les tropiques, les tropiques
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les tropiques, les tropiques
42, rue Scheffer 75116 Paris Téléphone : 01 53 70 20 22 Télécopie : 01 53 70 21 44 www.cirad.fr Crédit photos et illustrations (de gauche à droite et de haut en bas) Les tropiques, l’autre jardin (pp. 2 et 3) : Illustration originale de Terri Andon – Zébus Afar, © Cirad-Emvt – PluieAverse, © Sunset – Désert, Brossard, © Sunset – Savane à Madagascar, C. Lanaud, © Cirad – Ouragan El Niño, © Weather Stock/Sunset – Lutte contre l’ensablement au Maroc, V. Dollé, © Cirad – Ouragan Georges, Weather Stock, © Sunset – Illustrations originales de Helen Larkins. Les tropiques, une histoire (pp. 4 et 5) : Groupe de bovidés, Sahara, Acacus, Lybie (environ 2000 avant notre ère), © Y. et C. Gauthier – Outils préhistoriques, © Agropolis Museum – Le Jardin d’essai d’Alger. Carte postale – Scène de labourage en Égypte. L’Illustration, 1847 (Bibliothèque municipale de Montpellier) – Liste des plantes cultivées, extrait du Rapport du Jardin d’essais de Camayenne, Guinée française, 1899 (Document Cirad) – Greffage d’orangers dans les serres de l’Institut national d’agronomie coloniale, © Cirad – Moissonneuses, Canada, Masterfiles, © Pix – Hélicoptère, 1957 (Bibliothèque municipale de Montpellier), © Science et Vie – © Agropolis Museum – Barrage, M. Morell, © IRD – Plantation d’arachides, © Cirad – Serres, © Cirad. Les tropiques, une diversité (pp. 6 et 7) : Collecte de matériel biologique, © Cirad – Paysage de forêt tropicale, Japack, © Sunset – Caméléon, C. Lanaud, © Cirad – Ornithorynque, in Voyage de découvertes aux terres australes, Freycinet et F. Péron, 1816 (Bibliothèque municipale de Montpellier) – Grenouille, C. Lanaud, © Cirad – Illustrations du radeau des cimes par Jean-Louis Tripp. Les tropiques, un enjeu (pp. 10 et 11) : Marché de poissons à Dhaka, Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures – Rizière, C. Poisson, © Cirad – Rizière en Guinée, C. Poisson, © Cirad – Rizière aux Philippines, C. Poisson, © Cirad – Rizière d’altitude, C. Poisson, © Cirad – Riz, C. Poisson, © Cirad – Rizière en Indonésie, © A. Rival – Illustrations de Helen Larkins. Les tropiques, un défi (pp. 12 et 13) : Enfants à Madagascar, C. Lanaud, © Cirad – Marché d’Abidjan, C. Lanaud, © Cirad – Récolte de thé en Malaisie, C. Lanaud, © Cirad – Rizière au Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures – Labour dans une rizière au Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures – Marché de Chichikastenan, Guatemala, Timmermann, © Sunset – Cerrados Brésil, R. Billaz, © Cirad – Culture de soja dans une couverture de paille de riz, L. Séguy, © Cirad – Rocinha, Rio de Janeiro, John Maier, © Still Pictures – Dhaka, Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures. Les tropiques, des nourritures (pp. 14 et 15) : Illustrations de Helen Larkins. Plusieurs exemples et références de cette brochure ont été tirés de documents de la Fao (Rome, Italie). Certaines des pages (en particulier la première et la dernière double page) ont été élaborées en collaboration avec Agropolis-Museum (Montpellier). Agropolis-Museum présente au public une exposition permanente sur les agricultures et les nourritures du monde, avec notamment la Fresque historique de l'alimentaire, Paysages du monde, Aliments du monde, Nourritures du monde, Boissons du monde, Banquet de l'Humanité. Agropolis-Museum est ouvert au public tous les jours sauf le mardi de 14 à 18 h 00. Agropolis-Museum est aussi un musée virtuel : www.agropolis.fr, rubrique Agropolis-Museum. E-mail : [email protected] Tél. : 04 67 04 75 00 Fax : 04 67 04 13 69 GROUPE AGENCE FRANCAISE DE DEVELOPPEMENT F F E M • TE T E 15 SEPTEMB RE d a r Le CiJardin a et letaire à lde é plan de Hallete Gran Villet la LES TROPIQUES, le jardin nourricier 3J 9 - 2 ANVIER 199 Les tropiques, des ressources (pp. 8 et 9) : Arche de Noé, illustration originale de Terri Andon – Interprétation d’image Spot, plantation d’hévéa au Liberia, © Cirad – Parc Naukluff, Namibie, FLPA, © Sunset – Chutes d’Iguazu à la frontière du Brésil et de l’Argentine, J. Warden, © Sunset – Sécheresse en Thaïlande, Kittprempool, © Still Pictures – Tsé-tsé en position de piqûre : Glossina fuscipes fuscipes, Newstead, 1910, B. Geoffroy et D. Cuisance, © IRD/Cirad – Troupeau, © Cirad-emvt – Petite fille portant du poisson, Mauritanie, Demi Onep, © Still Pictures – Éléphants et impalas, Zimbabwe, I. de Szoborowski, © Cirad. © Cirad août 1999 Il a été réalisé avec le concours : • du ministère des Affaires étrangères, Sous-Direction de la recherche ; • du ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement ; • de l’Agence française pour le développement (AFD); • du Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM). DE LA V ILL ALLE H E Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement Ce document a été édité par le Cirad à l’occasion de l’exposition promenade « Le Jardin Planétaire » organisée du 15 septembre 1999 au 23 janvier 2000 à la Grande Halle de la Villette. • PARIS, G R A 00 ND 20 CIRAD Couverture : Illustration originale de Terri Andon Coordination : Anne Hébert, Cirad, Direction des relations extérieures Textes : Pascale Ammar-Khodja, avec la collaboration des chercheurs du Cirad et de l’Ird Création et mise en pages : Denis Delebecque, Bernard Favre, Pascale Thiers, Louma productions 42, rue Scheffer 75116 Paris Téléphone : 01 53 70 20 22 Télécopie : 01 53 70 21 44 www.cirad.fr Crédit photos et illustrations (de gauche à droite et de haut en bas) Les tropiques, l’autre jardin (pp. 2 et 3) : Illustration originale de Terri Andon – Zébus Afar, © Cirad-Emvt – PluieAverse, © Sunset – Désert, Brossard, © Sunset – Savane à Madagascar, C. Lanaud, © Cirad – Ouragan El Niño, © Weather Stock/Sunset – Lutte contre l’ensablement au Maroc, V. Dollé, © Cirad – Ouragan Georges, Weather Stock, © Sunset – Illustrations originales de Helen Larkins. Les tropiques, une histoire (pp. 4 et 5) : Groupe de bovidés, Sahara, Acacus, Lybie (environ 2000 avant notre ère), © Y. et C. Gauthier – Outils préhistoriques, © Agropolis Museum – Le Jardin d’essai d’Alger. Carte postale – Scène de labourage en Égypte. L’Illustration, 1847 (Bibliothèque municipale de Montpellier) – Liste des plantes cultivées, extrait du Rapport du Jardin d’essais de Camayenne, Guinée française, 1899 (Document Cirad) – Greffage d’orangers dans les serres de l’Institut national d’agronomie coloniale, © Cirad – Moissonneuses, Canada, Masterfiles, © Pix – Hélicoptère, 1957 (Bibliothèque municipale de Montpellier), © Science et Vie – © Agropolis Museum – Barrage, M. Morell, © IRD – Plantation d’arachides, © Cirad – Serres, © Cirad. Les tropiques, une diversité (pp. 6 et 7) : Collecte de matériel biologique, © Cirad – Paysage de forêt tropicale, Japack, © Sunset – Caméléon, C. Lanaud, © Cirad – Ornithorynque, in Voyage de découvertes aux terres australes, Freycinet et F. Péron, 1816 (Bibliothèque municipale de Montpellier) – Grenouille, C. Lanaud, © Cirad – Illustrations du radeau des cimes par Jean-Louis Tripp. Les tropiques, un enjeu (pp. 10 et 11) : Marché de poissons à Dhaka, Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures – Rizière, C. Poisson, © Cirad – Rizière en Guinée, C. Poisson, © Cirad – Rizière aux Philippines, C. Poisson, © Cirad – Rizière d’altitude, C. Poisson, © Cirad – Riz, C. Poisson, © Cirad – Rizière en Indonésie, © A. Rival – Illustrations de Helen Larkins. Les tropiques, un défi (pp. 12 et 13) : Enfants à Madagascar, C. Lanaud, © Cirad – Marché d’Abidjan, C. Lanaud, © Cirad – Récolte de thé en Malaisie, C. Lanaud, © Cirad – Rizière au Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures – Labour dans une rizière au Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures – Marché de Chichikastenan, Guatemala, Timmermann, © Sunset – Cerrados Brésil, R. Billaz, © Cirad – Culture de soja dans une couverture de paille de riz, L. Séguy, © Cirad – Rocinha, Rio de Janeiro, John Maier, © Still Pictures – Dhaka, Bangladesh, Shehzad Noorani, © Still Pictures. Les tropiques, des nourritures (pp. 14 et 15) : Illustrations de Helen Larkins. Plusieurs exemples et références de cette brochure ont été tirés de documents de la Fao (Rome, Italie). Certaines des pages (en particulier la première et la dernière double page) ont été élaborées en collaboration avec Agropolis-Museum (Montpellier). Agropolis-Museum présente au public une exposition permanente sur les agricultures et les nourritures du monde, avec notamment la Fresque historique de l'alimentaire, Paysages du monde, Aliments du monde, Nourritures du monde, Boissons du monde, Banquet de l'Humanité. Agropolis-Museum est ouvert au public tous les jours sauf le mardi de 14 à 18 h 00. Agropolis-Museum est aussi un musée virtuel : www.agropolis.fr, rubrique Agropolis-Museum. E-mail : [email protected] Tél. : 04 67 04 75 00 Fax : 04 67 04 13 69 GROUPE AGENCE FRANCAISE DE DEVELOPPEMENT F F E M • TE T E 15 SEPTEMB RE d a r Le CiJardin a et letaire à lde é plan de Hallete Gran Villet la LES TROPIQUES, le jardin nourricier 3J 9 - 2 ANVIER 199 Les tropiques, des ressources (pp. 8 et 9) : Arche de Noé, illustration originale de Terri Andon – Interprétation d’image Spot, plantation d’hévéa au Liberia, © Cirad – Parc Naukluff, Namibie, FLPA, © Sunset – Chutes d’Iguazu à la frontière du Brésil et de l’Argentine, J. Warden, © Sunset – Sécheresse en Thaïlande, Kittprempool, © Still Pictures – Tsé-tsé en position de piqûre : Glossina fuscipes fuscipes, Newstead, 1910, B. Geoffroy et D. Cuisance, © IRD/Cirad – Troupeau, © Cirad-emvt – Petite fille portant du poisson, Mauritanie, Demi Onep, © Still Pictures – Éléphants et impalas, Zimbabwe, I. de Szoborowski, © Cirad. © Cirad août 1999 Il a été réalisé avec le concours : • du ministère des Affaires étrangères, Sous-Direction de la recherche ; • du ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement ; • de l’Agence française pour le développement (AFD); • du Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM). DE LA V ILL ALLE H E Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement Ce document a été édité par le Cirad à l’occasion de l’exposition promenade « Le Jardin Planétaire » organisée du 15 septembre 1999 au 23 janvier 2000 à la Grande Halle de la Villette. • PARIS, G R A 00 ND 20 CIRAD Couverture : Illustration originale de Terri Andon Coordination : Anne Hébert, Cirad, Direction des relations extérieures Textes : Pascale Ammar-Khodja, avec la collaboration des chercheurs du Cirad et de l’Ird Création et mise en pages : Denis Delebecque, Bernard Favre, Pascale Thiers, Louma productions Les tropiques, Mexique l’autre jardin Forêt équatoriale, déserts brûlants, steppes arides du Sahel, savanes herbeuses, lagunes, marécages… la zone intertropicale présente une grande variété de paysages, de cultures et de modes de vie. L es tropiques ne connaissent pas d’hiver rigoureux, de printemps fleuri, d’été torride et d’automne coloré. Sauf en altitude et dans les déserts de latitude élevée, les tropiques ne connaissent pas le gel. À l’exception de la zone équatoriale, deux saisons liées au rythme des pluies se partagent l’année : une saison sèche relativement fraîche de décembre à février, puis de plus en plus chaude jusqu’en avrilmai, et une saison des pluies correspondant à l’été dans l’hémisphère nord. La pluie constitue la principale préoccupation des populations tropicales qui redoutent terriblement la sécheresse. Les précipitations sont, en effet, très variables et imprévisibles. Sous les tropiques, il pleut trop, ou pas assez. Le soleil, à la verticale dans les régions tropicales, fournit une énergie considérable, théoriquement favorable pour la production agricole. Mais les tropiques sont un milieu fragile : « Le cultivateur qui a connu la sécheresse ne l’oublie jamais. Des années plus tard, loin de l’Afrique, dans le climat humide d’une région septentrionale, il s’éveille en sursaut la nuit au bruit d’une soudaine averse et s’écrie : enfin, enfin! » Karen Blixen, Hors de l’Afrique « L’attitude d’un Indien en face des nuages et de la pluie demeure fondamentalement différente de celle d’un Occidental. Pour le premier, nuages est synonyme d’espérance; pour l’autre, il évoque la consternation. L’Indien scrute le ciel, et si le soleil est caché par un cumulus, son cœur se remplit d’allégresse. » Khushwant Singh Dans une petite vallée sèche à 1600 mètres d’altitude, Las Fuentes est un village de hauts plateaux tempérés, siège d’un ejido – une forme juridique particulière d’usage de la terre, qui est attribuée de façon communautaire à un groupe de paysans; il abrite également des paysans sans terre, mais aucun propriétaire privé, à la différence des villages voisins où subsistent quelques héritiers des anciens grands domaines constitués à partir de la conquête espagnole, les haciendas. À plusieurs reprises, Chava Martinez a été élu président du conseil de l’ejido. Plus jeune il partait chaque année travailler aux États-Unis. Aujourd’hui, les relations qu’il a tissées avec l’administration locale lui permettent de négocier le financement d’un puits collectif pour l’irrigation, ou des arrangements concernant le remboursement des dettes de l’ejido. Pour lui et sa famille, une mauvaise récolte serait dramatique si la banque publique se montrait trop stricte. La conjoncture actuelle de restriction des aides l’inquiète. Brésil Munifumi Mitsubara est le pionnier d’une agriculture respectueuse de l’environnement. Il vit dans les zones tropicales du Mato Grosso où sa famille s’est installée après avoir quitté le Japon au début du siècle. Au cours des années 80, il a accueilli pendant plusieurs années, dans son exploitation (la Fazenda Progreso), les expérimentations conduites par le Cirad sur des techniques de semis réalisé sans labour directement sur une couverture végétale. Il y consacra plusieurs dizaines d’hectares et des financements très conséquents. La Fazenda Progreso, de 2000 ha environ, est située dans les fronts pionniers de la route conduisant de Cuiaba (MT) à Santarem (PA), dans les Cerrados. M. M. l’avait acquise au début des années 70 alors qu’il était marchand de grains dans le sud du Brésil. Il décida de s’y installer quelques années plus tard, en abandonnant ses activités antérieures pour y cultiver du soja. Mais, à cause de l’érosion engendrée par la monoculture (le soja ne se cultive qu’une partie de l’année, entre-temps les sols sont à nu) et les outils de labour, il a dû modifier ses pratiques culturales. Son sens aigu de l’observation, le soin qu’il a apporté à mettre en œuvre sur ses propres parcelles les recommandations issues de la recherche, lui ont permis de suivre pas à pas les étapes qui ont conduit à la maîtrise du semis direct dans des couvertures permanentes, et d’améliorer considérablement les résultats de son exploitation (augmentation des rendements, diminution des dépenses d’intrants, diversification des cultures, constitution d’un élevage très performant...). Membre influent de la Coopérative locale, il a joué un rôle déterminant dans l’adoption massive de ces techniques par les autres agriculteurs (plusieurs centaines de milliers d’hectares en quelques années). Aussi modeste que studieux et entreprenant, il est sans cesse à la pointe du progrès technique. Les actions du ministère des Affaires Étrangères Au regard de la place qu’il occupe au cœur des débats de société et de développement, l’environnement constitue désormais un enjeu politique et socio-économique vital. Pour relever le défi, la France se doit de : • assister ses partenaires en matière de gestion des ressources naturelles, supports de leurs économies (forêts, grands fleuves, eaux souterraines, ressources halieutiques, sols, diversité biologique…); • parfaire la connaissance scientifique des phénomènes et l’analyse approfondie des interactions homme-nature; • privilégier des actions de terrain exemplaires et reproductibles. l’aridité et la sécheresse, l’agression des pluies et l’érosion, la dégradation de la matière organique des sols… constituent de fortes contraintes au développement de l’agriculture. 2 Ses objectifs sont : • chez ses partenaires, contribuer à la conservation de l’environnement, appuyer la mise en œuvre d’opérations de développement durable, former des compétences; • pour elle-même, valoriser son expertise et élaborer des positions françaises sur l’enjeu environnemental; • en multilatéral, rechercher les cohérences dans les actions afin de mieux rentabiliser les ressources financières disponibles. Dans son engagement pour la protection de l’environnement, la France intervient dans le cadre des conventions internationales issues de la Conférence de Rio sur le développement durable (1992). Burkina Faso Comores Amidou habite la région de l’Oudalan à l’extrême nord du Burkina Faso. Cette région est caractéristique du milieu sahélien. Une pluviosité moyenne annuelle de 350 à 400 mm, en une seule courte saison des pluies, permet d’y pratiquer à la fois une culture extensive de mil et un élevage plus ou moins mobile. Plusieurs groupes ethniques d’agro-pasteurs (à la fois agriculteurs et éleveurs), sédentaires ou semi-nomades, coexistent dans l’espace régional. Si certaines unités de production familiales se consacrent prioritairement à l’élevage et d’autres à l’agriculture, la plupart combinent ces deux activités. Les semi-nomades, contrairement aux sédentaires, s’installent pendant la saison sèche sur les terres cultivables afin d’y concentrer la fumure animale grâce au parcage des troupeaux; pendant la saison des pluies, ils habitent à l’écart des champs pour que les animaux n’occasionnent pas de dommages aux cultures. Le mil et le lait constituent les bases de l’alimentation. La vente d’animaux permet d’acheter sur les marchés les compléments céréaliers nécessaires et les autres biens de consommation. En période difficile, des activités complémentaires, telles que la cueillette (de nombreux végétaux sauvages permettent de diversifier et de compléter la ration alimentaire) et surtout le travail des hommes lors des migrations lointaines, peuvent être indispensables à la survie de la famille et à la reconstitution du cheptel. Les Comores sont un archipel de l’océan Indien, au large de Madagascar et des côtes africaines. C’est là qu’Ahmed vit avec sa famille, sur l’île la moins peuplée, Mwali, dans un village de pêcheurs au bord du lagon. En fait, comme beaucoup de Comoriens, Ahmed est pêcheur-agriculteur : le produit de la pêche lui permet de compléter la nourriture habituelle, ou d’acheter du riz et d’autres denrées lorsqu’il vend suffisamment de poisson : c’est ce qu’on appelle la pêche vivrière. Ahmed ne peut pas prendre la mer tous les jours avec sa « galawa », une pirogue à deux balanciers : elle est trop fragile lorsque la mer est agitée, pendant la période de mousson par exemple, d’octobre à mars. Il pêche surtout la nuit, sur le récif, avec une lampe à pétrole. Il utilise des lignes de fond ou de traîne et parfois des nasses ou un filet pour ramener des thons, des bonites et des « capitaines ». Avec sa femme, il cultive aussi un potager où il récolte du manioc, des ignames, du maïs, des légumes. De plus, la cocoteraie plantée autour du village permet d’utiliser les fruits pour se nourrir, pour fabriquer de l’huile, du savon, des bougies, et les palmes pour tresser les toits et les cloisons des maisons. Ahmed espère pouvoir bientôt obtenir un prêt pour acheter une « japawa », une barque en plastique insubmersible dont le gouvernement encourage l’achat pour développer la pêche artisanale. Elle lui permettra de sortir plus souvent et d’aller plus loin. Sri Lanka Cameroun Gaston Bivina habite Ekali, un village de la zone forestière camerounaise, situé à environ 50 km de Yaoundé. Dans le village coexistent deux systèmes d’arbitrage : celui des notables et celui de l’administration territoriale. Comme tous les anciens, Gaston fait partie du Conseil des notables. Comme bon nombre de petits planteurs tropicaux, Gaston, gros travailleur, a planté, année après année, des cacaoyers, « capital arbres » capable de donner un revenu régulier lui permettant de marquer son droit sur le sol par rapport à ses voisins. Sa femme se consacre aux cultures vivrières, qui peuvent se vendre mais qui sont surtout produites pour nourrir la famille (manioc, banane plantain…). Jusqu’à une date récente, Gaston a bien maîtrisé son activité agricole, en cohérence avec sa force familiale de travail. De 1956 à 1991, la collecte du cacao était effectuée sous le contrôle de l’administration camerounaise qui fixait un prix garanti aux producteurs. À présent, la libéralisation des échanges laisse les petits planteurs seuls face aux commerçants. En outre, la tendance actuelle à la baisse des cours du cacao est pour eux un élément supplémentaire de fragilité. Depuis quatre ans, la vie de Shantala et de sa famille est en train de changer. Shantala travaillait dans une grande plantation de thé, qui est la culture dominante au Sri Lanka. Les plantations de thé ont été créées par les Anglais au siècle dernier. Le thé est d’excellente qualité car il pousse sur des terrasses au flanc des montagnes où le climat tropical est tempéré par l’altitude et où la pluviosité est importante (plus l’altitude est élevée, plus le thé est corsé), mais sa culture demande beaucoup de travail. La cueillette – tâche délicate – se fait toute l’année; ensuite, il faut rouler les feuilles, les laisser fermenter puis les sécher avant de les trier et de les mettre en sacs. Le salaire journalier est de quelques francs et, pour pouvoir vivre, toute la famille de Shantala travaillait à la plantation. Il y a quelques années, Shantala a entendu parler d’une association qui proposait une plantation en locationvente aux journaliers acceptant de se constituer en coopérative. Le thé serait commercialisé, sans intermédiaires, selon le principe du commerce équitable (Fair Trade) : un prix minimum, toujours supérieur aux coûts de production, garanti aux coopérateurs, un contrat conclu sur plusieurs années. Ce principe correspond à une demande de plus en plus grande des consommateurs et donne aux producteurs une sécurité qui leur permet de faire des projets. Après avoir hésité, Shantala a rejoint la coopérative et aujourd’hui elle ne le regrette pas : ses revenus ont augmenté, elle possède quelques parts de la plantation, elle peut faire soigner ses enfants quand ils sont malades et envisage même d’envoyer les plus jeunes à l’école. Mais le travail reste dur… Ouganda Samwiri habite la région du Kigezi au sud-ouest de l’Ouganda. Cette région d’altitude, située sur l’équateur, est très vallonnée et très peuplée. Comme la plupart de ses compatriotes, Samwiri se consacre aux cultures vivrières qui lui permettent de nourrir sa famille. Grâce à des sols très fertiles et à deux saisons des pluies, il récolte toute l’année du manioc, des patates douces et des bananes plantains et deux fois par an des haricots, du maïs et du millet. Mais, dans sa région, les agriculteurs sont très nombreux et ne possèdent, comme lui, que peu de terres : moins de deux hectares en général. Il n’y a pas de machines agricoles, sa femme et ses enfants l’aident beaucoup pour les travaux des champs. Les parcelles cultivées se trouvent à flanc de montagne, sur des terrasses. Leur village, lui, est au fond de la vallée. Le Kigezi tout entier ressemble à un jardin bien entretenu. Il espère que les récoltes seront meilleures cette année, après la sécheresse du début de l’année 1997 et les pluies torrentielles du début de 1998. Pour améliorer ses revenus, et à condition de trouver de la terre à acheter, il a le projet de planter des caféiers : son pays est le premier producteur de café d’Afrique. UN CLIMAT ÉQUATORIAL, DES CLIMATS TROPICAUX Ici, ce sont les pluies qui caractérisent les climats. Les tropiques connaissent trois grands climats types avec cependant des variantes régionales. • Le climat équatorial humide est caractérisé par des températures élevées et constantes, des précipitations abondantes tout au long de l’année, une humidité atmosphérique permanente. C’est le domaine de la grande forêt, des plantations pérennes (palmier à huile, cacaoyer, caféier, hévéa), des tubercules (igname, patate, manioc), des bananiers et du maïs. Les paysans y pratiquent souvent des cultures itinérantes sur brûlis ou ils y exploitent des agroforêts. Il s’étend sur une zone couvrant environ cinq degrés de part et d’autre de l’équateur : en Amérique sur le bassin amazonien (Brésil, Surinam, Guyane française, Guyana, Venezuela); en Asie du Sud-Est et Pacifique sur des portions de la Péninsule malaise, de l’Indonésie, de la Nouvelle-Guinée, et de nombreuses îles du Pacifique; en Afrique orientale sur les côtes du Kenya et de la Tanzanie et la côte est de Madagascar, en Afrique occidentale et centrale sur le bassin du Congo (Zaïre) et la bande côtière du golfe de Guinée. • Le climat tropical soudanien, aux deux saisons très contrastées (sèche et humide), décline une succession de climats qui assure une transition progressive entre les deux extrêmes. C’est le domaine des savanes et des grandes cultures annuelles : coton, maïs, sorgho, riz pluvial… Il est aussi le lieu de prédilection d’une association active et intensive entre l’agriculture et l’élevage. Il s’étend entre les 5e et 15e degrés de latitude nord et sud : sur l’Amérique du Sud, l’Afrique centrale et occidentale. Il plonge même jusque dans certaines parties de l’Asie du Sud-Est. On l’observe également à des latitudes plus élevées et dans la zone équatoriale d’une grande partie de l’Afrique orientale. 3 Java La famille Prawiro habite Kedung, l’un des hameaux du village de Wukirsari, situé dans la province de Yogyakarta, en Indonésie. L’essentiel de son activité économique se confine au hameau. Un réseau d’entraide particulièrement actif lie tous les habitants de Kedung, pour des travaux tels que la construction et l’entretien des réseaux d’irrigation. Les Prawiro se rendent à Wukirsari pour le marché (tous les cinq jours), ou pour régler des problèmes administratifs avec le chef de village. Une fois par an, à l’occasion du lebaran (fin du ramadan), toute la famille se rend à Yogyakarta, capitale culturelle de Java. Bien que de nationalité indonésienne, Monsieur Prawiro se considère avant tout comme javanais. Avec 8 ares de pekarangan (jardin) et 50 ares de sawah (rizière) en pleine propriété, qu’ils cultivent toute l’année sans interruption, les Prawiro bénéficient d’un statut social élevé. Ils font partie des 15 % de privilégiés tirant l’essentiel de leurs revenus de l’activité agricole. À Kedung, seulement une famille sur deux possède un jardin et une rizière. La petitesse des surfaces en propriété oblige de nombreuses familles à recourir au travail à l’extérieur pour compléter leurs revenus. • Le climat tropical sec, voire aride, intéresse les zones désertiques chaudes et semi-arides. Ces zones ont une pluviosité faible et aléatoire souvent concentrée en une saison très courte. Sans irrigation, les cultures pluviales y sont risquées ou pratiquement impossibles (Afrique du Nord, Arabie, Iran, Inde du Nord-Est, Australie et une partie de la côte Pacifique de l’Amérique du Sud). C’est le domaine des oasis, des grands élevages transhumants, des nomades et du miraculeux mil pénicillaire qui peut se contenter de quelque 300 à 450 millimètres de pluie. Il est généralement centré sur les tropiques du Cancer et du Capricorne (Sahel africain, Nordeste du Brésil en sont les exemples les plus connus). Les tropiques, une histoire Dès que les hommes ont commencé à travailler la terre, ils ont donné naissance à des communautés agricoles et des civilisations qui se sont développées différemment. Avec le temps, les écarts se sont creusés. L e développement de l’agriculture dépend des sols et des climats. Mais l’histoire explique également les différences et les inégalités qui caractérisent aujourd’hui les agricultures de notre planète. Ainsi, ce sont seulement quelques sociétés d’Eurasie, d’Afrique et d’Amérique qui connurent les outils métalliques à l’âge du bronze. Ce sont les mêmes qui, à l’âge du fer, remplaceront couteaux, petites haches, pointes de bâtons à fouir par des outils beaucoup plus performants comme les haches, les houes, les bêches, les faucilles et seront les premières à trouver comment utiliser l’énergie animale (araire, bât, charrette). Certaines sociétés humaines vivront aussi des bouleversements considérables, notamment du fait de la colonisation. Les écarts se creuseront encore davantage dans la seconde moitié du XIXe siècle. Les agricultures de l’Europe du Nord-Ouest et de l’Amérique du Nord connaîtront un véritable essor grâce aux progrès de l’industrie, à l’apparition de nouveaux La Révolution verte de financement du crédit…); les résultats furent spectaculaires. En Asie, la Révolution verte a permis notamment à de grands pays de devenir autosuffisants en riz (Inde, Indonésie, Bangladesh et Philippines) ou de passer au rang de grands exportateurs (Vietnam, Birmanie). Mais la Révolution verte atteignit cependant ses limites en deux ou trois décennies. Elle ne put être appliquée partout et s’est limitée à des pays à fort potentiel de production (abondance d’eau, sols et climats favorables), à forte densité de population, dotés d’infrastructures de communication, d’institutions facilitant le fonctionnement de l’économie de marché, de politiques publiques très incitatives. En outre, elle a été préjudiciable pour l’environnement : remontée des nappes phréatiques et salinisation des sols dans les zones intensément irriguées, pollution par les intrants chimiques, etc. L’insuffisance alimentaire chronique en Asie inquiète particulièrement les États-Unis après la Seconde Guerre mondiale. La menace de pénuries alimentaires, voire de famines, dans les pays en développement alerta en effet les pays du Nord sur la nécessité d’accroître la production agricole. L’Inde devient alors un enjeu stratégique dans cette course production-population. Des fondations nord-américaines (Rockefeller, Ford…) entreprennent, à la fin des années cinquante, d’aider à la modernisation des agricultures en Asie, mais aussi en Amérique latine où éclataient des conflits agraires générés par la pauvreté. Elles investirent alors dans le transfert, vers les régions tropicales, des techniques agricoles conçues en Occident. C’est la « Révolution verte » dont l’objectif fut avant tout de mettre au point des variétés de blé et de riz très productives, en utilisant massivement engrais et pesticides. La communauté internationale mène alors parallèlement une politique agricole d’accompagnement considérable, finançant massivement des infrastructures d’irrigation, mettant en place un appareil parapublic de grande envergure (organismes de recherche publique, de vulgarisation, entreprises publiques d’approvisionnement en intrants, offices publics d’achat, organismes publics matériels mécaniques à traction animale ou à vapeur (faucheuses, moissonneuses, batteuses…) et à la révolution des transports (chemins de fer, bateaux à vapeur) qui permettra aux paysans d’écouler plus facilement et plus rapidement leur production. Au XXe siècle, l’apparition de nouvelles techniques et de nouveaux outils (motorisation, sélection, fertilisation minérale, traitements) fera exploser ces inégalités au profit des pays développés. Ces plantes tropicales qui ont bouleversé notre alimentation Les premiers contacts des voyageurs européens avec les pays asiatiques, puis la découverte des Amériques et de l’Afrique ont fait connaître au vieux monde de nombreuses plantes exotiques, dont certaines ont occupé progressivement une place considérable dans l’alimentation et l’agro-industrie. Dès avant la Révolution française, le thé, le café, la pomme de terre, le sucre de canne, le coton et l’indigo avaient dépassé en Europe le stade de simple curiosité exotique : nobles et bourgeois avaient pris goût aux breuvages stimulants et à la consommation des autres plantes qui se répandaient dans la population. 5 À partir du XIXe siècle, avec le développement des transports à vapeur et la généralisation de l’expansion coloniale, de nouveaux produits tropicaux devinrent accessibles, puis essentiels, pour les économies européennes : c’est le cas du riz, des huiles végétales (d’arachide, de palme), de la banane et de plusieurs autres fruits tropicaux, mais aussi de l’hévéa avec la très forte croissance du marché des pneumatiques. Plus récemment, avec l’« acclimatation » du maïs aux conditions tempérées, c’est encore une plante tropicale qui occupe une place de choix dans l’économie agroalimentaire des pays tempérés. Les tropiques, une diversité... Les tropiques constituent une source inestimable de diversité biologique. La vie et la reproduction s’y poursuivent tout au long de l’année. Le froid, le gel n’empêchent jamais la croissance continue des plantes et la prolifération incessante de toute sorte d’organismes vivants. Diversité et alimentation Si la diversité biologique est cruciale pour le devenir des écosystèmes « naturels », elle l’est plus encore pour les agriculteurs, éleveurs et pêcheurs et plus généralement pour les humains, leur alimentation et leur cadre de vie. Parmi près de 13000 plantes alimentaires connues, 4800 sont cultivées mais quatre espèces seulement représentent près de 50 % de l’alimentation mondiale (le blé, le maïs, le riz et la pomme de terre) et 18 plantes en représentent 80 %. Ce faible nombre de plantes sur lesquelles repose notre alimentation ainsi que la diminution de leur diversité génétique pourraient entraîner des risques importants en cas d’épidémie ou de changement climatique. La mondialisation des échanges, jointe aux progrés dans la sélection de variétés à haut rendement, aboutit à ce que l‘alimentation de l’humanité repose sur un petit nombre de plantes, d’animaux, de plus en plus fragiles. Chaque pays, chaque culture dispose d’un patrimoine de savoir-faire agro-alimentaire et culinaire important qui s’appuie sur cette diversité et la spécificité des plantes et animaux, et permet de les valoriser. La diversité est donc à la fois biologique et culturelle. Les forêts tropicales, un des berceaux de la diversité Elles ne couvrent que 6 % de la superficie du globe et pourtant les forêts tropicales concentrent plus de la moitié des espèces animales et végétales de notre planète. On estime que, dans ces espaces tropicaux, seulement 10 % des organismes vivants sont décrits et qu’il resterait environ 30 millions d’espèces à identifier, surtout des insectes. Un hectare de forêt porte, en moyenne, de 50 (en Asie) à 300 (en Afrique) espèces de grands arbres accompagnés de plus de deux mille autres plantes. Les milieux forestiers de la ceinture tropicale du globe ont également une particularité par continent, notamment parce qu’ils abritent une faune spécifique comme le gorille en Afrique, le panda en Asie, sans compter les orchidées d’Amérique du Sud, etc. Pour l’humanité, les forêts tropicales jouent un rôle fondamental. Elles lui apportent directement nourriture, pharmacie et matières premières et, plus globalement, ont un rôle essentiel pour la protection des sols, la régulation des eaux. En outre, elles marquent leur influence sur les climats. Mais l’utilisation souvent abusive de ces espaces (par exemple par une exploitation mal organisée et un défrichement régulier pour les besoins de l’agriculture) a conduit, depuis un demi-siècle, à une forte réduction des superficies de forêts tropicales ou à une perturbation de leur diversité. Chaque année, 15 à 20 millions d’hectares disparaissent (l’équivalent d’un terrain de football chaque seconde), signifiant l’extinction probable de très nombreuses espèces. 6 O n estime à environ 13 millions le nombre d’espèces végétales et animales présentes sur la terre, sur lesquelles 1,75 million ont été identifiées à ce jour. Les forêts tropicales à elles seules concentrent la moitié des espèces de notre planète. Cette diversité biologique est essentielle à la survie de l’humanité. C’est au sein de cette diversité qu’ont été découvertes, domestiquées et sélectionnées les espèces de végétaux cultivés et d’animaux élevés. Mais c’est aussi dans cette diversité qu’on été trouvés et pourront être trouvés les gènes nécessaires à l’amélioration de ces espèces. Pourtant, des pertes irréversibles sont déjà à déplorer. On estime, par exemple, qu’au cours du XXe siècle il y a eu une réduction de plus des trois quarts des potentialités d’utilisation de Le Fonds français la diversité variétale dans les cultures. pour l’environnement mondial Comment favoriser le développement économique et social des pays pauvres tout en préservant l’environnement de la planète? Telle est la préoccupation visée par la France lorsqu’elle crée en 1994 le FFEM (Fonds français pour l’environnement mondial), spécialement destiné à promouvoir les activités qui concilient ou réconcilient développement économique et Le radeau des cimes Depuis une dizaine d'années, grâce à cette invention française, les scientifiques peuvent accéder au sommet des arbres de la forêt tropicale, situé entre 30 et 45 mètres au-dessus du sol. Ce radeau des cimes représente une occasion unique de collecter micro-organismes, échantillons botaniques et échantillons d'insectes dont beaucoup étaient méconnus jusqu'alors. Ces données permettent de mieux comprendre l'écologie des forêts tropicales. Les expéditions mises en place à cette occasion rassemblent des chercheurs de nombreux pays et représentent une aventure humaine et scientifique passionnante. Trois missions sur cinq ont eu lieu en Guyane française dont la forêt fait l'objet de nombreuses études. préservation des grands équilibres de notre planète. Le FFEM finance, dans une cinquantaine de pays du monde situés majoritairement en Afrique, des projets exemplaires de cette préoccupation dans quatre domaines : la protection de la biodiversité, la lutte contre l’effet de serre, la protection des eaux internationales et la préservation de la couche d’ozone. 7 Les tropiques, ... des ressources Les ressources naturelles comme l’eau, les sols, les formations végétales, les animaux (terrestres et aquatiques)… font aussi partie de notre patrimoine. J usqu’à une époque récente, ces ressources naturelles étaient généralement utilisées de façon harmonieuse. Mais la population humaine, en raison de son nombre croissant et des technologies qu’elle développe, influence fortement le devenir des ressources qui sont vitales au développement de l’agriculture des pays du Sud. Il devient donc urgent de trouver des solutions techniques qui permettent de les préserver. Il est également indispensable de proposer des solutions visant à donner aux usagers de ce patrimoine les moyens de le valoriser et de le gérer durablement, en conservant des pratiques et organisations sociales garantes de la survie des communautés rurales. L’eau recouvre les trois quarts de la surface du globe, mais 97,5 % est salée. Sur les 2,5 % restants, une bonne partie est souterraine, est inaccessible ou gelée dans les glaciers. Les sols, une ressource capitale mais en danger Tous les sols cultivables ne sont pas mis en valeur et certaines régions disposent encore de réserves (essentiellement en Amérique latine et en Afrique) dont l’inventaire et la classification sont cependant largement avancés et leurs aptitudes agricoles connues. Toutefois, ces ressources sont limitées en surface et inégales en valeur et en répartition; 11 % seulement des sols de la planète ont une véritable vocation agricole, les autres étant trop humides, trop secs, trop escarpés, trop peu profonds, chimiquement inaptes ou gelés en permanence. Bien que l’érosion soit au départ un phénomène naturel, l’influence de l’homme peut en aggraver et accélérer les processus. Actuellement, cette dégradation des sols affecte plus ou moins sérieusement près de 2 milliards d’hectares de terres arables et de pâturages dans le monde, soit une superficie plus vaste que celle des États-Unis et du Mexique réunis. Elle est due notamment à la désertification et à la destruction de la végétation qui ne protège plus les sols des méfaits du ruissellement et du vent. Une fois détruit, le sol est souvent irréversiblement perdu et la zone concernée peut demeurer stérile. En outre, les pluies tropicales sont généralement plus abondantes et agressives qu’en régions tempérées et les sols – particulièrement après déboisement – arrivent difficilement à absorber de telles quantités d’eau : le ruissellement et l’érosion peuvent alors prendre des formes catastrophiques. Par ailleurs, la mise en culture sous irrigation artificielle de zones arides provoque des processus parfois lents (échelle du millier d’années), mais parfois très rapides (échelle de la dizaine d’années), de dégradation chimique des sols par salinisation. Actuellement, on estime que 20 à 30 millions d’hectares parmi les plus productifs sont sérieusement affectés. L’accès à l’eau pour tous L’eau est indispensable à la plupart des activités humaines, économiques, sociales ou culturelles. Or, les ressources en eau sont limitées et l’eau est inégalement répartie : les deux tiers de l’humanité ne disposent pas d’eau saine. L’eau insalubre fait des milliers de victimes dans le monde pendant que la croissance démographique fait reculer le volume disponible par habitant. Depuis 1950, ce volume a diminué de moitié en Amérique du Nord et des trois quarts en Afrique. La pénurie d’eau touche aujourd’hui 230 millions de personnes dans vingtsix pays. Avec l’augmentation de la demande, les pays, les foyers, l’industrie et l’agriculture se disputent tous l’eau. Si L’eau est peu fréquemment rare, elle est très souvent insalubre ou inaccessible. Dans une ville comme Douala au Cameroun (10 mètres de précipitations annuelles) seules 50 000 personnes, sur plus de 2 millions, ont accès à une eau potable. 8 Dans les années à venir, cela risque de s’amplifier. D’ores et déjà, l’accès à l’eau est un facteur supplémentaire de conflits. La Conférence de Paris sur l’eau et le développement durable qui s’est tenue en mars 1998 a permis à plus de 80 pays de venir témoigner de l’importance de cette bataille de l’eau. Ils ont posé les principes d’une gestion durable de la ressource permettant de contribuer au développement des pays tropicaux : priorité à accorder au développement des capacités humaines plutôt qu’aux grands projets souvent sans lendemain, nécessité d’une gestion au plus près du terrain qui associe tous les groupes sociaux, et enfin, dans ce but, échange d’expériences en réseau qui doit fonder la coopération internationale dans le domaine de l’eau. Les communautés locales et la gestion de leurs ressources Élevage : mieux combattre les tsé-tsé La glossine ou « mouche tsé-tsé » véhicule des parasites (trypanosomes) aux effets pathologiques graves sur les hommes (« maladie du sommeil ») mais aussi sur le bétail (amaigrissement, chute de lait, avortement, mortalité, incapacité à l’effort, etc.). Les pertes qui en résultent, estimées à 1,5 milliard de dollars par an, freinent considérablement le développement de l’agriculture mais aussi l’approvisionnement en protéines (viande, lait). Ces maladies ou trypanosomoses sont transmises généralement par la piqûre d’une mouche (il y a 31 espèces ou sous-espèces de tsé-tsé en Afrique) préalablement contaminée avec le sang parasité d’un mammifère infecté. Le bétail peut être traité et guéri s’il n’est pas trop gravement atteint et les experts estiment qu’on pourrait élever 33 millions de bovins supplémentaires sur le continent africain. La FAO pense qu’actuellement 60 millions de bovins et 100 millions de petits ruminants sont exposés au risque. La lutte est dirigée à la fois contre les tsé-tsé et contre le parasite. Elle associe le contrôle de l’insecte à une gestion raisonnée de la maladie (thérapie, sélection d’animaux tolérants, etc.). Pour faire face à ce défi, le Cirad s’est orienté vers le contrôle local des tsé-tsé par des méthodes simples, souples, propres et gérables par les populations rurales : pièges, écrans attractifs, imprégnation insecticide du bétail (devenant des pièges vivants). Il a également investi dans la mise au point d’un vaccin original anti-effet pathogène du parasite. Il s’est, par ailleurs, engagé dans des méthodes d’identification rapide des milieux favorables aux tsé-tsé et fréquentés par le bétail, méthodes associant imagerie satellitaire et enquêtes de terrain permettant de spatialiser les zones à risques parasitaires et leur gestion. Préserver les ressources aquatiques En Asie, des millions de gens tirent la majorité de leurs protéines alimentaires des ressources aquatiques. Les pêcheries marines et continentales fournissent près de 30 % des protéines animales de la région. En Afrique, cette proportion est de 21 %, en Amérique latine de 8 %, et en Asie de plus de 50 %. Environ 30 % du produit mondial de la pêche est transformé en farine de poisson pour le bétail ou la pisciculture et n’est pas destiné à la consommation humaine. Environ 60 % des prises mondiales sont pêchées par les pays en développement. Or la pêche a aujourd’hui atteint ses limites naturelles. Alors que les pêcheurs des pays du Nord utilisent des techniques industrielles et modernes, ceux des pays en développement sont équipés de flottilles artisanales. Il en résulte une surexploitation des stocks aquatiques et une concurrence inégale sur une même ressource. Si l’on n’y prend pas garde, la situation de ces stocks dans le monde risque de se détériorer et de ne plus se renouveler. Les actions du ministère de l’Environnement Garant des grandes conventions internationales signées dans le domaine de l’environnement, le ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement est aussi un partenaire de terrain pour les pays en développement. Son action repose principalement sur la recherche, l’information et le recueil de données. C’est ainsi que, dans le cadre de la lutte contre la désertification, il aide l’Observatoire du Sahara et du Sahel, participe à l’Organisation météorologique mondiale, et forme des techniciens au sein d’ONG africaines. Ses interventions peuvent être très diverses : cycles d’études sur la gestion environnementale de la Patagonie; aide au classement de la palmeraie de Errachidia, dans le Sud marocain; lutte contre l’érosion marine des côtes méditerranéennes; développement d’un projet d’agroforesterie au Brésil pour lutter contre l’effet de serre… Mais toutes participent de la même volonté de faire de la protection de l’environnement un défi collectif et non un obstacle au développement. 9 Au Zimbabwe, comme dans de nombreux pays d’Afrique, la cohabitation des agriculteurs et de la faune sauvage n’est pas toujours pacifique. Les activités humaines ont réduit et fragmenté l’espace dans lequel la faune avait l’habitude de se déplacer. Privés de l’accès à l’eau, les animaux sauvages dévastent par leur passage les champs pour aller s’abreuver. Parfois même, ils pillent les greniers des villages et déclenchent la colère des villageois. Chaque année, un cinquième des récoltes peut être détruit. L’objectif est donc de trouver un équilibre afin que les animaux et les humains puissent se partager l’espace en toute quiétude. C’est dans cet esprit qu’a été lancé le projet de conservation de la biodiversité dans la vallée du Zambèze. Les paysans acceptent de mieux respecter l’habitat naturel des animaux. En compensation, la faune, sans être mise en péril, paie un tribut en nature. Sa valorisation, bien gérée, se fait sous différentes formes et contribue au développement des villages et au mieux-être des habitants. En négociant des quotas de prélèvement, on augmente les produits et les revenus locaux issus de l’exploitation de la faune, on met notamment de la viande de brousse à la portée des villageois (qui manquent de protéines). Convaincus de la nécessité de protéger la faune sauvage, les villageois participent aux concertations et aux négociations. Le regard qu’ils portent sur leur environnement s’est modifié. D’autant que les paysages et la faune protégés peuvent se prêter au développement d’un écotourisme dans la région (autre source de revenus importante) ainsi qu’à la chasse sportive. Des formations à la gestion des ressources naturelles ont donné aux responsables locaux les moyens d’élaborer une politique de développement dynamique et durable où chacun trouve son intérêt. Ce projet mené par le Cirad et financé par l’aide française (ministère des Affaires étrangères, FFEM) montre la voie d’une entente écologique possible entre développeurs et protecteurs. Les tropiques, un enjeu Actuellement, plus de 800 millions de personnes souffrent de sous-alimentation chronique. La sécurité alimentaire est menacée dans de nombreux pays par la rapidité de la croissance démographique et la généralisation de la pauvreté. A Le droit de s’alimenter Il n’y a pas de droit de l’homme plus fondamental que celui de s’alimenter. En 1948, la Déclaration universelle des droits de l’homme reconnaissait que toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation. La sous-alimentation (manque de nourriture) fait bien plus de victimes que les famines sans faire la une des journaux télévisés. Elle devient critique lorsque le besoin énergétique minimum n’est pas assuré (de 1600 à 1800 calories par personne et par jour) avec de fortes disparités selon le sexe, l’âge, le poids ou le mode de vie. La malnutrition (carences multiples, en protéines, fer, vitamines…) entraîne des maladies spécifiques qui affaiblissent les individus, les rendent plus vulnérables aux autres maladies courantes. Elle freine la croissance des enfants, y compris leur développement intellectuel. Ainsi, le manque de vitamine A est lié à l’augmentation de la mortalité infantile. Elle est aussi souvent responsable de la cécité des enfants. L’anémie, due en majorité au manque de fer, est le problème le plus répandu, avec 2 milliards de personnes touchées dans le monde. La malnutrition affaiblit les facultés intellectuelles et la productivité, et elle est l’une des causes principales de la mortalité maternelle dans les pays en développement. ujourd’hui, malgré les progrès spectaculaires réalisés dans l’agriculture et dans les politiques publiques au cours des cinquante dernières années, et malgré un certain ralentissement de la croissance démographique, plus d’un tiers de l’humanité souffre de malnutrition liée à des carences en minéraux et vitamines essentiels. Même lorsque la nourriture est largement disponible, tous les habitants n’ont pas forcément les moyens de se la procurer. Les plus pauvres sont en situation d’insécurité alimentaire. Leur garantir l’accès à la nourriture reste essentiel pour échapper au piège de la pauvreté. La sécurité alimentaire existe lorsque tous les habitants, à tout moment, ont accès aux aliments nécessaires pour mener une vie saine et active, autrement dit quand l’alimentation est disponible tout au long de l’année et à des prix à la portée de chacun. Or, pour des milliards d’hommes, trouver de quoi manger reste un sujet d’inquiétude et l’accroissement de la population mondiale est tel qu’il continue à excéder la disponibilité alimentaire dans de nombreux pays. ROI DES TUBERCULES Le riz, plante mythique de la sécurité alimentaire Le riz est consommé partout dans le monde, et représente le quart des ressources alimentaires de la planète. Sa part est discrète dans l’alimentation très diversifiée des consommateurs des pays les plus développés (5 kg en France). En revanche, le riz est l’aliment de base de plus de la moitié de l’humanité (190 kg par habitant et par an au Myanmar, ex-Birmanie, 145 kg en Indonésie), nourriture traditionnelle dans de nombreux pays (65 kg au Japon), ou plus récemment plébiscité (60 kg au Sénégal, 45 kg au Brésil). Sa consommation augmente particulièrement en Afrique et en Amérique latine où il se substitue aux féculents et autres céréales, mais aussi dans les pays développés, sous une diversité de formes (étuvé, précuit, complet, etc.) et avec une bonne image diététique. Les besoins mondiaux en riz usiné augmenteront au rythme de 2 % par an, essentiellement en raison de l’accroissement de la population. Le riz est une des plus anciennes plantes vivrières cultivées, sa domestication remontant à plusieurs millénaires. Elle s’est effectuée en Asie d’où le riz s’est propagé vers la Chine (sa culture y est attestée depuis trois millénaires avant notre ère) ainsi qu’en Afrique où sa diffusion a été plus limitée. Son introduction dans les autres parties du monde est plus récente. Cultivé sur tous les continents, il est présent des zones tropicales aux zones tempérées et à des altitudes allant jusqu’à 2400 mètres au Népal. Il peut être traditionnellement irrigué mais aussi submergé sous nappe d’eau de parfois plusieurs mètres de profondeur, de mangrove, pluvial (comme les autres céréales), sur brûlis, défriche de forêt, de plaine ou d’altitude. Cette grande variété des modes de culture du riz sculpte et diversifie beaucoup de paysages de notre planète. Savoir développer La famine L’humanité subit le fléau de la famine depuis la nuit des temps : la plus ancienne que l’on connaisse eut lieu en Égypte en 3500 avant J.-C. et la pire fit entre 9 et 13 millions de victimes en Chine entre 1876 et 1879. Les famines sont causées par des facteurs humains comme la guerre et les conflits ethniques, religieux et tribaux, ainsi que par les conditions météorologiques et les cataclysmes naturels. Les populations pauvres ne sont pas aptes à y faire face. Les famines n’ont pas disparu au XXe siècle. Certaines sont restées tragiquement célèbres (1978 dans le Nord-Est du Brésil, 1983 au Sahel, 1984 en Éthiopie, 1989 au Soudan, et 1992 en Somalie). Même si elles se sont raréfiées, les famines ont fait davantage de victimes que les guerres au cours de la dernière décennie. Cependant, les chiffres sont peu élevés comparés au durablement tous ces types de riziculture contribue à améliorer la sécurité alimentaire. La demande croissant très fortement, il est nécessaire d’accroître la productivité tout en luttant contre une pression parasitaire et des ravageurs de plus en plus élevée. Il faut, en outre, élargir l’aire de production à différents milieux. Le Cirad s’est particulièrement impliqué avec ses partenaires dans le transfert auprès des pays du sud de l’ensemble des technologies mises au point. En 1990, il crée notamment des variétés de riz pluvial adaptées à des altitudes supérieures à 1000 mètres en région tropicale. À Madagascar, elles sont cultivées jusqu’à 1500 mètres, avec des rendements de 5 t/ha (1 tonne avec des variétés conventionnelles). Il travaille actuellement sur tous les constituants des systèmes de production à base de riz. Pour appuyer cette démarche, il porte un effort particulier sur la qualité du grain, la lutte contre les ennemis des cultures, les variétés hybrides, la production de semences et les biotechnologies. Le riz possède, en effet, la particularité d’avoir le plus petit génome parmi ceux des graminées cultivées et représente un concentré de l’information génétique retrouvée chez ces dernières. Ce caractère synthétique rend plus facilement accessible le décryptage des gènes (agencement, expression, fonction). nombre de personnes dont le régime alimentaire ne suffit pas à les maintenir en bonne santé. • Aujourd’hui, pour une population mondiale de 6 milliards d’individus : – 10 à 15 millions meurent encore de faim chaque année; – 800 à 850 millions sont sousalimentés, soit une personne sur six; – 1,5 à 2 milliards souffrent de malnutrition, soit une personne sur trois; 11 – 190 millions d’enfants de moins de 5 ans souffrent de carences protéiniques énergétiques. • Sénèque : « On ne peut attendre ni respect de la loi, ni raison de ceux qui ont faim ». • « Seul celui qui a connu la famine connaît le goût des aliments ». Proverbe peul du Nord-Cameroun. Je suis le Manioc, le Roi des Tubercules. Je souffre, mais je suis bien content, Parce que je suis aimé par tout le monde. Ah! Mais surtout par les Camerounais(es). Moi le manioc, Mes feuilles c’est un délice, elles sont découpées et préparées Avec l’arachide ou avec les palmistes; on me donne ce joli Nom de « Kouem »; Oui je souffre. Mais je suis content, parce que je suis le bien-aimé. Mes tubercules sont enlevés et préparés. Là c’est mon propre nom le « Manioc ». Ce n’est pas fini, oui je souffre, mais bien content. On me trempe dans l’eau, je pourris, je sens, On m’attache dans le sac, tout mon jus sort, On me pile, je prends le nom de famille maternelle « Miondo » (Bâton de Manioc), « Mintoumba », « Bobolo ». Oui je souffre, mais bien content. Ce n’est pas fini. Mon jus séché c’est l’amidon pour divers usages. Moi le Roi des Tubercules. Chez mes frères Nigérians, je subis plusieurs transformations Et me donne le nom « Gari ». De mes feuilles aux tubercules passent par mon jus, rien n’est négligé. Oh! quel bonheur. Je suis content, Parce que je suis vraiment le Roi des Tubercules. Endale Shylot, Cameroun Nourrir les villes du Sud La planète compte chaque année environ 60 millions de citadins supplémentaires. D’ici 2025, ceux-ci représenteront plus de 60 % de la population mondiale. Cette explosion urbaine est particulièrement marquée dans les pays du Sud. Elle y provoque une brutale remise en cause des systèmes traditionnels de production, d’échange et de consommation. Dans les villes et leur proche périphérie, se développent alors de nouvelles formes d’agriculture, d’élevage, d’agroforesterie mais aussi de nouveaux métiers spécialisés pour transformer et distribuer les aliments et restaurer les citadins. Cette agriculture périurbaine joue un rôle croissant dans l’approvisionnement des villes, notamment en produits frais. Elle procure aux citadins qui s’y consacrent de nouveaux emplois et revenus. Cette proximité offre aux agriculteurs et éleveurs des facilités d’accès au marché, aux services, aux produits intermédiaires de la ville. Dans ce contexte, et bénéficiant de ces opportunités, les systèmes de production et d’échanges évoluent vite et constituent un vivier d’innovations intéressantes. Mais la proximité de la ville se traduit aussi par une forte pression foncière sur les terres cultivables, par des difficultés de cohabitation entre citadins, agriculteurs ou éleveurs, par un accroissement des risques sanitaires pour les aliments. Néanmoins, si l’agriculture en zone périurbaine reste confrontée à de multiples difficultés, elle invente chaque jour de nouvelles façons de réconcilier l’urbanisation et l’agriculture. Les tropiques, un défi Nourrir la planète tout en préservant les ressources naturelles, mieux insérer l’économie des pays tropicaux dans l’économie mondiale compteront parmi les défis vitaux du troisième millénaire. L’agriculture est au cœur de ces enjeux importants qui nous concernent tous. D’ révolution doublement verte, plus productive que la première et vraiment « verte » : un accent particulier est maintenant donné à la gestion des ressources naturelles qui, pour l’agriculture, sont avant tout des facteurs de production (sol, eau, ressources génétiques…). Il s’agit donc aujourd’hui de mieux prendre en compte la spécificité des milieux naturels et la diversité des types d’agriculture qui leur correspondent pour proposer de nouvelles techniques de production et de nouveaux modes de gestion des ressources naturelles. Mais il s’agit aussi de proposer des innovations institutionnelles dans les domaines de la gestion de l’espace et du foncier, de l’eau, de la biodiversité, des ici 2025, notre planète devrait compter près de 9 milliards d’habitants dont 7 milliards se trouveront dans les zones tropicales. Pouvons-nous produire assez, assurer à chacun l’accès à une alimentation suffisante, de façon durable et cela sans porter atteinte à l’environnement? Autant de questions qui poussent la communauté internationale à promouvoir à l’échelle de la planète un développement durable, et l’idée d’une nouvelle révolution agricole dite cette fois L’Agence française de développement Pour l’AFD, la préservation des patrimoines de ressources naturelles dans les projets de développement devient une priorité. Outil principal de financement de l’aide française au développement, l’AFD prend en compte dans tous les projets qu’elle finance la dimension environnementale à travers des études d’impact et de définition de mesures correctives. Ces études précèdent les décisions de financement et la mise en œuvre de tous les projets d’infrastructures. COMMERCE INTERNATIONAL : CONJUGUER AGRICULTURE ET ENVIRONNEMENT L’Organisation mondiale du commerce (OMC) ouvre un nouveau round de négociations en fin d’année 1999. L’organisation internationale, chargée de négocier un nouvel accord commercial mondial et de trancher les litiges commerciaux entre États, va devoir, pour la première fois, prendre en compte des critères sociaux et environnementaux. Les accords commerciaux devront rester compatibles avec les accords internationaux existants destinés à Dans le domaine de la production agricole, l’AFD, en compagnie des principaux partenaires de l’aide française, va apporter son appui technique et financier à un vaste programme de développement des méthodes agro-écologiques : ces techniques très prometteuses doivent permettre à des économies paysannes de la zone intertropicale de sortir de la spirale d’appauvrissement continu dans lequel elles sont prises. protéger certaines espèces animales, assurer la qualité des eaux ou limiter la circulation des déchets toxiques… Mais pas seulement. Lorsqu’elle règle les différends commerciaux entre États, l’OMC devra prendre en compte les principes de précaution et de pollueurpayeur dont pourrait se justifier un pays. Enfin et surtout, ces règles devront contribuer au développement durable des pays en développement et ne pas se contenter simplement de faciliter le développement des exportations des pays développés. 12 Des techniques agro-écologiques pour une agriculture respectueuse de l’environnement Dans les années 1970, les agriculteurs du sud du Brésil avaient dû trouver des solutions pour faire face à l’érosion des sols due à la grande culture mécanisée du soja. Ils eurent l’idée de laisser sur place les résidus de leur récolte jusqu’au semis suivant, sans plus labourer. Cette pratique de semis direct fut un succès. Elle échoua cependant dans les zones intertropicales de savanes herbeuses massivement défrichées du centre-ouest brésilien, les cerrados. Dans ces régions, au climat plus chaud et plus humide, la couverture était beaucoup plus difficile à maintenir. Dès 1983, le Cirad effectue un travail de pionnier en adaptant aux cerrados ces techniques de semis direct sur couvert végétal à la grande culture mécanisée. Aujourd’hui, trois millions et demi d’hectares de la zone tropicale brésilienne sont couverts par des systèmes de culture à base de soja, de riz, de maïs, de cotonnier et de fourrage utilisant ces nouvelles pratiques agricoles : en protégeant en permanence le sol (soit par une couverture morte constituée de résidus de récolte, soit par une couverture vive constituée par une plante différente de celle cultivée) et en À propos de gestion agro-écologique L’idée centrale de la gestion agro-écologique des sols est de reproduire, dans les champs cultivés, les mécanismes qui assurent l’équilibre des forêts avec leurs milieux : protéger le sol en permanence contre les pluies torrentielles et les températures excessives qui caractérisent les climats tropicaux; recycler les éléments nutritifs du sol avant qu’ils ne soient drainés hors de la portée des cultures grâce à un enracinement profond; favoriser le développement et le maintien des organismes vivants du sol (insectes, vers, micro-organismes), qui contribuent très activement à l’« aérer », à produire de l’humus et à solubiliser les éléments minéraux des matières organiques. semant directement à travers cette couverture à l’aide d’outils adaptés, on supprime les labours qui, en zone tropicale humide, peuvent détériorer très vite les sols s’ils sont inconsidérément réalisés. Ces techniques offrent de nombreux avantages, puisqu’elles permettent notamment à l’agriculteur de réduire la pénibilité de son travail et d’accroître la productivité. Elles ont, en outre, des effets bénéfiques pour l’environnement : recyclage des nutriments par les plantes de couverture; préservation du sol et de l’eau; limitation de la déforestation (par stabilisation des exploitations). Aujourd’hui, le Cirad se consacre à l’adaptation de ces techniques pour la zone tropicale dans plusieurs pays en voie de développement, notamment à Madagascar. émissions de gaz à effet de serre… et de mettre en place des agricultures durables et plus productives. Dans les pays en développement, qui dépendent fortement sur le plan économique de l’agriculture, augmenter l’utilisation durable des ressources agricoles et promouvoir le développement rural demeurent les moyens les plus rapides et les plus satisfaisants pour lutter contre la pauvreté et améliorer la sécurité alimentaire. L’agriculture, les forêts et les pêches sont donc de puissants moteurs du développement. La France de l’outre mer constitue dans la relève de ce défi un atout majeur. Elle permet en effet la réalisation, sur ces terres tropicales, de recherches et d’expérimentations dont les résultats sont importants pour l’avancée des connaissances scientifiques mais aussi pour la contribution au développement des pays de la zone intertropicale. 13 Les tropiques, des nourritures Au Burkina Faso… Les femmes écrasent le mil à l’aide d’un pilon. Dans un chaudron, elles cuisent ensuite cette farine avec de l’eau. Cette bouillie s’appelle le tô ou bien la pâte. On la mange avec une sauce à base de concentré de tomates, de gombos (condiment), de piments, de poisson séché, de haricots secs... Cette sauce est préparée dans un mortier, le tô zunlugo. En Chine… Les Chinois découpent leurs aliments (légumes, poissons...) en petits morceaux à l’aide d’un fendoir et d’un billot. Ils les cuisent à feu vif dans un wok. Ces préparations se consomment avec du riz (cuit aujourd’hui dans un autocuiseur électrique), et de la sauce de soja, du gingembre, de la ciboule et d’autres épices. Les aliments oubliés du monde Certaines plantes alimentaires traditionnelles pourraient bien devenir les aliments de demain. On a ainsi redécouvert l’amarante et le quinoa, des graines provenant, à l’origine, des Andes et considérées comme sacrées par les Incas du Pérou et les Aztèques du Mexique. Elles sont toutes deux nourrissantes et d’utilisations diverses. Elles sont également vivaces : l’amarante prospère dans les climats chauds, le quinoa résiste aux gelées et pousse jusqu’à des altitudes de 4 000 mètres. (Extrait de « L’ampleur des besoins », Atlas des produits alimentaires et de l’agriculture, FAO.) 14 Aux quatre coins du monde, les cuisines et les recettes ne se ressemblent pas, les ustensiles de cuisine ne sont pas les mêmes. À chacun sa façon de faire. Au Mexique… Dans un mortier de pierre appelé le molcajete, les Mexicains préparent une sauce à base de légumes, d’épices, de piments... qui sont écrasés avec un pilon. Cette sauce accompagne généralement une viande (dinde, poulet...), bouillie séparément dans une marmite, la cazuela. Les repas sont toujours accompagnés par les tortillas (galettes de maïs), désormais achetées toutes prêtes. En Inde… Les vendeurs ambulants de Delhi, en Inde, proposent une multitude de plats. Le riz au safran est un mets très répandu car beaucoup d’Indiens sont végétariens. Le riz est cuit et coloré avec du safran dans une grande marmite, puis servi avec une sauce à la tomate, très épicée. On le consomme sur place, pesé et servi sur des assiettes. En France… Le « poulet-frites » est un plat bien apprécié en France. On fait rôtir le poulet dans un four électrique. Les frites (achetées surgelées) sont cuites dans une friteuse électrique. Les repas sont traditionnellement accompagnés de pain, acheté en boulangerie. 15 En Thaïlande… On mange souvent dans la rue, mais aussi sur la plage. Des marchandes transportent dans un panier les produits frais (poissons, crevettes, brochettes de volailles, légumes) prêts à être cuisinés et dans un autre le brasero dont elles raniment la flamme pour les grillades qu’on leur demande. Le tout est servi dans des petits bols ou des assiettes en carton.