ung acroissemant à sa personne et à sa maison, louant tous les moyens quy s’y pourront ofrir, auquels j’y contribueré le mesme soing que pour les miens propres. Que je tiendray tousjours an ce debvoir de vous faire servisse et moy an celluy d’obéir à vos commandemans ainsy que le vous a promis, Vostre plus humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour Archives nationales, 1 AP 434/111 166 7 mai 1619 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame Vostre soeur vous a fet mes excuses, mes mauvés yeus me donnant une peu de relasche, je m’an serviray pour vous remercier très humblemant des bon ofisses que vous me randés, de quoy je ne seray jamés mesconnaissant. Ces Messieurs sont retornés avec la continuassion des tesmoignges de la perpétuelle durée de mes intansions au servisse du Roy. Vous sçaurés le subject du voïage de ce porteur, où mes buts sont bons. Dieu veuille que chascun le ressante ainsy ; disposés et commandés moy comme à quy est à vous. C’est, Votre plus humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour De Sedan, le 7e may 1619. Archives nationales, 1 AP 434/69 167 13 mai 1619 - Sedan à M. de La Trémoille Monsieur, je suis fort mal instruit aus afaires dont vous m’avés escrit pour vous an donner ung avis certin. L’esvaluassion des terres donne principalement le quite au partage ; ce que je croy vous voudrés faire vérifier sur les lieus. L’angagemant de Didonne354, puis qu’il avoit esté fet pour aquiter de debtes, doit estre conté sur tous et non seullemant sur vous. Dieu vous donne ceste faveur de faire ce partage, quoy que provisionnel, si raisonnable qu’il n’y aie lieu qu’à le comfirmer et à estrindre, à cest heure et à l’advenir, une estroite et parfecte amitié antre vous, par laquelle vos personnes et maisons an soient fortifiées. Les changemans aus afaires publiques sont si fresquens que les conseils eslongnés perdent leurs usages, se debvant tenir à ces généraus pour y conduire les particulliers à ne rien faire quy ne soit juste et honorable. Vos ocupassions rendent vos lettres sy peu expliquées, que l’ingnorance an quoi elles lessent ceus à quy elles s’adressent, qu’on ne vous y peut satisfaire, ainsy que je désire faire à tout ce où je pourré servir à vostre grandeur. Je suis bien aise que mes gents à Turenne aient sy justemant satisfet à ce qu’ils debvoient faire porter à Poitiers. Tout ce porte bien issy où j’espérois vous voir avant que vous vous an eslongnassiés. C’est Vostre humble père et serviteur. 354 Charlotte-Brabantine de Nassau avait vendu la baronnie de Didonne au duc de Bouillon pour réunir la somme lui permettant d’obtenir la renonciation d’Anne de Coligny, marquise de Mirebeau, à ses droits sur l’héritage de son neveu François de Coligny. 143 Henry de La Tour A Sedan, ce 13e may. Archives nationales, 1 AP 434/144 168 26 mai 1619 – Sedan355 Copie de la lettre de M. de Bouillon à M. de La Haye356 Monsieur, vous estes trop sage et assés vieux pour savoir qu’il n’y a rien plus ingrat que le public, néantmoins il faut toujours le servir puisque la première chose que les gens de bien taschent de s’acquérir, c’est de se contenter soy mesme. Tournez vos yeux vers moy et vous y aurez de quoy vous consoler en mon traictement qui, à la vérité, va au delà de mon attente. En quelque esgard, je pouray en dire quelque chose pour m’instruire si la cause en est en moy ou quelque partie, venez-me voir si vostre condition n’en peut souffrir et nous roulerons le tonneau et me riré de vous, si je n’ay la goutte qui m’est cruelle. Je vous baise les mains, c’est Vostre plus affectionné à vous faire service. e A Sedan, le 26 may. Archives nationales, 1 AP 497/II/136 169 5 juin 1619 - Sedan à Monsieur de La Trémoille Monsieur, vous me demandés des avis par la lettre que m’a donnée, de vostre part, Monsieur de La Haie. Je n’an ay point d’autres que ceus que je vous ay dis fort distinctemant devant le Sr. Brus357; Cella me fet croire à ce que les avés oubliés ou que vous ne les voulés suivre, estimant que les afaires que vous voiés sur les lieus vous font avoir autre conseils que je desvreray tousjours estre propre à vostre honneur et grandeur à quoy il est temps que vous donniés du fondemant. Ma fille se prespare à vous aller trouver an la compagnie de sa mère. Je prieray Dieu qu’il bénisse vostre union et me donne le pouvoir de vous tesmoigner combien vous [suis-je] aquis. Monsieur, mon fis, Vostre bien humble père et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 5e juing. Archives nationales, 1 AP 434/147 170 1er septembre 1619 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’ay de la peine à croire que je ne sois pas à Touars avec tout ce quy est, je sans bien que non par les desplaisirs que j’ay d’estre sans la compagnie que vous avés, à cella j’opose mes joies an celles quy seront ressues pas nos anfants. A quoy je m’assure que j’orés, Madame, des plus favorables à les continuer et acroistre par les bons moiens qu’y porterés. Pour ce faire, n’aians aujourduy rien de sy 355 Cette lettre peut-être également de 1620. 356 Sans certitude, il s’agit peut-être de Charles Feugueray, sieur de La Haye. 357 Adam Brusse, un écossais, maître d’hôtel de Henri de La Trémoille après avoir été son précepteur. 144 prosche de mes santiemans que le bien estre de ces personnes antre elles. La familiarité y pouvant estre ung grand aide. J’atandray avec grand désir de sçavoir vostre arivée avec bonheur estimant que le temps de la convocassion de l’assamblée358 se ranconstrant que les bons esprits n’an tiront quelque conséquance. Il faut lesser dire et bien faire, ce que je feray songneusemant. J’envoie la procurassion qu’avés voulue ; an cella et toute autre chose vous serés servie fidellemant de Vostre plus humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce premier sep . Archives nationales, 1 AP 434/135 171 1 septembre 1619 – Thouars à Monsieur Rivet Ministre de l’Eglise de Thouars359 Monsieur, je sçay combien vous avés désiré l’acroissemant de nostre aliance, je m’assure qu’a l’arivée de ma fille vous la recepvrés avec les joies chrestiennes qu’on donne aus choses auquelles on estime l’Esglise de Dieu y avoir de l’acroissemant. An cella principallemant veus, je croire à a consisté le but où l’on a regardé an cella soient les principaus fruits quy an reviendront, à quoy je vous convie, non d’y joindre vos prières, mes vos bons et sages conseils que ma fille désirera, et moy je vous an conjure, assuré quelle les profitera an la sciance de son debvoir et à vous an sçavoir ung grand gré. Eslongné du corps, je suis présent d’esprit à Touars pour prier à Dieu les bénir de toutes ses bénédictions du ciel et de la terre. Ce qu’il me donne de quoi vous tesmoigner combien se santira obligé vers vous par ces bons ofices requis Vostre bien afectionné à vous faire service. Henry de La Tour er bre A Sedan, ce 1 sep . er Koninklijk Huis Archief, Inv. 11, XVII D-8, ad 172 1er septembre 1619 – Sedan Henriette de La Tour d' Auvergne à sa mère Madame, Je ne pouroy assez souvent m' aquiter de mon devoir vous escrire et principalement sur un sy bon sujet que le bon portement de Monsieur mon père, lequel ne se tiendroit guère dans son logis s' il faisoit beau, car encore qu' il face un bien mauvais tems si ne ce passe t-il guère de jours qu' il ne sorte diné tout les jours en salle où il va seulement apuyé sur deux gentilshommes. Il soupe dans sa chambre où après chacun rantre pour faire les prières. Puis mon frère, mon cousin, ma soeur et moi jouons avec luy jusqu' à huit heure. Il a etté bien en peine d' avoir esté plus qu' il ne pensoit a savoir de vos nouvelles et a esté bien rejouy quant il en a eu et nous avec luy, selon le devoir et le désir, Madame, de votre très humble et très obéissante fille et servente. 358 L’assemblée protestante s’ouvrit le 26 septembre 1619 à Loudun. 359 Cette lettre à André Rivet, conservée dans les archives de la maison royale d’Orange-Nassau à La Haye, est entièrement de la main du duc de Bouillon. 145 Henriette de La Tour Du 1 jour de septembre 1619. Archives Nationales, 273 AP 180/HC1 173 xx xxxx 1619 – Sedan Charlotte de La Tour d’Auvergne à sa mère360 Madame, Ce seroit estre insensible n’avoir point de frayeur ayant dire le grand hazard que vous avés encouru avec tout ce qui estoit avec vous et ingratitude envers Dieu s’il n’estoit loué de bon cœur que vous l’avés eschapé sans inconvéniant aucun. Monsieur mon Père le conte à chacun se portant fort bien comme aussi mon frère et mon cousin.Il ne me reste que l’honneur de vous revoir et le désir que vous me trouviez telle que vous ayez occasion de me tenir, Madame, Pour vostre très humble et très obéissante fille et servante Charlote de La Tour Archives nationales 273 AP 180 174 Un dimanche matin à Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’estimeray vostre soeur bien heureuse, sy elle fet an vostre compagnie une partie de son voyage, sinon je la presse de partir instamant ces resonnable que mes ennemis interprestent son séjour à leur avantage. Tout nostre mesnage se porte fort bien, et moy mieus que je ne fis il y a longtemps, de fasson que j’ay de quoy travailler sy l’on m’an donne l’ocasion et à toutes sans an perdre aucune à vous randre ce que vous a promis Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour Ce dimanche matin; Archives nationales, 1 AP 434/84 175 6 septembre 1619 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon à M. de La Haye Monsieur, je vous remercie des deux lettres que m’avez escrites. Les affaires sont aujourd’huy en un tel maniement, qu’il est mal aysé de porter des conseils lesquels fussent ny suivis n’y qu’aussy on les peust assaisonné de la prudance convenable pour en tirer du bien, les médecins attendent les effets de la nature et nous attendons ceux de Dieu, au service duquel je seray, s' il luy plaist, tousjours porté, sans crainte, ny espérance des hommes qui m’y fasse défaillir. La pais de trente ans se peut establir, mais je ne say si la façon de celuy qui dit cela, sera meilleure pour l’Estat et pour nos Eglises que celle que je saurois bien désirer. Si on fait bien, j’an jouyray, sy mal je ne diray amen. Je suis tout entier, Vostre très humble à vous faire service. 360 Les lettres de Charlotte de La Tour d’Auvergne n’étant pas datée, leur classement est aléatoire. 146 Henry de La Tour e Ce 6 septembre. Archives nationales, 1 AP 497/II/137 176 24 septembre 1619 – Sedan Henriette de La Tour d' Auvergne à sa mère Madame, Je n' ay point pris la hardiesse vous escrire pendant vostre voiage, crainte de vous importuner. A cet heure que vous estes en repos, je penseray faire une grande faute devoir et pour les meilleures nouvelles vous dire le bon portement de Monsieur mon père et l' honneur qu' il fait à ma soeur et à moi de nous avoir souvant auprès de luy, et de nous commenser ses volontés qui sont que nous servions bien Dieu et …, et le respect que luy devons et à vous Madame. De quoy je mettray telle peine m' aquiter que vous aurés occasion vous contanter, Madame, de votre très humble et très obéissante fille et servante. Henriette de La Tour. Du 24 septembre 1619. Archives Nationales, 273 AP 180/HC2 177 xx xxx 1619 – Sedan Charlotte de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je say bien que ie ne vous puis pas mender rien de plus agréable que le bon portement de Monsieur mon père, de quoy ie ne veux faillir faire mon devoir, encore que ma sœur le vous puisse mieux dire que moy et plus au lon, mais ie vous diray Madame qu’il a esté bien en pène atendant de vos nouvelles et qu’il fut bien resiouy quant l’homme vint de Turenne durant son dîner, qu’il ne peut achever sans lire vostre lettre. Ie laisseray aux autres à vous dire leur ioye et me conteray de vous dire la grande que ien eus, Madame, Comme le doit, Vostre très humble et très obéissante fille et servante Charlote de La Tour Archives nationales 273 AP 180 178 30 septembre 1619 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, L’honneur que vous me faictes de me mander que j’ay esté souhaitté à Thouars, me faict bien regretter de n’y avoir esté pour y pouvoir servir ceubs qui me font la faveur de m’aymer, comme particulièrement. Monsieur de Chausseray duquel vous me parlez, mais ce qui me fait plus plaindre l’esloignement, c’est de n’estre plus auprès de vous, j’en eusse porté bien plus impatiemment le 147 desplaisir, si ce n’eust esté la joye que je reçois tous les jours de veoir Monsieur mon père en bonne /2/ santé et d’entendre de bonne nouvelles de la vostre. Vous suppliant très humblement de croire que je me souviendray tousjours de ce que vos m’ordonnastes à vostre départ et tascheray d’y obéir le mieux qu’il me sera possible. J’ay esté très aise de sçavoir que mon frère se porte à c’este heure bien et en grande paine de tant d’accidents qui vous sont arrivés en vostre voyage, louant Dieu de vous en avoir préservé, le priant de vous conserver en sa sainte garde et de me faire la grâce de vous pouvoir /3/ tesmoigner le debvoir et l’obéissance que vous doibt, Monsieur, Vostre très humble, très obéissant et très fidelle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour e De Sedan, ce 30 septembre 1619. Archives nationales 273 AP 180/FM4 179 3 novembre 1619 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon à M. de La Haye Monsieur, on doit voir à présent si le conseil du Roy et ceux de la Religion jugent que l’entretenement des Edits soit convenable au repos commun de l’Estat. On dit que Monsieur le comte de Soissons dit volontiers parler de la Religion, le bruit me rend doubteux de la suitte. Toute la nature des affaires est en maniement, par qui au printemps fera les parties qui plus tost ou plus tard seront agitées d’un protecteur de son Eglise qui dans ces confusions saura bien continuer son héritage. Sur cette ferme foy, je demeure et demeureray jusques au tombeau ferme à ce qui est de son service à l’observasion des choses honnestes et par lesquelles l’Estat se maintenant en paix et à vous asseurer toujours que je suis, Vostre bien humble et affectionné à vous faire service. Henry de La Tour e Ce 3 novembre. Archives nationales, 1 AP 497/II/137 180 Sans date - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je commenceray par le singulier contantemant que je reçois lorsque vous me dites celluy qu’avés de nostre fille, cella m’aide ainsy que me le dites, avons bien fort à recouvrer ma santé quy a esté bien mauvese. M. vostre fis demeure plus au Bretangne qu’il ne pansoit361. On me mande qu’il y a fet tout ce qu’il y a voulu. Vous voirés, sy vous plaist, la lettre que j’escris à ma fille, par où je luy mande la response sur certene chose qu’il vous plaisoit m’escrire, vous supliant estre assurée que ce n’est pas faute d’afection, mes c’est la science que j’ay de ne satisfaire à vous, ny à moy au désir que j’aurois de donner ce que vous atandrés de ceste conduite, vous supliant, Madame, prandre et recepvoir mes raisons. Vous voirés aussy ung avis que je vous demande vous pourrés voirla personne quy a 361 La session des Etats de Bretagne de 1619 avait commencé ses travaux le 28 septembre et les avaient achevés le 13 octobre. 148 beaucoup de choses dont la nature l’envelope quy me fait crindre qu’il n’aura pas la force qu’il promet fair san destourner. Vous aurés des lettres de Madame l’Eslectrisse. Il y a fort grande aparanse que le roy de Boesme se randra paisible362, mesme si les huil mil Italliens y allant d’Itallie ont esté retenus an Suisse. Nous sommes pour voir choses grandes. M. de La Valete363 est mal à Metz et s’il a du conseil, il est mauvés. Il n’obeist ny ne s’assure. Cessy vous donra jugemant des afaires des afaires de Monsieur le Prince. Dieu veuille qu’il ne s’intruise par ces fautes. Nostre assamblée à bon besoing de bonne direction journallière tant parmy eus que hors d’eus. Je vous supliray me tenir an vos bonnes grasses et vous assurer du servisse, Madame de Vostre plus humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour Je n’ay santy ancore aucun esfet de tout ce que Justel pansoit avoir avansé. Je serois fort aise que on le sache an l’assamblée. Archives nationales, 1 AP 434/72 181 20 novembre 1619 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon à M. de La Haye Monsieur, j’ay receu vos lettres du 3e vous remerciant de tout mon cœur du soing qu’avez en de m’envoyer les divers actes qu’avez faits. Je fais response à l’assemblée sur ce qu’elle m’a escrit. Je ne say si on a fait lever les restrinctions aux pouvoirs de certaines provinces, cela est rompre l’union et former une division à toutes les actions /2/ publiques en ce temps mesme que pour la pluspart sont plus menez par corruption que par religion. Une copie de lettre fait bien voir comme il garde à s’interpréter. Pour vostre particulier, je vous jureray que je le voy avec les mesmes yeux que le mien. Le procédé de Monsieur le Prince depuis sa sortie et la connessance de son humeur, me rend sans conseil pour ne savoir juger ce qu’on a à attendre de luy et moins ce qu’il faut luy rendre pour en recevoir la gratitude méritée. Il faut par le moment des clartez réglées qu’il donne à son esprit, insinuer les voyes de ce à quoy on le veut acheminer. Je suis dans le chemin estimant seulement de luy qu’il ne sera pas l’auteur à me faire mal, mais mauvais garant qu’on ne m’en fasse l’incertitude qui fait ce doubtes en fait aussy pour devoir vous garder d’espérer que par un subit retour vous verrez naistre les effects de la reconnoissance qu’on vous doit. M. de Chastillon est à Paris à présentation de M. de Luines. Il n’a envoyé M. du Motet. On dit qu’il a un brevet de mareschal de France par Mlle de Pequigny. M. de Montmorency ne m’a donné aucunne de ses nouvelles. L’employ de Venise fait tort à Monsieur le Vidame à qui je suis très affectionné et vous suplie de l’en asseurer. M. le comte d’Orval ne sauroit mieux s’acheminer à obtenir de moy ce qu’il en désire que faire ce qui est bon au service des Esglises et ne courre pas avec ceux qui le prennent pour manteau pour en son dommage profiter en son particulier, procédure que je déteste ny pouvant jamais convenir. Vous devez savoir les différents des cantons. Le prince de Transsilvanie fait un grand progrès. Bucquoy en fuïant avec perte de quelques hommes s’est mis en partie dans Vienne et partie dans les fauxbourg. Bodunes seulle tient dans le royaume de Bohême pour Ferdinand. Les Païs-Bas très mal avec l’archiduc n’y ayant plus ville qu’il ne veille asseurer par garnison. M. de La Valette est mal asseuré dans Mets et je me trompe où il y suit un chemin pour sy mal perdre. Je suis debout et en aparance de bonne santé. Je voudrois pouvoir ce que je say vous estre deu. Pour le dehors s’il s’offre quelque chose asseurez vous qu’elle vous sera portée. C’est Vostre humble et fort fidelle amy. 362 Frédéric V fit son entrée solennelle à Prague le 31 octobre 1619 et fut couronné avec son épouse le 4 novembre suivant. 363 Bernard de Nogaret(1592-1661), marquis de La Valette, fils du duc d’Erpernon 149 Ce 20e novembre. Archives nationales, 1 AP 497/II/137-138 182 30 novembre 1619 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, C’est avec un extrême joye que je vous escris à ce coup l’entière guérison de Monsieur mon père qui pense estre délivré de sa goutte pour tout cest hyver, ne s’en estant point senti durant tous ses mauvais temps. Je prie Dieu qu’il luy plaise conserver en ceste pleine santé afin qu’il puisse, selon vostre désir, à ce printemps faire le voyage de Limosin pour y veoir tant de ses amis et serviteurs. Vous remerciant très humblement de l’honneur que vous me /2/ faictes de me tesmoigner combien vous désirez mon contentement, lequel je n’auray jamais plus entier ny plus grand qu’en rendant la très humble obéissance que je doibs à vos commandements et de Monsieur mon père près duquel je m' estime très heureux. Il a leu fort malaisément vos lettres ayant eu grand peine de se mettre en son séant et m’a commandé d’en lire la partpart. J’auray grand soing de vos lettres d’Allemagnes comme de tout ce qu’il vous plaira me faire l’honneur de me /3/ commander n’ayant rien plus à cœur que de vous pouvoir tesmoigner que cest avec vérité que je me dis, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan, ce dernier novembre 1619. Archives nationales 273 AP 180/FM5 183 xx xxx 1619 – Sedan Charlotte de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Il a plu à Monsieur mon père nous permettre vous escrire qu’il a bien eu du mal de ses goutes à cet heure qu’il ce porte bien et qu’après avoir pleuré nous rions. Il nous a tousiours permis de le voir et entrer dans sa chambre pour chanter des pseaume. Nous avons priay Dieu de bon cœur. Il nous tarde bien que vous soiez de retour qui ne sera iamais plutot que le désire, Madame Vostre très humble et très obéissante fille et servante Charlote de La Tour Archives nationales 273 AP 180 184 4 décembre 1619 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vos lettres m’ont restabli antièremant ma santé, pour les assurances qu’il vous plaist me donner de vos bonnes grasses et combien nostre fille vous agrée que cela puisse tousjours durer. Mesdames de 150 Juerre et de Ste-Croix364 m’ont anvoié voir. Il me samble que Monsieur de La Trémoille ne se doit haster d’y aller, mes n’an ôter l’espérance. J’escris à Monsieur de La Forest ce que je say de nouveau. Le roy de Bohesme n’a pas besongne fecte, mes aussy Dieu luy tesmongne beaucoup de grasses. J’ay anvoié ung laquais à vostre soeur aujourd’huy. Je voudrois qu’elle le fit revenir par Touars. Vous sçavés plus de nouvelles de Monsieur le Prince que moi quy ne voy365 rien de nouveau à ce qu’il fet. Je suis tousjours celluy qu’avés veu et iray au tombeau sans changer à la singullière afection que j’ay tousjours de vous desmeurer, Madame, Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 4e des . Archives nationales, 1 AP 434/79 185 23 décembre 1619 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je me resjouis bien fort d’entendre de bonnes nouvelles de vostre santé et vous pouvoir mander la continuation de celle de Monsieur mon père, lequel a veu le commandement que vous me faictes en vostre lettre de prendre un soing particulier que l’on ne luy serve point de viandes qui luy soyent mauvaises. Il vit d’un bien plus grand régime que quand vous partites. Il soupe fort peu et tousjours en sa chambre. Je vous remercie très humblement de la peine qu’il vous a pleu prendre pour mon argent et desirerois que les receveurs fussent de meilleure volonté. Je n’eusse manqué /2/ de vous mander des nouvelles de la cour au retour de M. Justel si j’en eusse sceu je n’ay point ouy parler à Monsieur mon père s’il ira en Limosin. Je n’ay point receu de lettre de ma sœur depuis un laquais qu’elle envoya ucy et crois que le mauvais temps en aura esté cause, ayant empesché les messagers d’aller. Je n’ay point escrit ny au Roy ny à la Royne de Bohême d’où nous entendons tous les jours d’heureux succés que je prie Dieu accroistre de plus en plus. Je n’ay point peu asseurément sçavoir /3/ si la grille de Madame de St. Pierre est d’argent ceuls qui y ont estez avec moy asseurent quelle est de fer fort bien limé je m’en enquitteray plus particulièrement pour vous le pouvoir mander par la première commodité. J’ay en le soin que vous me commandiez de vos lettres d’Allemagne lesquelles Monsieur mon père a données à M. Justel ne s’estant point présenté d’occasion jusques icy de les envoyer. J’ay dict à tous ce que vous me commandiez par vostre lettre, vous suppliant très humblement de croire que j’en ay rien plus cher que la prompte obéissance que je vous doibs comme estant, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan, ce 23e décembre 1619. Archives nationales 273 AP 180/FM6 364 Jeanne de Bourbon-Montpensier (1540-1624), abbesse de Jouarre et sa nièce Flandrine de Nassau (1579-1640), abbesse de Sainte-Croix de Poitiers; 365 Le duc de Bouillon avait d’abord écrit : sçait. 151 186 xx xxx 1619 – Sedan Charlotte de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Suivant le commandement qu’il vous plaist de faire à ma sœur et à moy d’estre bien sage, iy mettray telle peine que vous cognoistrés combien ie désire mériter l’honneur des bonnes grâces de Monsieur mon père et les vostre. Il se porte bien à ceste heure, Dieu merci. Nous mettons peines de lui faire passer le temps. Mon frère se blesse il y a quelque temps, mais son mal fut bien tot guary. Iay, comme ma sœur fait vos recommandation à toute les Damoiselles qui nous font l’honneur nous venir bien souvent voir désirent bien vostre retour mais surtout, Madame, Vostre très humble et très obéissante fille et servante Charlote de La Tour Archives nationales 273 AP 180 187 24 décembre 1619 - Sedan au Roy366 Sire, Ayant apris que Vostre Majesté n’aura pas désagréable que je luy donne mes advis sur l’estat présent des affaires d’Allemagne et m’y sentant encores obligé par le serment que j’ay à vostre couronne, je prendray la hardiesse de représenter à V. M., avec le très humble respect que je luy dois, ce qu’en cette occurance j’estime estre du bien de vostre estat. Je ne parleray point du droit que les Estats du royaume de Bohême prétendent avoir en l’élection qu’ils ont fait /156/ du Roy Frédéric, par ce que les causes et raisons en sont notoires par les escricts qu’ils en ont fait publier. Je m’aresteray seulement à ce qui regarde l’intérest et la part qu’il semble que Vostre Majesté doit prendre en cest affaire en l’estat qu’il le rencontre à présent. Or c’est chose assés cognue, Sire, que l’Empereur Ferdinand voyant l’auctorité de sa maison quasy dépérie en Alemagne et presque sans espérance de la pouvoir relever de ses propres forces, ny mesmes de celles d’Espagne tasche par tous moyens de convertir son interest particulier à une cause publique de Religion pour oblige tous les Princes catholiques à une commune desfence pour a recouvrement de ce qu’il a perdu et c’est à ce dessein, comme il est aisé à juger que depuis il a envoyé un ambassadeur à V. M. pour vous demander secours et assistance en cette occasion contre le roy de Bohême. Mais V. M. par la prudance saura bien distinguer la cause et le prétexte quand elle cognoistra que la Religion Catholique est notoirement maintenue au Royaume de Bohême et es provinces qui y sont incorporées, et que les édicts et loix publiques establies de longtemps en cest estat la pour la liberté commune tant de la Religion Catholique que de la Réformée y sont entretenues ainsy que ledit Roy la promis par ses lettres à V. M. et par la déclaration qu’il a fait publier des causes qui l’ont meu à accepter la couronne de Bohême et le gouvernement desdites provinces incorporées et cest affaire ne regardant la Religion, ains seulement l’Estat V. M. ne se voudra partialiser en faveur de la maison d’Autriche contre un Prince de la maison électorale Palatine, alliée de tout temps de vostre couronne et de vostre maison de laquelle les Roys 366 Une copie de cette lettre du duc de Bouillon à Louis XIII est conservée dans un registre de correspondance de Henri de La Trémoille. Henri Zuber l’a publiée dans les pièces justificatives de sa thèse (tome II, N° 44, p. 244-247). Une minute de cette lettre est conservée aux Archives nationales dans la série R² 51. Elle a été également l’objet d’une publication dans le Mercure François, T. VI (1619), p. 371-376. L’on peut présumer que le duc de Bouillon avait adressé une copie de cette lettre aux La Trémoille pour les tenir informer de la démarche qu’avait entrepris auprès de Louis XIII à l’annonce que celui-ci avait promis à l’Empereur Ferdinand une aide militaire contre les protestants de Bohême et le roi qu’ils s’étaient donné. Au mois de janvier 1620, Louis XIII sur les conseils de Brulart de Puisieux et de Jeannin revint sur son imprudente décision. 152 vos prédécesseurs ont esté souvant assistez et principallement le feu Roy vostre père de très heureuse mémoire en la desfence de sa maison, de sa personne et de sa légitime succession, lequel estant à cause de son mariage, si estroictement allié avec le roy de la Grande Bretagne, outre l’alliance généralle avec les villes et princes protestants /157/ d’Allemagne, seroit sans difficulté assisté et secouru par ce Prince prudent et équitable, qui a toujours affectionné le bien de vostre Royaume, quy l’intéressoit en cette occurance, s’il voioit que sous un faux prétexte et par une comune delibération on voulust courir à la ruine de son gendre et entreprendre sur ses Ettats héréditaires et patrimoniaux parquoy si V. M. avoit à prendre résolution d’assister l’un ou l’autre. J’estime, Sire, qu’il seroit de vostre prudance et de vostre service de protéger les alliances des plus asseurez alliez de vostre couronne, et de les assister et secourir s’il n avoient besoin pour arrester le progrès que la maison d’Autriche et d’Espagne pourroient faire au désavantage de leurs Estats s’ils de trouvoient foibles, ainsy qu’il a de tout temps esté pratiqué par les Roys vos prédécesseurs, qui ont toujours favorisé ceux que cette maison a voulu oprimer. Pour cette raison le Roy Henry 2e prit en sa protection les princes protestans d’Allemagne contre l’empereur Charles V, et le feu Roy, vostre père, aussy toujours favorisé les Estats des provinces unies des Paîs-Bas, quoy qu’ils soient de la Religion réformée et Vostre Majesté à son exemple et suivant ses maximes a assisté ouvertement l’électeur de Brandebourg et le duc de Neubourg en l’affaire de Clèves et de Juilliers pour empescher le dessein de l’Empereur et du roy d’Espagne qui sous divers prétextes se vouloient emparer de ceste succession et depuis pour semblables raisons le duc de Savoye a ressenty les effects du secours de Vostre Majesté laquelle on essaye de persuader que c’est à la Religion Catholique qu’on en veut, qu’elle est en péril en Allemagne, pour ce que les Estats de Bohême ont esleu un nouveau Roy, desquels disent au contraire, que c’est pour maintenir leurs libertez, les droits et privilèges sous lesquels ils sont nez et les loix establies en ce Royaume, tant pour la Religion que la police lesquelles ont (disent-ils) esté enfraintes et violées avec dessein /158/ de le rendre héréditaire, encore que de tout temps il ait dépendu de la libre élection des Estats du païs ! Quoy que s’en soit, Sire, c’est chose digne du zelle et de la piété de V. M. d’avoir soin de la Religion dont vous faites profession, voire de la desfendre si on la vouloit oprimer et semble que si l’aprehention et desfiance qu’en ont les Princes ecclésistiques et autres catholiques d’Allemagne, il sonr raison de l’armer en meurs terres, pour empescher qu’on n’entreprenne sur leur Religion ny sur leurs Estats, pourveu qu’ils en demeurent là. Ce que je croy qui a sy impossible veu les artifices dont on use pour les porter plus avant sans l’entremise et authorité de V. M. laquelle seule pouroit retenir et les uns et les autres, leur faisant cognoistre qu’elle se veut intéresser pour maintenir la paix et le repos en Allemagne dans la jouissance des privilèges et communes libertez du païs tant en ce qui est du gouvernement politique que de là Religion et d’assister ceux qui les voudroient observer et entretenir contre ceux qui les voudroient violer et enfreindre et pour parvenir à un tel bien, si V. M. prend cette résolution, il faudroit qu’au plustost elle moïennast la tenue d’une diette ou les Roys ou Estats voisins non interessez fussent conviez d’intervenir par leurs ambassadeurs, pour d’un commun contentement rechercher les moyens les plus propres et convenables pour oster la cause et les prétextes des armes, asseurer la Religion pour relever les catholiques de crainte et de deffiance, affermir l’authorité de l’Empereur, qui se trouve maintenant fort affoiblie et esbranlés et ainsy esteindre le feu qui menace d’allumer toute l’Allemagne, mais aussy toute la chrestienté, si bientost il n’y est pourveu en danger que l’ennemy commun du nom chrestien, ne prenne occasion de profiter de ses divisions et peut-estre que dans les difficultez que l’expériance de quelques mois fera voir aux vus de ceux autres de pouvoir venir à bout de leurs desseins par les armes. Il se pouroit /159/ trouver des ouvertures de quelque accord et raisonnable accomodement dont la gloire retomberoit sur V. M., laquelle par ce moyen, ainsy que les Roys vos prédécesseurs se rendroit comme père commun et arbitre de la paix publique de l’Empire et de l’Europe. Voilà, Sire, ce que j’ay estimé devoir représentent sur ce sujet à V. M., laquelle je suplie très humblement de vouloir prendre en bonne part, comme procédant d’un vray François et très fidelle à vostre couronne, qui prévoit le mal et les inconvéniens qui peuvent arriver de toutes parts, et l’issue des armes bien douteuse et incertaine, laquelle, par une juste punition de Dieu, pourroit enfin tourner à la ruine de ceux qui par la guerre veulent violenter les consciences, au péril mesme de la Religion qu’ils veulent prendre pour prétexte de leurs armes. Et en cest endroict, je prieray Dieu, Sire, qu’il continue à espandre ses sainctes bénéditions sur Vostre Majesté, avec accroissement de toute sorte de prospérité et grandeur. 153 Archives nationales, 1 AP 397/II/155-159 1620 Au cours du premier semestre de l’année 1620, les brouillons s’assemblaient à Angers autour de la Reine-mère. Le 4 juillet 1620, Louis XIII décida de crever l’abcès et, par la Normandie, marcha sur Angers. Mécontent du peu de cas que la Cour et le souverain faisait de lui Henri de La Trémoille, au grand désespoir de sa mère et de son épouse, offrit ses services à la Reine-mère. Mais l’armée royale bouscula l’armée des princes le 7 août aux Ponts-de-Cé et la paix fut conclue le 10 août, avant qu’il n’ait pu rassembler les troupes dont le commandement lui avait été confié. Il ne lui resta plus qu’a faire amende honorable devant le souverain lorsque celui-ci se rendit à Poitiers. La paix conclue, Louis XIII marcha sur le Béarn pour y faire rétablir le catholicisme. A la suite de cette décision, l’assemblée protestante réunie illégalement à La Rochelle décida la prise d’armes. En Allemagne, la bataille de la Montagne blanche le 8 octobre 1620 mit fin aux chimères du roi de Bohême, neveu du duc de Bouillon367. Notons que Frédéric de La Trémoille était alors aux cotés du roi et de la reine de Bohême. 1620 est la dernière année pour lesquelles nous possédons des lettres du duc de Bouillon à la duchesse de La Trémoille et à son neveu. La goutte dont il souffrait depuis plusieurs années, l’empêchant désormais d’écrire. “ Il n’écrir plus de sa main, c’est ce quy l’empaiche de vous rendre ce devoir ” écrit Elisabeth de Nassau dans sa lettre du 25 septembre 1621368. Henri de Bouillon était seul à Sedan avec son fils aîné Frédéric et sa fille Henriette, son épouse était toujours dans le sud-ouest avec son petit troupeau. Elle visita ainsi successivement ses terre de Montfort, Limeuil, Nègrepelisse et Castillon. Au mois de novembre, elle se rendit à Thouars pour assister à la naissance le 17 décembre de son premier petit-fils, le prince de Tarente. Après avoir passé les fêtes de Noël et du nouvel an à Thouars, Elisabeth de Nassau prit le chemin de Sedan369. Elle passa par Loudun, l’Ile-Bouchard, Tours, Amboise, Blois où elle rencontra la Reine-mère. Après 17 mois, d’absence, elle arriva à Sedan dans la première quinzaine du mois de février. 188 9 janvier 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Le Sr. de Châteauneuf370 ariva icy dimanche et an est party comme le baron Dona371, quy va an Angleterre, ainsy que je l’escris au long à Monsieur de La Forest. Mme l’Eslectrisse est an doute où elle desmeurera, sy les afaires vont à une antière rupture. Elle m’an a demandé mon avis, je esté fort ampesché à le luy donner, encores ce n’a esté qu’avec des sy. 367 Sur cette bataille Cf. Olivier CHALINE, La bataille de la Montagne blanche (8 novembre 1620). Un mystique chez les guerriers, Noesis, Paris, 1999. 368 Archives nationales, 1 AP 335/312. 369 Le 6 janvier 1621, Duplessis-Mornay écrivait à André Rivet : “ J’attends ce jour d’huy Madame de Bouillon, qui s’en retourne à Sedan, enrichie d’un petit-fils ”. DUPLESSIS-MORNAY (Philippe), Mémoires... contenans divers discours, instructions, lettres & depesches par luy dressées ou escrites [...] depuis l’an 1600 jusqu’à l’an 1623, op. cit., tome II, p. 514. 370 Charles de Marconnay, sieur de Châteauneuf, d’une famille huguenote du Mirabelais, accompagna Frédéric de La Trémoille lors de son périple en Allemagne, Autriche et Bohême. 371 Le comte Christoph zu Dohna (1583-1637) un émissaire du roi de Bohême. Il devint en 1629 gouverneur de la principauté d’Orange. 154 J’ay esté bien marry que Monsieur le conte de Laval ne soit venu issy passer les festes, cella ut anpesché ce quy c’est passé à Charanton372. On prans plaisir à formanter cella. Je me crins que les fammes n’y contribue. Cepandant, j’estime que vostre sagesse y doit pousser afin que le scandalle du lieu cesse et les inconvénians au dehors n’avoient pour moy. L’on me fet connoistre que qy puisse, cella y sera porté avec soing et diligence. J’ay commandé au Sr. de Bonnefoy de vous mander le conte et me mander l’estat où il est. Je ne sçay si le Sr. de Chasteauneuf a charge de parler de son voïage an Boesme. Si ne l’a eue, j’estime que si vous luy voulés anvoier qu’il ut esté fort bon de le faire santir de della, d’autant qu’il ni sera sans y avoir grande considérassion /2/ de la part du Roy, de la sienne que de tous autres. Jusques issy, il se voie an ces afaires choses divines où les hommes n’ont point de part ce qu’il faut espérer continuera pour avoir du ciel l’assistance de ramercier les grandes recherches et presparatif qu’ils se font pour le ruiner, l’Angleterre y va bien lantemant. Je crins que nostre assamblée aura peine de choisir ung bon conseil et qu’il soit aprouvé. Dieu les veuille bien conduire et me donne de quoy vous tesmoigner combien vous estes, Madame, honrée et aimée de Vostre plus humble frère et obéissant serviteur. Henry de La Tour er A Sedan, ce 9e jan . Archives nationales, 1 AP 434/68 189 janvier 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vous sçaurés par Justel toutes les causes de son anvoi, quy visent et au public et au particulier. J’atans de sçavoir l’esfet de l’ambassade de Messieurs de Lesdiguières et Chastillon quy ont la conduite et les conseils tous contrère, sellon mon jugemant, au servisse du Roy et à celluy de nos Esglises. Je ne le dis qu’à vous, n’aïant Justel chargé d’an parler aucunemant. On n’an demande mon conseil, je ne mandrai aussy à la donner. Vous sçaurés par Brestel la charge qu’il a de parler au Roy. Ses princes ont désiré qu’il passat issy celuy qu’il aména. Je fais seconder ceste nesgossiassion par Justel, quy se communiquers pour cela avec ledit Berstel. La lettre que j’ay escrite au Roi a esté louée par della, et vous dis, Madame, que le Roy a ung beau jeu an main et plus aisé qu’ils ne le jugent et sçay-je pour plus avantageus qu’ils ne sont sages pour le conduire d’issy à vous et qu’il n’an sorte. Il faut mener au moins les esfets du Roy à la neutralité et cella autant par respects de ce quy se mestra antre luy que par la charité et almour au bien public. On mande une recherche curieuse de Monsieur le Prince avec la maison de Guise. Il y trouvera beaucoup pour eus, mes que dit mal pour luy personnellemant sans celluy de sa maison. Voiés et oïés, Madame, la Contesse et Monsieur le Conte qu’ils donnent à leur qualité publique ce qu’il doivent recepvoir du général an le retirant des misérables et funestes divisions quy s’y préparent, desquelles je ne participeré par la bresveté de mes jours ny aussy durant isseus, ny aideray ains seulemant à ce que Dieu et ma patrie m’oblige. Pour Monsieur le comte de Laval, il est à souheter que les afaires privées et publiques du roy de Boesme se trouvent acommodées pour le recepvoir. J’atans avec impassianse ce qu’on aura fet à Loudun373. Donnés-moy si vous plaist à vostre commodité de vos nouvelles et je vous desmeureray, Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour 372 Frédéric de La Trémoille trouvant la première place vide au temple de Charenton l’avait occupé. Il en avait résulté une querelle avec le comte de Châtillon qui estimait que cette place lui revenait (Cf. la lettre de la duchesse de Bouillon à sa soeur du 13 janvier 1620). 373 Le duc avait d’abord écrit : Saumur; 155 Archives nationales, 1 AP 434/107 190 2 février 1620 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Je ne viens que de sçavoir tout à ceste heure que l’on vous escris par un page que Monsieur mon père me vient d’envoyer estant tout prest de s’en aller au presche. J’ay esté extremement resjouy d’entendre le continuation de vostre bonne santé. On se porte fort bien icy. Monsieur mon père vit à cest heure d’un fort grand régime. Il mange des pruneaux en se mettant à table le soir, ne mange quairre que d’une viande et pour son dessert que du biscuit et point du tout de fruict, et prend de la poudre digestive. Je finiray celle-cy le temps ne me permettant de la faire plus longue en vous asseurant que je seray toute ma vie, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Fréféric-Maurice de La Tour De Sedan, ce 2e Febvrier 1620. Archives nationales 273 AP 180 191 13 février 1620- Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Ce laquais est arivé à ce matin et soudain je l’ay redespesché, afin de satisfaire à vos deus commandemans pour l’agreassion de mon logis. J’avois redespesché ung messager que Gobaille m’avoit anvoié, par lequel je luy mandois de ne pouvoir rien sy bien faire que ce quy vous seroit a gré, vos commandemans luy estant la règle de son servisse la plus assurée pour me complaire. Vous trouvéz ung estrange direction d’afaires. M. de Lesdiguière est an crinte ou an une spessiable obligassion de faire tout ce que l’on voudra, puisq’il n’a voulu ouïr la créiance de Marbau374, qu’on présente de Bullion pour la confianse qu’on vous a monstré désirer à Saumur, la mienne est assée à donner et à moy de la resceuillir d’otruy pourveu qu’on me croit, n’avoir de buts à ma grandeur, ny à mon profit, qu’après que le général aura le sien et que l’examen de mes actions le vérifiera, ainsy qu’on assure ma confianse par telle desportemans bien vérifié par père, gendre et sans comissaires comme Marbaut, nous seront très fassilles à nous communyquer. Je n’ay but, ny conseil privé qu’avalle à estimer que nul vray huguenot ne peut tant faire pour luy et les siens qu’en la grandeur et sûreté de nos Esglises. Il faut voir le partemant du Plessis et quelles sûretés ils demanderont les ung des autres /2/. Il faut vois ce que raporteront les deus israélités de Bellujon et de La Fontan, si l’assamblée pour ne dessobéir aura se séparé, sans desputer, ny refuser ou recepvoir ce qu’on leur présente avec promesse de se restrouver ansamble à La Rochelle si les provinces l’ordonne, ils ne seront criminels ny n’auront contrevenu à leurs fonctions, ny abandonné le Béar[n]. Je croy anvoiée bientost quelqu’un à la Cour sur une lettre que j’ay eue du Roy avec sa desfance pour faire des levées. Vous aurés Madame bien sceu l’issue du voïage de Brantes375 et comme M. le Prince estant convié de l’honneur d’une promesse de Monsieur de Luxembourg, que le dit prince a tenu de escrire 374 Marbault était le secrétaire de Duplessis-Mornay. 375 Léon d’Albert († 1630), sieur de Brantes, était un des frères du duc de Luynes. Il épousa par contrat du 6 juillet 1620 Marguerite-Charlotte de Luxembourg, fille de Henri de Luxembourg, duc de Piney, prince de Tingry. Le prince de Condé avait fait ce mariage. Il s’agissait d’un mariage magnifique puisque outre la maison de Luxembourg et les biens, le mari de Mlle de Luxembourg héritait également du duchés et de la pairie. 156 de sa main, par laquelle nous nous promestions de marier nos anfants pour ôter la raison d’an parler pour d’autres. Il dit qu’il n’avoit garde que cela feroit panser qu’il auroit inteligence avec moy. Je n’ay jamais pu lire le non de celluy à quy vous me dites avoir parlé du voïage de Monsieur le conte de Laval. Madame aus hommes il n’y a foy, honneur susfisante et moins d’amour vers le public. C’est pourquoy il n’an faut rien atandre ny se promestre une suite de prosséders, ains desmeurer /3/ aus actions quy despandront de nous dans le juste et où il faudra par quelque contrainte despandre d’autruy, estres assuré que ce qu’on an recepvra sera pour nous faire desfailir à nostre debvoir ou bien par crinte que nous leur pourrons nuire. Je plins bien la perte du prossés et vous désire aus autres meilleure issue. Les Estats sont près d’anvoier des ambassadeurs extraordinaires. Les Arminiens et Remonstrans (?) y font tousjours de la peine. Les afaires an Bohesme et Alemagne ont pour avoir bien des peines. Quoy qu’on vous dit et quy vous le dit, ne vous fiès à Burstel. Je m’esbaïs que Vilarnou n’est pas revenu d’Alemagne. M. Tillenus sans va376, devenu très Arminien377. Je croy vous escrire dans peu, quy fera finir ma lettre an vous assurant qu’il n’y a personne au monde sur quy vous avés plus de pouvoir que sur Vostre plus humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce dimanche 13e febvrier. Archives nationales, 1 AP 434/127 192 2 mars 1620 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, J’ay receu celle qui vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire, ayant eu un grand contentement d’y apprendre la continuation de vostre bonne santé et le commandement que cous avés faictes de continuer à bien faire auquel je tascheray d’obéir le mieux qu’il me sera possible et me conformer à toutes vos volontés vous m’avez faict un commandement fort agréable de solliciter vostre retour j’y apporteray tout ce que je pourray /2/. Je souhaitterois infiniment que mes prières peussent avoir lieu. Nous recevons icy souvent des lettres de ma sœur378 dont Monsieur mon père s’en loue grandement. Je pense que nous aurons fort tost icy Monsieur le comte de Laval379 qui s’en va en Bohême. Monsieur de Châteauneuf n’est pas encore de retour. J’escrivis à La Royne de Bohême par Monsieur de Vilarnoul. Il y a quelque temps que l’on n’a pas receu de nouvelles de ce pais là. Monsieur le marquis de /3/ Brandenbourg m’a donné un cheval d’Hespagne, un chien de fort rare poil que je souhaitterois à mon frère, que j’ay grand envie de veoir, un arquebuze d’Allemagne et une paire de pistolets. Il me fait l’honneur de m’aymer. Il me faut tous jours parler Allemand avec luy n’entendant pas le François. Je finiray celle-cy en vous asseurant que je demeureray toute ma vie, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour 376 Daniel Tilenus, né en 1563 à Goldberg en Silésie, fut appelé à Sedan en 1602 par le duc de Bouillon où il devint professeur de théologie. Il eut des dissensions très vive avec Pierre du Moulin. Daniel Tilenus avait été appelé par le roi d’Angleterre Jacques Ier, mais il préféra rester finalement à Paris où il mourut en 1633. 377 Partisan du libre-arbitre, les Arminiens niaient la prédestination que défendaient les Gomaristes. 378 Marie de La Tour d’Auvergne, duchesse de La Trémoille. 379 Frédéric de La Trémoille, comte de Laval, frère cadet de Henri de La Trémoille. 157 De Sedan, ce 2e mars 1620. Je viens de recevoir une de vos lettres du 15 de febvrier par un messager que M. Justel a envoyé de Paris. Il n’est arrivé qu’à neuf heures du soir. Archives nationales 273 AP 180 193 7 mars 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’anvoie ce laquais porter l’arest à Messieurs les desputés qu’ils ont désirés. Il y a long temps que je l’ay donné sy les choses arivoient comme elles vont, j’escriray par le cosche à nos bien aimés anfants. L’avis de Monsieur de La Trimoille estoit bon. Que désir les antremesteurs de ceste desclarassion ? Madame la Contesse ne doit estre mal contente sy on marie Monsieur son fis avec Madame. Je suis Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 7e mars. Archives nationales, 1 AP 434/82 Sans date - Sedan Mémoire du duc de Bouillon380 ... pasage de la desclarassion qu’on a feite au parlement est d’une grande conséquence, d’autant qu’on ôte la liberté de nesgossier le gré des choses qu’on cèdera pour avoir la pes et met on là maintien de l’hautorité du Roy à l’estroit pour passer outre, si ne la vont bien fort afoiblir, je considère bien qu’il y a une eschapatoire que les peines ne courent qu’après la significassion qu’ils tandront autant qu’ils vousdront, nonobstant ce prosséder est considérable. Je ne sçay le pouvoir des desputés, mes il y a trois choses à trester : - la première satisfaction à nos principaus grief ; - la seconde l’afaire de Béar[n] ; - la troisième favorable response aus caiers. Pour le premier on s’est ouvert, mes avec du temps pour y satisfaire. Ce qu’on ne peut refuser, m’estonnant qu’il y ait des subjects quy veulent et s’osfrent de caussionner la parolle de leur Roy et qu’il y an ait qu’il samble mestre cella pour gage de la bonne foy. Cela est ny et rien au Roy et ridiculle à tous autres. Pour le Béar[n], mon avis est qu’il faut assurer leurs afaires ou périr avec eus, ce qu’ils ne feront si on fet ce que l’on doit /2/. Pour la response aus caïers, on ne peut prandre que des promesses sçavoir donc sy sans avoir des fets et réparassion actuelle et sans sûreté aus afaires de Béar[n], on doit recepvoir les ofres, faire des desputés et se retirer avec le paiemant des frais. Ou bien sans refus, ny aceptassion, se sesparer. An l’ung, ny an l’autre, on ne ce rand criminel. Au premier, on contrevient au pouvoir donné, aus promesses lesquelles on n’oblige à ne requérir que jusques où l’assamblée aura convenu mesme mieux pour le Béar[n] et ainsy on est resduit dans d’assés petites concessions ; et ancores l’observassion mal assurée, an dernier vous lessés le Roy an sa plaine hautorité de faire antretenir les Estats et d’avoir le gré sans contrinte de ce qu’il trouverra bon de faire. 380 Ce Mémoire non daté clôt la série des lettres de la main du duc de Bouillon dans le registre 1 AP 434. 158 Vous lessés les provinces à ressantir ceste obligassion ou à ressantir, et san plindre du desfaut, vous ampeschés le mauvés exemple de la non valleur des pouvoir et ainsy l’assurance que les ressolussions publiques doivent porter aus particulières /3/. C’est à ces Messieurs les antremesteurs de garantir la commitassion de la publicassion au parlemant et donner des condissions resonnables. Ou bien à aimer mieus que, sans rupture, on lesse les choses où elles sont. Ceste incertitude veu les divers projects qu’on fet anlèvra la plus part moins exécutables et fera panser à acommoder plus tost qu’à rompre partout. Je pansois anvoier cessy par le messager, mes jé mieus aimé le fier au vostre. Vous le monstrerés, s’il vous plaist, à Justel. J’atans Chasteauneuf ou Fassin que j’ay anvoyé à Heidelberg. Archives nationales, 1 AP 434/149 194 17 mars 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’ay dit tout ce que j’ay à dire. J’atans de sçavoir ce qu’on aura dit à nos desputés. Sy on suit mon avis, j’adjousteray qu’il faut prier M. de Berteville et Manial381 de ne partir de la Cour qu’en les promesses n’aient arivé à ce que qu’elles auront à faire ou à dire. Vous aurés toutes nouvelles de Boesme. J’usse bien désiray sçavoir ce qu’a raporté Mme de Longueville et si la Raine viendra. Je ne sçay pourquoy j’auré de la paine sur Monsieur de La Trémoille ne saschant par pourquoy j’an ay. M. le Prince an s’an venant de Soissons à Raions (?) a dit à ung gentilhomme, qu’il a cru estre de mes amis, que je faisois de grandes levées et que je despandois de la Reine-mère, adjoustant quelques propos de honte contre moy. Sy vous trouvés à propos Mme la Princesse, luy diré, s’il vous plaisoit, que les bonnes grasses de son mary sont à sa liberté de m’an honorer ou m’an priver sans que je m’an plaigne ou me lessant sans se souvenir de moy, mes que de me haïr et faire mauvés ofisse, que j’auré subject de dire pour quoy il ne le doit pas faire et que à cella j’auré de la nescessité de le faire avec une assurée justificassion par la nescessité où il m’y aura contrint, et cella an sorte que je garderé ce que je dois à sa nescense. Vous m’obligerés, Madame, si vous plest prandre côté et serés servie fidellemant de Vostre plus humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 17e mars. Archives nationales, 1 AP 434/110 195 21 mars 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Quant je voys le prosséder qu’on tient vers nostre assamblée et que je joints ce qu’on voit dans l’estat des afaires j’est tiens les ungs aussy fous que les autres avec des, de crindre autre mal que celluy procuré par les leurs pour moiens de faire ce qu’ils conseillent. Je ne puis rien mander à Touars que je ne sasche la ressolussion de l’assamblée, vers laquelle je ne change pas d’avis. Les propos de Monsieur le Prince sont interprestés dans mon esprit an une pasion que ma plume ne vous peut bien exprimer ny jugeant aucune ingénuité les esfets le montreront. 381 Samuel Puchot (1569-1638), chevalier, seigneur de Berteville ou Bertheville, un normand, conseiller du Roi en ses conseils d’état et privés, gentilhomme ordinaire de sa chambre et Etienne Maniald, avocat au parlement de Guyenne et ancien de l’Eglise de Bordeaux, étaient les deux députés généraux et étaient du nombre des députés élus le 22 février 1620 pour porter au souverain les voeux de l’assemblée de Loudun. 159 Il va de divers lieus beaucoup de forces pour l’Empereur et le duc de Bavière382. Le retour de vostre soeur aura esgart sur l’estat des afaires généralles. Je le désire bien fort, quoy que, Dieu mercy, je n’aie point de doulleurs et pour les prévenir, je me feray seigner dans trois ou quatre jours. Vous suppliant, Madame, vous assurer de la volonté à vous servir de Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 21e mars; Archives nationales, 1 AP 434/124 196 24 mars 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’atans de sçavoir la ressolussion qu’aura pris l’assamblée n’aïant rien à adjouster. J’escris à Monsieur de La Trémoille pour Roïan d’anvoier à Turenne ou à Limeuil383 (?) où sera vostre soeur, à quy je mande de faire cest argent ce qu’elle pourra a peu près faire du nostre si l’on peut atandre ce temps là, sinon je luy mande de le prandre à rante. Elle y fera tout ce qu’elle y pourra. Je croy M. vostre fis dessirant d’un, donne à nostre fille de satisfaire tousjours ce qu’elle a de la ramplir d’ung bonheur de la jouissance antière de l’amitié de son mary, auquels mon amitié est toute antière et à vous Madame, ung désir de vous randre tousjour servisse que vous n’avés rien sy aquis que le servise de Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 24e mars. Archives nationales, 1 AP 434/81 197 30 mars 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Ung chascun a de ces peines, vos prossés et nous issy, nos voisins, Dieu nous an gardera et vous si luy plaist. De Monsieur Vertamont, j’atans la ressolussion de Loudun. Justel me mande que mon avis est bien blasmé. cella ne m’an fet despartir, estimant avoir des raisons irresproschables pour le maintenir anvers tous gents de bien et d’esprit. Je vous suplie de commander que ma lettre soit anvoiée à ma fille quy ne m’a rien mandé de cella du comte d’Orval384, aussy ne luy an mandé-je rien. Tenés-moy an vostre bonne grasse et je vous desmereray Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 30e mars. Archives nationales, 1 AP 434/80 382 Maximilien Ier de Bavière (1573-1651), le plus puissant des princes catholiques allemands, avait fondé le 10 juillet 1609 la Ligue catholique. Le 8 octobre 1619, il avait promis son aide à l’empereur Ferdinand contre la promesse de celui-ci de lui transférer la dignité électorale du Palatin. 383 Limeuil, à l’Est de Bergerac, est une place stratégique sur un promontoire au confluent de la Dordogne et de la Vézère. 384 François de Béthune (1598-1678), comte d’Orval, fils de Sully et de sa seconde épouse Rachel de Cochefilet. 160 198 2 avril 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Chasque jour porte sa nouveauté, Dieu veuille tout conduire à sa gloire. C’est mon désir et mes conseils de procurer le repos. Il faut voir ce quy se produira et sur cella aller au bien. Si on sert à le faire qu’au moins nous n’ampeschions pas qu’il ne se fasse. Vous voirés si vous plaist la lettre de vostre soeur. On me dit que Monsieur le conte de Laval doit bientost passer par issy, mes puisque ne m’an mandés rien, je ne sçay qu’en croire. A quelque heurs qu’il arive, il sera le bienvenu et luy randray tout servisse, et à vous celluy que vous a promis, Madame, Vostre très humble frère et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 2e avril. Archives nationales, 1 AP 434/55 199 3 avril 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’anvoie le Sr. de Briquemau385 voir vos anfans. Il vous dira le portemant et le partemant de Monsieur le conte de Laval, continuant à estimer qu’il doit lesser passer ceste année sans cercher les armées, ny aussy sans aproscher si près qu’il luy fut mal étant de ny aller. Ses Messieurs de la faveur seront conseiller par les inconus mais quy les talonnent à mon avis de la modérer. J’aprans qu’ils vous ont fet mangé, boire mine que de coutume et qu’il mandent Monsieur de La Trémoille. Ils peuvent sçavoir que si luy et moy mesme conclu à la sesparassion qu’elle ne se fut feste, nous la voulions non par antrer des faveurs, mes par ce que nous l’estimions utille au public. M. de Chastillon m’a fet parler de sa charge an Olande386 pour mon fis, je l’an remercie n’an voullant point, afin que si vous y pansier pour Monsieur le conte de Laval, vous saschier qu’il san veut desfaire dont vous doint repos. Je trouve bien estrange la lettre de Canaples387 an Alemangne contre la Boesme et l’Union. Quiretu et nos ministres an devraient parler, les derniers craignant la révolte, alant où il nota nul exercisse. Aimés tousjour Vostre bien humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour 3e avril. Archives nationales, 1 AP 434/73 385 Jacques de Briquemault (1582-1642), sieur de Prémartin et de Saint-Loup, lieutenant de la compagnie d’ordonnance du duc de Bouillon. Il épousera en 1629 Elisabeth de La Marche-des-Comtes, demoiselle d’honneur de la duchesse de Bouillon, fille aînée de Antoine de La Marche-des-Comtes, sieur de La Roche, gouverneur de Sedan, et lui succédera dans cette charge en 1640. 386 Gaspard de Coligny (1584-1646), comte de Châtillon, avait été nommé en 1614 colonel général des gens de pied français entretenus en Hollande. 387 Charles de Créqui (1578-1638), seigneur de Canaples, gendre de Lesdiguières, futur maréchal de France, était en mission en Allemagne 161 200 10 avril 1620 – Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je vous supplie très humblement de me pardonner si j’ay laissé passer deux coches sans me donner l’honneur de vous escrire par le premier n’ayant peu pour l’amour de Monsieur le comte de Laval, qui arriva le samedy à neuf heures du soir388. Le lundy nous fusmes à la chasse ensemble tout le long du jour. Par le dernier, Monsieur mon père me l’ayant dépêché, il a eu une grande joye d’entendre la guérison de mon frère, en ayant esté en grande peine. Marat n’arrivant /2/ pas si tost qu’ll cryoit. Il envoye M. de Briquemault à Thouars et part demain fort matin. Monsieur le comte de Laval part demain et fera son voyage partie en coche, partie en batteau et en chevaux de louage, il va tout droict d’icy en Hollande. Il a donné un cheval de bague à Monsieur le marquis de Brandebourg qui est tout asseuré de demeurer icy Monsieur son frère luy ayant mandé il semble s’en resjouir. Je souhaitterois de pouvoir quleque chose à ce que vostre retour fust bien /3/ tost mes prières ny défandront. Vous me faites trop d’honneur de vouloir avoir soin de mon argent. Je tascheray de faire toutes les choses que je croiray vous agréer et rechercherés les occasions de vous tesmoigner le désir que j’ay de demeurer toute ma vie, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur Frédéric-Maurice de La Tour e De Sedan, ce 10 apvril 1620. Viuans me sert bien à ceste heure et l’ayme bien fort. Archives nationales 273 AP 180 201 14 avril 1620 - Sedan Madame, J’atans de vos nouvelles à vostre retour de la Cour, où vous n’aurés guieres avancé vos affaires. On sçaura l’arivée de Monsieur du Maine an Guïenne389 et juger quelque chose de la suite de cest afaire. Après quoy j’anvoiré quelqu’un voir nos anfans et y porter mon avis sur les ocurrances du temps, lequel passera vous voir, estimanr que Monsieur de La Trimoille ne se doit haster d’aller à la Cour, quoi qu’elle aprosche de luy, qu’il n’aie de mes nouvelles. J’an atants de vostre soeur pour y savoir, si plest à Dieu, la guérison de Henry de quy je sans bien le mal où il est céans an bonne santé390. Le Sr. Bartolle391 vous dira mon avis sur le voïage de Monsieur le conte de Laval quy est grand, qu’il n’a ancore pris de force pour andurer l’air an tous climas et an divers païs, ansemble les fatigues d’une armée. Cella dit d’afection et de considérassion que j’ay aus choses où je voiré vos afection portée ainsy, que le vous a promis, Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour Ce 14e avril. 388 Frédéric de La Trémoille est arrivé le samedi 4 avril 1620 à Sedan. Le 10 avril est le vendredi suivant. 389 Henri de Lorraine (1578-1621), duc du Maine, fils du duc de Mayenne, avait rejoint les mécontents qui s’étaient réunis à Angers autour de Marie de Médicis. Il possédait en Guyenne le duché d’Aiguillon. 390 Henri de La Tour d’Auvergne, futur vicomte de Turenne, avait été très malade au début de l’année de 1620. 391 M. Berthold, originaire de Silésie, avait été le précepteur de Frédéric de La Trémoille. Il l’accompagna lors de son Grand Tour en Europe qui fut interrompu par la bataille de la Montagne blanche. Ses lettres couvrant les années 1617-1623 sont conservées à la côte 1 AP 354. 162 Archives nationales, 1 AP 434/100 202 23 avril 1620 - Sedan à M. de La Trémoille Monsieur, mon fis, j’ay ressu de vos lettres où vous vous festes le cajoleur, an m’escrivant des cajoleries pour me remerssier de ce que j’ay escrit pour vostre affaire de Roïan, pouvant estre tousjour assuré que ce quy sera à moy sera porté avec mon plaisir à ce quy servira de vostre grandeur, vous aimant et ma fille au de là de moy mesme, n’aïant rien à mon aage quy la soulage tant que lorsque je vous sçay tous deus jouissant des bénédictions de Dieu au bonheur que possédent ceus quy se possédent ansamble an vostre parfecte amitié. Monsieur le comte de Laval s’an va an Olande, aiant mis, ainsy que je l’ay mandé à Madame de La Trémoille, an grande considérasion si devoit cest esté voiager ou se trouver dans les armées où l’air est mauvés, les fatigues grandes sen esquipage, mesme acommodé pour y vois les ocasions ainsy qu’il le faut. J’estime que Monsieur le prince d’Orange jugera mieus de cella que moy. J’anvoie le Sr. de Briquemau pour vous voir et ma fille, me raporter l’estat de vos santés. Vous voirés ce que j’escris à /2/ M. de La Forest à quy j’ay escrit de ne partir d’auprès de vous jusque à ce qu’il ut de mes nouvelles. Il faut faire tousjour bien et avec une bonne prudance s’aider des ocasions au moins ancore qu’il n’an reussisse rien. On a ce contantemant d’avoir fet ce quy estoit an nous. Je n’ay rien de Boesme despuis le retour d’Austrische du conte de Buquoy392 avec bonté et porte ressue par le prince d’Anhalt393. Nous avons les forces du Roy an Champangne, qu’on dit devoir aller an Alemangne394, quy ne sont puisantes pour bien faire valoir l’hautorité d’ung si grand Roy. Tout se porte bien céans, priant à Dieu que je sasche le mesme de vous et de ce quy vous tousche, estimant que l’usage de la chasse et des compgnies vous plaira plus que la disficulté de mesnager dans la cour ainsy qu’elle est composée. Je juge imposible qu’il ne s’y change quelque chose antre moy et vous, assurés que je vous donne de toutes mes afections. Vous retiendrés ce gentilhomme autant ou sy peu que vous et ma fille voudrés. Je vous bese les mains. C’est Vostre humble père et serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 23e avril. Archives nationales, 1 AP 434/74 203 4 mai 1620 – Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, J’ay receu celle qu’il vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire du 15 du mois passé, dont j’ay eu un très grand contentement y ayant appris l’entière guérison de mon frère. Je ne manqueray pas de faire tenir le paquet pour Madame l’Electrice de Brandebourg, je l’envoyray dès demain. M. Duverge partant pour s’en aller en Allemagne. Il n’y a que deux jours que j’ay receu une lettre de la Royne de Bohême et une de Monsieur /2/ le duc Louis qui ne me parle que d’un balet qu’il a dansé. Je vous remercie très humblement de la 392 Charles-Bonaventure de Longueval (1571-1621), comte de Buquoy, était un général Wallon de valeur, que l’archiduc Albert, gouverneur des Pays-Bas, avait mis à disposition de l’empereur Ferdinand II. 393 Le prince Christian I d’Anhalt, principal conseiller du roi de Bohême, jouait un peu le rôle de chef de parti parmi les princes réformés Allemands. 394 Les troupes françaises ne sortirent pas du royaume. 163 peine qu’il vous pleu prendre pour mon argent commencant à en avoir besoing ayant acheté deux chevaux pour la chasse à fort bon marché. Je souhaitterois sçavoir forces nouvelles pour vous les mander. Je finiray en vous asseurant que je suis, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan, ce 4e may 1620 Archives nationales 273 AP 180 204 25 mai 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’espère que vous avés pris la peine que je vous ay donnée volontiers de faire tenir tost et suremant ce que je vous ay anvoié. Je crains et presvoy bien du mal ; Dieu an conserve son Esglise ! Je n’obmets à faire plus que l’on ne m’y oblige pour l’ampescher, aïant ce conseil commuable qu’on doit garder la pès dans le roïaume. Les grands presparatif quy se font, premièremant contre le roy de Boesme et ansuite contre l’Esglise. J’an voy surpassant tout ce, ce qu’on se fut pu immaginer, mes aussy voit-on resluire du ciel des ampeschemant quy desmonstre leur ruine. Je ne vous ay rien respondu pour vostre partemant, d’autant que là où vous este et de nos anfans, vous pouvés mieus avoir vostre règle que d’issy, aïant bon besoing que l’on panse à moy, quy dans la fin du mois quy vient voire à moins de vint lieus soissante mil hommes an canpangne quy disent qu’il faut ruiner le huguenot ! Ma santé n’est pas bonne, la goute esveillant d’autres maus, quy me donnent ocasion de croire que mon hôtesse veut aller d’où elle est venue. Cella arivera ainsy que j’an suis assuré par la main de celluy quy fet tout pour bien. Je désire le retour de vostre soeur, mes si elle ne lesse l’ordre qu’elle pourra an nos afaire, elles an pâtiront an absanse an otan les remesdes. Vostre [soeur rémèdie]ra chose dommageable à elle, aus siens et au public, à quoy elle sera aidée puissamant et industrieussemant où elle est. M. Tillenus escrit, issy, que M. Cameron395 luy a porté quatre points de l’un et l’autre fort 396 avant . Je ne mande rien à ma famme que bien de ma santé ; vous pouvant assurer, Madame, de la sincérité du servisse de Vostre plus humble frère et très fidelle serviteur. Henry de La Tour Ce 25e may. Archives nationales, 1 AP 434/102 205 25 mai 1620 – Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, 395 Jean Cameron, théologien, né vers 1580 à Glasgow, vint en France en 1600, enseigna à Bergerac, Sedan, Bordeaux puis en 1619 à Saumur. Carmeron développait des idées sur la grâce et le libre arbitre qui furent plus tard reprise par Moïse Amyrault. Le débat avec Tilenus auquel fait allusion le duc de Bouillon se tint à l’Ile-Bouchard le 18 avril 1620. Après un bref séjour à Glasgow, il vint à Montauban où il mourut le 27 novembre 1625. 396 Tilenus avait été l’adversaire violent des arminiens avant de se rapprocher d’eux. 164 Je n’ay voulu perdre une si bonne occasion sans me donner l’honneur de me ramentevoir en vostre souvenir estant pourtant fort dépourveu de nouvelles pour ce coup. Vous pouvant mander avec grande joye la guérison de Monsieur mon père, s’estant pourmené tout ce matin en carosse, y ayant desjà trois jours qu’il sort. J’ay esté bien ayse d’entendre le bon portement de mon frère et tant de gentillesse, souhaittant bien fort de le veoir. Je feray tout ce que je pourray pour haster vostre retour icy, ayant rien que je désire avec plus de passion comme aussi que vous me croyez toute ma vie, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan, ce 25e may 1620. Archives nationales 273 AP 180 206 29 mai 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, J’escris cesle-cy, ne saschant si elle vous trouvera à Paris, par le Sr. de Briquemau, que j’anvoie porter une lettre à Monsieur le Prince, en laquelle je le suplie de me dire pourquoy il me veut mal. J’espère que vous aurés fet tous mes petit paquet porté par le laquais de mon fis. On bruit de grandes levées an Flandres, mes il n’y a point ancores d’argent donné. Monsieur le prince d’Orange est an Gueldre d’où M. le conte de Laval doit partir. Dieu fortifie les siens contre les mauveses volontés qu’on leur porte et paraschève son oeuvre. J’estime que Justel vous dit ce qu’il sçait. Si ne vous an dit plus qu’il ne m’an mande il ne vous an dit graves et bien diverses. Je suis Vostre très humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour Ce 29e may. Archives nationales, 1 AP 434/85 7 juillet 1620 – Sedan Copie de la lettre de M. de Bouillon à M. de La Haye Monsieur, me voicy sur Beauregard, ayant tous les jours des nouveautez qui paressent plus s’augmenter au mal qu’au bien, qui se doit trouver à esviter le trouble et à affermir la paix à quoy en mes impuissances et faultes interprétations de mes actions et continuation de mesme traictement, je ne laisse et le vous asseure de donner les advis que j’estime y pouvoir servir. On se trompe à user des remèdes pour une cure paliative, il en faut de proportionnez à la maladie. On mande que le Roy va à Ca[e]n, je ne comprens pas ce conseil, contraire à l’ambassade qui va à Angers, non plus que le Grand prieur soit party sans congé et n’aye pensé n’y pourvoir que la porte n’y soit fermée s’il ne la fait ouvrir. Qu’est ce que les mescontentement populaires en Berry. Monsieur le Prince a ses conseils dificiles à changer sinon lorsque le mal luy en a osté le pouvoir. Le passé luy en a fait sentir de rudes secousses. Je crains celles qui suivront pour le Roy, pour l’Estat et pour luy. Quant à moy, j’ay mes actions en ma main, don je les puis garantir de tous blasmes raisonnables n’ayant en n’y n’auray autre but, qu’à servir à Dieu, au Roy et à garentir l’estat de tous inconvéniens, qui fera autrement, ne me trouvera pas favorable. Je le seray tousjours à chercher tous les moyens que je pouray pour vous tesmoigner que vous avés tout pouvoir sur Vostre humble et affectionné à vous faire service. 165 Ce 7e juillet. Archives nationales, 1 AP 497/II/136 207 25 juillet 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Les prosséders d’aujourduy randent nuisibles la vertu et la sagesse qu’on amploie à sa conduite397. Je vous avois fet une despesche quy aura en son ampeschemant par le bannissemant de Justel, ainsi que ce gentilhomme vous dira. Nonobstant je suis sans aucun changemant, ce qui me sera fort disfissille de continuer veu les soings que prant Monsieur le Prince de nuire à tout que la nature et le mérite luy debvroient faire onorer et aimer. Je m’opose vers vous Madame à ce que vous ne sespariés ma fille d’auprès de vous et que de bonne heure vous avisiés à vostre sûreté au dehors et au dedans. Monsieur de La Trimoille, aïant à s’absanter, doit auparavant y pourvoir. Il ne m’a rien escrit de cest afaire d’Oiron. Il faut, ce me samble, s’accommoder avec Monsieur de Roannes398 pour vivre anssamble civillemaant, faisant autremant cella n’aura puisqu’on dessavoue ceus quy ont batu desmeuront aus voies de justisse, laquelle cessant, cella atandra le repos. Si mon avis peut servir à la fermeté de ces opinions pour l’an desmouvoir, je seray bien aise qu’ils voie ce que je vous an /2/ mande. Madame, que de maus ! Que souvant, je cerche an mon esprit de voir quelques adoussissemans, mes an loing, près, de tous côté, je ne voy que mal ! Ceus quy n’ont point Dieu pour arest, sont bien ampeschés ! On m’a chassé mes gents de Paris sans que je sasche pourquoy. Je ne suis aprosché de la Cour parce qu’on ne m’y a convié, ainsy je n’an suis party sans dire adieu, je ne suis dans le roïaume. Ma protection n’a nulle observassions, le Roy ne m’a escrit pour me dire de quy il se plaint ou quy l’ofance. Je suis sans changemant an ce lieu et sans nouvelle obligassion vers quy que ce soit, et néantmoins on me fet ce trestemant nonobstant, lequel je mes desplaisirs du mal et mes afections au bien toutes antières pour servir le Roy et ma patrie, ainsy que Dieu me le commande, et garder ma sûreté ainsy que je le dois à ma famille et à ceus quy sont sous moy, et vous randre, Madame, les servisses et honneurs que je vous ay dès longtemps voué. Vostre plus humble frère et fort fidelle serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 25e jullet. Archives nationales, 1 AP 434/75 208 19 août 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Quelle joie si Dieu nous donne une bonne pes399. J’anvoie Le Conte400 la tesmoigner au Roy. J’estime que Monsieur de La Trémoille se conformera à ce que la Raine luy aura fet antandre et qu’ainsi il aura posé ses armes. Elles s’an vont très fortes en Alemagne. Le marquis Spignola doit estre 397 Cette lettre du duc de Bouillon témoigne du climat de psychose qui s’empara de la communauté protestante au lendemain de la paix d’Angers devant la décision du souverain de rétablir le catholicisme au Béarn. 398 Louis de Gouffier (1578-1642), duc de Rouannez, seigneur d’Oiron, époux de Claude-Eléonore de Lorraine. Il était le voisin des La Trémoille et avec sagesse le duc de Bouillon recommande d’avoir de bonnes relations avec lui. 399 Le 10 août 1620, le traité d’Angers négocié par Richelieu avait mis fin à la seconde guerre de la mère et du fils. 400 Antoine de La Marche des Comtes, sieur de la Roche et de l’Eschelle était le gouverneur de Sedan. 166 prosche de Couelans et l’armée de l’Union à Openan aussi très forte. Madame l’Eslectrisse et toute la paranté ont bien de quoy panser. J’ay envoié ce matin une lettre de Monsieur le conte de Laval, escrite avec jugemant. Il s’an aloit an l’armée,401 où Dieu le veuille bénir. Le Conte vous dira tout ce que nous faisons issy et me raportera si vous plaist ce que vous feites tenant que vostre soeur sera bientost avec vous Madame, à quy je demeure Vostre plus humble frère et obéissant serviteur. Henry de La Tour e A Sedan, ce 19 aoust. Archives nationales, 1 AP 434/116 209 30 août 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je n’auray pas de redites de ce que j’escris à Monsieur de La Trimoille, me promestant que vous voirés ma lettre, Le Conte aura eu l’honneur de voir. Vos conseils ont esté très bons, quoique plus long. Je ne cessois de croire les esvénemans qui ont suivy. Dieu nous donne la pes mes quelle soit sienne. Je veus espérer que Monsieur Le Grand raportera au Roy tout contantemant de Messieurs du Maine et d’Espernon, sinon cella seroit fascheus. Monsieur le Prince, à Paris, a fort assuré l’exécussion de l’Esdit et celle de l’arrest de Béar[n]. On ne croioit pas que le parlemant se relaschant à recepvoir les conseillers. Je n’ay nulle lumière si Monsieur de La Trémoille sçaura. Le Roi a put ou s’il atandra chose de considérassion dont les raisons s’an peuvent minées prandre de près que de long. Je veus espérer que vostre soeur sera avec vous. Il y a fort longtemps que je n’an, n’an ay nouvelles. Pour son passage à la cour des Raines, la response du Conte luy doit donner principalemant devoir former sa ressolussion. Si elle estoit mauvese pourquoy y passer pour n’estre pas bien, vous n’aïant pas à y sesjourner pour nesgossier quelque chose et elle a esté bonne pour de ceste bonne chose, cella fera quelque chose dans le public. Je pose que l’injure du tabouret sera éfassés /2/ ainsy je luy an lesse la liberté et avoir de vos bons conseils; Fedéric a eu la vérolle, mes favorablemant. Il tomba mallade le propre jour que Le Conte partit. Il commanse à se lever. Elle est issi fort commune. Monsieur de Nevers a ses troupes anssamble faute d’argent pour les lissansier, lesquelles font de grands maus. Je n’ay point de nouvelles de Heidelberg et par conséquent de Boesme ; à Paris, ils an peuvent avoir. Spignola a passé le vin, si les vins le rendoit voir, il ne tiendra qu’à eux, leur armée estant plus forte que la sienne402. Monsieur de La Trémoille est aussi retenu à monstrer qu’il se resjouit de la grossesse de sa famme, qu’elle de sa fasson d’avouer. Monsieur le Prince a tenu des propos à Paris quy ne se pourroient pas bien lier à ceus qu’il a tenus à Monsieur de La Trimoille, lequel doit aller considérémant à ce qu’on pourra requérir de luy. Je me promet que vous conserverés vos bonnes grasses avec assuranse d’estre très fidèlemant Vostre bien humble frère et fort obéissant serviteur. Henry de La Tour A Sedan, ce 30e aoust. Archives nationales, 1 AP 434/76 401 Frédéric de La Trémoille qui le 30 juin 1620 avait rejoint avec ses compagnons le roi et le reine de Bohême à Prague, avait quitté cette ville le 4 août pour rejoindre l’armée des Etats de Bohême, commandée par le prince Christian d’Anhalt, alors stationnée à Eggenburg en Basse Autriche. 402 Spinola commençait sans hâte la conquête du Palatinat. 167 210 8 septembre 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Je vous anvoie des lettres quy me sont venues sans adresse. J’ay ouvert la lettre de Bartole, où je n’ay trouvé nulle nouvelle. Je m’avanserois à vous dire mon avis sur celluy qu’il vous demande, mes ceste mauvèse saison me prive d’un pouvoir choisir où vous Madame et Monsieur le conte de Laval y passas an le suivant y trouverier satisfaction. Les armées des nostres et de Spignola sont voisines et sera disfissille qu’il ne se passe quelque notable actions; Nous an avons fet issy des prières publiques pour la conservassions des nostres, quy ont bien besoing de son assistance. Je ne travaille jamès davantage; Dieu les bénie. Henriete403 est au lit, à mon avis, pour avoir la petite vérolle. J’atans des nouvelles de ma famme. Je suis et seray tousjours Vostre bien humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour bre Ce 8e Sep . Archives nationales, 1 AP 434/125 211 28 octobre 1620 - Sedan à M. de La Trémoille Monsieur, je commansse à me plindre de n’avoir eu aucunnes de vos nouvelles, despuis vostre partemant d’issy. J’estimois avoir Monsieur de La Forest comme chose que je jugeoy fort pressée et nescessaire tant pour aprandre vostre estat, celluy des afaires publiques, comme pour vous mander le nostre, tant pour le présent que le jugemant que je fais de l’avenir ; les dispossissions se fortifiant tous les jours à maintenir des armes puissantes et les torner à une guerre de religion, s’ils peuvent taschant par tous moïens de retirer les princes catoliques, ce que je me promets qu’ils ne feront. Ces Messieurs resconnoissans bien qu’il n’y a que fraudes. On me menasse tousjours de siège. S’ils le peuvent, je suis bien assuré de leur mauvèse volonté, mes Dieu quy a esté ma garde, ne me deslivra. Je croy que nos Esglises feront sçavoir, à leurs desputés, la part qu’ils prandront à celà. Et le plus tost est le meilleur, afin que nos desputés an fassent santir sellon les ocasions les santiemans du public. Je me promets, Monsieur, que vous les convierés à cella. Atandant de vos nouvelles, je vous béseray les mains et desmeureray, Vostre bien humble oncle et serviteur. Henry de La Tour bre A Sedan, ce 28e oc . Archives nationales, 1 AP 434/148 212 3 novembre 1620 - Sedan Mme de La Trémoille Madame, Je me suis esbahy de ce que lors du partemant du laquais, vous ne sçaurés les changemans fets an Béar[n] à cest heure. Vous voiés la suite qu’en prandront les afaires de nos Esglise et si le Roy continuera à vouloir garder les Esdits et si le général de la religion estimera debvoir faire connoistre au Roy qu’ils sont nescesseres, non seulemant pour eus, mes pour touts ses subjects de l’une ou de l’autre 403 Henriette de La Tour d’Auvergne (1609-1677) future marquise de La Moussaye. 168 religion, ou bien si le général saura cest avis de quelques ungs que les esdits portent plus de causes de scandales que de sûreté et qu’ainsy ils ne sont utilles au Roy à l’estat ny aus Esglises. Je n’ay eu nules nouvelles des desputés généraus pour sçavoir ce quy s’est fet. J’an ay plus apris par la lettre de Monsieur de Loumeau404, que par autre chose. L’acceptassion de l’assamblée à La Rochelle n’a plus d’esfet pour le Béar[n], Le toure est rendue, les conseillers pouvant estre receus au premier jour. Ainsy le Roy aura donné satisfaction. La compossission des assamblées est feite de desputés quy /2/ ont ung caïer exprès de faire leurs afaire et donner l’eslan aus publiques, ainsy qu’il an pouront recepvoir plus de profit. Vostre soeur fet estat de partir dans huit jours405, quy vous dira mes ocupassions et santiemants quy vont fermes à randre à Dieu ce que je luy dois. Les armées du Palatinat sont voisines et se pourront se chaufer durant l’iver, au feu l’une de l’autre, sans se batre. Vous supliant me continuer vos bonnes grasses et estre assurée du servisse de Vostre plus humble frère et serviteur. Henry de La Tour e bre A Sedan, ce 3 no . Archives nationales, 1 AP 434/78 213 22 novembre 1620 - Sedan à Mme de La Trémoille Madame, Vostre soeur vous aura randu conte de mes pansées. Tout à cest heure, j’ay ressu le paquet que je vous anvoie de Monsieur le conte de Laval, vous demandant pardon d’avoir ouvert la lettre de Bertault, où j’ay apris leur retour406, quy vous ferra moins de soussy lorsque vous le sçaurés an Olande. Dieu veuille préserver son Esglise du mal qu’il paroist estre concerté et deslibère contre elles. Maintenant que la Cour est à Paris, je pouré mieus an voir les actions, n’aïant eu nul avis tant qu’elle a esté eslongnée. La desclarassion vérifiée au parlement est fort expresse, j’ay veu le temps qu’en pareile cas on ut fet antandre ces raisons an obéissant et randus tous debvoirs de subjects, et cepandant on ce fut mis autens moins convenables de se garder contre une ressolution géénrale de ruiner l’Esglise de Dieu /2/. Vous dirés, si vous plaist à vostre soeur que j’ay suivy son avis vers Madame d’Elbeuf407 pour la somme que je n’ay si minuée et pour l’argent contant, j’escris ung mot à Monsieur de La Forest. Je n’escris à ma fille pour laquelle, je prie Dieu de m’an donner de bonnes et heureuses nouvelles. Que ne se peut-on voir ! On peut durant trois mois juger de la forme des presparatif et diriger sa conduite, à quoy on a bien prandre garde à la mauveses foy des hommes. Ce froit, Dieu mercy, n’a rien esbranlé à mes goutes. Honorés-moy de la continuassion de vos bonnes grasses. J’ay ressu la lettre de ma fille. La vitesse du passage du Roy donne des escuses ligitimes à ceus quy ne l’ont veu. Je suis et seray jusques’au tombeau Vostre plus humble frère et fidelle serviteur. Henry de La Tour e bre Ce 22 no Archives nationales, 1 AP 434/120 404 Samuel Loumeau, ministre de La Rochelle de 1594 à sa mort en 1629. 405 Elisabeth de Nassau était alors à Castillon. 406 La défaite de la Montagne blanche a contraint Frédéric de La Trémoille a arrêter son Grand tour en Europe et à reprendre le chemin des Provinces-Unies. 407 Marguerite Chabot de Charny, veuve de Charles Ier de Lorraine (1556-1605), duc d’Elbeuf. Le duc et la duchesse de Bouillon avaient emprunté 120 000 livres à la duchesse d’Elbeuf pour pouvoir verser la dot de leur fille aînée. 169 214 28 décembre 1620 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à la duchesse douairière de La Trémoille Madame, Outre le désir que j’avois de me ramentevoir en l’honneur de vos bonnes grâces et vous asseurer de la continuation de mon très humble service, je me sens obligé en la joye commune de vous tesmoigner combien ceste bonne nouvelle, que nous a apportée M. d’Iray, m’a donné de contentement. Monsieur mon père en a esté fort resjouy et m’a commandé de vous faire ses excuses de ce que la d>>>>> de ses mains ne luy a permis de vous escrire et vous donner les asseurances de son service très humble. Vous suppliant de me croire pour jamais, Madame, Vostre très humble et très obeyssant nepveu et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan, ce 28e décembre 1620. Archives nationales 1 AP 434/152 1621 Un registre de correspondance de Henri de La Trémoille conserve la copie d’une lettre du duc de Luynes au duc de Bouillon en date du 14 septembre et la réponse de celui-ci en date du 18 septembre. L’on peut présumer que Henri de La Tour d’Auvergne adressa ces copies à sa bellesœur pour rassurer celle-ci sur les bruits qui couraient sur lui. 215 13 janvier 1621 - Sedan Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère e Madame, Je vous puis asseurer que depuis que Monsieur mon père est tombé malade, il n’a pas encore si bien dormi que la nuict passée. Il ne luy reste, Dieu mercy, aucune douleur, mais seulement l’incommodité qui l’empesche d’escrire ; sur quoy il m’a commandé de vous mander qu’il croit qu’à vostre retour vous serez informée de la résolution qu’orront prise ceuls de La Rochelle, comme aussi de celle de Messieurs de La Trémoille, de Rohan, de du Plessis sur les avis qu’il leur a donnée par le Sr. d’Iray et s’ils cerchent quelque moyen de négotiation pour arrester le Roy. Durant vostre séjour à Paris, vous tascherez d’y ayder. Vous voirez si la response /2/ qu’on fera au Sr. Justel sera conforme à ce dessein sa lettre n’ayant esté que pour se subject. Ce seroit un grand point d’adoucir la volonté du Roy et que sa résolution peut changer. Il a trouvé fort estrange que le Sr. Le Vasseur ne luy mande point qu’il ait receu une lettre que je luy escrivois par le comandement de Monsieur mon père qui estoit pour croire à ce que luy diroit ledict S. Justel et qu’aussi le dernier ne luy parle en façon du monde du premier ct dessus nommé et croit que c’est mes intelligences entre eux qui pouroit nuire à ces affaires, il dict que le Sr. Le Vasseur est un peu trop négligent et qu’il seroit bien aise que tout l’argent qu’il reçoit luy /3/ demeurast entre ses mains pour acquitter la les dettes et au contraire Monsieur mon père le désire avoir icy, en ayant besoin, ne se souciant pas tant pour cest heure qu’on paye les debtes qui peuvent attendre quelque délays. Vous sçaurez s’il vous plaist qu’elle récompense attend le Sr. Le Vasseur et sur quoy il se fonde. Il vous mande que faciez acheter deux coffre de nuict pour mes deux grandes sœurs leur en ayant promis. 170 Si vous voyez Madamoiselle du Moulin, vous luy direz que si les affaires de Monsieur du Moulin ne se font pour pouvoir avec seuretés s’en retourner. Vous la solliciteray et aideray son mary. Il est résolu de demeurer icy…, à ce qu’il demeure icy, estant presque résolu. Il y a fort peu que Monsieur mon père vous a escrit par un messager qu’il /4/ envoyast à Gobaille et pense vous avoir escrit tout ce qui vous est nécessaire on vous attend icy avec grande impatience et grande joye quand l’on pense d’avoir bien tost l’honneur de vous voir et moy principalement qui vous supplie très humblement excuser mon brouillon m’ayant fallu escrire plusieurs autres lettres et me contenteray pour finir celle-cy de vous asseurer que je seray toute ma vie, Madame, Vostre très humble, très obéissant fils et très fidèle serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan, ce 13e janvier 1621. Archives nationales 273 AP 180 216 14 septembre 1621 – Camp devant Montauban M. de Luynes A Monseigneur le duc de Bouillon Monsieur, Je resisteray à ce coup, comme j’ay fait à tous les autres de mesme nature, touchant les calomnies que l’on vous veut imposer et comme je say que vous fuirés les occasions de me donner suject d’en doubter par la continuation de vostre affection pour le Roy. L’on tient icy que vous voulés faire des levées et que vous arrestés des gens pour ce subjet. Et, je suis asseuré sur les asseurances que m’avés données du contraire et jurés tousjours de vostre fidélité, jusques à ce que m’aiés trompé, qui ne peut estre puisque m’avez promis le contraire ! Je vous dirés donc mon advis que je n’auray jamais une semblable occasion pour faire cognoistre ce que j’ay promis de vous estre véritable que maintenant voicy la pierre de touche. C’este action seule peut donner de vous ou bonne ou mauvaise impression et passée à vostre advantage. L’envie à la col rompu, plus de calomnie, seureté en vos paroles, honneur pour jamais qui effacera tous les soupçons du passé et mesme les fera trouver faux ; jugeant bien que vous vous estes contenu dans le devoir en ce temps, par le passé n’en aïant jamais eu tant de subjet. Je veus dire tant de prétexte, que vostre âme a esté tousjours bonne, que vos ennemis ont prévalu plustost que la vérité et bref ferez condamner vos accusateurs en vostre justification et donnerés subject au Roy d’avoir soin de vous à l’advenir d’aymer vostre fils et d’estre et l’un et l’autre dans son cœur comme dans sa protection. Voilà comme je parle à ceux que j’honore et que je désire obliger et servir ! Ceux qui ont bonne volonté apprennent cette franchise comme les autres y trouvent à redire. Je ne doubte point de vostre nompareille prudence. Je croy de mesme que ce conseil sera receu de vous et que puis que pour la dernière fois, c’est à dire la plus asseurée, je vous offre les bonnes grâces du Roy. Vous les accepterés et en ferés vostre proffit. Mandés-moy librement et vos intentions et vos nécessités, je vous promets y faire avoir égard. Je vous dis efficacement et sans artifice, si cela n’est prenés vous en aà moy. Cette espérance me fait vous asseurer que je suis, Monsieur, Vostre très humble serviteur. De Luines. Au camp devant Montauban, Le 14e septembre 1621. Archives nationales, 1 AP 397/II/57 171 217 26 septembre 1621 - Sedan A M. de Luines Monsieur, J’ay receu la lettre qu’il vous a pleu m’escrire par M. de Berlize qu’il a pleu au Roy d’envoyer vers moy. J’essayray à y respondre avec franchise suivant ce que vous me mandés d’en user ainsi vers moy, dont je me sens obligé et suis asseuré que si l’examen de mes raisons est fait sans qu’on y porte des préjugés contraires à la naïveté de ce que ma responce contient que je seray délivré des soupçons qu’à tout heure on fait paroistre avoir de moy. Vous me dittes qu’on dit que je lève et retiens des gens. Je vous asseureray avec parole véritable que cela ne se trouvera point et quand je le feray je ne le céleroy point puisque tant de necessités apaprentes ny pourroient convier lesquelles sont attachées à la conservation de cette place pour le service du Roy la seureté de son estat et le repos de ma famille voyant de grandes et puissantes armées à ma porte entre les mains de personnes qui n’ayment la France et ausquels ladite place nuit et n’ont pas croyance que je puisse jamais défaillir à ce qui est de mes debvoirs. Je n’ay d’autre costé nulles parolles ny effets de la volonté du Roy à me faire jouir de sa protection ce que j’ay recherché par plusieurs fois les paroles ayant esté tousjours doubteuses et point expresses sur cela et si quelque fois on m’a asseuré d’effects, je n’en ay pourtant veu aucun ny petit ny grand qui me peust satisfaire quoy qu’il m’ayt esté promis avec des tesmoignages d’agréer mes actions et par vous mesmes, Monsieur, par vos dernières escrites de Castillon le 17 juillet. Ces choses ne seroient-elles pas assés légitimes pour me faire prévoir et pourvoir à la conservation de ce lieu pour les raisons susdites sans que cela deust donner de la desfiance de moy ny une mauvaise interprétation à mes volontés qui ne seront jamais portées à faire autrement que ce qu’un bon Français doibt à Dieu, au Roy et ç sa Patrie, mais je cognoy bien que deux causes attirent ce soupçon. L’une qui est en moy et l’autre qui est hors de moy, la première que je ne peux ny par les danger ny par les mauvaises voyes estre desmeu du service juste et honorable que je doibs au Roy pour avec abjection tenir des moyens comme il s’en voict aujourd’huy plusieurs exemples qui soient dommageables à S. M. et contraires à mon honneur, l’autre est le mauvais traictement que je reçois, qui /2/ fait assés aisément juger qu’il me peut offenser et par là estre convié à y cercher les remèdes par des moyens nuisibles. Quant à celle qui me regarde, je ne désire point qu’on attende autres actions de moy qui n’ayent les limites susdites, toutes choses m’estant plus aysées à suporter que de me départir de cela en un aage et en suitte de la profession que je fais et ay tousjours fait et pour le regard de celle qui est hors de moy, elle me donne droit de prévoir ce qui est de ma seureté, ainsi qu’elle ne m’en donneroit à chercher pour satisfaire à mes desplaisirs des moyens qui fussent domageables au Roy et à son estat, je vous suplie de vouloir fermement asseurer qu’il ne partira jamais de moy aucune chose contraire à cela et ainsi me faire jouir des bonnes grâces du Roy comme il vous plait me les offrir, qui me sera un trésor le plus précieux que j’aurois jamais peu acquérir, vous conviant d’adviser à terminer les inconvéniens où l’estat des affaires si retrouvent vous y exitant par vous mesmes et de tourner les yeux derrière vous que l’on tient autheur et conducteur des choses qui se passent afin que l’envie ne puisse prendre par les événemens occasion de blasme contre vous, de ce qu’au lieu de recognoistre vos debvoirs et services vers le roy vostre bon maistre, vous ne soyés blasmé de conseils coantraires et qui attire plus la continuation des peines de l’estat que non pas d’en cercher l’issue, ce qui à mon advis se doict faire et que je vous dis me promettant que ma liberté ne vous desplaira point d’autant plus qu’elle est poussée par un certain retour de ma part vers vous de l’amitié dont il vous plait me faire offre de laquelle j’attendray les effets avec une volonté très entière de vous rendre les miens conformes à tout ce qui recognoistroy ou qu’il vous plaira me faire cognoistre estre de vostre service et de demeurer, Monsieur, Vostre … 26 septembre 1621. Archives nationales, 1 AP 397/II/58 172 1623 Le 10 février Henri de La Tour d’Auvergne envoya son fils aîné à Paris pour assurer le souverain de se fidélité. Il partit pour la capitale “ en poste par un très mauvais temps ”408. Le Fonds Rohan-Bouillon conserve six lettres que Frédéric-Maurice écrivit les 16, 20, 22 et 28 février et 6 et 14 mars 1623 de Paris à sa mère. Dans ses lettres, le jeune prince de Sedan conte les visite qu’il reçu et qu’il rendit. L’annonce de la mort de son père le 25 mars le fit retourner à Sedan. 218 16 février 1623 - Paris409 Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère e Madame, J’ay fait, Dieu mercy, fort heureusement mon voyage et suis arrivé d’ier au commencement de la nuict, n’ayant icy veu ny esté veu de personne jusques au matin. M. le comte de Roucy a esté un des premiers M. de La Haye, de Vilars, de La Coste, de St-Germain, Beaupré d’Anquitar, le vicomte de Machault, de Montmartin sont venus après. Ayant prié M. Le Comte d’aller trouver Monsieur de Momorancy et luy donner la lettre de Monsieur mon père, il m’est aussi tost venu veoir et m’a mené disner avec luy. Le Roy estoit allé à la chasse dès le matin et a disné à une maison de M. le Chancelier et n’est revenu que sur les cinq heures et en est huict et je ne lay point encore veu. M. de Momorancy m’a donné toutes sortes de tesmoignages d’amitié et de franchise et m’a dict sur ce qu’on parle du voyage du Roy au commencement /2/ de Caresme en Picardie et en Champagne, qu’il ne manquera d’aller veoir Monsieur mon père ; ce qu’il désire passionément et n’en parle qu’avec le plus grand honneur qu’il est possible. Après le disner M. de Longueville l’est venu visiter qui m’a enquis fort particulièrement de la santé de Monsieur mon père et du désir qu’il avoit de luy rendre service. Aussi tost qu’il a esté parti M. de Monmorancy m’a dict comme il luy avoit tesmoigné avoir envie de travailler à la réunion avec M. de Nevers. Il m’a aussi parlé comme croyant que le Roy fasse la guerre à l’Espagne. Me ramemant il a passé devant le logis de Madame la Princesse, la mère410, et m’a dict qu’il n’y auroit point de danger de la saluer. Elle m’a fort demendé des nouvelle, d’où je vien. Elle dict que M. le Prince prenoit la poste et qu’il devoit bientost arriver et se pleignant de son trop long séjour et qu’il donnoit moyen à ses ennemis de s’en prévaloir. Madame la princesse de Conti y est venu qui pour l’honneur du lieu et de la compagnie ne m’a pas dit grand chose, me remettant quand je la reverray. M’ayant ramené à mon logis, il m’a promis de /3/ m’avertir quand je pourray faire la révérence au Roy ce que j’attends encorre cepeandant MM. de Chatillon, le comte de La Suze, de Villarnou, l’aisné de Blambuisson me sont venus veoir lequel je n’ay pas peu entretenir pour l’amour des autres. Monsieur le Landgrave de Essen m’est venu visiter. Je n’achéveray pas cellecy que je n’aye veu le Roy, mais il faut que je prenne le temps comme je puis. Monsieur de La Trémoille est party il y a quatre jours. J’ay oublié de vous dire que j’ay veu Madame de Juerre qui se porte fort bien et me vint recevoir jusques à la porte de l’abbaye et me fit promener une heure avec elle me demendant tousjours des nouvelles de Monsieur mon père et de vous avec le plus grand contentement du monde de les apprendre bonnes. Je ne peus pas voir Madame de Prouil parce qu’elle se trouvoit mal. Monsieur de Momorancy m’a à ce matin envoyé un gentilhomme avec un carosse pour me mener au Louvre où il m’attendois et m’a présenté au Roy qui revenoit de la messe et s’en alloit à la chambre de la Royne mère. Il m’a dict qu’il me < et qu’il estoit bien aise de me veoir et m’a ambrassé deux fois et de la est passé dans la chambre. J’ay salué /4/ presque tous les plus grands, personne 408 Lettre d’Elisabeth de Nassau à sa sœur du 10 février 1623. Archives nationales, 1 AP 336/371. 409 Sur sa lettre, force de l’habitude, Frédéric-Maurice a porté Sedan au lieu de Paris. 410 Charlotte de La Trémoille, infortunée veuve de Henri I de Bourbon-Condé. 173 n’ayant suivi le Roy ; lesquels m’ont tous donné forces asseurances d’amitié. M. de Nevers m’a demandé comme Monsieur mon père se portoit et m’a fort asseuré qu’il me serviroit en toutes occasions. Quand je les auray tous veu en particulier, je vous pouray escrire plus asseurément comme je les trouveray. J’iray tantost veoir les Roynes et puis continuray les autres visites. Je n’ay point encore donné la lettre au Roy. J’escrirois à Monsieur mon père si j’avois autre chose à luy mender. Je ne souhaitte rien à l’esgal d’apprendre vos santés bonnes. C’est de quoy je prie Dieu et qu’il me face la grâce de vous tesmoigner avec quelle obéissance je veux demeurer, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan (sic), ce 16e febvrier 1623 Archives nationales 273 AP 180 219 18 février 1623 - Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Depuis ma dernière, j’ay passé tous les jours en visite. J’ay veu la Royne mère, mays non pas la Royne, n’en ayant pas eu la commodité et n’ay point esté depuis hier. A midy au Louvre, parce qu’estant entré pour aller voir Monsieur le duc de Chevreuse, un des gardes de la porte demanda au cocher à qui il estoit et qui il menoyt. Il dit qu’il estoit à Monsieur de Momorancy et qu’il me menoit. Le garde luy dit qu’une autre fois il fermeroit la porte. Il n’avoit commandement de ne laisser entrer, ce que je fis sçavoir à M. de Momorancy qui en a parlé hier au soir et à ce matin au Roy, qui luy a respondu qu’il falloit sçavoir sy j’estois entré d’autre fois, et qu’on en parla à M. le Chancelier, auquel M. de Villeneuve est allé parler et luy ayant tesmoigné comme au premier voyage j’i estois entré, il luy a dit qu’il n’en avoit encor rien entendu, mais puis qu’il l’en asseuroit qu’il le croyoit et qu’il me serviroit. J’ay depuis veu M. de Momorency qui m’a assuré qu’il me diroit demain la résolution du Roy, si c’est qu’il ne le vueille point j’envoyray un laquais sçavoir de Monsieur mon père ce qu’il luy plaist que je face, cependant je n’iray point au Louvre si ce n’est avec MM. le cardinal de La Valette, de Momorancy et de La Vallette, qui tous trois me tesmoignent beaucoup d’amitié. L’on avoit avant hier fait des rappors au Roy que M. de Momorancy cabaloit pour M. le Prince ce qui l’avoit bien mis en peine. Il en parla aussi tost au Roy bien hardiment et qu’il luy feroit cognoistre que ce n’estoit que fausettés et que il savoit que c’estoit il luy donneroit cent coups d’éperons. Je n’ay peu encore donné les lettres ny au Roy, ny à la Royne mère, ne les ayant veu qu’une fois. J’ay visité M. le Chancelier et de Puisieux qui me firent bonne chère. Tout va d’étrange façon. Le discours commun est de Sedan les uns disent que MM. de La Marque vont faire juger le procès les autres que le Roy en donne sep cent mille escus et érige une des terres de Monsieur mon père en duché, d’autres que le Roy fera plustost le voyage de Champagne que de Picardie, que c’est pout aller à Sedan et chacun là dessus en discours à sa fantaisie. J’iray demains à Charanton. L’on nous avoit fait espérer que ce seroit M. Durant qui preschera, mais M. le Chancelier l’a encore remis /2/ et luy a dit qu’il faut qu’il parle au Roy. Je ne l’ay point encorre veu. Je luy ay envoyé la lettre de Monsieur mon père. Ceux de la religion ont bien peur qe la paix ne dure pas. L’on ne parle point de razer le fort de La Rochelle, des trouppes du Roy sont entrées dans les Sévenes qui les alarmes fort. Quand on parle à M. le Connestable il dit qu’ils sont trop prompts et qu’ils n’ayent point depuis. Il dit hier qu’il ne falloit pas que les huguenots espérassent ny charges ny bienfaits et qu’ils en estoient cause parce qu’ils ne s’estoient pas bien défendus la pluspart icy blasment M. de Rohan du traicté qu’il a faict et disent tout haut qu’il nous a plus fait de mal que tout ce qui estoit arrivé auparavant. M. de Chatillon tasche de s’excuser et dit que ça esté contre son 174 gré et volonté qu’est arrivé ce qu’il a fait et qu’il y a esté contrainct, les ministres du païs ayant tout fait à leur teste. Je suis bien marry de ne vous pouvoir mander de meilleures nouvelles je m’en enquereray afin de vous en pouvoir escrire davantage par la première occasion. Je crains bien que celle-cy ne soit bien longue. Je finiray en priant Dieu qu’il vous maintienne en bonne santé et qu’il vous augmente ses bénédictions et qu’il me face la grâce de vous tesmoigner que je suis, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour e De Sedan (sic), ce 18 febvrier 1623 Le carosse que m’a presté Monsieur de Montmorency m’a fait grand bien autrement je n’eusse pas peu aller par la ville ayant tousjours pleu et faisant extrêmement froid. J’ay fort parlé à M. de Benjamin de mon frère qui m’a tesmoigné qu’il seroit bien aise de l’avoir. Il monstre à Monsieur … Archives nationales 273 AP 180 220 20 février 1623 – Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Depuis ma dernière, il n’est rien arrivé. L’on parle tousjours fort du voyage du Roy en Picardie et en Champagne. J’attendray le commandement de Monsieur mon père là dessus, lequel je supplie très humblement de m’escrire si je ne luy escris point, vous mandant tout ce que je sçay. Je me fie aussi sur le commandement qu’il me fest de vous adviser toutes mes nouvelles. Je vis hier lettres de Hollande qui parlent d’une conspiration des Arminiens contre la personne de Monsieur le prince d’Orange et contre l’estat se devant emparer de trois villes desquelles il ne met pas le nom il y en a de prisonniers. Le Roy a ordonné que j’entrerois au Louvre. J’ay esté aujourd’huy à la chasse avec luy. Les Roynes y estoient, mais elles s’en sont revenues comme la pluspart des grands qui y estoient tous ceux de la fauconnerie qui portent la casaque bleue sont demeurez avec le Roy qui couche dehors. Ils sont bien soisante ou quatre-vingts. Je n’ay pas encorre veu de Dames n’ayant pas eu l’honneur de faire la révérence à la Royne. Je ne manqueray d’aller veroit telles que vous me commander cela m’empesche de pouvoir mander les modes à mes sœurs /2/. Trouvay Tournon qui poursuit d’avoir l’argent que M. de Nevers a promis au comte de Mansfeldt. L’on croit qu’il s’en retournera s’en rien faire. Ils sont souvent ensemble Montereau et luy. Mardy Digant estoit parti devant que j’arrivasse. Je n’ay pas peu apprendre ce qu’il estoit venu faire. L’on dit icy tout autrement que Monsieur mon père ne pense. C’est aux nouveaux venus à visiter les premiers, la plupart de ceux que j’ay veus qui tesmoignent estre de mes amis me conseillent d’aller veoir M. de Nevers, me remonstrant la bonne chère qu’il me fit au Louvre, venant me saluer et aussi qu’il désire grandement de se rapatrier. Je croy que le faisant par leur amis, Monsieur mon père ne le trouvera pas mauvais. Je prie Dieu que j’assure par la première occasion que ses douleurs l’ayent quitté et qu’il soit en bonne santé comma aussi mon frère et mes sœurs et que je sois si heureux d’estre honoré de vos commandements afin que vous recognoissiez avec quelle obéissance se portera toute sa vie, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Paris, ce 20e febvrier 1623. 175 L’on envoyé un estat de toute la dépense que j’ay faicte et que je fais chacun jour et le pris de chaque chose. J’ay desja parlé à M. de La Bérauderie pour faire racommoder, la monstre. Le maistre qui l’a faicte est mort. Il m’asseure que son fils travaille aussi bien et m’a promis qu’il mettra peine à ce qu’elle soit bien refaicte. Je vous avois menti de dire que M. Durant ne prescheroit pas, c’estoit après M. Drelincourt qui m’en avoit asseuré. Il fust fort loué de toute l’assemblée. Il m’a promis de me venir veoir souvent et qu’il me dira les raisons qui l’en ont empesché. Je n’ay pas encore peu faire le discours que Monsieur mon Père me commande à M. de Puisieux n’estant point à son logis où ayant des affaires qui m’empeschent de le veoir. Tout le monde va à luy, y estant l’autre jour allé si… Archives nationales 273 AP 180 221 22 février 1623 - Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je vous supplie très humblement de m’excuser si je fais celle-cy si courte qui ne fust plus de minuict sans avoir souppé. J’y fus toute l’après-dînée et eu moyen de donner vostre lettre à la Roynemère qui me demenda forces nouvelles de Monsieur mon Père et de vous m’abseurant de sa bienveillance. Le Roy au retour de la chasse fust bien une heure auprès d’elle. Il estoit fort las ayant couché au Bourget tout vestu. Il ne laissa pas de répéter son balet. Mme la princesse de Conti me présenta à la Royne qui me demenda de vos nouvelles. Le Roy y vint aussitost qui parla long temps à moy. Je luy présenté la lettre de Monsieur mon Père. Il me commanda de la donner à M. d’Oquere je la luy bailleray. Aujourd’huy je demeuray à une pastorelle que jouèrent les filles de la Royne. Toutes les princesses y estoient la première fois. Je manderay à mes ssœurscomme elles s’abillent. Je vous envoye une paire de gants doublé de marté. Ma chambre est toute pleine de monde qui me contrainct de finir par les mesmes protestations de mon obéissance estant, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour e De Paris, ce 22 febvrier 1623 Archives nationales 273 AP 180/FM 222 28 février 1623 - Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je me suis grandement resjouy d’apprendre par celle qui vous a pleu me faire l’honneur de m’escrire la bonne sancté de Monsieur mon père et de vous. Le voyage du Roy en Picardie est asseuré. Ce sera de demain en huict jours je vous supplie très humblement que je puisse avoir les commandemens de Monsieur mon Père devant cela. C’est d’aujourd’huy qu’il a esté résolu car l’on le croyoit rompu. Je parlay hier à Monsieur le duc de Chevreuse sur l’arrivée de Monsieur le Prince et comme je ne voulois point avoir d’autres reigles que les commandements du Roy, il me dit qu’il luy en parleroit. Il me fait fort bonne chère. Madame la Princesse la mère m’a encoyé un gentilhomme me dire qu’elle avoit eu nouvelles asseurées que M. son fils arriveroit le second du mois à Lion. Je ne l’ay poinct veue depuis la première fois qui fust contre mon gré /2/. 176 J’ay desja veu l’ambassadeur d’Angleterre et de Hollande. Le premier me dit qu’il avoit commandement du Roy son maistre de s’employer et de servir Monsieur mon Père en ce que il requéreroit de luy. Je n’ay point encore visité celuy de Savoye et de Venise ce sera le plustost que je pouray. Je ne sçaurois que me louer grandement de l’affection que me tesmoigne M. de Bassompierre. Il s’excuse sur leurs festins et leur ballet s’il ne m’a pas peu servir comme il désiroit. J’ay veu Mesdames deVerneuil et de Châteauneuf qui se sont enquises fort particulièrement de vos nouvelles et esté voir Mme la duchesse de Belgarde et Mme de Roan que je n’ay point trouvés, mais au Louvre. Je leur ay dict le commandement particulier /3/ que vous m’en aviez fait. J’ay envoyé la bouteille à ma sœur par Rosemond qui s’en n’est allé par le relais. Je ne luy ay escrit que deux fois avec grande peine n’ayant encor eu une seule heure à moy. Si M. Le Conte vous veois plustost que moy, il vous dira plus particulièrement comme tout s’est passé. Ce que l’on me dit tout les jours ne vaut pas d’en faire mémoire n’estant que choses des plus communes. Je ne manqueray pas d’en faire si c’est chose qui en vaille la paine. J’ay veu trois ou quatre fois M. le vicomte de Sardiny qui ne bouge de la chambre ou du lict. Il m’a fort asseuré de la bonne volonté de la Royne mère. Je luy ay parlé du dessus de lettre. Il m’a dict qu’il /4/ le fera changer au secrétaire qui la fait de son mouvement. Je n’ay nulles nouvelles de M. de La Forest. Je fus hier avec Monsieur le cardinal de La Vallette veoir danser le balet du Roy et fus dans la grande sale du Louvres depuis les huict heures jusques à six. Il ne s’est commencé qu’à quatre heure. Il n’y a point eu de machines, mais les danseurs estoient fort bons et bien habillez. Devant qu’il entrast les Roynes s’ennuyèrent bien y estant de le mesme heure. L’on a finy par les branles. Ceux du grand balet ayant pris la Royne et les dames qui sont de son balet qui se dansera dimanche. Il ne se peut rien veoir /5/ au monde de mieux paré. L’on portera l’or jusques à la fin de mars. Mes habits sont des moindres que l’on veoit porter aux grands, estant impossible de croire qu’elle est la superfluire. L’on ne m’en a point fait. Je n’ay point encore de nouvelles du coche. J’ay veu la lettre de M. Le Conte. Il m’a dict qu’il remettra le marquis insensiblement sur le mesme discour qui est le bruict commun. J’en feray sentir quelque chose aux ambassasdeur avec le plus de discretion qu’il sera possible. Je ne sçaurois que me louer de ceux qui sont avec moy se randant les plys subjects qu’on sçaurois /6/ désirer ne donnans point sujet de plaintes. Le Roy au sortir du balet est allé à la chasse et a couché dehors et n’est point encore de retour. Il a eu fort peu de suité, estant le seul qui aymast mieux chasser que dormir. Le duc de Crouy est icy de la part de l’Infant pour se conjouyr des victoires du Roy. On vient de me dire qu’Amau a escrit que ceux de La Rochelle ont arresté un vaisseau chargé d’armes et de munitions pour son fort que le vent avoit poussé dans le port et une par représaille il a fait sortir des soldats qui ont pris des plus riches bourgeois et leur demendent qu’il feront restituer le vaisseau et vingt mille escus pous sa part. Ce sont /7/ toutes les nouvelles que je sçay que je souhaiterois estre meilleures un jour l’on prend une résolution et l’autre l’on la romp et pour cela est icy impossible de pouvoir mander choses asseurées si ce n’est les choses que le Roy nosta quoy il ne reçoit point d’opposition. En attandant vos commandements, je demeureray en ma mesme obéissance que doibt, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Paris, ce dernier febvrier 1623. Archives nationales 273 AP 180 223 2 mars 1623 - Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, 177 Ayant esté tost ce matin pressé de visites, je feray celle-cy plus courte. Je vis hier les embassadeurs de Savoye et de Venise qui me parlèrent des bruicts qu’on fait courre de Sedan et que cela leur faisoit craindre qu’on ne fist la guerre à la Valteline et comme ils croyent que ce n’est pas le dessein de Monsieur mon père, ils m’ont tesmoigné l’obligation que leurs maistres luy ont et le commandement qu’il ont de s’employer ardiment où il ira de son bien et m’ont monstre luy porteront grande affection. Ils n’estiment plus que leurs maistres facent des trouppes et qu’ils rendront veoir devant qu’en faire une résolution certaine de la France. Ils ne croyent pas que le traicté de Rome réussise à bien. Ils m’ont promis de mander à leurs maistres le désir que j’ay d’estre employé. M. de Marcilly m’a tesmoigné beaucoup d’affection. Il est parti depuis quatre jours pour aller chez luy. M. le comte qui partira au commencement de l’autre semaine vous pourra dire plus au long, ce que je suis contrainct d’abbréger pour les compagnies. Je n’ay encore peu parler au Roy, n’y a M. de Puisieux ne manquant pas un jour à en chercher l’occasion. Le dernier a esté cinq ou 6 jours dehors à ce carnaval qui m’en a empesché. Je vous supplie très humblement d’excuser mon brouillon et mon stille estant si ambarassé que je ne sçay ce que je dis si je sçavois quelque chose de plus meilleur j’escrirois à Monsieur mon père, lequel suplieray très humblement de me pardonner. Je me suis grandement resjoui d’apprendre sa bonne santé, laquelle je prie Dieu luy vouloir continuer et qu’il me face la grâce de vous revoir en bonne santé personne ne la désirant à l’esgal de moy qui seray toute ma vie avec très humble respect, Madame, Vostre très humble, très obeissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Sedan (sic), ce 2 mars 1623. Archives nationales 273 AP 180 224 6 mars 1623 - Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Depuis ma dernière, j’ay veu M. de Puisieux qui m’a laissé dire tout au long ce que j’avois envie, l’asseurant de l’obéissance de Monsieur mon père et de son déplaisr de ne pouvoir pour son indisposition s’acquitter de son debvoir. Il m’a respondu qu’il estoit bien aise de ses asseurances et qu’il les feroit entendre au Roy touchant ses conseils, que le Roy les avoit tousjours receus en bonne part et qu’il continuat à les luy donner. Qu’il avoit donné la paix a ses subjects pour les maintenir selon ses edicts, qu’il ne l’a pas faict pour la rompre s’il n’y est obligé par eux. Ce qu’il ne croit pas qu’ils faict, que le Roy s’oposoit par tous moyens à ce que l’orgueil d’Espagne ne s’accroict par leurs conquestes qu’à étouffer sa faisoit à traicte à Rome pour la restitution de la Valteline, que les Alemans estoient causes de leur malheur qu’il ne lairoit pas détascher d’y apporter remède il ne m’a parlé ny de l’alliance d’Anglettere ny du traictement que reçoivent MM. les Estats pour la fin il m’a dit qu’il feroit le tout entendre au Roy /2/ le mesme jour, qui estoit le quatrième, vindrent nouvelle de l’arest de M. de Rohan à Monpellier par M. de Valencé411, qui escrit luy avoir mandé qu’il n’y vint point ce qui ne l’en a pas empesché et pour ce subject l’a fait arrester. Aussi tost que le Roy en eu veu les lettres, il fit assembler le conseil, qui dura fort longtemps, après lequel il envoya M. le duc de Chevreuse à Madame la duchesse de Roan luy dire que cela estoit arrivé sans son commandement et qu’il en feroit recevoir toute sorte de satisfaction à M. de Roan, qu’elle ne s’en affligeois pas, qu’il despescherois dès 411 Jacques d’Etampes, marquis de Valancay, gouverneur de Montpellier, beau-frère de Puisieux, avait interdit à Rohan de venir à Montpellier alors que se déroulaient des élections municipales tendant à partager les offices entre les deux communautés, celui-ci ayant délibéremment ignoré cette interdiction, il l’avait arrêter. Louis XIII désarma cette crise en ordonnant à Valancay de libérer Rohan. Jack Alden CLARKE, Huguenot Warrior. The life and times of Henri de Rohan, 1579-1638, Martinus Nijhoff, La Haye, 1966, p. 111. 178 le lendemain courier pour sa délivrance. Ce qu’il a faict. Ce mesme soir le bruict courut que M. de Soubize avoit esté mesné à la Bastille sur lequel tout au soir me vindrent trouver M. de La Suze, de La Nuze et de La Noue, ce qui se trouva entièrement faux. Je fis faire la révérence au Roy par le dernier qui le supplia très humblement d’oublier le passé, il luy respondit qu’il fust plus sage et rien que cela /3/. Je n’ay point encore encore receu de response de M. de Chevreuse sur ce que je luy ay dit, ny moyen de parler au Roy qui hier au matin au sortir du balet de la Royne s’en est allé à la chasse on croit que ce sera pour quatre ou cinq jours. Il ne fust finy qu’à six heures du matin Madame de Roan en estoit ; l’on le trouva plus beau que celuy du Roy. On n’y voyoit qu’or et pierreries. Jamais la dépense en toutes choses n’a esté où elle est. L’on ne sçait quand le Roy fera son voyage s’en reservant à luy seul le temps et le lieu où il ira on parle que ce sera à Nostre Dame de Liesse à la my caresme, si je puis sçavoir qu’il passe plus outre et la certitude du jour de son partement je ne manqueray de le vous mander. Je remets à M. le Conte à vous dire ce qui est de l’affaire du comte de La Marck et à ce qui vous en escrit et vous en envoye. Gobaille comme au Sr. Le Vasseur ce que j’ay faict à ce jourd’huy chez M. le marquis de La Vieuville. J’ay receu des lettres de Thouars de M. et Mesdames de La Trémoille, lesquelles me convient fort de les /4/ aller voir. Elles sont de la mesme date que celle que vous recevrez par le petit parfumeur, par lequel je ne vous escrivis point n’ayant rien du tout à vous mander. Tarascon arriva hier qui a apporte deux milles pistolles des quelles je prendray ce qu’il faudra pour ma dépance et gardera on le reste en attendant le commandement de Monsieur mon père. Il s’en retournera après demain et remporte une lettre du Roy à M. d’Espernon pour faire sortir la garnison de Negrepelisse. J’avois envoyé aujourd’huy pour ce sujet M. de Gercy à M. d’Erbaut qui luy a donné ceste lettre et une cy-joincte pour Monsieur mon père. Le Roy estant dehors M. le Comte ne remportera point de responses à la lettre, laquelle je presseray d’avoir. Il vous dira le besoin que j’ay de carosse et la dépanse qu’apporte celuy que j’ay les quatres chevaux mangant autant que neuf autres et les rabilogés du carosse qui est tous les jours à refaire et /5/ n’en sçauroit on rien dire au cocher qu’il ne dit qu’il a bon maistre et qu’on ne s’en serve pas si on veut l’on y est contrainct, car sans cela je n’eusse pas peu sortir un seul jour sans estre tout gasté ayant tousjour pleu. Je n’ay ny acheté ny joué rien à la foire ce qu’on y voyoit estant fort commun et bien aisé à recouvrir sans qu’elle soit ou faillant beaucoup d’argent pour avoir ce qui estoit de beau ce qui n’estoit pas ma résolution. En cest cour il y a bien plus de paroles que d’effects, force asseurance de services et puis c’est tout. Le baron de Cresias es venu aujourd’huy et a amené Dame accause de la compagnie. Je n’ay pas peu parler à luy il me dit qu’il reviendra me veoir. Je feray ce que je pourray pour luy faire recevoir contentement. Tout ce que j’apprendray, je ne faudray de le vous mander. Les uns désirent les autres craignant l’arrivée de M. le prince. L’on a point eu de ses nouvelles depuis Turin où il a passé le caresme prenant, Madame sa femme l’atend à Mouron pour venir icy avec luy /6/. Il y en a qui croyent que le Roy au lieu de Picardie doit prendre le chemin de Tours. On parle que c’est pour La Rochelle faisant tousjour mener munitions dans le fort. Forces gens disent que l’on contraindra à y aller plusieurs personnes contre leur gré ou que l’on les arrestera ce sont les discours que l’on tien. J’ay veu M. le cardinal de Richelieu qui a grande autorité par la Royne mère et luy dis que Monsieur mon père ne luy avoit point escrit en resjouissance de son cardinalat, parce qu’il avoit résolu de me faire faire ce voyage et que je l’en asseurerois, qu’il désirerois qu’il fust dans les affaires que ce seroit un bien pour le Royaume. Il ayme grandement a estre flatté412. Le Roy l’autre jour de M. de Soubize qu’il sembloit qu’il se sentit coupable et qu’il n’osoit lever la teste et pluiseurs discours de moquerie. L’on ne le veoit jamais en compagnie. On dit qu’il presse son partement. Il y en a qui croyent qu’on ne luy donnera point congé. 412 Richelieu avait obtenu le 5 septembre 1622 son chapeau de cardinal, il posait les dernières cartes du jeux de patience qui le mènera au conseil du Roi. Il y fit son entrée le 29 avril 1624. Joseph BERGIN, L’ascension de Richelieu, Payot, 1994, p. 300-328. Au travers de la lettre de Frédéric de La Tour d’Auvergne se lit l’aversion qu’il eprouvait envers le cardinal et qu’il conservera toute sa vie. 179 Je remets à M. Le Conte à vous dire ce que j’oublie. Il a esté tous les jours depuis le matin jusques au soir à cheval. Il prend le coche à cause de sa jambe, il me fera grand besoin /7/. Je n’ay nulle nouvelle de M. de La Forest. Je renvoye la monstre ce que je ne peus faire par le dernier coche. Elle va fort bien je n’ay pas peu monstrer ce que vous m’escrivez à M. Durant parce qu’il a pris médecine. J’ay donné la lettre de M. Le Comte qui luy a monstrée, mais il ne m’a pas dit ce qu’il en pense ou l’ayant peu veu depuis estant allé à la ville devant que je fusse levé et n’estant pas encore de retour je remets à luy à vous dire tout plus particulièrement. Devant Dieu que je continue à apprendre l’estat de vostre bonne santé c’est ce que peut souhaiter avec toute sorte de passion celuy qui veut demeurer en toute obéissance, Madame, Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour e De Paris, ce 6 mars 1623 Archives nationales 273 AP 180/FM 225 10 mars 1623 - Paris Frédéric-Maurice de La Tour d’Auvergne à sa mère Madame, Je ne vous sçaurois rien mander de certain des voyages du Roy chacun en parle à sa fantaisie. Il revint dimanche au soir, estant dans le lict je luy demanday s’il trouvoitbon que je visse M. le comte de Carle ce que je n’avois osé faire sans sa permission. Il me dit qu’il le vouloit bien. J’eus après moyen de luy dire ce que Monsieur mon père m’avoit commandé sur les asseurances que je luy donnay de son obéissance il me respondit qu’il se maitient tousjours en son debvoir et qu’il le conserveroit sur le volonté que je luy dis avoir de n’avoir autre reigle que ses commandements et que je le supplioie très humblement de me les donner pour m(y conformer. Il me dit qu’il me les donneroit. Hier je fus veoir M. le comte de Carle et retournay aujourd’huy luy dire adieu je luy fis excuse d’avoir tant tardé à m’acquitter de ce debvoir mais que je n’avois osé le Roy n’estant pas /2/ icy je pensois vous envoyer celle-cy par le coche, mais M. le marquis de Seissac m’a envoyé un gentilhomme sçavoir si je voulois escrire et qu’il envoyeroit demain à Sedan en poste M. le cardinal de La Valette trouva fort bon que je ne vis point M. le comte de Carle sans la permission du Roy. Il m’a dit qu’il a parlé à la Reyne mère de ce dont M. le Comte luy avois parlé et qu’elle luy a promis de faire paroistre à Monsieur mon père qu’elle luy veut du bien et qu’elle s’employera pour luy sans en faire semblant. On attend M. le Prince dans 10 ou 15 jours. Je suis contrainct souvent de vous mander le contraire de ce que je vous ay escrit auparavant. Je vous envoye de la pomade d’orange qui me semble estre assez bonne. M. le comte de Carle vient de me veoir. Je remettray à vous dire les discours qu’il m’a renus quand je vous verray et cependant je le mettray par discours mémoire afin de ne les oublier /3/. M. de Monmartin m’a promis de me monstrer les caiers qu’il a présenté au Roy. Il en attend aujourd’huy la response par la première occasion. Je vous manderay ce qu’il m’en dira c’est tout ce que j’ay appris depuis ma dernière. Le bruict de la vendition de Sedan commence à cesser. Il a donné de la peur à beaucoup de monde. Je vois bien souvent M. Durant. Je ne luy ay pas encore demanday comme Mme de Sully met à Mme de Roan. Trois anciens sont venus au logis pendant que je n’y estoit point pour me demender pour rebâtir leur temple. Ils s’addressèrent à Gobaille qui m’en parla. Je ne sçay s’ils reviendront demain. J’assembleray le conseil pour apprendre en quel estat sont toutes vos affaires pour vous le pouvoir mander ou dire moy mesme quoy attendant je demeurereray en l’obéissance que vous doit, Madame, 180 Vostre très humble, très obéissant et très fidèle fils et serviteur. Frédéric-Maurice de La Tour De Paris, ce 10e mars 1623 Archives nationales 273 AP 180/FM 181 ETAT DES SOURCES I - SOURCES MANUSCRITES Archives nationales Papiers Bouillon R2 51, R2 53, R2 54 Fonds La Trémoille : 1 AP 331 - Correspondance de Charlotte-Brabantine de Nassau 1 AP 332 - Correspondance de Charlotte-Brabantine de Nassau 1 AP 333-336 - Correspondance d’Elisabeth de Nassau 1 AP 354 – Correspondance de Berthold à Charlotte-Brabantine de Nassau 1 AP 393 - Correspondance de Henri de La Trémoille 1 AP 394 - Correspondance de Henri de La Trémoille 1 AP 397 – Registre de correspondance de Henri de La Trémoille comportant des copies de lettres de Henri de La Tour d’Auvergne. 1 AP 430 - Correspondance de Marie de La Tour (datée) 1 AP 431 - Correspondance de Marie de La Tour (non datée) 1 AP 434 - Correspondance de Henri de La Tour d’Auvergne413 Fonds Rohan-Bouillon : 273 AP 179 – Correspondance à Henri de La Tour d’Auvergne. 273 AP 180 - Correspondance à Elisabeth de Nassau Bibliothèque nationale : Fr. 4102, f° 62 et 68 copies. II - SOURCES IMPRIMEES A J. AYMON, Actes ecclésiastiques et civils de tous les synodes nationaux des Eglises réformées de France... , La Haye, 1705, 2 vol. B Etienne BALUZE, Histoire généalogique de la Maison d’Auvergne, Paris, 1708, 2 vol. Maréchal de BASSOMPIERRE, Journal de ma vie, Edition de la Société de l’Histoire de France, Renouard, Paris, 4 vol., 1870-1877. Elie BENOIT, Histoire de l' Edit de Nantes et sa révocation, Delft, 1693-1695, 5 vol. 413 Ce registre contient également quelques lettres de ses fils Frédéric-Maurice et Henri; 182 BELLIEVRE et SILLERY, Mémoires […] contenant un journal concernant la Négotiation de la Paix traitée à Vervins l’an 1598, entre Henry IV, Roy de France & de Navarre, Philippes II, Roy d’Espagne & Charles-Emmanuel, Duc de Savoye, Paris, chez Charles de Sercy, 1676, 2 vol. Jules BERGER de XIVREY et Joseph GUADET, Recueil des lettres missives de Henri IV, Coll. des documents inédits de l’histoire de France, Imprimerie nationale, Paris, 1843-1876, 9 vol. M. BOUCHITTÉ, Négociations, lettres et pièces relatives à la conférence de Loudun, Collection de documents inédits sur l’Histoire de France, Paris, 1862. C Louis CAPPEL, Sur la douloureuse et non jamais assez regrettée mort de … Mademoiselle Louise de La Tour, fille aînée de Monseigneur le duc de Buillon, décédée à Paris, le jeudi 6 décembre 1607 … complainte élégiaque en vers féminins, Sedan, 1608, in-4°, 7 p. Baldassar CASTIGLIONE, Le livre du Courtisan, GF-FLammarion, 1991. D Charles DANGIBEAU, “ Diaire de Jacques Merlin ou recueil des choses les plus mémorables qui ce sont passées en cette ville (de La Rochelle) de 1589 à 1620 ”, Archives Historiques de la Saintonge et de l’Aunis, tome V, 1878, p. 63-384. DUPLESSIS-MORNAY (Philippe), Mémoires... contenans divers discours, instructions, lettres & depesches par luy dressées ou escrites aux Roys, Reines, Princes, Princesses, Seigneurs plusieurs grands personnages de la chrestienté, depuis l’an 1600 jusqu’à l’an 1623, Louis Elzevier, Amsterdam, 1652, 2 vol. E François-Annibal d’ESTREES, Mémoires... sur la Régence de Marie de Médicis (1610-1616), Edition de la Société de l’Histoire de France, Renouard, Paris, 1910. F Madeleine FOISIL (Direction), Journal de Jean Héroard, médecin de Louis XIII, Arthème Fayard, 1989, 2 vol. G Eugène GRISELLE, Louis XIII et Richelieu. Lettres et pièces diplomatiques, Slatkine-Megariotis Reprints, Genève, 1974. Guillaume GROEN van PRINSTERER, Archives ou Correspondance inédite de la Maison d’Orange-Nassau, 2e série, tome I : 1584-1599 et tome II : 1600-1642, 1857-1859. H Suzanne d' HUART, Archives Rohan-Bouillon, SEVPEN, Paris, 1970. Suzanne d' HUART (Éditeur), Lettres de Turenne extraites des Archives Rohan-Bouillon, SEVPEN, Paris, 1971. I Hugues IMBERT, “ Registre de correspondance de Henri de La Trémoille, duc de Thouars ”, Mémoires de la Société des Antiquaires de l' Ouest, tome XXXI, 1866, p. 35-364. Hugues IMBERT, “ Mémoire de Marie de La Tour d' Auvergne, duchesse de La Trémoille (1661) ”, Mémoires de la Société des Antiquaires de l' Ouest, tome XXXII, 1867, p. 89-129. 183 Hugues IMBERT, “ Lettres de Catherine de Parthenay, Dame de Rohan-Soubise et de ses deux filles Henriette et Anne à Charlotte-Brabantine de Nassau, duchesse de La Trémoille ”, Mémoires de la Société de Statistique, Sciences, Lettres et Arts du département des Deux-Sèvres, 2me Série, Tome XII, 1872, p. 41-161. 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