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Université de Strasbourg
Ecole nationale d’administration
Master « Administration publique »
Parcours « Administration publique générale »
CRISES ECONOMIQUES ET POLITIQUES
ET
LA MOBILISATION DES RECETTES PUBLIQUES
EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
Sous la direction de
Robert HERTZOG
Professeur Emérite de l’Université de Strasbourg
Soutenu par
Adolphe LUMBIKILA LUEMBA
CIL Promotion Jean de La Fontaine (2013-2014)
Jury composé de :
- Gabriel ECKERT : président
- Robert HERTZOG : directeur de mémoire
- Fabrice LARAT : membre du jury
Mai 2014
I
DEDICACE
A mon épouse Sissy MOLAY MOKANGO, pour les sacrifices consentis !
A mon fils Armel LUMBIKILA LUEMBA, dont les premiers instants de la vie
ont été marqués par mon absence pour raison de la présente scolarité !
II
REMERCIEMENTS
Force nous est, à la fin de ce travail, remercier tous ceux qui nous ont
aidé pour réaliser ce travail.
Nous exprimons notre gratitude Monsieur Robert HERTZOG,
professeur émérite à l’Université de Strasbourg, pour avoir accepté de
guider nos pas dans la réalisation de ce travail.
Nos remerciements s’adressent également à Maitre TUNDA ya
KASENDE ainsi qu’aux Messieurs Gérard POINTE, Laurent MABIALA UMBA et
Dieudonné SASSE KEMBE pour l’attention et la documentation fournie.
III
SOMMAIRE
O. INTRODUCTION…………………………………………………………………………1
CHAPITRE I : CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET ECONOMIQUE DE LA RDC……8
I.1. Bref aperçu sur l’évolution politique de la Rd Congo ……………………………….8
I.2. La situation économique de la Rd Congo…………………………………………..14
I.3. Valeur et légitimité du pouvoir public congolais ………………………………….27
CHAPITRE II : L’ORGANISATION DU SYSTEME DES RECETTES PUBLIQUES
EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO…………………30
II.1. Cadre juridique et administratif des recettes publiques…………………………...30
II.2. Spécificités du système congolais de perception des recettes publiques………39
CHAPITRE III : L’IMPACT DES RECETTES PUBLIQUES SUR LES CONDITIONS
DE VIE DES HABITANTS EN RD CONGO………………………….51
III.1. Le contraste de l’augmentation des recettes publiques et de la persistance de la
vulnérabilité des citoyens…………………………………………………………..51
III.2. L’évaluation de la mobilisation des recettes courantes. ………………………...59
III.3. Recommandations pour la maximisation des recettes publiques……………..64
CONCLUSION…………………………………………………………………………….75
IV
ACRONYMES
BAD
: Banque Africaine du Développement
CDF
: Congolese Democratic Francs (Francs congolais)
DGDA
: Direction Générale des Douanes et Accises
DGI
: Direction Générale des Impôts
DGRAD
: Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires,
Domaniales et de Participations.
DSCRP
: Document de la Stratégie pour la Croissance et la Réduction de la
Pauvreté.
FMI
: Fonds Monétaire International
IPPTE
: Initiative- Pays Pauvres Très Endettés
ITIE
: Initiative pour la Transparence des Industries Extractives
OCDE
: Organisation de Coopération et de Développement Economiques
OMD
: Objectifs du Millénaire pour le Développement
ONU
: Organisation des Nations Unies
PEG
: Programme Economique du Gouvernement
PIB
: Produit Intérieur Brut
PIR
: Programme Intérimaire Renforcé
PNUD
: Programme des Nations Unies pour le Développement
RDC
: République Démocratique du Congo
TVA
: Taxe sur la Valeur Ajoutée
USD
: United States Dollars (Dollars Américains)
V
RESUME
La République Démocratique du Congo est un pays pauvre. Cette situation
est la résultante de la récession économique qui a débuté depuis 1960 ainsi que les
troubles politiques et la dictature qui ont caractérisé les cinquante années
d’indépendance. Les réformes politiques et économiques entamées depuis 2001 ont
permis la mise en place des institutions politiques démocratiques et l’amorce de la
croissance économique continue. Mais ces efforts restent insuffisants au regard de
besoins de reconstruction du pays.
C’est ainsi que la RD Congo cherche des ressources financières pour
reconstruire le pays et réduire la pauvreté. Mais elle est butée à plusieurs difficultés :
le pays n’a pas accès aux marchés des capitaux, la volatilité et la diminution de l’aide
au développement, l’épargne domestique quasi-inexistante, les
financements
bilatéraux et multilatéraux sont soumis à des conditionnalités qui laissent le destin du
pays à la merci des financeurs.
Les recettes fiscales demeurent le seul levier. Celles-ci ont certes
sensiblement augmenté de 2001 à 2012, dans la mouvance de la croissance
économique enregistrée durant la même période. Mais elles demeurent très faibles
au regard des défis et le taux de prélèvements se situe encore en déca de la
capacité contributive du pays. D’où la possibilité et nécessité d’augmenter encore les
recettes fiscales.
Pour y parvenir, il faudra certes poursuivre la reforme du cadre juridique de la
fiscalité congolaise, mais il est judicieux de réorganiser le cadre administratif
notamment en fusionnant plusieurs les administrations fiscales et en instituant le
contrôle interne, informatiser les circuits et les procédures pour sécuriser les recettes
et réduire la fraude, simplifier les procédures, mais surtout améliorer la gouvernance
en canalisant la rente des ressources naturelles vers le Trésor public.
VI
SUMMARY
The Democratic Republic of Congo is a poor country. This situation is a result of
economic recession which started in 1960 as well as a consequence of political
instability and dictatorship which have characterised the fifty four years of
independence.
The Democratic Republic of Congo is thus in search of financial resources in order to
rebuild the country and reduce poverty. However, the country faces several
challenges: lack of access to the capital market, development aid volatility and
depletion, quasi non-existent domestic saving, bilateral and multilateral loans are only
available on terms which leave the country at the mercy of financiers.
The country can only rely on fiscal revenue which has significantly increased from
2001 to 2012 in accordance with economic growth experienced during the same
period. However, given the challenges faced by the country, fiscal revenue remains
low. Besides, fiscal collection stands below the country’s fiscal contribution capacity.
Therefore, it is possible and even necessary to increase fiscal revenue.
To reach this goal, it is undoubtedly necessary to reform the fiscal legal framework. In
addition, it is also important to reorganise the administrative framework by merging
several fiscal administrations, instituting internal audit, computerising processes and
procedures in order to secure fiscal revenue and minimise fraud, simplifying
procedures, and most importantly improving governance in channelling natural
resources revenue towards the public Treasury.
INTRODUCTION
1. CONTEXTE
La République Démocratique du Congo est un pays pauvre : le taux de
pauvreté est à 70% de sa population estimée à 73 millions d’habitants. A la clôture
de l’année 2013, le taux de chômage se situait à 46,1% de la population active, dont
deux tiers des jeunes. 30 enfants sur 100 en âge de scolarité ne vont pas à l’école,
et 55,5% d’écoliers n’achèvent pas la sixième année primaire. Le taux de mortalité
maternelle s’élève à 670 pour 100.000 naissances vivantes et la prévalence de VIH
est estimée à 1,3%. Le taux d’inflation, qui était à 520% en 1994 et à 46% en 2008 a
été ramené à 9,34% en 2012. Le taux de croissance était à 7,2% la même année.
Cependant, l’indice du développement humain est de 0,304 et la RD Congo est
classée au dernier rang mondial1.
Elle est aussi un Etat post-conflit et est à cet effet nommé un Etat « fragile »2.
En effet, la RD Congo sort de deux guerres civiles qui se sont déroulées de 1996 à
1997 et 1998 à 2002. La première guerre a eu raison du dictateur qui régnait depuis
32 ans alors que pendant la seconde est considérée comme la première guerre
africaine puisqu’elle a vu intervenir sept pays africains soutenir soit le Gouvernement,
soit les deux rebellions qui occupaient le deux tiers du territoire national. Malgré la
signature de l’accord mettant fin aux hostilités en décembre 2002 à Sun-city et la
constitution d’un gouvernement d’union nationale de juin 2003 à juin 2006
rassemblant
tous
les
belligérants
dans
un,
d’autres
rébellions
se
sont
successivement formées dans les provinces du Kivu à l’Est du pays. Une Mission de
l’Organisation des Nations Unies de Stabilisation du Congo (MONUSCO) est
installée au pays depuis 2002. Formée de 18.000 hommes, elle actuellement
associée aux Forces armées de la RDC dans les opérations d’éradication de
rebellions et groupes armés qui sèment l’insécurité dans les provinces du Kivu.
1
Lire à ce sujet Le condensé hebdomadaire d’informations statistiques de la Banque Centrale du
Congo (n° 02/2014 du 10 janvier 2014) et le Rapport sur le développement humain en 2013, publié
par le Programme des Nations Unies pour le Développement.
2
OCDE, Suivi des principes d’engagement international dans les Etats fragiles et les situations
précaires. Rapport pays 3 : République Démocratique du Congo. 2010.
1
La RD Congo est un Etat qui renoue avec la pratique démocratique. Autrefois
appelé « Zaïre », ce pays fut confronté aux troubles politiques au lendemain de
l’indépendance et a subi, dès 1965, une dictature sanglante et prédatrice jusqu’au
coup d’état de 1997. Elle est ensuite passée sous le régime militaire et puis à partir
de 2003 sous le régime des belligérants qui a abouti en 2006 aux premières
élections démocratiques, après celles de 1960 organisées à la veille de
l’indépendance. Mais, ce processus de refondation de l’Etat se heurte actuellement
au problème de gouvernance. Du point de vue politique, le défaut de gouvernance
est symbolisé par de nombreuses irrégularités et fraudes constatées lors les
élections présidentielles et législatives de 2011 qui ont permis la réélection du
président Joseph Kabila3. Sous l’angle économique, le défaut de gouvernance est
épinglé dans la gestion des ressources naturelles. En effet, en décembre 2012, le
FMI et la Banque Mondiale avaient suspendu la coopération technique4 et par
ricochet, tout financement extérieur. Il est reproché aux autorités congolaises le
manque de transparence dans l’attribution des contrats d’exploitation des
concessions minières. Le pays est aussi suspendu du processus de l’Initiative pour la
Transparence des Industries Extractives (ITIE), car des centaines de millions USD,
pourtant déclarés payés à l’Etat par les entreprises minières, n’ont pas été retracés
dans le compte du Trésor Public5.
2. PROBLEMATIQUE
La RD Congo est donc confrontée aux défis de reconstruction du pays et de la
lutte contre la pauvreté. Ces défis sont immenses et complexes car elle est dans un
cercle vicieux : insécurité, faible accès aux besoins humains de base, absence de
sécurité sociale, ressources publiques insuffisantes, faible gouvernance, absence de
fierté nationale, faible épargne, une économie non industrialisé,… Elle a certes fait
des avancées depuis 2001 : l’organisation des élections en en 2006 et 2011 et la
stabilisation du cadre macroéconomique, gratifiée en juillet 2010 par un allègement
3
Lire à ce sujet le Rapport de la Mission d’observation de l’Union Européenne pour les élections
présidentielles et législatives du 28 novembre 2011 en République Démocratique du Congo
4 Rapport de la revue trimestrielle du programme de relais consolidation (Ministère des FinancesRDC) décembre 2012, p.4.
5 Rapport ITIE – RDC 2010 publié en décembre 2012.
2
plus que substantiel de 80 % de sa dette extérieure dans le cadre du processus de
l’Initiative pays pauvres très endettés (I-PPTE.). Mais, la stagnation de l'indice du
développement humain en 2013 démontre que le pays éprouve d’énormes difficultés
pour sortir de l’interaction de la pauvreté et de la fragilité.
Certaines études estiment que l’industrialisation, par ses effets multiplicateurs
sur la croissance et la création d’emplois, permettrait de briser ce cercle vicieux6. Le
Gouvernement pour sa part, qui a longtemps concentré les efforts sur la stabilité du
cadre macroéconomique, mise sur l’augmentation des ressources publiques pour
endiguer la persistance de la pauvreté. Il prévoit de collecter environ 48 milliards
USD en recettes publiques cumulées pour la période de 2012 à 20167. Cet objectif,
estimé très ambitieux par le Gouvernement, parait très insuffisant pour faire passer la
RD Congo du stade de pays fragile à celui de pays en voie de développement, qui
est un processus social et culturel et non une statistique macro-économique.
Quant à la piste du financement extérieur, il faut noter que le pays n’a pas
accès aux marchés des capitaux. Et le constat réalisé en 2003 par Kabuya Kalala et
Tshuinza Mbiye est toujours d’actualité. En effet, ces derniers notent que
l’accomplissement des fonctions minimales d’un Etat moderne ainsi que l’impératif de
mobiliser le financement requis pour la reconstruction post-conflit sont si
contraignants que l’aide étrangère demeure incontournable dans le processus de
refondation politique et de consolidation de l’économie congolaise8.
Ce cri de détresse eut un écho favorable car la RDC a bénéficié d’un flux net
cumulé de 15,08 milliards USD au titre de l’aide publique au développement pour la
période de 2002 à 2008. Cette injection de ressources extérieures dans l’économie
congolaise a été si importante qu’elle a permis de remettre en place un minimum
6
SEUNG-HUN Chun (Dr), La relance économique de la RDC, Séminaire à l'intention des membres du
Gouvernement, à Zongo, (KDS-KOICA), 6 août 2012.
7
Programme d’actions du Gouvernement 2012-2016 – RDC, Mai 2012, p.53.
8 Kabuya (Kalala) et Tshuinza (Mbiye), Les enjeux du financement de la reconstruction de l’Etat et de
l’Economie formelle, in Notes de Conjoncture, (Nouvelles
séries), Volume 1, n° 1, octobre 2003, p. 64.
3
d’infrastructures essentielles du pays9. Elle a aussi permis la stabilisation du cadre
macroéconomique, sous le contrôle des institutions de Brettons Wood (Banque
Mondiale et le FMI).
Cependant, ces ressources, bien que plus importantes que les ressources
fiscales prélevées durant la même période, ont constitué plus un palliatif qu’un
mécanisme susceptible de déclencher le décollage économique. Fort de ce constat,
le pays a recherché d’autres sources de financement, illustrées par la signature en
2008 du contrat de financement de 9 milliards USD en échange d’une joint-venture
sino-congolaise d’exploitation des ressources naturelles. Ces ressources devraient
permettre la réalisation des grands travaux d’infrastructures à impact économique et
social. L’exécution de cet accord tarde cependant toujours10.
Notre premier constat demeure : le pays est pauvre et fragile, sans ressources
fiscales suffisantes et sans ressources extérieures conséquentes. C’est ainsi que la
question de mobilisation des ressources fiscales pour le développement de la RDC
reste une priorité d’Etat, surtout que le pays a enregistré depuis 2002 un taux annuel
moyen de 5,5% de croissance économique. Ce qui suggère plusieurs questions :
quel a été le niveau réel des ressources fiscales ? Et ont-elles contribué à
l’amélioration des conditions de vie des habitants ? Voila des questions auxquelles
ce travail s’évertuera de répondre.
Répondre à ces questions conduit à associer dans une seule étude deux
aspects distincts du circuit financier de l’Etat : la collecte des deniers publics et leur
redistribution. Réaliser une telle étude pousse d’une part s’interroger sur le système
fiscal tant son cadre juridique que son fonctionnement administratif, et d’autre part à
choisir l’investissement public par les ressources fiscales comme l’axe d’analyse de
la redistribution. Mais il faut préalablement s’imprégner du contexte institutionnel et
économique d la RD Congo pour mieux appréhender les enjeux de ce travail.
ème
9 Document de la Stratégie de Croissance et de Réduction de la Pauvreté, 2
2015. (Ministère du Plan – RDC), Kinshasa, octobre 2011.
génération 2011-
10 Rapport du le contrat de financement des infrastructures de la R.D.C. Document présenté au
Parlement par le Ministère du Plan – RDC, en décembre 2008.
4
3. CHOIX ET INTERET DU SUJET
Le choix du sujet que nous nous proposons de développer se justifie par le fait
que la R.D.C. est un pays qui est pris dans le piège de la pauvreté et de la fragilité.
Pour sortir de la pauvreté et rétablir l’autorité de l’Etat, elle a besoin de la bonne
gestion économique et de la confiance, lesquelles lui font défaut actuellement. En
effet, ses
ressources fiscales sont très faibles au regard des besoins de
reconstruction du pays. L’épargne domestique ne peut couvrir ses besoins en
investissements pour lutter contre la pauvreté. D’autre part, la R.D.C n’a pas accès
aux marchés des capitaux et reste fortement dépendante aux ressources
extérieures, lesquelles sont tributaires aux nombreuses et drastiques conditionnalités
et s’amenuisent de plus en plus.
Considérant que les marges de manœuvre restent centrées sur les ressources
fiscales, l’intérêt de cette étude est de:
- montrer la situation actuelle de la RD Congo est la résultante de son passé
politique et économique caractérisé par une dictature prédatrice et de politiques
économiques désastreuses.
- montrer que le système fiscal a été l’un des axes des réformes économiques
entamées depuis 2001.
- analyser l’évolution des recettes publiques depuis l’engagement de ces réformes
et s’interroger sur leur incidence sur la vie des habitants.
- de formuler des recommandations pour maximiser les recettes publiques.
4. OBJECTIFS
Ce travail vise de manière globale à démontrer que la mobilisation des
recettes publiques est l’un des leviers du développement (Causes et conséquence):
la collecte optimale des ressources fiscales et leur meilleure affectation aux besoins
sociaux de base permettent de réduire la pauvreté.
De ce fait, le premier objectif de ce travail est de montrer la corrélation existant
entre la modicité des ressources fiscales et la persistance de la pauvreté. Le second
objectif est de signaler la possibilité d’accroitre davantage les ressources fiscales,
5
grâce à des pratiques de bonne gouvernance et la réorganisation de l’organisation
administrative des services mobilisateurs des recettes.
Aussi, ce travail se voudrait-il être un document de travail pour toute
personne, chercheur et acteur du développement et de la fiscalité congolaise.
5. HYPOTHESES
Pour atteindre les objectifs susmentionnés, ce travail s’appuie sur l’hypothèse
suivante : l’augmentation substantielle des recettes publiques permettra de réduire la
vulnérabilité de la population de la RD Congo, à condition qu’elles soient utilisées de
manière appropriée. Ce qui pousse à solliciter des efforts supplémentaires, en
termes de comportements et réformes, pour accroître les recettes publiques.
6. METHODOLOGIES
Notre méthode sera analytique, comparative et documentaire. La méthode
documentaire nous permettra de réunir un maximum de la documentation sur la
mobilisation des ressources fiscales en RDC, sur les différents financements
extérieurs obtenus ainsi que sur les différentes actions réformes et politiques
entamées dans ce secteur. La méthode analytique et comparative nous permettra
d’approfondir la réflexion sur la pertinence et l’efficacité de l’existant et proposer des
réformes et politiques conséquentes.
7. DELIMITATION DU TRAVAIL
Notre étude analyse l’incidence des ressources fiscales sur le développement
en s’appuyant sur les dépenses d’investissement et écarte de ce fait les dépenses
de fonctionnement. Elle couvrira la période de 2001 à 2012 dont le choix se justifie
par le fait que c’est en 2001 que la R.D. Congo a entamé les réformes structurelles
en gestion publique et la relance de la croissance.
6
8. PLAN
Cette étude s’articule sur trois chapitres, plus l’introduction et la conclusion. Le
premier chapitre, intitulé « Contexte institutionnel et économique de la RD Congo » a
pour objet de brosser l’évolution politique et économique de la RDC, reprenant d’une
part la désintégration politico-économique et les efforts de redressement qui s’en
sont suivis depuis 2001. Le deuxième chapitre, intitulé « L’organisation du système
fiscal en RD Congo » analyse les réformes du cadre juridique et de la structure
administrative des services mobilisateurs des recettes. Il souligne également les
forces et pesanteurs de ce système fiscal.
Le dernier
chapitre, « l’impact des recettes publiques sur le développement
en RD Congo », évalue d’une part l’effort de mobilisation des recettes publiques et
d’autre part leur impact sur le développement du pays et formule des
recommandations pour la maximisation des recettes publiques.
7
CHAPITRE I : CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET ECONOMIQUE DE
LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
Ce chapitre a pour but de montrer que la mobilisation des ressources
publiques en RD Congo reste tributaire d’un environnement politique et économique
particulier marqué par les troubles politiques, la dictature, les guerres civiles et les
politiques économiques désastreuses.
Le premier point traite de l’évolution politique du pays, dont l’éclatement a été
évité de justesse grâce au concours des Nations Unies. Le deuxième point démontre
la trajectoire de récession prise par l’économie congolaise et les efforts de
redressement entrepris depuis une décennie. Le dernier point illustre le déficit de
confiance enregistré par les acteurs politiques en un demi-siècle d’indépendance.
I.1. BREF APERCU SUR L’EVOLUTION POLITIQUE DE LA RDC
L’évolution des institutions politiques de la RD Congo est à l’image de
différentes appellations qu’a connues le pays. Etat Indépendant du Congo est son
premier nom à partir de 1885 lorsque Léopold II, roi des Belges, en devient le
propriétaire à l’issue de la conférence de Berlin qui en délimita les frontières
actuelles. Le pays devient ensuite Congo-Belge dès 1908 lorsque le roi souverain
en céda la souveraineté au Royaume de Belgique jusqu’au jour de son
indépendance le 30 juin 1960. République du Congo ou Congo-Kinshasa à
l’indépendance, il prit le nom de République Démocratique du Congo en 1967, pour
devenir la République du Zaïre en 1971. En 1997, le pays reprend le nom de
République Démocratique du Congo, qu’il conserve jusqu’à ce jour.
Ces changements d’appellation illustrent bien les instabilités qu’a connues la
RDC, pays aux dimensions d’un sous-continent situé au cœur de l’Afrique : 2,345
millions km2 avec 9 pays limitrophes. En 2012, la population congolaise était évaluée
à 73 millions d’habitants.
I.1.1. RDC : 50 ans d’agitation politique
8
L’agenda politique des premières années de l’indépendance fut mouvementé.
Le jeune Etat fit face à des événements dramatiques, lesquels menaçaient déjà son
existence et son unité : l’assassinat du Premier Ministre Patrice Lumumba le 17
janvier 1961, la sécession de la province diamantifère du Sud-Kasaï (8 août 1960 au
30 décembre 1961), la sécession de la riche province minière du Katanga dirigée par
Moïse Tshombe du 11 juillet 1960 au 15 janvier 1963 avec le soutien du royaume de
la Belgique, l’intervention des troupes onusiennes11 ainsi que la mort du Secrétaire
Général de l’ONU, Dag Hammarskjöld le 18 septembre 1961 à Ndola en Zambie, lors
de sa tournée au Congo pour négocier la fin de la sécession.
Le coup d’Etat du colonel Mobutu survenu en novembre 1965 contre le
président Kasa Vubu mit un terme à la stabilité politique, consécutive à la
Conférence de Luluabourg d’août 1964 qui permit la rédaction d’une nouvelle
constitution, adoptée au referendum de la même année et censée régir la nouvelle
législature et le nouveau mandat présidentiel à partir de 1965.
Bien que la pacification du pays fût au rendez-vous et que la menace
d’éclatement fut écartée, il n’en demeure pas moins que le régime de Mobutu se
transforma en une dictature prédatrice. En 32 ans de pouvoir, il a cumulé tous les
ingrédients d’un développement manqué et d’une stabilité apparente : clientélisme
politique, mesures économiques désastreuses, effondrement du tissu social et de
l’appareil administratif, parti unique, instabilité institutionnelle après le début du
multipartisme (10 premiers ministres de 1990 à 1997), prédation des ressources
publiques ainsi que divers assassinats. En effet, et comme le décrivait Colette
Braeckman « si l’argent est utilisé pour soudoyer, récompenser, déstabiliser
l’économie et saper les adversaires, c’est la violence qui demeure le plus sûr garant
de la pérennité du pouvoir du dinosaure12 ».
La fin du parti unique annoncée en avril 1990 dans la foulée du vent de la
pérestroïka a eu le mérite de délier les langues, mais n’a pas empêché le régime de
Mobutu de perpétuer les maux dessus décriés. La Conférence Nationale qui s’en est
11
Résolution 143 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 17 juillet 1960, demandant au royaume
de la Belgique de retirer ses troupes au Congo. Il s’agit d’une première intervention des troupes
onusiennes en Afrique.
12
Colette Braeckman, Terreur africaine. Burundi, Rwanda, Zaïre : les racines de la violence. Fayard,
1996, p 216.
9
suivie s’est heurtée aux blocages du dictateur. Conçue comme un grand forum de
déballage public pour une réconciliation nationale, elle s’est clôturée en catastrophe,
sans résultat palpable. Le leader de l’opposition, Etienne Tshisekedi, qui a été élu
Premier Ministre au cours de ces assises, a été gêné d’exercer ses fonctions et
limogé par la suite.
Il s’ensuivit le déclenchement d’une rébellion en août 1996 qui conduisit à la
prise de pouvoir de Laurent Désiré Kabila en mai 1997 et a sonné le début d’une
longue période de guerre en RDC. A partir du 2 août 1998, deux rébellions
consacrent la partition du pays en 3 zones, soutenues chacune par des pays
africains : (1) le Gouvernement de Kinshasa soutenu par l’Angola, la Namibie, le
Zimbabwe et le Tchad, (2) le Mouvement de Libération du Congo de Jean-Pierre
Bemba soutenu par l’Ouganda et (3) le Rassemblement Congolais pour la
Démocratie soutenu par le Rwanda.
La persistance de cette guerre considérée comme la première guerre africaine
poussa les Nations Unies à mobiliser un effectif de 18.914 personnes au Congo,
après la création de la Mission de l’Organisation des Nations Unies au Congo
(MONUC)13. Malgré l’assassinat de Laurent Désiré Kabila en janvier 2001, cette
guerre ne prendra fin qu’après l’accord de paix signé à Sun City en Afrique du Sud
en décembre 2002. Elle a enregistré « 5,4 millions de morts du fait de la guerre et
des troubles sociaux et économiques causés par la guerre»14.
Le 1er juillet 2003, tous les belligérants (pouvoir de Kinshasa, le Mouvement
de Libération du Congo et le Rassemblement Congolais pour la Démocratie) ainsi
que l’opposition politique formèrent un
gouvernement d’union nationale et un
parlement qui a rédigé une nouvelle constitution votée au referendum le 18 février
2006. La même année furent organisées les élections présidentielles, législatives et
provinciales. Joseph Kabila, qui a succédé à son père en 2001, est élu président et
gouverna durant les cinq années de législature avec la
majorité parlementaire
formée par une coalition politique composée de son parti (le Parti du peuple pour la
reconstruction et la démocratie) et du Parti Lumumbiste Unifié d’Antoine Gizenga.
13
14
Résolution 1279 du 30 novembre 1999 du Conseil de sécurité des Nations-Unies.
International Rescue Committee, « Mortality in the Democratic Republic of Congo: An Ongoing
Crisis », 2008.
10
Le processus de paix qui aboutit à l’organisation des élections révéla un fait
politique majeur : la mise sous tutelle de fait de la RDC par la communauté
internationale.
Elle
s’est
traduite
par
une
responsabilisation
partielle
du
Gouvernement de transition. L’action de la communauté internationale en RDC a
permis la fin de la guerre et l’unification du pays, l’institution du régime de la
transition incluant tous les belligérants et l’organisation des élections en 2006,
donnant ainsi naissance à la troisième république congolaise. Sous l’appellation du
Comité International d’Accompagnement de la Transition (CIAT), présidée par le
représentant spécial du Secrétaire Général des Nations Unies, la communauté
internationale avait un pouvoir décisionnel en dernière instance dans la mesure où
elle était chargée d’arbitrer et de trancher tout désaccord pouvant surgir entre les
parties de l’accord de paix.15
La stabilité institutionnelle retrouvée à l’issue des élections de 2006 n’a pas
franchi la barre de la deuxième législature de la 3ème république : le scrutin
présidentiel et législatif du 28 novembre 2011 s’est révélé comme un retour en
arrière dans la construction d’un Etat démocratique en RDC, car ces élections sont
considérées comme « pas crédibles à la lumière des nombreuses irrégularités et
fraudes constatées lors du processus électoral »16.
Aussi, la stabilité institutionnelle reste-t-elle encore fragilisée par la guerre qui
sévit dans les provinces du Kivu. Plusieurs groupes rebelles successifs se créent : la
rébellion du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Laurent Kunda
soutenu par le Rwanda et l’Ouganda17 et arrêté en janvier 2009 ainsi que la rébellion
du Mouvement du 23 mars 2009 (M23). La création, la violence et les activités
15
Gauthier de Villers, la « communauté internationale » dans l’impasse ? Perspectives critiques, dans
Conjonctures congolaises 2012. Politique, secteur minier et gestion des
ressources naturelles en RD Congo, Cahiers africains n° 82, 2013, p 288-291
16
Mission d’observation de l’Union Européenne, République Démocratique du Congo : Rapport final,
élections présidentielles et législatives du 28
novembre 2011, p. 8.
17
Le 11 mai 2007, William Lacy Swing, représentant du secrétaire général de l’ONU à Kinshasa,
dénonçait : « 7 à 8.000 éléments armés rwandais et un millier d’Ougandais occupent l’Est de la
RDC où ils sèment l’insécurité et provoquent la désolation parmi les populations civiles ».
http://www.digitalcongo.net/article/43565 (consulté le 21 juillet 2013)
11
déstabilisatrices de ces groupes rebelles ont été fortement condamnées par la
Nations Unies18. Alimentée par le trafic des matières premières (coltan en
particulier), cette guerre demeure à ce jour un obstacle au développement du pays et
menace l’intégrité du territoire national. Elle fragilise davantage l’administration
publique, dont l’affaiblissement remonte aux années Mobutu.
I.1.2. L’effondrement de l’appareil administratif
L’instabilité politique chronique des institutions politiques a eu des
répercussions
sur
l’administration
publique.
Dans
son
chapitre
relatif
à
l’administration publique, le Document de la Stratégie de Croissance et de Réduction
de la Pauvreté résume bien les maux qui gangrènent l’administration publique
congolaise : « l’inadaptation et l’anachronisme des textes légaux et réglementaires
régissant le personnel de l’Etat et du régime de protection sociale, l’inadéquation des
missions, des structures, des emplois et des effectifs, la non-maîtrise de la masse
salariale, le vieillissement et le manque de qualification du personnel de l’Etat, la non
– observance d’éthique professionnelle, l’obsolescence du système de suivi de la
carrière des agents de l’Etat, l’absence d’une politique de rémunération cohérente et
attractive ainsi que des avantages sociaux »19.
Le parcours administratif n’est plus respecté. Le dernier de recrutement sur
concours remonte aux années 80, sauf pour certains recrutement du personnel de
catégorie B du ministère des finances et budget, qui se fait par voie de l’unique
l’école nationale des finances. Celle-ci reste la seule école de recrutement et de
formation du personnel qui a su résister à l’effondrement du système administratif.
L’école nationale d’administration est en cours de réimplantation.
Le système des salaires, versés de manière inégale et insuffisante par rapport
au coût de la vie, a généré les mauvaises habitudes et des formes d’encouragement
à la corruption traduite respectivement par l’adage «la chèvre ne broute que là où on
18
Résolution 2098 du 28 mars 2013 du Conseil de Sécurité des Nations Unies.
19
Document de la Stratégique de Croissance et de Réduction de la Pauvreté. Deuxième génération.
2011-2015, Volume 1, (Ministère du Plan – RDC), octobre 2011, p. 14
12
l’a attachée» et la culture de l’impunité à tous les niveaux en cas des détournements
constatés même en cas de flagrance.20.
Pour y remédier, des mesures de redressement ont été entreprises sous la
coordination et le financement des partenaires internationaux à partir de l’année
2005 : l’élaboration d’un cadre juridique soumis à l’adoption du parlement, le
recensement des fonctionnaires, la mise à la retraite dans les administrations des
finances et budget, les audits institutionnels.21
Cependant, ces réformes sont restées au point mort. Un recensement des
fonctionnaires a été initié en 2005, mais il fut abandonné et sa finalisation n’est
toujours pas à l’ordre du jour. Le processus de mise en retraite s’est arrêté aux
secrétaires généraux et fonctionnaires des ministères des finances et Budget22, alors
que près de 60% des fonctionnaires ont atteint l’âge légal d’admission à la retraite.
Une première étape pour la réforme du système de salaires a été lancée en 2007,
mais n’a pas été suivie d’effets.
La combinaison des facteurs logistiques, le manque de financements et les
désaccords au sein du gouvernement expliquent clairement cette situation23. Ce qui
permet de constater que l’administration publique congolaise n’est pas encore en
mesure, non seulement de rendre un service public de qualité, mais aussi de créer
un environnement favorable aux affaires et aux investissements.
C’est dans ce contexte que la Banque Mondiale a créé des « administrations
quasi autonomes » chargées de la gestion des financements extérieurs et de
certaines réformes. Elle espérait ainsi former quelques îlots de bonne gestion, quitte
20
KABUYA KALALA et TSHIUNZA MBIYE, La politique économique revisitée en R.D.C. : pesanteurs
d’hier et perspectives, dans L’Afrique des grands lacs.
Annuaire 2005-2006, Kinshasa, mars 2006, p 325
21
Document de la Stratégique de Croissance et de Réduction de la Pauvreté, Deuxième génération,
2011-2015, (Ministère du Plan – RDC, Volume 1, octobre 2011, p. 39
22
Les secrétaires généraux et les fonctionnaires du Ministères des finances et budget n’ont jamais
reçu leurs indemnités de fin de carrière, en dépit de leur mise en retraite respectivement en 2007
et les deux vagues de 2009 et 2010.
23
VERHEIJEN,T., & alii, Dynamique institutionnelle, dans Résilience d’un Géant Africain : Accélérer la
Croissance et Promouvoir l’emploi en République Démocratique du Congo,
Volume I, Kinshasa, page 108.
13
plus tard à dissoudre ces structures «provisoires» et à transférer leurs compétences
à l’administration publique.24
I.2. LA SITUATION ECONOMIQUE DE LA RD CONGO
Deux périodes couvrent l’histoire économique de ce pays, à savoir
l’effondrement (1960 – 2001) et les efforts de redressement (2001 à nos jours). La
crise de la dette publique, quant à elle, s’est étalée sur ces deux périodes.
I.2.1. Les espoirs déçus d’un géant économique africain
« De 1960 à 2001, l’économie de la RDC a connu globalement, au-delà des
fluctuations conjoncturelles, un déclin prolongé du PIB réel »25. Cette situation se
révèle comme un contraste à la croissance qui a prévalu pendant la période
coloniale. Une étude commandée par la Banque Mondiale indique que le taux de
croissance réel du Congo Belge était sans doute l’un des taux les plus élevés non
seulement en Afrique mais dans le monde, avec une moyenne de 4.5% entre 1920
et 1950, et de 6.7% entre 1950 et 195726.
Le graphique ci-dessous montre clairement la trajectoire de la récession
postcoloniale.
Graphique n°1 : L’évolution du PIB (prix 1987 en milliards de Zaïres)
P IB
1000
900
800
700
600
500
P IB
400
300
200
100
2000
1998
1996
1994
1992
1990
1988
1986
1984
1982
1980
1978
1976
1974
1972
1970
1968
1966
1964
1962
1960
0
Source : Rapports Annuels de la Banque Centrale du Congo
24
KABUYA KALALA et TSHIUNZA MBIYE, Op.cit., pp 325-326
25
Idem, p.309
ALFIE ULLOA et alii, Contraintes à la Croissance Economique en République Démocratique du
Congo dans Résilience d’un Géant Africain : Accélérer la Croissance et
Promouvoir l’emploi en République Démocratique du Congo, Volume I, pp
175-176.
26
14
Pour mieux comprendre cette récession, Akitoby et Cinyabuguma identifient
cinq sous-périodes importantes dans la trajectoire de l’économie congolaise27 :
•
1960 – 1965 : chaos politique et dislocation de l’appareil économique ;
•
1966 – 1975 : stabilité politique et croissance ;
•
1975 – 1982 : marasme économique et crise de l’endettement ;
•
1983 – 1989 : programmes d’ajustement appuyés par le Fonds Monétaire
International et politiques de « stop and go » ;
•
1990 – 2000 : hyperinflation et effondrement des systèmes économique et
politique.
I.2.1.1. Les mesures de nationalisation et de zaïrianisation
La période post coloniale se caractérise par la recherche de l’indépendance
économique, symbolisée par les mesures de nationalisation et de zaïrianisation. Les
nationalisations forment l’ensemble des mesures politiques, prises après l’échec des
accords sur le contentieux belgo-congolais, à l’occasion duquel le nouvel Etat
réclamait les titres de participation de la Colonie dans plusieurs sociétés coloniales à
caractère public ou mixte. En effet, de la création de l’Etat Indépendant du Congo en
1885 à l’instauration de la colonie belge en 1908, le patrimoine de la colonie était
toujours distinct de celui de la Belgique.28
Les accords signés le 8 février 1965, après 3 ans de négociation, n’ont pas
satisfait le nouveau régime de Mobutu car plusieurs titres de la colonie dans les
27
KABUYA KALALA et TSHIUNZA MBIYE, Op.cit., , pp 309-310
28
A l’approche de l’indépendance, la Belgique prit, presque en catastrophe, deux lois dont
l’application allait occasionner la naissance du contentieux : (1) la Loi d’option de nationalité du 17
juin 1960 qui autorisait les sociétés anciennement propriété du Congo-Belge qui le souhaitaient
d’opter soit pour la nationalité belge, soit pour la nationalité congolaise. Celles-ci optèrent pour la
nationalité congolaise et érigèrent en succursales leurs établissements situés au Congo ; (2) le
décret royal du 27 juin 1960 portant suppression des sociétés à charte : Comité Spécial du
Katanga, Chemin de fer du Congo Supérieur aux Grands Lacs Africains et le Comité National du
Kivu, qui eurent des nombreuses filiales, notamment L’Union Minière du Haut Katanga, la
Compagnie de Chemin de fer du Bas-Congo au Katanga et la Société Internationale Forestière et
Minière du Congo.
15
importantes sociétés ci-après n’ont pas été restitués.
29
Les mesures suivantes de
nationalisation ont été prises30 :
- la loi n° 66-343 du 7 juin 1966 dite « loi Bakajika » par laquelle la RDC reprenait la
pleine et libre disposition de tous les droits fonciers, forestiers et miniers concédés
avant le 30 juin 1960 en propriété ou en participation à des tiers, personnes
morales ou physiques. Cette loi permit aussi la récupération de tous les biens
abandonnés par les ressortissants belges et qui n’étaient pas mis en valeur ;
- l’ordonnance-loi n° 66-341 qui exigeait aux sociétés dont le principal siège
d’exploitation est situé au Congo, d’y transférer leur siège administratif et leur
siège social. Ce qui permit la nationalisation de l’Union Minière du Haut Katanga,
l’actuelle Gécamines ;
- le retrait au Congo du Fonds Belgo-Congolais de gestion et d’amortissement de la
dette ;
- le renoncement aux droits sur les immeubles que l’Office National de Sécurité
Sociale détenait en Belgique, en contrepartie de la reconnaissance que tous les
biens meubles et immeubles de cet organisme au Congo revenaient de droit au
Congo ;
- le retrait de la SABENA, société aérienne belge dont le Congo détenait 24% des
actions et corrélativement le Congo somma la SABENA de se retirer d’AIR
CONGO dont elle détenait 35% du capital. En outre, la RDC confisqua 8
immeubles de la SABENA au profit de l’OTRACO qui devait céder 8 immeubles
qu’il possédait en Belgique en contrepartie ;
- la dissolution et la nationalisation de la société minière de Kilo-Moto et la société
internationale forestière et minière au Congo (La Forminière).
Dans la foulée des mesures dites de sauvegarde de l’économie nationale et
de l’indépendance économique, des décisions draconiennes furent annoncées le 30
novembre 1973, sous l’appellation de « zaïrianisation ».
Cette dernière consistait
« en la reprise par l’Etat ou les organismes publics en vue d’une gestion publique ou
d’une cession à des particuliers congolais, personnes physiques ou morales, de la
29
OMOMBO OMANA Adrien, Le portefeuille de l’Etat et l’Ajustement Economique de la RDC,
Kinshasa, Hippolyte éditeur, 1999, p13-26.
30
Francis KIKASSA, le contentieux Belgo-congolais, in Congo-Afrique, n° 7, août – octobre 1966,
p.333
16
propriété de la quasi-totalité des moyens de production et des services économiques
appartenant à des expatriés »31.
La zaïrianisation comportait cinq (5) niveaux32 :
- zaïrianisation des plantations, élevages, fermes, carrières et exploitations
forestières, raffinage du cuivre, direction de la Gécamines, assurances, agences
immobilières, transport maritime, entreprises de construction, etc ;
- zaïrianisation du commerce, des sociétés à charte et des filiales de l’Union
minière ;
- zaïrianisation par institution du monopole de l’Etat en matière d’assurance
automobile obligatoire, de transport maritime international (création de la
compagnie Maritime Congolaise et interdiction de la Société Congolaise de
Surveillance) ;
- zaïrianisation des emplois des cadres dans les entreprises privées qui devraient
compter dans leur haute direction des congolais au poste de Président et de
Directeur Général notamment ;
- zaïrianisation des biens immeubles appartenant à des étrangers dont certains
considérés comme abandonnés sont plus acquis par l’Etat sans indemnité, etc.
S’étant certainement rendu compte qu’il était allé trop loin, le Gouvernement
décida, par la loi n°77-027 du 17 novembre 1977, de rétrocéder à leurs anciens
propriétaires les entreprises zaïrianisées. Cette loi, prévoyait aussi plusieurs
restrictions qui limitèrent sa portée :
- la limitation à 60% du capital détenu par les personnes physiques ou morales de
nationalité étrangère ;
- le droit réservé au gouvernement congolais d’ordonner le retrait des biens
rétrocédés en cas de défaillance de gestion dûment constatée, pour les confier à
d’autres personnes physiques ou morales désignées par lui ;
- le droit de participation réservé à l’Etat congolais dans certains domaines d’intérêt
national, à savoir les mines, l’énergie, le bois, les transports maritimes, fluviaux,
aériens et ferroviaires.
31
BUABUA wa KAYEMBE, Cours de droit économique et social congolais, Université protestante au
Congo, 2011-2012, p.55
32
YABILI YALALA ASANI, Code de la Zaïrianisation, Lubumbashi, Mwanga Hebdo, 1973, p 76
17
Les congolais demeuraient cependant propriétaires des fermes, élevages,
petits commerces et plantations acquis par l’effet des mesures de zaïrianisation.
I.2.1.2. La crise de la dette et les ajustements structurels
En 2003, la RDC entra dans le processus Pays Pauvre Très Endettés, qui met
en place des mécanismes d’annulation de la dette. Celle-ci devenait un lourd fardeau
dans la mesure où le Congo était « en cessation de paiements au vu de ses
ressources financières »33.
La rupture de l’équilibre de la balance des paiements constatée en 1972
révéla la première crise économique congolaise et les désastres des mesures de
nationalisation et zaïrianisation. Ce déséquilibre, qui devient profond lors du premier
choc pétrolier en 1973 et de la chute du cours de cuivre à partir de second trimestre
1974, obligea la RD Congo à recourir à ses liquidités internationales au Fonds
Monétaire International34.
Par ailleurs, le Congo a poursuivi de 1969 à 1980 une politique
d’industrialisation et d’équipement. Ce fut l’époque des « éléphants blancs »
et « canards boiteux », parfaite expression du gaspillage technologique, qui peuvent
être classés en quatre catégories35 :
-
les investissements fictifs et usines fantômes ne correspondant à aucune
réalisation visible sur le terrain. C’est le cas d’une trentaine d’usines d’égrenage
de coton achetées en 1972 pour une valeur de 7.700.000 $US ;
-
les infrastructures à destination non économique : la cité de la Voix du Zaïre (600
millions de francs) et le spectaculaire immeuble du Centre du Commerce
International du Zaïre ;
33
MABI MULUMBA, Les dérives d’une gestion prédatrice. Le cas du Zaïre devenu la République
Démocratique du Congo, Kinshasa, CRP, 1998, p.7.
34
TSHUINZA MBIYE, Le Zaïre aux guichets du Fonds Monétaire International, dans Zaïre – Afrique,
n° 138, p.475.
35
VERHAEGEN, Benoit, Les safaris technologiques du Zaïre, dans Gaspillages technologiques
(Politique Africaine), Paris, Karthala, juin 1985, p. 71-86.
18
-
les infrastructures à vocation économique, mais secteur à gestation trop lente :
barrage d’Inga I et II pour un montant de 643.350.000 $ US, les aéroports de
Kisangani et Goma ;
-
les industries non rentables (sidérurgie de MALUKU).
Ces emprunts utilisés pour l’essentiel dans l’infrastructure au sens large ou
dans les secteurs à rentabilité douteuse, et gonflés d’intérêts débiteurs, n’ont pas
permis de créer des richesses qui auraient pu éponger par la suite le remboursement
et le service de la dette.
Consécutivement aux difficultés de remboursement de la dette du fait de ces
investissements improductifs, et après avoir épuisé ses réserves des liquidités
internationales au FMI, le jeune Etat conclut avec le FMI presque systématiquement
et de façon interrompue de 1976 à 1989 plus de douze (12) accords qui, selon les
besoins, oscillaient entre un accord de confirmation et un accord ou une facilité
élargie36. Dix (10) accords de rééchelonnement de la dette ont été signés à la même
période, dont neuf (9) avec le Club de Paris37.
Ces accords, appelés programmes d’ajustement structurel, contenaient un
ensemble des mesures économiques : « la restriction du secteur informel, la
dévaluation de la monnaie, le blocage relatif ou absolu des salaires, la limitation des
crédits à l’économie,
la limitation des dépenses publiques en particulier les
dépenses sociales et le remboursement de la dette publique ».38
Les différentes interventions du FMI et de la Banque Mondiale ont eu un bilan
mitigé, en ce quelles n’ont pas permis de casser le déséquilibre de la balance des
paiements.
Par contre, le montant du remboursement de la dette extérieure a
sensiblement augmenté pour atteindre en 1986 près de 50% du budget de l’Etat. Il
36
TSHUINZA MBIYE, Op.cit., p.475.
37
KAWATA BUALAM, L’endettement extérieur du Zaïre, dans Zaïre-Afrique, n° 237 (1989), p.363.
KANKWENDA MBAYA, Le FMI dans la crise économique du Zaïre : Bilan et perspectives, dans
Analyses Sociales, vol.1 janvier-février 1984, p 10.
38
19
était respectivement de 22,4% en 1980 ; 16,5% en 1981 ; 7,8% en 1982 ; 39,5% en
1983 ; 40,3% en 1984 ; 42,3% en 1985 ; 49,5% en 198639.
Cette politique a causé le blocage du fonctionnement de l’Etat et la mise en
œuvre des projets du développement socio – économique, avec des lourdes
conséquences telles que les démontre l’inventaire fait en mars 1998 par le Secrétaire
Général pour le renforcement des capacités de l’économie40 :
-
le salaire mensuel moyen des fonctionnaires est resté inférieur à 10 dollars
depuis plusieurs années ;
-
l’alimentation de la majorité des citoyens ne s’est pas améliorée (…). La plupart
des familles n’étant encore pas en mesure de se procurer plus d’un repas par
jour ;
-
le logement est très insuffisant faute de politique appropriée et les habitants de
Kinshasa ont multiplié de manière précaire des constructions très peu conformes
aux alentours de la ville ;
-
les maladies déjà éradiquées pendant la période coloniale ont refait surface à
cause de mauvaises conditions sanitaires ;
-
le système d’enseignement public est en perdition et l’on assiste à une
émergence des écoles et universités privées en substitution ;
-
les dépenses publiques par tête d’habitant pour les soins de santé sont environ
six fois inférieures à la moyenne en Afrique au sud du Sahara et seulement 26%
de la population congolaise ont accès aux services de santé ;
-
l’accès à l’eau potable et à l’électricité est parmi le plus faible en Afrique ;
-
la consommation de carburants pat habitant ne représente que le quart de la
consommation moyenne en Afrique.
L’échec de ces accords et politiques d’ajustement structurel, dont les
responsabilités restent partagées, a conduit au retrait
des FMI et BANQUE
Mondiale, qui ont définitivement rompu la coopération en 1990.
39
Données collectées dans les rapports annuels de la Banque du Zaïre, aujourd’hui Banque Centrale
du Congo.
40
TUNDA ya KASENDE, La problématique de la dette extérieure de la République Démocratique du
Congo, dans Congo-Afrique, n° 340, (décembre 1999) p.619-620
20
Il était reproché à l’Etat congolais
le désordre dans la préparation des
négociations, l’absence d’une analyse cohérente de portée macroéconomique
soutenable et surtout le maquillage des états financiers par une manipulation
délibérée des chiffres incitant ainsi le FMI à décerner au gouvernement congolais le
certificat de bon élève.41
Quant aux institutions de Brettons Wood, il leur était reproché un « manque de
clairvoyance dans l’appréciation des crises et des effets particuliers dans les pays
malades de la dette, le Congo-démocratique en particulier »42.
En clair, elles n’ont
pas compris que le déséquilibre de la balance des paiements de la RD Congo n’était
plus un phénomène conjoncturel, monétaire et financier comme on l’envisageait
dans la deuxième moitié de la décennie 70, mais constituait un phénomène
structurel43. Il leur était aussi reproché la passivité devant un transfert net des
capitaux de près d’un milliard de dollars en défaveur du pays, et sa distraction au
regard de l’allocation de 50% du budget de l’exercice 1986 au remboursement de la
dette, ralentissant ainsi le redéploiement économique opéré durant l’exercice
budgétaire 198444.
I.2.1.3. L’effondrement de la Gécamines
L’effondrement de la Gécamines en 1990, et en particulier du secteur
cuprifère, « marque l’effondrement de l’économie formelle »45 en RDC, car ses
conséquences affectèrent l’économie entière46 se manifestant par :
-
la réduction des ressources publiques puisque la Gécamines était la principale source
de revenus pour le Gouvernement central. Celui-ci imprima alors de la monnaie
pour couvrir les dépenses publiques et le niveau élevé de vie du régime, ce qui
causa une spirale inflationniste ;
41
MABI MULUMBA, Op.cit., p.61.
42
BOSSEKOTA WATSHIA, Rebâtir le Congo-Démocratique : de la bonne gouvernance étatique et du
rôle-clé des PME-PMI, Kinshasa, Presses Universitaires « Bel Campus »,
1999, p.154.
43
KANKWENDA MBAYA, Op.cit., p 10
44
MABI MULUMBA, Op.cit., p.62
45
46
MATON,J., et SOLIGNAC LECOMTE, CONGO 1965-1999 : Les espoirs déçus du « Brésil
Africain ». Centre de
développement de l’OCDE.
Septembre 2001, p 19.
ALFIE ULLOA et alii, Op.cit., p 180-181.
21
-
la pénurie des devises et réserves étrangères, avec comme conséquence la
chute des importations et des exportations ;
-
le quasi-arrêt du transport fluvial et ferroviaire suite à l’arrêt des investissements
dans l’entretien et l’équipement. Les opérateurs, notamment l’Office National de
Transports (ONANTRA) et la Société Nationale de Chemin de fer du Congo
(SNCC),
ne pouvaient ajuster les tarifs selon l’inflation et les prix élevés du
pétrole. Il s’installa alors une crise nationale de production, amplifiée par la
liquéfaction du réseau de transports, qui était basé sur un réseau de rails et de
rivières liés a un large système de raccordement de routes qui étaient liait les
villes aux rivières/rails. Les provinces les plus éloignées souffrirent de cette
isolation économique et le secteur de l’agriculture s’est même effondrée dans
certaines provinces ;
-
la faillite de la Banque Centrale comme les politiques budgétaire et monétaire
étaient peu judicieuses et/ou mal mises en œuvre. La plupart des banques
fermèrent en 1993 ;
-
le gouvernement cessa d’honorer ses dettes aux compagnies de services publics,
entreprises publiques et aux acteurs prives. A la fin de 1995, elle accumula US$
217 millions de dettes envers la SNEL (électricité) et US$ 156 millions à
REGIDESO (eau). La Gécamines, la REGIDESO et d’autres entreprises
publiques cumulèrent une dette de 152 millions USD envers la SNEL. Un effet
domino de banqueroutes de compagnies publiques et parapubliques s’enclencha.
I.2.2. L’effort de redressement économique et de relance de la croissance
Le redressement économique de la RDC se caractérise par les efforts
d’exécution du Programme économique du Gouvernement (versions 2003 – 2006 et
2009 – 2012) et la mise en œuvre du Document de Stratégie de Croissance et de
Réduction de la Pauvreté. L’atteinte du point d’achèvement de l’initiative Pays
Pauvres Très Endettés en est une étape importante.
22
I.2.2.1. Le retour de la croissance du PIB
Le programme Intérimaire Renforcé47, initié en mai 2001, marque le début
d’une action corrective d’envergure pour arrêter la dégradation de l’économie et
remettre l’économie sur la voie d’une croissance durable. Il comprenait une liste de
84 projets urgents dont l’exécution pendant huit (8) mois a permis la signature du
Programme économique du Gouvernement soutenu par la Facilité pour la Réduction
de la Pauvreté et la Croissance du FMI et de l’Initiative des Pays Pauvres Très
Endettées.
Ce programme d’ajustement structurel, dit de seconde génération, courait
pour la période du 1er avril 2002 au 31 juillet 2005 et comprenait, « outre les
exigences classiques d’un programme de stabilisation, requérant des politiques
macroéconomiques restrictives, (…) la libéralisation des prix y compris ceux des
produits pétroliers, des marchés des changes, du commerce du diamant
d’exploitation artisanale et surtout l’instauration effective d’un régime de taux de
change flottants »48.
Les résultats de ce programme n’ont pas été satisfaisants malgré sa
prolongation jusqu’au 31 mars 2006 à travers
le Programme Relais de
Consolidation. Ce qui a conduit le FMI à sa suspension formelle. En effet, ses
objectifs
« n’ont pas tous été atteints et les principaux repères quantitatifs et
structurels () n’ont malheureusement pas été observés ».49
Nonobstant
cet
échec,
un
nouveau
Programme
Economique
du
Gouvernement 2009-2012 a été adopté. Il était axé sur « une plus grande stabilité
macroéconomique, une augmentation de l’investissement dans la formation du
capital physique et humain, et la mise en œuvre de réformes structurelles visant à
améliorer la mobilisation des ressources intérieures, à renforcer la gestion des
47
Le Programme Intérimaire Renforcé était initié par le Gouvernement congolais, pour faciliter la
reprise du dialogue avec les partenaires financiers internationaux, interrompu depuis 1990. Il
visait la restauration d’un minimum de stabilité macroéconomique, des conditions de rentabilité et
de sécurité des activités de production.
48
KABUYA KALALA et TSHIUNZA MBIYE, Op.cit., p.318.
49
Programme de suivi par les services du FMI. RDC, mai 2007, p.2.
23
finances publiques, à accroître l’indépendance de la banque centrale et à doper la
capacité de production de l’économie »50.
En dépit des constats énumérés ci-haut, ces différents programmes
économiques ont permis d’inscrire le pays sur le rythme de la croissance.
Graphique n° 2 : Evolution du P.I.B à prix constants de 2000 (en milliards de CDF)
600
500
400
300
PIB
200
100
2012
2011
2010
2009
2008
2007
2006
2005
2004
2003
2002
2001
2000
0
Source : Banque Centrale du Congo
Cependant, en dépit de la croissance économique observée, la situation
économique de la RDC reste dégradée, comme l’indique le tableau suivant :
50
Lettre d’intention au Directeur Général du FMI. RDC, Kinshasa, 30 novembre 2013.
24
Tableau n°1 : Evolution de la croissance économique, de la population et de l’emploi (2000-2012)
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
(en milliards de CDF)
1
407,5
1
922,2
2
298,7
2
601,0
3
407,9
4
132,0
5
182,3
6
674,0
9
026,7
11
945,0
14
754,7
17
290,1
(en milliards de USD)
6,8
5,53
5,67
6,27
7,19
8,82
10,04
11,85
11,18
13,19
16,05
18,81
127,3
101,0
100,6
108,1
120,4
143,5
158,6
181,7
166,4
190,5
225,1
256,2
(en milliards de CDF)
290,83
300,91
318,34
339,48
365,96
386,39
410,57
435,84
447,93
479,95
513,10
549,88
(en milliards de USD)
4,2
4,4
4,6
4,9
5,3
5,6
5,9
6,3
6,5
7,0
7,4
8,0
-2,1
3,5
5,8
6,6
7,8
5,6
6,3
6,2
2,8
7,1
6,9
7,2
78,7
79,3
81,7
84,8
88,8
91,0
93,9
96,8
96,6
100,5
104,3
108,5
-4,7
0,7
3,0
3,8
4,7
2,5
3,2
3,1
-0,2
4,0
3,8
4,0
135,09
15,80
4,44
9,22
21,27
18,20
9,96
27,57
53,44
9,84
15,4
5,67
357,28
25,30
12,80
4,00
21,57
13,09
16,67
17,97
46,10
23,50
15,54
9,34
53
505,7
54
950,3
56
434,0
57
957,7
59
696,4
61
487,3
63
331,9
65
231,9
67
188,9
69
204,5
71
280,7
73
419,1
2,7
2,7
2,7
2,7
3,0
3,0
3,0
3,0
3,0
3,0
3,0
3,0
11
383,5
16
831,9
17
457,2
18
966,3
17
948,1
18
908,9
20
069,1
18
251,0
15
700,0
20
524,5
20
589,5
20
692,4
32
422,4
33
068,6
33
897,5
34
736,8
35
611,3
36
503,8
38
009,7
38
998,0
40
050,9
41
131,3
42
365,2
44
258,0
35,1
35,0
35,3
35,6
35,6
35,9
35,0
33,4
39,2
49,9
48,6
46,8
49,0
49,1
48,5
45,4
49,6
48,2
47,2
53,2
60,8
50,1
51,4
49,1
Produit Intérieur Brut
(à prix courants)
P.I.B./habitant
(en USD courants)
Produit Intérieur Brut
(à prix constants de 2000)
Taux de croissance du P.I.B.
(en %)
P.I.B. / habitant
(en USD constant de 2000)
Taux de croissance du P.I.B /
hab.
(en %)
Taux d'inflation fin période
Taux d'inflation moyenne
annuelle
Population résidente
(en milliers d'habitants)
Taux de croissance de la
population
Résidente
Population occupée salariée
(en milliers d'hab.)
Population active (en milliers
d'hab.)
Rapport population salariée &
active
(en %)
Taux de chômage
Source : Banque Centrale du Congo
L’analyse de ce tableau démontre que le bout du tunnel est encore long : le taux
de chômage situe encore à près de 50% de la population active. Le revenu par
habitant est de 239,2 USD en 2011, soit 0,65 USD par jour51.
51
Banque Centrale du Congo, Rapport Annuel 2011, p.5
25
I.2.2.2. L’annulation de la dette
La mise en œuvre du Programme Intérimaire Renforcé en 2001 a remis la
question de la dette sur la table de négociation avec les différents créanciers de la
RDC. Ce programme avait aussi pour objectif de « faciliter (…) la reprise du dialogue
avec les partenaires extérieurs afin de résoudre de problème de l’endettement
extérieur de la République Démocratique du Congo et d’amorcer la relance des
investissements étrangers devant soutenir celle de l’économie »52.
Malgré l’atteinte du point de décision en 2003, « les contre-performances
macro-économiques, la lenteur des réformes et la non exécution du Document de la
stratégie pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSCRP) ont empêché la
RDC d’atteindre le point d’achèvement de l’initiative PPTE fin 2007, comme
prévu »53.
Ce n’est qu’après l’exécution satisfaisante du Programme Economique du
Gouvernement (PEG II) appuyé par la Facilité Elargie de Crédit, que la RDC a atteint
le point d’achèvement de l’Initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés (IPPTE) avec comme conséquence l’annulation de 74,6 % de la dette. Cette décision
a été annoncée le 1er juillet 2010 lors de la tenue conjointe du Conseil
d’administration du FMI et de la Banque mondiale.
A la faveur de l’achèvement de l’I-PPTE, le stock de la dette extérieure est
passé de 12.467,7 millions en 2009 à 3.164,5 millions une année après. Le FMI a
annulé 312,0 millions de Droits de Tirage Spécial (DTS), soit 478,1 millions de $ US,
représentant 30,0 % de la dette envers cette structure financière. Le « Club de
Paris » a annulé 6.499,3 milliards de USD sur 6.679,3 millions de $ US du stock
arrêté à fin décembre 2009. Les négociations directes
avec chaque créancier
membre du « Club de Londres » pour obtenir l’annulation minimum équivalent au
facteur commun de réduction de 82,4 % et maximum de 100,0 %. Les négociations
52
Programme Intérimaire Renforcée de la République Démocratique du Congo, 2001, p.15.
53
OCDE, Perspectives économiques en Afrique. Année 2008, p.257.
26
avec le « Club de Kinshasa », qui se sont poursuivies en 2011, ont conduit à
l’annulation de 80% du montant global dû54.
I.3. VALEUR ET LEGITIMITE DU POUVOIR PUBLIC CONGOLAIS
La confiance de la population envers ses dirigeants s’est dégradée au fil des
années. Contrairement aux espoirs suscités par l’indépendance et la prise de pouvoir
de Mobutu en 1967, le premier discrédit de la classe politique remonte au lendemain
de la zaïrianisation, dont les opérations de distribution aux acquéreurs se sont faites
sans appel d’offres. Les conséquences économiques engendrées ont fait
comprendre au peuple qu’il a été « floué par la classe politique qui s’était partagé le
gâteau de la zaïrianisation en faisant payer la facture au peuple, via le Trésor
public»55. Ce ressenti a été palpable lors des tentatives de privatisations des années
1980, auxquelles le peuple s’est fortement opposé et ont fait échec.
Si les résultats des élections de 2006 ont été généralement acceptés par
l’opinion nationale qui s’est reconnu à travers les candidats élus, la communion entre
les élus et le peuple s’est vite effritée au vu du train de vie rapidement acquis par les
parlementaires. Alors que le budget 2007 maintenait le salaire du fonctionnaire à
l’équivalent de moins de 100$ US, les élus se sont accordé un salaire équivalent à
5000 $US et une allocation d’une jeep.
Par ailleurs, ceux-ci n’ont pas payé l’impôt sur le revenu durant toute la
législature, en dépit de toutes les actions menées par l’administration fiscale pour
établir l’assiette de cet impôt et le recouvrer.
L’organisation des élections législatives et présidentielles de 2011 a renforcée
le sentiment de méfiance de la population envers la classe politique, suite au
« manque de crédibilité de ce scrutin (…) du fait des fraudes constatées et du vide
créé par la non-connaissance des résultats réels »56. La population ne se reconnait
54
Données publiées dans les Rapports Annuels de la Banque Centrale du Congo 2010 et 2011.
55
BUABUA wa KAYEMBE, Op.Cit., p 21
56
BOUVIER,P. & alii., RDC 2012 : la fracture ? dans Conjonctures congolaises 2012. Politique,
secteur minier et gestion des ressources naturelles en RD Congo, Cahiers
africains n° 82, 2013, p 241.
27
pas aux députés qui siègent à l’Assemblée Nationale. Cette antipathie est confortée
par une situation peu connue dans l’univers politique mondial : une vingtaine de
députés élus refusent depuis lors de siéger à coté des autres députés qu’ils
considèrent n’avoir pas été élus, mais comme « nommés » par la Commission
Electorale Nationale Indépendante. Ils conditionnent aussi leur participation à la
reconnaissance de l’élection du leader de l’opposition Etienne Tshisekedi comme
vainqueur du scrutin présidentiel.
Dans un autre registre, la faible mise en œuvre des réformes structurelles,
pourtant bénéfiques au peuple, est encore tributaire de la mauvaise gestion des
coalitions politiques « particulièrement au regard de la nature de l’environnement
politique de la RDC et de sa faible capacité à obtenir des engagements forts entre
les acteurs-clés du système »57. Il n’échappe non plus à aucun citoyen que le
Conseil des Ministres ne se réunit que très rarement, alors qu’il est l’instance
d’adoption des projets de lois et des documents d’orientations politiques. Ce qui
pousse la population à déduire que l’intérêt général n’est pas encore dans l’agenda
des dirigeants.
La lutte contre l’impunité lancée par le Président lors de son discours
d’investiture en 2006 est demeurée lettre morte depuis lors. Aucune motion de
méfiance n’a été adoptée contre le membre du Gouvernement, en dépit des
nombreuses accusations. En plus, le 17 avril 2013, la RDC a été suspendue de
l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives, suite à l’opacité et les
discordances observées dans les données publiées.
Enfin, la croissance économique et la maîtrise de l’inflation enregistrées
depuis une dizaine d’années ne se répercutent pas dans le panier de la ménagère.
Le citoyen s’interroge sur les vrais bénéficiaires de la réduction de la dette à travers
le processus PPTE obtenue en 2010, en vue de laquelle les dépenses sociales ont
été fortement réduites depuis 2003. En effet, la RDC occupe la dernière place dans
le classement de l’indice du développement humain en 2011 et 2012. Elle a même
reculé d’un cran par rapport à 2010.
57
VERHEIJEN,T., & alii., Op.cit., p 105.
28
*
*
*
La dégradation de la situation politique de la RDC s’est fait en
concomitance avec son effondrement économique. Les efforts d’instauration d’un
Etat de droit amorcés depuis 2001 se sont accompagné aussi des mesures de
redressement économique.
Si les élections de 2006 ont remis la RDC dans le processus
démocratique rompu par le coup d’état de Mobutu en 1965, les institutions qui en ont
résulté peinent à relever les défis de sortir le pays de la catégorie des pays dits
«fragiles». Le manque de crédibilité des élections des élections de 2011 jette encore
l’incertitude sur l’aptitude à construire un Etat. La guerre qui sévit encore à l’Est du
pays continue à brandir le spectre de la balkanisation. Le doute subsiste sur la
capacité du gouvernement à mettre en œuvre de nouvelles politiques publiques et
assurer dans le même temps ses fonctions régaliennes.
La moyenne de 5,3% de croissance économique constatée de 2001 à
2012 n’a empêché néanmoins pas la RDC d’être encore classée comme pays très
pauvre. Il en résulte que la situation économique et sociale reste dégradée, dans la
mesure où le gouvernement ne réussit que partiellement à mettre en place des
politiques macroéconomiques qui permettent à la population de bénéficier des
richesses naturelles du pays et à assurer la transparence dans la gestion publique.
Ces échecs politiques et économiques ont entamé la confiance du
peuple envers les dirigeants, qui brillent par l’absence d’un consensus national
autour des réformes clés et le faible leadership national dans leur mise en œuvre.
L’administration publique reste coincée dans cet étau. Les services mobilisateurs des
ressources n’en sont pas moins impactés et leurs capacités opérationnelles
demeurent encore réduites. L’on peut dès lors comprendre que la mobilisation des
ressources demeure un défi
dans cet environnement politique, administratif et
économique.
29
CHAPITRE II : L’ORGANISATION DU SYSTEME DES RECETTES
PUBLIQUES EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
CONGO
La mobilisation des ressources internes a été impactée par l’évolution de
l’environnement politico-économique congolais déclenchée depuis 2001. Le système
des recettes publiques a été inscrit comme une des composantes essentielles de
l’objectif de consolidation de la stabilité macro-économique et de croissance, qui est
l’un de cinq piliers de la stratégie de développement adoptée par le Gouvernement.
Le système des recettes publiques congolais comprend l’ensemble des règles
juridiques relatives aux recettes fiscales (impôts) et non fiscales (taxes, redevances
et autres droits) telles qu’administrées par différents services mobilisateurs des
recettes appelés « régies financières ». Ce système fiscal est en pleine réforme,
déclenchée en 2003 puis relancée en 2010 dans l’objectif d’arrimer le modèle fiscal
congolais aux standards internationaux et rendre le pays compétitif et attractif après
des décennies de troubles politiques et de désarticulation du tissu économique. La
fiscalité locale connait un nouveau tournant impulsé par les dispositions
constitutionnelles du 18 février 2006 qui instituent le transfert des compétences
fiscales et non fiscales du Pouvoir central vers les autorités locales.
Afin de comprendre l’effort de mobilisation des recettes publiques, ce chapitre
va mettre en lumière l’organisation du système des recettes publiques, en présentant
son état actuel et l’organisation administrative des services mobilisateurs des
recettes (1) ainsi que ses spécificités à travers ses atouts et faiblesses (2).
II.1. CADRE JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF DES RECETTES PUBLIQUES
Le cadre juridique de la fiscalité congolaise s’articule autour du régime de droit
commun et des régimes dérogatoires contenus dans certains textes particuliers (1).
Le cadre administratif décrit la situation des régies financières (2).
30
II.1.1. Un système fiscal composé d’un régime de droit commun et de régimes
dérogatoires.
Le système fiscal congolais comprend des impôts, taxes, redevances et droits
établis et perçus suivant des règles communes à tous les opérateurs contribuables et
assujettis. Parallèlement il s’est développé au fil des années des textes particuliers
dans certains secteurs économiques (mines, hydrocarbures, forêts, code des
investissements,…) contenant des règles fiscales spécifiques et des incitations
particulières.
II.1.1.1. Le régime de droit commun
Ce point expose la liste et la structure des impôts relevant de fiscalité
intérieure et fiscalité de porte, les prélèvements non fiscaux, la fiscalité locale et la
parafiscalité.
II.1.1.1.1. La fiscalité intérieure
La fiscalité intérieure correspond aux impôts directs et indirects perçus à
l’intérieur du territoire national. Les impôts directs sont :
• Impôts réels : Impôt foncier, impôt sur les véhicules, impôt sur les concessions
minières et hydrocarbures ;
• Impôts cédulaires sur les revenus : impôt sur les revenus locatifs, impôt sur les
revenus mobiliers, impôt sur les revenus professionnels (impôt sur les bénéfices et
profits des personnes physiques et morales, impôts Professionnels sur les
Rémunérations des Expatriés), impôt exceptionnel sur les rémunérations des
expatriés et l’impôt minimum pour expatrié ;
Les impôts indirects : la Taxe sur la Valeur Ajoutée, instituée depuis le 1er janvier
2012.
Tous ces impôts sont gérés par la Direction Générale des Impôts58, qui en
assure l’assiette et le recouvrement. La structure des taux d’imposition a évolué
depuis 2001. Pour l’impôt sur les bénéfices et Profits (IBP), elle est passé de 40% à
35%, mais un taux forfaitaire est appliqué aux petites entreprises : 1% sur le chiffre
58
Conformément à l’article 204 de la Constitution, les impôts réels (Impôt foncier, impôt sur les
véhicules, Impôt sur les concessions minières et hydrocarbures) et Impôt sur les revenus locatifs
sont de compétence exclusive des provinces, qui en assurent la gestion depuis 2011.
31
d’affaires pour les ventes et 2% sur le chiffre d’affaires pour les services. L’impôt sur
les rémunérations (professionnel et exceptionnel) est à 30% de la rémunération
perçue. L’impôt mobilier est à 20%, alors que la TVA est au taux de 16%.
II.1.1.1.2. La fiscalité de porte
La fiscalité de porte correspond aux droits exigés aux frontières nationales, à
l’occasion de l’entrée, sortie ou transit des marchandises. Elle comprend les droits de
douane, la TVA à l’importation, les droits de sortie à l’exportation des minerais,
produits agricoles et autres produits ainsi que les droits d’accises (perçus à
l’importation et à l’intérieur59).
La structure tarifaire de la fiscalité de porte est variable. Les droits de douane
à l’importation sont au taux normal de 10%. Leur taux est à 5% pour les matières
premières et à 20% pour les produits concurrençant l’industrie nationale. La TVA à
l’importation est à taux unique de 16%. Les droits de douane à l’exportation varient
de 1% pour le café, 1% pour l’eau douce, 1,5 % pour l’or et le diamant d’exploitation
artisanale, 3% pour l’or et le diamant de production industrielle, 5% pour la courante
électricité, 5% et 10% pour les minerais, 6% à 10% pour le bois. La TVA à
l’exportation est à 0%.
II.1.1.1.3. Les prélèvements non fiscaux
Les prélèvements non fiscaux sont constitués de l’ensemble des droits, taxes
et redevances perçus au profit du Pouvoir central et qualifiés de non fiscaux. Une
récente actualisation recense 364 actes générateurs des prélèvements non fiscaux
(recettes non fiscales) répertoriés dans une nomenclature spécifique60 et regroupés
en quatre (4) catégories selon la classification budgétaire :
- les Recettes Administratives : perçues en contrepartie d’un service rendu par les
ministères et services d’Etat ou d’une autorisation accordée (licence de
59
Le droit d’accises à l’intérieur est repris dans la catégorie de la fiscalité de porte parce que leur
gestion est assurée par l’administration douanière.
60
Ordonnance-loi n° 13/002 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des droits, taxes et redevances
du pouvoir central.
32
télécommunication, passeport, dépôts des candidatures aux élections, carte de
travail pour étrangers,…) ;
- les Recettes Judiciaires : perçues en exécution des actes judiciaires, de la Police
Nationale ou en contrepartie d’un acte administratif du ministère de la justice
(inscription au nouveau registre de commerce, Droits proportionnels sur les
S.A.R.L.,…) ;
- les Recette Domaniales : en contrepartie de l’usage ou de la cession d’un bien du
domaine privé de l’Etat. (Royalties pétrolières, Taxe rémunératoire annuelle sur
les établissements classés, loyer sur les maisons de l’Etat, …) ;
- les Recettes de Participations qui sont des dividendes et bonus perçus en
rémunération des actions et participations de l’Etat dans les entreprises publiques
et d’économie mixte.
II.1.1.1.4. La fiscalité locale
La fiscalité locale comprend les impôts, droits, taxes et redevances perçus au
profit des Provinces et Entités territoriales décentralisées61. Elle regroupe 284 actes
générateurs des recettes regroupés dans une nomenclature et répartis de la manière
suivante62 : 109 impôts, taxes, droits et redevances d’intérêt commun ; 61 taxes,
droits et redevances spécifiques aux provinces ; 53 taxes, droits et redevances
spécifiques aux villes ; 48 impôt, taxes, droits et redevances spécifiques aux
communes et 13 impôt et taxes spécifiques aux secteurs et chefferies.
Les principaux impôts, droits, taxes et redevances relevant des Provinces et
Entités Territoriales Décentralisées sont : l’impôt sur la superficie des propriétés
bâties et non bâties, l’impôt sur les véhicules automoteurs, l’impôt sur les revenus
locatifs, l’impôt personnel minimum, la taxe spéciale de circulation routière, la taxe
annuelle pour la délivrance de la patente, la taxe de consommation sur la bière,
l’alcool, le spiritueux et le tabac, la taxe de superficie sur les concessions forestières,
61
Au terme de l’article 3 de la constitution, les Provinces et les Entités territoriales décentralisées sont
des entités distinctes du Pouvoir central, dotées dé la personnalité juridique et gérées par les
organes locaux. Les entités territoriales décentralisées sont la ville, la commune, le secteur et la
chefferie, elles jouissent de la libre administration et de l'autonomie de gestion de leurs ressources
économiques, humaines, financières et techniques.
62
L’Ordonnance-loi n° 13/001 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des impôts, droits, taxes et
redevances des Provinces et des Entités Territoriales Décentralisées ainsi que leurs modalités de
répartition.
33
la taxe de superficie sur les concessions minières et la taxe sur les ventes des
matières précieuses de production artisanale.
II.1.1.1.5. La parafiscalité
La parafiscalité63 désigne des prélèvements sont opérés par divers
organismes publics qui agissent :
- aux frontières : l'Office de contrôle congolais (le contrôle de la qualité des produits
importés), l'Office de Gestion du Fret Maritime (fiche électronique de
renseignement à l’importation) ;
- à la frontière comme à l’intérieur : la parafiscalité est gérée par la Régie des Voies
Aériennes (RVA), qui perçoit la redevance aéroportuaire auprès des passagers de
transport aérien national et international ;
- A l’intérieur du pays : le Fonds de Promotion Industrielle (la taxe sur la production
locale, et la taxe sur les biens importés), l’Institut National de Sécurité Sociale (les
cotisations sociales), Fonds National d’Entretien routier (les redevances sur les
carburants terrestres et les péages,…).
Cette liste n’est pas exhaustive car il existe des prélèvements mal
connus, dont les pratiques ont été développées durant la période de la guerre et la
transition politique (péage routier perçus par la police, les taxes sur les minerais
dans les zones de guerre et autres taxes créées par les autorités provinciales).
II.1.1.2. Des textes particuliers dérogatoires du régime de droit commun
Outre les dérogations contenues dans la loi fiscale et celles consignées dans
les accords et conventions internationaux, le paysage fiscal congolais recense des
textes particuliers contenant des dispositions fiscales qui dérogent au droit commun
63
La parafiscalité est un terme officiel qui désigne des prélèvements opérés par des organismes
publics sous couvert de prestation d’un service, rendus obligatoires par un texte réglementaire et
qui n’émargent pas dans budget de l’Etat.
34
(code des investissements, code minier, les conventions pétrolières)64, qui font l’objet
de cette brève présentation.
Le code des investissements est régi par la loi n° 004 du 21 février 2002
portant code des investissements65. Il prévoit un régime incitatif aux investissements
directs, nationaux ou étrangers, pour une durée allant de 3 à 5 ans selon la région
économique. Il fixe les avantages douaniers, fiscaux et parafiscaux ci-après :
l’exonération des droits et taxes à l’importation des machines, matériels et
équipements (à l’exclusion de la taxe administrative de 2 % et de la TVA, à payer en
amont par le promoteur, mais à rembourser par l’Administration fiscale), l’exonération
de l’impôt sur les bénéfices, l’exonération de l’impôt foncier, l’exonération des droits
proportionnels lors de la création des SARL ou de l’augmentation de leur capital
social.
Une fiscalité minière, reprise dans la loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002
portant code minier et décret n° 038/2003 du 26 mars 2003 portant règlement minier,
présente des avantages incitatifs aux investisseurs dans ce secteur porteur de la
croissance. Le code minier pose le principe de la garantie de stabilité, fixée à 10 ans,
qui permet de sécuriser les investissements dans un pays ballotté par les aléas
politiques, au lendemain de deux guerres civiles. Cependant, en dressant une liste
limitative des impôts, droits de douane, taxes et redevances applicables aux activités
minières (article 220 du code minier), le code minier soustrait les opérateurs du
secteur à d’autres impôts généraux, ce qui met en mal le principe d’égalité devant
l’impôt.
La fiscalité des pétroliers producteurs est régie d’une part par la
convention du 9 août 1969 entre la RDC et le groupe CHEVRON et d’autre part par
la convention du 11 août 1969 entre la RDC et le groupe PERENCO REP ainsi que
leurs avenants successifs. Les sociétés pétrolières sont jouissent des exemptions
64
Bien que le titre VIII de la loi n° 011/2002 du 29 aout 2002 portant code forestier a un chapitre
l’intitulé de « fiscalité forestière », le code forestier ne contient pas les mesures dérogatoires du
droit commun. Ce chapitre se limite à présenter les modalités de répartition des produits des taxes
et redevances forestières entre l’Etat, les Entités Territoriales décentralisées et Fonds Forestier
National.
65
La promotion du code des investissements est assurée par l’Agence Nationale pour la Promotion
des Investissements.
35
d’impôts suivantes prévues par l’article 93 de l’Ordonnance-Loi n° 67-231 du 11 mai
1967 portant législation générale sur les mines et hydrocarbures66 : l’impôt sur le
revenu, l’impôt mobilier, l’impôt personnel minimum, la taxe sur la valeur ajoutée à
l’exportation, l’impôt sur les concessions minières et d’hydrocarbures et l’impôt sur
les véhicules. En contrepartie, les concessionnaires pétroliers s’acquittent, selon le
régime de la convention, de l’impôt forfaitaire sur les bénéfices, la marge distribuable,
la taxe de participation et la taxe statistique pour la convention off shore et d’une
royaltie (12,5% de la valeur FOB), l’impôt sue le bénéfice et profit ainsi que des
dividendes pour la convention on shore.
Ces différents régimes dérogatoires ont été conçus pour accompagner des
secteurs économiques porteurs de la croissance et qui nécessitent de gros
investissements. Cependant, ils comportent les risques de complexification du
régime fiscal, de restriction du champ d’action du régime de droit commun et de
multiplication des fiscalités particulières dans chaque secteur économique au point
que les experts réunis au sein des Assises nationales sur les coulage des recettes
publiques ont proposé la suppression des régimes dérogatoires régissant les
ressources naturelles67.
II.1.2. Une multiplicité des services mobilisateurs des recettes ou «régies
financières»
Le paysage de l’administration fiscale congolaise se caractérise par une
multitude des services mobilisateurs des recettes, communément appelés « régies
financières ». Le Pouvoir Central en dispose trois (3) et chacune des onze (11)
provinces a créé aussi sa régie financière. Cette pluralité de régies financières
implique la recherche d’une cohérence dans la définition et mise en œuvre de
politique fiscale nationale, laquelle n’est pas acquise. Pour les entreprises, elle pose
la difficulté d’identification du véritable interlocuteur.
66
Un nouveau code des hydrocarbures est en discussion à l’assemblée nationale. Il remplacera
l’Ordonnance-Loi n° 67-231 du 11 mai 1967 portant législation générale sur les mines et
hydrocarbures et sera consacrée uniquement aux hydrocarbures, étant donné que le secteur
minier est déjà régi par le code minier en vigueur depuis 2002.
67
Rapport des Assises nationales sur le coulage des recettes publiques. RDC, Vice Primature,
Ministère du Budget – Ministère des Finances, Kinshasa du 2 au 4 mai 2013, p.7.
36
II.1.2.1. Une administration fiscale additionnelle aux deux administrations fiscales
classiques du Pouvoir Central.
Comme la plupart des pays, la structure administrative fiscale congolaise a les
deux services classiques de mobilisation des impôts, l’un intérieur, la Direction
Générale des Impôts, et l’autre à la frontière, La direction générale des douanes et
accises (DGDA).
Créée depuis l’époque coloniale, la Direction Générale des Douanes et
Accises (DGDA) a eu le statut d’entreprise publique de 1979 à 2009 et a fonctionné
sous la dénomination de l’Office des Douanes et Accises (OFIDA), dotée d’une
personnalité juridique. En exécution de la loi 08/007 du 07 juillet 2008 relative à la
transformation des entreprises publiques, elle a été transformée en service public,
portant sa dénomination actuelle, dotée d’une autonomie administrative et
financière68.
La Direction Générale des Douanes et Accises (DGDA) a entre autres pour
mission la perception des droits, taxes et autres redevances à caractère douanier et
fiscal qui sont dus soit du fait de l’importation ou de l’exportation des marchandises
de toute nature, soit du fait de leur transit ou leur séjour en entrepôt. Elle perçoit
aussi les droits accises et de consommation. Par l’application des normes aux
frontières, elle assure la protection de l’espace économique national.
La Direction Générale des Impôts (DGI) fonctionnait sous la dénomination
de « direction générale des contributions » avant de porter sa forme et dénomination
actuelle depuis le décret 017/2003 du 3 mars 2003. Elle a pour mission l’assiette, le
contrôle, le recouvrement des impôts, taxes, redevances et prélèvements à caractère
fiscal.
A ces deux services s’est ajoutée en 1995 la Direction Générale des
Recettes
68
Administratives,
Judiciaires,
Domaniales
et
de
Participations
Elle fonctionne suivant le Décret 09/043 du 03/12/2009 portant création de la Direction Générale
des Douanes et Accises et le Décret 11/06 du 25/01/2011 portant institution du cadre organique de
la direction générale des douanes et accises.
37
(DGRAD)69, créée dans l’objectif d’encadrer les recettes non fiscales, générées à
l’initiative des différentes administrations de l’Etat. Sa création répondait à la
nécessité de valoriser ces recettes dont la part au budget de l’Etat s’amenuisait de
plus en plus jusqu’à atteindre 2% des recettes budgétaires, alors qu’elle atteignait
40% à l’indépendance70.
La DGRAD assure, au profit du Trésor public, l’ordonnancement et le
recouvrement des droits, taxes et redevances. Pour accomplir cette mission, elle
collabore avec
des ministères et services de l’Etat qui assurent l’assiette (la
constatation et la liquidation).
II.1.2.2. Des régies financières particulières dans chaque province
La décentralisation administrative consacrée par la constitution du 18 février
2006 a engendré un processus de transfert de compétence fiscale aux collectivités
locales, en vue de mettre les autorités provinciales et décentralisées en capacité
d’assurer les prestations de services aux citoyens.
C’est dans ce contexte que les Gouverneurs des provinces, désormais élus
par les assemblées provinciales, ont créé tour à tour les régies financières, chargés
du recouvrement des impôts, droits, taxes et redevances relevant de leur
compétence exclusive. On en compte en 2014 onze : la direction Générale des
recettes de Kinshasa (DGRK), la Régie Provinciale d’Encadrement des Recettes du
Bas-Congo (REPERE), la Direction des Recettes de la Province Orientale (DRPO),
la Brigade des recettes de Bandundu (BRB), la Direction des recettes du Katanga
(DRKAT), la Direction Générale des Recettes de la Province de l’Equateur (DGRPE),
Direction Provinciale des Recettes du Kasaï-Oriental (DPRKO), la Direction Générale
des Recettes du Kasaï-Occidental (DGRKOC), la Direction des Recettes du
Maniema (DRMA), la Direction Générale des Recettes du Nord-Kivu (DGRN-K), la
Direction Provinciale de Mobilisation et d’Encadrement des Recettes du Sud Kivu
(DPMER).
69
70
Décret 0058 du 27 décembre 1995 portant création de la Direction Générale des Recettes
Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations.
DGRAD, Rapport d’activités 2007, Kinshasa, 2009, p. 9.
38
II.2. SPECIFICITES DU SYSTEME CONGOLAIS DE PERCEPTION DES
RECETTES PUBLIQUES
Le système congolais de perception des recettes publiques regorge quelques
particularités, dans lesquelles se retrouvent ses points forts ainsi que ses points
faibles.
II.2.1. Atouts du système congolais de perception des recettes
Le système fiscal congolais de perception des recettes comporte plusieurs
aspects positifs, dont certains résultent des réformes de ces dernières années.
II.2.1.1. La volonté de réformer symbolisée par « le Plan stratégique de réforme des
finances publiques
Depuis 2001, les autorités congolaises ont compris l’importance des recettes
publiques et ont inscrit la mobilisation des recettes comme un des axes de la
stratégie d’appui au Programme intérimaire renforcé du Gouvernement d’avril 2001.
L’élaboration du « Plan stratégique de réformes des finances publiques » en mars
2010 et la mise en place du « Comité d’Orientation de Réformes des Finances
Publiques » révèle la volonté politique à réformer le secteur des finances publiques.
Celle-ci est aussi traduite dans différents textes qui ont amélioré le cadre
juridique de la fiscalité congolaise. Il s’agit notamment des textes classés dans l’ordre
chronologique suivant :
- Décret n° 007/2002 du 02 février 2002 relatif au mode de paiement des dettes
envers l'Etat tel que modifié et complété par le Décret n° 011/20 du 14 avril 2011 ;
- Décret n° 018/2003 du 2 mars 2003 portant règlement administratif relatif au
personnel de carrière de la Direction Générale des Impôts ;
- Loi n° 004-2003 du 13 mars 2003 portant réforme des procédures fiscales, telle
que modifiée et complétée par l’Ordonnance-loi n° 005 / 2012 du 21 septembre
2012 ;
- Décret n° 09/043 du 03 décembre 2009 portant création de la Direction Générale
des Douanes et Accises et le Décret 11/06 du 25 janvier 2011 portant institution
du cadre organique de la direction générale des douanes et accises ;
39
- Ordonnance-loi n° 10/001 du 20 aout 2010 portant institution de la taxe sur la
valeur ajoutée telle que modifiée et complétée par l’ordonnance-loi n° 13/007 du
23 février 2013 ;
- Ordonnance-loi n° 10/002 du 20 août 2010 portant code des douanes ;
- Décret n° 011/32 du 29 juin 2011 du Premier Ministre portant suppression des
perceptions illégales aux frontières.
- Ordonnance-loi n° 002/2012 du 21 septembre 2012 modifiant et complétant
l’ordonnance-loi n° 90-046 du 8 août 1990 portant réglementation du petit
commerce ;
- Ordonnance-loi n° 003/2012 du 21 septembre 2012 portant régime fiscal
applicable aux entreprises de petite taille en matière d’Impôt sur les bénéfices et
profits ;
- Ordonnance-loi n°004/2012 du 21 septembre 2012 modifiant et complétant
certaines dispositions de la Loi n° 69/009 du 10 février 1969 relative aux impôts
cédulaires sur le revenu ;
- Ordonnance-loi n° 13/001 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des impôts,
droits, taxes et redevances des Provinces et des Entités Territoriales
Décentralisées ainsi que leurs modalités de répartition ;
- Ordonnance-loi n° 13/002 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des droits,
taxes et redevances du pouvoir central ;
- Ordonnance-loi n° 13/003 du 23 février 2013 portant réforme des procédures
relatives à l’assiette, au contrôle et aux modalités de recouvrement des recettes
non fiscales.
II.2.1.2. Un système déclaratif auto-liquidé
Le système fiscal congolais est déclaratif auto-liquidé. Il met le contribuable
devant ses responsabilités en lui demandant de s’identifier, de déclarer lui-même les
bases de son imposition, de calculer son impôt et d’effectuer le paiement y
correspondant. Ce système a l’avantage d’alléger les coûts administratifs de gestion
de la fiscalité puisqu’il consiste à « confier la collecte de l’impôt aux entreprises (…)
40
et à réduire, en fonction des enjeux de recettes et des contraintes, le nombre de
déclarations fiscales »71.
II.2.1.3. Une législation fiscale adaptée au contexte régional
La fiscalité de porte est axée sur un système de protection qui est
concurrentiel, puisqu’elle fixe à 20% les produits concurrençant l’industrie nationale,
et est également en phase avec les pays de la sous-région72 : 5% pour les matières
premières, 10% pour les produits alimentaires de grande consommation, 20% pour
les produits concurrençant l’industrie nationale, dont la consommation ne doit pas
être encouragée ou est inélastique au prix et 0% pour la TVA à l’exportation.
L’adaptation à l’environnement régional a conduit à la suppression d’une
trentaine de perceptions opérées sans base légale ou instituées par des textes en
violation de la loi, perçues par les agents, services et organismes à l’occasion de
l’importation et exportation73.
L’institution de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)74 au 1er janvier 2012 permet
une meilleure lisibilité des rapports fiscaux au sein des espaces économiques sousrégionaux. Elle a remplacé l’impôt sur le chiffre d’affaires dont l’étroitesse du champ
d’action ne permettait pas la rentabilité optimale pour renflouer le Trésor public d’une
part. D’autre part « son caractère cumulatif qui entrainait un effet en cascade, (…) a
eu un impact négatif sur la compétitivité des produits de fabrication locale aussi bien
à la consommation qu’à l’exportation, créant des distorsions dans le commerce
71
BRUNQUEL Christian, & alii., La modernisation des administrations fiscales, dans Afrique au Sud
du Sahara : mobiliser des ressources fiscales pour le
développement, Paris, Economica, 2005, p 219.
72
Gérard Pointe, Approche comparative du système fiscal congolais (inédit), Assises nationales sur
les coulages des recettes publiques (Vice Primature, Ministère du Budget - Ministère
des Finances), Kinshasa du 2 au 4 mai 2013, p.31.
73
Décret n° 011/32 du 29 juin 2011 du Premier Ministre portant suppression des perceptions illégales
aux frontières.
74
Ordonnance-loi n° 10/001 du 20 aout 2010 portant institution de la taxe sur la valeur ajoutée telle
que modifiée et complétée par l’ordonnance-loi n° 13/007 du 23 février 2013.
41
extérieur (…) et des conséquences néfastes au niveau des investissements et même
de la consommation »75.
II.2.1.4. L’externalisation de la perception des recettes par le système bancaire
Le Décret n° 007/2002 du 2 février 2002 relatif au mode de paiement des
dettes envers l’Etat attribue aux banques et institutions financières agréées la
compétence de percevoir le paiement des dettes envers l’Etat et les astreint à les
reverser au compte général du Trésor ouvert à la Banque Centrale du Congo
endéans 48 heures.
De ce fait, ce décret marque une révolution dans la procédure de perception
des recettes, puisqu’il retire aux comptables publics la compétence d’encaissement
des fonds publics76, qui leur était autrefois reconnue par l’Ordonnance n° 73-235 du
15 août 1973 portant création du cadre des comptables publics. Aux termes de ce
Décret, les comptables publics n’exercent plus la fonction de « caissier » qui leur
conférait la compétence « de détenir et de manier (par eux-mêmes ou par leurs
préposés) les deniers publics »77.
Instauré depuis plus d’une décennie, ce mode de paiement a donné
satisfaction tant à l’Etat qu’aux opérateurs économiques, de telle sorte que sa
révision n’a porté que sur le barème de sanctions pour non respect du délai de
reversement78.
75
Laurent MABIALA UMBA, La TVA. Pratique dans le monde des affaires. Editions CRIGED,
Kinshasa, 2011, pp 224-225.
76
Ce décret prévoit deux exceptions : d’une part des attachés financiers des représentations
diplomatiques de la République démocratique du Congo à l’étranger et d’autre part sur autorisation
du ministre ayant les finances dans ses attributions, les comptables publics des recettes ou
receveurs affectés aux régies financières et aux entités administratives décentralisées dans les
localités où les Institutions financières agréées ne sont pas représentées.
77
Jean-Luc ALBERT, Finances publiques, 8
ème
78
Décret n° 011/20 du 14 avril 2011 modifiant et complétant le Décret n° 007/2002 du 02 février 2002
relatif au mode de paiement des dettes envers l'Etat
édition, Paris, Dalloz, 2013, p.108.
42
II.2.2. Les faiblesses du système congolais de mobilisation des recettes
publiques
La modernisation du système de mobilisation des recettes publiques n’est pas
encore totale malgré les différentes réformes réalisées au cours de la dernière
décennie. Elle est tributaire de plusieurs contraintes qui font sa faiblesse.
II.2.2.1. L’incivisme fiscal
La principale faiblesse est sans doute « l’incivisme fiscal » tant dans le chef
des autorités politico-administratives que pour l’ensemble de la population. Si celui-ci
est « sans doute la chose la mieux partagée sur le continent »79 africain, il se traduit
en RDC principalement par la non perception de « l’impôt minimum garanti », conçu
comme une obligation fiscale minimale pour participer aux charges publiques d’une
part, et d’autre part par le refus des parlementaires de payer l’impôt professionnel sur
les rémunérations.
II.2.2.2. Multiplicité des prélèvements non fiscaux.
Le système actuel recense 648 prélèvements non fiscaux dont 284 relèvent
de la fiscalité locale. Si ce chiffre parait effrayant, il constitue déjà une avancée
significative car en 2010 on dénombrait 774 prélèvements non fiscaux80. Les travaux
de mise en place de la TVA et du transfert des compétences fiscales aux provinces
ont permis la suppression de 126 prélèvements jugés redondants, sans base
juridique et ceux faisant double imposition avec la TVA. Néanmoins, l’on peut
constater leur nombre est encore important.
II.2.2.3. Multiplicité des services mobilisateurs des recettes (régies financières).
La RDC compte actuellement 14 services mobilisateurs des recettes : 3
services mobilisateurs des recettes relèvent du Pouvoir Central (la Direction
Générale des Impôts, la Direction Générale des Douanes et Accises ainsi que la
Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de
79
80
Salif YONABA, le recouvrement des recettes publiques dans les Etats africains, dans Revue
Française d’administration publique (ENA), n°144, 2012/4, p 1045.
Plan stratégique de réformes des finances publiques,( RDC – Ministère des Finances), p 30.
43
Participations) et 11 services mobilisateurs des recettes fonctionnent pour chacune
des 11 provinces du pays.
Contrairement aux autres pays francophones africains qui n’ont que les
administrations fiscales (Douanes et Impôts) et que des pays anglophones qui
évoluent vers une seule administration (Revenue Autority), la prolifération des
services mobilisateurs des recettes ternit l’image des institutions fiscales. Les
disputes de compétences entre ces différents services mobilisateurs des recettes,
l’absence de coordination dans la programmation des contrôles ainsi que l’absence
d’un interlocuteur unique sont autant de maux qui détériorent le climat des affaires et
rendent ces services inefficaces.
II.2.2.4. Dualité dans la gestion des phases d’exécution des prélèvements non
fiscaux.
La DGRAD a été créée en vue d’assurer « toutes les missions et prérogatives
en matière d’ordonnancement et de recouvrement des recettes administratives,
judiciaires, domaniales et de participations émargeant du budget général de l’Etat»81.
Il se dégage de ses missions et prérogatives que ce service mobilisateur des
recettes n’exerce pas les missions d’assiette (la taxation et la liquidation) des
recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations émargeant du
budget général de l’Etat. La DGRAD partage donc les phases d’exécution du budget
de l’Etat avec 42 ministères et services de l’Etat généralement appelés « services
d’assiette » ou « services générateurs »82.
Il s’agit là d’une nette séparation dans la gestion de phases d’exécution des
prélèvements non fiscaux. Cette dichotomie, qui a l’avantage de permettre le contrôle
mutuel entre la DGRAD et les services d’assiette, présente néanmoins les
inconvénients de cohérence, de coordination et d’absence d’interlocuteur unique
pour les contribuables et assujettis, en matière de contrôle, d’établissement des
statistiques et de recours (relatif à l’assiette ou le recouvrement). En effet, c’est le
81
Article 3 du Décret 058 du 27 décembre 1995 portant création, organisation et fonctionnement de la
Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations.
82
DGRAD, Rapport d’activités 2009, p27.
44
souci de cohérence et coordination a poussé beaucoup de pays africains à mettre
dans un même service.
La Direction Générale des Impôts de la RDC fonctionne sur ce modèle
d’administration unique. Aussi, ne faudrait-il pas intégrer au sein de la DGRAD tous
les services des Ministères chargés de la taxation et de la liquidation. Ce qui
permettrait d’assurer la cohérence et éviter la relation conflictuelle qui règne entre la
DGRAD chargée de l’ordonnancement et du recouvrement et les services des
Ministères qui assurent la taxation et la liquidation. D’ailleurs, le regroupement au
sein d’une même administration les fonctions d’assiette et de recouvrement a
l’avantage de mettre en place « des chaînes de travaux et de contrôle complètes
allant de l’identification au paiement, en s’appuyant sur une informatique unique et
cohérente (…) et de clarifier les responsabilités en évitant le renvoi des difficultés des
services
chargés
de
l’assiette
à
ceux
chargés
du
recouvrement
(et
83
réciproquement) ».
II.2.2.5. Chevauchement de compétence dans la gestion de certains impôts, taxes et
redevances
La classification des impôts, taxes, redevances et droits appelle
un
questionnement sur leur répartition par services compétents chargés de leur
mobilisation. C’est le cas pour les droits d’accises gérés par la DGDA, et les
redevances minières et forestières gérées par La DGRAD.
En attribuant à la Direction Générale des Douanes et Accises la mission de
« perception des droits d’accises et de consommation »84, le Gouvernement
congolais élargit les compétences de la DGDA, ayant vocation de gérer la fiscalité de
porte, à des activités exclusives de la fiscalité intérieure. Bien que la DGDA gère les
droits d’accises depuis l’époque coloniale, il est étonnant de constater que cette
compétence n’a jamais été transférée à la Direction générale des impôts, chargé de
la fiscalité intérieure. Chaque administration a, en effet, été spécialisée : « les métiers
83
Christian BRUNQUEL & alii, Administration de l’impôt : problématique d’ensemble, dans Afrique au
Sud du Sahara : mobiliser des ressources fiscales pour le
développement, Paris, Economica, 2005, p 146
84
Article 5 alinéa 2 du décret n° 09/43 du 03/12/2009 portant création et organisation de la direction
générale des douanes et accises.
45
des Douanes et des Impôts présentent des spécificités marquées (spécificités
d’assiette, des contribuables, des transactions) »85.
Un autre constat montre que la DGRAD gère certaines opérations concernant
les recettes ayant un caractère fiscal. Ils ne sont payés ni à titre de taxe en
contrepartie d’un service rendu, ni en tant que redevance comme « un prix perçu en
contrepartie de l’avantage économique procuré à certains usagers »86 ou encore
comme prix perçu pour un bien cédé. Il s’agit notamment de la redevance minière et
des droits superficiaires (pour le secteur minier), de la marge distribuable et des
royalties (pour le secteur des hydrocarbures) ainsi que la taxe de numérotation et de
la redevance annuelles sur les concessions en matière de téléphonie (pour le
secteur des télécommunications).
Face à ce constat, il y a lieu de s’interroger sur la pertinence de leur gestion
par la DGRAD, spécialisée dans la gestion des recettes non fiscales, alors qu’une
administration spécialisée pour les impôts existe, en l’occurrence la Direction
générale des Impôts87.
II.2.2.6.
Un système de
d’encouragement
rémunération
des
agents
axé
sur
les
primes
Le système de rémunération des services mobilisateurs du Pouvoir central88
des recettes comprend des mécanismes particuliers. En effet, outre le salaire payé à
85
Christian BRUNQUEL & cie, Op.Cit., p 144
86
Xavier CABANNES, La redevance : de la rémunération du coût du service rendu à la rémunération
de la valeur économique de la prestation fournie. Une longue marche vers un
prix du marché, dans Réformes des finances publiques et Modernisation de
l’Administration. (Mélanges en l’honneur de Robert HERTZOG), Paris,
Economia, 2011, p 76 (pp 67-82).
87
A sa création en 1995, la DGRAD a hérité de la gestion de ces opérations à caractère fiscal. En effet, depuis
l’indépendance, les ministères chargés de la police du secteur concerné établissaient l’assiette de ces
impôts et en assuraient aussi les activités du recouvrement. Avec la création e la DGRAD, celle-ci assure le
recouvrement et les Ministères continuent d’en assurer l’établir l’assiette. La Direction Générale des Impôts
est restée depuis toujours en dehors de la gestion de ces impôts.
88
Ce point ne traite pas de la rémunération (prime) des services provinciaux de mobilisation des
recettes, dont le système de rémunération n’est pas encore formalisé, lisible et généralisé dans
plusieurs provinces. A ce jour, les provinces oscillent entre le système de rémunération basé sur
46
tous les fonctionnaires, les agents et cadres des services mobilisateurs des recettes
du Pouvoir central reçoivent d’autres rémunérations sous forme de primes : la prime
de rétrocession, la prime de plus-value et la prime contentieuse.
La prime de rétrocession provient de la rétrocession mensuelle émargée du
budget de l’Etat à la hauteur des recettes mensuelles réalisées : 5% pour la DGI et la
DGDA et 10% pour la DGRAD, qu’elle partage à parts égales avec les services
générateurs desdites recettes89. Le tiers de cette rétrocession est payé au personnel
au titre de prime de rétrocession pour motivation. Le solde est affecté au
fonctionnement et à l’investissement.
Instituée en 2004 dans le « Contrat de performance » signé entre le Ministre
des Finances et les Directeurs généraux des services mobilisateurs du Pouvoir
central, la prime de plus-value (bonus) est une prime payée trimestriellement à la
hauteur de 10% du montant de la plus-value réalisée durant le trimestre entre les
recettes recouvrées et les assignations budgétaires. Cette somme sert uniquement à
la motivation du personnel et n’est en aucun cas affectée ni au fonctionnement et ni
à l’investissement des services mobilisateurs des recettes.
Les dispositions de la prime de plus-value ont été modifiées en 2010 par le
Pacte de doublement des recettes90, qui institue un nouveau critère de performance,
à savoir le doublement des recettes en l’année N+1 par rapport au niveau réalisé en
un salaire base (sans rétrocession) et un système de rémunération basé sur une certaine
rétrocession (sans un salaire de base).
89
Article 5 de la Loi 04/015 du 16 juillet 2004 fixant la nomenclature des actes générateurs des
Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations ainsi que leurs modalités de
perception
90
Le pacte de doublement des recettes est un contrat de performance signé entre le ministre des
finances et les directeurs généraux des services mobilisateurs des recettes. Il part de l’idée que les
recettes réalisées et les assignations budgétaires sont très faibles par rapport au potentiel fiscal. Il
exigeait aux services mobilisateurs des recettes de réaliser en l’année n le double du montant des
recettes réalisées en n-1, en contre partie d’un appui du ministre des finances sur certains
problèmes structurels et conjoncturels relatifs à la mobilisation des recettes d’une part, et d’une
attribution d’une prime de plus value correspondant à 15% du de la part du montant supérieur aux
recettes doublées. Le montant du pacte de doublement des recettes est généralement supérieur
de 30% à 40% des assignations budgétaires.
47
l’année N. Le pacte de doublement des recettes élargit à un (1) an la période
d’évaluation.
La prime contentieuse est payée aux agents des services mobilisateurs à
l’issue d’un contrôle fiscal. En effet, les règlements administratifs des services
mobilisateurs des recettes91 disposent de la répartition du produit des amendes
contentieuses comme suite : 50% versés au Trésor public au moyen de titre de
perception et 10% versés au service mobilisateur des recettes concerné pour les
travaux d’investissements et 40% pour la motivation du personnel. Le montant
revenant à la motivation du personnel est ensuite scindé entre d’une part les auteurs
du contrôle fiscal et d’autre part l’ensemble du personnel au titre de «la prime
contentieuse minimum garantie ».
Ces différentes primes ont un caractère incitatif et motivant pour maximiser les
recettes publiques internes du pays. Elles soulèvent néanmoins des critiques. La
prime de rétrocession comporte trois aspects négatifs : d’abord elle crée une
différence de traitement avec les autres fonctionnaires à qui l’Etat ne paie que le
salaire, ensuite elle masque le faible niveau du salaire, étant donné que le salaire se
situe à 84.000 CDF alors que la prime de rétrocession garde une moyenne
mensuelle de 500.000 CDF, enfin sa variabilité pose problème puisqu’elle peut
fluctuer d’un mois à l’autre entre 250.000 CDF ou 750.000 CDF.
La prime de plus-value quant à elle pose clairement la notion même de
l’évaluation de la performance. Le trimestre n’est pas une périodicité optimale
d’évaluation, car en dépit de performances réalisées au cours de certains trimestres
et que des primes de plus-value y relatives ont été payées de 2004 à 2010 alors que
les recettes mobilisées n’ont pas atteint les assignations budgétaires durant la même
période.
La prime sur le produit des amendes contentieuses a l’avantage d’encourager
le personnel à réprimer la fraude. Mais elle présente l’inconvénient de créer un
engouement massif du personnel vers les fonctions de contrôle, considéré comme
91
Article 18 du Décret n° 09/43 du 03/12/2009 portant création et organisation de la DGDA ; article 22
du Décret 018/2003 du 2 mars 2003 portant règlement administratif relatif au personnel de carrière
de la Direction Générale des Impôts ; article 21 du décret 059 du 27 décembre 1995 portant
règlement d’administration relatif au personnel de carrière de la DGRAD
48
une fonction enrichissante. Aussi, n’assiste-t-on pas à une frustration du personnel
exerçant des fonctions support ou n’ayant pas l’avantage d’exercer les fonctions de
contrôle.
II.2.2.7. L’informatisation partielle de la chaîne des recettes
Le système de gestion fiscale ne dispose pas d’un système intégré permettant
le suivi en temps réel des recettes sur toute la procédure, hormis le circuit douanier
avec le système informatique SYDONIA World. Le circuit de télédéclaration de la
fiscalité intérieure n’est pas intégré avec les banques commerciales et la Banque
centrale du Congo chargées respectivement de la perception et du nivellement92 des
recettes au compte général du Trésor public. Les prélèvements non fiscaux ne sont
pas informatisés. Seule la Direction Générale des Impôts possède un site internet.
La problématique d’informatisation se présente sous trois aspects : d’abord, le
début d’informatisation n’a pas transformé les méthodes de travail. Plusieurs
procédures sont encore manuelles. L’utilisation de SYDONIA world par exemple
n’exclut pas le maintien de plusieurs documents papiers ; ensuite, les échanges
informatiques entre les services mobilisateurs des recettes ne sont pas fluides. Les
applications informatiques ne sont interconnectées. Ce qui altère la fiabilité du fichier
d’identifiant unique du contribuable (IUC) et complexifie la gestion de la TVA entre
l’administration douanière et l’administration des impôts ; enfin, le processus
d’informatisation souffre de « carence d’une approche coordonnée des démarches
d’informatisation répondant à un plan d’ensemble et à des normes »93. Cette
dispersion conduit au risque d’incohérence.
92
Le nivellement est un terme officiel qui désigne l’opération qui consiste à solder journellement les comptes
transitoires des services mobilisateurs des recettes ouverts à la Banque centrale du Congo au profit du compte
général du trésor.
93
François AUVIGNE, Diagnostics sur les régies financières en république démocratique du Congo.
Note adressée au Ministre des Finances. Kinshasa, novembre 2011, p 10.
49
*
*
*
Les différentes réformes entamées depuis 2001 donnent un nouveau visage
au paysage fiscal en RD Congo. La législation fiscale est plus lisible, mais demeure
perfectible. Le nouveau code douanier répond aux standards internationaux.
L’institution de la TVA en 2012 a été une étape décisive de la modernisation du
système fiscal. La structure et le taux d’impôts sont cohérents avec l’environnement
régional. Le transfert des compétences fiscales vers les collectivités locales s’est
opéré en même temps que le processus d’assainissement des prélèvements non
fiscaux. L’externalisation de la perception des recettes par les banques est un vrai
succès. D’autres réformes de droit commun ont permis d’élargir l’assiette et la
fiscalisation progressive du secteur informel.
Cependant le système fiscal n’est pas totalement modernisé pour répondre
aux enjeux de la mobilisation optimale des recettes. Il a encore des marges de
progression, tant du point de vue de la législation que de l’architecture et de
l’organisation administratives.
La poursuite des réformes est un impératif absolu pour sortir le système fiscal
de son paradoxe actuel : ses atouts sont l’un des facteurs explicatifs de la hausse du
niveau des recettes constatée depuis 2001 alors que ses faiblesses sont l’une des
causes de l’incapacité du gouvernement à propulser le développement à travers la
mobilisation des recettes.
50
CHAPITRE III : LA MOBILISATION DES RECETTES PUBLIQUES EN
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
Ce chapitre a pour but de montrer le contraste existant entre l’augmentation
des recettes et la persistance de la pauvreté d’abord (1) ; il évalue ensuite l’effort de
mobilisation de ces recettes au regard des prévisions budgétaires et du potentiel
fiscal (2) en vue de formuler des recommandations (3).
III.1. LE CONTRASTE DE L’AUGMENTATION DES RECETTES PUBLIQUES ET
DE LA PERSISTANCE DE LA PAUVRETE.
Cette étude analyse le comportement des recettes publiques prélevées au
profit du Pouvoir central pour la période allant de 2001 à 2012. Sont donc écartées
les recettes des Provinces et des Entités Territoriales Décentralisées, ainsi que les
ressources extérieures reçues par l’Etat congolais.
III.1.1. Une augmentation sensible des recettes publiques
De 2001 à 2012, les recettes courantes ont sensiblement augmenté, passant
de 64,4 milliards CDF en 2001 à 3.612,7 milliards CDF en 2012 soit un
accroissement annuel moyen de 48,3%. En intégrant les recettes prélevées auprès
des pétroliers producteurs, les recettes publiques dégagent la même trajectoire
ascendante avec un montant de 69,55 milliards CDF en 2001 et 4.448,06 milliards
CDF en 2012. Par contre, le taux d’accroissement annuel moyen des recettes
globales a baissé à 17,76% suite à l’absence de paiement des impôts et taxes
pétroliers en 2003 et du non paiement des royalties et de l’impôt sur le bénéfice et
profits des pétroliers producteurs en 2004, consécutive aux déductions sur
investissements opérés en 2002.
Le tableau ci-dessous indique que les recettes courantes ont augmenté en
même temps que le PIB. Le taux de prélèvements des recettes courantes est passé
de 7,1% en 2001 à 20,9% du PIB en 2012, et rattrape ainsi son retard par rapport à
51
la moyenne non pondérée des pays africains située à 20,3% en 201094. Les recettes
courantes ont dépassé la barre du milliard CDF en 2008, en dépit du contexte
économique mondial marqué par le déclenchement de la crise financière, elles ont
triplé en quatre ans pour atteindre 3.612,7 milliards CDF en 2014.
Tableau n°2 : L’évolution des recettes publiques (en milliards de CDF)
Année
Recettes
courantes
PIB
(à prix
courants)
Taux de
Recettes
prélèvement globales1
PIB
(à prix
courants)
Taux de
prélèvement
2001
64,41
1 407,55
4,58%
69,55
1 407,55
4,94%
2002
146,59
1 922,30
7,63%
169,37
1 922,30
8,81%
2003
168,47
2 298,66
7,33%
265,45
2 298,66
11,55%
2004
243,8
2 601,00
9,37%
392,5
2 601,00
15,09%
2005
309,54
3 407,94
9,08%
611,16
3 407,94
17,93%
2006
667,21
4 066,60
16,41%
917,37
4 066,60
22,56%
2007
61,32
5 148,17
1,19%
834,1
5 148,17
16,20%
2008
1 206,05
6 525,98
18,48%
1 270,44
6 525,98
19,47%
2009
1 426,01
9 026,68
15,80%
2 102,63
9 026,68
23,29%
2010
2 162,32
11 949,31
18,10%
3 094,17
11 949,31
25,89%
2011
2 679,03
14 760,54
18,15%
3 206,51
14 760,54
21,72%
2012
3 612,73
17 312,63
20,87%
4 448,06
17 312,63
25,69%
1. Recettes globales = Recettes courantes + les recettes des pétroliers producteurs.
Source : Nos calculs sur la base des statistiques des services mobilisateurs des recettes et de la Banque
Centrale du Congo.
La classification budgétaire divise les recettes publiques en deux catégories :
les recettes courantes et les recettes des pétroliers producteurs95. Dans cette
dernière catégorie sont enregistrés les impôts déduits sur le chiffre d’affaires
(Convention off shore) ou sur la production (Convention on shore) : la marge
distribuable, la taxe de participation et l’impôt sur le bénéfice et profit. Ces impôts
sont payés mensuellement. Par contre, les royalties et les dividendes sont
94
Le rapport de l’OCDE sur les « perspectives économiques en 2012 » indique que la moyenne non
pondérée du recouvrement des impôts dans les pays d’Afrique subsaharienne est passée de
17,5% du PIB en 2000 à 20,3% en 2010.
95
Suivant les Conventions pétrolières signées entre l’Etat et les sociétés productrices du pétrole,
celles-ci sont exemptés des impôts et taxes du droit commun. En revanche, elles paient les taxes
et impôts ci-après : la marge distribuable, les royalties, l’impôt sur le bénéfice et profit, la taxe de
participation et les dividendes. Les sociétés de production du pétrole paient généralement en
devises et ces recettes servent au remboursement de la dette.
52
enregistrés dans la catégorie des recettes courantes et sont payés à la fin de
l’exercice comptable.
Les recettes de la catégorie des pétroliers producteurs ne sont pas intégrées
dans le calcul de l’effort de mobilisation des recettes publiques ainsi que du taux des
prélèvements
publiés dans les publications officielles. En vue de garder la
cohérence avec les statistiques officielles en la matière, le présent travail fait le choix
de s’aligner sur l’option de l’Etat congolais qui écarte les recettes des pétroliers
producteurs dans le calcul de l’effort de mobilisation des recettes. En effet, leur mise
à l’écart ou leur intégration ne modifierait pas substantiellement les principales
conclusions qui en découleront96.
Tableau n° 3 : Structure du budget exécuté par rapport aux recettes totales
(en pourcentage des ressources totales)
Année
Recettes
courantes
(1)
(1= 2+3)
Recettes
2001
100
92,9
7,1
-
100
2002
100
86,7
13,3
-
100
2003
77,6
66,1
11,5
22,4
100
2004
82,4
70,9
11,5
17,6
100
2005
79,2
67,7
11,5
20,8
100
2006
78,9
69,1
9,8
21,1
100
2007
95,9
76,2
19,7
4,1
100
2008
94,8
78
16,8
5,2
100
2009
75,6
56,6
19
24,4
100
2010
94,4
71,1
23,3
5,6
100
2011
98,4
75,3
23,1
1,6
100
Fiscales
Recettes
non fiscales
(3)
Ressources
extérieures
(4)
-2
Ressources
totales (5)
(5=1+4)
Source : Les Rapports d’activités 2010 et 2011 de la Banque Centrale du Congo.
Il ressort de ce tableau que les recettes courantes constituent le poste
principal des ressources totales. Les ressources extérieures n’ont jamais atteint 25%
des ressources totales, malgré les promesses de la Communauté internationale
96
Le taux des prélèvements publiés dans les différentes Lois des finances (de 2002 à ce jour) et les
Rapports d’activités de la Banque Centrale du Congo sont calculés sur les recettes courantes. Les
recettes de la catégorie pétroliers producteurs ne sont pas aussi prises en compte dans le calcul
du montant de la rétrocession payée mensuellement aux services mobilisateurs des recettes.
53
d’aider le pays fragile, post conflit. Aucune ressource extérieure n’a été apportée
directement au Gouvernement congolais pendant la période d’exécution du
Programme Intérimaire Renforcé (2001-2002). Les ressources extérieures ont été
réduites autour de 5% en 2007 et 2008, consécutivement à l’échec du Programme
Economique du Gouvernement I (PEG I). Après une remontée en 2009, ces
ressources ont encore baissé en 2010 et 2011 du fait des promesses non tenues par
les bailleurs de fonds.
III.1.2. Faible poids des recettes courantes sur les dépenses d’investissements.
L’analyse de l’incidence de l’effort national sur le développement de la RDC
s’effectuera à travers les investissements réalisés sur base de recettes courantes.
Tableau n° 4 : La part des dépenses d’investissement financées par
les recettes courantes (en milliards CDF à taux courants)
Année
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Recettes
dépenses
courantes d’investissement
64,41
1,61
146,59
5,42
168,47
10,28
243,80
15,12
309,54
16,10
667,21
31,36
761,32
19,79
1 206,05
150,76
1 426,01
332,26
2 162,32
605,45
2 799,60
352,75
9955,32
1540,90
%
2,5%
3,7%
6,1%
6,2%
5,2%
4,7%
2,6%
12,5%
23,3%
28,0%
12,6%
15,48%
Source : nos calculs sur base des rapports d’activités de
la Banque Centrale du Congo 2010 et 2011
Le tableau n° 3 nous renseigne que la part des recettes courantes affectées
aux dépenses d’investissements a augmenté chaque année. Elle est passée de
2,5% en 2001 à 12,6% en 2011. Elle a connu des niveaux très élevés en 2009 et
2010 avec respectivement un taux de 23,3% et 28%.
De manière globale, de 2001 à 2011, le montant de 1.540,9 milliards CDF des
recettes courantes a été consacré aux projets d’investissements. Ce montant
correspond au tiers des ressources extérieures reçues au titre de dépenses
54
d’investissements durant la même période, soit un montant de 4.611,3 milliards
CDF97.
Le graphique ci-dessous indique que les dépenses d’investissements
financées par des recettes courantes ont certes augmenté, mais pas avec le même
rythme que celles financées par les ressources extérieures. Il indique également que
les dépenses d’investissements financées par les recettes courantes n’ont jamais
atteint la moitié du montant des dépenses d’investissements financées par les
ressources extérieures98. Le taux de 96% réalisé en 2010 est à la fois exceptionnel
et historique : la somme de 605,45 milliards CDF a été consacrée à l’accélération
des travaux du programme « Cinq chantiers »99, à la veille de la célébration du
cinquantenaire de l’indépendance.
Graphique n° 3 : Situation des dépenses d’investissements financées par les recettes courantes
et celles financées par les ressources extérieures (en milliards CDF)
1000,00
900,00
800,00
700,00
600,00
500,00
400,00
300,00
200,00
Dépenses d'investissements
financées par les ressources
internes
Dépenses d'investissements
financées par les ressources
extérieures
100,00
0,00
Source : Nos calculs sur base des Rapports d’activités de la Banque Centrale du Congo 2010 et 2011.
97
Les ressources extérieures ont aussi financé les dépenses de fonctionnement à la hauteur de
1.750,2 milliards CDF de 2001 à 2011.
98
Les ressources externes reçues en 2001 et 2002 n’émargeaient pas dans le budget de l’Etat. Cette
période correspond à la période d’exécution du Programme Intérimaire Renforcé (PIR) jusqu’à la
reprise effective de la coopération structurelle. Les ressources extérieures étaient gérées par le
Bureau Central de Coordination, créé par le Gouvernement et la Banque Mondiale pour gérer les
projets d’investissements à financement extérieur.
99
Les « Cinq chantiers » : programme quinquennal de reconstruction de la RD Congo sur lequel le
Président KABILA s’est fait élire en 2006. Il cible cinq secteurs clés : 1) Infrastructures ; 2) Santé et
Education ; 3) Habitat ; 4) Eau et Electricité ; 5) Emploi.
55
Il en découle un constat majeur : le développement de la RD Congo n’était
pas assuré par l’effort national, mais laissé à la merci des ressources extérieures. Et
compte tenu de leur volatilité parce que dépendant de l’environnement économique
et financier mondial, force est de conclure que la RD Congo n’est pas maître de son
développement.
III.1.3. Un pays en retard par rapport aux cibles à atteindre en 2015 relatifs aux
Objectifs du Millénaire pour le Développement
Le développement d’un pays, en tant que réalisation d’un niveau souhaité et
souhaitable d’un bien-être humain, ne saurait se réduire à la seule croissance
économique. Il s’apprécie par l’amélioration de la qualité de vie des individus, des
familles et des communautés ainsi que par la combinaison des aspects sociaux,
économiques, politiques, culturels et environnementaux : la nourriture, le logement,
l’emploi, les services de santé, l’éducation, la sécurité. C’est une vision consensuelle
du développement déclarée par les Nations Unies et traduite à travers les objectifs
du millénaire pour le développement (OMD)100.
Pour atteindre ces objectifs, la RD Congo a élaboré un « Document de
Stratégie pour la croissance et de réduction de la pauvreté » (DSCRP) en deux
versions, dont une première en 2006 et une version révisée en 2011. Ce document,
qui est considéré comme le « seul cadre fédérateur de l’ensemble des politiques
macroéconomiques et sectorielles »101, repose sur quatre piliers comportant des
orientations stratégiques sectorielles et transversales : (1) renforcer la gouvernance
et la paix, (2) diversifier l’économie, accélérer la croissance et promouvoir l’emploi,
100
Les Objectifs du Millénaire pour le Développement, définis lors du Sommet du millénaire de 2000
constituent les engagements des dirigeants de 189 Etats membres des Nations Unies pour un
nouveau partenariat mondial visant à réduire, à l’horizon 2015, l’extrême pauvreté et construire un
monde plus sûr, plus prospère et plus équitable, à travers les objectifs suivants : (1) éliminer
l’extrême pauvreté et la faim, (2) assurer l’éducation primaire pour tous, (3) promouvoir l’égalité
des sexes et l’autonomisation des femmes, (4) réduire la mortalité infantile et post-infantile, (5)
améliorer la santé maternelle, (6) combattre le VIH/SIDA, le paludisme et d’autres maladies, (7)
préserver l’environnement (8) mettre en place un partenariat pour le développement.
101
Document de la stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté. Deuxième génération.
RDC, Ministère du Plan, octobre 2011, p 8.
56
(3) améliorer l’accès aux services sociaux de base et renforcer le capital humain, (4)
protéger l’environnement et lutter contre les changements climatiques.
Les piliers 2 et 3 comportent des indicateurs quantitatifs, donc évaluables.
Cependant, la quasi inexistence des statistiques relatives à l’emploi direct généré
exclusivement par les investissements publics oblige à limiter cette analyse à
l’évaluation du pilier 3, lequel a été financé tant par les recettes courantes que par
les ressources extérieures. Ainsi, l’analyse de l’évolution de quelques indicateurs des
OMD par rapport à leur cible de 2015 révèle des observations alarmantes :
- en 2007, sept (7) congolais sur dix (10) disposaient encore d’un revenu inférieur
au seuil de pauvreté nationale (1 USD), alors que la cible est de réduire ce
nombre à quatre personnes sur dix en 2015. Notons que ce nombre n’a presque
pas bougé puisqu’en 2001, ils étaient presque autant à souffrir de l’extrême
pauvreté et de la faim, soit 7,13 sur 10 personnes ;
- près de la moitié (48 %) des enfants de moins de deux ans n’avaient pas été
vacciné contre toutes les maladies, alors que l’objectif était que ce nombre soit en
déça de 40% pour qu’au moins 60 % des enfants soient vaccinés à l’échéance
2015 ;
- la prévalence du VIH/SIDA a enregistré une progression annuelle moyenne de
0,5%, passant de 3,8% à 4,1% entre 2001 à 2010, alors qu’il devra baisser au
rythme de 1,2 % de 2010 à 2015 pour atteindre la cible de 3,1 % ;
- trente (30) enfants sur cent (100) en âge de scolarité ne vont pas à l’école, et
55,5% d’écoliers n’achèvent pas la cinquième année primaire, malgré la gratuité
de l’enseignement primaire consacrée par la Constitution.
57
Tableau 5 : Evolution des quelques indicateurs des objectifs du millénaire pour le développement
humain en République Démocratique du Congo.
Objectifs
2001
Indicateurs
2010
Cible
Ecart(1)
(en 2015)
Objectif 1 :
Réduction de
l’extrême pauvreté
et de la faim
Objectif 2 : Assurer
l’éducation primaire
pour tous
Objectif 3 :
Promouvoir l’égalité
des sexes et
l’autonomisation
des femmes
Objectif 4 : Réduire
la mortalité infantile
Objectif 5 :
Combattre le
VIH/sida, le
paludisme et autres
maladies
Objectif 7 : Assurer
un environnement
durable
Proportion de la population
disposant de moins d’un dollar
71,3(*)
par jour en parité du pouvoir
d’achat
70(**)
40
-30
Taux net de scolarisation au
primaire
51,7
75
100
-25
Taux d’alphabétisation
hommes
des
81,2
85,8(**)
100
-14,2
Rapport filles/garçons
l’enseignement primaire
dans
0,87
0,93
1
-0,7
Rapport filles/garçons dans
l’enseignement secondaire
0,62
0,81
1
-0,19
Taux de
juvénile
213
158
60
-98
22,8
48
90
-42
Taux de prévalence du sida
3,8
4,3
3,1
-1,2
Pourcentage des enfants de
moins de 5 ans qui dorment
sous
des
moustiquaires
imprégnées d’insecticides
0,7
3,4(**)
15
- 11,6
Proportion de la population
ayant accès de façon durable
à une source d’eau meilleure
46
47
71
-24
Proportion de la population
ayant accès à un meilleur
système d’assainissement
27,2
17,6(**)
55
-37,4
mortalité
infanto-
Proportion des enfants (12 à
23 mois ayant reçu tous les
vaccins)
Source : Nos calculs sur base du Rapport pays RDC 2010.
(*) : Niveau de 2005 et (**) : niveau de 2007
58
La lecture de ce tableau révèle un constat majeur : tous les objectifs sont en
déficit par rapport à leur cible à atteindre en 2015. D’ailleurs, nombre d’entre eux ne
seraient pas atteints avant plusieurs années. Et la situation ne s’est pas améliorée,
étant donné qu’en 2013 la RD Congo occupe la dernière place du classement
d’indices du développement humain, la place qu’elle occupait déjà en 2012. C’est le
drame congolais : le pays stagne dans la pauvreté.
Plusieurs facteurs expliquent cette contreperformance : d’une part, la
récession économique et la désarticulation du tissu social enregistré depuis
l’indépendance ne pouvaient être résorbées par la croissance enregistrée des dix
dernières années, et d’autre part le déficit institutionnel en matière de
programmation, de suivi et d’évaluation explique le faible taux d’absorption des
financements extérieurs et la faiblesse des ressources publiques internes. En effet,
en dépit de l’augmentation sensible des recettes publiques, celles-ci se sont avérées
insuffisantes et mal utilisées pour améliorer le vécu quotidien de la population. Mais
il y a lieu aussi de s’interroger sur l’efficacité de la mobilisation des recettes
courantes.
III.2. L’EVALUATION DE LA MOBILISATION DES RECETTES COURANTES.
Pour apprécier l’efficacité de la mobilisation des recettes courantes, ce travail
fait le choix de les comparer aux prévisions budgétaires et au potentiel fiscal du pays.
III.2.1. Des contreperformances par rapport aux prévisions budgétaires.
Les recettes courantes, comme l’indique le graphique n° 2 ci-dessous, ont
connu une trajectoire ascendante de 2001 à 2012. L’accroissement des recettes
observé durant toute cette période est tributaire de la croissance économique, de
l’unification du pays après les quatre années de guerre civile, des réformes en
matière de finances publiques et de l’effort des services mobilisateurs des recettes.
59
Graphique n° 4. Recettes courantes de l’Etat (en milliards de CDF courants)
4000
3500
3000
2500
2000
Recettes internes
1500
1000
500
0
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Source : Nos calculs sur base des statistiques des services mobilisateurs des recettes
Les recettes mobilisées par la Direction Générale des Douanes et Accises
(DGDA) sont passées de 31,20 milliards CDF à 1.326,86 milliards CDF soit une
augmentation annuelle moyenne de 41,12%. Par contre l’accroissement annuel
moyen des recettes réalisées par la Direction Générale des Impôts (DGI) se situe à
45,15% passant de 23,42 milliards CDF en 2001 à 282,65 milliards CDF en 2012.
Bien que les recettes encadrées par la DGRAD ont connu une augmentation
annuelle moyenne de 66,83% durant toute la période, la courbe des recettes était
décroissante en 2004, 2007 et en 2011 avec respectivement des taux négatifs de
-14,32%, -50,12% et -3,33%. Les recettes encadrées par la DGRAD sont passées de
5,79 milliards CDF en 2001 à 485,85 milliards CDF en 2012.
L’analyse serait biaisée s’elle se limite à ces résultats, quoique spectaculaires,
car les recettes publiques sont autorisées dans le cadre de Loi des finances, qui
autorise les recettes minima à mobiliser durant l’exercice budgétaire. Ainsi, leur
confrontation avec les prévisions budgétaires parait un meilleur indicateur de
performance.
60
Tableau 6 : L’évolution des recettes réalisées par rapport aux prévisions budgétaires
(en milliards CDF courants)
DGDA
Année
Prévisions Réalisations
DGI
DGRAD
Tx Réal
Prévisions
Réalisations
Tx Réal
Prévisions Réalisation
Tx de
Réal
2002
60,55
54,62
90,21%
45,22
40,44
89,43%
15,73
11,05 70,25%
2003
87,36
72,80
83,33%
65,40
62,84
96,09%
39,09
32,83 83,99%
2004
108,60
104,03
95,79%
77,76
87,66 112,73%
25,34
18,51 73,05%
2005
139,66
145,36 104,08%
90,38
112,14 124,08%
44,85
66,05 147,27%
2006
169,75
195,47 115,15%
141,00
216,37 153,45%
60,88
122,64 201,45%
2007
273,70
278,05 101,59%
250,36
184,90
73,85%
195,96
158,46 80,86%
2008
406,40
340,46
83,77%
346,70
431,23 124,38%
153,43
118,81 77,44%
2009
588,50
551,89
93,78%
636,83
564,30
88,61%
255,56
176,40 69,02%
2010
928,50
754,52
81,26%
908,50
778,10
85,65%
481,76
369,40 76,68%
2011
1 087,20
1 001,22
92,09%
1 253,27
893,30
71,28%
726,03
352,50 48,55%
2012
1 500,00
1 326,86
88,46%
1 427,84
1 235,70
86,54%
747,80
431,10 57,65%
5 243,26
5 350,22
4 825,28 90,19%
4 606,98
Source : Les statistiques de la DGDA, DGI et de la DGRAD.
87,86%
2 746,43
1 857,75 67,64%
Ainsi, l’analyse du tableau n°5 laisse apparaître une autre réalité : les recettes
réalisées sont inférieures aux prévisions budgétaires de la période. Le taux global de
réalisation a été de 84,63%, car les recettes réalisées sont de l’ordre de 11.290,01
milliards CDF contre les prévisions de 13.339,91 milliards CDF.
Comment alors expliquer ce décalage ?
De deux choses l’une : soit les services mobilisateurs des recettes ont
enregistré des contreperformances, soit
alors les prévisions budgétaires ont été
surestimées par rapport au potentiel fiscal du pays.
III.2.2. Une faible mobilisation des recettes par rapport au potentiel fiscal.
L’écart négatif des recettes réalisées sur les prévisions budgétaires incite à
explorer l’hypothèse d’une exagération des prévisions budgétaires. En effet, depuis
2008, le Parlement, en tant qu’autorité budgétaire, ajoute les « recettes
additionnelles » sur les prévisions élaborées par le Gouvernement. La Loi des
finances 2008 a été votée avec des recettes additionnelles de l’ordre de 111,9
61
milliards CDF102. Tel est également le cas de la Loi des finances 2011 qui a voté la
somme de 726,03 milliards au titre des recettes non fiscales, alors que le projet du
budget 2011 élaboré par le Gouvernement les évaluait à 438,41 milliards CDF. Le
verdict a été sans appel à la clôture de l’exercice budgétaire : seulement 352,50
milliards CDF ont été mobilisés, soit un taux de réalisation de 48,55%.
Il apparait alors facile d’affirmer que le Parlement opère les ajustements sans
une maitrise factuelle des contraintes liées à la mobilisation des recettes. Cela est
d’autant plus plausible pour le cas illustré, étant donné que les recettes
additionnelles
du
Parlement
reposaient
sur
la
vente
des
licences
de
télécommunications103 alors que le pays était confronté au problème d’indisponibilité
des fréquences depuis l’année 2009. Il s’agit là donc de l’un des cas qui démontrent
l’insécurité des prévisions budgétaires et économiques.
Par ailleurs, conclure l’analyse uniquement à la surévaluation des prévisions
budgétaires serait simpliste puisque la question mérite d’être approfondie sur l’angle
de l’effort fiscal, considéré comme l’écart entre les ressources publiques et le
potentiel fiscal104.
Dans une étude présentée lors des « Assises nationales sur le coulage des
recettes », Kabuya Kalala a évalué le potentiel fiscal de la RD Congo. En effet, après
avoir réévalué le PIB selon le Système de Comptabilité National SCN-93105 d’une
part, et d’autre part par une approche économétrique basée sur les données
annuelles de 1980 à 2012, de plusieurs variables structurelles (le degré d’ouverture
102
Tableau d’évolution des recettes 2008 du Gouvernement à la Commission paritaire, (Ministère du
Budget RDC), décembre 2007.
103
Rapport de la Sous-commission des recettes sur le projet de budget 2011. La Commission
Economie et Finances. Assemblée Nationale – RDC. Novembre 2011.
104
Le potentiel fiscal est la mesure de la compatibilité de la politique économique avec la capacité
contributive du pays. Lorsque les recettes publiques sont supérieures au potentiel fiscal, cela
traduit un effort fiscal positif ; au contraire, c’est un effort fiscal négatif.
105
Kabuya Kalala est professeur ordinaire à l’université de Kinshasa et directeur de cabinet du
Ministre des Finances depuis 2011. Dans cette étude, il estimait que le calcul du potentiel fiscal
sur le Système de Comptabilité Nationale SCN-68, précédemment utilisé, était biaisé « parce que
ce système n’intercepte pas le secteur informel dont le poids est de 55,3% en moyenne dans
l’assemblée des activités productives ».
62
économique, la part des exportations minières et pétrolières dans le total des
exportations des biens, le PIB par tête d’habitant et de la part de valeur ajoutée de
l’agriculture dans le PIB), il détermine le potentiel fiscal et par conséquent l’effort
fiscal de la manière suivante :
Tableau n° 7 : Evolution du potentiel fiscal et de l’effort fiscal
(en milliards de CDF)
Année
PIB
courant
SCN68
PIB
courant
SCN93
(en % du PIB SCN93)
Recettes
internes
Potentiel
fiscal
SCN93
Effort
fiscal
SCN93
Recettes
internes
Potentiel
fiscal
Effort
fiscal
2001
290,8
2 231 ,4
66,6
110,7
-44,0
3,0
4,96
-2,0
2002
300,9
3 025 ,9
139,2
152,0
-12,8
4,6
5,02
-0,4
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
318,3
339,5
366,0
386,4
410,6
435,8
447,9
3 623 ,3
4 113 ,6
5 670 ,1
6 694 ,8
8 456 ,1
10 691 ,4
14 740 ,3
173,0
217,3
319,9
503,9
869,0
1 212,0
1 419,0
276,0
384,1
563,2
747,2
1 348,7
1 828,4
2 320,6
4,8
5,3
5,6
7,5
10,3
11,3
9,6
7,62
9,34
9,93
11,16
15,95
17,10
15,74
-2,8
-4,1
-4,3
-3,6
-5,7
-5,8
-6,1
2010
480,0
19 512 ,9
2 666,7
3 936,8
13,7
20,18
-6,5
2011
513,1
24 103 ,4
2 755,3
5 223,1
11,4
21,67
-10 ,2
2012
549,9
28 234 ,3
3 608,5
5 904,6
-103,0
-166,8
-243,3
-243,3
-479,7
-616,4
-901,6
-1
270,1
-2
467,7
-2
296,1
12 ,8
20,91
-8,1
Source : Kabuya Kalala, évolution des recettes depuis 2001, Assises nationales sur le coulage des
recettes, Kinshasa, 2 au 4 mai 2013, (inédit).
Il ressort de ce tableau que l’effort fiscal a été négatif de 2001 à 2012
malgré la trajectoire ascendante des recettes courantes. Le niveau le plus bas a
été atteint en 2011 avec un effort fiscal négatif de – 10,2%, entraînant un manque à
gagner de l’ordre de 2.467,7 milliards CDF. Ce tableau prouve tout d’abord que les
prévisions budgétaires ne sont pas surestimées, de même qu’ensuite, il interroge la
capacité nationale à mobiliser les recettes publiques tout en expliquant en partie le
faible impact des recettes courantes sur le développement.
63
III.3. RECOMMANDATIONS POUR LA MAXIMISATION DES RECETTES
PUBLIQUES.
La faible mobilisation des recettes constatée n’est pas une fatalité, elle est
susceptible d’améliorations. Pour y parvenir, la recommandation générale est le
renforcement de la gouvernance. En effet, comme affirmait le premier ministre
Matata, « la pauvreté de ce pays, pourtant doté d’énormes ressources potentielles,
est largement due à la mauvaise gouvernance»106. Selon l’indice de la perception de
la corruption publié par Transparency International en 2013, la RDC est perçue
comme un pays fortement corrompu et occupe la 154ème place sur 177 pays. La RDC
est depuis le 17 avril 2013 suspendue de l’Initiative pour la Transparence des
Industries Extractives107 suite à des rapports non fiables et non exhaustifs. Par
ailleurs, l’organisation non gouvernementale « Global Witness » dénonçait la
mauvaise gouvernance dans le secteur forestier : « en 2012, seuls 10% des recettes
que la redevance de superficie (forestière) aurait dû générer se sont retrouvés dans
les caisses du trésor »108.
Cette recommandation s’adresse principalement aux plus hautes autorités qui
dirigent les institutions du pays. Concrètement, Elle se traduit par l’abandon des
pratiques qui entrainent des manques à gagner, surtout dans les secteurs des
ressources rares. Tel est le cas du secteur minier, dont plusieurs études démontrent
que « les rentrées de recettes, avec la meilleure gouvernance, pourraient tripler »109.
D’autres recommandations visent l’amélioration de la législation et le pilotage des
services mobilisateurs des recettes.
106
Allocution du Premier ministre Matata Ponyo au congrès international sur la gestion des ressources
naturelles co-organisé en 2012 avec le FMI, cité par Stefaan MARYSSE et Claudine TSHIMANGA,
La renaissance spectaculaire du secteur minier en RDC : où va la rente minière ? dans
Conjonctures congolaises 2012. Politique, secteur minier et gestion des ressources naturelles en
RD Congo, Cahiers africains n° 82, 2013, p.23 (pp 11-46)
107
ITIE est une norme internationale pour la transparence au niveau de la gestion des revenus issus des
ressources naturelles. Les gouvernements publient les montants qu’ils perçoivent des entreprises
extractives implantées dans le pays, et ces entreprises publient ce qu’elles paient.
(http://eiti.org/fr/faq#WhatEITI)
108
GLOBAL WITNESS, Les forêts de la RDC victimes d’une grande braderie, octobre 2013, p.3
109
MARYSSE.S et TSHIMANGA. C., La renaissance spectaculaire du secteur minier en RDC : où va
la rente minière ? dans Conjonctures congolaises 2012.
Politique, secteur minier et gestion des ressources naturelles en
RD Congo, Cahiers africains n° 82, 2013, p.40 (pp 11-46)
64
III.3.1. Recourir à la procédure d’appel d’offres dans la vente des ressources
rares.
En dépit de l’installation des institutions démocratiques issues des élections
de 2006, les prescrits de la commande publique ne sont pas encore d’usage en RD
Congo, en l’occurrence lorsqu’il s’agit de la vente des blocs pétroliers ou des
fréquences des télécommunications.
En effet, la RD Congo a attribué à plusieurs sociétés des blocs pétroliers de
bassin de la cuvette centrale et graben Albertine110 de la branche Ouest du Rift Est
africain : les blocs 1 et 2 du graben Albertine ont été attribués à Caprikat et
Foxwehelp, deux sociétés immatriculées aux Iles vierges, le bloc 3 a été attribué à
South Africa Congo OIL (Sacoil). Pour la cuvette centrale, les blocs 1,2 et 3 ont été
attribués à la Compagnie Minière Congolaise (COMICO), les blocs 7 et 9 à la firme
britannique Soco oil et le bloc 8 au sud africain Divine Inspiration Group111.
Aucun de ces blocs pétroliers n’a été attribué par appel d’offres, entrainant
d’importants manques à gagner au profit du Trésor public. Aucun des majors du
secteur pétrolier ne figure parmi des bénéficiaires de ces blocs pétroliers, alors que
leur présence par appel d’offres aurait apporté des propositions financières
préférentielles que les 2 millions USD payés par certaines sociétés au titre de bonus
de signature lors de l’attribution des blocs.
La même défaillance à la législation sur les marchés publics a été constatée
dans le secteur des télécommunications : aucune licence d’exploitation de la
téléphonie mobile n’a été attribuée par la procédure d’appels d’offres112. Qui pis est,
110
Le bassin de la cuvette centrale couvre une superficie de 800.000 km qui s’étend de la province
du Bandundu jusqu’à la Province Orientale, tandis que le bassin de la Branche Ouest du Rift Est
2
Africain s’étend sur 50 km le long de la frontière Est de la RD Congo et comprend les grabens
Albertine, Tanganyika, de l’Upemba, de Bangwelo et du lac Moero.
2
111
François MISSER, Enjeux et défis d’une province pétrolière en devenir, dans Conjonctures
congolaises 2012. Politique, secteur minier et gestion des ressources
naturelles en RD Congo, Cahiers africains n° 82, 2013, pp 153-158. (pp 147177).
112
Le non respect de la procédure d’obtention de licence est l’argument principal de l’Autorité de
Régulation des Postes et Télécommunications au Congo (ARPTC) dans l’affaire qui l’oppose au
Tribunal de commerce de Kinshasa à la société Nederland British Compagny. Cette dernière
prétend détenir le monopole de la licence 3G depuis 2004 alors que pour l’ARPTC, Nederland
65
les sociétés YOZMA, SEMATEL, INGWETELE et EPHRATA ont obtenus des
licences d’exploitation sans paiement préalables des droits dus au Trésor public.
III.3.2. Fusionner les services mobilisateurs des recettes
La pluralité des services mobilisateurs des recettes est l’un des facteurs qui
ternit l’image de la fiscalité congolaise. Après une décennie des réformes sur la
législation, l’heure est venue de réformer l’architecture administrative de la
fiscalité congolaise. Cette réforme devra conduire
à terme à deux
administrations fiscales : l’administration des Douanes et celle des Impôts et
taxes. Ainsi, notre recommandation consiste à fédérer l’administration des impôts
avec toutes les administrations chargées des prélèvements non fiscaux. Elle
s’articule en trois étapes suivantes:
III.3.2.1. Fusionner la Direction Générale des impôts et la Direction Générale des
Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations.
Cette étape est la première, sa mise en œuvre s’avère immédiate parce
qu’elle est techniquement plus facile à réaliser. D’abord ces deux services relèvent
du même ministère. Ensuite, ces deux services sont dans une dynamique de
concertation depuis août 2010 à travers les « Concertations des régies financières »,
qui réunissent chaque mois les trois services mobilisateurs des recettes en vue de
mutualiser les pratiques tant sur des questions techniques que sur la gestion du
personnel. Enfin, Une commission indépendante avait été créée quant à ce en
janvier 2010. Il ne reste qu’à adopter son rapport rendu depuis février 2011, avant de
le soumettre à l’approbation du Gouvernement.
British Compagny n’est pas un exploitant de la téléphonie en RDC et que sa licence est irrégulière
puisque obtenue sans respect de la procédure édictée par la loi-cadre de 2002 sur les
er
télécommunications en RDC qui prévoit le recours à l’appel d’offres. (Radio okapi du 1 mars 2014
(http://radiookapi.net/actualite/2014/03/01/la-rdc-risque-detre-privee-de-la-technologie-3g/),
consulté le 15 mars 2014.
66
III.3.2.2. Intégrer au sein de l’administration fiscale unifiée les services des ministères
chargés de l’établissement de l’assiette et de la taxation des prélèvements
non fiscaux.
Cette proposition se veut une solution à la dualité dans la gestion les
prélèvements non fiscaux. Elle consistera à sectionner chacun des services chargés
de la taxation des prélèvements non fiscaux au sein des ministères et de les
transférer au sein de l’administration fiscale. Son lancement devra intervenir à moyen
terme, après la réalisation de ces deux préalables : réussir la fusion de la DGRADDGI ainsi que réduire le nombre des prélèvements fiscaux.
Aussi, outre le fait que tout changement enregistre les résistances, la plus
grande résistance viendra des hauts cadres des ministères qui tirent une grande
partie de leurs revenus du système de rétrocession. Il est judicieux qu’une telle
réforme soit pilotée par le Chef du Gouvernement.
III.3.2.3. Fusionner l’administration fiscale unifiée les services provinciaux de
mobilisateurs des recettes.
Politiquement difficile à réaliser puisque cette option devrait requérir
l’approbation de tous les Gouverneurs de provinces. Ainsi, cette démarche devrait
préalablement être discutée au sein de la Conférence des Gouverneurs province113
et devrait à cet effet être soutenue par le Président de la République qui préside
ladite Conférence. Sa mise en œuvre est à prévoir à long terme, dix ans après le
déclenchement de la fusion DGI-DGRAD.
III.3.3. Renégocier à la hausse les financements climatiques
La RD Congo regorge 60% du bassin forestier du Congo qui couvre plus de
2 millions de km2 et qui s’étend sur six pays (Cameroun, République Centrafricaine,
Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée Equatoriale). C’est la deuxième réserve forestière
mondiale, après la forêt d’Amazonie.
113
La Conférence des Gouverneurs de province est une instance créée par la Constitution en vue
d’une part de servir de conseil aux deux échelons de l’Etat (Pouvoir central et provinces) et d’autre
part pour assurer une bonne harmonie entre les provinces elles-mêmes. Présidée par le Président
de la République, elle a pour mission d’émettre des avis et formuler des suggestions sur la
politique à mener et sur la législation à édicter par la République.
67
Bien qu’il est difficile de quantifier de manière certaine le montant des droits
revenant à chaque pays du bassin du Congo, il est certain de constater que la RD
Congo ne reçoit pas une part juste et équitable des financements climatiques. En
effet, tous les autres pays du bassin du Congo reçoivent environ 100 à 200 millions
USD pour protéger leurs forêts, alors que la Tanzanie reçoit 100 millions USD, la
Guyane avec sa petite superficie reçoit 250 millions USD, l’Indonésie et le Brésil
reçoivent 1 milliards à chacun114.
Face à ce manque à gagner évident, la RD Congo doit renégocier ces accords
de financement. Elle devra aussi transformer ce financement, recueilli comme
ressources extérieures, en une recette courante à insérer dans la nomenclature des
actes générateurs des recettes du Pouvoir Central. Cette insertion aura l’avantage
d’attirer
l’attention
de
l’autorité
budgétaire
et
l’encadrement
des
services
mobilisateurs des recettes.
III.3.4. Investir dans les infrastructures de contrôle.
La RD Congo ne maitrise pas le flux d’appels internationaux entrants sur
lesquels sont prélevées la taxe de régulation et la TVA. Selon le Ministre des Postes
et Télécommunications, le manque à gagner est estimé à « 12 millions USD par mois
car les exploitants de la téléphonie mobile ne déclarent recevoir que 20 millions
d’appels internationaux alors que le Centre d’observation d’Angleterre affirme que la
RD Congo reçoit 120 millions d’appels »115.
En effet, le Gouvernement congolais ne possède pas d’infrastructures pour
attester la sincérité des déclarations des exploitants de la téléphonie mobile et pour
bloquer
la
piraterie
téléphonique
opérée
moyennant
des
« Sim-box ».
L’investissement pour acquérir un Switch est indispensable pour maximiser les
recettes des flux internationaux entrants et les droits d’interconnexion à l’intérieur de
l’espace national, assujettis également à la taxe de régulation et à la TVA.
114
Propos recueillis auprès de Tosi MPANU MPANU, président honoraire du Groupe des
négociateurs africains au sein de la Convention Climat de l’ONU (2010-2012) et Membre du
Conseil d’Administration du Fonds Vert pour le Climat.
115
Déclaration retransmise par la radio okapi en date du 12 novembre 2012.
(http://radiookapi.net/actualite/2012/11/12/rdc-letat-perd-12-millions-usd-par-mois-suite-au-piratagetelephonique/)
68
III.3.5. Réviser le code minier pour en retirer les clauses fiscales.
La révision du code minier permettra non seulement de réviser à la hausse les
taux des droits superficiaires par carré et la redevance minière, mais aussi d’aligner
plusieurs impôts sur le régime de droit commun :
-
l’impôt sur les bénéfices et profits passerait ainsi à 35% du régime du droit
commun contre les 30% actuellement prévu dans le code minier ;
-
le taux de l’impôt exceptionnel sur les rémunérations versées au personnel
expatrié pourrait s’élever alors à 22% contre les 10% fixés par le Code minier;
-
le taux de l’impôt mobilier fixé à 10 % sur les dividendes et autres distributions
versés par le titulaire d’un droit minier à ses actionnaires actuellement sera perçu
au taux de 20% conformément au droit commun.
III.3.6. Canaliser vers le Trésor Public les dividendes perçus par la Gécamines
au titre d’actionnaire dans divers joint-ventures.
Après l’effondrement de la Gécamines en 1988, celle-ci a redéfini son rôle en
se transformant en début des années 2000 à un courtier de ses droits miniers et en
signant trente-cinq contrats de partenariats d’exploitations de ses concessions
minières,
en
contrepartie
d’un
pourcentage
d’actions
dans
les
nouvelles
116
entreprises
. Entreprise publique privatisée puis restructurée en Sarl dans laquelle
l’Etat congolais est l’unique actionnaire, la Gécamines perçoit des dividendes de ces
joint-ventures, dont certains n’ont aucune traçabilité au niveau du Trésor public. La
transparence de cette rente et sa traçabilité permettront à la RDC de reprendre son
siège au Conseil d’administration de l’Initiative pour la Transparence des Industries
Extractives (ITIE) après sa suspension prononcée en mars 2013.
III.3.7. Rétablir l’autorité de l’Etat dans le secteur d’exploitation artisanale des
minerais
Le secteur minier en RD Congo présente deux facettes : l’exploitation
industrielle et l’exploitation artisanale. Au-delà de la compétition existante entre ces
116
MARYSSE.S., et TSHIMANGA, C., Op.cit, p.24
69
deux exploitations, le code minier prévoit leur cohabitation en formalisant l’activité
artisanale par l’achat des cartes des creuseurs. En effet, si l’artisanat minier a
l’avantage de consommer une grande main-d’œuvre, son plus grand reproche est sa
faible capacité contributrice au Trésor public. Plusieurs enquêtes témoignent que son
fonctionnement actuel est infiltré par les « organisations parallèles qui permettent
l’enrichissement d’individus censés représenter l’Etat, continuent de fonctionner en
dehors du cadre légal et convertissent les mines artisanales du pays en ‘ zones de
non-droit’ »117.
Le rétablissement de l’autorité de l’Etat dans les provinces du Kivu et Katanga
permettra de casser le manque à gagner occasionné non seulement par ces
pratiques, mais aussi à bloquer le trafic illégal des quantités des minerais acheminés
vers les pays frontaliers (Rwanda, Ouganda et Zambie) sans paiement des droits dus
au Trésor public.
III.3.8. Réduire le nombre des prélèvements non fiscaux
Il est possible d’agréger les 364 actes générateurs des recettes du Pouvoir
central en moins une centaine. Il s’agira en clair d’instaurer la gratuité du service
public pour des actes ayant les caractéristiques suivants :
- les prélèvements dont la collecte et la gestion en imprimés de valeur coûtent plus
cher que le prix payé (tous les prélèvements taxés à moins de 20.000 CDF soit
moins de 20 euros) ;
- les prélèvements relatifs à l’innovation et la recherche (permis de recherche dans
le domaine scientifique, carte de chercheur indépendant, agrément des bureaux
d’études en matière des travaux publics et d’infrastructures,…) ;
- beaucoup d’enregistrements et de renouvellements d’enregistrements,…
Pour ce faire, un travail existe déjà et n’attend que sa mise en application. Il a
été réalisé lors de l’Atelier sur le renforcement de la mobilisation des recettes fiscales
organisé en juin 2012. Les participants ont proposé des mesures pour agréger en un
seul acte ou deux, la multitude des prélèvements non fiscaux sans rendement.
117
Marie MAZALTO, la réforme du secteur minier en République Démocratique du Congo : enjeux de
la Gouvernance et perspectives de reconstruction, dans Afrique contemporaine,
2008/3 n°227, p 68
70
Quant aux prélèvements non fiscaux relevant de la compétence des
provinces, leur réduction devra s’enclencher à moyen terme, après le retour
d’expérience de l’opération sur les prélèvements non fiscaux du Pouvoir central. Sa
mise en œuvre exigera certainement un consensus national.
III.3.9. Réformer le système de rémunération et lutter contre l’impunité
Trois raisons principales conduisent à recommander la suppression du
système de rémunération axée sur la rétrocession. D’abord, la rétrocession est
fluctuante et donc ne sécurise pas le personnel dans la planification. Ensuite, parce
qu’elle n’est qu’une prime, et en tant que telle, elle n’est pas indexée dans le calcul
de la rente payée aux retraités. Enfin, elle attire la convoitise des autres
fonctionnaires et agents de l’Etat.
En substitution, le système de barème unique, incluant dans le fait le montant
actuel du salaire de base et le montant moyen de la prime de rétrocession, parait le
mieux indiqué puisqu’il ne modifierait pas l’enveloppe globale dédiée à la paie du
personnel des services mobilisateurs des recettes. Aussi, une telle démarche ne doit
pas être catégorielle, elle doit s’inscrire dans la politique générale du Gouvernement,
définie dans l’agenda 2010-2012, visant à « harmoniser les divers systèmes de
gestion de la paie des fonctionnaires, notamment par la révision de la structure des
barèmes applicables à ces systèmes »118.
Tous les observateurs s’accordent sur le fait que la corruption rime avec
l’impunité dans les services mobilisateurs des recettes. Certes, une soixantaine des
cadres et agents des services mobilisateurs des recettes ont été révoqués en janvier
et mars 2010 respectivement par ordonnances présidentielles et arrêtés ministériels,
mais cet épisode semble déjà lointain, puisque non systématisé. Pour qu’elle pénètre
le système administratif fiscal congolais, l’Exécutif doit soutenir les actions
répressives engagées par les Directeurs Généraux des services mobilisateurs des
recettes. Ces derniers aussi devront être sanctionnés en cas de mégestion.
118
Mémorandum des politiques économiques et financières 2010-2012. RDC, Kinshasa 15 juin 2010.
71
III.3.10. Informatiser le circuit des recettes
L’informatisation de la chaîne des recettes s’avère urgente pour la
sécurisation des recettes. Sous le pilotage du Ministre des Finances, elle devrait
intégrer les deux approches complémentaires : informatique et le process relatif aux
métiers de base (vérificateurs, ordonnateurs, inspecteurs, receveurs,…). Sa
conception devrait s’inspirer de schémas directeurs existants, s’inscrire dans la
perspective de la fusion de la DGI et de la DGRAD ainsi que formaliser les échanges
des données entre services mobilisateurs des recettes.
Il est préférable de privilégier les impôts et taxes à fort enjeu, avant sa
généralisation à tout le système fiscal. Par contre, le circuit informatique devrait
s’étendre jusqu’au bout du processus de perception des recettes, en intégrant les
banques commerciales chargées de leur perception et la Banque centrale du Congo
qui en assure le nivellement au compte général du Trésor. Toutefois, sa réalisation
pourrait se heurter au manque de financement.
III.3.11. Adopter les modalités de pilotage plus efficace des services
mobilisateurs des recettes.
Les directeurs généraux des services mobilisateurs des recettes pourraient
améliorer leur pilotage en intégrant les outils ci-après : le document d’orientations
stratégiques, le contrôle interne et la démarche qualité.
III.3.10.1. Elaborer un Document d’Orientations Stratégiques, à l’instar de la DGDA
qui en élabore depuis dix ans.
Cette recommandation s’adresse aux directeurs généraux de la DGI et de la
DGRAD. Ce document fixe le cap pour les deux prochaines années, l’évolution des
missions et de l’organisation administrative. Il a aussi pour objectif de rassembler le
personnel autour des grandes thématiques et des valeurs du service.
Il devra déboucher à une conclusion d’un contrat avec le Ministre des
Finances, à l’instar du « pacte de doublement des recettes » conçu pour l’exercice
2010 et signé entre le Ministre des Finances et les directeurs généraux des services
mobilisateurs des recettes.
72
III.3.10.2. Introduire au sein des Inspections Générales des Services l’approche
maitrise des risques dans les opérations d’audit des services.
La nécessité de sécuriser les procédures conduit à recommander aux
directeurs généraux des services mobilisateurs des recettes d’introduire au sein des
Inspections Générales des Services l’approche maitrise des risques dans les
opérations d’audit des services. Une telle démarche vise à identifier les risques de
fonctionnement des services tant pour la mobilisation des recettes que pour
l’organisation administrative, à les hiérarchiser selon leur impact et probabilité de
survenance pour proposer les mesures d’amélioration.
III.3.10.3. Instituer la démarche qualité au sein des services mobilisateurs des
recettes
La démarche qualité est processus d’amélioration continue des services et
prestations rendus. En effet, la maximisation des recettes passe aussi par
l’amélioration de l’image reflétée par les services mobilisateurs des recettes. Les
directeurs généraux devraient s’engager sur certains aspects de la relation entre
l’administration et contribuable ou assujetti.
Cette démarche devra être formalisée dans un « référentiel qualité de
service » contenant des engagements et des indicateurs d’évaluation. Dans sa
phase expérimentale, ce référentiel pourrait contenir les mesures d’amélioration de
l’accueil (physique, téléphonique et courriel), de délai de réponse des courriers, ou
de publication des informations sur le site internet,… Il pourra englober dans la suite
le délai de dédouanement des marchandises, la diffusion de la meilleure information
sur les avantages fiscaux et les procédures ou encore la diffusion des prix réels des
taxes.
Cette liste des recommandations n’est pas exhaustive, au regard de l’ampleur
de la fragilité du pays et de la vulnérabilité de ses citoyens. Certes, leur mise en
œuvre se heurtera aux pratiques de prédation qui gangrènent le pays depuis
l’époque du Président Mobutu, mais elle parviendra à terme à modifier le modèle de
gestion. Car, comme l’affirme Pierre JACQUEMOT, le temps « de la reconstruction
73
de l’Etat est peut-être arrivé en RD Congo (…). La classe politico-économique n’a
plus guère d’autres choix »119.
119
JACQUEMOT, P., La résistance à la « bonne gouvernance » dans un Etat africain. Réflexions
autour du cas congolais (RDC) dans Revue Tiers Monde 2010/4 n°204,p. 144
(pages 129 à 146)
74
CONCLUSION
Ce travail intitulé « Crises économiques et politiques et mobilisation des
recettes publiques en RD Congo », avait pour but d’évaluer, à travers le budget de
l’Etat et le potentiel fiscal, l’effort de mobilisation des recettes de l’Etat de 2001 à
2012.
Cette étude se justifie pour plusieurs raisons :
- d’abord la RD Congo est un « pays fragile et post-conflit », résultant de cinquante
ans de dictature et de guerres civiles, et dont les dirigeants tentent de rétablir
l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire national en dépit d’une légitimité
constitutionnelle acquise depuis 2006. L’exercice d’une telle mission requiert
d’importants moyens d’actions financiers pourvus par les recettes publiques ;
- ensuite la RD Congo est un pays pauvre, consécutivement à quatre décennies de
récession et de prédation. Les efforts de stabilisation du cadre macroéconomique
entamée depuis 2001 ne parviennent pas toujours à endiguer la pauvreté qui est
devenue un problème de masse. L’enjeu actuel est de transposer la croissance en
bien-être des citoyens, à travers notamment une collecte suffisante des recettes
publiques et leur meilleure distribution ;
- enfin la RD Congo est un pays doté d’énormes ressources potentielles. Sa
position géostratégique explique sa survie malgré les successives guerres civiles
qu’elle a connues. En effet, la Communauté Internationale n’a pas ménagé les
efforts pour éviter sa balkanisation et sa transformation en îlots de non-droits, et
par ricochet pour ne pas compromettre l’accès à ses matières premières
devenues des biens mondiaux de plus haute importante. Dans ce contexte,
l’équation congolaise consiste à éviter le paradoxe de « la malédiction des
ressources naturelles »120 en faisant
profiter ses ressources géologique à la
population, c’est-à-dire de passer du cercle vicieux de la pauvreté et de la fragilité
à un Etat stable et en voie de développement. Pour y parvenir, il faudrait, entre
120
Concept évoqué dans l’article précité de Stefaan MARYSSE et Claudine TSHIMANGA, qui se
réfèrent aux études de Ross 1999, Sachs & Warner 2001, Brunnschweiler 2008 et Auty 2010 qui
répondent à la question suivante « Pourquoi certains pays, royalement dotés en ressources
naturelles, n’arrivent-ils pas à faire bénéficier leur population de cette richesse ».
75
autres, réussir à mobiliser suffisamment les recettes publiques générées par les
industries extractives et les investir pour les biens sociaux de base.
Ce travail a donc tenté d’approfondir la mobilisation des recettes publiques, en
apportant des réponses aux questions suivantes : Comment fonctionne le système
fiscal congolais et comment se structure son architecture administrative ? Quel a été
le comportement des recettes publiques durant la période 2001 à 2012 ?
Répondre à ces questions recentre l’analyse sur le rôle de l’Etat en tant que
collecteur d’impôts, notamment ceux collectés sur les ressources naturelles. Cela
oblige également d’étudier le fonctionnement du système des prélèvements publics
en tant qu’un des moyens d’actions financiers de l’Etat pour exercer ses missions
tant régaliennes qu’interventionnistes. Ce qui laisse apparaitre l’interaction entre la
perception des recettes publiques et l’intervention pour le développement. Par
conséquent, le questionnement permanent de ce travail est axé sur, d’une part,
l’efficacité de la collecte des recettes publiques, et d’autre part sur leur incidence sur
quotidien de la population.
Dans le cas de la RD Congo, le présent travail soutient le rôle des recettes
publiques, si elles ont bien redistribuées à travers le Budget de l’Etat, non seulement
pour refonder un Etat en pleine déliquescence mais aussi pour soulager la misère de
la population pour la mise en œuvre d’une administration de qualité et des
infrastructures vitaux de base. Dans un contexte économique international où le pays
n’a pas accès aux marchés des capitaux, ce travail réaffirme le rôle principal des
recettes publiques comme pourvoyeur des moyens d’actions financiers. Il considère
également que les ressources extérieures octroyées par l’aide internationale ne
doivent être que complémentaires, d’autant plus qu’elles sont volatiles et qu’elles
s’amenuisent de plus en plus.
Ainsi, l’hypothèse sur laquelle repose ce travail s’articule comme suit :
l’augmentation substantielle des recettes publiques est possible. Elle est
même obligatoire pour réduire la vulnérabilité des habitants. Ce qui conduit à
postuler la poursuite des réformes, la bonne gestion économique et la
confiance.
76
Dans ce contexte, l’intérêt de cette étude a été de :
- montrer que la situation socio-économique actuelle de la RD Congo remonte d’un
passé marqué l’échec des politiques de développement d’un géant africain aux
potentialités énormes, qui n’a pas pu opérer son décollage économique aux
lendemains de l’indépendance. La dictature et de la prédation des ressources
publiques qui s’en sont suivies ont entrainé le pays à la faillite et aux guerres
civiles ;
- montrer que les réformes économiques entamées depuis 2001 ont permis la
stabilité du cadre macroéconomique ainsi que la relance la croissance, et que le
système fiscal en a été l’une des composantes essentielles ;
- montrer que les ressources publiques ont certes ostensiblement augmenté depuis
2001, mais n’ont pas encore atteint leur niveau maximal ;
- formuler des recommandations pour accroître davantage le niveau des recettes
publiques.
Dès lors, nous pouvons retenir de cette étude ce qui suit :
• Sur le plan théorique :
- Le cadre juridique du système fiscal congolais a subi de profondes améliorations
depuis 2001 : l’institution de la Taxe sur la Valeur Ajoutée en 2012, l’alignement
du barème tarifaire sur celui pratiqué dans la région, la fiscalisation progressive du
secteur informel, la perception des recettes publiques par les banques.
- Il est composé de la fiscalité intérieure, de la fiscalité de porte, des prélèvements
non fiscaux (recettes non fiscales), de la fiscalité locale. S’y ajoute la parafiscalité
dont le produit n’émarge pas du budget de l’Etat.
- La fiscalité locale a connu un nouveau tournant en 2006 avec la Décentralisation
déclenchée par la Constitution du 18 février 2006 qui a octroyé aux Provinces des
compétences exclusives en matière fiscale.
- Les prélèvements non fiscaux contiennent plusieurs actes générateurs des
recettes, répartis à tous les échelons de l’administration : le Pouvoir central, les
Provinces et les Entités Territoriales Décentralisées.
- L’organisation administrative constitue l’un des points de fragilité du système fiscal
congolais. La pluralité des services mobilisateurs des recettes, soit quatorze (14)
au total, en est l’élément démonstrateur.
77
• sur le plan pratique :
- De 2001 à 2012, la mobilisation des recettes publiques connait un accroissement
remarquable : les recettes ont augmenté à une moyenne annuelle de 48,3%
passant respectivement de 64,4 milliards CDF à 3.612,7 milliards CDF. Le taux
des prélèvements rattrape le niveau des autres pays de la région, car il a atteint
20,9% du PIB en 2012 alors qu’il se situait à 7,1% en 2001.
- Cet accroissement des recettes n’a cependant pas permis de réduire la
vulnérabilité de la population. Seulement 15,48% de ces recettes, soit 1540,9
milliards CDF, a été consacré de 2001 à 2011 aux dépenses d’investissements
censées améliorer les besoins sociaux de base. Et même avec l’injection des
ressources extérieures à la hauteur de 4.611,3 milliards CDF durant cette période,
la RD Congo a pris du retard par rapport à ses cibles à l’horizon 2015 pour ce qui
est des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Le rythme de progression
est très lent et la RD Congo occupe la dernière place au classement d’indice du
développement humain de 2012 et 2013. Ce qui pousse à admettre que
l’augmentation
des
recettes
publiques
contraste
fortement
avec
la
persistance de la pauvreté.
- Par ailleurs, en finançant seulement le tiers des dépenses d’investissements, la
RD Congo a laissé le sort de son développement aux pays donateurs de l’aide et
perd le contrôle de son destin en tant que pays. Il s’agit en fait d’une situation
dramatique d’autant plus que le développement de ce pays au cœur de l’Afrique,
regorgeant d’immenses ressources naturelles et partageant ses frontières avec
neuf autres pays, est considéré comme moteur du développement de l’ensemble
des pays subsahariens.
- Les recettes publiques constituent en principe l’un des leviers du développement.
Mais ce n’est pas encore le cas pour la RD Congo car la mobilisation des recettes
accuse des contreperformances par rapport aux prévisions budgétaires et au
potentiel fiscal. De 2002 à 2012, les recettes publiques n’ont été mobilisées qu’à
84,63% par rapport aux prévisions budgétaires, lesquelles sont des minima à
réaliser, entrainant un manque à gagner de 2.049,9 milliards CDF sur toute la
période. Ce manque à gagner est encore plus important si on se réfère au
potentiel fiscal puisque l’effort fiscal a été négatif de 2001 à
2012. Le point
culminant a été atteint durant l’année 2011, où il a été enregistré un effort fiscal
78
négatif de -10,2% entrainant un manque à gagner de 2.467,7 milliards CDF, soit
un montant supérieur à la somme des manques à gagner constatés de 2001 à
2012 sur les prévisions budgétaires.
Au regard de ce qui précède, il apparait judicieux de :
- améliorer la gouvernance en matière de perception des recettes publiques pour
certainement de tripler les recettes publiques. C’est la recommandation principale
de cette étude. Elle se traduit concrètement par le recours à la procédure de la
commande publique pour attribuer l’exploitation des ressources rares dans les
secteurs de télécommunications, des hydrocarbures et des mines. Elle veut aussi
par la mise en œuvre d’action diplomatique relever les fonds du financement
climatique reçu par la RDC au niveau des autres partenaires comme le Brésil ou
l’Indonésie.
- Investir dans les infrastructures pour informatiser l’ensemble de la chaine des
recettes afin de fluidifier les circuits et réduire les traitements manuels et réduire
tant soit peu la fraude fiscale, notamment par la maitrise de la comptabilité des
interconnexions téléphoniques tant nationales qu’internationales ou la certification
de la qualité des minerais taxés à l’exportation, les guichets uniques dans les
postes frontaliers,…
- Après la réforme du cadre légal de la fiscalité, s’attaquer à la refonte de
l’organisation administrative de la fiscalité congolaise, en privilégiant la cohérence
et l’efficacité sur des choix à opérer. Parmi les hypothèses, il y a celle de fusionner
tous les services mobilisateurs des recettes pour aboutir à une seule
administration fiscale. La formation du personnel, notamment sur les ressources
rares et la réforme du système des rémunérations figureraient aussi parmi les
priorités. Il s’agit donc d’un axe qui mérite attention pour les prochaines années.
79
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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2. BOUVIER Paul, OMASOMBO TSHONDA Jean et OBOTELA RASHIDI Noël, RDC
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3. BRUNQUEL Christian, CHAMBAS Gérard et CORNELY Jean-Paul, La
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80
4. BRUNQUEL Christian, CHAMBAS Gérard, CORNELY Jean-Paul, LIOTET
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6. Gauthier de Villers, la « communauté internationale » dans l’impasse ?
Perspectives critiques, dans Conjonctures congolaises 2012. Politique, secteur
minier et gestion des ressources naturelles en RD Congo, Cahiers africains n° 82,
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7. JACQUEMOT Pierre, La résistance à la « bonne gouvernance » dans un Etat
africain. Réflexions autour du cas congolais (RDC) dans Revue Tiers Monde
2010/4 n°204,p. 144 (pages 129 à 146)
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11. KAWATA BUALAM, L’endettement extérieur du Zaïre, dans Zaïre-Afrique, n°
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13. Louis (Michel), L’appui budgétaire : « Et si on essayait le respect et la
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14. MARYSSE Stefaan et TSHIMANGA Claudine, La renaissance spectaculaire du secteur minier en
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81
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17. MISSER, François Enjeux et défis d’une province pétrolière en devenir, dans Conjonctures
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III. Documents officiels, Rapports et Etudes
III.1. Documents officiels
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2.
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4.
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5.
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6.
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9.
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10. Tableau d’évolution des recettes 2008 du Gouvernement à la Commission
paritaire, décembre 2007 Ministère du Budget RDC,
III.2. Rapports
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3. GLOBAL WITNESS, Les forêts de la RDC victimes d’une grande braderie, octobre 2013.
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Congo: An Ongoing Crisis », 2008.
5. Mission d’observation de l’Union Européenne, Rapport final de la sur les
élections présidentielles et législatives du 28 novembre 2011 en République
Démocratique du Congo.
6. OCDE, Perspectives économiques en 2012. Promouvoir l’emploi des jeunes. 316
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7. OCDE, Perspectives économiques en Afrique 2008. Développement des
compétences techniques et professionnelles. 720 pages.
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2010. 50 pages.
9. Rapport ITIE – RDC 2010. Novembre 2012.
10. Rapport de la revue trimestrielle du programme de relais consolidation (Ministère
des Finances-RDC) décembre 2012, p.4.
11. Rapport Objectifs du Millénaire pour le Développement 2012. Evaluation des
progrès accomplis en Afrique dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour
le développement. (ONU, UA, BAD, PNUD).
83
12. Rapport sur le développement Humain 2013. L’essor du Sud : le progrès humain
dans un monde diversifié. (PNUD), Version française. 2013. 214 pages.
13. Résolution 143 du Conseil de sécurité des Nations Unies du 17 juillet 1960.
14. Résolution 1279 du 30 novembre 1999 du Conseil de sécurité des Nations
Unies.
15. Résolution 2098 du 28 mars 2013 du Conseil de Sécurité des Nations Unies.
III.3. Etudes
1. AUVIGNE François, Diagnostics sur les régies financières en république
démocratique du Congo. Note adressée au Ministre des Finances. Kinshasa,
novembre 2011.
2. Assises nationales sur le coulage des recettes publiques. (Rapport Final). RDCVice Primature, Ministère du Budget et Ministère des Finances, Kinshasa du 2 au
4 mai 2013.
3. Banque Centrale du Congo, Le condensé hebdomadaire d’informations
statistiques de la Banque Centrale du Congo. n° 02/2014 du 10 janvier 2014.
4. KABUYA KALALA, Evolution des recettes depuis 2001, Conférence animée aux
Assises nationales sur les coulages des recettes, Kinshasa, 2 au 4 mai 2013.
5. Ministère du plan, Rapport du le contrat de financement des infrastructures de la
R.D.C. Document présenté au Parlement. Décembre 2008.
6. POINTE Gérard, Approche comparative du système fiscal congolais.
Présentation lors des Assises nationales sur les coulages des recettes
publiques. Kinshasa du 2 au 4 mai 2013.
7. Rapport de la Sous-commission des recettes sur le projet de budget
2011.Commission Economie et Finances. Assemblée Nationale- RDC.
Novembre 2011.
8. SEUNG-HUN Chun (Dr), la relance économique de la RDC. Actes du Séminaire
à l'intention des membres du Gouvernement, à Zongo, 6 août 2012.
9. Statistiques des régies financières (DGDA, DGI et DGRAD).
84
IV. Textes juridiques
1.
Constitution du 18 février 2006
2.
Loi 004 du 21 février 2002 portant code des investissements
3.
Loi n° 007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier et Décret n° 038/2003 du
26 mars 2003 portant règlement minier
Loi 004-2003 du 13 mars 2003 portant réforme des procédures fiscales.
4.
5.
Ordonnance-loi n° 10/001 du 20 aout 2010 portant institution de la taxe sur la
valeur ajoutée telle que modifiée et complétée par l’ordonnance-loi n° 13/007 du
23 février 2013.
6.
L’Ordonnance-loi n° 13/001 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des
impôts, droits, taxes et redevances des Provinces et des Entités Territoriales
Décentralisées ainsi que leurs modalités de répartition
7.
Ordonnance-loi n° 13/002 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des droits,
taxes et redevances du pouvoir central
8.
Décret 0058 du 27 décembre 1995 portant création de la Direction Générale
des Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations.
9.
Décret n° 007/2002 du 02 février 2002 relatif au mode de paiement des dettes
envers l'Etat tel que modifié et complété par le Décret n° 011/20 du 14 avril
2011
10. Décret 017/2003 du 2 mars 2003 portant création de la Direction Générale des
Impôts et Décret 018/2003 du 2 mars 2003 portant règlement d’administration
relatif au personnel de carrière de la Direction Générale des impôts.
11. Décret 09/043 du 03/12/2009 portant création de la Direction Générale des
Douanes et Accises
12. Décret n° 011/32 du 29 juin 2011 du Premier Ministre portant suppression des
perceptions illégales aux frontières.
V. Interviews
1. Tosi MPANU MPANU : président honoraire du Groupe des négociateurs africains
au sein de la Convention Climat de l’ONU (2010-2012) et Membre du Conseil
d’Administration du Fonds Vert pour le Climat.
85
2. Laurent MABIALA UMBA, directeur du recouvrement de la Direction Générale des
Impôts.
3. Fidel RAMAZANI RADJABU, directeur à la direction générale des Douanes et
accises.
4. Ephrem LUTETE, conseiller administratif du ministre des finances (2011-2012).
5. KALAMATA KATAMBWE, chef de bureau chargé des recettes pétrolières à la
Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de
Participations.
86
TABLE DES MATIERES
DEDICACE……………………………………………………………………………………………………………………………………………I
REMERCIEMENTS …………………………………………………………………………………………………………………………….II
SOMMAIRE ……………………………………………………………………………………………………………………………………….III
ACRONYMES …………………………………………………………………………………………………………………………………….IV
RESUME …………………………………………………………………………………………………………………………………………….V
SUMMARY…………………………………………………………………………………………………………………………………………VI
INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 1
1.
CONTEXTE ........................................................................................................................................ 1
2.
PROBLEMATIQUE ............................................................................................................................ 2
3.
CHOIX ET INTERET DU SUJET ........................................................................................................... 5
4.
OBJECTIFS ........................................................................................................................................ 5
5.
HYPOTHESES .................................................................................................................................... 6
6.
METHODOLOGIES ............................................................................................................................ 6
7.
DELIMITATION DU TRAVAIL............................................................................................................. 6
8.
PLAN ................................................................................................................................................ 7
CHAPITRE I : CONTEXTE INSTITUTIONNEL ET ECONOMIQUE DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU
CONGO .................................................................................................................................................... 8
I.1. BREF APERCU SUR L’EVOLUTION POLITIQUE DE LA RDC .................................................................. 8
I.1.1. RDC : 50 ans d’agitation politique .............................................................................................. 8
I.1.2. L’effondrement de l’appareil administratif .............................................................................. 12
I.2. LA SITUATION ECONOMIQUE DE LA RD CONGO ............................................................................. 14
I.2.1. Les espoirs déçus d’un géant économique africain.................................................................. 14
I.2.1.1. Les mesures de nationalisation et de zaïrianisation ......................................................... 15
I.2.1.2. La crise de la dette et les ajustements structurels ............................................................ 18
I.2.1.3. L’effondrement de la Gécamines ...................................................................................... 21
I.2.2. L’effort de redressement économique et de relance de la croissance .................................... 22
I.2.2.1. Le retour de la croissance du PIB ...................................................................................... 23
I.2.2.2. L’annulation de la dette .................................................................................................... 26
I.3. VALEUR ET LEGITIMITE DU POUVOIR PUBLIC CONGOLAIS ........................................................... 27
CHAPITRE II : L’ORGANISATION DU SYSTEME DES RECETTES PUBLIQUES EN REPUBLIQUE
DEMOCRATIQUE CONGO ...................................................................................................................... 30
II.1. CADRE JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF DES RECETTES PUBLIQUES................................................ 30
87
II.1.1. Un système fiscal composé d’un régime de droit commun et de régimes dérogatoires. ..... 31
II.1.1.1. Le régime de droit commun ............................................................................................. 31
II.1.1.1.1. La fiscalité intérieure ................................................................................................. 31
II.1.1.1.2. La fiscalité de porte ................................................................................................... 32
II.1.1.1.3. Les prélèvements non fiscaux ................................................................................... 32
II.1.1.1.4. La fiscalité locale........................................................................................................ 33
II.1.1.1.5. La parafiscalité........................................................................................................... 34
II.1.1.2. Des textes particuliers dérogatoires du régime de droit commun .................................. 34
II.1.2. Une multiplicité des services mobilisateurs des recettes ou «régies financières» ................. 36
II.1.2.1. Une administration fiscale additionnelle aux deux administrations fiscales classiques du
Pouvoir Central. ............................................................................................................................. 37
II.1.2.2. Des régies financières particulières dans chaque province ............................................. 38
II.2. SPECIFICITES DU SYSTEME CONGOLAIS DE PERCEPTION DES RECETTES PUBLIQUES.................... 39
II.2.1. Atouts du système congolais de perception des recettes ...................................................... 39
II.2.1.1. La volonté de réformer symbolisée par « le Plan stratégique de réforme des finances
publiques ....................................................................................................................................... 39
II.2.1.2. Un système déclaratif auto-liquidé .................................................................................. 40
II.2.1.3. Une législation fiscale adaptée au contexte régional ...................................................... 41
II.2.1.4. L’externalisation de la perception des recettes par le système bancaire ........................ 42
II.2.2. Les faiblesses du système congolais de mobilisation des recettes publiques ........................ 43
II.2.2.1. L’incivisme fiscal ............................................................................................................... 43
II.2.2.2. Multiplicité des prélèvements non fiscaux. ..................................................................... 43
II.2.2.3. Multiplicité des services mobilisateurs des recettes (régies financières). ....................... 43
II.2.2.4. Dualité dans la gestion des phases d’exécution des prélèvements non fiscaux. ............. 44
II.2.2.5. Chevauchement de compétence dans la gestion de certains impôts, taxes et redevances
....................................................................................................................................................... 45
II.2.2.6. Un système de rémunération des agents axé sur les primes d’encouragement ............. 46
II.2.2.7. L’informatisation partielle de la chaîne des recettes ....................................................... 49
CHAPITRE III : LA MOBILISATION DES RECETTES PUBLIQUES EN .......................................................... 51
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ........................................................................................... 51
III.1. LE CONTRASTE DE L’AUGMENTATION DES RECETTES PUBLIQUES ET DE LA PERSISTANCE DE LA
PAUVRETE. ............................................................................................................................................. 51
III.1.1. Une augmentation sensible des recettes publiques ............................................................. 51
III.1.2. Faible poids des recettes courantes sur les dépenses d’investissements. ............................ 54
88
III.1.3. Un pays en retard par rapport aux cibles à atteindre en 2015 relatifs aux Objectifs du
Millénaire pour le Développement .................................................................................................. 56
III.2. L’EVALUATION DE LA MOBILISATION DES RECETTES COURANTES. .............................................. 59
III.2.1. Des contreperformances par rapport aux prévisions budgétaires. ....................................... 59
III.2.2. Une faible mobilisation des recettes par rapport au potentiel fiscal..................................... 61
III.3. RECOMMANDATIONS POUR LA MAXIMISATION DES RECETTES PUBLIQUES. .............................. 64
III.3.1. Recourir à la procédure d’appel d’offres dans la vente des ressources rares. ...................... 65
III.3.2. Fusionner les services mobilisateurs des recettes ................................................................ 66
III.3.2.1. Fusionner la Direction Générale des impôts et la Direction Générale des Recettes
Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations. ..................................................... 66
III.3.2.2. Intégrer au sein de l’administration fiscale unifiée les services des ministères chargés de
l’établissement de l’assiette et de la taxation des prélèvements non fiscaux. ............................. 67
III.3.2.3. Fusionner l’administration fiscale unifiée les services provinciaux de mobilisateurs des
recettes.......................................................................................................................................... 67
III.3.3. Renégocier à la hausse les financements climatiques ........................................................... 67
III.3.4. Investir dans les infrastructures de contrôle.......................................................................... 68
III.3.5. Réviser le code minier pour en retirer les clauses fiscales. .................................................... 69
III.3.6. Canaliser vers le Trésor Public les dividendes perçus par la Gécamines au titre d’actionnaire
dans divers joint-ventures. ................................................................................................................ 69
III.3.7. Rétablir l’autorité de l’Etat dans le secteur d’exploitation artisanale des minerais .............. 69
III.3.8. Réduire le nombre des prélèvements non fiscaux ................................................................. 70
III.3.9. Réformer le système de rémunération et lutter contre l’impunité ....................................... 71
III.3.10. Informatiser le circuit des recettes ...................................................................................... 72
III.3.11. Adopter les modalités de pilotage plus efficace des services mobilisateurs des recettes. . 72
III.3.10.1. Elaborer un Document d’Orientations Stratégiques, à l’instar de la DGDA qui en
élabore depuis dix ans. .................................................................................................................. 72
III.3.10.2. Introduire au sein des Inspections Générales des Services l’approche maitrise des
risques dans les opérations d’audit des services. ......................................................................... 73
III.3.10.3. Instituer la démarche qualité au sein des services mobilisateurs des recettes ............ 73
CONCLUSION ......................................................................................................................................... 75
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ......................................................................................................... 80
TABLE DES MATIERES ............................................................................................................................ 87
89