L`évolution récente de la mortalité à la Réunion en regard des
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L`évolution récente de la mortalité à la Réunion en regard des
ESPACE, POPULATIONS, SOCIETES, 2004-2 pp. 397-413 Christine CATTEAU DRASS de La Réunion 2 bis, avenue Georges Brassens BP 50 97408 Saint-Denis Messag cedex 9 [email protected] Pierre BAZÉLY DSDS Centre Delgès Hauts de Dillon BP 656 97263 Fort-de-France Cedex [email protected] avec la collaboration d’Émilie NARTZ VATC, DRASS Réunion L’évolution récente de la mortalité à la Réunion en regard des tendances en Antilles-Guyane et en Métropole INTRODUCTION Bien qu’éloignés géographiquement, la Réunion dans l’océan Indien en zone « Afrique », les Antilles-Guyane dans l’océan Atlantique en zone « Amérique », ces colonies devenues départements depuis 1946 ont connu des histoires comparables, avec de profonds changements économiques et sociaux, mais avec des évolutions démographiques et épidémiologiques assez dissemblables. Ainsi, la croissance annuelle moyenne de la population élevée à la Réunion, proche de 2% par an (1,8 en 2001), 1 est bien ralentie en Guadeloupe1 (0,98) et surtout en Martinique (0,66), alors que la Guyane se distingue par un accroissement particulièrement fort, de 3,56% par an. Ce sont tous les quatre des départements jeunes, avec une proportion de moins de 15 ans importante, 23% en Martinique, 25% en Guadeloupe et 28% à la Réunion. Ils connaissent une immigration importante des pays de la zone, pour lesquels ils sont particulièrement attractifs, dans un contexte social difficile. Les taux de chômage y sont Les données pour les Antilles et la Guyane concernent l’année 1999. 398 élevés, la situation étant particulièrement critique à la Réunion où l’on frise des records. En 1997-98, on y a dépassé 38% de chômeurs [ INSEE, Enquête Emploi], ce qui correspond à 101 000 personnes à la recherche d’un emploi. Depuis lors, cette proportion diminue, elle est de 35% en 2002 ; mais la situation de l’emploi reste fragile et handicapée par le nombre important de personnes qui se portent chaque année sur le marché du travail. Ainsi le nombre de bénéficiaires - que ce soit du RMI ou de la CMU - à la Réunion est le plus fort de tous les départements français, et le seuil de pauvreté est près de 2 fois inférieur à celui de métropole [INSEE,2003]. L’état de santé a connu une amélioration sensible dans l’ensemble des DOM, mais ceux-ci connaissent des problèmes sanitaires spécifiques, qui pourraient à terme, et particulièrement pour la Réunion, ralentir la progression de l’espérance de vie. Malgré une baisse importante de la mortalité infantile [Barbieri, Catteau, 2003], et une diminution des maladies infectieuses, on constate une forte surmortalité persistante à la Réunion, notamment masculine, conséquence de comportements à risque. Cet article se propose d’abord de présenter l’évolution de la mortalité et de ses causes à la Réunion avec les observations faites dans les 2 îles des Antilles françaises, et la Guyane. Ensuite nous examinerons les spécificités de la morbidité et de la mortalité réunionnaises par rapport aux autres DOM et à la Métropole. Enfin nous analyserons l’évolution récente de la surmortalité réunionnaise et de ses causes, et comment les hommes et les femmes sont touchés différemment. Progrès ralentis de l’espérance de vie à la naissance à la Réunion L’espérance de vie à la naissance est un excellent indicateur de santé publique, qui résume les conséquences de la baisse de la mortalité, en éliminant les effets de la structure par âge de la population. À cet égard, il permet des comparaisons significatives, plus que le taux brut de mortalité, influencé par la proportion de personnes âgées dans la population. Or, cette espérance de vie a fortement progressé dans l’ensemble des DOM ces vingt dernières années, se rapprochant peu à peu de la moyenne nationale, qui est en 2001 de 75,5 ans pour les hommes, et de 83 ans pour les femmes. Mais la progression, remarquable jusqu’en 1990, s’est ralentie par la suite, de façon très perceptible à la Réunion, ce qui place aujourd’hui ce département en toute dernière place, même après la Guyane. Pour l’année 2001, l’espérance de vie à la naissance est estimée à la Réunion à 79,4 ans pour les femmes et à 71 ans pour les hommes, l’écart avec la métropole est ainsi de 4 ans et demi pour les hommes et de 3 ans et demi pour les femmes. Dans le même temps la Martinique a égalé pour les hommes l’espérance de vie de la Métropole, et l’a dépassée pour les femmes. Pour la Guadeloupe et aussi en Guyane l’écart est bien moindre avec la Métropole que celui observé à la Réunion. Les progrès accomplis par les femmes ont été nettement supérieurs à ceux des hommes dans un premier temps, ainsi entre les périodes 1951-55 [Festy, Hamon, INED, 1983] et 1986-87, les femmes ont gagné 22,9 ans, tandis que les hommes ne voyaient leur Tableau 1. Évolution des espérances de vie à la naissance dans les DOM et en Métropole Réunion Métropole Guadeloupe Martinique Guyane Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes 1951-1955 1965-1969 1981-1982 1986-1987 1990 1995 1998 2001 47,5 ans 57,2 ans 64,8 ans 67,2 ans 68,8 ans 69,8 ans 70,1 ans 71,0 ans 53,4 ans 63,9 ans 72,6 ans 76,3 ans 78,2 ans 78,4 ans 78,5 ans 79,4 ans 64,2 ans 67,4 ans 70 ans 71,3 ans 72,6 ans 73,8 ans 74,8 ans 75,5 ans 70,1 ans 74,8 ans 77,8 ans 79,3 ans 80,8 ans 81,9 ans 82,4 ans 83,0 ans 62,5 ans 67,3 ans 63,3 ans 67,4 ans 58 ans 68 ans 75,3 ans 71,9 ans 76,1 ans 65,3 ans 70,8 ans 78 ans 73,3 ans 80 ans 67,5 ans 70,2 ans 78,3 ans 72,9 ans 79,8 ans 65,5 ans 63,9 ans 73,8 ans 74,6 ans 73,9 ans 74,4 ans 80,3 ans 74,7 ans 81,0 ans 70,1 ans 78,4 ans 74,8 ans 81,7 ans 75,5 ans 82,3 ans 72,4 ans 80,1 ans Sources : INSEE TER 2002-2003, INED « Travaux et Documents » Cahier N°100. 1983, pp.20-21. 399 espérance de vie progresser que de 19,7 ans. Depuis lors, ces dix dernières années, la tendance s’est inversée, et les progrès sont devenus plus favorables aux hommes, ceci se vérifie pour la Réunion comme pour la Métropole ou les Antilles, mais les progrès accomplis par les hommes sont moins importants ces dernières années à la Réunion. En effet, depuis 1990, l’espérance de vie des hommes n’y a progressé que de 2,2 ans contre 2,9 ans en Métropole, 2,6 ans en Guadeloupe et Martinique et 6,9 ans en Guyane, ce qui fait de la Réunion le département où l’écart d’espérance de vie à la naissance entre hommes et femmes est le plus important. MORTALITÉ LIÉE À LA PROCRÉATION Les bons résultats obtenus pour l’espérance de vie à la naissance sont corrélés à la baisse continue, depuis les années 70, de la mortalité infantile (Tableau 2). Cette baisse a été spectaculaire à la Réunion, partie bien plus haut que les autres DOM (en 1965, la mortalité infantile y était deux fois plus élevée qu’en Martinique) [Barbieri, Catteau, 2003]. Tableau 2. Évolution des taux de mortalité infantile dans les DOM et en Métropole (pour 1000 naissances vivantes) Années 1965 1971 1975 1981 1985 1991 1995 2000 Réunion Guadeloupe Martinique Guyane Métropole 82,3 47,7 25,7 12,7 10,4 7,2 7,0 5,6 52 51,2 37,5 21,4 19,2 8,1 42 37,2 33,2 20 15,1 8,7 59 53,8 48,5 42,5 21,3 17,9 7,9 7,1 12,4 21,9 17,2 13,6 9,7 8,3 7,3 4,9 4,5 Source DRASS Statistiques 1985-2001 En ce qui concerne la mortalité périnatale qui comprend la mortalité néonatale et la mortinatalité, après la baisse sensible enregistrée depuis les années 80, on constate une stabilisation dans les années 96/97, voire une aggravation du phénomène (Tableau 3), ce qui n’est pas sans inquiéter les pouvoirs publics. Tableau 3. Taux de mortalité périnatale dans les DOM et en Métropole (pour 1000 naissances vivantes et morts nés) Années 1987 1997 Guadeloupe Martinique Guyane Réunion Métropole 20,8 17,4 17,8 14,5 29,8 19,5 15,2 10,9 9,9 7,0 Source DRASS Statistiques 1985-2001 Classiquement, dans la lutte contre la mortalité infantile, les premières mesures de vaccination et d’hygiène ont pour effet de faire baisser les décès d’enfants liés à des facteurs « exogènes », infections, maladies, survenant tout au long de la 1ère année ; c’est ce qui s’est passé dans l’ensemble des DOM durant les années 60-70. Dans un 2ème temps, la mise en place d’un meilleur suivi de la mère vient à faire baisser la part des décès liés aux causes endogènes. Ainsi, entre 1980 et 1990, on assiste à une diminution du « poids » des pathologies périnatales dans la mortalité infantile à la Réunion, 400 Figure 1. Enfants prématurés et de petits poids (% de naissances) - Enquête périnatale 1998 Source : INSERM, DRASS Tableau 4. Les taux de mortalité maternelle - Décès de femmes en couche pour 1000 naissances vivantes Périodes 1987-1990 1993-1997 1998-1999 Guadeloupe Martinique Guyane Réunion Métropole 51,4 46,9 18,1 54,4 24,4 17,3 64,6 79,3 35,6 27,0 26,0 18,1 9,5 10,6 10,2 Source INSERM CépiDc- Centre d’Epidémiologie sur les causes médicales de décès (ex SC8) de 46% à 34%. Par la suite, les décès survenant au-delà de la 1ère semaine continuant de diminuer, le poids des pathologies périnatales recommence à augmenter, pour atteindre 52% en 1997-99 ; on note un phénomène similaire pour la période 1993 à 1995 aux Antilles, où la mortalité périnatale retrouve le niveau des années 80 : 53 % de la mortalité infantile ; en Guyane ce poids a presque triplé et en représente 60 %. C’est dans ce contexte de mortalité périnatale élevée que les résultats de l’enquête nationale périnatale, étendue à l’ensemble des DOM en 1998, ont été analysés. On a pu ainsi mettre en évidence un pourcentage significativement plus élevé d’enfants prématurés, et de petits poids, en particulier en Guyane et à la Réunion, où ils sont quasiment le double de ceux de Métropole [Bazely, Catteau, 2001] (Figure 1). Parmi les facteurs de risque, on a noté que les mères étaient plus jeunes, vivaient plus souvent seules au moment de la grossesse : 22% à la Réunion contre 7 % en Métropole (28 % en Guyane et 40% en Martinique). À la Réunion, l’état de santé de la mère est préoccupant, avec une part importante de l’hypertension (16% des mères), ainsi que celle des retards de croissance intra-utérins (10%). Parallèlement, un suivi renforcé des grossesses est exercé par les différents services à la Réunion, ce qui conduit à diminuer fortement les décès maternels pour lesquels un faible nombre de cas sont relevés. L’indicateur était particulièrement élevé dans les années 1987-90 surtout dans les Antilles et en Guyane, où il continue à se détériorer en 1993/97 (Tableau 4). La situation des Antilles s’améliore au contraire rapidement, la Martinique rejoint même la Réunion dès 1993/97, mais à un niveau encore 2 fois supérieur au taux métropolitain de la même période. À la Réunion la mortalité maternelle diminue plus précocement puisqu’elle était de 200 dans les années 60, de 170 dans les années 70, de 45 au début des années 80. Elle semble s’être stabilisée au niveau atteint ce jour par la Guadeloupe et la Martinique. 401 Figure 2- La modernisation épidémiologique à la Réunion Source : DRASS SPÉCIFICITÉS DE LA MORTALITÉ ET DE LA MORBIDITÉ À LA RÉUNION La Réunion connaît une forte augmentation du nombre de décès depuis quelques années (3200 en 1993, 3620 en 1997, 3781 en 2000 et 4000 en 2002). Ce phénomène devrait s’accentuer dans les années à venir, ainsi les projections de l’INSEE annoncent pour 2030 entre 8000 et 9000 décès, soit un doublement des effectifs actuels [Lardoux, 2003]. Cette augmentation du nombre de décès est liée au vieillissement de la population et à l’accroissement de la longévité. Elle fait suite à une période de régression spectaculaire entre les années 50 et 80, portée en particulier par la diminution des pathologies infectieuses et parasitaires, de 14% à 3% des décès. C’est ce qu’on a appelé la transition épidémiologique, qui a débuté d’une situation où le paysage épidémiologique était dominé par l’omniprésence du paludisme et des maladies infectieuses : leur part dans la mortalité était de 47% en 1931-33, 15% en 1950 et de 2,7% en 1981-83 ; ces maladies passent alors du 1er au 10ème rang ; pendant le même temps, ce sont les maladies de civilisation, maladies cardiovasculaires, tumeurs et accidents qui deviennent les plus 2 Enquête emploi INSEE fréquents, en ordre rapproché de ce qu’on observe dans la majorité des pays industrialisés [Catteau, Hamon, 1989]. Après avoir fait sa « révolution épidémiologique », on peut dire que la Réunion est entrée dans la 3ème phase de sa transition épidémiologique qu’on peut qualifier de « modernisation épidémiologique » (Figure 2). Aujourd’hui, les maladies de l’appareil circulatoire sont responsables de près d’un tiers des décès, constituant ainsi la première cause de décès à la Réunion, et les tumeurs arrivent en seconde position et représentent un décès sur cinq. Nombreux aussi sont les accidents et autres morts violentes responsables d’un décès sur dix (figure 3). La comparaison avec la situation observée aux Antilles-Guyane, peut être intéressante ; ainsi, ces 3 DOM ont enregistré une augmentation relative de leur nombre de décès, de 5060 en moyenne en 1991-92 à 5600 en 1997- 99. Cette augmentation, de + 10%, qui accompagne un vieillissement de la population, est équivalente à celle qu’on a enregistré à la Réunion dans le même temps. Or, la Réunion apparaît, lors de l’analyse des taux comparatifs2, comme le départe- 402 Figure 3- Situation en 1999, selon les chapitres de la Classification Internationale des Maladies 14% Maladies de l'appareil circulatoire 30% 4% Tumeurs Causes extérieures de traumatismes et empoisonnements 6% Maladies de l'appareil respiratoire Maladies de l'appareil digestif 6% Maladies endocriniennes Troubles mentaux 10% Ensemble des autres causes 20% 10% Source INSERM, SC8 ment d’outre-mer le plus en difficultés sanitaires. Mises à part les maladies infectieuses, en effet, les taux de mortalité y sont partout les plus élevés. (Tableau 5). Le calcul d’un indice de surmortalité qui rapporte le taux de la Réunion considéré comme base 100 à celui de chaque autre département d’outre-mer permet de quanti- Tableau 5. Taux comparatifs de mortalité pour 100 000 habitants, 1993/1997 Causes médicales Guadeloupe H Maladies infectieuses et parasitaires Tumeurs 42,9 Maladies de l’appareil circulatoire Maladies de l’appareil respiratoire Maladies de l’appareil digestif 23 Guyane Réunion Métropole H F H F H F H F 39,6 18,2 80,2 71,9 31,8 17,1 26,7 12,5 283,6 131,3 281,4 139,4 289,3 121,4 336,3 135,9 363,5 164,9 Maladies endocriniennes, troubles immun. Troubles mentaux dont alcoolisme Maladies du système nerveux F Martinique 42 44,4 46,9 34,8 42 42,7 58,1 54,6 24,3 21,6 41,5 27,9 14,5 3,5 35,4 25,1 12,7 4,1 37,4 16,4 16 4,2 69,3 48,4 21 9 23,6 7 19,5 1,6 34,9 15,3 33,4 17,9 32,2 12,2 39,3 17,4 25,5 18,6 366,1 278,2 339,1 249,3 366,7 296,9 572,1 368,4 360,3 234,1 76 33,1 73,6 41,4 70,2 26,9 200,8 76,4 100,3 48,7 60,2 33,9 46,4 29 45,4 23,9 82,1 49 56,7 33,1 dont cirrhose alcoolique Causes extérieures de traumatismes dont suicides Autres maladies 23,4 9,2 13,5 3,3 14,3 7 34,5 19,9 22,3 8,3 131,9 16,5 85,8 45,8 5,3 86,6 89 16 96,4 30,9 148,1 48,1 133,6 4,5 18,5 9 33,2 65,7 113,4 103,8 162,4 47,2 105,6 7,7 31,6 96,2 97,6 49,5 10,1 71,6 TOTAL TOUTES CAUSES 1164,8 700,4 1081,3 639,3 1225,0 883,2 1184,1 674,1 Source INSERM CépiDC 763,7 1684,8 403 Figure 4. Indices comparatifs de surmortalité Réunion autres DOM- 1993/1997 - Sexe masculin 3,5 3,0 2,5 2,0 1,5 en do cr ., nu tri ,m M 0,0 To ta l es al in fe ct ie us 0,5 Si da T ét ab um eu .,t r ro ub s .im Tr m ou . bl es m en ta ux a lc M oo al lis du m sy e st ne ap rv pa eu re x il ci rc ap ul pa at oi re re il re sp ira to ap ire pa re il di ge st if C C au irr ho se s se ex té rie ur es do nt su ic Au id e t re s m al ad ie 1,0 M al Guadeloupe Matinique Guyane Source INSERM SC8 Figure 5. Indices comparatifs de surmortalité Réunion autres DOM- 1993/1997 - Sexe féminin 7,0 6,0 5,0 4,0 3,0 2,0 ta l To M m bl es ou Tr au x al co ol al ism du e sy st ap ne pa rv eu re il x ci rc ap ul pa at oi re re il re sp ira ap to ire pa re il di ge sti f Ci r Ca rh os us e es ex té rie ur es do nt su ic id A ut e re sm al ad ie m rs ub .im en t Guadeloupe Matinique Guyane M al e nd o cr ., nu tri , m M ét a al b. ,t in f ro Tu m eu Si da ec tie u 0,0 se s 1,0 Source INSERM SC8 fier l’importance de cette surmortalité, différente pour chaque sexe. Le chiffre 1indique un niveau de mortalité identique entre le département de référence, la Réunion, et le département d’outre-mer comparé. Un indicateur inférieur à 1 indique qu’on est en présence d’un cas de sous-mortalité réunionnaise. À l’inverse, un indicateur supérieur à 1 révèle un niveau de mortalité plus important pour la Réunion. Toutes causes confondues, la mortalité est plus importante à la Réunion, qui arrive au 1er rang pour les maladies circulatoires, respiratoires, les maladies mentales, les suicides mais aussi les maladies endocriniennes (Figures 4 et 5). La surmortalité de la Réunion s’observe pour tous les grands cha- pitres de pathologies, sauf pour les maladies infectieuses et parasitaires, plus particulièrement le sida. Pour les tumeurs, les maladies du système nerveux et des organes des sens et pour les causes extérieures de traumatisme l’indice proche de 1 nous indique une mortalité comparable entre tous les DOM. Par contre une forte surmortalité est enregistrée pour les maladies liées à une consommation excessive d’alcool (cirrhose ou psychose alcoolique), pour les décès par maladies de l’appareil respiratoire ainsi que pour certaines causes extérieures dont les suicides. Les Réunionnais sont également en tête des DOM en ce qui concerne les maladies circulatoires (1,5) et les maladies respiratoires où la surmortalité est de 2 fois et demi, près de 3 fois 404 Figure 6. Nombre de nouveaux cas et de cas cumulés de sida par année de diagnostic 35 300 30 250 25 200 20 150 15 100 10 50 0 0 19 87 19 88 19 89 19 90 19 91 19 92 19 93 19 94 19 95 19 96 19 97 19 98 19 99 20 00 5 nouveaux cas supérieure à celle que connaissent les hommes aux Antilles-Guyane. La Réunion épargnée par le sida Aux Antilles et en Guyane, le poids des pathologies infectieuses et transmissibles en terme de morbidité est très supérieur à ce qu’il peut être à la Réunion. La dengue endémique, avec flambées épidémiques, est surtout fréquente aux Antilles. L’apparition des formes graves de la maladie s’est accompagnée d’une augmentation du nombre des sérologies positives diagnostiquées chaque année. À la Réunion, le paludisme, omniprésent dans les années 50 (4 décès sur 10), a officiellement été éradiqué en 1970, malgré la présence dans l’île du vecteur de la maladie, le moustique anophèle ; un contrôle sanitaire strict aux frontières permet de contenir les cas importés. La poliomyélite, la rougeole, la diphtérie ont soit disparu, soit fortement diminué sous l’effet des campagnes de vaccination. Ce sont ce qu’on appelle « les maladies de civilisation », ou encore « les maladies de confort » qui dominent maintenant. Certaines pathologies telles l’insuffisance rénale, l’hypertension, le diabète, ont une prévalence particulièrement élevée (selon les résultats de l’enquête REDIA menée par l’INSERM en 2000, 10% de la population réunionnaise est diabétique, 18% des personnes âgées de 30-69 ans, ce qui est 3 fois plus que la moyenne métropolitaine). L’impact de l’alcoolisme reste considérable, cas cumulés il est à l’origine de nombreux passages à l’acte (suicides, violences..) et de syndromes d’alcoolisme fœtal ; on note également une prévalence élevée de l’asthme et des maladies respiratoires en général. L’enquête ISAAC menée localement en 2001 sous l’égide de l’INSERM a montré une forte prévalence de l’asthme chez les jeunes scolarisés en 5ème et 4ème, 19% soit près de 2 fois plus que les résultats de la même enquête en Métropole. Mais, au contraire des autres DOM, la Réunion reste peu concernée par les maladies transmissibles telles les infections virales sexuellement transmissibles (HTLV1, VIH) en termes de morbidité et de mortalité. En effet, malgré les risques particuliers encourus par la population (mères jeunes, fécondité élevée, multi-partenariat), l’épidémie de sida y apparaît bien maîtrisée. Un Programme Régional de Santé (PRS) mis en place par les pouvoirs publics dans les années 90 a eu comme objectif de prévenir la transmission du virus. Et, 20 ans après l’apparition des premiers cas, le nombre de nouveaux cas stagne aux alentours de 20 à 30 chaque année. En file active 490 patients sont suivis en 2000 dans les hôpitaux de la Réunion, l’augmentation moyenne en nouveaux cas déclarés est de + 10% chaque année comme en Métropole. Mais, encore en 2001, le nombre de cas cumulés de sida par millions d’habitants (333) place le département au dernier rang national (840 pour la France entière) (Figure 6) [INVS, 2001]. 405 Tableau 6. Taux comparatifs de mortalité par sida (pour 100 000 habitants) 1988-92 Réunion Martinique Guadeloupe Guyane Métropole 1993-97 2000 Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes 2,7 15,2 17,8 44,7 8,5 0,5 4,4 6,9 8,6 1,4 4,5 15,7 21,4 45,9 10,6 1,5 4,6 8 41,3 2,4 2 6,8 7,8 2,7 0 3,2 6,2 0,7 Source INSERM-CépiDC En ce qui concerne la mortalité par sida (Tableau 6), la Réunion, partie de plus bas, voit ses taux comparatifs augmenter davantage que les autres DOM ou la Métropole : entre 1988/90 et 1993/97, ils doublent pour les hommes, ils triplent pour les femmes, alors que dans le même temps les taux stagnent pour la Martinique et la Guadeloupe ; signalons le cas de la Guyane où la mortalité des femmes explose et rejoint celle des hommes. On comptait à la Réunion 43 décès en 1988/1992 (dont 35 hommes et 8 femmes) imputables au sida et au VIH, 94 décès en 1993/1997, (dont 70 hommes et 24 femmes). Ainsi, deux fois plus d’hommes et trois plus de femmes sont morts du sida et du VIH entre 1993 et 1997 qu’entre 1988 et 1992. Entre 1997 et 1999, par contre, le nombre de décès annuel est en diminution, et sur trois ans on n’a enregistré que 21 décès, dont seulement 3 femmes. Malgré cette évolution qu’on peut qualifier de défavorable, les Réunionnais restent 3 fois moins touchés que les Martiniquais, 4 fois moins que les Guadeloupéens et 9 fois moins que les Guyanais ; les Réunionnaises sont encore plus préservées. Outre les actions nombreuses de prévention mises en place, on explique ce retrait par une typologie de l’épidémie différente à la Réunion, où elle s’est développée lentement, mieux maîtrisée et avec un profil européen, au contraire des Antilles, où elle a touché en priorité la transmission hétérosexuelle. DES DIFFÉRENCES DE MORTALITÉ ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES DE LA RÉUNION Les taux comparatifs calculés en 1997/99 mettent les maladies de l’appareil circulatoire en tête. Mais, à structure d’âge identique, ces taux sont en baisse chez les hommes par rapport à la période 1988-92, tandis que pour les femmes, ces taux sont plutôt en aggravation. Cette évolution favorable pour les hommes et défavorable pour les femmes s’observe pour plusieurs causes, notamment pour les décès par maladies endocriniennes et diabète (Tableau 7). Les taux de décès par tumeurs qui arrivent en 2ème position, quel que soit le sexe, sont nettement plus élevés pour les hommes que pour les femmes. Les décès par tumeurs diminuent cependant légèrement pour les hommes, alors qu’ils sont en augmentation pour les femmes. En particulier, on constate pour les hommes une diminution des tumeurs malignes du pharynx ou de l’œsophage liés à une surconsommation de rhum, et du cancer du poumon. Alors que chez les femmes, le cancer du poumon ainsi que celui de l’utérus, ou du sein continuent à s’aggraver. En troisième position on note la présence des maladies respiratoires. Malgré une nette augmentation pour les femmes et une légère baisse pour les hommes, le niveau de mortalité demeure plus élevé chez les hommes. À la Réunion, si les accidents mortels sont fréquents, le nombre total d’accidents corporels est en diminution, résultat des mesures gouvernementales pour une plus 406 Tableau 7. Taux comparatifs de mortalité Hommes et Femmes 88/92 Hommes 97/99 88/92 Femmes 97/99 Maladies infectieuses et parasitaires 27,8 21,8 16,6 17,7 Tumeurs Cancers des VADS Cancer de l’intestin Cancer du poumon 298 54,9 14,4 64,8 269,8 21,2 10,9 55,1 125 4,5 8,5 7,5 149,2 4,5 10,6 9,4 Maladies endocriniennes, nutrition, ... 58,2 45,8 53,8 81,8 Troubles mentaux Psychose alcoolique et alcoolisme 64,2 51,1 49,8 39,9 19, 8 10,8 20,7 9 47 29,7 16,8 24,5 Maladies de l’appareil circulatoire Maladies hypertensives Cardiopathies ischémiques Maladies vasculaires cérébrales 560,6 21,2 123,5 221,3 383,1 21,4 98,6 117,7 384,5 30,8 70,4 154,8 428,4 25,2 76,2 134,9 Maladies de l’appareil respiratoire Asthme et alvéolite allergique 178 19,2 157,3 15,5 72,5 10,9 113,4 9,1 Maladies de l’appareil digestif Cirrhose alcoolique ou s.p. du foie 93,3 46,7 51,2 29,4 57,7 28,2 62,7 19,9 Maladies du système nerveux Anomalies congénitales 2,5 2,2 3 3 Affections période périnatale Symptômes, états morbides mal définis Causes inconnues ou non déclarées 3,4 73,6 13,8 5,5 61,9 35,9 2,7 62,6 7,9 3,8 87,3 2,6 Causes extérieures traumatismes Accidents de la circulation Chutes accidentelles Suicides 137 32,3 20,8 35,4 112,2 24,9 13,9 21,2 45,7 8,6 12,4 8,1 50 5,5 11,6 7,7 Source INSERM CépiDC grande sécurité routière. Les taux comparatifs de mortalité sont ainsi en baisse sur les périodes récentes, à peine supérieurs aux taux métropolitains. Les taux de suicide restent élevés pour les hommes, mais plutôt en diminution. Surmortalité masculine et conduites à risque Une analyse de la surmortalité masculine par âge comparée entre les DOM peut permettre de comprendre les mécanismes d’évolution. Comme on le voit sur les graphiques (Figures 7 à 10), à la Réunion, la surmortalité des hommes est nette dès l’âge de 15-19 ans mais elle ne faiblit pas comme ailleurs entre 25 et 45 ans. Une analyse des causes de surmortalité masculine, faite en rapportant les taux comparatifs observés des hommes à celui des femmes pour chaque cause, permet de mettre en évidence l’ampleur de cette surmortalité des hommes (Tableau 8), et d’y voir en particulier la conséquence de comportements particulièrement à risque à la Réunion des hommes adultes, liés généralement à une consommation excessive d’alcool. Par ailleurs, la Réunion se distingue par un lourd tribut masculin aux accidents de la route : 4 fois plus qu’en métropole en 2000. Le suicide également a une composante fortement masculine à la Réunion (Figure 11). 407 Figure 7. Indice de surmortalité masculine en Martinique-1998/2000 6 ,0 5 ,0 4 ,0 3 ,0 2 ,0 1 ,0 0 ,0 <1an 1 -4 5 -9 1 5 -1 9 2 5 -2 9 3 5 -3 9 4 5 -4 9 5 5 -5 9 6 5 -6 9 7 5 -7 9 8 5 e t + Source : INSERM SC8 et CIM10 Figure 8. Indice de surmortalité masculine en Guadeloupe-1998/2000 6 ,0 5 ,0 4 ,0 3 ,0 2 ,0 1 ,0 0 ,0 <1an 1-4 5-9 1519 2529 3539 4549 5559 6569 7579 85 et + Source : INSERM SC8 et CIM10 Figure 9. Indice de surmortalité masculine à la Réunion-1998/2000 6 ,0 5 ,0 4 ,0 3 ,0 2 ,0 1 ,0 0 ,0 <1an 1 -4 5 -9 Source : INSERM SC8 et CIM10 1 5 -1 9 2 5 -2 9 3 5 -3 9 4 5 -4 9 5 5 -5 9 6 5 -6 9 7 5 -7 9 85 et + 408 Figure 10. Indice de surmortalité masculine en Métropole-1998/2000 6 ,0 5 ,0 4 ,0 3 ,0 2 ,0 1 ,0 0 ,0 <1an 1 -4 5-9 1519 2529 3539 4549 5559 6569 7579 85 et + Source : INSERM SC8 et CIM10 Figure 11. Taux de mortalité par âge pour la Réunion, les autres DOM et la Métropole Mortalité par accident de voiture – 1998/2000 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 0,01 0,01 0 10 20 30 40 50 Guadeloupéens 60 70 80 90 0 20 Guadeloupéennes 40 60 Métropolitain 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 0,01 80 100 Métropolitaine 0,01 0 20 40 Réunionnais Source : INSERM SC8 et CIM10 60 80 Réunionnaises 100 0 10 20 30 40 Martiniquais 50 60 70 Martiniquaises 80 90 409 Tableau 8. Indices de surmortalité masculine dans les DOM et en Métropole, Évolution 1990-2000 Réunion Guadeloupe Martinique Guyane Métropole 1990 1995 2000 1990 1995 2000 1990 1995 2000 1990 1995 2000 1990 1995 2000 Maladies infectieuses Tumeurs dont Cancer du poumon Maladies endocriniennes Troubles mentaux dont Psychose alcoolique 1,7 1,2 2,6 1.8 2.2 1,3 1,6 2 1,6 2,5 1,3 2,1 2,1 1,7 2,4 1,8 2,1 1,9 1,8 1,8 2,1 1,9 2,2 1,9 2,4 2,2 3 2,1 8,6 5,9 5,4 3,2 5,3 5,9 3,1 4,0 3,9 4,1 5,3 8,8 6,6 1,1 0,6 1 1 1,1 1,2 1,1 1 1,1 1,4 1 3,2 2,4 2,8 2,6 2,9 2,7 2,9 2,3 1,2 1,3 1,3 4,7 4,3 5,3 4,1 8,2 12,9 5,0 6,6 3,6 8,0 0,9 5,7 Appareil circulatoire 1,4 0,9 1,4 1,2 1,3 1,4 1,3 1,4 1,5 2,6 1,5 1,6 1,6 Appareil respiratoire 2,5 1,4 1,8 2,4 1,5 1,7 2 1,9 1,7 1,7 1,8 Appareil digestif 1,7 1,5 1,7 2,4 1,4 1,7 2 1,9 1,7 1,7 1,7 2,6 3,9 2,3 3,1 2,1 2,8 2,2 3,8 4,5 4,4 5,5 9,7 5,4 5,2 3,5 6,2 2,9 2,8 4,4 2,8 3,6 5,3 4,1 6,1 3,5 2,6 5,7 2,7 2,1 2,9 1,3 2,9 4,3 3,2 Causes extérieures dont Accidents de la circulation dont Suicides 3 2,3 3,4 3,4 3,5 3,4 3 7,0 L’indice de surmortalité masculine en 1990 a été calculé à partir de la moyenne des décès de 1987 à 1990 pour les Antilles et avec celle des décès 1988-1992 pour la Réunion et la Métropole : l’année 1995 a été calculée à partir de la moyenne 1993 à 1997 pour toutes les régions. Source INSERM CépiDC Parmi les causes les plus importantes de surmortalité masculine on trouve à la Réunion le cancer du poumon. Les femmes semblaient encore préservées de cette maladie il y a 10 ans, comme en Métropole, mais la situation évolue défavorablement pour elles et l’écart se resserre, à l’identique des Antilles. Le cancer du poumon présente une courbe classique d’aggravation avec l’âge, mais à la Réunion les femmes sont encore peu concernées (Figure 12). Par contre les psychoses alcooliques apparaissent un facteur de surmortalité à des âges jeunes à la Réunion, dès 15 ans, et la courbe masculine s’arrondit un maximum aux âges adultes (Figure 13). 410 Figure 12. Taux de mortalité par âge pour la Réunion, les autres DOM et la Métropole Mortalité par cancer du poumon– 1998/2000 1000 1000 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 0,01 0,01 15 25 35 45 55 65 75 85 15 95 25 35 55 65 75 Martiniquais Guadeloupéennes Guadeloupéens 45 85 95 Martiniquaises 1000 1000 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 0,01 15 0,01 15 25 35 45 55 65 Réunionnais 75 85 95 25 35 45 55 65 Métropolitain Réunionnaises 75 85 95 Métropolitaine Source : INSERM SC8 et CIM10 Figure 13. Taux de mortalité par âge pour la Réunion, les autres DOM et la Métropole Mortalité par cancer du poumon– 1998/2000 1000 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 0,01 0,01 15 25 35 45 55 65 75 85 15 95 Guadeloupéennes Guadeloupéens 25 35 45 55 Martiniquais 100 100 10 10 1 1 0,1 0,1 65 75 85 95 Martiniquaises 0,01 0,01 15 25 35 45 Réunionnais Source : INSERM SC8 et CIM10 55 65 75 85 Réunionnais es 95 15 25 35 45 Métropolitain 55 65 75 85 Métropolitaine 95 411 Évolution récente de la surmortalité par rapport à la Métropole : encore des raisons de s’inquiéter Les indices de surmortalité rapportent les taux comparatifs, à structure d’âge comparable, de la Réunion à ceux de Métropole, ainsi un indice supérieur à 1 indique une surmortalité (Tableau 9). Le calcul a été fait sur les 2 périodes et pour chaque sexe, ce qui permet d’analyser l’évolution de la mortalité à la Réunion par rapport à la Métropole, et de mesurer ainsi d’une certaine façon les retombées des mesures de santé publique. Continuent à être plus fréquentes dans l’île, les maladies endocriniennes et de la nutrition, les maladies de l’appareil respiratoire, les maladies hypertensives, les affections de la période périnatale. Tableau 9. Indices comparatifs de mortalité Hommes et Femmes 88/92 Hommes 97/99 88/92 Femmes 97/99 Maladies infectieuses et parasitaires 1,2 1,6 1,5 1,4 Tumeurs Cancers des VADS Cancer de l’intestin Cancer du poumon 0,8 1,4 0,4 0,8 0,9 1,8 0,3 0,8 0,7 1 0,4 0,8 0,8 1 0,5 0,9 Maladies endocriniennes, nutrition, 2,4 1,9 2,5 2,4 1 0,9 1,3 0,9 2,6 6 2,3 5,3 1 5,9 1,1 5,6 2 1,2 1 0,8 Maladies de l’appareil circulatoire Maladies hypertensives Cardiopathies ischémiques Maladies vasculaires cérébrales 1,4 2 1 2,2 1,4 2,1 1,1 2 1,5 3 1,1 2 1,5 2,5 1,4 2,1 Maladies de l’appareil respiratoire Asthme et alvéolite allergique 1,9 4,9 2 5,3 1,6 3,3 1,6 2,8 Maladies de l’appareil digestif Cirrhose alcoolique ou s.p. du foie 1,5 1,8 1,1 1,4 1,6 2,9 1,6 2,4 Anomalies congénitales 0,7 0,8 1 1,3 Affections période périnatale 1,2 2,1 1,3 1,.9 Symptômes, états morbides mal définis Causes inconnues ou non déclarées 1,1 0,6 1,2 0,3 1,3 0,7 1,4 0,3 Causes extérieures Accidents de la circulation Chutes accidentelles Suicides 1,2 1,2 1,1 1,1 1,2 1,2 1 1 0,8 1 0,7 0,7 0,9 0,7 0,8 0,8 Maladies du sang Troubles mentaux Psychose alcoolique et alcoolisme Maladies du système nerveux Source INSERM CépiDc On note que le risque de décès par maladies respiratoires subit une certaine aggravation, l’asthme tue en 1999 cinq fois plus d’hommes réunionnais que d’hommes métropolitains et trois fois plus de femmes. Les Réunionnaises quant à elles décèdent trois fois plus que les Métropolitaines de complications de la grossesse, accouchement et suites de couche. Par contre, et c’est encourageant, les hommes réunionnais voient leur surmortalité par alcoolisme et psychoses alcooliques passer de six fois plus en 1988 /92 à 5,3 fois plus en 1997/99, les femmes enregistrent 412 également une petite baisse, de 5,9 à 5,6. La surmortalité par cirrhoses alcooliques est également en diminution pour les hommes, de 1,8 à 1,4, avec une surmortalité pour les femmes qui passe de 2,9 à 2,4. Enfin, les hommes réunionnais ont un risque supérieur de 20 % de mourir de mort violente à celui des hommes métropolitains alors que les femmes bénéficient d’une légère sous-mortalité (0,8), surtout en ce qui concerne les accidents de la circulation (0,7). Contrairement aux autres pathologies, les cancers continuent à faire moins de victimes à la Réunion qu’en Métropole. L’indice est en légère augmentation, mais il reste inférieur à 1 pour les deux sexes. Les cancers de l’intestin et du poumon représentent un risque de décès plus faible qu’en Métropole, les cancers de l’intestin sont même en diminution pour les hommes. Mais la surmortalité par cancer des voies aéro-digestives supérieures, souvent liée à une consommation excessive d’alcool, est en augmentation. CONCLUSION L’état de santé a connu une amélioration sensible à la Réunion, et l’espérance de vie à la naissance a fortement progressé ces vingt dernières années, le nombre de décès augmente en partie du fait de la croissance de la population et du début du vieillissement. Mais, au contraire des autres DOM, un écart important d’espérance de vie subsiste avec la moyenne nationale, surtout pour le sexe masculin. En raison de la jeunesse de la population, le taux global de mortalité est bas. Toutefois, la mortalité par âge qui élimine l’effet de la structure de la pyramide des âges révèle par rapport à la Métropole une surmortalité en générale réunionnaise quels que soient l’âge et le sexe, pour toutes les causes sauf pour les tumeurs. Une comparaison avec les autres DOM n’est pas favorable à la Réunion. La plus grande surmortalité est observée pour l’alcoolisme : les Réunionnais en meurent 6 fois plus que les Métropolitains, ce qui place l’île au 1er rang des DOM, loin devant la Guyane. La Réunion arrive également en tête des DOM en ce qui concerne les maladies circulatoires (1,6) ; les maladies respiratoires et l’asthme où la surmortalité avec la Métropole est de 2 fois plus alors qu’aux Antilles-Guyane la situation est plu- tôt favorable. En ce qui concerne les causes extérieures et accidents, la Réunion affiche une surmortalité équivalente à celle de la Guadeloupe, mais c’est le département d’outre-mer le plus concerné par les suicides. Cependant, une analyse comparative temporelle des taux de mortalité à la Réunion laisse entrevoir un début d’amélioration : ainsi, entre la période 1988-92 et 1997-99, on enregistre une baisse de la mortalité par maladies de l’appareil circulatoire chez les hommes, une diminution toujours chez les hommes des cancers du pharynx ou de l’œsophage, et du cancer du poumon, de même en ce qui concerne la mortalité par asthme. Pour les femmes, la situation est moins réjouissante, les taux seraient plutôt en aggravation pour les maladies de l’appareil circulatoire, les tumeurs du poumon, de l’utérus ou du sein. Il est probable que les tendances constatées se poursuivent à l’avenir, à mesure qu’évolue la situation socio-économique de la Réunion, et que les politiques de santé et de prévention mises en place depuis quelques années prennent de l’ampleur et sont accompagnées de modifications de comportements. Il est encore trop tôt pour espérer mesurer davantage de changements. 413 BIBLIOGRAPHIE BARBIERI M., CATTEAU C. (2003), L’évolution de la mortalité infantile à la Réunion depuis cinquante ans, Population, vol. 58, n° 2, pp. 229-250. FESTY P., HAMON C. (1983), Croissance et révolution démographique à la Réunion, Paris, PUF, Travaux et Documents de l’Ined, n° 100, 116p. BAZÉLY P., CATTEAU C. (2001), Conditions de santé dans les DOM, juin, DREES, Document de Travail n° 14. INSEE (1998), Enquête DEMO97. CATTEAU C. (2001), Enquête alcool auprès des patients hospitalisés, Novembre 2000, DRASS Réunion. INSEE (2003), Enquête Emploi. CATTEAU P., HAMON C. (1989), La révolution sanitaire et démographique dans le département de la Réunion, mars-avril, SESI, Solidarité Santé- Études Statistiques, n° 2. DRASS, SSR (2001), Les causes médicales de décès à la Réunion en 1999. INSEE (2003), TER 2002-2003. 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