à la recherche de l`économie sociale et solidaire le cas du Grand
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à la recherche de l`économie sociale et solidaire le cas du Grand
économie et statistiques février 2006 8 à la recherche de l’économie sociale et solidaire le cas du Grand-Duché de Luxembourg préparé pour le Ministre de l’Economie et du Commerce Extérieur, Monsieur Jeannot KRECKÉ à l’occasion du colloque européen « L’économie sociale et solidaire, acteur central de la cohésion sociale et de la stratégie de Lisbonne » Serge ALLEGREZZA, Victor MOLLING (STATEC) À la recherche de l'économie sociale et solidaire Table des matières 1 Introduction 3 2 Définitions 4 2.1 Qu’est ce que l’économie sociale? 4 2.2 Définition de l'Union européenne 6 2.3 Définition du gouvernement luxembourgeois 6 3. Première évaluation de l’importance de l’économie sociale au Grand-Duché de Luxembourg 8 3.1 Les salariés 9 3.2 La valeur ajoutée 9 3.3 Limites de l’exercice quantitatif 9 4. Conclusions 10 5. Bibliographie (extraits) 11 2 "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 Ã la recherche de l'économie sociale et solidaire À la recherche de l’économie sociale et solidaire Le cas du Grand-Duché de Luxembourg 1. Introduction C'est au cours de la seconde moitié du 19e siècle qu'apparaissent les premières organisations d'économie sociale dans les pays industrialisés, prônées par des socialistes associationnistes comme Owen, Saint-Simon, King, Fourier ou Proudhon. Le christianisme social a aussi participé au développement de l’économie sociale dont une figure emblématique est l’oeuvre de Raiffeisen dans le monde agricole1. L’économie sociale a pris la forme d’associations et des sociétés de secours mutuel, qui permettent aux travailleurs à faible revenu de s'entraider et de se donner des assurances en cas de maladies ou d'accidents. L’économie sociale est une réaction aux excès du capitalisme débridé. L’histoire économique permet de décrire les traits communs aux entités qui composent l’économie sociale: le statut particulier – association, coopérative, mutualité – ou bien la finalité non lucrative des activités et leur mode de gestion. Ce tiers secteur (ou système) se situe entre le secteur public et le secteur privé. Depuis la crise économique des années soixante-dix, la montée du chômage de masse, l’essoufflement de l’Etat providence et la naissance de mouvements sociaux, l’économie sociale a vu émerger de nouvelles formes d’activités appelées « solidaires ». Les entreprises de l’économie sociale et solidaire, faisant preuve d’esprit d’innovation, ont conquis de nouveaux créneaux comme les services de proximité, la réhabilitation de quartiers défavorisés, l’aide aux personnes âgées, ou en difficulté, le commerce équitable, la finance éthique et solidaire, la gestion environnementale de déchets ou l’insertion professionnelle des personnes non qualifiées.... L’économie solidaire serait plus à même de réaliser les objectifs de la politique sociale ou de la politique de l’emploi (Rosanvallon, 1995). Ce sont les activités d’insertion de chômeurs de longue durée qui se sont démarquées au Luxembourg au cours des dernières années. La gestion flexible et proche du terrain de ces organisations a fait naître l’espoir d’une capacité supérieure à celle de l’Etat ou des entreprises commerciales à délivrer des services d’intérêt général de manière plus efficace et moins onéreuse. Cette problématique des formes que doit prendre l’action de l’Etat Providence moderne, distinguant entre la mission de service public et le fournisseur dudit service a été soulevée par le Conseil Economique et Social. Quel est le rôle que peut ou doit jouer l’économie sociale et solidaire dans ce contexte, déjà très présente et bénéficiant de subventions et de commandes de l’Etat, n’a pas encore été clarifié. De plus, il n’y a pas encore d’évaluation quantitative de l’efficacité comparée des différentes formes d’exécution des missions des services publics sociaux. Le secteur de l’économie sociale et solidaire soumis à de nombreuses tensions, internes et externes. En effet, il est en proie aux contradictions entre syndicalisme et volontariat, entre logique étatique et concurrence globale. Fort hétéroclite, et menacé de marginalisation, susceptible de devenir la « poubelle », de l’économie publique et de l’économie privée comme le dit Bardos-Féltoronyi (2004), professeur à l’Université de Louvain. Les « entreprises solidaires » sont en quête d’une reconnaissance de leur travail par l’Etat et la société. Cette reconnaissance peut aussi se traduire en termes de statistiques officielles. Les statistiques dans ce domaine assez hétéroclite sont encore rares ou insuffisamment structurées. La difficulté de définir et de repérer avec suffisamment de précision les entreprises qui relèvent du secteur de l’économie sociale et solidaire pose de nombreux problèmes qui commencent seulement à être étudiés. La présente note a été rédigée à l’occasion du colloque européen « L’économie sociale et solidaire, acteur central de la cohésion sociale et de la stratégie de Lisbonne » qui s‘est tenu à Luxembourg les 11 et 12 mars 2005. __________ 1 cf. Jacques Defourny in J.L. Laville et A.D. Cattani (2005). "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 3 À la recherche de l'économie sociale et solidaire 2. Définitions 2.1 Qu’est ce que l’économie sociale? Selon Sabine Mertens (2004), chercheur à l’Université de Liège, « Il n'existe pas de définition européenne commune de l'économie sociale qui soit institutionnellement acceptée mais on s'accorde à reconnaître que les organisations qui en font partie partagent au moins trois caractéristiques importantes: (1) leur finalité première n'est pas la maximisation du profit à destination des investisseurs mais la volonté d'offrir un service à leurs membres ou à une collectivité plus large, (2) leur fonctionnement repose sur un mécanisme démocratique (qui s'apparente au principe "un membre-une voix") et (3) elles bénéficient d'une autonomie dans leur gestion par rapport aux pouvoirs publics ». Le réseau de recherche emes1, sur base de critères communs des réalités susceptibles d'être appelées "entreprises sociales" dans chacun des quinze pays propose une première définition construite en guise de base de travail. Les éléments retenus pour celle-ci ne prétendaient pas cerner toute la réalité des entreprises sociales, mais à l'expérience, ce cadre conceptuel initial s'est révélé assez robuste et fiable. a) b) Une activité continue de production de biens et/ou de services. Les entreprises sociales, à l'inverse des organisations non-profit traditionnelles, n'ont normalement pas comme activité principale la défense d'intérêts, ni la redistribution d'argent (comme c'est le cas, par exemple, de beaucoup de fondations), mais elles sont directement impliquées, d'une manière continue, dans la production de biens et l'offre de services aux personnes. L'activité productive représente donc la raison d'être - ou l'une des principales raisons d'être - des entreprises sociales. Un degré élevé d'autonomie Les entreprises sociales sont créées par un groupe de personnes sur base d'un projet propre à ces personnes et elles sont contrôlées par ces personnes. Elles peuvent dépendre de subsides publics mais ne sont pas dirigées, que ce soit directement ou indirectement, par des autorités publiques ou d'autres organisations (fédérations, entreprises privées,…). Elles ont le droit tant de faire entendre leur voix ("voice") que de mettre un terme à leurs activités ("exit"). c) Un niveau significatif de prise de risque économique Les créateurs d'une entreprise sociale assument totalement ou partiellement le risque qui y est inhérent. A l'inverse de la plupart des institutions publiques, leur viabilité financière dépend des efforts consentis par leurs membres et par leurs travailleurs pour assurer à l'entreprise des ressources suffisantes. d) Un niveau minimum d'emploi rémunéré Tout comme les organisations non-profit traditionnelles, les entreprises sociales peuvent faire appel à des ressources tant monétaires que non-monétaires, et à des travailleurs rémunérés comme à des volontaires. Cependant, l'activité de l'entreprise sociale requiert un niveau minimum d'emploi rémunéré. __________ 1 4 http://www.emes.net/fr/recherche/emes/analyse.php. "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 Ã la recherche de l'économie sociale et solidaire Pour refléter la dimension sociale des initiatives, cinq indicateurs ont été retenus: manière limitée - ce qui permet d'éviter un comportement visant à la maximisation du profit. i) Une initiative émanant d'un groupe de citoyens Les entreprises sociales résultent d'une dynamique collective impliquant des personnes qui appartiennent à une communauté ou à un groupe qui partage un besoin ou un objectif bien défini; cette dimension doit être maintenue dans le temps d'une manière ou d'une autre. v) Un objectif explicite de service à la communauté L'un des principaux objectifs des entreprises sociales est le service à la communauté ou à un groupe spécifique de personnes. Dans la même perspective, une caractéristique des entreprises sociales est constituée par leur volonté de promouvoir le sens de la responsabilité sociale au niveau local. ii) Un pouvoir de décision non basé sur la détention de capital Ce critère renvoie généralement au principe "un membre, une voix", ou tout au moins à un processus de décision dans lequel les droits de vote au sein de l'assemblée détenant le pouvoir de décision ultime ne sont pas répartis en fonction d'éventuelles participations au capital. En outre, si les propriétaires du capital social sont importants, le pouvoir de décision est généralement partagé avec d'autres acteurs. iii) Une dynamique participative, impliquant différentes parties concernées par l'activité La représentation et la participation des usagers ou des clients, l'exercice d'un pouvoir de décision par diverses parties prenantes au projet et une gestion participative constituent souvent des caractéristiques importantes des entreprises sociales. Dans bon nombre de cas, l'un des objectifs des entreprises sociales est de promouvoir la démocratie au niveau local par le biais de l'activité économique. iv) Une limitation de la distribution des bénéfices Si les entreprises sociales peuvent être des organisations caractérisées par une obligation absolue de nondistribution des bénéfices, elles peuvent aussi être des organisations qui, comme les coopératives dans certains pays, ont le droit de distribuer des bénéfices, mais de L'économie sociale est le terme générique pour désigner les groupements de personnes - et non de capitaux jouant un rôle économique: les coopératives de toutes natures (salariés, usagers, d'entreprises), les mutuelles (d'assurance ou de prévoyance santé), la plupart des associations. C'est donc l'alliance de ces trois familles: mutuelles, coopératives, associations gestionnaires qui vit sous le concept d’économie sociale L'économie solidaire est une forme émergente de l'économie sociale, surtout axée vers les initiatives de développement local, de réinsertion et de lutte contre l'exclusion1. A partir des années 1970 et sans doute sous la double influence de l'esprit de mai 1968 puis de la crise de 1974, on voit effectivement resurgir, en France p.ex., un mouvement associationniste qui prend en compte des besoins non satisfaits, qui invente de nouveaux modes de production, qui développe de nouvelles activités. Le plus souvent créées sous forme associative, ces innovations sectorielles sont reconnues ou se reconnaissent dans l'économie solidaire. (ibid.) __________ 1 CEGES (Conseil des entreprises, employeurs et groupements de l’économie sociale) 43, rue de Liège, 75008 Paris, http://www.ceges.org/. "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 5 À la recherche de l'économie sociale et solidaire 2.2 Définition de l'Union européenne Dans ses communications, la Commission européenne1 définit l'économie sociale: "L'économie sociale et les entreprises qui en relèvent appliquent des principes d'entreprise et de performance pour atteindre leurs objectifs sociaux et sociétaux. Ces entreprises doivent relever des défis particuliers en ce qui concerne l'accès au financement, à la formation en gestion et au conseil. L'économie sociale est constituée d'entreprises coopératives, mutuelles, associations, fondations - dont l'objectif principal est de fournir des services à leurs membres ou à la collectivité. Les entreprises de l'économie sociale, qui représentent près de 8% des emplois du secteur privé en Europe2, sont souvent aptes à survivre et à fournir des services de qualité dans des circonstances jugées moins lucratives par les entreprises pilotées par des investisseurs. Or, les spécificités de leurs systèmes de gestion, de la composition des groupes impliqués et enfin, la structure de leur capital, nécessitent des compétences particulières parmi leurs responsables et leurs équipes dirigeantes. De nombreuses administrations locales ont cherché à combiner les aspects positifs du secteur public et du secteur privé pour rendre les services publics plus performants, ce qui explique en partie l'essor des "entreprises sociales" qui poursuivent des objectifs principalement sociaux ou sociétaux et qui représentent actuellement 3,5 millions d'emplois dans l'Union européenne3." (Commission européenne, 2003). 2.3 Définition du gouvernement luxembourgeois L'accord de coalition reconnaît l'importance de l'économie sociale et solidaire. La nouvelle coalition retient une distinction nette entre le secteur associatif, les initiatives d'insertion tout en reconnaissant les mérites de ces dernières: "Initiatives sociales en faveur de l'emploi. Le Gouvernement est conscient que dans la logique d'un cofinancement par le biais du Fonds pour l'emploi, l'objectif premier en est la prise en charge de personnes éloignées du marché du travail, et notamment de chômeurs de longue durée. Le projet de loi n° 5144 relatif à la lutte contre le chômage social dont l’intitulé sera amendé de façon à en faire une loi pour le rétablissement du plein-emploi, sera finalisé en tenant compte des réflexions des acteurs du secteur, notamment en matière de charges administratives supplémentaires, sans pour autant toucher aux orientations générales du projet, à savoir - donner une base légale définitive et complète aux organismes gérant des initiatives sociales en faveur de l'emploi - garantir une efficacité sociale et une transparence financière de ces initiatives - assurer, dans ce cadre, l'accès limité et conditionné aux marchés publics tout en évitant toute forme de concurrence déloyale. Économie sociale/solidaire Le Gouvernement est conscient que la réglementation des initiatives sociales pour l’emploi ne saura à elle seule répondre aux aspirations importantes du secteur associatif oeuvrant dans le cadre de l’économie solidaire. A cette fin il s'engage à mener une large concertation sur le rôle de l'économie solidaire comme troisième pilier de l'économie et la mise en place d'un cadre légal nécessaire à son développement." L’exposé des motifs du projet de loi 5144 relative à la lutte contre le « chômage social » définit l'économie sociale de la manière suivante: "La doctrine définit l'économie sociale comme les groupements de personnes et non de capitaux jouant un rôle économique et créant du lien social: les coopératives de toute nature (de salariés, d'usagers, d'entreprises), les mutuelles (d'assurance ou de prévoyance), et les associations. L'économie solidaire est une forme émergente de l'économie sociale, surtout axée vers les initiatives de développement local, de réinsertion et de lutte contre l'exclusion. __________ 1 2 3 6 http://europa.eu.int/comm/employment_social/empl_esf/3syst/index_fr.htm) 7,92% des emplois civils salariés en équivalents plein temps (1995-1997), Action pilote: Troisième système et emploi, CIRIEC, 2000. Researching social enterprise, David Smallbone et al., the UK Small Business Service. "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 Ã la recherche de l'économie sociale et solidaire Les deux concepts sont rentrés dans le vocabulaire des grandes politiques européennes au plus tard à l'occasion de l'élaboration des lignes directrices pour l'emploi dans le cadre de la stratégie européenne pour l'emploi et les plans d'action nationaux en faveur de l'emploi et de lutte contre l'exclusion sociale qui en découlent. Cette consécration communautaire n'est que le début de la reconnaissance de la contribution fondamentale de l'économie sociale et solidaire aux politiques d'insertion et à la satisfaction de nouveaux besoins sociaux mal ou non pris en charge par les secteurs public ou privé notamment dans les domaines des services aux familles, de la protection de la santé, des personnes âgées, du recyclage des ressources, du développement culturel et souligne la diversité des réponses innovantes apportées par l'ensemble des composantes de l'économie sociale et solidaire. Souvent qualifiés de services de proximité, ces nouveaux services présentent une dimension de développement local et de participation démocratique "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 tout en s'avérant de précieux potentiels de création d'emplois. Au Luxembourg, les initiatives sociales en faveur de l'emploi actuellement en place ont largement contribué à exploiter de manière systématique de tels nouveaux gisements d'emplois liés à la satisfaction des nouveaux besoins locaux en y associant des groupes cibles extrêmement éloignés du marché du travail. Le présent projet de loi a comme unique but de réglementer la prise en charge par l'Etat de frais liés à l'intégration respectivement la réintégration dans le monde du travail de ces catégories de personnes très éloignées de la vie active." Le projet de loi vise donc surtout à délimiter les initiatives locales d’emplois, les entreprises sociales d’insertion des autres branches de l’économie sociale ou du tiers secteur classique. 7 À la recherche de l'économie sociale et solidaire 3. Première évaluation de l’importance de l’économie sociale au Grand-Duché de Luxembourg L’évaluation quantitative de l’économie sociale a fait l’objet de plusieurs études au niveau international. Citons les séminaires sur les comptes satellites pour l’économie sociale, qui ont eu lieu à Bruxelles en avril 2004, et le séminaire tenu à Luxembourg en décembre 2002, organisé par Eurostat, sur la mise en oeuvre du manuel pour les associations à but non lucratif, manuel développé par la Johns Hopkins University. Plusieurs pays ont fait des efforts pour appréhender statistiquement l’étendue et le poids de l’économie sociale1. Au Luxembourg, ces travaux ne font que commencer. Deux critères peuvent être mobilisés pour appréhender le poids de l’économie sociale et solidaire: l’emploi et la valeur ajoutée. Tableau: Branche (NACE 85.3) Action sociale regroupée par forme juridique (en%) Nace Rév.1 85.311 85.312 85.314 85.322 85.323 Forme juridique Nombre d'unités Total de salariés Établissements publics et communaux 0.76 s.o. Établissements d'utilité publique 1.52 Associations sans but lucratif 2.27 Total de salariés masculins Total de salariés féminins dont: Salariés à Salariés à Salariés à temps temps partiel temps partiel partiel masculins féminins 1.57 1.25 1.74 1.37 1.48 0.73 2.57 1.29 3.25 2.53 2.90 0.36 Établissements d'utilité publique 0.76 2.88 2.41 3.13 4.59 4.75 3.65 Associations sans but lucratif 3.03 5.91 4.19 6.83 5.91 6.17 4.38 Établissements d'utilité publique 1.52 0.40 0.09 0.56 0.63 0.74 0.00 Associations sans but lucratif 4.55 8.04 5.17 9.56 8.23 8.94 4.01 Société Coopérative 3.03 6.07 10.20 3.88 4.75 2.65 17.15 Établissements d'utilité publique 0.76 0.65 0.36 0.80 0.42 0.43 0.36 Associations sans but lucratif 4.55 4.96 7.71 3.51 1.79 1.73 2.19 Entreprise individuelle 1.52 s.o. 2.19 Établissements d'utilité publique 5.30 7.08 Groupements de droit privé 0.76 0.02 Associations sans but lucratif 4.32 8.54 7.96 8.94 0.02 0.05 0.06 62.97 58.15 61.76 61.22 64.96 100 100 100 67.42 59.82 Sociétés anonymes 0.76 s.o. Sàrl 1.52 0.03 0.04 0.02 TOTAL 100 100 100 100 __________ 1 8 B. Jadoul & Béatrice Thiry Le compte satellite des institutions sans but lucratif. L'expérience belge, 2004. "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 Ã la recherche de l'économie sociale et solidaire 3.1 Les salariés Que savons-nous actuellement au sujet de l’importance économique de l’économie sociale au Luxembourg? En l’absence d’une étude spécifique nous nous référerons aux données disponibles au STATEC et à la nomenclature utilisée pour la catégorisation des activités économiques, à savoir la NACE (nomenclature des unités d’activité économique dans les CE) qui comporte une branche Action sociale (85.3) et sept sous-classes: l’économie sociale et solidaire dans le sens large généralement admis. On y compte environ - 130 unités d’activité qui occupaient en septembre 2004 - quelque 6 500 salariés, soit 2.4% de l’emploi salarié total, dont 1 900 personnes à temps partiel. - L’activité est dominée par les salariés féminins qui représentent deux tiers soit 4 250 personnes dont 1623 à temps partiel. - En termes de salariés le secteur avoisine le commerce automobile, y compris la réparation; il compte six fois l’emploi de l’agriculture. 85.311 Orphelinats et instituts pour enfants en difficulté, 85.312 Instituts pour handicapés, 85.313 Maisons de retraite, 85.314 Autres activités sociales avec hébergement, 85.321 Crèches et garderies d’enfants, 85.322 Ateliers protégés, 85.323 Autres activités d’action sociale sans hébergement. On y trouve différentes formes juridiques, des a.s.b.l., des coopératives, mais également des sociétés anonymes des s.à.r.l. ou encore des entreprises individuelles. Si on fait abstraction des maisons de retraite et des crèches on peut considérer qu’en gros ce groupe NACE recouvre Les 12 associations de la plate-forme « Economie sociale et solidaire » employaient à la même époque 1 575 salariés dont 527 femmes. A l’intérieur de cette plateforme les organismes plus particulièrement focalisés sur la réinsertion de chômeurs employaient 1 387 salariés dont 326 femmes. A titre de comparaison on peut citer la distribution d’électricité de gaz et eau ou encore les activités immobilières où l’emploi se situe dans le même ordre de grandeur. 3.2 La valeur ajoutée Pour une entreprise la valeur ajoutée se calcule comme étant la différence entre la production et la consommation intermédiaire, la production représentant les ventes de produits et/ou de services sur le marché. Pour l’action sociale, la Valeur Ajoutée Brute est calculée via le coût i.e. les salaires et les amortissements sont additionnés. Ainsi la valeur ajoutée brute estimée par la Comptabilité Nationale pour l’action sociale, hors maisons de retraite et crèches, s’élevait-elle en 2003 à plus ou moins 1% du PIB. Une estimation grossière situe la part des unités de la plate-forme dans un ordre de grandeur oscillant entre 0.3 et 0.4% de la valeur ajoutée. 3.3 Limites de l’exercice quantitatif Certes l’instrument de mesure de la contribution appelle quelques commentaires: - la comptabilité nationale – les comptables sont les premiers à le reconnaître (Piriou, 2001) n’enregistre que les transactions monétaires marchandes, de nombreuses transactions échappent donc à l’évaluation quantitative de l’économie sociale, ceci d’autant plus que le volontariat joue un rôle important; "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 - la valeur ajoutée et l’emploi, comme critères de la contribution de l’économie sociale ne tiennent pas compte des effets indirects, des externalités qui peuvent s’exprimer en termes de valeur ajoutée ou d’emplois induits, voire de satisfaction individuelle ou collective. 9 À la recherche de l'économie sociale et solidaire 4. Conclusions Le « tiers système », entre économie publique et privée, a une importance non négligeable, soit environ 1% de la valeur ajoutée au Luxembourg. C’est un secteur très hétérogène dans lequel les entreprises sociales d’insertion se distinguent nettement de l’économie sociale classique issue du mouvement coopératif et mutualiste. L’économie solidaire, les entreprises d’insertion en particulier, peuvent être considérées comme vecteur d’une nouvelle forme de politique d’emploi. De plus, elles contribuent à dynamiser les marchés des biens et services, elles combinent la création d’emploi et l’esprit d’entreprise, elles occupent des niches laissées en friche, elles satisfont des nouveaux besoins, elles favorisent la participation des citoyens et le volontariat, elles renforcent la solidarité et la cohésion sociale. 10 Il faut cependant avoir aussi à l’esprit le risque de concurrence déloyale en raison des subventions importantes aux « entreprises solidaires », qui réduiraient ainsi l’effet positif sur l’emploi ou sur la valeur ajoutée par un effet négatif de substitution ou d’éviction. Il va de soi que l’importance de ce secteur hétérogène méconnu gagnerait à être analysée plus en profondeur. Le Statec est prêt à lancer des enquêtes plus poussées et à réaliser des analyses approfondies sur l’importance, et l’impact de l’économie sociale et solidaire au Luxembourg. "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 Ã la recherche de l'économie sociale et solidaire 5. Bibliographie (extraits) B. Jadoul & Béatrice Thiry Le compte satellite des institutions sans but lucratif. L'expérience belge, 2004 B. Lévesque, G. L. Bourque, E. Forges, La nouvelle sociologie économique, Desclée de Brouwer, Paris, 2001 Commission européenne, COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL ET AU COMITÉ DES RÉGIONS sur la promotion des sociétés coopératives en Europe, COM(2004)18, Bruxelles, le 23.02.2004 Commission Européenne, Extrait du LIVRE VERT COM(2003) 27 final: « L'esprit d'entreprise en Europe », le 21.1.2003 J.L.Laville, A.D. Cattani Dictionnaire de l’autre économie, Desclée de Brouwer, 2005 J.P. Piriou La comptabilité nationale, 10e édition, Repères, La Découverte, 2001 N. Bardos-Fétronyi, Comprendre l’économie sociale et solidaire, Chronique sociale, Lyon, Couleur livres, Charleroi, 2004 P. Rosanvallon, La nouvelle question sociale. Repenser l’Etat Providence, Editions du Seuil, 1995 S. Mertens , Development of a methodology on the "social economy – satellite account, présenté au seminar on the Satellite Account for the Social Economy Brussels – 23.4.2004 "Économie et Statistiques" - Working papers du STATEC n° 8 11