Poste de travail: l`avènement du client mi-lourd

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Poste de travail: l`avènement du client mi-lourd
DOSSIER
Analyse
Débat
Décryptage
Client riche, client léger, deux
approches différentes P 16
Le modèle client Web est-il
aujourd’hui suffisant ? P 20
Microsoft adapte le modèle
Web à ses besoins P 22
DR
Poste de travail : l’avènement
du client mi-lourd
Complexe à administrer, démesuré par rapport aux besoins, le poste de travail classique – client
lourd – perd du terrain face au client léger, où tout réside sur le serveur, et au client Web, où un
navigateur suffit pour accéder à un portail de services. Mais ces solutions ne conviennent pas
à tous les usages et pourraient se voir supplantées par l’approche hybride défendue par
Microsoft : un client mi-lourd, à l’aise tant en mode connecté qu’en mode déconnecté.
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N° 1061 • 11 mars 2005 • LE MONDE INFORMATIQUE
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DOSSIER
| Poste client
Analyse Client riche, client léger,
deux objectifs différents
Les architectures client léger et client riche ont en commun de chercher à simplifier l’administration des postes
de travail. La première a prouvé son efficacité sur le court terme, la seconde est encore en phase de maturation.
n informatique, les bonnes idées
ne meurent jamais. Un retour de
balancier menace l’équilibre actuel du couple client-serveur.
Côté utilisateur, le PC sous Windows croule sous une multitude d’applications, dont certaines, comme la
messagerie instantanée, ont été installées à l’insu de la direction informatique.
Côté administrateur, les coûts d’exploitation explosent du fait des mises à
jour et de la gestion des correctifs, surtout quand il s’agit de parcs micros
contenant des milliers de machines. A
tel point que certaines grandes entreprises se sont d’ores et déjà lancées dans
des projets structurants destinés à centraliser le contrôle et la gestion de leurs
applications utilisateurs sur la partie
serveur. Une sorte de retour aux sources
au temps du mainframe tout puissant
ou des terminaux X du monde Unix.
Deux stratégies sont possibles. L’une vise
les économies à court terme, c’est le recours à une architecture dite client léger,
très en vogue actuellement. L’autre, nettement plus structurante, y compris
pour les applications métier de l’entreprise, est encore dans les limbes. Elle s’appuie sur l’interaction entre les portails
et des logiciels clients dits “riches”.
Centraliser les applications
pour réduire les coûts
La question peut se poser par exemple
à l’occasion du changement de parc des
postes de travail, qui intervient en théorie tous les trois ou quatre ans. L’opération est lourde, souvent complexe et onéreuse. Il faut prévoir d’installer les
nouvelles machines, de les configurer,
puis de gérer leur maintenance, la sauvegarde des données disséminées sur
chaque PC, et leur sécurité au quotidien. Avec, à la clé, des coûts récurrents
d’administration, de mise à niveau, de
support technique et de gestion de correctifs. Pour les directions informatiques
qui cherchent à réduire les dépenses, la
tentation est forte de vouloir sortir de ce
cercle infernal en centralisant toutes les
applications et les données au niveau
d’une ferme de serveurs. Les mises à
jour sont ainsi effectuées une seule fois
pour tous les utilisateurs. Du pain béni
pour l’éditeur Citrix, le champion de l’architecture client léger, qui a réalisé en
France une croissance record de plus de
30% de son chiffre d’affaires en 2004. Les
16
Marc Guillaumot
E
LES ACCÈS CLIENTS LÉGERS, BON PLACEMENT
POUR LES CLIENTS ÉCONOMES
la Caisse d’épargne Ile-deA
France Paris (photo ci-dessus),
il s’agissait de centraliser les
applications au siège, sous
Windows 2000. S’est alors posé le
problème du mode d’accès, les agences
étant équipées de postes sous OS/2.
L’infrastructure d’accès MetaFrame
de Citrix a résolu le problème.
Aujourd’hui, les postes clients sont
des terminaux clients légers. Citrix et
Tarantella, les principaux fournisseurs
de logiciels clients légers, fourmillent
d’histoires de la sorte. Le plus souvent,
il est question de réaliser des
économies. Le groupe de transport et
de logistique Sernam dit avoir réalisé
une économie d’un million d’euros par
projets portant sur plusieurs milliers
d’utilisateurs ne font plus figure d’exceptions, dans les banques, les caisses de
retraites, ou chez les opérateurs. Même
SAP, en tant qu’entreprise, s’est laissé tenter par les perspectives de réduire ses
coûts de 30 % en centralisant une quarantaine d’applications… dont SAP.
Un recyclage des vieux PC
La technologie permet de déporter
sur des serveurs MetaFrame sous Windows les applications qui tournent ha-
LE MONDE INFORMATIQUE • N° 1061 • 11 mars 2005
an grâce au déploiement de clients
légers dans ses 108 sites en France. La
société de maintenance aéronautique
TAT Industries estime économiser
entre 350 et 450 euros par poste de
travail et par an. Insensible aux virus,
impossible à bidouiller, un client léger
diminue sensiblement le recours à
l’assistance technique. De même, il
élimine les besoins de déplacement
sur site et les prestations de mises
à jour. Il faut cependant disposer d’un
budget initial élevé (investissement
dans une infrastructure serveur et
stockage centralisée, licences
serveurs en plus des licences clients)
et ne compter sur les économies
R. F. ET O. R.
qu’à moyen terme.
bituellement sur les postes de travail (il
faut quand même s’acquitter d’autant
de licences logicielles que d’utilisateurs
simultanés). Ceux-ci n’ont besoin que
d’un unique logiciel client (disponible
pour un PC sous Windows, un ordinateur Macintosh, des stations de travail
sous Unix ou Linux, des périphériques
sans fil ou des PDA…), qui communique avec le serveur par un protocole
propriétaire, ICA (ou RDP pour l’offre
Microsoft Terminal Server, développée
à l’origine par Citrix). Plus récemment,
l’offre serveur MetaFrame s’est étoffée
en une véritable suite logicielle, avec
gestion des mots de passe, accès Web et
travail collaboratif. C’est le concept de
l’informatique client léger, en tant
qu’infrastructure d’accès, à ne pas
confondre avec le client léger en tant
que tel, qui désigne un PC simplifié,
sans disque dur, comme on en trouve
chez Wyse, Neoware, HP, Sun (Sun Ray)
ou Fujitsu Siemens, et qui s’appuie généralement sur une infrastructure logicielle de type Citrix. L’un peut aller
sans l’autre. D’ailleurs, dans la grande
majorité des cas, les entreprises qui optent pour une architecture client léger
décident d’installer un client ICA sur
leurs PC existants, qui peuvent ainsi
continuer à servir pendant encore deux
à cinq ans supplémentaires. C’est le cas
chez France Télécom (60 000 postes), où
de nombreux vieux PC ont été habilement recyclés, et relookés agrémentés
d’un écran plat et d’un clavier sans fil
flambant neufs.
Une solution adaptée
à la mobilité
L’architecture client léger permet ainsi
à n’importe quel terminal doté d’un
client ICA ou RDP d’accéder à des applications client exécutées sur un serveur. C’est valable sur le réseau local
(LAN) comme sur le réseau étendu
(WAN), dans le cas d’entreprises multisites. La consommation de bande passante du protocole ICA par utilisateur
étant relativement réduite (moins de
20 Kbit/s), la solution s’adapte désormais à la mobilité comme en témoigne
le récent lancement chez France Télécom d’un forfait illimité aux applications sous Citrix pour les connexions
3G, Wi-Fi et GPRS. Elle s’étend aussi au
Web, avec les solutions Nfuse de Citrix
qui permettent d’accéder à des applications sur le Web par téléchargement
d’un client ICA. Certaines entreprises,
comme la Caisse d’épargne Ile-deFrance ou Vediorbis, publient même des
navigateurs Web sur des serveurs MetaFrame, en frontal d’un portail ou de
serveurs d’applications “webisées” de
type Siebel. L’avantage est double : d’une
part, le trafic ICA entre le client et le
serveur est plus faible que celui généré
par HTTP, et d’autre part la mise à jour
du navigateur, en cas d’alerte sécurité,
ne nécessite qu’une seule intervention
au niveau du serveur MetaFrame.
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Chiffres clés
Qui allège le client ?
Le marché des postes clients légers
en France
Parts de marché des logiciels clients légers
pour Windows
En nombre de sites français équipés (*) et de machines installées
Nombre de sites
Nombre de machines
Wyse
222
9 458
IBM
186
6 965
140
3 184
Autres
90%
HP/Compaq
126
3 538
NCD/Neoware
117
4 925
60%
Dell
27
1 002
50%
Fujitsu Siemens
10
508
Sun Microsystems
9
207
8
274
VXL
8
160
8
Esesix
Total :
115
1
3
862
30 339
(*) Harte Hanks Market Intelligence recense le parc informatique
des 24 000 plus grands sites en France (grands comptes et grosses PME).
85%
82%
79%
78%
74%
71%
Hermitage Solutions
Citrix et Microsoft (*)
40%
Ce spécialiste de Linux distribue en
France Win4Lin Terminal Server. Ce
dernier permet d’exécuter sur un
serveur Linux des applications
Windows, auxquelles les utilisateurs
accèdent grâce au système X Window.
Microsoft seul
30%
Source : Forrester Research Inc.
Bull
En pourcentage du nombre de licences total
(nouvelles ventes et renouvellements)
80%
70%
Acer
Source : Harte Hanks
100%
Citrix
L’offre s’appuie sur la technologie
de déport d’écran des serveurs
MetaFrame, à laquelle sont venus se
greffer des services de sécurisation
en SSL, d’authentification unique,
de portail, d’accès aux contenus…
27%
24%
20%
15%
17%
19%
3%
4%
3%
10%
10%
5%
IBM
Autres
2%
La stratégie WorkPlace Client
observe les canons de la
centralisation (attribution des droits
depuis le serveur, télédistribution de
rustines, supervision de la sécurité…),
mais impose toutefois l’installation
d’une couche middleware sur les
postes clients : un environnement de
services, des interfaces de
programmation, un mini serveur
d’applications, un gestionnaire de
données dérivé de DB2, etc.
2%
0%
2000
2001
2002
2003
2004
(*) 85% du chiffre d'affaires réalisé par Microsoft dans ce domaine provient
désormais d'une vente Citrix, d'après les analystes de Forrester.
2005
20 à 25 %
25 à 30 %
La croissance annuelle des ventes
mondiales de clients légers d’ici à 2006
(source : Gartner, novembre 2004).
La proportion de terminaux, parmi les
postes de travail, utilisés comme clients
légers (source : Gartner, novembre 2004).
Softricity
Globalement, les arguments de l’architecture client léger sont essentiellement liés aux économies que l’on
peut réaliser en coûts sur la mise à niveau des postes de travail, en maintenance applicative et en support. Même
si l’architecture apporte également sur
le plan technique des réponses très intéressantes en termes de haute disponibilité (équilibrage de charge), de
sécurité (mot de passe unique) et d’accès mobile. Il faut par ailleurs être
conscient que cette approche nécessite
la constitution (et l’administration)
d’une véritable ferme de serveurs MetaFrame, qui peut atteindre la centaine
de serveurs rack ou de serveurs lames
lorsque le nombre d’utilisateurs dépasse plusieurs milliers, chaque serveur MetaFrame ne gérant en pratique
que 30 à 100 utilisateurs. Le coût dépend également du niveau de service
voulu pour les applications. Dans certains cas, il faudra par exemple prévoir
d’investir dans des dispositifs de qualité de service sur le WAN pour donner
la priorité aux flux Citrix sur d’autres
flux comme la messagerie par exemple,
ou se lancer dans des processus de
maquettage, de tests de non-régression
pour valider la stabilité de telle ou telle
application métier sur un serveur
MetaFrame. Bref, la solution miracle
n’existe pas. “Pour ne pas passer à côté
Le client riche
WorkPlace
d’IBM,
entièrement
personnalisable,
est une
extension du
portail sur le
poste de travail.
SoftGrid for Terminal Servers
complète les offres Citrix et TSE,
en permettant de consolider les
applications serveurs. SoftGrid
répartit la charge entre les serveurs
et les postes clients pour permettre
d’aller au-delà des possibilités
théoriques de Citrix et TSE.
Sun
Un poste de travail Sun Ray ne
contient ni disque dur, ni système
d’exploitation, ni applications locales.
Les applications sont centralisées sur
un serveur Sparc/Solaris, les données
utilisateur sont stockées sur le réseau,
et les paramètres sur une carte Java.
Tarantella
des bénéfices d’une architecture client
léger, il faut impérativement faire une
étude préalable, car dans certains cas
la migration peut coûter cher”, prévient Vincent Malka, ingénieur avantvente chez l’intégrateur D-Fi.
Pouvoir accéder
à des services composites
L’autre solution de centralisation des
applications repose sur une évolution
future du portail d’entreprise. L’avantage par rapport au client léger, c’est la
possibilité d’accéder à des services
composites, intégrant plusieurs applications ou services Web au niveau
du serveur. Reste qu’aujourd’hui, l’accès aux applications à travers le portail
s’effectue à l’aide d’un navigateur
Web utilisé comme client universel.
Compte tenu des temps de réponse du
protocole HTTP, ce schéma ne permet
pas de centraliser les applications bureautiques, qui restent la plupart du
temps en local, à moins qu’elles ne
soient publiées sur un serveur MetaFrame, dans le cadre de solutions hybrides. La DSI ne peut donc pas faire
l’économie des coûts de mise à jour sur
Issu de SCO (après la vente du nom
et des Unix à Caldera), Tarantella
est depuis le rachat de New Moon
en 2003 le principal concurrent
de Citrix, notamment sur Unix.
VMWare
ACE (Assured Computing
Environment) est une machine
virtuelle installée sur le poste de
l’utilisateur, qui contient sous forme
cryptée l’OS, les applications et
les données que l’administrateur
aura sélectionnées.
Suite page 18 ➤
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N° 1061 • 11 mars 2005 • LE MONDE INFORMATIQUE
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DOSSIER
| Poste client
➤ son parc. Par ailleurs, les performances
sont souvent insuffisantes pour permettre un accès mobile aux applications
critiques dans de bonnes conditions.
Le client riche veut réunir
le meilleur des deux mondes
La réponse des éditeurs de portails
et de serveurs d’applications, IBM en
tête avec son offre WorkPlace, est de défendre le concept de client riche. L’objectif est de réunir le meilleur des deux
mondes, la facilité de navigation du
Web d’une part, et la richesse applicative et les performances du client lourd
de l’autre. Dans le principe, le poste de
travail n’a besoin que d’un seul logiciel client qui gérera l’exécution, en
mode connecté ou non, de l’ensemble
des applications et services. La mise à
jour, la synchronisation et la sauvegarde sont gérées automatiquement
de manière centralisée, à partir du portail-serveur d’applications. Chez IBM,
ce client riche se présente sous la forme
d’un mini “portail local”, avec un mini
serveur d’applications, une mini base
de données, et des mécanismes de synchronisation serveur (SyncML) avec le
portail. Il comprend également une
suite de logiciels bureautiques, collaboratifs et de gestion de documents,
sous la forme de composants prêts à
l’emploi pouvant se greffer sur des services provenant d’éditeurs tiers (progiciels de gestion intégrés ou de gestion de la relation client), ou des
applications métier. Le tout dans un
environnement de développement
Java, basé à 100 % sur Eclipse. “WorkPlace est une architecture de bout en
bout, c’est une extension en local du
portail Web vers n’importe quel terminal : un PC sous Linux ou Windows,
un Macintosh, un PocketPC, un Palm”,
précise Thomas Coustenoble, chef de
produit chez IBM Lotus France.
En revanche, le modèle client riche
récupère également un inconvénient
non négligeable du client lourd, à savoir la nécessité de continuer à faire
évoluer régulièrement son parc de
postes de travail, avec des capacités
importantes en termes de mémoire et
de ressources de stockage. Contrairement au client léger. Au final, il apparaît que les deux architectures ne répondent pas tout à fait aux mêmes
objectifs. La mise en œuvre d’une architecture client léger constitue souvent
un moyen immédiat pour la DSI de se
simplifier la vie et de réduire ses coûts.
A l’opposé, l’architecture client riche,
dans la lignée du portail d’entreprise,
intéresse davantage les directions métier dans le cadre d’une réflexion stratégique plus large sur la manière d’optimiser les applications de l’entreprise
et, plus généralement, ses processus. Les
projets sont évidemment à plus long
terme. Cela tombe bien, car l’offre n’est
pas encore tout à fait mature. ●
JEAN-LUC ROGNON
18
POUR EN SAVOIR PLUS
LES PLUS DU CLIENT LÉGER
LES MOINS DU CLIENT LÉGER
• Connexion rapide et simple au
réseau et aux applications et
données centrales.
• Aucune donnée en local (pas de
risque de vol, ou de perte en cas
de panne).
• Administration entièrement
centralisée.
• Sauvegarde des données et des
applications assurée sur le
serveur central.
• Mises à jour du matériel et des
logiciels en une seule fois depuis
le serveur central.
• Les clients légers sont mis en
route par un simple bouton,
pas de parties mobiles ou de
disque dur.
• Insensibles aux attaques des virus.
• Les clients légers ont une durée
de vie moyenne de 5 à 7 ans.
• Facilite l’externalisation de la
gestion de parc.
• Nécessité d’optimiser les
connexions réseau, notamment
les réseaux distants et les flux
d’impression.
• Infrastructure serveur importante
à prévoir.
• Devient totalement inutile en cas
de problème de connexion ou de
couverture réseau.
• Bride les possibilités de
personnalisation par l’utilisateur.
• Inadapté aux futures applications
produisant et consommant des
services Web.
• Problèmes éventuels de
certifications d’applications,
nécessité de valider la stabilité.
• Ne devient intéressant qu’au-delà
d’un certain nombre d’utilisateurs
aux besoins comparables.
• Nécessite un accompagnement
humain auprès des utilisateurs,
administrateurs locaux…
■ www.wyse.fr/wyse/literature/
whitepapers Le constructeur donne
accès à plusieurs études, rédigées
notamment par des analystes de
Butler Group et Bloor Research.
■ www.thinclient.org Informations
en anglais et pointeurs vers des
annonces ou articles liés au client
léger. Possibilité de souscrire à un
flux d’information (RSS).
■ Citrix MetaFrame XP (FR3)
Installation, configuration et
administration, par Marc Stoik,
chez Eni éditions, est destiné aux
administrateurs réseaux devant
mettre en œuvre le serveur de
présentation de Citrix. Prix : 27,14 €.
■ www.microsoft.com/NET/
SmartClient/Benefits.mspx
Microsoft a commandité une étude
auprès de Jupiter Research sur le
concept de “smart client”.
Quatre solutions pour enrichir le client Web
omment enrichir le navigateur
Web pour atteindre l’ergonomie
des applications natives tout en
conservant les avantages des
architectures distribuées
(indépendance de la couche de
présentation, déploiement sans
douleur, standards du Web…) ?
C
1 Les appliquettes Java
représentent l’approche
classique. Sur le client, le seul
prérequis est une machine virtuelle
Java (JVM). Côté serveur, un
container de servlets tel que Tomcat
peut suffire. Cette solution offre une
grande simplicité de
programmation et de déploiement.
Mais les interfaces graphiques en
Java sont loin d’atteindre la rapidité
des interfaces Windows ou Flash.
Citons, dans cette catégorie, des
produits tels que UltraLightClient de
Canoo, AltioLive Presentation Server
de Altio, Nexaweb Client de Nexaweb.
plug-in sur le poste
2 Des
client
constituent une
tentation forte. Ainsi, Eclipse Rich
Client Platform (RCP) installe deux
plug-in. Ce projet Open Source est
issu de l’atelier Eclipse auquel il
emprunte le framework et les
composants graphiques pour
développer des applications Internet
riches. Eclipse RCP sert également de
base pour le poste utilisateur d’IBM,
WorkPlace Client Technology Rich
Edition (WCTRE), environnement
d’exécution destiné à remplacer
l’interface de Windows.
LE MONDE INFORMATIQUE • N° 1061 • 11 mars 2005
A partir de son
langage de
description
MXML,
Macromedia Flex
génère des
interfaces riches
en Flash :
glisser-déposer,
rafraîchissement
et calculs
instantanés…
Un navigateur intégrant sa
3 plate-forme
d’exécution
comme Mozilla Firefox peut se
substituer à Internet Explorer et
apporter certaines technologies,
comme XUL, son langage XML de
description de l’interface graphique.
XUL, sous la bannière de l’Open XUL
Alliance, draine de nombreux projets de
clients riches en Open Source : Mozilla,
Luxor, SwixML, Thinlet, MyXAML…
Décrire l’interface utilisateur en XML
en se basant sur des composants
préinstallés, c’est aussi la démarche
adoptée par Microsoft avec XAML
dans son prochain OS Longhorn. Pour
l’heure, la firme de Redmond vante
timidement sa technologie smart
client (voir page 22).
4 La technologie Flash,
dédaignée par les développeurs
pour son image de gadget pour
créatifs, offre pourtant l’avantage d’être
présente sur la quasi-totalité des
navigateurs et des OS, et d’être à la fois
légère et rapide. Flash gagne ses galons
de client riche grâce à la technologie
Flex de Macromedia. Ce serveur de
présentation s’intercale entre un
serveur d’applications J2EE (bientôt
.Net) et le serveur Web. Le langage de
description d’interface Macromedia
XML (MXML) permet de générer à la
volée une interface utilisateur en Flash
qui sera exécutée sur le poste client
par le plug-in Flash Reader.
Contrairement à XUL, l’interprétation
et la génération de l’interface se fait
côté serveur. Cette solution apparaît
comme la plus aboutie : haute
programmabilité (Java, XML),
déploiement aisé (Flash) et bonne
ergonomie de l’interface (Flash). Son
seul handicap est d’utiliser un format
propriétaire. A noter que le projet
Open Source Lazlo utilise également
un langage XML (LZX) pour générer
des applications Flash côté serveur. ●
PIERRE TRAN
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DOSSIER
| Poste client
Débat Le modèle client Web est-il
aujourd’hui suffisant ?
Laurent Chaumereuil,
DR
DR
responsable produits pour la gamme x86
de Sun Microsystems France
OUI
’ approche
L
client Web
permet aux
entreprises d’être
plus flexibles et aux
collaborateurs d’être
plus performants.
Dans ce modèle, tous
les services [ceux
que rendent les
applications, NDLR]
se trouvent
accessibles à tout
moment et
indépendamment de
la position
géographique du
collaborateur.
L’approche client Web
permet ainsi aux
utilisateurs de
s’affranchir des
équipements
matériels utilisés pour
accéder aux services :
poste de travail
classique, client léger
ou encore assistant
personnel.
Evidemment, cette
mutation nécessite
quelques
aménagements dans
l’architecture
informatique
classique. Il faut
transférer une partie
de “l’intelligence” qui
20
L’approche client Web fait la part belle au Jean-Christophe Cimetière,
navigateur au détriment des applications
chef de produit plate-forme .Net
clientes traditionnelles. Mais rencontre une vive
chez Microsoft France
opposition, menée par le duo Microsoft-Intel.
se trouve sur les
postes clients vers le
réseau de l’entreprise.
Dans ce modèle, les
applications se
transforment ainsi en
“services”, le plus
souvent accessibles
L’effort de
maintenance du
poste de travail
est quasi
inexistant dans le
cas du client Web.
au travers d’un
portail.
Cette approche
n’est pas nouvelle
pour Sun. Cela fait
vingt ans que le
constructeur y
travaille. L’évolution
technologique
actuelle lui donne
raison, même si
certains s’y opposent.
Microsoft, par
exemple, a une
approche différente.
L’éditeur tire une part
importante de ses
revenus des produits
installés sur le poste
client. Il est normal
qu’il ne préconise pas
l’approche client Web.
LE MONDE INFORMATIQUE • N° 1061 • 11 mars 2005
Le client Sun Ray de Sun
(à droite) dispose d’un
emplacement pour insérer
une Javacard, qui contient le
profil utilisateur. De son côté, Microsoft
lance Click-Once pour gérer les paramètres
d’administration et de déploiement des smart clients (ci-dessus).
our la gestion et le suivi
de ses projets, l’Afnor a
choisi son camp entre
le client Web et le client
riche : ce seront les
deux. Les chefs de projet de
l’Agence française de normalisation utilisent un client Web
pour saisir les informations relatives aux projets qu’ils supervisent. Les administrateurs
s’appuient, quant à eux, sur un
client riche pour visualiser et
gérer des plannings très lourds,
ce qui est impossible avec une
interface Web. Le cas de l’Afnor reflète bien la situation des
entreprises. Ces dernières lorgnent avec intérêt sur le
concept client Web, et pour
cause. Les applications accessibles par des navigateurs sont
plus simples à installer et à
suivre que des applications sur
le poste client. En outre, le matériel du poste client perd de
son importance. Les applications, aussi appelées services
dans ce modèle, fournissent
le contenu par le réseau. Les administrateurs, pour leur part,
apprécient ce modèle qui leur
simplifie les tâches de déploiement, de mise à jour et
d’administration. Cette approche entraîne donc une
baisse des coûts de revient au
niveau du poste client.
P
Ce modèle présente néanmoins quelques inconvénients. En premier lieu, les
applications doivent être accessibles au travers d’un portail, avec un système d’authentification unique, ce qui
est loin d’être systématique. Ensuite, l’ergonomie d’affichage
peut se révéler insuffisante.
Voir midi à sa porte
Ces raisons ont notamment
poussé certains éditeurs et
constructeurs à prôner l’approche client riche. Sous ce modèle, les applications s’exécutent localement sur l’ordinateur
client et utilisent les ressources
de la machine. Les applications
s’affranchissent des contraintes
liées au réseau. En fait, le positionnement des éditeurs et les
constructeurs vis-à-vis de l’une
ou l’autre approche est avant
tout dicté par leur modèle économique. Les fournisseurs plus
orientés serveurs que postes de
travail poussent le concept
client Web. A l’inverse, le couple
Microsoft-Intel mène la résistance en insistant sur l’importance de disposer d’une certaine
puissance sur le poste client
pour traiter des informations
en mode déconnecté. ●
NON
e modèle
L
client Web
n’est pas suffisant
bride l’ergonomie.
Le recours au DHTML
et aux scripts
pour les entreprises. complexifie la tâche
Pour commencer, il
des développeurs qui
ne fonctionne que si doivent par là même
le client se trouve
acquérir de nouvelles
connecté au réseau. compétences.
L’utilisateur n’accède
Bien que le support
donc plus à ses
du modèle client Web
informations lorsqu’il
est déconnecté. Et
Le concept Smart
l’Hexagone est loin
Client reprend le
d’être couvert
meilleur des
entièrement.
approches client
Considéré parfois
Web et client riche.
comme le modèle de
développement
reste une priorité,
universel, ce modèle toutes ces raisons
atteint justement ses ont poussé Microsoft
limites lorsqu’il est
à proposer une voie
utilisé dans le
alternative qui a
contexte de
donné naissance au
nomadisme. Second “smart client”. Ce
frein à son adoption, modèle prend le
l’ergonomie peut se
meilleur des
révéler insuffisante
approches client Web
dans certains cas par et client riche. Avec
rapport aux clients
ce client intelligent,
riches.
l’utilisateur bénéficie
Afin de respecter
d’une ergonomie
les standards
adaptée à ses
supportés par les
besoins.
navigateurs,
L’administrateur, lui,
l’interface de
retrouve la facilité de
présentation repose déploiement et
essentiellement sur
d’administration du
du code HTML, ce qui modèle client Web.
XAVIER BOUCHET
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DOSSIER
| Poste client
Décryptage Microsoft s’adapte au Web
Le “Smart Client” permet à Microsoft de se démarquer
à peu de frais de l’image négative du client lourd.
G
sont les applications phares du client
hybride prôné par Microsoft. A première
vue, rien ne distingue donc le Smart
Client du client lourd traditionnel,
équipé de Windows et Office. Côté matériel, toutefois, le PC peut être remplacé
par un client plus mobile, à condition
que ce dernier dispose d’une puissance
de traitement et d’une capacité de stockage suffisantes. Mais les différences apparaîtront surtout avec la généralisation
du modèle .Net, avec .Net 2.0 et Visual
Studio 2005, attendus cette année.
Un client équipé du “Framework
.Net” apparaît bien plus simple à administrer. Les applications peuvent être
déployées sans modification de la base
de registre, ni impact sur des ressources
partagées comme les DLL (bibliothèques
de liens dynamiques, dont les conflits
récurrents ont généré l’expression “enfer
des DLL”). Plusieurs versions d’un composant pouvant même coexister. Une
application peut ainsi être déployée par
simple copie de fichier depuis le serveur,
ts lourds
Clien
Importante
empreinte
mémoire
Difficultés de
déploiement
Source : Microsoft
artner pense, à l’instar des analystes de Zapthink, que l’émergence des architectures orientées services entraînera le retour
à des postes clients plus lourds,
consommant ou publiant des données
sous forme de services Web. La prédiction tombe à pic pour Microsoft, qui
tente d’imposer son concept de Smart
Client. Un client sans les principaux défauts du client lourd traditionnel, notamment en termes d’administration,
mais beaucoup plus riche qu’un client
léger sans disque dur ou un client Web.
Connecté au serveur, il échange des données, synchronise la messagerie et
l’agenda, voire se met à jour. Déconnecté,
il permet de travailler sur les données ou
de préparer des messages qui seront envoyés lors de la reconnexion.
Le concept était au cœur d’Office System Developer Conference, début février, que Microsoft consacrait à sa suite
bureautique et son environnement. Car
Word 2003, Excel 2003 et Infopath 2003
Entre lourd et léger : smart
Enfer
des DLL
Clients lég
ts hybrides (Smart clients)
ers
Clien
Support des services
Dépendance
Web et des modes
envers
connecté/déconnecté
Capacité
Richesse
le réseau
à toucher
de l'interface
un maximum
de clients
Pauvreté de
Productivité élevée
Gestion simple
l'interface
du développement
des changements
Facilité de
déploiement
Réactivité
Adaptabilité
aux matériels clients
Complexité du
développement
Microsoft affirme reprendre le meilleur des deux mondes. Mais omet le principal
avantage du client Web : il suffit d’un client HTML et d’un serveur Web quelconques.
lorsque le client s’y connecte (technologie ClickOnce). Microsoft admettant
tout de même que des logiciels sensibles,
par exemple des pilotes, devraient plutôt être installés de façon traditionnelle.
Le modèle .Net implique aussi des
échanges de données au format XML.
Dissocier la couche de présentation, le
format des documents et l’application
cliente des données est une grande avancée de ce modèle. Cela facilite la colla-
boration, y compris avec des utilisateurs
de technologies non Microsoft ou des
applications back-office capables
d’échanger en XML. Les applications
s’appuyant sur ces avancées sont encore
peu nombreuses. Microsoft incite ses
partenaires à développer des solutions
verticales. La majorité des entreprises
utilisant encore Office 97, ces solutions
ont le temps de mûrir. ●
OLIVIER RAFAL
Veille Les PC lames
de HP en phase de test
l y a un an environ, HP lançait sa solution CCI (Consolidated Client Infrastructure) pour résoudre les problèmes du client lourd. L’idée du
constructeur est de déporter les PC vers
des salles serveurs, sous forme de lames
insérées dans des châssis, en ne laissant
sur les bureaux que des clients fins : clavier, souris, écran et le strict nécessaire
en matière de puissance et de connectique. Chaque “PC blade” est pourvu
d’un système d’exploitation et des applications utilisateurs classiques. En revanche, les données sont enregistrées à
part, au sein d’un SAN. Après s’être identifié, l’utilisateur peut donc travailler
depuis n’importe quel client fin. En
cas de panne, du client, du réseau ou
d’une lame, l’utilisateur peut se connecter sur une autre lame depuis son client
ou un autre et récupérer ses documents
(au dernier enregistrement). Le coût initial est d’environ 1 500 dollars par utilisateur, déploiement compris.
La solution CCI est pour l’heure uniquement disponible en Amérique du
Nord. Et pas par manque d’intérêt,
nous a répondu HP : “Afin de nous assurer que les ressources adéquates sont
en place pour assurer un service satis-
I
22
LE MONDE INFORMATIQUE • N° 1061 • 11 mars 2005
Les PC lames (blades) de HP, sous
XP Pro, sont accessibles au travers
du protocole Windows RDC.
faisant aux clients de CCI, nous nous
consacrerons dans les prochains mois
à la réussite d’un nombre limité de déploiements de grande envergure [...]. En
outre, un déploiement significatif est
en cours dans un certain nombre de
groupes de travail au sein de HP. En
phase avec notre engagement de répondre aux besoins des marchés locaux en fournissant le bon produit au
bon moment, nous surveillerons l’impact de ces déploiements afin d’évaluer l’opportunité d’introduire CCI sur
d’autres marchés, y compris EMEA.”
Pour l’heure, la solution n’apparaît
intéressante qu’à partir de 1 000 utilisateurs. Et encore, en déplaçant simplement la localisation du PC, elle n’apporte qu’une partie des avantages du
client léger. ●
OLIVIER RAFAL
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