Synthèse des ateliers Agenda 21

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Synthèse des ateliers Agenda 21
Synthèse des ateliers Agenda 21
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P OURQUOI UN AGENDA 21 POUR L’ILE DE LA REUNION ?
Un contexte plus que sensible.
Les documents préparatoires à la Conférence de Johannesburg montrent qu’à l’échelle de la
planète les désordres sociaux et environnementaux constatés en 1992 à la Conférence de Rio se
sont pour la plupart aggravés : augmentation des rejets de gaz à effet de serre, accroissement du
niveau de pauvreté, dégradation de la ressource en eau… L’Ile de La Réunion n’échappe pas à
ces tendances lourdes. Son caractère insulaire vient même exacerber les tensions entre un milieu
naturel unique et un espace de vie et d’activité en pleine extension. Il en résulte une
consommation / fragilisation accélérée du territoire à laquelle des acteurs de plus en plus
nombreux sont désormais très attentifs.
Favoriser le développement durable de l’Ile.
Conscients des handicaps qui pénalisent l’Ile (dépendance économique et énergétique, exiguïté
du territoire, poids du chômage...), les responsables politiques de La Réunion ont décidé de
s’engager vers un mode de développement durable, plus respectueux des grands équilibres. La
mise en œuvre depuis février 2001 d’un Agenda 21 associant les forces vives de l’Ile, répond à
cette nouvelle orientation.
Un pilotage partenarial.
Cette démarche ambitieuse, transversale et complexe, initiée par le Conseil Régional, fait en
effet l’objet d’un pilotage partenarial impliquant l’Etat, le Conseil Général, l’Association des
Maires de La Réunion, le CESR* et le CCEE*. La première étape de l’Agenda 21 qui s’est
conclue en juillet 2002 avait pour objectifs d’initier le processus concret de l’Agenda 21, de
créer la dynamique entre les acteurs et de dégager des axes stratégiques de poursuite du travail
d’élaboration, après le sommet de Johannesburg.
Une approche ouverte à la société civile.
Pour cela, cinq ateliers ont été constitués sur des thèmes jugés prioritaires par tous : habitat ;
construction et cadre de vie ; déplacements ; énergie ; développement économique, cohésion
sociale et métiers de l’environnement ; éducation relative au développement durable. Ces
ateliers, réunis à trois reprises, ont regroupé près de 90 acteurs volontaires de la société civile :
responsables économiques, associatifs, culturels, sociaux, secteurs des transports, de
l’environnement, de l’énergie, de l’éducation, de l’emploi, etc.. Les débats, fondés sur
l’expression individuelle, l’expertise et l’expérience de chacun, ont permis de formuler les
premiers éléments d’un diagnostic partagé. La qualité des échanges a également permis de
dégager des pistes d’actions et d’outils susceptibles de faire progresser le développement durable
de l’Ile.
Le séminaire sur le co-développement durable qui a eu lieu du 16 au 18 juillet 2002 a permis
d’alimenter ces préconisations et montre la nécessité de s'ouvrir à notre environnement régional
proche.
* CCEE : Conseil de la Culture de l’Education et de l’Environnement
CESR : Conseil Economique et Social de la Région Réunion
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LES ATELIERS
1. Habitat, construction et cadre de vie
Deux questions partagées par tous les participants :
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Comment économiser l’espace constructible dans l’Ile (ressource rare convoitée pour de
multiples usages dont la canne à sucre) tout en logeant 300 000 habitants supplémentaires à
l’horizon 2020 ?
Quelles seront les répercussions de la construction de 90 000 nouveaux logements en terme
environnemental : eau, assainissement, accessibilité, matériaux... ?
Trois impératifs :
• Relier la réflexion sur l’habitat à celle sur les politiques d’aménagement du territoire
• Mettre en place une politique volontariste de maîtrise foncière
• Accompagner les Réunionnais dans la mutation des modes de vie qu’implique la densification
de la construction sur l’Ile, tout en respectant leur diversité culturelle.
Deux souhaits :
• Se saisir des Schémas de Cohérence Territoriale (loi SRU 12/2000) pour conduire une
politique résidentielle durable avec d’autres critères que la seule offre foncière. Sur ces sujets
complexes, une large participation est indispensable, c’est pourquoi l’échelle intercommunale a
semblé pertinente et susceptible de favoriser un débat au bon niveau.
• Etendre l’usage des démarches Haute Qualité Environnementale dans la construction, en
l’accompagnant d’une sensibilisation efficace des professionnels et des futurs habitants.
Un outil à finaliser :
L’atelier « habitat » arrive à la conclusion qu’il faut définir des critères de durabilité pour
s’assurer que les décisions prises dans le domaine de l’habitat respectent les enjeux du
développement durable. Il propose une « grille de durabilité » à finaliser avec les participants des
autres ateliers. Celle-ci met l’accent sur une approche pragmatique et propose :
• des critères environnementaux : intégration environnementale et maîtrise des impacts…
• des critères sociaux et culturels : intégration sociale, offre d’équipements de proximité,
desserte, emploi…
• des critères économiques : approche globale des coûts, emplois locaux pour la construction,
mis en place de régies de quartiers…
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2. Déplacements
Un constat partagé par tous les participants :
Le parc automobile va doubler à l’horizon 2025 et atteindre 490 000 véhicules selon une
projection réalisée à partir du croisement entre la croissance démographique et le rattrapage du
taux d’équipement des ménages par rapport à la métropole. Le total de ces véhicules mis bout à
bout représente une longueur de 1 470 km alors que La Réunion possède actuellement 750 km de
routes départementales et 369 km de routes nationales.
Face à ces prévisions, le groupe s’est interrogé sur les choix à faire :
• Privilégier l’extension des réseaux routiers ?
• Développer des modes alternatifs de déplacements ?
• Sur quelles variables peut-on et doit-on agir ?
- Avoir un réseau de transports performant et homogène à l’échelle de la Réunion.
- Mettre en place un réseau type Transport en Commun en Site Propre ( TCSP ) sur les
grands axes de l’Ile avec un réseau complémentaire de désenclavement ( maillage entre
un réseau primaire et secondaire).
- Envisager des solutions innovantes pour réduire les besoins de déplacements (nouveaux
modes d’organisation : télétravail, décalage des horaires….).
Pour l’heure, La Réunion a engagé deux projets ambitieux : la Route des Tamarins, 35 km de
2x2 voies à l’ouest et un Transport Collectif en Site Propre, le Tram-Train.
Les participants sont conscients que ces grands projets d’infrastructures retarderont la saturation
des réseaux et constituent une opportunité pour le développement durable de île, mais ils ne sont
pas en mesure de dire dans quelles conditions elles permettront d’atteindre au mieux ces
objectifs et quelles en seront les répercussions sur l’ensemble du territoire .
Une demande :
L’atelier «Déplacements » s’interroge : est-il encore possible d’intervenir sur ces projets pour
tendre vers plus de durabilité et exprime la demande que soit élaborée une méthodologie
permettant d’intégrer les exigences du développement durable dans les projets en cours ou
en instruction.
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3. Energies
Quelques données de cadrage proposées par les participants :
• la consommation d’électricité est à 40% résidentielle, 40% tertiaire, 20% industrielle.
• la consommation des ménages en électricité augmente de 7% par an, et est consacrée pour
40% à la production d’eau chaude.
Dans la perspective d’une autonomie énergétique de l’île, l’atelier veut promouvoir l’important
potentiel d’EnR* de La Réunion ( solaire, géothermique, éolien, eau biomasse, déchets ) en
vue de :
- la réduction de la contribution locale à l’effet de serre
- la limitation des impacts environnementaux
- le rapprochement entre moyen de production et consommation
- l’adéquation production / besoins
- la garantie minimale de confort et d’un coût accessible à tous dans la durée
- la solidarité planétaire
- la contribution au développement économique local
Pour le groupe, il faut d’abord convaincre les consommateurs et tous les décideurs qu’à terme
ces énergies sont crédibles et rentables. Ensuite, maîtriser les consommations, tant au niveau
résidentiel que tertiaire et industriel. On peut déplorer que la dimension énergétique soit
généralement si peu présente dans l’étude des projets d’équipement. Les besoins en
sensibilisation et en accompagnement sont grands.
Les participants ont pris note des études en cours sur le potentiel éolien, solaire, géothermie,
thermique dans les bâtiments et l’élaboration d’un plan pluriannuel des EnR.
Une action concrète :
Les participants proposent comme objectif à atteindre rapidement « 100% de Cha uffe-eau
solaires, 0% de Chauffe-eau électriques ».
La concrétisation de ce projet de développement durable implique un partenariat innovant. C’est
pourquoi l’atelier « Energie » propose une méthode souple d’intervention (qui pourrait être
appelée « missions 21 ») mobilisant un partenariat efficace et opérationnel à court terme en
vue de la mise en œuvre de ce projet politiquement soutenu, au financement assuré et
techniquement encadré.
*EnR :Energies Renouvelables
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4. Développement
économique, cohésion sociale et métiers de l’environnement
Une situation sociale particulièrement marquée :
. Environ 32% de la population active est au chômage (dont une forte proportion de jeunes),
. Près de 400 000 personnes sont bénéficiaires de la Couverture Maladie Universelle,
. 65 000 sont bénéficiaires du RMI.
L’atelier a considéré que la part de la réponse sociale relevant des métiers de l’environnement
– principalement emplois verts du secteur public – est positive mais de courte durée, et souvent
non valorisante puisqu’il s’agit plutôt d’emplois d’exécution à durée déterminée.
Les métiers de l’environnement : une source d’emplois durables à exploiter :
Pourtant, la protection de l’environnement, la promotion de l’écologie et la gestion active de la
biodiversité pourraient être de véritables sources d’activités, de richesse et d’emplois mais elles
ne sont pas encore perçues comme telles par la grande majorité des acteurs locaux et par la
population.
L’atelier a commencé à identifier des secteurs d’activité potentiellement porteurs pour l’avenir
(déchets, eau potable / non potable, assainissement, politique énergétique, sécurité
environnementale et sanitaire, nuisances sonores, éducation, espace naturel et patrimoine). Dans
ces domaines, il apparaît indispensable aux participants que se développent des programmes de
recherche susceptibles de traduire ces secteurs d’activités en emplois durables et en
formations adaptées accessibles aux Réunionnais. Les objectifs seraient les suivants :
• démontrer que le concept de développement durable est utile pour apporter des réponses
crédibles au problème majeur de sous-emploi dans l’île,
• mobiliser progressivement le secteur privé plutôt intéressé par des secteurs rentables,
• mettre en place, dans le même temps, une politique à long terme déconnectée du profit
immédiat, qui seule, peut garantir le développement durable du territoire
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4. Education relative au développement durable
Un constat commun :
A La Réunion comme ailleurs, la sensibilisation à l’environnement se multiplie. Il existe déjà de
nombreux outils de qualité. Les connaît-on bien ? les utilise t-on suffisamment ?
Avec l’Agenda 21, il s’agit désormais de développement durable, ce qui recouvre un domaine
bien plus large que l’environnement stricto sensu, moins connu et non maîtrisé.
Quatre priorités :
• Faire prendre conscience à la population, en tenant compte de sa diversité culturelle, que le
patrimoine réunionnais et sa préservation sont incontournables et indispensables.
• Ensuite, en finir avec l’idée selon laquelle la protection de l’environnement s’oppose aux
politiques de développement.
• Faire connaître la réglementation et la faire comprendre par tous est une étape à l’éducation à
l’environnement, mais elle n’a de chance de réussir que si la réglementation est respectée.
• Enfin, Mieux communiquer autour des actions allant dans le sens de l’éducation à
l’environnement et au développement durable, en recherchant les méthodes et moyens pour
« faire passer le message » du développement durable, difficile à appréhender concrètement et
concept nouveau tout en étant presque galvaudé à force d’être employé à tout propos.
Une action clef :
Pour mettre en œuvre ces priorités, l’atelier a commencé à élaborer un plan ambitieux de
formation de formateurs et relais associatifs, plan devant être accompagné d’une plate-forme
d’échange entre acteurs ( mise en synergie des compétences, impulsion d’initiatives,…) et
d’une Charte donnant les grandes orientations politiques dans ce domaine.
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VERS UN CO-DEVELOPPEMENT DURABLE
Ces préconisations émanent du séminaire co-développement durable qui s’est déroulé à La
Réunion du 16 au 18 juillet 2002 et révèlent une véritable prise de conscience des acteurs
réunionnais de la nécessité de s’ouvrir à notre environnement régional. Cette rencontre a permis
de réaffirmer la volonté d’inscrire la priorité d’un développement durable dans un cadre régional.
Contexte :
Les pays de l’espace indianocéanique sont confrontés à des défis majeurs. Les pays de notre
région subissent les conséquences positives et négatives de la mondialisation des échanges et
s’engagent dans un processus d’intégration régionale au sein duquel La Réunion ne peut rester à
l’écart.
Sur le plan de la croissance démographique, alors que La Réunion comptera près d’un million
d’habitants à l’horizon 2025, l’espace océan Indien et Afrique Australe (pays de la SADC) en
comptera plus de 300 millions (soit un doublement par rapport à la situation actuelle).
Les conséquences de ce dynamisme démographique se traduisent en particulier par des
problèmes cruciaux à résoudre par les Etats concernés que ce soit en terme d’emploi, ou
d’aménagement du territoire.
Les territoires insulaires qui composent notre espace géographique sont également menacés
directement par les conséquences des changements climatiques, sujet au cœur des réflexions
actuelles à la veille de l’ouverture du Sommet de la Terre à Johannesburg.
Seule Région Européenne de l’Hémisphère Sud, La Réunion doit concilier sa double
appartenance à l’espace indianocéanique et à l’espace européen.
La Réunion peut être considérée comme un laboratoire des problèmes du Monde, elle est
pourtant confrontée à des problématiques identiques à celles que peuvent connaître les pays de
son environnement immédiat.
La résolution de certains de ces problèmes peut trouver des solutions communes, s’inscrivant
dans l’esprit du co-développement et fondée sur des échanges harmonieux et mutuellement
avantageux au bénéfice de l’ensemble des populations de nos pays.
Constat :
Découlent des conclusions du séminaire : la nécessaire continuité des actions engagées en
matière de co-développement, d’une meilleure connaissance mutuelle et d’une prise en compte
des dimensions historique et culturelle entre les pays partenaires ; la nécessité d’un
assouplissement des procédures administratives et juridiques notamment liées aux contraintes de
double appartenance de La Réunion dans le cadre de son intégration régionale.
Les dispositions réglementaires et les moyens financiers dont disposent La Réunion, s’ils sont
pleinement déployés, sont les leviers d’une stratégie de co-développement réussie.
Les impératifs :
Les principes du co-développement durable posent comme postulat, la place de l’Homme dans
les politiques de développement durable en favorisant les possibilités d’échanges pour une
meilleure connaissance réciproque, basée sur un véritable partenariat et une complémentarité
dans les actions à mettre en place. Il s’agit de construire ensemble et solidairement un destin
commun pour un développement durable dans cette partie du Monde.
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Les priorités dégagées lors du séminaire sont les suivantes :
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Faire connaître et partager les conclusions du présent séminaire dans chaque pays,
Identifier des actions pilotes au sens du co-développement durable,
Mettre en place un groupe de recherche sur l’Histoire et la culture dans l’océan Indien,
Mettre en place dans le cadre de la démarche Agenda 21 un atelier de suivi et de prospective
des initiatives à engager sur un plan régional pour un développement durable des pays de la
zone.
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CONCLUSIONS POUR LA POURSUITE DE L’AGENDA 21
Les propositions issues de cette première étape se complètent. L’ensemble des participants des
ateliers considèrent en effet que :
• Un plan de formation est nécessaire pour tous, populations et acteurs,
• Il est urgent d’identifier des méthodes d’intégration des exigences du développement durable
dans les projets en cours,
• Il est indispensable de mettre en place et de faire vivre des cadres partenariaux rénovés,
• Il est pertinent d’identifier des critères de durabilité,
• Les gisements de nouveaux métiers liés à une meilleure prise en compte de l’environnement
doivent être structurés.
Ensemble, ces nouvelles méthodes de travail permettent d’engager la définition et la mise en
œuvre du développement durable de l’Ile.
Elles couvrent un champ important de l’action publique. Certaines pourraient être applicables et
éventuellement généralisables dans le court terme.
Elles ont le mérite essentiel d’avoir été initiées collectivement par des représentants du service
public, des milieux socio-professionnels et associatifs de La Réunion qui ont ainsi manifesté leur
souhait de voir cette démarche appliquée dans leur territoire et leur volonté de poursuivre le
travail engagé.
Les prochaines étapes dans la mise en œuvre de la démarche Agenda 21 de la Réunion :
• Pour mieux comprendre les enjeux et dans un souci d’une plus grande concertation, le volet
culturel sera intégré dans les prochains ateliers comme un des axes fondamentaux de l’Agenda
21 au même titre que l’économie, le social et l’environnement.
• En parallèle, une action de sensibilisation des communautés de communes est prévue pour les
inciter à s’engager dans une démarche d’Agenda 21 au niveau micro régional ou communal.
• Accompagnement d’un porteur de projet au niveau local pour l’aider dans la réalisation d’un
Agenda 21 à l’échelle d’un quartier et en application des grands principes issus de la réflexion
globale.
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