Rue Frontenac - Une bien drôle de façon de protester

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Rue Frontenac - Une bien drôle de façon de protester
Rue Frontenac - Une bien drôle de façon de protester
Dimanche, 05 juillet 2009 15:02
Les supporters du Canadien ont fini par croire que l'équipe leur appartient. Ils se croient
maintenant justifiés et capables de se substituer aux hommes de hockey de l'organisation en
prenant les décisions à leur place.
Non, mais c'est quoi cette histoire de pétition pour ramener Alex Kovalev? C'est quoi cette idée
d'aller marcher devant le Centre Bell dans une ultime tentative pour obliger le Canadien à faire
marche arrière?
L'équipe voudrait le faire qu'elle ne le pourrait pas. Gainey se garde une marge de manœuvre
de 4 millions de dollars pour renégocier les ententes de quelques joueurs actuels, pour ajouter
un autre défenseur à son personnel et pour parer aux coups durs durant la saison.
Comment expliquer que Kovalev n'ait pas encore trouvé une équipe pour l'accueillir? J'en ai
entendu une bonne à ce sujet. Kovalev attendrait que le Canadien se ravise parce qu'il aime
Montréal et qu'il se plaît chez le Canadien, une organisation avec laquelle il aimerait terminer sa
carrière.
S'il tenait tant à jouer à Montréal, pourquoi n'a-t-il pas accepté l'offre très généreuse qui était
sur la table mercredi dernier? À 36 ans, quand on se voit offrir une entente de deux ans se
situant quelque part entre huit et neuf millions de dollars américains, comment peut-on faire la
moue en répliquant: «Je vais y penser...»?
Kovalev a joué gros. Il a cru que le Canadien rajouterait un peu plus d'argent et probablement
une année de plus au contrat. Il a joué et perdu. Point final.
S'il avait aimé autant le public que les fans l'aiment, il n'aurait pas couru le risque de tout perdre
en jouant à la roulette russe. S'il avait eu de la reconnaissance envers Montréal et le Québec,
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qui lui ont pardonné si souvent le fait de disputer un bon match sur trois, il aurait accepté sa
dernière proposition de contrat avec un brin de soulagement.
Souvenez-vous de ce qu'on a dit le jour où Jacques Martin s'est présenté en conférence de
presse à titre de successeur de Guy Carbonneau. On s'est tout de suite demandé comment il
allait s'y prendre pour diriger Kovalev. Comment allait-il pouvoir vivre en harmonie avec lui?
Or, dites-moi, pourquoi faut-il toujours que ce soit à l'entraîneur de s'ajuster à Monsieur K.
pendant que le reste de l'équipe doit se conformer aux directives qu'il reçoit?
On aime tous Kovalev l'artiste, sauf que l'artiste ne monte pas toujours sur les planches. S'il
était le comédien principal dans une pièce de théâtre et qu'il sortait constamment de son texte
pour faire les choses à sa manière, sa carrière ne ferait pas long feu.
Alors, je reprends ma question du début. Pourquoi ces pétitions? Pourquoi cette marche devant
les portes du Centre Bell?
Avez-vous seulement pensé à y aller d'une pétition quand la haute direction de l'équipe a
manigancé sournoisement pour pousser Guy Lafleur vers une retraite hâtive?
L'avez-vous fait quand Patrick Roy, qui vous avait donné deux coupes Stanley presque à lui
seul, a été bêtement ridiculisé sur la patinoire et quand l'équipe n'a rien fait pour le retenir par la
suite?
Sur le plan de la détermination, du désir de vaincre et du profond respect de ce chandail, le
nom de Kovalev ne peut pas être prononcé dans la même phrase que Lafleur. Et Kovalev,
aussi super talentueux soit-il, n'a jamais et n'aurait jamais fait gagner le Canadien comme Roy
l'a fait. Lafleur et Roy lui étaient de plusieurs coches supérieurs parce qu'ils jouaient comme ils
s'entraînaient, le couteau entre les dents.
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Alors, ne pourrait-on pas jouir de l'été en allant faire autre chose que de futiles pétitions? Il sera
toujours temps la saison prochaine de revenir sur la justesse des plus récentes décisions de
Gainey.
Le vestiaire a été assaini. Les cas lourds n'existent plus... Kovalev faisait malheureusement
partie de ceux-là. Même s'il a compliqué la vie de Claude Julien et de Carbonneau, Gainey a
fait un effort louable pour le retenir. Ayons l'honnêteté de reconnaître que Kovalev avait son sort
entre ses mains. Il a choisi d'aller vérifier s'il pouvait brasser de meilleures affaires ailleurs.
Too bad.
Tanguay: une aberration
Quelqu'un a récemment demandé à Guillaume Latendresse s'il aurait aimé jouer à la gauche de
Vincent Lecavalier. C'était comme demander à un enfant s'il adore la crème glacée.
Avec Lecavalier, on lui a fait remarquer qu'il n'aurait eu qu'à déposer son bâton sur la glace
pour recevoir la rondelle. Sa réplique ne s'est pas fait attendre.
«Nous en avons un comme lui dans l'équipe, a-t-il dit quelques jours avant la date butoir du
premier juillet. La première fois que j'ai joué avec Alex Tanguay, je lui ai demandé ce qu'il
attendait de moi? Où devais-je me placer? Que voulait-il que je fasse? Il m'a dit: Oublie tout ça.
Assure-toi de garder ton bâton sur la glace, c'est tout ce que je te demande.
Le premier jeu n'était pas sitôt parti que je recevais la rondelle en pleine centre de la palette.»
Tanguay a une anticipation et une vision du jeu que peu de joueurs possèdent. La précision de
ses passes est exceptionnelle. Or, selon l'explication de Gainey, il n'est plus là précisément
parce qu'il est davantage un fabricant de jeu qu'un marqueur.
Je n'ai rien entendu d'aussi ridicule depuis le jour où Pierre Turgeon a été échangé parce qu'on
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avait déjà Saku Koivu et Vincent Damphousse au centre et que cela aurait été injuste d'en faire
le troisième centre. Or, Damphousse avait souvent été utilisé à l'aile durant sa carrière.
Pourquoi n'avait-on pas conservé à son service un élégant joueur de centre en utilisant
Damphousse d'une façon différente?
Plus jamais je ne vais accorder de la crédibilité aux décideurs du Canadien quand ils vont tenter
de nous convaincre qu'ils sont conscients de l'importance de greffer des francophones à
l'équipe. Oubliez cela, ce ne sont que de belles paroles destinées à se donner bonne
conscience. On se plaint que les Québécois ne se bousculent pas aux portes pour jouer à
Montréal. On avait un élément local talentueux en Tanguay.
On n'a pas vu le vrai Tanguay l'hiver dernier parce qu'il a subi une blessure grave à l'épaule
quand une armoire à glace de six pieds et cinq pouces et de 255 livres, Evgeny Artyukhin, a
tenté de l'incruster dans la bande. Il a fait la preuve dans le passé qu'il était un joueur résistant.
Il avait manqué quatre matchs en deux ans à Calgary. Il a disputé des saisons de 82, 82 et 81
matchs durant sa carrière.
Comment une équipe partie de la première place dans l'Est pour entrer dans les séries par la
porte arrière avant de se faire rosser en quatre matchs a-t-elle pu s'offrir le luxe de laisser filer
sa seule star francophone? Cela dépasse tout entendement. Et à ceux qui seraient tentés de
nous dire que Tanguay est toujours libre sur le marché, je veux juste rappeler que, dans le
contexte particulier du Canadien, il a 10 fois plus de valeur à Montréal que dans tout autre
marché de la ligue.
Le grand cœur de Guillaume, la maladresse de Boivin
J'ai participé samedi à la première édition de la classique de golf Guillaume Latendresse qui a
choisi de partager les profits entre trois organismes dédiés à la cause des enfants malades ou
défavorisés. Il n'a pas fait que prêter son nom. Il s'est impliqué.
Quand il a pris le micro pour justifier son implication dans ces trois causes et qu'il a raconté la
journée entière qu'il avait passée à l'hôpital aux côtés d'un petit bonhomme qui n'est plus là, il
s'est arrêté, la gorge nouée par l'émotion. Il y avait des yeux mouillés dans la salle pendant que
Guillaume essayait de retrouver la voix.
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Dans cette salle se trouvaient Maxim Lapierre, Francis Bouillon et Mathieu Dandenault, qui ont
été chaleureusement applaudis. C'était eux, le Canadien, cuvée 2009. Deux Québécois actifs et
deux autres à qui on vient de dire au revoir. Tous les autres (exception faite de Georges
Laraque) ne pouvaient pas être là puisqu'ils vivent ailleurs, bien loin de la réalité québécoise.
Le Canadien traverse l'une des périodes noires de son centenaire. Dehors Bégin... Dehors
Bouillon... Dehors Dandenault... Dehors Tanguay... Dehors Brisebois... Ne restent plus que
Latendresse, Lapierre et Laraque qui, lui, n'a ni mains ni coup de patin.
Pour tant de maladresse et pour une si pauvre représentation locale, c'est le président de
l'organisation qu'il faut blâmer. Gainey a l'entière responsabilité de diriger l'équipe, d'effectuer
des transactions et de régler le sort des joueurs, mais la ligne directrice concernant l'aspect
francophone de l'organisation, c'est Pierre Boivin qui doit la dicter...
Son règne à la présidence de l'équipe aura été marqué par la plus faible représentativité
québécoise. Et de ça, Boivin ne peut pas être fier. Au fait, résidait-il au Québec quand plus
d'une douzaine de Québécois ont aidé le Canadien à gagner sa dernière coupe? Si vous voulez
mon avis, c'est cette mascarade qui justifierait une pétition. Au lieu de monter aux portes du
Centre Bell, la meilleure façon d'être entendu serait plutôt de ne plus s'y présenter.
Mais comme l'argent y entre de partout, Boivin et Gainey seraient bien fous de s'en faire. Il
reste un seul espoir, celui de voir les Molson mettre de l'ordre dans tout ça.
La chronique de Bertrand Raymond reviendra dans quelques semaines.
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