les cosmogonies - Club d`Astronomie Véga

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LES COSMOGONIES
Parmi les très nombreux récits traditionnels, ceux qui relatent les origines du
monde, des dieux ou des institutions appartiennent souvent à la catégorie des
mythes. Les figures idéales et les modèles intemporels ont donc une place
importante dans les récits cosmogoniques et les légendes de création du monde
(du grec cosmo- « monde » et gon- « engendrer »).
Il existe de très nombreux récits de création du monde. Derrière cette variété
se retrouve le souhait de décrire les transformations radicales justifiant
l'existence du monde observable, de la Terre et de l'Homme.
1. CONSTANCES DANS LES SCHEMAS DE L'IMAGINAIRE HUMAIN
La plupart de ces mythes recèlent des points communs :
• L'œuf (œuf cosmique)
Il est souvent représenté comme le germe contenant l'universen puissance. Il
symbolise la rénovation périodique de la nature, la possibilité de renaissance du
monde. L'éclosion de l'œuf donne naissance à l'Univers (Pan Gu en Chine,
Partholon chez les Celtes, Puruska en Inde, Nommo au Mali).
• L'eau
Symbole de pureté, l'eau est souvent exprimée par le biais du Déluge. Le déluge
se retrouve dans de nombreuses cosmogonies. Il rappelle à l'homme sa faiblesse
face aux puissances célestes et permet le renouvellement du monde grâce aux
meilleurs des humains (le roi Manu, sauvé par Vishnu et transformé en poisson,
Noé et son arche, Deucalion et Pyrrha sauvés par Prométhée).
•
Le chaos primordial
La naissance d'un monde harmonieux est souvent la résultante de conflits entre
forces antagonistes, l'ordre et le désordre. Le chaos originel n'est pas un
ensemble, mais plutôt une entité renfermant l'ensemble des éléments à venir,
tous mélangés.
•
Autres
Dans la majorité des cosmogonies traditionnelles, les créateurs sont un ou des
dieux anthropomorphes qui génèrent l'Univers et l'Homme par la parole, le
geste, un membre, des sécrétions...
2. ETAPES CLASSIQUES DE CREATION DU MONDE
La majorité des mythes ont ceci en commun qu'ils ne supposent pas l'existence
d'un Univers incréé, immuable et éternel, mais suggèrent des étapes et des
devenirs possibles du monde :
1. Apparition de l'Univers à partir du néant (ex nihilo), du chaos ou de l'inconnu ;
2. Naissance du temps et de l'espace, de la lumière et de la matière
3. A partir du chaos primordial inerte, les éléments, eau, terre, feu et air (en
Occident ; dans d'autres cultures, les éléments fondamentaux sont organisés
différemment) s'animent ;
4. Apparition de la vie à partir de la rencontre et du mélange de ces éléments ;
5. Apparition de l'homme ;
6. Possibilité de création d'un nouvel univers après un cataclysme mondial.
Certains mythes partent du principe que la naissance et la mort de l'Univers est
une création continue. L'univers apparaît, vit, disparaît puis laisse place à un
nouvel univers et ceci à l'infini. Chaque création d'univers correspondrait à une
sorte de réincarnation de Dieu. Le corps physique de Dieu serait l'univers tout
entier. À chacune de ses réincarnations, il s'améliorerait et pourrait donc créer
à chaque fois un univers meilleur que le précédent.
Aux mythes cosmogoniques répondent les mythes eschatologiques, qui décrivent
la fin du monde.
Rê à bord de sa barque
La cosmogonie varie en fonction de la région, et les dieux tutélaires ont souvent
les rôles les plus importants.
A Héliopolis : issu du Noun, l'océan, émerge Rê qui est à la fois le soleil, Atoum
l'être achevé ou encore Khepri la renaissance. En se masturbant, il met au monde
Shou le sec. De son crachat naît Tefnout, l'humide. De ce couple en naît un
autre, Nout, le ciel et Geb, la terre que leur père sépare en levant les bras.
Viennent ensuite Osiris et Isis, Seth et Nephtys. Le premier couple symbolise le
renouveau végétal et avec eux vient la légende d'Osiris, alors que le second est
stérile.
A Memphis : au début des temps, Ptah le démiurge, issu du Noun, l'océan
primordial, prit conscience de son existence. Puis il prit le limon de la terre,
créant et modelant l'Homme. Aussitôt son œuvre créatrice terminée, il céda la
place à son successeur Rê, le soleil. Rê, seigneur d'Héliopolis, parcourt chaque
jourson domaine dispensant à l'humanité dons et bienfaits.
En Haute-Égypte, Amon (père des dieux fondateurs du monde) féconda l'œuf
cosmique d'où naquit toute vie.
3. COSMOGONIE MESOPOTAMIENNE
Sceau sumérien représentant les Anunnaki
Les mythes de la création, d'origine sumérienne, mettent en scène deux êtres
primordiaux : l'un féminin, Tiamat, l'eau salée et l'autre masculin, Aps?, l'eau
douce. De leur union naissent tous les dieux, dont les principaux sont Enlil, Adad,
Enki (Ea), Ishtar, Marduk, mais aussi des dieux dominants Annunaki qui
exploitent les dieux Igigi en les faisant travailler durement afin de nourrir tous
les dieux.
La voûte céleste, les étoiles, la terre, les enfers... furent formés du cadavre de
Tiamat, au terme d'une guerre gagnée par Marduk. Puis l'homme fut créé à son
tour pour servir les dieux lorsque les Igigi se révoltèrent contre les Annunaki.
L'homme fut façonné à partir d'argile trempée dans la chair et dans le sang d'un
dieu sacrifié, donnant ainsi à la créature un peu de l'intelligence divine.
4. COSMOGONIE GRECO-ROMAINE ANTIQUE
Au début était le Chaos, un tout incommensurable au sein duquel les éléments
constituant le monde actuel étaient mélangés. Quatre entités s'en séparèrent :
Gaïa (la Terre), Éros (le Désir amoureux vu comme force créatrice primordiale),
Érèbe (les Ténèbres des Enfers) et Nyx (la Nuit). Gaïa engendra Ouranos (le
Ciel), le premier principe fécondateur mâle (pour les Anciens, le Ciel fécondait la
Terre par ses pluies, comparables à une semence), et de leurs étreintes
naquirent les Titans, dont Cronos, les trois Cyclopes et les Hécatonchires
(géants à cent bras).
5. COSMOGONIE HINDOUE
Le temps est vu de manière cyclique ; il existe donc un cycle de créations et de
destructions. Lorsque Brahma se réveille et qu'il ouvre les yeux, l'univers et tout
ce qu'il contient se crée, lorsqu'il s'endort, tout se détruit. Vishnou protège
l'univers. Shiva le détruit et donc mène à sa renaissance. L'univers connaît donc
une suite de naissances et de destructions.
On représente traditionnellement le cycle créateur impliquant les trois dieux de
la Trimurti comme suit : tandis que Vishnou dort, allongé sur le serpent Ananta
(infini), lui-même flottant sur l'océan d'inconscience, de son nombril sort un
lotus dans lequel se tient Brahma. Tout en dormant, Vishnou rêve le monde tel
qu'il l'a connu, et de ses souvenirs oniriques, Brahma donne naissance à un
nouveau monde, nécessairement moins pur que le précédent (d'où la théorie des
âges). C'est Shiva qui, par sa danse cosmique, anime l'Univers conçu par la pensée
et, à la fin du cycle, le détruit.
Pour certaines sectes hindouistes, notre univers n'est que le rêve de Dieu, une
illusion, la Mâyâ.
6. COSMOGONIE MONOTHEISTE
Dans cette cosmogonie, la création de l'univers est décrite dans le livre de la
Genèse. On considère aujourd'hui, en général, que ce récit est symbolique. Le
créateur (qu'il soit appelé Yahvé, Dieu ou Allah) est intemporel, n’ayant ni début
ni fin. D'après la vision biblique, lorsqu’il créa le monde, l’univers était « vide et
vague, les ténèbres couvraient l'abîme, un vent de Dieu tournoyait sur les eaux ».
Le premier jour, il créa la lumière par la parole (« Que la lumière soit et la
lumière fut »), basculant le monde vers une alternance entre jours et nuit.
Le deuxième jour, il sépara ciel et mer, créant ainsi la plate-forme de base du
monde.
Le 3e jour, il créa la terre, la fertilisa et y parsema la végétation, donnant
naissance à la vie.
Le 4e jour, il créa le soleil et la lune pour indiquer l’alternance entre les deux
états du monde (« Dieu fit les deux luminaires majeurs : le grand luminaire
comme puissance du jour et le petit luminaire comme puissance de la nuit, et les
étoiles. »).
Le 5e jour, il peupla le ciel par les oiseaux et les mers par les poissons.
Le 6e jour, il décida de créer les êtres qui peupleront la terre ferme, donnant
naissance au règne animal ainsi qu’à l’homme, être à son image et destiné à
dominer la terre (« et qu'ils dominent sur les poissons de la mer, les oiseaux du
ciel, les bestiaux, toutes les bêtes sauvages et toutes les bestioles qui rampent
sur la terre »).
Enfin, le 7e jour, il se reposa bénissant et sanctifiant ces jours où il eut fini de
créer le monde.
Le récit coranique indique aussi une création en six jours : « Votre Seigneur est
Allâh qui a créé les cieux et la terre en six jours ».
Les six jours en question sont répartis en trois phases de deux jours : « Dis :
"Renieriez-vous (l’existence) de Celui Qui a créé la terre en deux jours et Lui
donneriez-vous des égaux ? Tel est le Seigneur de l’univers, § c’est Lui Qui a
fermement fixé des montagnes au-dessus d’elle, l’a bénie et lui a assigné ses
ressources alimentaires en quatre jours d’égale durée. (Telle est la réponse) à
ceux qui t’interrogent. § Il S’est ensuite tourné vers le ciel qui était alors fumée
et lui dit, ainsi qu’à la terre : "Venez tous deux, bon gré, mal gré". Tous deux
dirent : "Nous venons de bon gré". § Il décréta d’en faire sept cieux en deux
jours et révéla à chaque ciel sa fonction. ».
Les théologiens musulmans interprètent la durée de la création de manière
métaphorique renvoyant au verset suivant : « Cependant, un jour auprès de ton
Seigneur, équivaut à mille ans de ce que vous comptez ».
7. COSMOGONIE DES ABORIGENES D’AUSTRALIE
La cosmogonie des aborigènes d'Australie repose sur la notion de « Temps du
rêve », en anglais « Dreamtime » et en langue locale « Tjukurpa ». À cette
époque mythique, les ancêtres surnaturels, comme le Serpent Arc-en-ciel ou les
Hommes Éclairs, créèrent le monde par leurs déplacements et leurs actions.
Tjukurpa fournit une explication du monde, définit le sens de la vie, ce qui est
bien ou mal, ce qui est naturel ou ce qui est vrai. Ces définitions règlent tous les
aspects de la vie des Anangu, peuple de l'Australie Centrale.
Tjukurpa interprète chaque site et chaque élément du paysage en termes
symboliques, il mêle le passé (c'est-à-dire l'histoire de sa création) avec le
présent et sa signification.
Uluru a été créé pendant la Tjukurpa. Ce monolithe de 3600 m de long et de 348
m de haut proviendrait du jeu de deux enfants mythiques dans la boue un jour de
pluie. Tout autour de ce rocher, de nombreux sites sont sacrés et porteurs de
mémoire et de légendes.
Dans cette cosmogonie, la pensée a créé toute matière. La terre, les hommes, les
animaux et les plantes ne sont que des parties d'un même tout. Donc les hommes
ne peuvent pas posséder de terres ni d'animaux. Cette cosmogonie a provoqué de
graves conflits entre les colonisateurs et les aborigènes qui ne comprenaient pas
les notions de propriétés privées délimitées ou d'élevage.
8. COSMOGONIE SCANDINAVE
Yggdrasil, l'arbre cosmique, assure la cohérence verticale des mondes de la mythologie nordique, tandis que
le serpent de Midgard sa cohérence horizontale. Peinture attribuée à Oluf Olufsen Bagge.
La cosmogonie scandinave nous est racontée en détail dans la Völuspá, ou Chant
de la voyante, poème de l'Edda en vers. Il existe cependant de nombreuses
variantes. Le Chant de la voyante en raconte une, que voici.
Au commencement n'existait qu'un abîme béant, le ginnunga gap, qui rappelle le
Chaos primordial grec ou la terre déserte et vide biblique. Les éléments y
erraient, libres, et une rencontre fortuite entre du feu et de la glace donna
naissance au premier géant, Ymir, lequel géant engendra les autres géants. Une
vache, Auðumla, l'avait délivré de sa gangue de glace en la léchant, et le
nourrissait de ses flots de lait. Les fils de Burr, Óðinn et ses deux frères Hœnir
et Lóðurr, géants qu'Auðumla avait aussi libéré de la glace, tuèrent Ymir et
bâtirent l'Univers de sa dépouille : son corps devint un cercle de terre, Miðgarð
(terre du milieu), qu'entourait son sang, devenu la mer, tandis que son crâne
servit de voûte céleste. Ils établirent ensuite un ordre, fixant une place au soleil
et à la lune, élevèrent des palais et s'établirent en Ásgarð (terre des dieux
Ases ).
Les neufs mondes avaient pris place autour de l'arbre Yggdrasil, peuplé des
mortels que les nains avaient façonnés avec la terre. Óðinn, Hœnir et Lóðurr leur
donnèrent le souffle vital. Enfin vinrent Urðr, Verðandi et Skuld, les trois
Nornes, équivalent des Parques latines et des Moires grecques, qui fixèrent le
destin de chacun.
9. COSMOGONIE DOGON
Suite aux travaux des ethnologues Marcel Griaule et Germaine Dieterlen dans
les années 1930-1950, certains auteurs dont Eric Guerrier en France et Robert
Temple au Royaume-Uni ont avancé l'hypothèse que les Dogon avaient été visités
par des extraterrestres pour détenir autant d'informations et aussi précises sur
l'astronomie, en particulier sur le système de Sirius, le système solaire, la
Galaxie, etc…
Selon leur mythologie, Amma a tiré la Terre d’un boudin d’argile. Huit nommo, des
petits génies aux yeux rouges et au corps vert sont nés de cette argile. Ils ont
donné naissance à huit familles qui sont devenues les huit tribus du peuple Dogon.
Ces mythes deviennent intéressants quand les Dogons affirment que les huit
nommo viennent de Sirius. De plus, les Grands prêtres savent depuis fort
longtemps que Sirius est accompagnée d’une autre étoile, baptisée par les
astronomes Sirius B.
Sirius. © Nasa
Ce qui est extraordinaire c’est que depuis plusieurs siècles, toute la cosmogonie
des Dogons est commandée par Sirius B. Or, cette étoile n’a été découverte
qu’en 1836 et identifiée comme une naine blanche qu’en 1915.
10. COSMOGONIE SCIENTIFIQUE
Les théories scientifiques fournissent à l'imaginaire populaire les éléments d'une
cosmogonie moderne. Cependant, la cosmogonie scientifique en tant que telle
s'occupe de la formation des objets célestes (planète, étoile, galaxie, etc.), alors
que la cosmologie est la branche de l'astrophysique qui étudie la structure et
l'évolution de l'univers. En cela, elle fournit les théories décrivant l'évolution de
l'univers, notamment le modèle du Big Bang. La biologie fournit les théories
décrivant l'origine et l'évolution de la vie, notamment les théories de l'évolution.
Les théories ne fournissent pas « toutes les réponses ». Par exemple le modèle
du Big Bang permet de remonter vers une époque très reculée de l'histoire de
l'univers, mais ne prétend pas connaître ses tous premiers instants. La plupart
des physiciens pensent que ce problème résulte de notre compréhension limitée
des lois de la physique dans une telle situation, ainsi que de l'absence d'éléments
observationnels ou expérimentaux relatifs à ces époques.
Les théories scientifiques sont par essence sujettes à de profonds
remaniements. Par exemple le modèle du Big Bang a été proposé en 1927 par
l'abbé Lemaître à partir d'une théorie de « l’œuf primitif ». Celui-ci fut un
pionnier dans l'utilisation de la relativité générale formulée par Einstein douze
ans plus tôt.
Le Big Bang n'est considéré comme étant le modèle le plus satisfaisant que
depuis les années 1960.