Zibeline n°11 en PDF
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1 1 Q | du 18/09 au 16/10/08 | À la rencontre des écrivains un gratuit qui se lit De retour des Festivals Marseille 2013 ? Politiques culturelles Le Mépris en débat au Festival d’Avignon Théâtre Avignon : Festival In Avignon : Festival Off Festival Off, Festival de Marseille, Les Informelles Dracénie, Opéra d’Avignon, Sanary Le Toursky, le Lenche, les Bancs publics La Criée, le Gymnase, le Jeu de Paume Ouest Provence, Gap, Briançon, Châteauvallon, La Friche Le Sémaphore, Nîmes Danse 8,9 10,11 12,13 14 16 18 20 21 Pavillon Noir, Gyptis, Châteauvallon, le Dôme Kélémenis, L’Olivier, les Salins, Nîmes Allauch, Trets Les Hivernales 22 23 24 25 La Folle histoire des Arts de la Rue, Caressez le potager Aubagne, Gardanne, Petit Art Petit, Sirènes et midi net, Lez’Arts Verts, Ornic’art 26 Arts de la rue Cirque Arles, le Toursky, Cavaillon, la Minoterie, le Gymnase Musique 27 28,29 Opéra de Marseille, opéra de Toulon 30 Musicatreize, Festival d’orgue de Roquevaire, Festival St-Victor 31 Concerts 32,33,34,35 Arles, agenda 36,37 Jazz des 5 continents, Arles, le Paradox, La Seyne 38 Trets, Théâtre et Chansons 39 Festival des Musiques Interdites 40 Liszt en Provence, Opéra au village, Nuits d’été 41 La Roque d’Anthéron, Orange 42 Festival d’Aix 43 Disques 44 Cinéma FID, Apt Lussas, Rousset, Trets Horizontes del Sur, Rendez-vous des quais Film, Femmes, Mediterranée Arts visuels Regards de Provence Van Gogh-Monticelli Galerie Hespare, galerie Insulaire Entretien avec Démosthène Davvetas L’Atelier Archipel, RIP Trets, Fontaine Obscure, conférences Fondation Vasarely Musée Estrine, La Ciotat Livres 46,47 48 49 50 50 51 52 53 54 55 56 57 Lire en fête 58 Les Rencontres d’Averroès, la Semaine Noire 59 Les Correspondances de Manosque, actOral, MOD 60,61 Écritures Croisées, agenda 62 Livres 64,65,66,67,68,69 Philosophie Livres, conférence Kant 70,71 72,73 Les Journées européennes du patrimoine 74,75 La génétique 76,77 Histoire et patrimoine Sciences et techniques Éducation La FAI AR Réforme des lycées Rubrique des adhérents 05 6,7 78,79 80 82 Affaire de contenus À l’heure où vous lisez ces lignes vous savez. À l’heure où nous les envoyons à l’impression, nous l’ignorons. Marseille Provence sera-t-elle retenue pour être la capitale française de la Culture en 2013 ? Le résultat changera la donne culturelle dans notre région. L’implication des dirigeants politiques et des entreprises dans la candidature a prouvé qu’ils étaient capables de se fédérer : reste à espérer qu’ils demeureront mobilisés, quel que soit le résultat… À ce propos, Zibeline se dote d’un site, sur lequel vous pourrez lire dès le 22 septembre nos commentaires à chaud ! Nous nous réjouirons ou déplorerons avec vous l’élection ou l’éviction sur www.journalzibeline.fr. Et vous y retrouverez aussi le journal en ligne, et quelques liens sommaires. Pour commencer. En revanche, vous ne nous trouverez plus dans les FNAC : ces magasins «culturels» acceptent de diffuser la presse gratuite seulement si elle leur offre des espaces publicitaires dans ses pages. «Quelle que soit la qualité du magazine», nous ont-ils répondu. Le contenu de ce qu’ils diffusent n’ayant pas d’importance, vous nous trouverez ailleurs. De fait, il est temps de dénicher des refuges, des librairies, de restaurer nos forces hors d’un monde où les œuvres ne se vendent plus, mais seulement les appareils à restituer des sons, des images, quelquefois des mots… Les rayons livres et disques s’évanouissent face à la morgue des divers Ipod. Restera-t-il demain quelque chose à mettre dedans ? On peut en douter, quand le Rien médiatique triomphe. Pour résister à l’irrépressible vacuité du monde il faudrait parier sur l’intelligence… Car la bêtise entraîne la hargne. La colistière de celui qui sera élu Président des States (ne rêvez pas, les Américains ne voteront pas Obama) se compare elle-même à un pittbull. Capable de tuer pour son enfant, aveuglément. La foule l’applaudit, McCain s’envole : les ennemis de l’Amérique n’ont qu’à bien se tenir. Ceux qui la mettent en doute, même. Vous en êtes ? AGNÈS FRESCHEL 06 POLITIQUES CULTURELLES La culture du mépris Prolégomènes Le concept de mépris fut d’emblée éclairé par Michel Guérin, philosophe et esthéticien : dans la société d’Ancien Régime, le mépris était organisé en «cascade de castes». L’ordre social était immanent et ne reposait pas sur le mérite, et chacun méprisait son inférieur «naturel». Les sociétés démocratiques, fondées sur l’égalité, ont ensuite amené l’émulation, l’ambition, puisque l’ordre n’était plus donné mais à conquérir. Or aujourd’hui nous vivons, selon Michel Guérin, dans des sociétés cyniques, où cette ambition dynamique, de mouvement, s’est pervertie, où l’utopie, l’idéal, sont moqués. Chacun prend l’autre de haut, le rabaisse, le nie (jusqu’au génocide). Au sommet des États, de notre État, on affiche comme valeur suprême l’argent qui, justement, n’a pas de valeur intrinsèque (pas d’autre valeur que d’être une monnaie d’échange). La pudeur, la vertu, le bien public, l’éducation, le lien avec les morts et le passé, en même temps que la capacité d’analyse et d’indignation, tout cela s’étiole, n’est plus posé comme fondement de civilisation. Et entraîne à la fois une «sécheresse de cœur», «une aridité sémantique» et une «stérilité intellectuelle» certaines. Le constat C’est à cet endroit que la notion de mépris intéresse le monde culturel : Renaud Ego, qui a coordonné le numéro de la Pensée de Midi avec Michel Guérin, le précise clairement : «la question de la rentabilité de la culture méprise l’objet même de la culture, qui est de faire vivre la langue, la pensée, l’art.» Il se traduit par une relégation des artistes et des auteurs dans les marges, et un principe d’inattention, puisqu’ils sont indignes d’attention sociale, étant au mieux des exceptions. Constat qui rejoint le combat que Jack Ralite mène depuis tant d’années ! Le sénateur communiste fit un bilan terrifiant, à la fois des théâtres «voués à devenir des entreprises», des droits d’auteur foulés aux pieds au profit des intérêts des producteurs, et de la réalité quotidienne de l’assemblée législative. Selon lui, les lois résultent aujourd’hui de compromis entre les lobbies, et non d’une réflexion sur la démocratie et le bien public. L’homme est traité en variable d’ajustement, tandis que le marché est présenté comme une constante inaliénable. Sans alternative. Dans le monde culturel le «Taisez-vous» s’impose : on appauvrit et méprise les intermittents, on licencie le directeur de Chaillot sans un mot, on restreint dangereusement les budgets sous prétexte de RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques), on s’occupe des programmes, on attaque En plein Festival d’Avignon et le jour de la Fête Nationale, la Pensée de midi avait invité les artistes de la région, et en particulier ceux du spectacle vivant, à assister et participer à un débat autour de sa dernière publication : un ouvrage collectif intitulé Le Mépris (voir Zib 10). Le débat, inattendu, fut profondément fructueux… les œuvres, et le Président trouve «anormal de s’emmerder à la Comédie Française» (il a parfaitement le droit de s’ennuyer au théâtre, mais pas de trouver cela anormal : le chef de l’État n’a pas à décider de la norme culturelle, surtout lorsqu’il «s’emmerde» devant du Lagarce mais fête son élection avec Johnny et Mireille Mathieu, et brandit le disque de sa femme sur le parvis de l’Elysée). Les propos de Jack Ralite rejoignaient ainsi ceux d’Alain Hayot, qui avait introduit la rencontre : le Vice Président de la Région PACA, délégué à la culture, expliqua pourquoi il était là, et pourquoi la Région s’intéressait ainsi aux débats d’idées. Selon lui il est urgent de mettre en débat les politiques publiques. Car le désengagement de l’État n’est pas dû à un pragmatisme financier, à une simple courte vue, à un aveuglement : il est politique, et relève d’une volonté très consciente d’exclure les enjeux culturels du champ d’action de l’État. Les remèdes Le «comment résister» souleva bien sûr des problèmes : si chacun était d’accord pour lutter, dialoguer, penser la culture, les remèdes envisagés semblaient différents. Jack Ralite proposa de s’en référer non aux intellectuels organiques (ceux qui passent à la télé) mais «de se fier, éperdument, aux experts du quotidien» (ceux qui font les choses dans le réel). Michel Guérin parla de restaurer l’humanité, la «considération», de combattre le narcissisme, et présenta l’art, «forcément généreux», comme un contrepoison à la «sécheresse de cœur». C’est alors que les artistes commencèrent à prendre la parole. Claire Lasne d’abord, qui participait au débat. La metteur en scène semblait illustrer, par sa posture même, les propos sur l’endroit où se tiennent les artistes. Directrice d’un Centre Dramatique National, invitée du Festival d’Avignon pour sa Mouette, elle apparaissait pourtant d’emblée comme marginale : fumant cigarette sur cigarette, gagnée par l’émotion, quittant par instants la salle, et impliquant sa propre histoire, personnelle, douloureuse, dans le débat d’idée. Et levant quelques lièvres. Elle nota bien sûr que le geste artistique n’est pas forcément généreux. Que le mépris a envahi le monde de la création. Que celle qui existe aujourd’hui, parce que les moyens lui en sont donnés, ne fait pas vraiment dans la générosité. Que les artistes se méprisent énormément entre eux. Plus qu’ailleurs. Et méprisent à leur tour les techniciens, ou les administratifs, les médiateurs culturels. Qu’en tant que femme et artiste, elle est victime depuis toujours d’une double condescendance, qu’elle combat en surjouant sa fragilité, ce qui est pour elle un moyen efficace et amusant de transformer le mépris des hommes de pouvoir en une sorte de paternalisme bienveillant… Elle affirma également que le pouvoir de décision, qui orientait les choix culturels, n’était plus du tout dans les mains des artistes, mais des programmateurs ou des politiques. Qui se sont approprié l’argent, détiennent la vérité et se foutent du public. Propos relevés par Jean-Michel Grémillet, directeur de la Scène Nationale de Cavaillon présent dans la salle, qui affirma que les programmateurs passaient leur vie à se battre pour les artistes, et ne s’appropriaient rien… Françoise Chatôt, directrice du Gyptis (Marseille), intervint aussi dans le débat, confirmant que les artistes se sentent «ramenés à l’état de choses ridicules», mais que «Sarkozy n’a fait que cristalliser un esprit ambiant». Que le fait même d’avoir régulièrement à solliciter des subventions met les artistes dans la position d’être méprisés. Elle releva que tout le système repose sur des inféodations aux collectivités territoriales ou aux programmateurs, et des mises en concurrence entre les artistes. À cela Alain Hayot, concerné au premier chef, répondit que la décentralisation amenait malheureusement les collectivités à être les relais de la politique gouvernementale. Que le candidat Nicolas Sarkozy avait pour projet de supprimer le ministère de la Culture, et que le Président n’y avait sans doute pas totalement renoncé… et qu’il n’y avait que deux positions possibles : soit composer avec la politique de l’État, l’appliquer en corrigeant au mieux ses erreurs, soit rompre et s’installer dans la radicalité. Et qu’avant cela il fallait penser, réfléchir à une ambition commune pour éviter justement la concurrence… D’autres questions Dans le jardin du cloître Saint Louis, en parlant avec les artistes après le débat, d’autres questions surgirent. D’abord, on se demanda si le monde culturel, qui aime tant les Ors des Cours et pratique le népotisme sans état d’âme (le nombre de fils d’artistes dans le monde culturel est impressionnant) n’en était pas resté à un modèle d’ancien régime, avec cascade de mépris et hiérarchie quasi immanente… Plus sérieusement, on releva les marques du mépris que chacun pratique. La violence de certains regards, quand les artistes (plutôt les vieux) sont traités de ringards, quand d’autres (plutôt les jeunes) sont jugés naïfs, quand ceux qui prennent des risques, s’emparent des textes à bras le corps ou sortent des répertoires entendus, sont accusés de faire des concessions au public, de sacrifier à la lisibilité… Et chacun avoua sans peine que, pour ne pas être victime de ces mépris qui sont les premiers symptômes d’une mort culturelle programmée (puisqu’ils précèdent la suppression des subventions), il avait parfois sacrifié au goût du jour, et cherché à faire entrer ses créations dans les cadres imposés de politiques culturelles qui ne correspondaient pas à son propos… Et finalement on en conclut que tous les intervenants avaient eu raison : Michel Guérin d’en appeler aux valeurs humaines et à l’art généreux, Claire Lasne de réclamer que le pouvoir soit redonné aux artistes, Alain Hayot de faire confiance à la résistance intérieure et au débat public, et Françoise Chatôt de refuser la mise en concurrence. Effectivement il s’agit bien, de façon vitale pour les artistes, d’en finir avec la soumission, et d’agir ensemble, en cessant de se servir des querelles esthétiques pour céder au narcissisme et se permettre de mépriser l’autre. AGNÈS FRESCHEL 08 THÉÂTRE FESTIVAL D’AVIGNON Maître enchanteur Voilà bien longtemps que l’iconoclaste Heiner Goebbels ne se limite pas à composer avec des sons. De son étroite collaboration avec quelques grands noms du théâtre (à commencer par Heiner Müller), il a acquis la conviction que l’écriture dramatique ne réside pas seulement dans les mots, mais relève d’un savant agencement de matériaux. Homme de spectacle, il n’a de cesse d’inverser la tendance qui, trop souvent, confine la musique au simple rôle de bande-son. Plus que toute autre, sa dernière création, Stifters Dinge, repose sur la volonté de faire du sonore la pierre angulaire de la représentation. Sur scène, pas de chanteur, de musicien ou de comédien, mais des choses -dinge en allemand- qui se mettent en mouvement dans un envoûtant ballet mécanique. Une fascinante partition emmenée, entre autres, par cinq pianos désossés, actionnés par d’invisibles mains. Un flot de sons, d’images et de mots où les chants colombiens croisent le concerto en fa majeur de Bach, où la misanthropie avouée de Lévi-Strauss dialogue avec la peinture du Quattrocento italien comme avec la chimie d’aujourd’hui. Au travers d’un geste d’une belle radicalité qui s’en remet à la puissance évocatrice d’un paysage tout à la fois pictural, sociétal et sonore, Goebbels nous invite à la contemplation, si chère à l’écrivain romantique Adalbert Stifter. Philosophe tout autant que magicien, il laisse affleurer la multiplicité des choses, se gardant bien de donner des clés d’interprétation. Voyage pour les sens ou éveil des consciences face à une nature malmenée par l’homme, Stifters Dinge s’interprète donc librement. Désigné «maître des choses», c’est au spectateur que revient le plaisir de les ordonner, de les ré-agencer, à son gré, selon son imagination, selon sa sensibilité. Pour une des plus réjouissantes expériences qu’il ait été donné d’éprouver lors de la dernière édition du festival d’Avignon. LAURENCE PEREZ Stifters Dinge a été présenté du 6 au 14 juillet à la Chartreuse de Villeneuve Lez Avignon © Mario del Curto Tueras, tueras pas… Advienne que dira Les metteurs en scène qui osent réellement affronter la Cour d’Honneur sont peu nombreux. Même dans sa configuration actuelle, plus facile que les précédentes, les spectateurs les plus éloignés sont difficiles à atteindre, la scène impossible à occuper et délicate à éclairer, le mur du lointain imposant, le vent imprévisible. Certains, des chorégraphes, Castellucci, parviennent à y fabriquer des images plus ou moins belles. Y dire un texte, y jouer à la bonne échelle sans transformer la cérémonie théâtrale en une vidéo transmission relève de l’exploit. Ostermeier a, sans conteste, réussi ce pari-là. Son Hamlet, porté par de magnifiques comédiens, transcende Shakespeare sans le trahir. Il laisse enfin entendre le baroque flamboyant du texte, la folie et les atermoiements d’un prince dont on ne sait jamais ce qu’il veut, sinon plonger dans la terre, la boue, la mort. Se dessine alors le portrait d’un Hamlet psychotique, qui perd le sentiment du réel, bloqué, arrêté à cette scène primitive qu’il ressasse et ne parvient jamais à dépasser. Car Ostermeier donne une réelle interprétation, subjective mais cohérente, de la tragédie, sans trahir le En montant Ordet (La Parole), la pièce célèbre du dramaturge danois Kaj Munk, le metteur en scène Arthur Nauzyciel prenait le risque de confronter sa lecture aux images inoubliées du film austère et flamboyant de Carl Dreyer ; de fait, il réussit magistralement à rendre au théâtre ce qui lui appartient en propre et d’évidence : la parole (et non le Verbe...), indissociable de son incarnation grâce en partie à la traduction «pleine bouche» de Marie Darrieussecq. Tout concourt sur scène à la quête de la résurrection, depuis l’étrange fond de scène peint d’Éric Vigner, marais du Nord aux vastes horizons, espace mental que l’on imagine propice à l’engloutissement des âmes, jusqu’à la déambulation inspirée des chanteurs de l’ensemble Organum qui tire le souffle des profondeurs... Les acteurs, dans la plénitude et la rusticité première de leurs corps habités, semblent glisser et aussi prendre racine (formidable apparition de Pascal Greggory en savates de fragile patriarche) sur le plateau luisant, vernis que n’habille qu’un mystérieux et métallique bec d’oiseau -figure de proue, refuge de «l’illuminé» de la famille, d’où naîtra la texte, mais en imposant sa lecture. Tous les écarts avec la lettre y sont justifiés : que la mère et la fiancée aient le même visage, qu’Hamlet ait du ventre et semble un bébé mou, que la Reine chantonne du Carla Bruni, que la Cour s’habille comme dans les Parrains, parle vernaculaire, se complaise dans les déchets et la boue, et n’ait jamais conscience de l’épaisseur du temps. La scénographie (un peu lourde ?) rendait clairement cette confusion des espaces mentaux et réels, extérieurs et intimes, publics et dramaturgiques ; comme si Hamlet, comédien de son propre destin, ne parvenait pas à différencier le lit de sa mère et la tombe de son père, la pièce qu’il joue pour révéler la vérité et la mise en scène de sa propre mort, ses spectres et les personnes réelles autour de lui, qu’il manipule comme des personnages. Une mise en scène passionnante, qui réactive un des plus grands textes dramatiques de l’histoire. AGNÈS FRESCHEL Hamlet a été créé dans la Cour d’Honneur du 16 au 20 juillet parole d’amour qui brisera la glace d’un univers figé dans les querelles religieuses... Un silence de cristal face au cercueil dressé de la jeune mère morte en couches, respiration légère et retenue du public, accompagne le miracle / simulacre sans plus de manières : il suffitsimplement de le voir pour y croire... MARIE-JO DHÔ Ordet de Kaj Munk, adapté par Marie Darrieussecq et mis en scène par Arthur Nauzyciel a été donné au Cloître des Carmes du 5 au 15 juillet © Christophe Raynaud de Lage 09 Qui veut faire l’ange... Olivier Dubois longuement sollicité par la presse avant sa prestation avignonnaise (qui n’a pas eu sous les yeux la troublante photo de l’homme en chemise blanche tenant à pleines mains ses cornes de grand bouc hurlant ?) a tenu des discours singulièrement vertueux sur son projet polymorphe de recréation de la chorégraphie mythique de L’après-midi d’un Faune de Vaslav Nijinski : «je danse pour questionner et défendre une réflexion» ou bien «je me fais historique»... L’homme est un danseur atypique, au corps lourd et fort sensuel, à l’œil brillant, vif, gourmand, goguenard. Il a travaillé avec Jan Fabre ou Angelin Preljocaj mais l’entreprise ici se veut plus singulière même s’il s’agit de faire le faune au pluriel. Quand, au terme de son quatrième solo, Dubois, nu dans sa fragile corpulence, salue le public comme un écorché au creux d’une mer de fourrures qui déferle des coulisses, à qui ou à quoi s’adressent sifflets, huées, applaudissements vigoureux (rares) ou sourires narquois (spectateurs avisés) ? Au court métrage de Christophe Honoré qui poursuit, en noir et blanc, chants d’oiseaux et bruissements de feuillages, les plates tribulations d’un amateur de chair fraîche (Animal1) réduit à une traditionnelle masturbation après défection de l’objet du désir ? La partie de tennis des Vacances de M.Hulot est nettement plus perverse... À la doucement réussie reprise du ballet fondateur (animal 2) où la toile peinte de Bakst remplace avantageusement l’écran de cinéma et où Mallarmé, Debussy et Nijinski justifient le tout petit saut dans le vide de notre pesant danseur ? À l’extravagant et cornant tableau imaginé par la metteure en scène Sophie Pérez qui laisse traîner en longueur l’agonie d’un loup chassant chassé pauvre de lui (animal 3) ? À la somnolente provocation gélatineuse de fesses tressautant de plaisir dans un monde de portemanteaux de fourrure (animal 4) ? On ne sait... Reste la troublante impression en fin de compte que dans cette succession de sketches mal embouchés, Bambi a benoîtement triomphé du satyre !!! M.-J. D. Faune(s) a été donné au Cloître des Célestins du 6 au 13 juillet Un cœur simple Il est 14 h 52 mn, le 8 juillet à Avignon ; sur la scène, la pendule marque la même heure dans une cuisine de Léningrad, au début des années 40 ; on respire le même air rigoureusement russe dans le reste de l’appartement ouvert à la curiosité des spectateurs qui commentent la précision hypervériste de ce décor minutieusement évocateur... Avant même le début du spectacle, la nostalgie attachée à la brocante a déjà produit son effet ! À 15 heures, deux immenses corps (Dieu que les Lettons sont grands) font irruption sur scène après avoir crocheté la serrure de la porte d’entrée et, tels des ours qui viendraient chez Boucle d’Or, viennent occuper par effraction cet espace d’un autre temps. Saisis eux-mêmes par la force d’âme des objets qu’ils sont sur le point de chaparder, les deux voleurs vont rêver ou plutôt jouer l’histoire de l’ancienne maîtresse des lieux, l’humble et souveraine Sonia... Alvis Hermanis, metteur en scène et directeur du théâtre de Riga a choisi un couple d’acteurs étonnants, au physique massif et aux yeux clairs, sortis tout droit du cinéma muet et de la pantomime (bouleversant interprète du rôle de Sonia) ou de la vraie vie (le narrateur/meneur de jeu est technicien de théâtre) pour incarner les personnages de la nouvelle de Tatiana Tolstaïa. La résurrection de Sonia et de sa triste aventure (la vieille fille au cœur tendre sera victime d’une farce, d’un complot épistolaire monté par quelques ricaneurs de son entourage) s’accomplit à travers chansons désuètes crachotées par le phono et de scènes commentées par un glouton barbouillé de chocolat. Les tableaux se succèdent : Sonia prépare un poulet à rôtir de ses paluches expertes ou un gâteau avec une dextérité pâtissière à couper le souffle / Sonia berce ses poupées / Sonia stupéfaite reçoit sa première lettre d’amour frelatée avec myosotis/ Sonia regarde par la fenêtre dans le ciel de Leningrad l’étoile de la passion partagée / Sonia vole au secours de son «bien aimé» dans un ultime sacrifice... Le burlesque est bien là, dans le jeu caoutchouteux et minutieusement réglé des deux comparses ; la tragédie aussi tout de guingois. Rires et larmes, reniflements des voisins et pas seulement à cause de l’odeur âcre dégagée par la décoction de tapisserie (un peu d’amidon pour ne pas mourir de faim) : tout est vrai, va droit au cœur, la langue russe distille sa dose d’émotion. Et pourtant, quand la porte se referme sur ces deux cambrioleurs du souvenir que reste-il ? Le sentiment un peu frustrant d’avoir assisté à un numéro d’acteurs virtuoses dont la réelle présence, trop immédiate peutêtre, se consume dans l’éphémère de la représentation. M.-J. D. Sonia de Tatiana Tolstaïa adapté et mis en scène par Alvis Hermanis a été présenté à la Salle Benoît XII du 5 au 9 juillet Sonia © Gints Malderis 10 THÉÂTRE AVIGNON OFF Pourquoi mon Dieu ? Gérad Gélas a mis en scène le roman de Saphia Azzeddine Confidences à Allah. Une première oeuvre d’une force peu commune, monologue intérieur d’une algérienne misérable, alliant une violente crudité langagière à l’évocation d’une vie terrible, transcendée heureusement par une force vitale exceptionnelle. Alice Belaïdi, une jeune comédienne étonnante, incarne seule en scène la jeune bergère infanticide, et amène dans les cercles d’enfers nauséabonds : ceux des diverses prostitutions qu’elle traverse. Bestiale, forcée, assumée, dominante, hypocrite, sa sexualité est toujours décrite comme l’unique moyen de survivre à la violence d’un monde où s’offrir est interdit, mais où le désir des hommes est incontournable : Jbara doit en passer par là en baissant la tête, en fermant les yeux © Manuel Pascual et en bouchant ses narines. La mise en scène de Gélas, discrète, permet à la comédienne de donner à voir l’évolution de la jeune femme, perdue, meurtrie, soumise, dans les divers lieux qu’elle traverse, et qui sont symbolisés simplement par quelques accessoires. Un bémol cependant, non négligeable : la forme de la prière, efficace littérairement puisqu’elle permet une adresse évidente à un interlocuteur absent, (et muet quoique omnipotent), devient franchement gênante à la fin du roman quand elle aboutit à la soumission du personnage, et à son renoncement à la liberté. Sur scène la tendresse envers l’imam polygame est encore plus palpable et la génuflexion laisse un goût amer : les bondieuseries musulmanes ne sont pas plus légitimes que les catholiques. AGNÈS FRESCHEL Confidences à Allah a été créé au Chêne Noir du 5 au 27 juillet Plaisanterie fine Ils pourraient sans mal se revendiquer de Dada ou de Queneau, mais préfèrent cultiver leur style, décalé et bien à eux. Chacune de leur apparition est un objet scénique non identifié qui entraîne le spectateur dans une réjouissante gymnastique de l’esprit, une stupéfiante mécanique de situations et de mots, à en tomber littéralement accro. Avec Panorama commenté, François Hiffler, Pascale Murtin et Bettina Atala, tiercé gagnant de la compagnie Grand Magasin, nous invitent à observer le monde via une grille de lecture de leur cru. Telles des sentinelles aux aguets, nous voilà scrutant le paysage au travers de la baie plastifiée d’une toile de tente un brin surdimensionnée. Hautement improbable et résolument low-tech, un tableau lumineux recense les événements qui se déroulent sous nos yeux. Et soudain, l’incroyable survient : aidée par l’intervention malicieuse de quelques collaborateurs dispersés sur le site, l’activité en apparence désordonnée du monde s’avère, une fois traduite sur ledit tableau, obéir à un magique principe de symétrie ! Une logique tout à la fois implacable et carrément loufoque qui, sous le couvert de l’humour, égratigne les schémas de pensée qui tendraient à tout rationaliser, à tout faire entrer dans des cases, histoire d’en finir avec ce(ux) qui sort(ent) du rang. Parti du petit bout de la lorgnette, ce commentaire de panorama offre ainsi un savoureux point de vue sur le monde. Inattendu, et drôlement pertinent ! LAURENCE PEREZ Historique Ils sont déjà sur scène, ombres discrètes qui s’agitent derrière un drap blanc, légèrement inquiétants, tandis que l’orchestre patiente dans un coin. Qui sont-ils ? Certainement les malades mentaux qui attendent qu’on leur raconte l’histoire du communisme. Moscou, 1953, ambiance hôpital psychiatrique. À la veille de la mort de Staline, un écrivain russe est chargé de transmettre aux malades l’idéologie communiste. Dans ce grand centre d’expérimentation de l’humain qu’est cet hôpital baigné d’une lumière glauque, Victor Quezada-Perez offre une mise en scène outrée, transcendant le texte de Matéi Visniec en langage clownesque, absurde et délibérément grinçant. Les acteurs/acrobates de la Cie Umbral ne laissent aux spectateurs aucune minute de répit, rythmant d’un rock électro-acoustique les reprises des hymnes populaires des Chœurs de l’Armée Rouge. D.M. Panorama commenté, observation publique d’un paysage par Grand Magasin, a été présenté du 12 au 14 juillet dans le cadre du Festival Contre courant de la CCAS à l’île de la Barthelasse, Avignon Histoire du communisme racontée pour des malades mentaux a été joué du 10 juillet au 2 août au Collège de la Salle Justes ou Terroristes ? Diastème, qui vient de sortir son premier long métrage (voir Zib 10), rêvait depuis vingt ans de mettre en scène Les Justes, pièce écrite par Albert Camus à partir d’un fait réel, l’attentat commis à Moscou en 1905 sur le Grand Duc, l’oncle du Tsar… pièce représentée pour la première fois en 1949. Du 5 au 27 juillet, il en a proposé une mise en scène au Chêne Noir à Avignon. On retrouve dans la pièce trois des acteurs du film Le Bruit des gens autour. Frédéric Andrau, excellent Yanek que jouait Serge Reggiani à la création de la pièce. Tour à tour grave, fragile et fort, il sait remarquablement traduire les doutes puis la détermination de son personnage. Face à lui, Dora -Jeanne Rosa, dont le jeu un peu hésitant au début, se libère dès le deuxième acte, pour la transformer en une magnifique héroïne tragique- et Stepan, l’irréductible, à qui Jean-Edouard Boziak prête une remarquable énergie, faisant vibrer son personnage de révolutionnaire sans état d’âme de toute la douleur subie en prison, comme si chaque coup de fouet reçu l’avait vidé de son humanité. Seule Linh Dan est peu convaincante dans le rôle de la grande Duchesse qui veut faire se repentir Yanek. © Mathieu Morelle La sobriété de la mise en scène donne au début du spectacle l’impression d’une succession de tableaux presque figés : décor réduit au minimum, jeu des acteurs hiératique, conférant à l’ensemble un rythme très lent. Mais peu à peu, le spectateur est gagné par la puissance du texte, la course à la mort des personnages, l’histoire d’amour tragique entre Dora et Yanek, l’engrenage infernal, et la cadence s’accélère jusqu’au point d’orgue de l’image finale : Dora, résignée, soufflant une à une les bougies et rendant ainsi l’espace à l’obscurité, laissant le spectateur en tête à tête avec son questionnement sur le terrorisme, la justice, l’oppression, le sacrifice. ANNIE GAVA ET DOMINIQUE HIGEL Les Justes a été jouée au Chêne Noir du 5 au 27 juillet 11 Tous en cœur Installés sur les gradins de la Posada, posée dans la cour du Collège de la Salle, les spectateurs zieutent les décors. Quelques tables rondes occupées au centre, des caisses, et un orchestre qui patiente. Et ça déboule de tous côtés, en marcels blancs, visages poudrés, bretelles de rigueur ou robes affriolantes. Girel, Pénible, Toinet, Francine, Margot, Malou, la tante Clarisse (ah ! la tante clarisse)… ils sont tous là les personnages de Vincent Scotto, jouant et chantant les succès de l’opérette avec entrain, transformant un Petit Cabanon, les Pescadous, le Plus beau de tous les tangos du monde ou le Cane cane Canebière en airs jazzy que reprend le public entraîné. Un dépoussiérage du texte bienvenu, une mise en scène survoltée de Fred Muhl, le jeu plus que convaincant des formidables comédiens… pari réussi pour une troupe des Carboni en grande forme ! D.M. Un de la Canebière a été joué, dansé et chanté du 10 juillet au 2 août au Collège de la Salle Effet loupe Elles s’appellent Georgia, Margaret, Brenda, Frances et Julia, sont américaines et redoutables. Toutes cinq habillées de la même robe immonde couleur pêche dont nous ne voyons d’abord pas grand chose. Ce sont les visages qui frappent, car rien n’apparaît sinon les masques grimaçants des actrices maquillées à outrance dans un décor vertical où niches et trappes montrent autant qu’elles suggèrent. Des visages de baby doll, mais version trash. Car ces demoiselles sont d’honneur, au mariage d’une des leurs, et quel plus grand plaisir que de médire à tout va, s’apitoyer sur soi-même, dézinguer les autres -les hommes surtout-, et finalement s’apercevoir que la quête du bonheur est souvent vaine. La pièce d’Alan Ball, scénariste remarqué d’American Beauty et créateur de l’excellente série Six Feet Under, aurait pu être plus acide, un brin plus caustique et dérangeante. Qu’importe ! La mise en scène de Marie-Laure Malric, ainsi que la scénographie et les costumes d’Adeline Caron accentuent la dynamique visuelle et permettent aux (excellentes) actrices, véritables marionnettes humaines, d’appuyer le © Jean-Paul Lozouet trait jusqu’à la caricature. Elles se régalent, dessinant la trame d’une Amérique oscillant entre puritanisme et décadence. D.M. Cinq filles couleur pêche a été donné du 10 juillet au 2 août au Théâtre de l’Etincelle. À voir également au Théâtre Toursky les 17 et 18 octobre (voir page 16) Belge et drôle © X-D.R Dernier jour et dernière représentation ce soir-là au Théâtre des Doms, haut lieu de la culture belge à Avignon. Sur scène un duo bruxellois déjanté, Eno Krojanker et Hervé Piron. Deux artistes qui vont tester les résistances et les limites du rapport comédiens/spectateurs au cours d’un petit déjeuner orageux un soir de carnaval. Autant laisser le titre de côté, c’est une bizarrerie de plus. Car ces deux-là vont les accumuler, débutant par un simulacre de repas qui se termine dans le sang (de cerise) ; ce pourrait être un début et une fin en soi. Mais le propos prend de l’ampleur lorsque les deux compères se mettent à suivre à la lettre les indications enregistrées sur cassette d’un mystérieux admirateur, reçue le jour-même. Foin des conventions lorsqu’il s’agira de jouer, à la demande donc, Don Quichotte (désopilant), la Mouette de Tchekhov avec l’aide d’une spectatrice ou l’ébahissement devant un ciel étoilé. Tout est habilement orchestré, et le public séduit et hilare ! Baroque Abolir les tracas… Avouez que l’idée à de quoi séduire. Surtout lorsque l’auteur du texte s’appelle Fred Vargas, et que l’on s’apprête donc à se débarrasser (pas tout de suite, il y a une méthode, ou du moins des astuces) des «menus emmerdements de l’existence». Au nombre desquels l’Amour, la Guerre, la Religion, le Sens de la vie, le Librearbitre… À l’origine de L’Abolition des tracas, deux ouvrages, Petit traité de toutes les vérités sur l’existence (2001) et Critique de l’anxiété pure (2003), que l’auteure a «écrit pour rire» et qu’elle a donné «pour rire» à son amie réalisatrice et metteure en scène Lulu Menase. On retrouve avec bonheur l’univers de Fred Vargas, ses mots et jeux de mots, qui dérident et font réfléchir le public complice qui participe à ce long voyage introspectif et poétique. Portée par une mise en scène un peu répétitive parfois, Oriane Littardi est seule sur scène, plantée dans un décor de chantier archéologique conçu par Jo Vargas, peintre décoratrice et sœur jumelle de Fred ; elle s’empare du texte et se l’approprie, envoyant promener d’un geste large «les économistes surfins» qui l’emmerdent, élaborant au fil de savoureuses digressions la méthode «scientifique» de l’éradication des fameux tracas. Un bon conseil, jetez donc aux oubliettes votre «mallette à outils de pressions» ! DOMINIQUE MARÇON D.M. Petit déjeuner orageux un soir d’orage a été joué du 7 au 27 juillet au Théâtre des Doms L’Abolition des tracas s’est joué du 10 au 21 juillet aux Ateliers d’Amphoux 12 THÉÂTRE AVIGNON OFF | FESTIVAL DE MARSEILLE | INFORMELLES Résistance sans majuscule © A.G. «Résister, c’est encore exister !», c’est ce que confie un des nombreux personnages, la «démoralisatrice» de soldats allemands, femme de ménage à la caserne, qui pleure au son d’une chanson de Fréhel son amour perdu, tué par les boches. Le spectacle est né de témoignages authentiques, illustrant les petits actes de résistance, pendant l’Occupation, de toute une foule d’obscurs héros qui ont, un jour, mis leur courage en acte. La mise en scène d’Isabelle Starkier, rigoureuse et inventive, réussit le tour de force d’allier un rythme très soutenu Parmi tout ce que propose le Off à Avignon, le Nautilus est une expérience un peu particulière par La Compagnie des Trois Temps : deux personnes, au maximum, peuvent assister à une représentation… dans un camion Peugeot des années 60. Un monologue que le spectateur (ou les deux spectateurs) choisit sur une carte, comme au restaurant ! Les dix textes proposés ont été écrits par des auteurs contemporains, de Laurent Gaudé à Josiane Balasko, de Gérard Watkins à Camille Laurens et sont interprétés en alternance par deux comédiennes, Maud Ivanoff et Emilie Wiest. Le choix du spectacle est difficile et dans la cour du Collège de la Salle, à l’ombre des grands arbres, vous guettez la sortie du spectateur précédent pour tenter de connaître la tonalité, l’ambiance du «mets» choisi. J’ai opté pour Repas dominical de Nicole Sigal. Après avoir marché sur le tapis rouge qui mène au plus petit théâtre du monde, je me suis retrouvée devant un écran de tulle, face à la comédienne qui dit ce texte grinçant, corrosif, sur les rapports familiaux et j’ai pensé à tous ces dimanches en famille qui n’étaient pas de tout repos !!! Il est vrai qu’avec un titre pareil, il fallait s’y attendre ! On m’a dit que d’autres monologues étaient plus légers et plus drôles… DOMINIQUE HIGEL ET ANNIE GAVA A.G. Résister c’est Exister a été joué au Collège de la salle du 10 juillet au 2 août. Flux d’inconscience Il y eut très peu de théâtre durant le Festival de Marseille. Peu de mots, de paroles, et pas de débats. Aussi la reprise de Mon Képi Blanc à Montévidéo résonna-t-elle comme une respiration bienvenue. Mais paradoxale, le monologue étant sacrément étouffant. Le texte de Sonia Chambretto est un soliloque intérieur, flux de conscience, mais de © X-D.R Pour moi seule à la précision d’un mécanisme d’horlogerie. Le comédien François Bourcier incarne ainsi tour à tour une vingtaine de personnages, se glissant littéralement en chacun d’eux grâce à une ingénieuse scénographie. Tour à tour grave, drôle, grinçant, triste, désespéré, il endosse les costumes, suspendus sur scène à des chaînes, d’hommes et de femmes, célèbres ou inconnus, résistants ou justes, qui ont dit NON ! En quelques secondes surgissent une silhouette, une gestuelle, une voix, émouvantes, précises. Un jeune homme qui va être fusillé écrit à sa mère. Une gueule noire en grève rompt avec le Parti. Une mère raconte à sa fille l’histoire des voleurs d’étoiles. Un proviseur sauve un élève de seconde D. Le Colonel Fabien, déguisé en curé, se désespère, avant de le tuer, devant un jeune aspirant allemand qui lui a souri. Joseph Kessel téléphone à André Malraux. La Roumaine Olga, dite Pierrette, la seule femme du groupe Manouchian, et même le Führer affublé d’un nez de clown, déambulent sous nos yeux. Les témoignages s’enchaînent, vivants et multiples pendant près d’une heure et demie, avec la même énergie. Dans ce kaléidoscope de scènes, la place est également faite aux résistances d’aujourd’hui, aussi nécessaires et quotidiennes : «Résister aujourd’hui, c’est s’opposer le jour de la rentrée des classes, le 2 septembre 2008, à l’expulsion des familles de sans papiers.» conscience amoindrie. Matée, mortifiée, laminée. Celle d’un légionnaire totalement abruti, qui ressasse ses obsessions d’ordre où l’autre, le sentiment, la sensation même n’ont aucune place. Abruti parce que légionnaire, légionnaire parce qu’abruti ? On n’en saura rien, et l’interprétation brutale de Manuel Vallade ne nous en dit pas plus : buté, enfermé dans un espace clos comme une cellule, inutilement amplifié, dupliqué, son discours apparaît comme un modèle de vacuité terrifiant. Où le «on» devient le sujet pensant, où le «je» disparaît dans sa masse impersonnelle, qui s’oppose à une non moins informe, mais ennemie, région du «eux». Hubert Colas mettra à nouveau en scène un texte de Sonia Chambretto : ne manquez pas Chto, à La Criée (voir page 18), dans le cadre d’Actoral (voir page 60). AGNÈS FRESCHEL Mon Képi Blanc a été joué à Montévidéo dans le cadre du Festival de Marseille du 8 au 11 juillet Le Nautilus est resté garé dans la cour du Collège de la salle du10 juillet au 20 août. © A.G 13 Petite(s) forme(s), grand format ! Chapeau les tchèques ! © Thomas Fourneau Surtout ne pas craindre la frustration : le plan-programme distribué à l’entrée de l’allée centrale et l’accueil joliment sémaphorique de Mireille Guerre préviennent le chaland : «Vous ne verrez pas tout». Plus de 20 propositions de spectacles occupent le site monumental de l’École de la 2e Chance et l’aventure ne peut être que zigzagante, voire en dents de scie. De part et d’autre d’une rue intérieure fort animée (de petits groupes de spectateurs légèrement inquiets et titillés dans leur sentiment géographique s’y croisent et s’interpellent en faisant sonner des titres fort prometteurs : Petites Danses de Pleurs ? Loin des Équilibres ? Allons où nos pas nous mènent.. ! ) se tiennent, se dressent, se déroulent, se défont, s’effilochent parfois au gré des talents et des réussites, ces moments de travail élaborés en une semaine environ dans des espaces qui ne se laissent pas forcément apprivoiser... La rencontre n’a pas toujours lieu. Et si Alain Philippeau réussit à garder serré contre lui et les Ambassadeurs de Holbein un public fasciné par le mystère de son érudition errante ; si Carol Vanni en 7 minutes taille à nu de gestes et de mots une belle étoffe de deuil ; si Xavier Marchand dans le silence du jardin sec de la Coursive 2 orchestre malicieusement un duel de trilles entre chardonnerets, d’autres ( la faute aux lieux ou aux artistes ?) peinent à instaurer un lien ou à installer une forme... Les voix entrelacées de Sarah Kéryna et de sa grand-mère ont une justesse et une fragilité de ton qui s’éventent dans un fond de cour glacial, la déploration «éthique» et grandiloquente de Véronique Boutroux et Bruno Boussagol autour de Tchernobyl est heureusement écrasée (les murs aussi ont des oreilles !) dans un goulet obscur et, propos saisi au vol à la Buvette de la bouche même de la chorégraphe Olivia Granville déçue par sa prestation sur le stade, «... avec tout ce vent, le comique s’est envolé…». Ainsi, la Fugue Mimique entrait finement en résonance avec l’émouvante drôlerie du Forza Bastia de Jacques Tati !!!! Quant au fameux canot de glace de Cathy Weyders et Mister Moo, emblème cette année des travaux éphémères des Informelles, les éléments déchaînés dans l’anse de Maldormé en ont décuplé les effets spectaculaires : mise à l’eau et autres périls glissants ont fait fondre de plaisir le public amassé sur les rochers. Laissons alors la grand -mère de Sarah Kéryna tirer le bilan de l’entreprise : «Les réunions de peuple, c’est très beau». MARIE-JO DHÔ Le Festival des Informelles s’est tenu le 12 et 13 septembre à l’École de la deuxième chance et sur la Corniche Kennedy Les jeunes danseurs tchèques se lancent à corps retrouvé dans la chorégraphie, et le Festival de Marseille a voulu les mettre en lumière. Expérience initiée l’an dernier et reconduite avec bonheur, annonçant une collaboration plus étroite dans les années à venir et saluée par la Saison culturelle européenne. La soirée du 9 juillet s’est déroulée dans le nouveau lieu du Théâtre Nono. Jan Kodet, proche collaborateur de Petr Zuska, directeur du Ballet National de Prague, a présenté 4 danseurs et 4 musiciens qui s’observent, se mélent dans un spectacle intitulé Kevel. Retour en enfance : on joue avec des cerceaux et des balles colorées, on fait beaucoup de signes avec ses mains et ses poignets, on ose des déséquilibres savants, on flirte avec la musique. L’ensemble est enlevé et frais. Venait ensuite Dora Ho tov avec Arcanum. Elle circule au sol entre ombre et lumière dans un chemin de petits carrés bleus s’éclairant successivement sur son passage grâce au travail raffiné de Pascale Bongiovanni; elle se relache, tombe, se désarticule,dans les saccades de la musique. Opiniâtre, elle avance jusqu’à l’épuisement et l’obscurité, accompagnée par la musique répétitive de Éric Cástko. Fort ! Elle reviendra en 4e partie pour une chorégraphique complètement différente : On the perch, où tout se joue sur et autour d’une chaise. Une espièglerie bienvenue... Également chorégraphe et interprète, Dagmar Chaloupková. Dans son solo Gradina elle replonge dans des instants d’avant le désir et la naissance, s’ouvre à la vie et nous entraîne. Au début, encore, l’obscurité, puis peu à peu l’offrande... CHRIS BOURGUE tcheq’up ! © X-D.R tcheq’up ! © X-D.R 14 THÉÂTRE SAISONS Le bel équilibre Scène conventionnée dès l’enfance et pour la danse, Pôle Régional de Développement culturel, Théâtres en Dracénie annonce une programmation savamment dosée entre rencontres singulières et talents confirmés Les grands rendez-vous sont d’ores et déjà prévus : le Festival des Musiques Insolentes, toujours dédié aux musiques improvisées, ouvre cette année avec Le Tigre des platanes, avec les voix d’Eténèsh Wassié et d’Audrey Chen (21 octobre) ; le toujours très attendu festival Amarelles pour le jeune public qui occupera tout le mois de janvier : avec notamment la relecture très personnelle du Petit chaperon rouge de Joël Pommerat, celle d’Olivier Py pour les Contes de Grimm ou encore celle d’Estelle Savasta du conte de Charles Perrault Seule dans ma peau d’âne ; il y aura bien sûr Les vents du levant, à cheval sur mars et avril, festival de danse de grande qualité : Israel Galván, la Cie Membros (Febre), Abou Lagraa (D’eux sens) ou encore Sidi Larbi Cherkaoui (Origine), Montalvo et Hervieu (La Bossa Fataka de Rameau) pour ne citer qu’eux ; et un festival de jazz fin décembre… Mais la programmation réserve d’autres belles surprises, et ceci dès la rentrée ; une création du chorégraphe Franck Micheletti et la cie Kubilai Khan Investigations (Geografia, 17 octobre), l’univers de Jean-Luc Lagarce et ses Derniers remords avant l’oubli (24 octobre), le cirque de Jambenoix Mollet et Philippe Eustachon, Le grand nain (21 novembre), l’alliance intéressante de Sophie Calle et Alexandra Tobelaim autour de Marivaux (La Seconde surprise de Kubilai Khan Investigations © Laurent Thurin Nal l’amour, 19 février), Les Variations Goldberg interprétées par Zhu XiaoMei (16 mai)… La liste est longue, la saison passionnante, à vous de jouer ! D.M. Naissance du Petit Une offre grandiose En dehors d’une très belle programmation d’opéras, d’opérettes et de concerts symphoniques et lyriques (voir Zib 9), l’Opéra-Théâtre d’Avignon propose aussi en danse et en théâtre de quoi se nourrir toute l’année. Côté danse, Europa Danse débutera en octobre (le 2) avec le programme Picasso et la danse, quatre ballets (Parade, Pulcinella, Mercure et Cuadro Flamenco) présentés dans les décors et costumes réalisés d’après les maquettes originales de Pablo Picasso, avec le concours de l’École de Flamenco et du Conservatoire Royal de Madrid et avec l’accord de Picasso Administration. Viendront ensuite les ballets de l’Opéra-Théâtre d’Avignon et des Pays de Vaucluse, avec une chorégraphie d’Eric Belaud pour La Nuit Transfigurée de Schöenberg, et celle de Christophe Garcia pour le Concerti Brandebourgeois n° 2 et 3 de Bach (en novembre) ; du tango sous la direction musicale de Daniel Binelli avec Buenos Aires Express Tango (en novembre) ; la surprenant compagnie japonaise Sankaï Juku, accueillie dans le cadre de la 31e édition des Hivernales (voir page 25) ; Eva Yerbabuena accompagnée de danseurs, chanteurs, guitares et percussions dans Santo y Sena (en avril) et, enfin, les danseurs énergiques de Celtic Legends (en juin). Dans la maison d’opéra le théâtre se décline à la parisienne, côté privé, avec de grandes pièces et des comédiens prestigieux : La Maison du lac d’E. Thompson avec Danielle Darrieux et Jean Piat ; Le Temps des cerises de N. Arestrup avec E. Mitchell et C. de France ; Good Canary de Z. Helm avec C. Reali et P. Cassignard ; Biographie Théâtres en Dracénie Saison 2008/2009 04 94 50 59 59 www.theatresendracenie.com sans Antoinette de M. Frisch avec S. Testud et T. Lhermitte ; La Vie devant soi de R. Gary avec M. Boyer dans le rôle-titre ou encore Mon Père avait raison de S. Guitry avec les Brasseur père et fils (ou fils et petit-fils ?)… La saison s’annonce prestigieuse… D.M. Opéra-Théâtre d’Avignon Saison danse et théâtre 04 90 82 81 42 www.operatheatredavignon.com Picasso et la danse, Pulcinella © M. Logvinov Le Foyer du Théâtre Galli se transforme en théâtre, et met en place un projet artistique qui va changer Sanary de ses habitudes L’espace, entièrement reconfiguré, comporte désormais une scène, 80 places assises autour de tables, en configuration cabaret, un bar, et une vraie régie équipée : les vrais moyens d’un théâtre, mais dans une configuration modulable qui permet un rapport au public différencié. Le lieu ouvrira le 15 octobre à 19h avec JeanGeorges Tartar(e), détracteur public, puis avec un Bal à facettes où deux danseurs et quatre musiciens espèrent bien faire entrer le public dans leur danse (à 20h). Puis régulièrement, et à terme tous les jeudis, l’association SacréBarnum qui s’occupe de la programmation proposera des petites formes spectaculaires, des expos, des performances, des concerts, du slam, des cabarets, et des débats et conférences. On souhaite donc longue vie au Petit ! A.F. Le Petit Galli Sanary-sur-mer (Var) 04 94 88 53 90 16 THÉÂTRE TOURSKY | LENCHE | BANCS PUBLICS Le monde à la porte Au pays de l’étrange Des lambeaux noirs dans l'eau du bain © Olivier Marchal Le Panier serait-il le centre du monde ? La programmation de Lenche en ce début de saison est pléthorique, cosmopolite… mais sans dispersion ni butinage : les compagnies invitées s’installent dans le temps et proposent des cycles ! Outre le concert d’ouverture (voir page 37) et les lectures (voir pages 58, 66), les trois petites salles, en ce début de saison, se partagent le premier cycle de l’année : le Mini Théâtre, la Friche du Panier et le Théâtre de Lenche accueillent le Centre Dramatique de l’Océan Indien du 23 septembre au 4 octobre. Pas moins de trois pièces, une lecture et une lecture vidéo (jeune public), toutes écrites par Sébastien Joanniez et mise en scène par Pascal Papini, qui dirige le Centre Dramatique. Les textes de Sébastien Joanniez, limpides et simples dans leur écriture, laissent la parole à d’ordinaires destins brisés, ou en devenir : un homme qui perd la mémoire et le sens du réel, un vieillard à l’hospice, un duo de femmes, un duo d’enfants qui vagabondent… Dès après ce cycle, à partir du 14 octobre, c’est le Théâtre algérien qui s’invitera au Panier. En commençant par un spectacle en arabe, La Répétition de M’Hamed Benguettaf, qui retrace avec humour les difficiles conditions de travail d’une troupe algéroise… AGNÈS FRESCHEL Théâtre de Lenche 04 91 91 52 22 www.theatredelenche.info D’année en année les Rencontres à l’Échelle organisée par les Bancs Publics s’étoffent, se précisent, s’officialisent dans leur esthétique, tout en gardant la même convivialité, le même goût de l’accueil. Pour leur troisième édition elles déclineront 16 propositions, presque toutes des créations. D’autres à bien moins que ça parlent de festival : ici le terme de Rencontres épouse tout à fait l’esprit de la manifestation, où ce qui est en jeu est le lien, et non le spectacle. À partir du 15 octobre et pendant 11 jours, le thème des étrangetés, terme qui connote à la fois l’étrange et l’étranger, sera décliné dans des performances, des lectures, des installations plastiques, un film d’animation, de la danse… et même une «performance conférencée» autour d’une thèse de Nicolas Ferrier sur le situationnisme. Parmi les propositions, on retiendra (très subjectivement) celles de nombreux jeunes artistes de la région : Mélodie Duchesne organise une performance urbaine sur la place Cadenet de la Belle de mai, Super Euro, qui tourne en dérision les symboles de l’échange marchand ; Jérémy Beschon (Collectif Manifeste rien) met en question l’apprentissage du langage écrit, en se demandant comment il modèle nos êtres ; Marie Lelardoux et Julie Kretzschmar inventent un personnage féminin, à partir de fantasmes personnels et de faits réels, comme la défénestration de cette femme chinoise lors d’un contrôle d’identité… Mais, plus globalement, l’intérêt de ces rencontres est d’aller y passer du temps ; enchaîner plusieurs propositions courtes, et en discuter ensuite en buvant un verre : la restauration est prévue, et l’espace est chaleureux ! AGNÈS FRESCHEL L C epouse Z de Marie Lepardoux et Julie Kretzschmar © X-D.R Rencontres à l’Echelle Du 15 au 25 octobre Théâtre des Bancs publics 04 91 64 60 00 www.lesbancspublics.com Tensions nocturnes Le hall d’un hôtel glauque, dans une ville sans intérêt sert de décor à la rencontre improbable d’un réceptionniste ventru, sale, aigri et d’un représentant en photocopieuse élégant et raffiné. Le décor planté, les deux protagonistes vont s’affronter dans un drôle de huis clos, sorte de comédie policière loufoque et intense servie par deux acteurs impeccables, JeanClaude Dreyfus et Claire Nebout. Génial et Réception © Stéphane Popu prolifique auteur marseillais, Serge Valletti a concocté là un duo détonnant, l’art du dialogue qu’on lui connaît tressant un habile entrelacs de succulents jeux de mots, d’effets de surprise et de rebondissements. Proche de l’univers Vallettien, le metteur en scène Christophe Correia a su s’emparer d’une partition qui oscille entre noirceur et humour, jusqu’au dénouement, ultime facétie d’un habile stratagème. DOMINIQUE MARÇON Réception Serge Valletti le 7 octobre Théâtre la Colonne (Miramas) 04 90 58 37 86 du 9 au 11 octobre Théâtre Toursky 0 820 300 033 Egalement au Toursky, Cinq filles couleur pêche (voir p 11). Si la distribution est légèrement différente, mise en scène et scénographie sont les mêmes qu’au Festival Off à Avignon. 18 THÉÂTRE CRIÉE | GYMNASE | JEU DE PAUME (AIX) L’intimité des chefs d’État La Criée ne sera en ses murs que durant un mois… avec quatre spectacles à ne pas manquer, dont la création de Jean-Louis Benoit Cela commence par deux pièces contemporaines : la première de Martin Crimp, mise en scène par Linda Blanchet, Personne ne voit la vidéo (du 23 au 27 septembre). Il y est question de l’aliénation d’une jeune enquêtrice employée par un institut de sondage, dans la langue grinçante et drôle, terriblement mimétique du réel, du dramaturge anglais. Après cela, dans le cadre d’Actoral (voir page 60), la criée accueillera la dernière mise en scène d’Hubert Colas, CHTO Interdit aux moins de 15 ans, un monologue de Sonia Chiambretto qui fait partie de la même trilogie sur la langue intérieure que Mon Képi blanc (voir page 12). L’auteur y invente une écriture poétique à dire, qui semble en prise directe avec la conscience, juste antérieure à la verbalisation (du 2 au 4 octobre). Le pouvoir d’État Puis le Théâtre National entamera une saison dont le thème central est le pouvoir. Avec Nicomède, mis en scène par Brigitte Jaques-Wajeman (du 9 au 26 octobre). La tragédie de Corneille, qui n’en est pas une puisqu’elle finit bien, est une pièce où le pouvoir d’État n’est pas décrit comme un ordre fatal ou immanent. Nicomède, héritier du trône de Rome, ne doit pas choisir entre devoir et désir, pouvoir et justice. Il essaie, tout au long, de monter sur le trône pour obtenir un ordre juste… bien loin du Titus de Racine ! La création de Jean-Louis Benoit mettra en scène un autre chef d’État. Il s’agit de De Gaulle durant la crise de 1968 (du 7 au 31 octobre). Rédigée essentiellement d’après les extraits du journal de Jacques Foccart, la pièce met en scène les erreurs du président, la peur des ministres, la courte vue de presque tous, associée à un sens machiavélique de la manipulation politique. Jean-Louis Benoit renoue ainsi avec le théâtre documentaire, celui qui prend ses mots dans le réel et les met en scène avec le plus de vérité possible… Théâtre qu’il avait beaucoup pratiqué il y a une vingtaine Photo de repetitions du spectacle de Gaulle en mai © Antoine Benoit d’années (Une nuit à l’Élysée 1998, Les Vœux du Président 1990, Un Conseil de classe très ordinaire 1981…), lorsqu’il dirigeait L’Aquarium de Vincennes.Il s’agit donc pour Jean-Louis Benoit de plonger le théâtre dans une réflexion politique, à partir du recul historique que l’on peut aujourd’hui avoir sur mai 68. À ce propos, il organise une journée de débats et projection le 11 octobre (représentation à 15h, débat animé par Hubert Huertas à 17h30, et le film Grands soirs et petits matins de William Klein à 20h) qui devrait rassembler amateurs de théâtre, d’histoire et d’analyse politique. À moins que ce ne soit les mêmes ? AGNÈS FRESCHEL La Criée, Centre Dramatique National 04 91 54 70 54 www.theatre-lacriee.com Duo sacré et silence historique La saison du Gymnase et du Jeu de Paume affiche dès l’entrée ses lignes de force, une programmation pléthorique, variée dans ses formes, ses publics, ses provenances… Outre la création de l’opéra de Musicatreize (voir page 31) et la reprise de l’excellent Semianyki (voir page 29) au Gymnase, le complexe à deux têtes dirigé par Dominique Bluzet programme deux pièces qui, a priori, semblent à des antipodes esthétiques. L’une est portée par deux acteurs, un monstre sacré du théâtre public, Gérard Desarthe, et une star absolue du théâtre privé, Michel Galabru. Les Chaussettes mettent en scène la rencontre de leurs personnages, que tout semble séparer, mais qui répètent ensemble un numéro de clowns (du 30 septembre au 11 octobre, au Jeu de paume, Aix). (Vittorio Foa, Miriam Mafai et Alfredo Reichlin), avait besoin d’un lieu plus intime, où le rapport entre spectateur et acteurs se joue différemment. Le cinéma de l’Alhambra, à l’Estaque, marqué lui aussi par l’histoire communiste, semblait naturellement désigné pour l’aventure. Jean-Pierre Vincent a traduit lui-même ce montage de textes, qui l’avait marqué dans la mise en scène italienne de Luca Ronconi. Il y est essentiellement Les chaussettes © Cosimo Mirco Magliocca question du Parti Communiste Italien autour des années 2000, du peu d’échos et de conséquences que sa dissolution a eues, comme si l’acceptation par tous de l’absence d’alternative au capitalisme relevait d’un événement mineur. Par ricochet, il est question aussi d’un autre silence, au sujet de l’URSS, adopté par un PCI au sommet de sa force, pendant les années 60 et 70. Une occasion d’avoir au théâtre une pensée politique ? A.F. Dis-moi ce que tu tais C’est encore en un autre lieu que se jouera Le silence des communistes (du 14 au 17 octobre). Ce texte, constitué par une correspondance entre (ex )militants communistes italiens Théâtre du Gymnase et du Jeu de paume 0820 000 422 www.lestheatres.net 20 THÉÂTRE OUEST PROVENCE | GAP | BRIANÇON Mélange des genres Un livre qui changerait la vie monotone de ceux qui s’en emparent… Sceptiques ? C’est pourtant bien ce qui arrive à quatre malheureux bonhommes qui tournent en rond dans leurs vies uniformes où n’ont de place ni l’amour ni l’imagination. Jusqu’à l’apparition subite d’un livre que l’un d’eux va lire et qui lui ouvrira tout un monde nouveau fait d’aventures, de voyages, d’utopie, d’horizons élargis… La cie espagnole La Baldufa mêle styles et techniques (ombres chinoises, cinéma d’animation, marionnettes) dans un spectacle qui accueillera tous les publics à partir de 6 ans. Puis Philippe Torreton s’empare d’une figure clas-sique et subversive du répertoire : Dom Juan de Molière. Un Dom Juan moderne désacralisé que Torreton met en scène, et joue, avec «un regard différent, moins favorable». Séducteur, violent, tyrannique, obstiné, décadent, il Le livre imaginaire Cie La Baldufa le 7 octobre Théâtre (Fos) Dom Juan Molière le 16 octobre Théâtre (Fos) 04 42 11 01 99 www.scenesetcines.fr Le Livre Imaginaire © X-D.R est tout cela bien sûr, un «méchant homme» progressivement mis à nu, habilement secondé par l’indispensable Sganarelle (Jean-Paul Farré), pendant moral et philosophe. Une première mise en scène attendue. D.M. En bourlinguant Humaine condition Une intrigue simple sert de prétexte au dernier spectacle écrit et mis en scène par François Cervantes et sa compagnie l’Entreprise : à la mort d’un peintre, ses amis ramènent chez elle la jeune femme silencieuse qui était son modèle. Ils débarquent sur une île, où tout n’est que ruines, y cherchent des traces de vie et essaient de comprendre ce qui s’y est passé depuis le départ de la jeune femme. Prétexte à un voyage imaginaire poétique, le spectacle écrit par François Cervantes s’en va fouiller notre inconscient et titiller notre imaginaire. Car cette île n’est pas inhabitée, loin de là, et les humains qu’y s’y agitent côtoient, sans le savoir, les disparus, les revenants toujours présents, drapés dans leurs oripeaux, masqués. Douze personnages que les masques sculptés par Didier Mouturat habillent et transcendent, suggérant douze essences d’une humanité proche. Bien plus qu’une île, l’univers de tous les possibles. À la Colonne également, et pour ouvrir la saison, un polar de Serge Valletti, avec Jean-Claude Dreyfus et Claire Nebout (voir page 16). Réception Serge Valetti le 7 octobre Une île François Cervantes le 14 octobre Théâtre la Colonne (Miramas) 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr Franck Dimech adapte des extraits d’Amérika ou le Disparu et Description d’un combat de Franz Kafka. Sur la route d’Oklahoma suivra ainsi le fil d’un personnage dénommé Karl, sans pour autant dérouler de continuité narrative. Quatre acteurs l’accompagnent, qui se partagent «les restes d’une collectivité humaine disloquée», plus un qui «dansera les gestes (…) écrits à partir des mots de Kafka.». Les 25, 26, 27 sept et 1er et 2 oct, à la Friche. 04 95 04 95 04 D.M. Échos de l’histoire Le Petit chaperon rouge version Jean-Claude Grumberg ça donne Le Petit chaperon Uf, une relecture caustique de la tragédie nazie, une leçon d’histoire et de tolérance. Il y a le loup bien sûr, qui là est déguisé en caporal et se prénomme Wolf, et le Petit chaperon, habillé de rouge, qui va rendre visite à sa mère-grand. Mais voilà : interpellée par le caporal Wolf, elle apprend qu’elle est Uf, et que pour les gens de son espèce existent des lois qu’elle ne respecte de toute évidence pas. Car «Uf doit porter capuchon jaune», ne doit pas manger de beurre, ni gagner de l’argent, entre autres… Abusant de son pouvoir pour faire dire à la fillette où est hébergée (clandestinement) sa mère-grand, le loup insiste… Le message de Jean-Claude Grumberg est limpide, et la mise en garde habile, le 24 octobre Opéra Toulon Provence Méditerranée 04 94 93 03 76 www.operadetoulon.fr ce qui n’exclut ni l’humour ni le jeu ; la mise en scène de Sylvie Orcier, très visuelle, insiste sur les rapports de force des deux protagonistes et renoue avec l’esprit du conte, celui qui rassure autant qu’il effraie, celui qui fait que même si on sait que les loups seront toujours les loups, on peut peut-être arriver à imaginer autrement la liberté. D.M. Le Petit chaperon Uf le 7 octobre La Passerelle (Gap) 04 92 52 52 52 le 10 octobre Le Cadran (Briançon) 04 92 25 52 52 Rappels dans le Var (et le Vaucluse) À Châteauvallon la saison théâtrale commence avec quelques joyaux divers que nous vous avions signalé durant la saison dernière, tous appréciés à divers titres par divers membres de la rédaction : une occasion de rattraper ce que vous avez manqué ! Ne ratez pas le Pinocchio de Joël Pommerat, qui atteint au cœur avec le même talent enfants et adultes (du 23 au 27 sept) ; plongez avec Laurence Vielle dans le texte de Pia Divoka, Solinge, qui raconte le viol mais surtout la reconstruction d’une toute jeune fille, qui recompose son image comme on assemble un puzzle (les 30 sept et 1er oct) ; rejoignez Dieudonné Niangouna dont le texte sur les sans papiers, Attitude Clando, témoigne d’une urgence sociale, humaine, et d’une singularité d’écriture exceptionnelles (les 3 et 4 oct à Châteauvallon, et du 6 au 10 oct en tournée Nomades autour de Cavaillon) ; enfin, venez découvrir l’univers d’Emma Dante avec son diptyque autour de Palerme : Mishelle di sant’Oliva et Vita mia (les 17 et 18 oct à 19h30 et 21h30). Sans oublier de goûter à la danse (voir page 24), toujours de choix à Châteauvallon ! A.F. Châteauvallon, Ollioules (83) 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com Scène Nationale de Cavaillon (84) 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com Agitations sur le front Hugo alors exilé à Guernesey, solitaire et sans illusions, mais profondément humain. Enfin, Marc Jolivet et son frère l’ours brun nous feront faire un tour d’actualité d’une planète terre en danger, et dont la destruction programmée par les dieux excédés par tant d’irresponsabilités humaines est mise un temps en sursis pour laisser à l’humoriste de quoi trouver une ultime solution salvatrice… © X-D.R La compagnie Le temps de dire ouvre la saison du théâtre le Sémaphore à Port-deBouc. Après un bien nommé Bal du début qui devrait faire «danser dans les vagues», avec Paul Fructus et Éloïse Brunet au chant et à la manœuvre, c’est Victor Hugo qui sera à l’honneur avec une adaptation par Paul Fructus des Travailleurs de la mer, mis en scène par Daniel Briquet. Incarnant tous les personnages, Paul Fructus rend à cette œuvre romanesque toute sa démesure, lui donnant une dimension épique («pour l’enfant qui reste en nous») et politique («pour l’humain que nous tentons de préserver»). Du marin Gilliat, cet homme «de rien», fort et courageux, parti à la recherche du moteur intact d’un navire échoué pour l’amour d’une femme, l’adaptation de Fructus fait ressortir le portrait d’un homme libre, en proie à un conflit avec son «personnage intérieur», mais aussi en lutte contre la mer, personnage à part entière du roman, qu’incarnent à merveille les musiciens présents sur scène. Gilliat, double de D.M. Le Bal du début Cie le temps de dire le 26 septembre Les travailleurs de la mer Cie le temps de dire le 3 octobre Mon frère l’ours blanc Marc Jolivet les 10 et 11 octobre Théâtre le Sémaphore (Port-de-Bouc) 04 42 06 03 09 www.theatre-semaphoreportdebouc.com Les travailleurs de la mer le 17 octobre (Port-Saint-Louis) Espace Gérard Philippe 04 42 48 52 31 www.scenesetcines.fr Pauvre humanité Denis Lanoy, metteur en scène et fondateur du Triptyk théâtre, poursuit sa démarche artistique se réclamant d’un théâtre de réflexion qui «met en rapport des hommes à l’Histoire.» Il s’empare d’une œuvre du romancier et dramaturge hongrois Ödon von Horváth, Foi, amour, espérance. Inspirée d’un fait divers authentique qui eu lieu à Munich en 1932, la pièce décrit une société en crise économique par le biais du parcours d’une jeune chômeuse, Elizabeth, qui cherche simplement à être heureuse, même si c’est un combat. Cherchant de l’argent pour acheter une carte de VRP, elle veut vendre son corps à l’institut d’anatomie. On lui prête la somme, pensant qu’elle est la fille de fonctionnaires du ministère des finances ; il n’en est rien. Arrêté pour avoir exercé sans carte, elle est alors confrontée à l’abandon de son fiancé, agent de police, qui ne peut compromettre sa carrière pour elle. Ne voyant pas d’autre issue que la noyade parce qu’«elle n’a rien à bouffer», elle mourra doucement d’épuisement au poste de police une fois repêchée. La mise en scène de Denis Lannoy ne cherche pas à justifier le pourquoi, mais plutôt à expliquer le comment, dans un étrange décor de dix-huit boîtes mobiles et de moulages anatomiques. D.M. © Stephane Barbier Foi, amour, espérance mes Denis Lanoy du 16 au 18 octobre Théâtre Christian Liger 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com 22 DANSE PAVILLON NOIR | GYPTIS | CHÂTEAUVALLON | BÉJART Entre deux Ballets Pendant que le Ballet Preljocaj va créer Blanche Neige à la biennale de Lyon (ne vous inquiétez pas, elle sera au GTP bientôt), le Centre Chorégraphique National de Lorraine, qui possède un Ballet rompu au répertoire contemporain (et aux autres !), viendra au Pavillon Noir danser un programme composé de quatre pièces magnifiques : Broken Man de Stephen Petronio, court sextuor écrit après le 11 septembre ; Two, un solo Russell Maliphant, où une danseuse se débat dans un cercle de lumière crue qui ne cesse de rétrécir, de la morceler, puis de la faire littéralement disparaître. Un duo féminin de Claude Brumachon en hommage à Jeanne d’Arc. Et La Stravaganza, de… Preljocaj. La pièce, que son Ballet n’a jamais montée, a été créée en 1997 pour le New York City Ballet, puis dansée depuis par les plus grands ballets du monde. Écrite en hommage à Balanchine et à son arrivée à New York, La Stravaganza oppose puis fait fusionner deux groupes de danseurs : l’ancien monde et le nouveau, le moderne et le baroque, le lâché, le placé, l’académique. Une petite leçon d’histoire de la danse, avec ce quelque chose en plus qui en fait une œuvre… AGNÈS FRESCHEL CCN-Ballet de Lorraine du 2 au 5 octobre 0811 020 111 www.preljocaj.org À noter Comme chaque année Marseille Objectif Danse propose, dans le cadre d’actOral, une programmation intitulée : les Écrits de la danse (voir page 60). La Strravaganza © Laurent Philippe Marcher, danser, jouer Sans Lui Dans d’autres toiles Après les feux et les fastes de la saison d’été (voir page 24), Châteauvallon rentre en ses murs et propose une danse moins spectaculaire, mais tout aussi choisie. Avec d’abord le trio masculin de Catarina Sagna, chorégraphe qui aime à interroger le corps du danseur dans sa présence théâtrale : Basso Ostinato les confronte à une imagerie virile, et à ses accessoires (le 10 octobre). Puis, après Solinge (voir page 20), Châteauvallon accueillera à nouveau Laurence Vielle : la comédienne et auteur y rencontre le chorégraphe Jean-Michel Agius pour un duo accompagné par deux musiciens, et qui décrit leur État de marche : un double road movie que chacun a accompli, de chez eux à Bruxelles et Paris (les 14 et 15 octobre). Après avoir accueilli Tonight le Gyptis renouvelle l’expérience et ouvre sa saison avec une autre pièce de Josette Baïz, dansée cette fois par la Compagnie Grenade (voir page 24). Les Araignées de mars font preuve une fois de plus de l’énergie tellurique et acrobatique des danseurs, qui déclenchent à tout coup l’enthousiasme et l’adhésion du public. Surtout dans cette pièce circassienne, verticale, où les jeunes corps gainés de cuir grimpent à des fils arachnéens qu’ils entremêlent… La pièce, parfois drôle, manque toutefois un peu de cohésion, et on ne sait trop quel est son sens, sa dramaturgie. Peu importe ? A.F. Centre National de Création et de Diffusion Culturelles Châteauvallon (83) 04 94 22 02 02 www.chateauvallon.com Basso Ostinato © Caroline Ablain © Fabrice Coffrini La tournée française du Ballet Béjart passe par Marseille. L’ultime pièce du chorégraphe, Le Tour du Monde en 80 minutes, est programmée pour deux soirées au Dôme. Elle est conçue en deux parties, et reprend les diverses sources d’inspiration du chorégraphe : en commençant par l’Afrique percussive, puis les standards des danses moderne et contemporaines (dont des citations de ses propres pièces), et en s’orientant ensuite vers l’Asie, l’Inde, les danses extrême-orientales. Le ballet, formé pour l’essentiel par les anciens de son École, est d’un niveau technique irréprochable, et s’est aussi entraîné à toutes sortes de techniques de cirque… ce qui permet quelques beaux exploits ! A.F. Le Tour du Monde en 80 minutes Béjart Ballet Lausanne Les 12 et 13 oct Le Dôme 04 91 12 21 21 www.bejart.ch www.gdp.fr www.ticketnet.fr A.F. Les Araignées de Mars Cie Grenade Les 10 et 11 oct Théâtre Gyptis 04 91 11 00 91 www.theatregyptis.com © Leo Ballani KÉLÉMÉNIS | L’OLIVIER | LES SALINS | NÎMES L’enfance de l’art Deux pièces de Gat Michel Kéléménis a une véritable expérience avec les enfants. Petits. Ceux du primaire, de la maternelle. Parce qu’il sait combien la danse, surtout la contemporaine qui interroge le corps dans sa facture même, intéresse ceux qui ne verbalisent pas totalement ce qu’ils sont, et tout à la fois ne maîtrisent pas vraiment les détails de leur corps qui, instable, grandit sans cesse, et ressemble si peu à celui des adultes. Qu’ils deviendront ? Kélé a donc conçu un spectacle pour eux. Là-dessus. Sur l’anatomie, les articulations et les muscles, mais aussi sur la découverte, le changement anatomique, l’attirance, le mouvement, l’amour. Le désir ? Cela s’appellera L’Amoureuse de Monsieur Muscle, et sera montré au Studio Kéléménis (pas encore fermé), et aux Bernardines (rouvertes !). A.F. L’Amoureuse de Monsieur Muscle le 8 octobre Studio Kéléménis 04 96 11 11 20 le 17 octobre Les Bernardines 04 91 24 30 40 DANSE 23 Trois pièces de Merce Crises © Briana Blasko © Gadi Dagon Le chorégraphe israëlien est installé à la Maison de la danse à Istres, et c’est à l’Olivier qu’il donnera ses deux dernières pièces, créées en juillet à Montpellierdanse. Fondées sur une danse coulée et virtuose, à la grammaire surprenante de fluidité et d’athlétiques performances (sans ostentation), les chorégraphies d’Emanuel Gat séduisent malgré une aridité certaine du propos. Ainsi, dans Silent Ballet, il est question de priver la danse de sons extérieurs pour ne laisser parler que les sons et l’espace. Sixty Four, moins abstraite, oppose une femme à quatre hommes, au-delà d’une démarcation qui fait penser à bien des murs. En espérant que les murs istréens ne semblent pas au chorégraphe ni trop contraignants, ni trop modestes, ni trop fragiles ! A.F. Silent Ballet - Sixty four Emanuel Gat le 10 oct Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr C’est bien la Merce Cunningham Company qui sera au théâtre de Nîmes en octobre. Avec trois chorégraphies de celui qui a bouleversé l’histoire de la danse et lui a permis de s’affranchir de la dramaturgie pour entrer dans l’ère du mouvement. La pièce la plus ancienne est Crises, un quintet de 1960, avec de costumes de Robert Rauschenberg (mais oui) ; les deux autres, plus récentes, mettent en œuvre la totalité des 14 danseurs, et des musiciens (qui donneront un concert la veille, voir page 30). CRWDSPCR a été créée en 1997, et Mini Events en 2008. Que dire de plus, sinon vous conseiller de ne pas le rater ? A.F. L’enfance de l’art (bis) Christine Fricker a une véritable expérience avec les enfants. Petits. Ceux du primaire, de la maternelle. Parce qu’elle sait combien la danse permet de raconter les choses au plus © Hélène Dattler près de leur intérêt, réceptifs qu’ils sont par tous leurs pores à la réalité matérielle du monde. Dans Du début à la faim elle raconte, en partant du besoin physiologique, de la sensation de faim, comment se fabrique le pain. Comment l’homme domestique le blé, la farine, la pâte, la cuisson, et fabrique une chaîne incroyablement complexe pour fabriquer cet aliment si simple, et si essentiel. Un spectacle coloré, ludique, qui se sert des mots autant que des gestes, pour faire entendre aux mômes à quel point leur quotidien, mine de rien, est sophistiqué. A.F. Du début à la faim Christine Fricker les 8 et 15 oct Les Salins – Scène Nationale 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr Crises, Mini Events, CRWDSPCR Merce Cunningham Company les 15 et 16 oct Théâtre de Nîmes (30) 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com 24 DANSE ALLAUCH | TRETS Europe aux States des verrouillages classiques. À partir de ce vocabulaire, il a écrit des standards simples, des duos pour les chansons d’amour, de petites formes qui travaillent la perfection du geste, mais dans une détente nouvelle, qui ne cherche pas l’amplitude ou la vélocité mais la justesse tranquille, et l’élan. La soirée se conclut par une rencontre inattendue et formidable, les danseurs de Grenade et ceux d’Europe se retrouvant pour un Rhapsody in blue d’enfer. Conjuguant réellement la différence de leurs techniques, ils ont pris un plaisir évident, et communicatif, à breaker au sol pour les plus classiques, à tenter des jetés (demis !) et des portés placés pour les plus acrobatiques. Dire qu’on confondait les corps, beaucoup moins normés chez Grenade qu’à l’Europe, serait exagéré. Mais visiblement il n’y avait qu’une âme… Le 31 juillet le Ballet d’Europe proposait à Allauch une soirée américaine, partagée avec la Compagnie Grenade de Josette Baïz. Non les adolescents (voir ci-dessous), mais la Cie professionnelle. Celle-ci ouvrit la soirée avec un hommage un peu décousu, théâtral sans l’être, à Fred Astaire. Ses interprètes y replongeaient dans la danse américaine jazz des années 40 (jazz roots, modern jazz) pour établir des ponts avec les danses populaires actuelles : intéressant, mais pas totalement réussi dans la forme. Dans un tout autre genre et sur des standards de Gershwin, très «classiques» dans leurs interprétations orchestrales, le ballet de Jean-Charles Gil proposa une pièce subtile, inspirée de la modern dance américaine. Le chorégraphe y met en œuvre un style coulé, gracieux, léger, en regardant vers cette école qui n’avait pas rompu avec le mouvement (comme le fera la postmodern-dance) mais s’était débarrassé AGNÈS FRESCHEL © Jean-Claude Verchere Le corps sacré Retour sur l’un des événements phares de l’été à Châteauvallon avec la création mondiale pour sept danseurs de Ushio Amagatsu, Utsushi L’instant était magique et le silence quasi religieux dans le théâtre à ciel ouvert du CNCDC Châteauvallon. Et pour cause, le chorégraphe japonais Ushio Amagatsu et sa compagnie masculine Sankai Juku avaient rendez-vous avec ses «fidèles», inconditionnels de la danse Buto et réceptifs à sa recherche personnelle basée sur un Dialogue avec la gravité*. Pour cette occasion unique de jouer en décor naturel, Ushio Amagatsu avait imaginé un spectacle singulier, florilège recomposé de quelques-unes de ses pièces, dont la plus ancienne de 1978 n’est pas inscrite au répertoire. Un souffle nouveau donc, une configuration réinventée, une architecture différente, une musique recomposée pour donner vie à Utsushi, œuvre à part entière, traversée par le concept d’humanité et d’universalité qui est la base même de son travail chorégraphique… Ce qui aurait pu apparaître comme décousu a mis en évidence, bien au contraire, l’extrême cohérence de son propos, de ses recherches qui, multidirectionnelles, devenaient «une». Un nouvel ordre qui a permis de lire à travers ces extraits son parcours de trente ans, et retrouver un peu de l’essence de chaque création ainsi que leur principe commun. Car ce qui frappe encore dans sa manière de revisiter son travail, c’est la cohérence et l’intensité de son art qui, toujours, ne cesse de s’interroger : Qu’est-ce que c’est que l’humanité ? Comment appréhender notre présence au monde ? Par la grâce d’interprètes exceptionnels (tous jeunes et nouveaux dans la compagnie à l’exception d’un seul présent depuis 1991), la danse de Ushio Amagatsu renaissait à chaque expression, chaque mouvement, chaque élan : de tableaux en tableaux, les corps s’échappaient, se libéraient avec force et gravité. Muets, ils s’offraient à la nuit qui les enveloppait d’un linceul blanc, plus vivants que jamais. Hiératiques, visages masqués parfois, paumes ouvertes ou poings fermés, les danseurs soudain gardaient nos âmes, sentinelles impassibles. Vient le rituel inéluctable : les flammes, le vent, le sable, quand la danse se fait élévation spirituelle, sacrifice, incantation. Puis la «cérémonie» chorégraphique se consume au fil d’une lente procession qui retient le souffle du public, l’homme chavire puis se relève, glisse et se hisse. C’est l’humanité tout entière, dans son dénuement total, qui résiste. MARIE GODFRIN-GUIDICELLI (*) titre de son ouvrage paru en 2001 chez Actes Sud. Sankai © X-D.R Sacré Sacre ! C’est à une époustouflante interprétation du Sacre du Printemps que le Groupe Grenade de Josette Baïz s’est livré dans la cour du château de Trets le 19 juillet. La jeunesse des artistes, (entre 13 et 17 ans), la maîtrise des gestes, une chorégraphie qui joue entre la fluidité du propos et ses emportements donnent à voir un spectacle d’une grande qualité dans la belle mise en lumière de Dominique Drillot… Les costumes de Patrick Murru soulignent la grâce fragile et exaltée des adolescents, et la musique de Stravinsky permet aux interprètes de montrer l’étendue de leur jeune talent dans un rite incantatoire où ils semblent interroger leur propre jeunesse qui se sacrifie et exulte… Le sacre est précédé de deux courtes pièces. Un hommage à William Forsythe présente un travail très rigoureux, les danseuses rendent l’espace matériel de la scène naturel, vivant, mouvant. Un pas de deux, dansé par les benjamins de la troupe, sur Tableaux d’une exposition de Mussorgsky, allie humour et ingéniosité : le jeune boxeur et la danseuse classique se découvrent, échangent leurs rôles, se confrontent, se copient, dans un mouvement très frais et dynamique. Une cure de jouvence ? MARYVONNE COLOMBANI LES HIVERNALES DANSE 25 Le off de la danse Y a plus d’saisons ! Pendant le off avignonnais l’été des Hivernales s’étoffe, s’étale en deux théâtres et 10 spectacles quotidiens... l’hiver des Hivernales sera-t-il aussi beau ? Seul à deux Entre quatre Siegfried Parmi les 11 compagnies présentes, celle de Frédéric Cellé, Le Grand Jeté !, installée à Grenoble, a d’abord proposé un solo de 20 mns, D’être en solitude : un homme (Thomas Régnier) se bat et se débat contre un adversaire invisible et tenace, son regard inquiet interroge tout aussi bien la terre que le ciel (vide ?), le corps se jette violemment au sol, sa respiration de plus en plus oppressante s’unit peu à peu à la plainte d’une contrebasse sur fond de percussions, jusqu’au noir de la fin. Un duo, The last, extrait de Lâches, constitue la 2e partie. Encore la violence, mais partagée cette fois dans une sorte de rapport sado-macho, parfois drôle. Dans une lumière crue tombant froidement du plafond, le corps souple et mince de la danseuse (Li-Li Cheng) affronte le corps athlétique et massif du danseur (Barthélémy Manias Valmont), contraste étonnant souligné par l’étrangeté de leurs rapports et la perfection de leur travail physique qui relève de la performance. Un violoncelle, un clavecin et une voix de haute-contre installent une atmosphère trouble et sensuelle. L’ensemble coupe le souffle ! Plus théâtral et déjanté, le travail de la compagnie belge Woosh’ing Mach’ine emmène dans une radio de Bayreuth, qui se consacre semble-t-il exclusivement à la célébration de Wagner. De scènes franchement cocasses où Siegfrieds et Brunehildes multipliés échangent baisers et serments en emmêlant perruques et dagues, à des mouvements d’ensemble mimant le mythe et ses leitmotivs, le spectacle s’amuse, se perd un peu dans des intermèdes musicaux mal maîtrisés, puis revient en force en projetant, entrelacées, des images de l’histoire belge et allemande, des mythes teutons, de la guerre. Les animateurs de la radio mangent des saucisses et boivent de la bière : caricatures absurdes de l’Allemagne, ou des Belges qui, à force de dissensions, se mettent à réinterroger la période sombre du nationalisme flamand ? C.B. ET A.F. Les spectacles ont été donnés au Studio et au Théâtre des Hivernales du 10 au 26 juillet Cie Frederic Celle © Cathy Peylan 26 ARTS DE LA RUE LA FOLLE HISTOIRE DES ARTS DE LA RUE La rue a une histoire Le Conseil Général des Bouches-du-Rhône poursuit sa politique de soutien aux Arts de la Rue, avec une biennale qui dure six semaines et s’étend sur le territoire… Ce bus, qui se visite en une trentaine de minutes, permet une approche pédagogique des arts de la rue. Même si l’accumulation d’objets et d’informations dans cet espace restreint est a priori choquante pour les yeux, le public en apprendra beaucoup sur l’histoire de ces arts, mais aussi sur leurs genres très divers, à travers la projection de documents d’archives (poétiques, contestataires, interventionnistes, chorégraphiques, contées, plastiques…). Et à l’intérieur des bus, dans des alcôves sonorisées, le public pourra se familiariser avec l’univers de chaque compagnie. Les trois premiers La rue est dans le pré © Artonik La manifestation est d’une ampleur impressionnante : pendant six semaines six compagnies investissent chacune une commune, et y jouent plusieurs spectacles de leur répertoire. Puis elles se réunissent pour une autre semaine de florilège... 40 spectacles seront ainsi joués, en commençant par Artonik à Gignac la Nerthe (du 29 sept au 5 oct), suivis par No tunes international à Saint-Rémy (du 6 au 12 oct), Ex Nihilo à Auriol (du 13 au 19 oct), Genérik vapeur ainsi que l’Agence Tartar(e) à Vitrolles (du 20 au 26 oct), pour finir par Ilotopie à Miramas (du 27 oct au 2 nov) avant que tout ce petit monde ne se retrouve à Salon du 1er au 8 novembre… Cette Folle histoire des Arts de la rue, organisée avec Karwan, est particulièrement bien pensée : contrairement à la très belle expo des Machines imaginée il y a deux ans, l’argent dépensé va essentiellement aux compagnies (toutes de la Région) et non à la logistique. Ensuite elle s’installe dans des communes petites ou moyennes qui manquent d’événements de cet ordre : la rue y réagit mieux, autrement, que celle des métropoles. Enfin les compagnies invitées sont d’esthétiques très diverses, ce qui prouve la vitalité, la qualité et la variété des arts de la rue dans le département. À côté des spectacles, et accompagnant sa route, un Bus expo dira toute cette richesse : il va sillonner le département, en s’arrêtant dans les villes du parcours, mais aussi à Petit Art Petit à Marseille (le 20 sept), à Tremblement de rue à Gardanne (le 21 sept), à Marseille et Martigues pour Rue Libre les 24 et 25 sept, à Chaud Dehors à Aubagne (le 26 sept), à Cavaillon pour accompagner les Nomades de Tablantec (le 27sept) et même à La Foire de Marseille (le 28 sept). Après une carte blanche offerte à des anciens de la FAI ART (voir page 78 et 79), c’est donc Artonik qui ouvrira la danse, avec trois spectacles de son répertoire, fondé sur l’observation de l’espace public : un bar, une plage… La rue est dans le pré, pique-nique revendicatif qui propose des scènes de genre sur les congés payés depuis 1936, parvient à retrouver une mémoire à travers des bandes d’archives, tout en détournant le réel discrètement, par la danse, et de légers décalages… La démarche de No Tunes International est plus interventionniste : les compères interviennent dans la rue en retrouvant la mémoire des lieux, puis en y jouant leurs scènes de noceurs, de facteurs, de voyous en cavale ou de commémorateurs éplorés, avec tout le sérieux du monde… Quant à Ex Nihilo, c’est une cie de danse qui a choisi d’intervenir dans l’espace public, et le fait bien. Grâce à une danse athlétique qui joue avec le danger, les coups, la violence, et se sert des bancs, des murs, des rampes, des étroitesses et des ouvertures, comme d’autant d’espaces d’envol ou de rupture… Allez donc les voir à Gignac, Saint-Rémy ou Auriol, en attendant les autres à la fin du mois d’octobre… AGNÈS FRESCHEL La folle histoire des arts de la Rue du 13 sept au 9 nov 04 96 15 76 30 www.follehistoire.fr Mirettes et papilles à la Mirabelle Pour la 5e année consécutive le Festival Caressez le Potager a rassemblé les amoureux d’espaces verts, de légumes bio, d’aventures savoureuses, avec 800 à 900 personnes par soirée, et plus pour la dernière avec le concert de la fanfare Vagabontu qui s’est terminé à 4 heures du matin ! Jean-Louis Favier, son créateur et grand organisateur, s’en félicite. Il y en avait pour tous les goûts : petits et grands déambulaient d’un atelier jardin ou écriture à une initiation aux claquettes, d’un film d’animation à un parcours chorégraphié... Au détour des bosquets D’abord la plasticienne Béatrice Bonhomme ; elle vient tous les ans de Bastia pour installer fleurs de papier, oiseaux, papillons, galets peints, sculptures en matériaux de récup... Elle propose des graines en vente dans des sachets aux étiquettes évocatrices : graines du temps qu’il fait, du premier bain de l’année, de la belle rencontre. Marco Beccherini, danseur et chorégraphe, a présenté Fratelli, un duo sur le thème du double et de la gemellité, qui n’est pas toujours tendre... Après avoir dansé cinq ans sous la direction de Roland Petit et partagé bien des aventures, il a créé sa compagnie Campo en 2000 et doit prendre bientôt la direction du Théâtre Solvay à Livourne. Un trio, composé d’une chanteuse lyrique, une pianiste et une danseuse (dans l’ordre Marilène Aledo, Hélène Niddam et Sara Moha) qui prétendait dépoussiérer la tradition flamenca, n’a pas réussi à convaincre : la représentation manquait de souffle et seule la danseuse a vraiment séduit. Mais les propositions du buffet étaient alléchantes : beignets de courgettes et poulet Yassa ont ravi les papilles...Ça s’appelle du spectacle total, non ? CHRIS BOURGUE Le Parc de la Mirabelle (Marseille 12e) a accueilli le Festival du 17 au 19 juillet Installation de Beatrice bonhomme © X-D.R ARTS DE LA RUE 27 Aubagne au centre des Arts À peine la saison commencée, le Comœdia sort de ses gonds et repart dans la rue, pour un autre tour de Chaud dehors les 25 et 26 sept. Avec quatre spectacles de choix : Ronan Tablantec qui, avant le Vaucluse, passera par là (voir page 28), JeanGeorges Tartar(e) qui, avant de rejoindre ses copains de Generik Vapeur pour la Folle histoire des arts de la Rue, viendra «détracter» dans les rues d’Aubagne, la Cie gardoise Lackaal Duckrick, qui propose au public de vivre pendant 10 minutes avec un ado rebelle ou une grand-mère sourde… Ces deux jours donneront aussi aux Aubagnais l’occasion de voir le Bus Expo de la Folle histoire s’installer place Foch, et d’accueillir la tournée des Batteurs de Pavés : les Suisses jouent à six Macadam Cyrano, version intégrale en fait, mais pour la rue, du chef-d’œuvre boursouflé de Rostand… Qui passera par ailleurs par d’autres villes : Marseille le 24 sept, Martigues le 25, Arles le 27, MontDauphin (05) le 28, Pernes les Fontaines (84) le 2 oct … Quand je vous disais qu’Aubagne est au centre des Arts ! Macadam Cyrano © Loïc Pipoz AGNÈS FRESCHEL Chaud dehors les 25 et 26 sept 04 42 18 19 88 Macadam Cyrano Les Batteurs de pavés www.karwan.info Y’a pas d’lézard Ça va trembler ! Depuis quatre années Tremblement de rue met Gardanne en fête durant toute une journée. Une série de courtes représentations ou performances (fanfare de Brass Band, bestiaire fantastique de la cie Malabar, et des compagnies aussi diverses et loufoques que La tactique du gendarme ou l’Ile au Trésor) qui se visitent à pied, en suivant un trajet simple… Le Bus Expo aussi passera par là ! A.F. Dans le cadre d’actOral (voir page 60) Lieux publics ouvre sa place publique au poète Julien Blaine. Accompagné de la cie Alzhar il ouvrira le parvis de l’opéra à d’autres mots… Les douze minutes de Pour sainte Thérèse et l’enfant fœtus seront précédées d’un défi lancé aux musiciens (surtout aux vents) : il s’agit de couvrir la sirène de midi… Rendezvous à 11, avec vos instruments (sifflets, percu et tout outil à vacarme est bienvenu !) A.F. Attention ! Petit Art Petit, organisé par l’association Lezarap’art, envahit le Parc de l’Oasis le 20 septembre. On vous a déjà prévenus (voir Zib 10) ! L’occasion de rencontrer des associations, des cies d’arts de la rue, et des plasticiens de l’éphémère… Ça dure toute la journée (de 12h à 19h), et près de 8000 personnes y passent chaque année. En famille. Sirène et midi net Parvis de l’Opéra de Marseille le 1er oct 12h 04 91 03 81 28 www.lieuxpublics.com Tremblement de rue Gardanne le 20 septembre 04 42 65 77 00 www.ville-gardanne.fr A.F. Petit art petit 04 91 69 11 80 http//pagesperso-orange.fr/lezarapart Précieux désordres Ornic’art dépose un Préavis de Désordre Urbain pour les journées du 24 au 27 sept. Si vous passez par la Joliette le 24, à la Friche au soir du 25, aux Réformés le 26 ou au Point de Bascule le soir du 27, vous risquez de tomber sur quelques performers de talent. Pas provocateurs, pas dérangeants : fouteurs de désordre, dans un monde qui en a bien besoin. Ils ont pour nom Princesse Peluches, Peter Les mots sont des sons Baren, Christian Messier, Herma Auguste Wittstock… et mettent leur corps en jeu pour nous remuer un coup. Sûrement salutaire. Jeunesse verte Des étudiantes qui se réunissent pour fabriquer à Aix un festival écolo, avec toilettes sèches, tri sélectif et vaisselle recyclable. L’événement allie expositions et documentaires sur le thème de l’eau (et de son écologie) sur trois sites universitaires (Université de Provence, Paul Cézanne et Université de la Méditerranée) et propositions artistiques de qualité (Marie-Hélène Desmaris, Comparses et Sons, Les grosses papilles…). Original ! A.F. A.F. Préavis de désordres urbains 06 61 34 93 62 http://ornicart.over-blog.com/ Ecofestival Lez’Arts Verts du 6 au 11 octobre Aix-en-Provence et Venelles http://lezartsverts.blogspot.com/ 28 CIRQUE CAVAILLON | LA MINOTERIE | LE GYMNASE Le Breton imaginaire spectacle, en partie écrit, en partie improvisé selon ce qu’il a à dire du monde, est celui d’un clown, véritable, de ceux qui font rire et dérangent. Un bateleur Breton… AGNÈS FRESCHEL Ronan Tablantec le 24 sept à19h00 Place de la Liberté, Morières-les-Avignon le 25 septembre à 19h00 Place Lagnel, Noves le 26 sept à19h00 Place de la Pastière, Châteauneuf-de-Gadagne Ronan Tablantec © Joel Verhoustraeten Pour sa première tournée Nomades de la saison, la Scène Nationale de Cavaillon profite des derniers beaux jours et propose un spectacle «en espace public». C’est Sébastien Barrier qui ira dans les 8 communes du Vaucluse pour y promener une valise et… un breton : il a inventé depuis quatre ou cinq ans un personnage nommé Ronan Tablantec, plus ou moins marin, conteur en tous les cas, jonglant avec quelques quilles et beaucoup de mots. Son Scène Nationale de Cavaillon (84) 04 90 78 64 64 www.theatredecavaillon.com Entre rire et délire le 30 sept à 19h00 Place de l’Etang, Cucuron le 1er oct à 19h00 Place du 8 mai, Le Thor © X-D.R Thème étonnant d’actualité, au moment où la Joliette prend un nouveau visage, et où les murs de la Minoterie vivent leurs derniers jours de murs. La programmation de la Cie Cosmo Kolej est d’ailleurs le premier spectacle d’un cycle voué volontairement à la création régionale, qui s’est tant abritée en ces lieux. AGNÈS FRESCHEL Boucherie chevaline © X-D.R le 3 oct à 19h00 Place de la Mairie, Mérindol le 27 sept à 11h00 Place Fernand Lombard, Cavaillon bal avec DJ Christel Dutorchon bus expo Marseille comme Roubaix Qu’y a-t-il de commun entre ces cités que leur point cardinal et leur mer opposent ? Les quartiers ouvriers, une mémoire de la pierre, que Wladislav Znorko, né à Roubaix comme son actrice, a reconnue en arpentant les Docks et les quartiers anciens de Marseille ; ceux où les murs ont encore, pour quelque temps, une mémoire… Son monologue Boucherie Chevaline, créé en mars 2008 à Lille, est écrit pour Florence Masure. Elle y joue comme toujours avec les spectacles de Cosmo Kolej, avec des objets pauvres et vénérés, chouchoutés comme des morceaux de mémoire. Mais aussi, ce coup-ci, avec le sentiment de l’espace : l’idée d’être perdu dans les toponymies nouvelles, et de vouloir retrouver le monde des baraques, des boutiques, des enseignes, des quartiers, des trajets affectifs… le 2 oct à 19h00 Place de l’Eglise, Cabrières d’Avignon Boucherie Chevaline Wladislav Znorko du 10 au 18 oct La Minoterie www.minoterie.org Vous voulez vraiment rire ? Alors surtout ne manquez pas le rendez-vous avec les Sémianyki, une famille russe sacrément déjantée Grosses lunettes, cheveux ébouriffés et teint blanc, ces six personnages au lien de parenté visible livrent une tranche de leur vie familiale. Leur quotidien est bien misérable, dans une Russie d’aujourd’hui qui ressemble à celle d’hier, avec ses injustices, ses peurs et ses contradictions. Mais malgré cette réalité morose, ces drôles d’énergumènes ont décidé de surfer sur la vague du burlesque en empruntant au répertoire du rire, des techniques de la Commedia dell’arte à l’univers grinçant de la famille Adams, en passant par de fabuleuses mimiques à la Charlie Chaplin. Résolument sans parole, cette création du collectif de clown du teatr Licedei est une véritable prouesse en matière de mime, au point que le spectateur est capable de suivre tout le spectacle à la virgule près. Gare aux débordements ! Il se pourrait bien que certains gags entraînent le public dans un délire tel que cela finira par d’irrépressibles éclats… de rire ! CLARISSE GUICHARD Affiche de Boucherie chevaline © X-D.R Semianyki Une Famille Frappadingue Teatr Licedei Du 14 au 25 oct Le Gymnase 0 820 000 422 www.lestheatres.net TOURSKY | ARLES CIRQUE Le bonheur de l’exploit Le cirque Eloize, c’est du cirque contemporain qui n’a pas renoncé à l’exploit. En passant dans les théâtres et en abandonnant la piste, le cirque contemporain est devenu théâtral, sérieux, frontal, et a déroulé des fils narratifs ou thématiques, inventant des personnages. Mais il a aussi, parfois, renoncé aux exploits acrobatiques, aux numéros qui époustouflent, à la magie des illusions et au rire simple des pitreries de clowns maladroits. Le cirque Eloize continue à parier sur la féerie, l’émerveillement, la musique, l’exploit d’artistes qui ont fait de leur corps leur outil virtuose. Dans les salles de théâtre du monde on pousse des ah et des oh, devant un spectacle de cirque contemporain qui sait également restituer un univers (celui des années folles) et tenir une ligne dramatique. Du cirque, total, au théâtre. A.F. Rain, comme une pluie dans tes yeux Cirque Eloize du 3 au 5 oct Théâtre Toursky 0 820 300 033 www.toursky.org © Production Eloize 2007/ Patrick Lazic Extraits d’essentiel Le théâtre d’Arles commence sa saison par un temps de cirque, véritable festival qui propose des spectacles de pointe… Les compagnies invitées explorent toutes des versants subtils du spectacle de cirque. Ceux où l’on s’aventure à un ou deux, pour y trouver une forme de théâtralité étonnée, au bout d’un geste circassien poussé vers son essence. Les invités sont tous des spécialistes : acrobates, clowns, funambules ou contorsionnistes, il ont entrepris de fouiller un des domaines circassiens, pour y trouver du nouveau. Cirque et entresorts se déploie hors des murs du théâtre allant chercher, le premier week end, le public dans la ville, avec des spectacles que l’on peut voir aussi en famille : tout est fait pour que la ville se mette en cirque, et que l’on puisse tout voir en quelques jours. Ainsi Dans mes bras se jouera dans la (magnifique) Cour de l’Archevêché : un spectacle de la cie L’Attraction céleste pour 50 personnes, intime, où il est question, en musique et en étreintes, en numéros acrobatiques Hodja-Vincent Berhault © X-D.R lents, de corps brisés qui continuent à vivre et à bouger, portés par la tendresse des autres (le 11 oct à 14h et 17h, le 12 oct à 14h et 16h). Un duo de clowns sans nez rouge, burlesque plutôt comme les couples en noir et blanc du cinéma muet, animera également le week-end dans la ville : Pol et Freddy, dans Ready, jonglent avec les mots et les quilles… (le 11 oct à 16h, le 12 oct à 12h, Place de la république). Enfin pour parfaire le week-end, un trio étrange Rate-rattrape-rate - Nikolaus © X-D.R (funambule, jongleur et équilibriste) essaiera de mettre au point le numéro du siècle, qui s’avèrera être une cascade… de catastrophes ! (Ratérattrapé-raté par la cie Pré O ccupé, le 11 oct à 20h30 et le 12 oct à 17h au Théâtre). Les autres spectacles, plus raisonnablement, se succèderont dans des salles, un par soir, à 20h30. Libertivore, un subtil duo d’amour de Fanny Soriano (superbe cordéliste) et Jules Beckman (musicien) le 14 oct au Théâtre ; En voiture SVP ! du clown Oskar, qui se prendra pour un chef de gare le 15 oct à Boulbon et le 17 oct aux Salins de Giraud ; Hodja Volume 1, un solo de Vincent Berhault autour des contes de Hodja, et de la manipulation de quelques objets qui, à l’instar des livres, restent habituellement sereins (les 16 et 17 oct au Théâtre) ; enfin, la semaine se conclura avec un spectacle à nouveau destiné aux plus jeunes : les quatre olibrius de la cie Bibendum Tremens montreront comment, Entre deux siestes, le réel peut tout à coup se mettre à vous jouer des tours, et à transformer le moindre geste en épreuve surhumaine (le 18 oct au Théâtre). Une semaine donc, pour faire le tour, pied à pied, de ces petites formes de cirque précieuses, qui font souvent avancer les grandes… AGNÈS FRESCHEL Cirque et Entresorts du 11 au 18 oct Théâtre d’Arles 04 90 52 51 51 www.theatre-arles.com 29 30 MUSIQUE OPÉRA Flaubert à l’opéra Fidèle au grand répertoire français oublié des plateaux lyriques, Renée Auphan ouvre la saison 2008-2009 avec Salammbô, un somptueux opéra du compositeur marseillais Ernest Reyer, tiré du roman de Flaubert «C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar.». Tel est l’incipit de Salammbô, fabuleux roman que Gustave Flaubert écrivit entre 1857 et 1862. C’est ainsi qu’il situe, en quelques mots, le cadre de son puissant récit historique. On le sait peu, mais les aventures guerrières et sentimentales du mercenaire libyen Mathô et de la fille du suffète carthaginois Hamilcar ont été portées à la scène par un grand compositeur d’opéra : Ernest Reyer (18231909). Ce marseillais (la place de l’Opéra municipal porte son nom et on célèbre en 2009 le centenaire de sa mort) a connu un immense succès avec Sigurd (sorte de Siegfried français) autrefois en tête d’affiche des théâtres hexagonaux, et Salammbô, créé en 1890, et dont la dernière représentation à l’Opéra de Marseille remonte à… 1940 ! Quel dommage, car la musique de ce compositeur, qui vouait une admiration sans borne à Berlioz et Wagner, est d’une qualité et d’une puissance expressive rares ! Quant au livret, il est assez fidèle à Flaubert : on retrouve le banquet initial, le rapt du voile sacré, la scène sensuelle sous la tente de Mathô, le calvaire final… seul l’amour qu’éprouve Salammbô, vierge consacrée au culte de Tanit, pour le colosse libyen, a été un peu amplifié pour sacrifier aux conventions de Gilles Ragon (Mathô) ou Jean-Philippe Lafont (Hamilcar)… dirigés par Lawrence Foster. La mise en espace d’Yves Coudray sera finement habillée par les lumières de Philippe Groperrin. Piano et orchestre On n’oublie pas également l’ouverture de la saison symphonique à l’Opéra, qui met à l’affiche un virtuose marseillais : Jonathan Gilad joue le 2e Concerto pour piano de Brahms quand l’orchestre seul, dirigé par Támas Vetö, interprète la 2e Symphonie de Beethoven. JACQUES FRESCHEL Salammbô les 27 et 30 sept. à 20h le 2 oct. à 20h le 5 oct. à 14h30 Concert Gilad / Vetö le 11 oct. à 20h Opéra de Marseille 04 91 55 11 10 http://opera.marseille.fr Kate Aldrich © John-Francis Bourke l’opéra romantique… Les amateurs de grands ouvrages lyriques ne devraient pas déçus par cette œuvre remarquable. Car Salammbô devrait connaître le même succès que L’Aiglon ou les opus de Damase (L’Héritière et Colombe) que la directrice de l’Opéra de Marseille a exhumé les saisons passées ! D’autant que le plateau vocal est brillant avec Kate Aldrich dans le rôle-titre, les ténors La Maledizione… à Toulon ! Claude Henry-Bonnet affiche, pour le début de saison de l’Opéra varois, l’un des grands chefs-d’œuvre populaires de Verdi : Rigoletto Le duc de Mantoue est un séducteur immoral… Hélas, le cœur ayant «ses raisons que la raison ignore», la jeune Gilda l’aime ! Par malheur («Ah, la maledizione !»), son père le bouffon bossu Rigoletto, désirant venger son honneur après l’enlèvement de la prunelle de ses yeux, commettra involontairement l’irréparable… Tragique au possible, l’opéra Rigoletto de Verdi, inspiré du drame romantique Le Roi s’amuse de Victor Hugo, recèle des airs parmi les plus populaires du répertoire lyrique, dont le fameux La donna è mobile. Les trois principaux rôles ont été marqués par les plus grandes voix : de Pavarotti à Alagna (le duc), de Callas à Rigoletto © Opera de Lausanne Sutherland (Gilda), de Gobbi à Fischer-Dieskau (Rigoletto)… Il revient à la soprano Rosanna Savoia d’incarner la jeune amoureuse, quand le ténor Leonardo Capalbo chante le Duc de Mantoue. On attend aussi le baryton Marco di Felice dans le rôle titre du bouffon maudit. Cette production qui a fait ses preuves à Lausanne, Marseille, Nantes ou Avignon est mise en scène par Arnaud Bernard (décors d’Alessandro Camera) dans un souci de fidélité à la représentation traditionnelle de l’ouvrage. La direction musicale est assurée par le chef maison : Giuliano Carella. J.F. Rigoletto le 12 oct. à 14h30 les 15 et 17 oct. à 20h Opéra de Toulon 04 94 92 70 78 www.operadetoulon.fr Dans le cadre des Journées Européennes du Patrimoine, l’Opéra de Toulon ouvre ses portes pour des conférences, concerts et visites commentées du bâtiment. Les 20 et 21 sept. De 9h30 à 12h30 et 14h30 à 17h30. CONCERTS MUSIQUE 31 Funérailles burlesques ! Dans la foulée de la création musicale de L’Enterrement de Mozart par Musicatreize, en avril dernier à Aix au Grand Théâtre de Provence, l’opéra de Bruno Mantovani est représenté cette fois dans sa version scénique à Marseille au Gymnase l’enterrement de Mozart» ? Si tout tourne autour de cette mince intrigue, les clins d’œil décalés qui émaillent le récit l’étoffent et l’ornent drôlement… un peu dans l’esprit des textes mis autrefois en musique par Satie ou Poulenc. Quant à celle de Bruno Mantovani, elle offre une texture mouvante, tantôt continue, fuyante ou pulsée, où la clarinette grinçante se taille la part belle. Et l’on se demande aussi ce que Jeanne Roth fera, dans sa mise en scène, du quatuor de Mozart joué en ouverture… JACQUES FRESCHEL © Agnès Mellon Ceux qui ont assisté à la création musicale de L’Enterrement de Mozart au printemps dernier attendent sans doute ce que l’opus donnera dans sa version mise en scène. Il faut dire que le livret imaginé par Hubert Nyssen, sorte de dialogue absurde et loufoque entre un boutiquier à moitié sourd et un collectionneur bègue, devrait gagner en saveur et lisibilité dans un contexte scénique, au gré du jeu des acteurs/chanteurs. Un collectionneur/visiteur désire acquérir une gravure aperçue par hasard dans la vitrine d’un marchand/ bonimenteur : serait-ce celle «que Beethoven avait accroché dans sa chambre car elle évoquait à ses yeux L’Enterrement de Mozart le 9 octobre Théâtre du Gymnase 0 820 000 422 www.lestheatres.net Violons aux créneaux Le 42e festival de Saint-Victor fait la part belle au violon. Si le jeune Yossif Yvanov joue en ouverture, on attend également à cet instrument Patrick Bismuth, le flamboyant Nemanja Radulovic et Olivier Charlier On connaît le jeune violoniste belge d’origine russe Yossif Yvanov depuis son deuxième prix obtenu au concours Reine Élisabeth en 2005, et à Marseille depuis son superbe récital donné au Pharo à la fin de l’année dernière. En compagnie de l’orchestre de l’Opéra il avait alors offert au public une interprétation magistrale du périlleux Concerto n°1 de Chostakovitch. C’est dire si l’on attend le virtuose dans l’atmosphère Yossif Ivanov © Imagellan chaleureuse de l’abbaye de SaintVictor. Il y jouera, en compagnie de l’Orchestra di Padova e del Veneto, sous la baguette experte d’André Bernard, la Romance n°2 de Beethoven et un chef-d’œuvre : Tzigane de Maurice Ravel. L’Orchestre seul interprètera également Boccherini, Salieri et la 5e Symphonie de Schubert. (le 25 sept.). Schubertiade Franz Schubert aimait réunir autour de lui des amis artistes, poètes et musiciens, pour des concert privés durant lesquels il interprétait ses propres Lieder en s’accompagnant au piano. Ces soirées ont été nommées des Schubertiades. C’est dans cet esprit d’intimité bienveillante que Bernard Tétu et ses Solistes de Lyon, le pianiste Jean-François Heisser, ont bâti un séduisant programme de poèmes chantés en solo ou en petit chœur (le 8 oct.). Outre les prestations de violonistes hors-pairs dans de grands opus du répertoire (Concertos Brandebourgeois de Bach ou Concerto pour violon de Beethoven), on ne manquera pas le concert en novembre de l’un des plus flamboyants contre-ténors actuels : Max Emmanuel Cencic. JACQUES FRESCHEL L’orgue en fête ! Débuté depuis le 6 septembre le 12e Festival International d’Orgue de Roquevaire se déroulera jusqu’au 18 octobre. Pour cette nouvelle édition, le roi des instruments sera associé à la flûte, la trompette et la voix dans un répertoire alliant les incontournables Bach, Liszt, Messiaen et Mendelssohn aux moins notoires Dupré, Ducasse, Duruflé, Séverac et Tournemire. Alterneront récitals et ensembles pour une programmation variée et inventive, ne se cantonnant pas seulement à la littérature routinière mais désireuse de dépoussiérer quelques pages oubliées, dans des répertoires et des esthétiques allant du symphonique à l’école française de la première moitié du XXe siècle, si propre à magnifier l’imposant instrument aux cinq claviers. Les organistes au talent confirmé tels Dong-Ill Shin, Paolo Oreni, Sylvain Pluyaut ou encore David Briggs ne manqueront pour autant pas pour certains d’interpréter et de vous faire découvrir leurs propres compositions, tandis que Georges Bessonnet et Pascal Marsault mettront en avant leurs qualités d’accompagnateurs au sein d’ensembles vocaux et instrumentaux. Et soulignons la démarche singulière d’Isabelle Sebah nous conviant à une vidéo-conférencerécital à la découverte de l’orgue ! FRÉDÉRIC ISOLETTA Festival de Saint-Victor du 25 sept. au 5 déc Concerts à 20h30 04 91 05 84 48 http://www.chez.com/saintvictor 12e Festival International d’Orgue de Roquevaire 0442040533 www.orgue-roquevaire.fr 32 CONCERTS MUSIQUE Mozart et grands interprètes Les Siecles © X-D.R Si le Grand Théâtre de Provence ouvre ses portes, dans le cadre des journées du patrimoine, pour un concert commenté (le 20 sept à 15h30), la saison Mozart 2008/2009 ne débute véritablement qu’en octobre. L’orchestre Les Siècles dirigé par François Xavier Roth en est la cheville ouvrière pour une série de concerts thématiques. Les deux premières soirées sont consacrées à Mozart et la voix : l’orchestre symphonique, la soprano Nathalie Gaudefroy et la pianiste Vanessa Wagner jouent et chantent Mozart père et fils, mais également Mantovani et Méhul (le 7 oct), alors que le lendemain, en formation de chambre, on retrouve les même solistes pour un récital d’airs de Wolfgang Amadeus (le 8 oct, en coproduction avec les Concerts d’Aix). Artiste associée depuis l’an dernier du théâtre aixois, Laurence Equilbey, à la tête du chœur Accentus, revient pour de célèbres transcriptions de Lieder de Schubert, de l’Adagio de Barber, de Wagner et Mahler (le 14 oct), avant un récital du grand violoniste russe Vadim Repin, accompagné au piano par Itamar Golan dans la Sonate en sol mineur de Debussy, le Divertimento de Stravinsky et la Sonate «À Kreuzer» de Beethoven (le 16 oct). JACQUES FRESCHEL Grand Théâtre de Provence 04 42 91 69 69 69 www.legrandtheatre.net Mozart et l’enfance… Séance «famille» à partir de 8 ans 1e 11 oct à 14h30 Entrée libre sur réservation Pythéas en duo Sextuor La Mairie des 13 et 14 arrondissements de Marseille, fidèle à l’ensemble Pythéas, permet à deux formidables solistes de la cité phocéenne de se produire en récital. Marie-France Arakélian (piano) et Yann Le RouxSédes interprètent des opus de Schumann, Franck, Bloch et Schubert. Le première Matinée de musique de chambre d’Arles affiche un remarquable sextuor de solistes avec Michel Lethiec (clarinette), André Cazalet (cor), Svetlin Roussev (violon), Bruno Pasquier (alto), François Salque (violoncelle) et Jean-Claude Vanden Eynden (piano) dans Penderecki, Beethoven et Bruch. J.F. J.F. e e Chapelle du Méjan, Arles le 5 oct. à 11h (petit déj. offert à 10h). 04 90 49 56 78 www.lemejan.com Bastide St Joseph, Marseille le 26 sept. à 20h 06 21 50 52 90 – Entrée libre Double quatre Pour leur nouvelle saison musicale, les Concerts d’Aix accueillent deux grands quatuors à cordes français : les Quatuors Rosamonde et Parisii unissent leurs archets dans un programme Mendelssohn (Octuor) et Schubert (Quintette). Théâtre du Jeu de Paume, Aix le 16 oct 04 42 99 12 12 www.concertsdaix.com J.F. Quatuor Parisii © X-D.R Des concerts à la pelle ! Piano : début des «Nuits» L’Opéra d’Avignon affiche, dès octobre, une série de concerts de musique de chambre, symphonique ou de musique ancienne. Sur un rythme soutenu ! Le festival nomade des Nuits pianistiques arpente, trois mois durant, les communes du département des Bouches-du-Rhône : d’Aix à St-Martin de Crau, de Trets aux Pennes Mirabeau, PaletteLe Tholonet ou Marseille Après Picasso et la danse (le 2 oct, voir page 14) où l’on entend des ballets de Satie (Parade et Mercure) et Stravinsky (Pulcinella), on découvre des musiques de Giovanni Gabrieli, dirigées par Jean Tubery, qui furent créées pour la Basilique San Marco de Venise (Trionfi Sacri, le 4 oct, voir ci-contre), avant un récital du formidable contre-ténor MaxEmmanuel Cencic (le 8 oct). L’Orchestre Symphonique Juvénile de Veracruz initie la saison symphonique avec des musiques latines (le 9 oct), avant les Vingt-quatre violons du Roy de Patrick Cohen-Akenine pour un programme «orphique» de Rossi et Lully (le 10 oct). La Musique de l’Air de Paris (14 oct) précède enfin un somptueux programme : l’OLRAP dirigé par Jonathan Schiffman joue L’Oiseau Jonathan Schiffman © Guy Vivien de Feu de Stravinsky et se joint au pianiste David Greilsammer pour le merveilleux Concerto en sol majeur de Ravel (le 16 oct). J.F Opéra-Théâtre d’Avignon 04 90 82 81 40 www.mairie-avignon.fr Michel Bourdoncle au piano et Chantal de Zeeuw à l’orgue ouvrent les festivités avec des transcriptions pour ces deux instruments du Concerto pour la main gauche de Ravel et les Tableaux d’une exposition de Moussorgski. Un programme qui n’oublie pas Messiaen (le 3 oct. à 20h30 à Aix, Eglise SaintJean de Malte). Ce sont ensuite des Lauréats du concours international de l’Académie pianistique, Misora Lee et Sofja Güldabamova, qui se produisent dans Beethoven, Mozart, Poulenc et Liszt (le 10 oct à 20h30 à Aix, Musée des Tapisseries). J.F. 16e Festival des Nuits pianistiques du 3 oct au 19 déc 06 16 77 60 89 www.lesnuitspianistiques.com Y a plus d’saisons ! L’ensemble Symblêma joue une tonique et séduisante adaptation des Quatre saisons de Vivaldi pour… quintette de percussions ! J.F. Salle Mistral, Châteauneuf-le-rouge le 20 sept à 20h30 Parc municipal, Venelles le 21 sept. à 17h30 04 91 81 23 87 www.symblema.com 33 Venezia ! Festes de rentrée Festes d'Orphee © X-D.R. Dans le cadre des Journées du Patrimoine, Les Festes d’Orphée présentent Aix et son Patrimoine musical : Baroque et XXe siècle : une mise en perspective d’opus de Charpentier, Campra, Darius Milhaud et Pierre Villette (le 20 sept à 15h 45 à l’Eglise du Saint-Esprit). Dès octobre, l’ensemble baroque Artemusia joue Un air d’Espagne ( le 4 oct à 20h30 à la Chapelle des Oblats), l’Orchestre symphonique de Jeunes Félix Mendelssohn présente un Concert pour le 175e Anniversaire de Johannes Brahms avec sa Symphonie n°1 (le 8 oct à 19h à la Chapelle du Sacré-Cœur) et l’Ensemble renaissant des Festes d’Orphée évoque L’Europe de la Renaissance à travers des Danses, chansons et Canzone (le 14 oct à 20h30 à Eglise du St-Esprit). J.F. Festes d’Orphée, Aix 04 42 99 37 11 www.orphee.org Le Centre Régional d’Art Baroque Euterpes marque la rentrée musicale marseillaise en créant son Automne Baroque. Pour inaugurer l’événement, Jean-Marc Aymes invite Jean Tubéry et les quarante musiciens de la 15è Académie baroque européenne d’Ambronay. Le programme, intitulé Fastes vénitiens «Trionfi Sacri» fait entendre deux compositeurs majeurs de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle ayant exploré les ressources sonores de la basilique Saint-Marc. On entend donc de magnifiques édifices vocaux à l’image de l’architecture vénitienne : des Motets polychoraux de Giovanni Gabrieli et la Missa in illo Tempore de Monteverdi. J.F. Swing en Provence Dépêchez vous, ce n’est pas trop tard : le festival Jazz à Saint-Rémy se tiendra du 18 au 21 septembre dans le nord des Bouches-du-Rhône. Associé aux journées du patrimoine, des édifices saint rémois seront le théâtre de concerts gratuits en journée. En soirée seront donnés des hommages à Sinatra (18/9) et à Michel Legrand Basilique du Sacré-Cœur le 1er oct. à 20h30 04 91 90 93 75 http://www.crab-paca.org (21/9) par le Nicolas Folmer quartet, entourant une soirée cubaine (19/9) et un Gainsbourg confidentiel par le Alain Brunet quintet (20/9). Le tout dans les magnifiques jardins de l’Hôtel de Sade ! F.I «Tito» & Cage ment pour la célèbre compagnie américaine (le 13 oct à 20h au Carré d’Art). J.F. Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 http://www.theatredenimes.com Ernesto Tito Puentes © Youri Lenquette Feuilles d’Automne. Explorant l’univers sans fin du monde jazzistique, ce lieu a tout pour attirer les mélomanes et les curieux afin de débuter la rentrée en rythme avec Dominique Bouzon 4tet (le 2 octobre), Nico Gori european 4tet (le 9), Sophie Alour 4tet (le 16) et Danilo Rea piano solo (le 17). F.I. 04 91 50 51 41 www.criduport.fr Jazz, world et classique Toujours active dans de multiples genres, la Cité de la Musique accueille dans le cadre de Jazz sur la ville le Marion Rampal Quintet (le 6 oct à 21h, la Cave) et le Franck Nicolas Patrick Torreglosa 5tet (le 13 oct à 21h, la Cave). Au rayon Musiques du monde, on découvre les accents méditerra- Le Big Band «In & Out» (18 jazzmen issus du foisonnant terreau local) se produit à Marseille, le 4 oct à 21h à la Station Alexandre. Espace Culture. 04 96 11 04 61 www.station-alexandre.org Déambulation musicale à l’abbaye de La Celle (Var). Visites guidées ponctuées de brèves stations d‘écoute musicale : opus modernes de Pärt, Berio, Gubaïdulina par l’Ensemble Des Equilibres. Les 20 et 21 sept 06 64 11 00 62 Les Rencontres Musicales du Mourillon (voir Zibeline 10) affichent des concerts de musique de chambre à Toulon et Hyères (Villa Noailles). du 18 au 21 sept Les Floraisons Musicales (Vaucluse et Gard) annoncent un beau programme de concerts : un Hommage à Messiaen (Valréas, le 20 sept à 21h), des duos pour piano et violon (Vaison-la-Romaine, le 21 sept à 18h et Bagnols-sur-Cèze à 21h), un récital de Michel Bourdoncle (le 10 oct) et une spectacle littéraire et musical sur Clara et Robert Schumann avec Daniel Mesguish (Bagnols, les 10 et 12 oct à 21h). 04 90 303 600 www.floraisonsmusicales.com La route du jazz La salle du Cri du Port, située dans le bâtiment du Parvis des Arts, démarre sa saison sur un rythme soutenu façon swing, participant notamment à la manifestation Jazz sur la ville avant d’enchaîner sur une nouvelle édition de http://rassegna.free.fr 06 64 11 00 62 http://accordsenscene.free.fr www.jazzasaintremy.free.fr Ernesto «Tito» Puentes dirige son Big Band dans des dynamiques et sonorités afro-cubaines (le 11 oct à 20h au Théâtre) avant que les musiciens de la Merce Cunningham Dance Company ne jouent John Cage (Fontana Mix) et d’autres partitions composées spéciale- La Compagnie Rassegna se produit pour la 17e édition des Chants sacrés en Méditerranée. Tournée du jusqu’au 26 oct en région P.A.C.A. néens des chanteurs et instrumentistes de MEZDJ (le 10 oct à 20h30, auditorium) et on entend, dans un programme classique, Brigitte Peyre (soprano), Eric Charray (clarinette) et Jacques Raynaut (piano), pour des opus en trio de Schubert, Kalliwoda, Brahms, des Ariettes oubliées ou La Rhapsodie de Debussy… (le 17 oct à 20h30, Villa Magalone). J.F Cité de la musique 04 91 39 28 28 www.citemusique-marseille.com Jean-Paul Serra (orgue et vièle à roue), Tarek Abdallah (oud) et Corine Milian (voix) proposent des Chansons et musiques autour de Don Quichotte (le 19 sept à 19h30, Sacré-Cœur, Marseille ; le 20 sept à 17h au Festival Asse-Arcadie, Saint Jacques, 04). À l’orgue de la basilique de SaintMaximin, Jean-Paul Serra présente un programme autour de Boëly : Un classique égaré au XIXe siècle (le 5 oct à 17h). Baroques-Graffiti 04 91 64 03 46 http://baroquesgraffiti.com 34 MUSIQUE CONCERTS Zig Zag autour du monde Papilles auditives Shaolin Temple Defenders © Pierre Wetzel. La Fonderie-Aix présente le Festival des Musiques du Monde du pays d’Aix Zik Zac les 19 et 20 septembre de 19h30 à 2h. Le Festival investit cette année le site majestueux de la Bastide Corsy, ancienne demeure de Paul Cézanne au Jas de Bouffan, qui accueillera pour la première fois le décor féerique d’une musique sans frontière et ensoleillée. l’Orchestra Baobab, Nuru Kane, Shaolin Temple Defenders & Martha High, Jah Tubbys, Le Petit Dernier, Kandjah Kora et DJ Tagada animeront la première soirée pour laisser la place le lendemain à Tony Allen, Sebastian Sturm, Chinese Man, Fanga, Musical Riot Sound, Karmix Dj set et The Punisher. De Dakar à Londres, de Marseille à Paris, de la Jamaïque à l’Allemagne, en passant par la Guinée et Montpellier, pas besoin de visa pour se déhancher à Aix. F.I. Zic Zak Les 19 et 20 septembre www.fonderie-aix.com Au pays de la chanson Berry © X-D.R Le Festival de la Chanson Française du Pays d’Aix s’est affirmé en qulques années comme un événement majeur de la rentrée culturelle. La 6e édition se déroulera du 26 septembre au 4 octobre et invitera comme chaque année de grands auteurs et interprètes ainsi que de jeunes talents de notre Marie Cherrier © X-D.R scène musicale. Autour des concerts, le festival propose des conférences, rencontres, signatures, expositions et un atelier d’écriture. Un hommage en chansons et sous forme d’exposition sera rendu à la chanteuse Barbara. Se succèderont sur scène Michel Fugain, Yves Duteil, James Deano, Thierry Romanens, Gildas Thomas, Musard, Vincent Baguian, Misère et Cordes, Staël, Marie-Hélène Desmaris, Travis Burki, Mathieu Rosaz, Marie Cherrier, Hervé Lapalud, Mauss, Initiales C.C. , Timek, Bass Vegas Parano, Bionic Man Sound, Black Castle Music, Mathelene, Maison Rouge, Karma Cramé, Bœuf, Berry, Portelli, Les Fatals Picards, Imbert Imbert et Abel. De quoi ne pas s’ennuyer… Sans oublier de ne pas se tromper de lieux, à choisir parmi la salle du Bois de l’Aulne, l’espace culturel Jean-Paul Coste, le Musée des Tapisseries, le Théâtre de la Fontaine d’Argent, l’espace enfance-jeunesse, et le restaurant Les 2 frères sur Aix, le complexe culturel de Simiane, le cinéma casino de Trets, la salle Duby à Eguilles et la salle des fêtes de Venelles. F.I. Festival de la Chanson Française du Pays d’Aix 06 82 78 11 65 www.festival-chanson-française.com Le festival à déguster sans modération, Les Bacchanales de Saint Cannat, se déroulera les 19 et 20 septembre à partir de 19h. Deux soirées festives sont prévues autour de dégustations de coteaux d’Aix ! Seront présents le vendredi la fanfare culinaire tzigane Taraf Goulamas et le jazz actuel du Manuchello Septet. La deuxième soirée verra se mettre en scène toute seule l’atypique mezzo- soprano Emmanuelle Zoldan dans son spectacle lyrico-comique Opéra, diva et cætera pour laisser la scène à 21h30 à la chanson festive espagnole de Calle Alegria. F.I. Les Bacchanales de Saint Cannat Les 19 et 20 sept 04 42 57 34 65 www.festival-bacchanales.com Sucré Salé La scène nationale du Théâtre des Salins à Martigues programme avec bonheur quelques concerts. La preuve le 10 octobre avec le goût des mots et l’art de les accommoder en chanson avec le Sanseverino Trio et façon slam avec le Nevchehirlian Trio. Nouvelle expérience le 21 octobre avec la venue pour la première fois dans le sud de la France des King’s Singers, formation a cappella reconnue qui explorera l’univers fleuri du madrigal, n’hésitant pas à faire le grand écart entre la renaissance élisabéthaine et l’écriture contemporaine de Ligeti. F.I. 04 42 49 02 00 www.theatre-des-salins.fr sanseverino © Philippe Delacroix et David Grimaux Épicé Le Théâtre du Toursky prendra l’accent mexicain le 14 octobre avec la venue de l’Orchestre Symphonique Juvenil de l’Etat de Veracruz. Cet ensemble de 85 musiciens sera accompagné du groupe de musiques traditionnelles mexicaines Tlen Huicani. Ne manquez pas Le mois de Veracruz en France, soirée magique saucée de découvertes musicales épicées de culture populaire et folklorique mexicaine. F.I. 0 820 300 033 www.toursky.org Si par hasard… … vous vous trouvez non loin de Longchamp ou du Panier entre les 18 et 21 septembre vous pouvez vous permettre d’improviser jusqu’au bout et butiner selon votre inspiration entre La Méson, Le Comptoir Artistique Phocéen, L’Atelier Ici, La Maison du chant, l’Atelier Celadon et la Grotte des Accoules. La 3e édition du Festival des Musiques Improvisées And on the other hand sera heureux de vous accueillir dans ces deux quartiers jumelés pour cette manifestation riche en expérimentations sonores (Barre Philips, Emilie Lesbros, Emy Chauveau, Jules Bernable, Philippe Deschepper…). Pratique : vos pieds suffisent et les concerts sont gratuits! F.I. www.myspace.com/andontheotherhand 35 Happy birthday ! 10 ans déjà que le génial café concert d’Istres l’Usine nous régale à la fois par son lieu accueillant et adapté, et sa programmation, qui n’a vraiment rien à envier à certaines salles de grandes agglomérations ! Cela se fête bien sûr, et la rentrée s’annonce chargée côté scène et décibels, pour cette salle qui peut accueillir 1300 spectateurs debout. Les premières bougies seront soufflées avec le hard rock urbain et métallique de Blue Oyster Cult le 14 septembre en attendant la singulière australienne Micky Green le 1er octobre. Week-end complet avec la présence de la californienne Suzanne Vega le 3 octobre et du spectacle poétique expérimental d’EZ3kiel le lendemain. Le 10 octobre c’est le festival des Nuits Métis qui pose ses valises avec le rock folk saharien de Temenik Electrik et Kandia kora / Zeid, duo Guinéen Libanais. Une semaine sera-t-elle suffisante pour vous remettre, et accueillir comme il se doit Dyonisos le 17 octobre ? En attendant The DØ et Thomas Fersen tout prochainement… Happy birthday, et merci pour tout ! FRED ISOLETTA L’Usine, Istres. 04 42 56 02 21 www.scenesetcines.fr C’est déjà demain Vers l’Espace La Fiesta des Suds approche à grands pas et l’édition 2008 s’annonce plus éclectique que jamais. Du 17 au 31 octobre, les Docks verront défiler les mythiques Trust (hors programmation le 10 octobre) en attendant l’ouverture officielle du festival, le 17, avec le barde de Woodstock 69 Richie Havens et la diva des Caraïbes Calypso Rose. La légende vivante du jazz Herbie Hancock sera présent en exclusivité le 18 octobre, tout comme la chanteuse cubaine Omara Portuondo et la soul électro plurielle du nigérian Nneka. À suivre, dans notre prochain numéro, puis sur scène : Bashung, Rokia Traoré, Asian Dub Fondation… Décidément la rentrée musicale s’annonce chargée ! Nada Surf est sur la scène de l’Espace Julien le 1er oct ! Le trio New-Yorkais, rendu célèbre par l’hymne rock des années 90 Popular sort son 5e album intitulé Lucky. Ils seront accompagnés du groupe noisy rock parisien expatrié à Londres Underground Railroad et du quatuor indie rock kIM NOVAk inspiré de Joy Division, du Velvet Underground, en passant par Radiohead. Cette soirée exceptionnelle ne doit toutefois pas éclipser la présence du métal de Chaos Fest 2008 les 3 et 4 octobre et le passage du 18e Garde’n Blues Festival avec Bill Deraime (10/10) et Little Bob (11/10). De quoi glisser sûrement vers le festival Jazz sur la ville (14/10) avant d’accueillir Makali (18/10). Le tout en attendant Suicidal Tendencies… F.I. Fiesta des Suds Les Docks 0825 833 833 www.dock-des-suds.org Micky Green © Jenny Harper F.I. www.espace-julien.com Richie Havens © Jim Dyson Nada Surf © X-D.R Manu Dibango © A. Hermann Ils sont là ! L’invasion est proche sur l’esplanade du J4 et dans le quartier du Panier, invasion sonore programmée pour les 10 ans de Marsatac du 25 au 27 septembre. Premiers pas des électro-terrestres dans un Panier prêt à imploser : apéros électros en guise d’accueil aux nouveaux venus place de Lenche et place des Pistoles les vendredi et samedi de 17h à 21h, histoire de s’acclimater à notre nouvelle population. Les trois soirées sur front de mer permettront une déambulation entre la scène Pharo et la scène Major. Premiers pas à l’accent africain (le 25 septembre), propagation de décibels à l’accent hip hop (26/09) et invasion massive de la planète électro (27/09). Manu Dibango, Seun Kuti, De La Soul, Laurent Garnier, Chloé… Venez donc rencontrer ces drôles de gens ! F.I. www.marsatac.com 36 MUSIQUE Cadre exceptionnel pour rencontres magiques, les Escales du Cargo ont assuré le spectacle en Arles à la fin du mois de juillet pour un succès retentissant ARLES | AGENDA Escales en Arles The DØ © Patrice Aim Le décor majestueux du théâtre antique d’Arles n’était ni trop beau ni trop grand pour accueillir la belle et si surprenante Camille et sa bande le 22 juillet. On est en droit de se demander ce que cette drôle d’artiste ne sait pas faire ! L’état extatique dans lequel ce petit bout de bonne femme a laissé les spectateurs de tout âge en dit long sur la qualité et l’inventivité du véritable show donné pour les Escales du Cargo. Avec Camille les mots ne Yaël Naim © Patrice Aim sont plus ce qu’ils étaient, et les phrases non plus ! Onomatopées, jeux de bouches, syllabes dérangées pour mots arrangés, syntaxe cabossée pour phrase déguisée, tout y passe. Cette marque de fabrique pourrait lasser mais la petite a du talent et une jolie voix, alors… D’ailleurs on ne voit qu’elle dans sa robe orange fluo, elle laisse un peu de place à ses acolytes adeptes de joutes, de sons et de bruits. Mais avant elle, la malienne Rokia Traoré avait posé ses valises pour une première partie réussie, naviguant entre poésie et danse haletante, posant son timbre de voix charnel et sensuel mêlant soul et funk entre deux discours revendicatifs sur la situation africaine. Duos sensibles et jolis pas de deux le lendemain, avec The DØ puis Yaël Naim. Le décor est planté avec une scène superbement éclairée pour le duo franco-finnois de Dan et Olivia, rencontre avec une brunette sympathique, guitariste à la voix cristalline et un musicien multiinstrumentiste auteur compositeur, entre autres, de musiques de film. Leur signature pop-rock- électro un brin déjanté est servie bien sûr par tous les jouets de Dan, une sculpture d’instruments culinaires qui serviront plus tard de percussions, sans compter les platines, la batterie et plusieurs guitares. Le concert est une réussite, pêchu et dansant et pas seulement pour les fidèles ; les moustiques arlésiens s’étant invités à la fête s’en donnèrent à cœur joie sur les espaces laissés libre par la superbe robe mousseline rayée noir et blanc portée par Olivia. Une chose est sûre : The DØ, bien qu’extrêmement sophistiqué et arrangé, passe allègrement le test du live. Moins de chance en revanche pour Yaël Naim et David Donatien dont les premiers titres ne purent résister à un orage malvenu. Dommage, le duo s’était doucement mis en marche malgré un son bien trop chargé en basses. Il était temps d’entonner en chœur, et sous la houlette de la voix très groovy de Yaël, un très pertinent Singing in the rain ! EMMA VIRY ET FRÉDÉRIC ISOLETTA Au programme MARSEILLE Balthazar : Watcha clan (18/9), Jazz sur la ville : PHM & François Rossi (10/10) 04 91 42 59 57, www.aubalthazar.com Cabaret Aléatoire : Heinrichs & Hirtenfeller, Holgi Star, JackJack Ollinsirak, Nik (20/9), Jazz sur la ville : Selecter the Punisher, José James, Dj Dusty Jazz Liberatorz (3/10), Empyr (8/10) 04 95 04 95 09, www.cabaret-aleatoire.com Cité de la Musique : Jazz sur la ville : Marion Rampal Quintet (6/10), Franck Nicolas & Patrick Torreglosa Quintet (13/10) 04 91 39 29 19, www.citemusique-marseille.com El ache de Cuba : Maudit comptoir (19/9) 04 91 42 99 79, www.elachedecuba.com Embobineuse : Seijiro Murayama & JeanLuc Guionnet (19/9) 04 91 50 66 09, www.lembobineuse.biz Intermédiaire : Janis Joplin tribute (18/9), Amara (19/9), The silver shine, devil crockett (20/9), Dj Raptus (22/9), Macadam Bazar (23/9), K.Do records presents radio dj show (26/9), Mind the Stepp (27/9), Waterproof marabout fonk system (29/9) 04 91 47 01 25 L’Affranchi : Dub station Marseille vol 2 avec Bush Chemists, Lion Roots, Musical Riot Sound System (11/10) 04 91 35 09 19 www.l-affranchi.com La Machine à Coudre : Fanfare Vagabontu (19/9), Short bus windows lickers, Sickness (23/9), L’oiseau mort, Koît electric nymphonik, Early bus (27/9), Dimi Dero INC (11/10) 04 91 55 62 65, www.lamachineacoudre.com La Meson : Festival And on the other hand (18 au 21/9), The flail (26/9), Soniquette (27/9), Farenji & Nuestra Cosa (5/10), Sashird Lao (5/10), Jazz sur la ville : Sashird Lao (7/10), Trio Winsberg, Di fraya, Maillard Technovoïd form3 (11/10) 04 91 50 11 61, www.lameson.com Le Lounge : Early (18/10) www.myspace.com/lelounge13 Le Poste à Galène : Darkmen, Porno-Graphic Messiah (19/9), Nuit années 80’ (20/9), Les Jolis, The Doliprane’s (26/9), Joseph d’Anvers (27/9), Into the groove (27/9), Steeve Estatof (30/9), Keith Caputo, Life of Agony (1/10), Phoebe Killdeer and the short straws (9/10), Kutati Boy & The Palmtree Family, Kuta (10/10), Alister (16/10) 04 91 47 57 99, www.leposteagalene.com Nomad’Café : 15e edition du Festival Nuits Métis : Selecter The Punisher, Kanjha Kora, Fanga (2/10) et Temenik Electrick, Sam Karpienia (3/10) 04 91 62 49 77 Station Alexandre : Jazz sur la ville : In & Out Le Big (4/10), Plein feux sous les pianos (6 au 25/10) 04 91 42 05 87, www.station-alexandre.org Théâtre Lenche : Usthiax (20/9) 04 91 91 52 22, www.theatredelenche.info/ AIX Théâtre et Chansons : Vis à vies (19/9) 04 42 27 37 39, www.theatre-et-chansons.com Le Korigan : Gama Bomb, Bondel Blood, Discard, In other climes (19/9), Ad Hominem, Nefarirum, Foscor, Hindvir, Shellshocked (27/9), Fis(ch)er, My Own Vision (18/10) 04 42 54 23 37 Luynes AUBAGNE L’Escale : Kill the thrill, Dj Prince Freedom ( 10/10), La Troba Kung-Fu, Dj Big Buddha (11/10) AVIGNON Théâtre des Doms : Jazzotrad Trio Trad, Charmasson, Tchamitchian (2/10) 04 90 14 07 99, www.lesdoms.be/ Ajmi : Christophe Leloil sextet «echoes» (10/10), Sophie Alour Quartet «Uncaged» (17/10) 04 90 860 861, www.jazzalajmi.com VITROLLES Moulin à Jazz / Charlie free : Dress Code, Rosa (26/9) 04 42 79 63 60, www.charliefree.com SALON Portail coucou : Live station portail (4/10), Positive roots band, Rob Taylor (11/10), Pra Fe (15/10) 04 90 56 27 99, http://portail.coocoo.free.fr CHATEAUNEUF-DE-GADAGNE Akwaba : Ronan Tablantec, Cristel Dutorchon Djette (3/10), Maniacx, Dilemn, Mizou mizou, Cie Joyo, Double Axel, C. Fuillet (4/10), Missill, Ghislain Poirier, Spitbastards (18/10) 04 90 22 55 54, myspace.com/akwabatheatre 38 MUSIQUE CONCERTS Légendes et logistique La deuxième soirée du festival était celle de deux monstres sacrés du jazz. Tout d’abord Richard Galliano et le Tangaria Quartet. L’accordéoniste et compositeur prolifique doué d’une technique incroyable de sensibilité nous a charmés dès les premières notes. Richard Galliano a joué avec d’innombrables musiciens qui comptent dans l’histoire du jazz : Chet Baker, Joe Zawinul, Michel Portal... mais aussi au théâtre, en 1983, comme 1er bandonéon solo avec Astor Piazzola qui composa la musique du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare mis en scène par Lavelli. À 58 ans, notre accordéoniste est toujours débordant de créativité : à l’issue d’une rencontre récente avec trois musiciens d’exception, il enregistre Love Day qui va sortir dès le 22 septembre chez Milan. Selon lui «one véritable histoire d’amour faite de respect, d’écoute, de pudeur, de dialogue...». À ses côtés Alexis Cardenas, violoniste vénézuelien au pedigree époustouflant, s’est particulièrement illustré dans des morceaux tels que Escualo ou encore Sertao. Quarante minutes s’écoulent pour commander un rafraîchissement (la logistique ne suit pas) et déjà arrive Archie Shepp. Avec lui aussi le courant passe immédiatement, notamment lorsqu’il prend le micro pour chanter. Encore un moment de musique exceptionnel ! Dommage que les choix organisationnels de l’événement se soient portés sur la gestion à code barre de la billetterie au détriment de la qualité du son ! DAN WARZY Des voix berbères à Arles Arles, en juillet, fourmille d’images, de sons, de rencontres. Le Museon Arlaten a donné l’occasion de découvrir le monde berbère à travers les paroles de la sociolinguiste Nacira Abrous, la voix de la chanteuse Houria Aïchi et les plats des femmes de l’association Horizons berbères. Une joie pour les oreilles et les papilles ! Rifains, Tamazights, Touaregs, Mozabites, Kabyles et Chaouis font partie des Berbères, qui se dit «Amazirs» en langue berbère et qui signifie «hommes libres». «Etre Chaoui, nous précise Houria Aïchi, c’est habiter l’Aurès, caractérisé par une géographie, un climat de haut plateau, une langue berbère traversée par la langue arabe. Si l’on en croit le proverbe algérien : Le Chaoui a la tête de sa mule !». C’est à travers la poésie chantée, accompagnée par la Gasbâ (flûte fabriquée à partir d’un morceau de roseau) que Houria Aïchi affirme cette culture berbère, poésie qui reprend les grands thèmes de la vie sociale paysanne, le travail, l’amour, la guerre, l’exil… Devant les paysages de sel de Patrick Box, elle a chanté a cappella, tenant longuement les notes d’une tendre berceuse, Berri ya berri (O Mon Dieu, endors mon enfant sous ta protection) et la chanson de l’amoureuse qui parle de son amant que le clan l’empêche de voir. Un beau moment d’écoute et de partage. ANNIE GAVA Le nouveau disque de Houria Aïchi sortira fin septembre. Archie Shepp © Roland Godefroy Ce concert a eu lieu au Palais Longchamp le 24 juillet lors de la 9e édition de Jazz des 5 Continents Chorus à minima et nappes sonores «neffesh» Peut-on vraiment parler de musique improvisée quand on a l’impression d’avoir affaire à une musique si «écrite» ? Telle était la question que l’on pouvait se poser lors du concert de l’ensemble Manuchello Septet au Paradox. Cependant, c’est une musique en recherche, qui explore.. Batterie, guitare basse dans des riffs rock et jazzrock, un violoncelle fédérateur : Emmanuel Cremer, principal compositeur du groupe. L’apport du quatuor à cordes qui forme le septet nourrit le son, la matière sonore et apporte de l’intérêt à cette formation qui fait penser parfois à Magma mais aussi à Yochk’o Seffer. DAN WARZY Houria Aichi © birgit Concert donné au Paradox le 11 juillet Retrouvez Manuchello en concert dans le cadre des Bacchanales de Saint Cannat 30 ans de Jazz à La Seyne Dans le Var a lieu un festival de jazz de très grande qualité Du 25 juillet au 1er Août, de grands acteurs de la scène jazz se sont produits dans le cadre intime du Fort Napoléon : David Murray, Daniel Humair, Pete La Roca, Georges Garzone, André Jaume... Robert Bonaccorsi, directeur artistique du festival témoigne : «Depuis 30 ans, nous marions les courants du jazz en accueillant artistes en devenir et artistes de légende...» La soirée du 31 juillet était consacrée aux contrebassistes. Le François Mechali trio commence, uni par une certaine parenté musicale. Eric Séva au saxophone produit un jazz assez mélodique, très originel. André Charlier, batteur au grand talent, a joué avec Didier Lockwood, John Scofield et encore bien d’autres. La contrebasse de Christian Brazier était à l’honneur pour la seconde partie avec ses complices de longue date que sont Philippe Renault (trombone) et Thierry Maucci (saxophones). Invités pour former le quintet, Steve Potts (saxophones) et John Betsch (batterie) auront apporté stabilité et perturbations à une musique écrite, évoluant toujours dans des improvisations devenant courants de passion, de combats, jusqu’à la grâce harmonique. Le festival s’est clôturé le lendemain dans l’amphithéâtre de Châteauvallon avec le groupe Yellowjackets et Mike Stern, guitariste de grand renom. Il a joué avec Billy Cobham, Miles Davis, Pat Metheny, Jaco Pastorius, Michael Brecker... Le groupe fondé en 1977 a démontré qu’il était encore plein de fraîcheur et talentueux comme jamais. Aux côtés de Russell Ferrante (claviers) et Jimmy Haslip (basse) les membres fondateurs, l’extraordinaire Bob Mintzer (saxophones) nous a fait goûter du EWI, instrument à vent électronique marquant le caractère très jazz fusion de la soirée. Marcus Baylor (batterie) a prouvé son extrême sensibilité et nous a révélé toute la dimension de son talent. DAN WARZY MUSIQUE 39 Ça Jazze au château La région est riche en festivals d’été, et il est difficile de déterminer le spectacle à ne pas rater. Ceux qui avaient choisi de se rendre à Trets pour la septième édition de Jazz au Château ont tablé sur une valeur sûre. Cette année, le festival qu’organise l’association Attrait rendait hommage au contrebassiste Roger Luciani récemment disparu et qui avait apporté son soutien dès la première édition. Le Miss Jones Quartet, un jeune groupe tretsois ouvrait les festivités. Jolies reprises de grands standards, de Cole Porter à des rythmes de Bossa Nova… des échos touchants de Billie Holliday…Voix juste, bons instrumentistes, de pertinents changements de rythme, pour un programme éclectique sans doute un peu trop sage… La deuxième partie voyait des compères de longue date se retrouver sur scène. Les frères Belmondo (cuivres) et Thomas Bramerie (contrebasse) se connaissent depuis l’adolescence, et tous jouent ensemble depuis au moins dix ans. C’est donc avec une complicité, une joie de se retrouver communicative, que ces musiciens hors pair (piano Éric Legnini, batterie André Ceccarelli), se lancent sur des canevas classiques, de Thelonius Monk, Freddy Hubbard, Coltrane… en de brillantes improvisations. Les premières mesures de batterie installent d’emblée un univers sonore magique. Les musiciens entraînent au gré de leur fantaisie et de leurs incroyables acrobaties un public subjugué. Les artistes jouent aux deux sens du terme, pour le plus grand bonheur des spectateurs, une musique riche et jubilatoire. On ne s’en lasserait jamais…! C’est un univers complètement différent qui était de superbes envolées et la batterie de Dimitri Reverchon est efficace. On ne s’ennuie jamais. Bizet, Ravel, Debussy sont ainsi passés à la moulinette du jazz, dans un spectacle qui unit qualité et humour. Décapant ! La grande Sara Lazarus clôture le festival. Let’s do it de Cole Porter installe une atmosphère chaleureuse et complice. Et si some of my friends have the blues lorsque l’artiste évoque avec une certaine nostalgie le Delaware de son enfance, le public, lui, est enthousiaste ! Hommage au pays qui l’accueille, une délicieuse valse des lilas de Michel Legrand, interprétée sur un rythme de bossa nova, permet de découvrir l’étendue du talent de la chanteuse. Chaque musicien se livre d’ailleurs à de très riches improvisations avec un plaisir virtuose. Un entrain communicatif, un sourire généreux, une voix superbe, un sens musical exceptionnel ont transporté l’auditoire. MARYVONNE COLOMBANI programmé lors de la deuxième soirée. Le Sudameris Quintet propose une relecture jazz tout à fait convaincante d’œuvres du répertoire classique. Les trois musiciens convient à un voyage à travers la musique française. Ainsi, le premier mouvement des morceaux choisis est donné dans sa version d’origine, parfois par l’entremise d’un 78 tours, puis retravaillé en jazz. Le jeu du pianiste Robert Rossignol n’est pas sans évoquer le toucher de Camillo. Jean-Christophe Gautier à la basse et Farid Boukhalfa à la percussion s’en donnent à cœur joie. Le saxophone de Iamine Diagne connaît Théâtre et chanson La saison nouvelle renoue le fil de la chanson avec le joli spectacle qui clôtura les activités du lieu. Chansons démêlées offre à un public fidèle et nombreux un florilège de chansons françaises dont les textes et les musiques sont empruntés à des artistes aussi variés que Higelin, Brel, Juliette, Anne Sylvestre… Les interprètes sont des stagiaires qui travaillent parfois depuis quatre ans avec Isabelle Bloch-Delahaie. Les voix sont justes, la mise en scène des chansons accorde aux textes un relief, une saveur, sans paraphrase aucune. Le spectacle joue entre différents registres, poésie, confidence, humour, tendresse. Les spectateurs qui emplissent la petite salle transpirent, s’éventent, se liquéfient, stoïques, mais restent tant la prestation est entraînante et sensible. Dans ce petit théâtre de poche, les mots voguent, circulent, se donnent, se transmettent, car il s’agit bien de transmission avec des passeurs de mots, de sens, d’enthousiasme pour la vie, dans ses émois et ses doutes, ses joies et ses dérives. On ne cesse d’enterrer la chanson française, d’en Jazz au Château a eu lieu à Trets les 11 et 12 juillet Les frères Belmondo © X-D.R déplorer la décadence, ce théâtre en est le parfait démenti ! M.C. Les soirées cabaret de Théâtre et chansons ont eu lieu du 27au 29 juin. Elles reprennent du 26 au 28 septembre. 04 42 27 37 39, www.theatre-et-chansons.com Soirée cabaret © X-D.R Louisiane en Provence Chaussures noires et blanches, veste croisée, pantalon large, cheveux gominés, la panoplie complète des années de la prohibition, un vieux poste des années 30, et l’indispensable micro dont la forme oblongue et les éclats métalliques renvoient aux vieux films d’Al Capone, ce sont les Cotton Candies ! L’univers du Cotton Club de SaintLouis se retrouvait ce soir-là sur la scène des Nuits du château de Trets… Un air de Louisiane en Provence… et quelle fougue ! D’emblée, les cinq musiciens captivent la salle ; les rythmes de boogie-woogie s’enchaînent, les airs swinguent, le jazz s’amuse et emporte un public que le chanteur du groupe, Karim Tobbi, entraîne dans un monde où renaissent Nat King Cole, Louis Prima, Slim Gaillard, Bennie Goodman, Louis Jordan et tant d’autres talents… Les ballades alternent avec des rythmes plus rapides, ménageant quelques respirations poétiques dans ce spectacle endiablé. Chaque musicien connaît son moment de solo virtuose, dans la plus pure tradition du Cotton Club. Les artistes jouent avec humour du décalage affiché du temps, établissant une complicité musicale et dansante avec un public conquis. M.C. Cotton Candies s’est produit le 20 juillet à Trets dans le cadre des Nuits du château 40 MUSIQUE MUSIQUES INTERDITES Requiem au camp de la mort Le festival Musiques Interdites a investi l’Opéra de Marseille pour deux soirées. Le 11 juillet, le théâtre lyrique a fait salle comble pour entendre une bouleversante interprétation du Requiem de Verdi donné dans un contexte historique et tragique : au camp de Terezin en 1944 Terezin fut un camp de transit que les nazis voulurent faire passer pour un «ghetto modèle». Son intendance quotidienne était autogérée par les juifs. Au demeurant, cette sombre vitrine ne dissimule nullement l’implacable génocide mis en œuvre dès 1942 : sur 140 000 internés, 90 000 furent envoyés à Auschwitz et 33 000 périrent sur place. La population du camp comportait une forte proportion de musiciens issus de Bohème. Des orchestres et chorales, tolérés par les nazis, donnèrent des concerts, en particulier pour les visites de la Croix-Rouge, où des mascarades étaient organisées, films de propagande à l’appui, afin de faire taire les rumeurs qui commençaient à grandir en Europe sur l’horreur de la solution finale. En 1944, un projet voit le jour : jouer le Requiem de Verdi. Le chef d’orchestre Raphaël Schächter réunit des musiciens présents sur place et, tant bien que mal, un quatuor de chanteurs qui changera au fil des départs des convois vers les camps d’extermination. Les répétitions et l’exécution de cette Messe des morts ont été racontées par un jeune juriste rescapé : © Agnès Mellon Joseph Bor. C’est à partir de ce récit que Michel Pastore imagine un oratorio qui, sur le plateau nu de l’Opéra de Marseille, a pris la forme d’un rituel puissant. Une prière universelle De fait, la liturgie latine, étrangère aux juifs, chantée dans ce contexte, offre un prisme étonnant, une distanciation fon- cièrement émouvante. L’impressionnant Dies irae (Jour de colère), le suppliant Dona eis requiem (Donne-leur le repos) ou le déchirant Libera me (Libère-moi) résonnent comme une prière universelle où l’inévitable mort annoncée n’exclut pas le fol espoir d’un possible salut. On le sait aujourd’hui, c’est leur propre Requiem qu’ont interprété ces musiciens juifs en sursis : après l’exécution de l’œuvre devant Eichmann, ils ne furent pas séparés… on les regroupa dans des wagons à bestiaux en partance vers les chambres à gaz. L’engagement des artistes autour de ce projet de Michel Pastore est remarquable : l’Orchestre de l’Opéra de Marseille, le chœur Ad Fontes Canticorum sous la baguette de Cyril Diederich, Fabrice Luchini en récitant à la diction sobre et dont la présence scénique est toujours captivante. Côté solistes, dans cette liturgie désordonnée, interprétée au gré des répétitions de 1944, on retient les pâtes vocales puissantes de la mezzo, du baryton Jean-Philippe Lafont, le timbre ensoleillé du ténor Jesus Garcia investi dans son personnage de jeune allemand, démasqué et terrorisé, se cachant au milieu du chœur afin de fuir une mobilisation pour le front de l’Est. On s’incline également devant la générosité expressive de la soprano Sandrine Eyglier, en particulier dans son ultime et furieux «Libera me», déchirant chant du cygne crié à la face de ses bourreaux ! Opus exhumés Le lendemain, 12 juillet, le programme a donné l’occasion de découvrir deux opéras oubliés d’un compositeur roumain Nicolae Bretan Nicolae Bretan est né en Transylvanie en 1887. Anti-nationaliste, il composa de nombreux Lieder et des opéras entre 1921 et 1942 dont il écrivit lui-même les livrets en roumain, en hongrois ou en allemand. Bretan subit le joug des deux grandes dictatures du XXe siècle. La famille juive de sa femme fut persécutée par les nazis et lui-même a été mis à l’index une fois la Roumanie livrée au stalinisme. Réduit au silence à partir de 1948, ses opus ne seront réhabilités qu’à partir des années 1990, soit plus de 20 ans après sa disparition en 1968. Deux de ses opéras ont ainsi été redécouverts sur la scène de l’opéra de Marseille : des opus condensés, en un acte, chantés en version de concert. Le premier, Golem, narre l’aspiration d’une statue de terre à la vie et à l’amour pour la fille de son créateur. La révolte de la créature est soutenue musicalement par un récitatif continu, syllabique et près du texte, qui se développe avec un lyrisme expressif, dans la lignée du postromantisme européen. Si le second opéra Arald, s’avère plus mystérieusement symboliste, sa forme (ABA) se révèle étonnante, rare pour une œuvre lyrique. L’opus a donné l’occasion à Jean-Philippe Lafont, dans un air imposant (Bretan était baryton d’opéra), de faire la démonstration de tout son talent, fort bien secondé par le ténor Jean-Luc Viala, la basse Roman Vocel et la soprano Delia Noble qui a rempli courageusement son contrat malgré une lourde laryngite. Un programme dense L’affiche de cette soirée a été complétée par l’œuvre d’un artiste qui a survécu aux camps de la mort. Paul Aron Sandfort composa, peu avant sa disparition en 2007, un septuor sur un poème qu’il avait écrit en 1947 : Le Rabiot. Ce texte décrit l’état d’inhumanité dans lequel se trouve l’interné soumis à la faim. Pour cette création, Dominique Koudrine (récitante) Jean-Philippe Lafont © X-D.R a été brillamment soutenue par des solistes de l’Orchestre Philharmonique de Marseille. La soirée s’est achevée par l’ultime Sonate pour piano de Victor Ullmann (18981944). Ce musicien, également sorti de l’ombre, composa sur du papier misérable une vingtaine d’œuvres au camp de Terezin… avant son aller-simple pour Auschwitz. Sa sonate inachevée, interprétée par Valdik Polianov, oscille paradoxalement entre une esthétique néoclassique gaie et légère et un contrepoint obstiné qui se souvient de Bach. Une réelle découverte ! JACQUES FRESCHEL LISZT | OPÉRA AU VILLAGE | NUITS D’ÉTÉ MUSIQUE 41 Bastide provençale et piano romantique Parmi les nombreux «petits» festivals que notre région accueille l’été venu, celui consacré à la mémoire de Liszt au Château Saint Estève d’Uchaux (Vaucluse) est à découvrir : pour son cadre, sa convivialité et la qualité des artistes invités par Thérèse Français On débouche, au milieu des vignobles, par une longue allée qui fait face à la demeure : une bastide provençale et ses dépendances attenantes. Ce sont les maîtres des lieux qui accueillent le public cosmopolite se présentant par petits paquets devant une billetterie sommaire : une simple table plantée auprès d’un bassin. On parle anglais, allemand… À la nuit tombante, les deux ou trois cent personnes présentes s’installent sur les chaises alignées au pied d’un perron, situé contre le frontispice, sur lequel trône un piano de concert. Première surprise : c’est un Fazioli ! Ce piano de fabrication italienne connaît, depuis une vingtaine d’année, un vif succès auprès de pianistes comme Ciccolini, Brendel ou Hamish Milne © Dmitri Simakov Herbie Hancock, en particulier pour sa sonorité claire et uniforme. Deuxième satisfaction : l’acoustique du lieu est excellente ! Le son se réfléchit contre l’angle adjacent à la façade et ne se perd pas. Enfin le 22 août, on découvre un pianiste de valeur, très peu connu chez nous. Hamish Milne est le cinquième invité de cette 11e édition de Liszt en Provence, après Mikhaïl Rudy, Daniel Propper, Agnès Graziano et Sodi Braide. Ce soliste et pédagogue anglais, un peu pris à froid par les variations de l’Impromptu en si bémol de Schubert, révèle toute la sensibilité d’un jeu subtil et nuancé dans la Sonate en mi bémol majeur de Haydn. En seconde partie, ce fin musicien développe, avec sobriété et clarté de jeu, une profonde poésie dans la Première Année de Pèlerinage que Liszt a consacré à la Suisse. Si le virtuose manque d’un poil de cylindrée dans l’exigeant Orage, le reste de l’opus est joué avec un sens rare de la respiration et du chant. De plus, Hamish Milne n’est pas avare en bis, et donne de délicates pièces de Bach et Chopin qui clôturent favorablement la belle soirée… avant un passage obligé à la dégustation de crûs du château ! J.F. Un Opéra à la campagne Connaissez-vous Pourrières dans le Var, petit village entouré de vignobles et d’oliviers ? Ses habitants, loin d’être oisifs, s’y livrent à la création de petits opéras méconnus pour lesquels ils réalisent décors et costumes durant une année. Ils cherchent un opéra, choisissent le metteur en scène, contactent les interprètes, accueillent le public, tout cela avec professionalisme ! Les représentations ont lieu dans la cour du Couvent des Minimes construit au XVIe siècle et restauré avec amour et patience par Jean de Gaspary, son propriétaire, qui participe aux décors. La soirée en 3 parties commence sous les marronniers par un repas berrichon accordé au thème de l’opéra, accompagné des vins du terroir. Puis une Nuit Romantique, Au temps de Nohant, création de Christelle Neuillet et Bernard Grimonet, directeur artistique, reconstitue une soirée musicale chez George, entourée de ses amis Rossini, Delacroix et Pauline Viardot. Tout cela enlevé et joyeux, avec des airs de Schubert, de Liszt, Mozart, Glück, soulignant les goûts musicaux de l’époque. Enfin Cendrillon, opéra de 1904 de Pauline Garcia Viardot, fille d’un célèbre chanteur et soeur de La Malibran, dont le talent et la compétence ont couvert le XIXe siècle, puisqu’elle vécut de 1821 à 1910. Œuvre fraîche et délicate qui raconte une histoire de Cendrillon qui finit bien. Tout y est : père faible, sœurs cruelles, prince marivaldien travesti en valet, dans une scénographie efficace et une distribution de qualité. CHRIS BOURGUE Cendrillon a été joué dans le cadre de L’opéra au village à Pourrières du 17 au 24 juillet Pauline Viardot-Garcia © X-D.R. Côté Cour, de Naples à Séville Brigitte Peyré et Muriel Oger-Tomao ont convié à une balade intimiste dans la cour tranquille du Musée Granet. Grâce à leur amitié complice et leur tessiture jumelle, elles passent avec malice du premier au second soprano quand elles sont en duo, mélangeant ainsi leurs tessitures et leurs registres, l’une chantant où l’on attendait l’autre ! Mises en scène avec finesse et humour par Bernard Colmet, elles ont enchanté le public. Les airs étaient variés : Donizetti et Rossini qui avaient composé pour leur amie Pauline Viardot, chansons napolitaines de Paolo Tosti, zarzuelas de Francisco Barbieri ; le thème intemporel de l’amour romantique en accord avec la nature revenait souvent, bien sûr, mais aussi la nostalgie des amours défuntes ou l’attente de celui qui ne vient pas. Sensualité et fantaisie étaient soulignées par la subtilité du piano de Marie-France Arakélian qui n’a pas hésité à participer au jeu dramatique ; ainsi le trio s’est montré décapant. Inoubliable : La pastorella delle Alpi de Rossini, air dans lequel Brigitte Peyre, parfaite bergère, appelle ses chèvres en imitant leurs bêlements, telle Manon dans ses collines ! CHRIS BOURGUE Ce concert a eu lieu le 17 juillet au musée Granet (Aix) B.Peyre et M. Oger-Tomao © Gilles Mickaelis 42 MUSIQUE LA ROQUE D’ANTHÉRON | ORANGE Nikolaï le Grand Un gros orage a failli remettre en cause le concert du 20 juillet au festival de La Roque d’Anthéron… Miraculeusement, la pluie a cessé de tomber à l’approche de 21 heures. Il aurait été fâcheux de ne pouvoir assister au triomphe de Nikolaï Lugansky dans Rachmaninov ! Nikolaï Lugansky © X-D.R Dans la cohorte du public, qui s’installe lentement sur les immenses gradins du parc du château de Florans, on a pris soin de se munir du poncho fourni par les bénévoles à l’entrée. Chacun prie pour que la mince toile plastifiée le protège d’une averse soudaine. Mais l’orage est passé et ne reviendra plus ! Dimitri Liss et l’Orchestre de l’Oural débutent, avec un poil de retard, par une pièce de Liadov, prélude à une affiche exclusivement russe. On attend la vedette ! Nikolaï Lugansky se fait un peu désirer et chacun frémit à l’idée du poids du programme que le pianiste va interpréter : les Concertos n°1 et n°3 de Rachmaninov ! Bientôt le tsar des claviers s’installe et attaque à pleins poignets le long thème en fa dièse mineur, sorte de portique sonore qui fut autrefois au générique de feue l’émission littéraire Apostrophe. L’artiste regorge de puissance et ses doigts courent avec netteté sur les touches enchaînant arpèges, gammes et octaves… Rien n’est laissé au hasard : c’est du grand piano qui n’oublie pas de chanter ! Le travail sur le son de Lugansky est somptueux, tempéré par un usage subtil des pédales. Tant de virtuosité laisse le public pantois! Après les fameuses Danses Polovtsiennes jouées par une formation instrumentale dans son jardin avec Borodine, le pianiste revient pour la folie digitale de l’opus 30. Entre des instants d’une grande tendresse, un chant d’une clarté souveraine, ce ne sont qu’éclairs fulgurants où les accords se succèdent à l’allure des ailes d’un oiseau mouche, des battements de phalanges qui défient les lois de la mécanique corporelle… Après un final à couper le souffle deux Préludes en bis de Rachmaninov, clôturent un programme brillant et assurent le triomphe du Russe. JACQUES FRESCHEL Sacrés tuyaux pour un Faust populaire Formidable succès pour le Faust de Gounod, mis en scène par Nicolas Joël, le 2 août aux Chorégies d’Orange, et pour la somptueuse distribution vocale emmenée par Roberto Alagna et Inva Mula Un immense buffet d’orgue plaqué contre le mur du théâtre antique sert d’unique décor au Faust imaginé par Nicolas Joël. Cette idée permet aux personnages de se mouvoir au pied de majestueux tuyaux de montre, comme dans un château fantasmagorique, sur une terrasse bordée de balustres, sous des arches ouvertes au rez-de-chaussée… Et les symboles qu’on associe d’ordinaire à l’instrument sacré se prêtent au chef-d’œuvre de Charles Gounod. Car chez le musicien, davantage que chez Goethe, l’opus s’attache au combat de Dieu contre Satan. Dans la fosse, habitué des lieux, Michel Plasson défend avec le talent qu’on lui connaît la grande musique romantique française. À la tête de l’Orchestre de Radio France, il sculpte une texture tantôt tranchante ou fondue, soutient des chœurs magistraux (près d’une centaine de choristes issus des opéras d’Avignon, Nice, Toulon et Toulouse) et le magnifique plateau vocal. Une lutte pour l’ut ! En tête d’affiche, Roberto Alagna était inévitablement attendu dans un rôle qui ne lui va plus comme un gant, surtout depuis que le ténor s’est tourné vers des emplois plus lourds. Alors, disons-le tout de suite, la star, le soir de la première, a loupé son contre-ut (celui dit de «la présence») ! Sur ces fameux mots, Roberto a du s’emmêler les cordes, hésitant vraisemblablement entre une voix mixte (poitrine/tête) ou un simple falsetto… Hormis ce bémol, le reste a été magistral ! Qui d’autre que lui peut chanter le français avec une telle évidence, clarté dans l’articulation, générosité dans l’émission ? Et quel métier ! On n’est pas de ceux qui jugent une prestation à l’aune d’une seule note… D’autant que, lors de la représentation télévisée captée le lendemain, on a entendu le ténor distiller un habile do, suave et léger… Dans ce contexte, Inva Mula a subjugué le public. Que ce soit dans les sobres couplets du Roi de Thulé ou dans le flamboyant Air des bijoux, puis au fur et à mesure que le drame accable Marguerite, la soprano a montré l’étendue de son talent, sa splendeur vocale, sa pure émotion théâtrale. Que dire également de l’immense stature du Méphistophélès campé par René Pape ? Les gradins du théâtre romain vibrent encore de son effrayant Veau d’or ! Et Jean-François Lapointe (Valentin), formidable baryton d’opéra, a complété un plateau vocal à la hauteur du lieu et de l’œuvre. Car Faust est un vrai opéra populaire, regorgeant de mélodies célèbres. Mais il exige, pour les chanter des voix exceptionnelles. JACQUES FRESCHEL Ascension chromatique Abdel Rahman El Bacha, est un adepte des marathons pianistiques. On se souvient de son intégrale du piano de Chopin donné dans l’ordre chronologique… et par cœur ! Le 25 juillet, le Libanais proposait d’enchaîner 24 Préludes de Bach, Abdel Rahman el Bacha © X-D.R Chopin et Rachmaninov dans l’ordre croissant des tonalités. Pari réussi ! Tout commence par le 1er Prélude en do majeur du Clavier bien tempéré de Bach. Le jeu est souple, avec pédale, un peu tiré vers le romantisme, comme si déjà le pianiste préparait Chopin : pas métronomique, avec un poil de rubato. De fait, c’est dans Chopin, qu’au fil des 72 pièces enchaînées plus de trois heures durant, le stakhanoviste se montre le plus à l’aise. Dans sa lente progression par demi-tons vers l’aigu, la confrontation des styles s’avère intéressante. Chaque ton, majeur puis mineur, apparaît, s’affirme ou s’estompe, plus évasif… de Bach à Rachmaninov. El Bacha s’acharne à unifier le tout, le contraste des langages harmoniques, la différence des styles d’écritures s’échelonnant sur deux siècles d’histoire de la musique. Au fil des trois concerts entrecoupés d’entractes, pour cette rituelle Nuit du piano, le public se prête au jeu, entre dans le rythme de l’artiste, reconnaît deci de-là quelque opus célèbre et reste ébahi par la concentration et la mémoire phénoménale du musicien. Car tout est joué par cœur ! On imagine le travail fourni en amont, les heures passées au clavier à enchaîner toutes ces pages, à en extraire la quintessence afin de bâtir une trame cohérente. Au final, le public ne s’est pas trompé, et salue la performance par une ovation debout ! J.F. FESTIVAL D’AIX MUSIQUE 43 Un oratorio à la scène Le parti pris de mettre en scène l’oratorio Belshazzar de Haendel au festival d’Aix s’est avéré judicieux : l’habile scénographie de Christof Nel, la direction millimétrée de René Jacobs ou l’aisance du contre-ténor Bejun Mehta en ont scellé le triomphe Un spectateur qui serait arrivé en retard lors d’une représentation de Belshazzar au Grand Théâtre de Provence, au milieu d’une vaste fugue chantée en anglais à la gloire du Divin ou lors de l’Amen conclusif, aurait eu de quoi tiquer ! En effet, ces pages sont caractéristiques d’un genre particulier : l’oratorio sacré. À la différence des opéras (joués avec décors, costumes et mise en scène…), ces drames, souvent historicobibliques, n’étaient pas représentés. Est-ce pour autant un sacrilège que de les «monter»? Non ! Cette nouvelle production du festival d’Aix prouve le contraire ! Certains oratorios possèdent une telle intensité dramatique que les porter à la scène ne nécessite pas un insurmontable effort d’imagination. Cela les rend, du reste, plus abordables. Belshazzar est de ceux-là ! L’histoire de ce tyran babylonien, vaincu par Cyrus libérateur du peuple juif, possède de nombreux ressorts dramatiques que la mise en scène de Christof Nel a su habilement exploiter. Un décor vertical en fausse perspective sert de terrain de jeu aux pantomimes d’un roi coiffé d’une improbable couronne d’opérette ; à des acrobates hommes de main du pouvoir, au chœur siégeant parfois, face au public, comme son propre miroir… Certains effets sont captivants, comme ce mur dégoulinant de sang, soudain dressé à l’avant-scène, alors qu’un instant plus tôt le vin coulait à flots lors d’une bacchanale… Côté musique, le style alternant récits et airs ne diffère pas de l’opéra, et l’utilisation de l’anglais (à la différence de l’italien pour l’opéra) semble clairement renouer avec la tradition de Purcell. Dans la fosse, les instruments © Elisabeth Carecchio anciens de l’Akademie für alte Musik Berlin font merveille. Dirigé avec précision et souplesse par René Jacobs, l’orchestre richement doté fournit une vaste palette d’accompagnements : orgue feutré, basse de viole, cordes pincées de clavecins et de théorbes, trémolos de violons, contre-chants de hautbois et flûtes… Les voix du RIAS-Kammerchor sont homogènes et les solistes admirables. De la distribution, on retient la performance rare d’un contre-ténor au timbre chaleureux et puissant aux aigus assurés et séduisants : Bejun Mehta (Cyrus). À ses côtés, l’élégant ténor léger Kenneth Tarver, roi perverti par le pouvoir, brille par son aisance corporelle. Neal Davis, noble vengeur, émeut par son style de baryton mélodiste (mais manquant de grave), Kristina Hammarström (alto) campe un prophète Daniel tout en noblesse de ton. Enfin, la soprano Rosemary Joshua, dans le rôle cornélien de la mère du Tyran, regorge de vérité expressive. JACQUES FRESCHEL La boucle est bouclée Premier ouvrage représenté il y a 60 ans dans la cour de l’Archevêché, Cosi fan tutte justifie à lui seul l’hommage rendu aux fondateurs du Festival d’Aix Parfois le destin d’une œuvre ne tient qu’à un coup du sort. C’est ce qu’à du se dire Mozart au début de l’année 1790 lorsque le formidable accueil réservé à son opéra bouffe au Burgtheater de Vienne pour son ultime collaboration avec le librettiste Da Ponte fut littéralement éclipsé par le décès de Joseph II. Deuil oblige, les théâtres ferment et l’activité reprend, Cosi est déjà oublié et sa longue vie pressentie un lointain souvenir… À Aix l’auditoire comblé n’a sans doute pas eu à se poser ce genre de question, profitant pleinement de la qualité de la distribution fort jeune mais réussie. Judith Van Wanroij dans le rôle de la femme de chambre Despina fut sans nul doute l’étoile de cette soirée. Outre ses talents scéniques, cette soprano hollandaise place remarquablement bien sa voix et donne une impression de légèreté dans les aigus, vocalisant à souhait. De là à éclipser Fiordiligi et Dorabella ? N’exagérons rien, mais Sofia Soloviy et Janja Vuletic, au demeurant de très bonnes interprètes, paraissent légèrement en retrait de leur soubrette ! Et les hommes dans tout ça ? Une analyse analogue est de mise, avec en tête le puissant Don Alfonso (William Shimell) devant Guglielmo (Edwin CrossleyMercer) et Ferrando (Finnur Bjarnason). La Camerata de Salzbourg se veut précise et fidèle à une authenticité orchestrale sous la baguette d’un Christophe Rousset plus à son aise dans les récitatifs au piano-forte qu’à la direction. Bien qu’il intervienne peu, le chœur affiche une jolie présence et une belle homogénéité, avec parfois un petit bémol pour les aigus (le festival souhaite avoir son propre chœur en reconduisant tous les ans les mêmes artistes, ce qui sera bénéfique). La mise en scène ori- ginale du cinéaste Abbas Kiarostami n’a pas dérouté le tout Aix, alternant décors classiques, film en fond de scène aux inflexions contemporaines parfois surprenantes mais bienvenues (un petit point devenu voilier s’approchant inexorablement vers nous) et jeu d’ombres chinoises servies par la palette de lumières de Jean Kalman. Un succès éclatant pour cette école de la vie qu’est Cosi. FRÉDÉRIC ISOLETTA Cosi fan tutte a été joué du 4 au 19 juillet au Théâtre de l’Archevêché © Elisabeth Carecchio 44 MUSIQUE DISQUES Lignes croisées Underground Vous êtes franchement rock’n roll ? Alors découvrez vite les Dead Sexy Inc, si ce n’est déjà fait. Ce trio de Los Angeles n’est pas un nouveau venu sur la scène américaine, et il continue de se frayer un chemin plus que mérité de l’autre côté de l’atlantique. L’album intitulé sobrement Kamikaze ravira tout autant les amateurs de rock garage brut de décoffrage que les adeptes d’électro griffé à coups de riffs saturés. Le mélange au demeurant tendance a tout pour plaire chez ces touche-àtout adeptes du remix : B.O de Nintendo, DJ itinérants ou encore réalisateurs…. Son cru, riff acide limite punk rock, rythmique soutenue : la recette est connue et elle se déguste encore mieux lorsque s’y ajoute une sombre pincée d’esthétique glam rock déjantée, à l’allure caverneuse digne d’un sous-sol batcave à vitraux gothiques. Le soutien électro prend alors toute son importance tel un tapis pulsatif élévateur. À déguster ! F. I. Kamikaze DEAD SEXY INC Enrage Production Les grandes lignes, véritable concept album composé et dirigé par la musicienne multi-facettes Nadine Esteve, réunit sous l’appellation du Tintamar’ Orchestra pas moins de 12 musiciens. Les origines diverses et les parcours plus que variés des instrumentistes ou chanteurs participant au projet concoctent une palette sonore riche et composite. Le quatuor à cordes Assaï, une contrebasse, des flûtes, une trompette, un trombone, des percussions (du tambour de basque à la derbouka) et deux voix basques, voilà un matériau propre à explorer différentes textures orchestrales ! Les voix sont bienvenues mais interviennent peu dans cet album essentiellement instrumental. La disparité des sources pourrait étouffer l’unité de l’œuvre mais bien au contraire, cette hétérogénéité est une aubaine, et force est de constater l’âme d’un fil conducteur bien présent, unissant les morceaux de ce volume pensé comme un projet de scène, et dont l’inspiration touche à la fois le jazz, le langage contemporain et le tissu populaire. F. I. Les grandes lignes Nadine Esteve La MeM Skanavi et Moultaka Dans les bacs (qui aujourd’hui s’explorent sur le net), on déniche une paire de disques enthousiasmants de deux labels majeurs marseillais. Lyrinx édite un concert «live» de Katia Skanavi, époustouflante dans Chopin, quand L’Empreinte digitale publie une monographie d’opus contemporains du libanais Zad Moultaka On attendait cet enregistrement Chopin de Katia Skanavi ! D’abord parce qu’un disque de la Russe constitue toujours un événement, ensuite parce que la prise directe adoptée par les Gambini convient à souhait à l’artiste. En effet, cette dernière, dont l’invention est débordante, «ne fait jamais la même chose» (dixit René Gambini, directeur artistique et preneur de son du label), ce qui constitue un véritable casse-tête pour le montage des prises. Orient-Occident Zad Moultaka pouvait difficilement trouver mieux que le Chœur de chambre Les Eléments, dirigé par Joël Suhubiette, pour enregistrer ce programme d’opus vocaux récemment composés. Ce musicien d’une quarantaine d’années, né au Liban, possède déjà un catalogue conséquent d’œuvres et tire l’originalité de son style de l’influence de la musique de sa culture d’origine Il ne faut pas se fier à l’allure «frêle» de la pianiste : c’est une virtuose hors-pair, issue de l’impressionnante cohorte slave, formée au panthéon du Conservatoire Tchaïkovski, ayant raflé tant de Prix aux «Long-Thibaud» et autres «Van Cliburn»… Pour son 8e disque enregistré pour la maison marseillaise, Skanavi s’intéresse au Chopin des années 1843 à 45. C’est la grande maturité du Polonais, sa période la plus heureuse peut être… vers 35 ans ! C’est à peu près aussi l’âge de la pianiste. Peut-être cela participe-t-il au fait qu’on la sent en osmose avec l’art poétique du maître du piano romantique. Au-delà de la fougue nécessaire déployée dans quelque Mazurka ou mouvement de la Sonate en si mineur, on retient son sens de la respiration, et toute la ductilité avec laquelle la virtuose sculpte les arabesques des Nocturnes ou de la Berceuse en ré bémol… qu’il marie volontiers à l’écriture contemporaine occidentale. Le programme propose six pièces contrastées, chantées dans différentes langues : français, latin, italien, ou sur de simples phonèmes arabes, voire imaginaires… La texture sonore naît parfois du trait, s’inspire de façon subjective de la calligraphie d’un poème (Khat), dévide un chapelet d’images sonores furtives (Enluminures), puise dans le chant byzantin, la polyphonie de Monteverdi (Zikr), les mélismes orientaux (Neb Ankh), et joue aussi sur la superposition sonore des différentes plages du disque (Vision)… L’occasion de découvrir un langage singulier et un compositeur qui compte dans la création contemporaine ! J. F. CD SKANAVI CHEZ LYRINX (LYR 2259) CD MOULTAKA CHEZ L’EMPREINTE DIGITALE (ED 13231) 46 CINÉMA FESTIVAL INTERNATIONAL DU DOCUMENTAIRE | APT Au fil du FID Le dix-neuvième Festival International du Documentaire s’est tenu à Marseille du 2 au 7 juillet Un parcours au fil du monde «Faire le FID», cela veut d’abord dire choisir un parcours durant six jours, décider de prendre soit une autoroute, les compétitions internationale ou nationale, soit des routes parallèles en Europe ou en Amérique, vers Zanzibar ou vers le passé toujours d’actualité. On peut aussi emprunter des chemins de traverse, en butinant de film en film, selon son inspiration du moment. Comment tracer sa route ? Vers les contrées inexplorées, les terres vierges des premiers films ? Sur les chemins balisés et rassurants des cinéastes qu’on aime ou des rétrospectives… qui réservent parfois des surprises ? Ou encore accepter de se détourner du chemin qu’on s’est fixé lorsqu’un panneau indicateur signale qu’il y a là, à ce moment-là, quelque chose à découvrir… Et puis, surtout, accepter la frustration devant tous ces films qu’on ne verra jamais ! De ce parcours quel qu’il soit, on ressort changé, chargé d’émotions. Des émotions On peut se sentir mal à l’aise devant les camps de ces gens déplacés, au Gouroukon, à l’Est du Tchad, filmés frontalement, en plans fixes : Au loin des villages, d’Olivier Zuchuat, ne suscite ni compassion, ni indignation, non, juste une sorte d’impuissance due à la distance respectueuse du réalisateur qui a passé plusieurs mois dans le lieu. On peut être dérouté, dérangé, voire agacé devant le dispositif radical qu’a imaginé Roee Rosen dans Les Confessions de Roee Rosen : ses «aveux» sont lus sur un prompteur par trois travailleuses, immigrées en Israël, qui déchiffrent péniblement l’hébreu. On peut être perplexe devant le choix de Phillip Warnell de se faire «radioscoper» par The Girl with X-Ray eyes qui lui diagnostique une infection à soigner de toute urgence, en regardant à travers ses organes, un documentaire qui ressemble à un film de science-fiction. On peut rêver à travers les paysages mystérieux, filmés en lumière naturelle de Il Cielo, La Tierra y la Lluvia de José Luis Torres Leiva, sorte de suite «fictionnarisée» à son court métrage, Ouvrières sortant de l’usine. On se dit aussi que Nous n’irons pas à Buti, c’est narcissique et inutile à l’Heure du berger ! On préfère entendre les témoignages des familles de «disparus» du régime marocain (Nos Lieux interdits) ou des protagonistes des procès des inculpés du génocide au Rwanda (D’Arusha à Arusha)… On peut aussi se laisser toucher par la tendresse de la Coréenne Sun Hee qui filme sa grand-mère de 84 ans, ses mains qui cousent, ses pieds qui font mille pas par jour (Her Summer). On peut se laisser entraîner par Henri-François Imbert qui suit les traces de Jean Eustache dans sa ville natale, Narbonne, et qui nous fait rencontrer Hilaire, l’un des garçons de Mes Petites Amoureuses au Bar Des Quatre Fontaines (Le Temps des amoureuses). On peut découvrir la chronique familiale de Morgan Dews, qui a réussi à rendre sensibles les tensions qui conduisent aux névroses familiales : on entre dans l’intimité d’Allis à qui son psychiatre reproche d’être non-conformiste ; les images en contrepoint avec les bandes sonores se superposent, se contredisent, s’entrechoquent. Se dégage peu à peu le portrait touchant d’une femme qui s’interroge sans cesse sur elle et sur les femmes en général. Une démonstration parfaite des blessures que peut provoquer la famille et des névroses qui peuvent s’y développer. Des rencontres Bien entendu au FID, on peut aussi rencontrer des réalisateurs, assister à des tables rondes, et sortir plus ouvert aux réalités du monde. On peut aussi, petit bémol, se sentir frustré comme lorsque Toni Négri, Président du Jury International, «fatigué par le métier de jury», ne répond pas vraiment à la question posée sur le rapport entre l’art et la philosophie, ou mélange architecture et urbanisme. On peut aussi être en colère face à un discours qui semble loin, parfois, des réalités sociales ! Mais films et paroles au FID étaient là pour interroger nos représentations et «réveiller ce qui dort en nous». Un vaste et beau programme ! ANNIE GAVA El Cielo, la tierra y la lluvia © Trigon-film Palmarès et coups de cœur Avant la cérémonie de clôture du FID, nous avons posé à une centaine de spectateurs la question suivante : «Vous repartez du FID avec un seul film : lequel ?» Le public n’a pas toujours les mêmes goûts que les jurys ! L’Heure du berger de Pierre Creton, Grand Prix de la Compétition française et prix du GNCR n’a été cité qu’une fois ! De même qu’Optical Vacuum de Darius Kowalski et Mirages d’Olivier Dury, prix Premiers Films et d’Arusha à Arusha de Christophe Gargot, prix Georges de Beauregard. En revanche, Au loin des villages d’Olivier Zuchuat, qui a obtenu le prix des Médiathèques, a été choisi sept fois, Khiam 2000-2007 –nom d’un camp de détention au Sud Liban, filmé par Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, prix Georges de Beauregard international, cinq fois, Les Confessions de Roee Rosen, mention spéciale du jury, quatre fois et le prix de Marseille Espérance, Bab Sebta, qui retrace le parcours d’émigrants africains arrivés à la Porte de Ceuta, réalisé par Pedro Pinho et Frédéric Lobo, cinq fois. Lettre à la prison, de Marc Scialom, long métrage franco-tunisien tourné en 1869, restauré et accompagné par Film Flamme qui a eu une mention spéciale du Jury a été choisi par quatre spectateurs. Quant au grand prix international, Must read after my death, superbe travail à partir d’images et de sons enregistrés par la famille du réalisateur, Morgan Dews, quatre personnes l’ont élu. Ont été cités aussi plusieurs fois : Ce Cher mois d’août du Portugais Miguel Gomez ( 6 fois), The Exiles de Kent Mackenzie, offert au public par Jean-Pierre Gorin (4 fois) et Nos Lieux interdits de Leila Kilani (4 fois). Mais le grand coup de cœur du public ne faisait pas partie de la compétition : il s’agit du film réalisé par Robert Kramer en 1984, Notre Nazi que quinze spectateurs sur la centaine interrogée ont plébiscité ! Notre Nazi, sorte de making off du film tourné par le cinéaste allemand Thomas Harlan, Wundkanal dont le rôle principal est le docteur Alfred Filbert, ancien commandant de la Gestapo, responsable de massacres en Lituanie et en Russie. Retrouvé en 1962 et condamné à la prison à perpétuité et libéré une dizaine d’années plus tard pour raison de santé, il vivait tranquillement à Berlin jusqu’à ce que Thomas Harlan vienne le solliciter… Espérons que ceux qui l’ont «loupé» le voient un jour ! ANNIE GAVA, ASSISTÉE PAR ARMELLE MARIE 47 Zanzibar ? Kèzaco ? Le FID en chiffres Le FID c’est : 900 000 euros de budget 5 permanents 30 personnes pour le pré-festival (mai /juin) 140 personnes travaillant durant le Festival (aucun bénévole) 500 accréditations professionnelles 90 accréditations presse nationale et internationale 21000 spectateurs 3000 films reçus et visionnés par l’équipe de sélection. 138 films projetés 208 séances 1/3 des films projetés sélectionnés pour les festivals internationaux 10 films sélectionnés pour le Festival Mar Del Plata de Buenos Aires Que se passe-t-il en France après la Nouvelle Vague ? Eustache et Garrel ? En effet, mais il y a aussi un groupe informel de dandys cinéastes, nés de la mouvance intellectuelle révolutionnaire de 68 dont le chef de file est précisément Philippe Garrel, qui, seul, continue de faire des films. Leur nom ? Productions Zanzibar. Nom inspiré d’un poème de Rimbaud et d’une destination africaine jamais atteinte. Ces jeunes gens, tous beaux ou presque, vont tourner des films dits «sauvages» car sans autorisation offi- cielle, mais montrés à la Cinémathèque et tous financés par une riche mécène, Sylvina Boissonnas. Films dépouillés, parfois mystiques, quasi mutiques voire muets (Le révélateur de Garrel) tournés dans des paysages déserts, à la recherche de l’origine de la vie (La cicatrice intérieure). Films d’échappées belles où cinéma et vie ne font qu’un. Étonnamment, peu de films politiques, à part peut-être Détruisezvous de Serge Bard. Films atypiques, souvent abstraits et expérimentaux, à la croisée des arts (Fun and Games for everyone où Serge Bard filme un vernissage du peintre Olivier Mosset). Électrons libres sous influence : Warhol surtout mais aussi LSD ! Films de corps et de décors : de beaux mannequins de la jet-set font partie de la bande, Caroline de Bendern, surnommée la «Marianne de mai 68» et Zouzou, muse de Garrel avant Nico. Ces films sont sortis de l’oubli grâce à Sally Shafto, historienne de cinéma et programmatrice de cet Écran Parallèle. MURIEL BENISTY Soirs d’été sous les étoiles Après des escales à Marseille, Arles, Port-de-Bouc, la Caravane du Cinéma euro arabe (voir Zib 10) s’est arrêtée au cœur du Lubéron, à Apt. Avis de concours Le mot du Délégué Général, Jean-Pierre Rehm «Je suis particulièrement satisfait de l’édition 2008 : un déroulement fluide, une équipe passionnée, un nombre important de sélectionneurs étrangers et un retour unanime sur la qualité du festival, un grand nombre de films qui vont «tourner» dans d’autres festivals, de plus en plus de réalisateurs qui confient leur film, grâce au label FID, des jurys qui ont fonctionné de manière optimale…» Et pour 2009 ? FID or not FID ? «Un vingtième anniversaire avec une rétrospective exceptionnelle… Je n’en dirai pas plus.Quant au nom du Festival, il est connu internationalement sous le nom FID, difficile de l’appeler autrement !» A.G. Délice Paloma de Nadir Moknèche L’ambiance était des plus conviviales sur le Cours Lauze de Perret, le jour de la Sainte-Anne. Plus de deux cents personnes, après s’être désaltérées au buffet offert par Le Festival des Cinémas d’Afrique, se sont installées devant le grand écran gonflable, à la tombée de la nuit, et ont assisté à la projection de Délice Paloma, troisième long métrage de Nadir Moknèche (après Le Harem de Mme Osmane et Viva Laldjerie). Ils ont écouté les aveux de Madame Aldjéria, la «bienfaitrice nationale» qui sort de trois années de prison. Elle leur a raconté toute son histoire, toutes les affaires, les combines qu’elle a montées, dont la dernière qui l’a conduite en prison, la tentative de rachat des Thermes de Caracalla, liés à son enfance. Madame Aldjéria -magistralement interprétée par Bijouna, l’actrice fétiche de Nadir Moknèche avec son chignon digne des héroïnes d’Hitchcock- et ses collaboratrices -Shéhérazade (Nadia Kaci) et Rachida (superbe Aylin Prandi), une serveuse qu’elle a recrutée- symbolisent la société algérienne, ses espoirs, ses souffrances. Le public aptésien, qui connaît bien le cinéma africain, a apprécié cette comédie douce amère… ANNIE GAVA Le Festival International du Film d’Aubagne soutient la jeune création cinématographique en s’attachant particulièrement à la création musicale pour l’image. Pour sa dixième édition, qui aura lieu du 16 au 21 Mars, un appel à candidature est lancé jusqu’au 15 Octobre, dans deux catégories : les premiers, deuxièmes ou troisièmes longs métrages (fiction, documentaire, experimental, animation), comportant impérativement une musique originale ; et les courts métrages (premiers, deuxièmes ou troisièmes) de tous genres également, présentant une musique originale ou un traitement particulier de la bande sonore. A.F. 48 CINÉMA LUSSAS | ROUSSET | TRETS Documentaires dans les prés, c’est la fin de l’été….. Chaque année, à la fin de l’été, les amoureux du documentaire se donnent rendez-vous à Lussas, village de 800 habitants, près d’Aubenas, en Ardèche. Et pendant une semaine, le village vit au rythme des projections, des débats, des rencontres : cafés, restaurants deviennent des lieux d’échanges dans la plus grande convivialité. Au programme de la vingtième édition des États Généraux du Documentaire, qui s’est tenue du 17 au 23 août, deux séminaires, l’un sur le corps, animé par Nicole Brenez qui a présenté entre autres, des films de Stephen Dwoskin, le deuxième, Formes de lutte et luttes des formes pendant lequel Jean-Louis Comolli, Patrick Leboutte et Marie-José Mondzain, ont donné à voir des films de Bu uel, Ivens, Rouch, Pazienza… La Route du Doc menait en République tchèque et a été contée l’Histoire du doc de Grande Bretagne. Comme chaque année étaient proposés un programme africain, une journée SACEM et une sélection de documentaires très variés, Incertains Regards. Deux cinéastes marseillais C’est dans la sélection Incertains Regards que le public de Lussas a pu découvrir le travail de deux réalisateurs marseillais, deux films soutenus par la Région PACA. Celui de Jean-Michel Perez, Trous de mémoire, réalisé avec Lieux Fictifs au cœur de la prison des Baumettes (voir Zibeline 5), à partir d’images d’archives présentées aux stagiaires, discutées, mises en scène, rejouées. «Images de l’Algérie des années 60, mur de Berlin, révolution roumaine, Tien J’ai un frère d’Emmanuel Vigier An Men 1989, sur lesquelles se détachent les visages d’Hacène, Dimitri ou Florin. Images imprimées sur les corps qui deviennent les supports de leur histoire, voix des détenus évoquant leurs souvenirs, lisant des textes d’Aimé Césaire ou les Propos sur le bonheur d’Alain. Images de l’extérieur qui entrent dans le lieu clos…» Le deuxième, celui d’Emmanuel Vigier, J’ai un frère. Deux frères ne se sont pas vus depuis quatorze ans : Drazan s’est exilé à Marseille en 1992 et Dejan vit au Nord de la Bosnie, dans la partie serbe, à Bosanski Brod, ville industrielle détruite par la guerre. En 2007, Drazan décide de rendre visite à son frère à la frontière de la Croatie… Emmanuel Vigier connaît bien les Balkans, où il a fait plusieurs reportages. Les retrouvailles de ces deux frères entraînent le spectateur dans une sorte de road-movie et le fait réfléchir sur l’exil et sur tous ces gens qui ont fui le pays, tous ceux qui ne sont pas rentrés après la guerre…. Ce film devrait être projeté à Marseille, nous en reparlerons… A. G. États généraux du film documentaire www.lussasdoc.com Des courts à Rousset Rock en 3D Le 4 octobre, de 9 heures à minuit, à la salle Emilien Ventre de Rousset, les Films du delta proposent le Festival Courts-Bouillons, une «seconde chance pour une trentaine de courts métrages internationaux d’être vus pas le public». Premier voyage de Grégoire Sivan Parmi ces courts, qui ont été montrés dans les festivals de la région ou à Clermont-Ferrand, ne ratez pas l’émouvant I want to be a pilot de Diego Quemada, ni l’étonnant Carlitopolis de Luis Nieto, ou Résistance aux tremblements d’Olivier Hems. Vous pouvez aussi faire un Premier voyage avec Grégoire Sivan et goûter La creme napulitane de Francesco Satta. Et pour la recette complète du CourtsBouillon ... A.G. Les Films du delta 04 42 53 36 39 www.filmsdelta.com Ladislas Starevitch, vous connaissez… ? Ce Russe qui vint en France en 1920 est un pionnier du cinéma au même titre que Mélies : il fut l’un des premiers à concevoir des films d’animation en trois dimensions. Les marionnettes s’animent sur l’écran avec une incroyable vérité. Les scénarii sont inspirés de contes ou de fables, il y a même un extraordinaire Roman de Renart qui reprend avec brio le récit du Moyen Âge… Peluches, insectes, créations fantasmagoriques, tout y est pour un monde de rêve et de poésie souvent moralisatrice. Le groupe Poum Tchack s’attache depuis des années à réhabiliter cet artiste trop peu connu, alors que Tim Burton ou Terry Gilliam lui doivent tant. Ils accompagnent les œuvres muettes de Starevitch. Les six musiciens dont la verve musicale conquiert tous les spectateurs s’en donnent à cœur joie et leur création, qui garde ses constantes de swing manouche et de musique tzigane, agrémente, illustre et commente avec bonheur les courts métrages du réalisateur russe. Un spectacle original et décapant, où humour et poésie se mêlent en un cocktail brillant. MARYVONNE COLOMBANI Dark Swing a été projeté-joué le 16 juillet à Trets, dans le cadre des Nuits du Château HORIZONTES DEL SUR | RENDEZ-VOUS DES QUAIS CINÉMA 49 La salle de classe en salles Qu’on ait aimé ou pas le roman de François Begaudeau, Entre les murs, vendu cet été à près de 70 000 exemplaires, depuis que l’adaptation de Laurent Cantet a obtenu la Palme d’or à Cannes, nul doute que le public, enseignants, parents, élèves, va se déplacer dans les salles de cinéma pour voir une salle de classe ! À priori, on peut faire confiance à Laurent Cantet à qui l’on doit Ressources humaines (1999), primé dans de nombreux festivals et L’Emploi du temps en 2001. On peut avoir confiance en Sean Penn, président du Jury qui lui a décerné la Palme à l’unanimité. On fait moins confiance à Monsieur Darcos qui continue à supprimer les postes malgré ses déclarations : «ce prix (…) constitue aussi un très bel hommage rendu à tous les enseignants de France qui, malgré des conditions de travail parfois difficiles, font preuve d’un dévouement et d’un mérite exceptionnels qui doivent être salués.» Avant même sa sortie en salles, le film a débordé la sphère cinématographique et semble s’insérer dans le débat sur l’école. Dans la région, trois avantpremières sont programmées, le 23 septembre à 20 heures aux cinémas Renoir à Aix, Variétés à Marseille, séances suivies de débats animés par le SNES (syndicat enseignant) et la FCPE (fédération de parents d’élèves), et au cinéma Utopia à Avignon par la Ligue de l’Enseignement. Par ailleurs, Télérama organise une projection le 22 septembre, aux Variétés, à 20h. Il est à parier que ces séances seront vraiment animées ! Entre les murs de Laurent Cantet © Georgi Lazarevski ANNIE GAVA Films espagnols à Marseille Du 10 au 18 Octobre, à Marseille, aura lieu le 7e festival Cine Horizontes. Au programme : les réalisatrices catalanes Judith Colell, Isabel Coixet, Silvia Munt, Claudia Llosa, Roser Aguilar, une nuit fantastique autour des jeunes réalisateurs du «cinéma de l’étrange» le samedi 11 octobre au rendez-vous des Quais, une nuit du court métrage le 17 octobre avec l’ECAM de Madrid à la Fiesta des Suds. Un hommage sera rendu à l’acteur et réalisateur disparu en 2007, Fernando Fernan-Gomez et une carte blanche donnée au peintre péruvien Herman Braun Vega. Quant à la compétition, seront présentés sept films : Lo Mejor de Mi de Roser Aguilar, Pretextos de Silvia Munt, Le Silence avant Bach de Pere Portabella (cf Zibeline 10), 3 Dias de Francisco Javier Gutiérrez, Los Cronocrimenes de Nacho Vigalondo, Todos estamos invitados de Manuel Gutiérrez Aragón et Uu Tiro en la Cabeza de Jaime Rosales. Et pour la soirée de clôture, samedi 18 octobre, le dernier film de Carlos Saura, Fados. Une occasion de découvrir des films peu diffusés en France et de rencontrer des réalisateurs dans une ambiance festive. A.G. Horizontes del Sur 04 88 01 38 18 www.horizontesdelsur.fr Fados de Carlos Saura Rendez-vous au Rendez-vous des quais Tout le monde connaît le réalisateur marseillais Paul Carpita, son Rendez-vous des quais, et son histoire, film, tourné à Marseille en 1953, censuré pendant 35 ans et ressorti à Marseille grâce au directeur de l’Alhambra. On a vu aussi certains de ses courts, Des Lapins dans la tête, Marseille sans soleil, Graines au vent, La récréation. Aujourd’hui, c’est un long métrage qui ressurgit : tourné entre 1955 et 1956, Rencontre à Varsovie raconte l’histoire de Jacques qui, partant en train couvrir pour un journal à sensation les Rencontres internationales de la Jeunesse, fait la connaissance d’une jeune fille qui fait partie de la délégation marseillaise. Sélectionné au Festival International de la Jeunesse pour la Paix de Moscou, le film obtient la médaille d’argent. À l’occasion de la sortie en DVD, chez Copsi production, de l’ensemble des films de Paul Carpita, il nous est proposé de voir ce film, lundi 29 septembre à 18h30 au Rendez-vous des Quais en présence du réalisateur. ANNIE GAVA Rendez-vous des quais 04 91 91 07 99 CRDP 31 bd d’Athènes (métro St Charles) 04 91 14 13 87 www.rendezvousdesquais.org Le 28 sept de 15h à 18h au Rendez-vous des quais, Tilt, Le CRDP d’Aix-Marseille et l’association ArtsTerres proposent une après-midi de projections de courts métrages sous-titrés et traduits en langue des signes en présence de Diane Maroger, directrice artistique du festival Retour d’image, «un festival de cinéma ouvert sur les différences, dont chaque film est accessible aux personnes aveugles ou sourdes». Parmi les films projetés, le tonique Guide Dog de Bill Plympton ; l’Oscar du meilleur court métrage, Le Mozart des pickpockets de Philippe Pollet-Villard et le beau film d’animation de Régine Pessoa, Histoire tragique avec fin heureuse. Arts-Terres 04 91 81 34 25 www.arts-terres.org 50 CINÉMA/ARTS VISUELS Des films, des femmes et la Méditerranée Mettre en lumière le travail des Méditerranéennes dans le cinéma, qu’elles soient scénaristes, réalisatrices, actrices, productrices, décoratrices, costumières, tel est le projet de l’association Films Femmes et Méditerranée (FFM), qui propose ses troisièmes Rencontres du 30 septembre au 7 octobre à Marseille, aux cinémas Prado et Variétés. Une douzaine de films viennent ainsi d’Algérie, de Bosnie, de Grèce d’Espagne, d’Israël, d’Italie, du Liban, de Palestine, de Tunisie et de Turquie, fictions et documentaires. Le programme est alléchant : beaucoup d’avant-premières et de films inédits, des échanges avec les invitées, des buffets et de la musique. En ouverture, mardi 30 septembre, le dernier film de Woody Allen (un homme certes, et américain !), Vicky Cristina Barcelona, avec la superbe actrice espagnole, Penelope Cruz, et Barcelone : «Lorsque j’ai commencé ce scénario, je n’avais d’autre intention que d’écrire une histoire dont Barcelone serait un personnage clé», explique Woody Allen. Sera invitée, pour la soirée, Sonia Grande, la costumière la plus célèbre du cinéma espagnol, six fois nominée aux Goya et dont les travaux seront exposés au cinéma Variétés. En clôture, mardi 7 octobre, Le Chant des Mariées, en présence de la réalisatrice, Karine Albou (La Petite Jérusalem) : la Tunisie de 1942, deux jeunes filles, amies depuis l’enfance, qui vivent leurs premières émotions amoureuses, Myriam la Juive et Nour la Musulmane, et l’entrée en vigueur de mesures antijuives… Entre-temps, une soirée gréco-turque avec deux courts métrages grecs et un long métrage turc, carte blanche du festival «Cinema e donne» de Florence : En attendantlesnuages de Yesim Ustaoglu ; un hommage à Anna Magnani et à Rome, Mamma Roma de Pasolini, et le Grand prix de la Semaine de la Critique à Cannes, Snow (Premières neiges), de la Bosniaque, Aïda Begic ; deux films du Maghreb, L’Envers du miroir de Nadia Cherabi et Nadia et Sarah en présence de la réalisatrice, la Tunisienne Moufida Tatli, avec qui le public pourra échanger ; deux documentaires, Je veux voir de la Libanaise Joana Hadjithomas (et Khalil Joreige), un voyage de Catherine Deneuve de Beyrouth à la frontière israél- Je veux voir, de Joana Hadjithomas ienne et Biutiful Cauntride, où l’une des plus grandes monteuses italiennes, Esmeralda Calabria, nous montrera comment Naples est devenue la poubelle de l’Italie… Penelope Cruz dans Vicky Cristina Barcelona de Woody Allen Et tous ceux qui, lundi 1er septembre, n’ont pu entrer à la projection du premier long métrage palestinien réalisé par une femme, Le Sel de la mer d’Anne- Marie Jacir, pourront le voir aux Rencontres FFM. Réservez donc vos soirées… ANNIE GAVA Association Films Femmes Méditerranée 09 51 77 77 66 www.films-femmes-med.org Un autre maître provençal Hasard de la programmation ? Au même moment Marseille met à l’honneur de ses cimaises deux peintres marseillais restés connus surtout des spécialistes de l’histoire de l’art. A la Vieille Charité Monticelli accompagne Van Gogh, au Palais des arts la Fondation Regards de Provence dévoile Jean-Baptiste Olive Peintre de la deuxième génération de l’école provençale avec Alphonse Moutte, Charles Camoin ou Alfred Casile, Jean-Baptiste Olive (1848-1936) est principalement connu pour ses paysages et marines : son travail sur les effets de la lumière et des vibrations colorées évoque J.-B. Olive, Coucher de soleil sur les îles du Frioul l’expérience impressionniste, tout en conservant une part plus importante de réalisme. De ses petits formats émane singulièrement l’impression de chaleur imposée par le soleil méditerranéen. Comme bien des maîtres régionaux il ne s’affranchit pas complètement de la tradition, alors qu’il est contemporain de Van Gogh, Matisse ou Picasso. Mais il propose une vision, si ce n’est renouvelée au moins personnalisée, influencée par l’invention de son époque : la photographie. Les clichés des rivages marseillais pris par ses amis les frères Cayol, lui suggèrent des cadrages moins conventionnels, plus dynamiques, avec de nouvelles hauteurs de vue. Un important travail de restitution historique et iconographique a été réalisé par Franck Baille, le spécialiste de l’œuvre de Jean-Baptiste Olive et commissaire de l’exposition. Ce catalogue monographique et raisonné dresse l’inventaire de plus de mille œuvres, ajoutées à la centaine exposée. L’ouvrage est actuellement accessible par souscription. À noter que grâce au partenariat avec les musées de Marseille, les détenteurs du ticket Van GoghMonticelli bénéficient d’un tarif réduit. C.L. Jean-Baptiste Olive - Prisme de lumière du 27 septembre au 25 janvier Palais des Arts Fondation Regards de Provence 04 91 42 51 50 www.regards-de-provence.org VAN GOGH-MONTICELLI ARTS VISUELS 51 Rencontre décisive À travers l’évènement culturel de l’année pour les musées de Marseille, la ville joue une carte majeure dans ses ambitions de capitale européenne de la culture pour 2013. Et si Van Gogh aidait à réhabiliter un peu Monticelli ? Et si Marseille devenait… ? Dans une de ses lettres à son frère Théo, Vincent avouait : «Ma jeunesse a été sombre, froide et stérile par suite de cette influence du rayon noir, mais je verrai le rayon blanc avant ma mort.». Du peintre des Mangeurs de pomme de terre aux matériologies obscures, jusqu’aux Champs de blé aux flamboyances colorées, il aura fallu toute une vie obstinée de recherche insatiable vers la couleur et la lumière. Nourrie de rencontres «prodigieuses». Ainsi en est-il avec les peintures de Monticelli, moment d’éblouissement qui apparaît assurément une étape majeure pour le Hollandais. Vincent, revendiquant cette filiation esthétique dans sa correspondance avec Théo, aurait souhaité être accroché à côté de Monticelli, aussi se vêtir, chapeau et canne, pour arpenter la Canebière à sa manière ! Peindre sous influence L’exposition conçue par Marie-Paul Vial et Luc Georget, conservateurs aux musées de Marseille, offre le regard croisé sur les deux œuvres alors que la rencontre des deux artistes vivement souhaitée par Van Gogh n’eut jamais lieu. Il découvrit les tableaux de Monticelli à Paris sans avoir pu rejoindre Marseille à temps, le maître décédant cette même année 1886. Cette mise en regard vient à propos pour «…com- Vincent Van Gogh, Autoportrait Huile sur toile, 65x54 cm, Paris, musée d’Orsay Photo Rmn - © Hervé Lewandowski Adolphe Monticelli, Autoportrait, vers 1880-1882 Huile sur bois, 35x34 cm Marseille, collection particulière © Jean Bernard prendre comment l’œuvre tardive de l’ombrageux Marseillais, apprécié de la bourgeoisie locale et des commerçants prospères mais aussi de Ziem, Guigou et Cézanne, a pu façonner à son insu le génie de l’un des peintres les plus célèbres du monde.». Cette influence se découvre dans les thèmes (bouquets, paysages) et les éléments formels des œuvres : touche vigoureuse, puissance des empâtements, montée de la lumière (mais Van Gogh gomme les clairs-obscurs), cadrages non conventionnels, effets chromatiques, comme dans la propension à faire surgir les sensations. Cette mise en œuvre des émotions trouve son équivalent dans la mise en mouvement de la surface picturale et l’exacerbation de la couleur : des audaces hautement cultivées par Van Gogh pour en devenir sa signature. Pourtant, les dernières œuvres de Monticelli suggèrent à JeanRoger Soubiran cette remarque : «Avant Gauguin, avant les fauves, Monticelli a instauré l’arbitraire de la couleur subjective.» Monticelli précurseur et Van Gogh novateur ? «Moi je peins pour dans cinquante ans. Il faudra ce temps là pour qu’on apprenne à voir ma peinture.» Adolphe Monticelli dixit. À juger sur pièces à la Vieille Charité. Sans oublier de faire un crochet par la galerie Marc Stammegna, spécialiste des peintres provençaux et de Monticelli en particulier dont elle expose actuellement un bel ensemble de pièces. CLAUDE LORIN Van Gogh-Monticelli du 16 septembre au 11 janvier Centre de la Vieille Charité 0810 813 813 www.marseille.fr Galerie Marc Stammegna du 19 septembre au 04 octobre 04 91 37 46 05 catalogue Van Gogh-Monticelli Martin Bailey, Frances Fowles, Mario Garibaldi, Luc Georget, Marie-Paule Vial Editions de la Réunion des Musées Nationaux www.rmn.fr 52 ARTS VISUELS HESPARE | INSULAIRE Se relocaliser Vous avez dit morose ? Conjoncture défavorable ? Art contemporain en déshérence ? Révisez votre jugement ! La preuve. Deux nouveaux lieux se sont ouverts très récemment à Marseille. Deux philosophies en faveur de l’art contemporain qui ont en commun de s’ouvrir sur des publics variés comme de vouloir travailler en relation avec leur quartier d’implantation. Se relocaliser au lieu de délocaliser ? L’idée d’une île Le quartier Belsunce/Canebière, en cours de rénovation, s’enrichit d’une nouvelle galerie d’art contemporain privée. Installée dans un immeuble du XVIIIe siècle en cours de réhabilitation, dans le haut de la rue Vincent Scotto, In Sul ai Re bénéficie de la visibilité de la grande avenue et de la proximité du cinéma Les Variétés. Une première manière d’approcher le grand public selon le souhait de sa directrice, Christiane Bray qui souhaite ouvrir le plus possible ses espaces tant aux différentes formes d’art contemporain qu’au visiteur non initié. Ainsi le monde de l’entreprise est convié à se frotter à la culture artistique (location hors horaires de la galerie) et à ses arcanes financières : «il s’agit d’informer les entreprises sur le mécénat et la défiscalisation, ce qui concerne aussi les collectionneurs comme les associations.» Domaine connu puisque Christiane Bray a été responsable administratif notamment auprès de l’université Paul Cézanne. Christiane Bray dans sa galerie insulaire © C.Lorin Mais «la présentation des œuvres à un public élargi» se fera aussi à travers des ateliers d’histoire de l’art, mais où est-donc la JoKonde ? Réservés aux jeunes enfants, ils se dérouleront sur deux demi-journées pour les initier à la lecture de l’œuvre d’art, à la création du passé comme contemporaine. «Mon travail principal est de rendre intime l’œuvre d’art. Je ne veux pas faire de cloisonnement des genres, des styles ou même générationnel. Je veux montrer des œuvres d’artistes vivants. Je fonctionne au coup de cœur.». Plusieurs projets sont en cours d’élaboration ou de négociation, en particulier avec des partenaires du quartier comme des projections vidéo sur les murs extérieurs. Mais la peinture ou les pratiques conventionnelles composent le fonds principal de la programmation. Cette première saison s’articulera autour de la problématique du corps et ses territoires. Début octobre c’est Yann Denais, un jeune artiste issu de l’École des Beaux-Arts de Luminy qui accrochera ses peintures aux cimaises d’In Sul ai Re. Mais pourquoi In Sul ai Re ? «Je vois les domaines de l’art comme des îles qu’il faut relier.». Le poete Dijeko photographié par Agnès O. Martins à l’inauguration de l’atelier Hespare monde entier.». Après ce coup d’essai, plusieurs projets sortent des cartons comme le prochain atelier public sur le thème du carnet de voyages, d’autres en cours d’élaboration à propos de l’Afrique notamment. Alors que la conjoncture s’annonce peu favorable aux nouvelles initiatives culturelles, les incertitudes matérielles et budgétaires ne semblent pas entamer l’enthousiasme de Sophie Testa : «Avec Hespare, on part à chaque fois de zéro. Et puis nous ne travaillons pas avec des outils coûteux. L’idéal serait de travailler sans subvention publique mais uniquement en mécénat.». Mais pourquoi Hespare ? En occitan, hespare gool signifie pariétaire, une plante comestible et médicinale. Une forme d’alternative aux pratiques dominantes ? CLAUDE LORIN L’Hespare fait vivre ! Sylvie Testa a choisi «de passer de la sécurité à l’insécurité», c’est-à-dire d’enseignante en arts appliqués à celui d’artiste indépendante. Et vient d’ouvrir un espace atelier géré par l’association Trois dans le quartier des Grands Carmes. Le projet articule la création contemporaine avec la mixité sociale. «Nous voulons mêler selon les projets arts visuels, sonores, poésie et art de la table, au moins pour les valeurs de convivialité et toutes les possibilités de tisser des liens, entre riches et pauvres.». En juin dernier, l’inauguration a réuni des créateurs de ces différentes disciplines avec en tête d’affiche les poètes et écrivains Julien Blaine, Sébastien Lespinasse, Emboligol, Stéphane Nowwak et Didjeko ; les combos Karma Cramé, Latino swing, Stéphanie Sagna pour la chanson; pour les arts plastiques, Stéphanie Testa présentait ses peintures en écho avec l’art aborigène alors que Nicolas Girbal proposait un atelier de cartes à poster avec le public : «l’objet de cet atelier est de revenir à un mode de fabrication personnalisé, non industriel et poétique de cartes qui seront envoyées dans le In Sul ai Re 35 rue Vincent Scotto 06 09 70 11 59 http://desirdetoiles.over-blog.com Atelier Hespare 14 place Marceau, 3e 06 50 95 60 36 http://hespare.canalblog.com ENTRETIEN AVEC DÉMOSTHÈNE DAVVETAS ARTS VISUELS 53 Tenter le Tout Démosthène Davvetas vient de réaliser deux performances à la galerie Jean-François Meyer et au Passage de l’art. Ses dessins restent exposés jusqu’au début d’octobre Il fait aussi partager sa conception de l’art et de la vie, par le truchement de la performance comme écriture totale. Car pour Démosthène Davvetas tout semble se résoudre dans la monopolisation de toutes les esthétiques, l’art de la boxe inclus. C‘est l’Écriture Totale. Mais que faut-il résoudre ? Le chaman, philosophe, enseignant poète et performeur, nourri au sein de Joseph Beuys, nous en dit plus. Zibeline : On peut se douter de ce que signifie écriture totale, mais grafale ? Démosthène Davvetas : Mon travail est basé sur le verbe graphein, au sens de graver et tracer. C’est une écriture qui commence sur le papier, qui devient image, puis entre dans l’espace en trois dimensions où les gens vont participer par la lecture de poèmes. Ce qui m’intéresse c’est de commencer par l’illusion, par les deux dimensions. Voyez, tous ces personnages sont réalistes… On reconnaît Brecht, Herman Hesse… Ça commence par des photos et ensuite on passe à la réalité de l’espace, l’action et l’écriture dans l’espace : une phrase sortie de son contexte et utilisée dans l’espace devient autre chose. Je ne fais jamais une exposition sans performance ni une performance sans exposition. C’est pour ça que je l’appelle une écriture totale : il faut que ça passe de l’illusion en deux dimensions à la troisième dimension, du visuel pictural au visuel sculptural. La performance pour moi est une sculpture vivante. Quand avez-vous commencé ces sortes de rituels ? C’est Joseph Beuys, mon maître spirituel, qui m’a initié. Il a vu mes dessins et m’a dit : vas-y. J’avais vingt ans à cette époque, j’avais perdu mon père, il a joué ce rôle. Je lui dois moralement cette poussée d’énergie. En fait, à Athènes je suis passé devant une exposition d’art. Je ne connaissais rien à l’art. Tout d’un coup il y a un monsieur avec un chapeau qui est arrivé et qui m’a demandé : qu’est-ce que vous regardez ? Je regarde ce dessin parce qu’il me fait penser à la fluidité et à la philosophie d’Héraclite. Ses yeux sont devenus grands. Il m’a dit vous connaissez Héraclite ? J’ai dit c’est pas mon copain mais j’ai lu ses textes. Il m’a dit venez dîner avec nous. Donc je suis allé dîner avec eux sans savoir qui c’était. Ensuite je suis allé le voir à Düsseldorf et il m’a dit voilà pour toi une bourse, va et continue ces études là-bas. Je n’y croyais pas, c’était énorme. C’était un coup de pouce, quelque chose qui m’a poussé à me réaliser. À vingt ans certains n’auraient pas fait le pas ! J’en avais besoin. C’est un appel par ses yeux, son œuvre lumineuse m’a appelé. J’étais complètement possédé par lui, par son esprit, par ses paroles. C’était une démonisation totale ! Ça veut dire quand même que je cherchais au fond de moi-même. Encore aujourd’hui je m’intéresse aux rencontres du hasard parce que ça Démosthène Davvetas, dessin, techniques mixtes © X-D.R Démosthène Davvetas, dessin, techniques mixtes © C. Lorin Démosthène Davvetas, dessin, techniques mixtes © X-D.R peut m’apporter des choses. Sinon c’est la fin. Je veux revenir au début, au point de départ. Toujours recommencer ? Oui, toujours, comme un Sisyphe, un Sisyphe fertile. Cet aller-retour c’est pour créer, arriver à quelque chose. Et le partager ? Certainement. La performance, c’est pour que le public entre en communication. S’il n’y avait pas cela, le public resterait immobile. Cela s’approche de la tragédie grecque. C’est un point de ma thèse. La performance commence par la tragédie parce que la tragédie était une action directe, et Joseph Beuys et tous les performeurs cherchaient la démocratie directe. Donc l’artiste avec le public fait encore comme s’il y avait un esprit collectif qu’on doit purifier. Il y a besoin d’énergie ? Certainement, parce qu’il faut sortir ce qu’on garde à l’intérieur jusqu’à faire créer le bébé. Chacun a un désir créatif, il faut le temps nécessaire pour lui donner une forme. Ensuite il faut le montrer. C’est ça la performance : montrer les formes. Un artiste, c’est quelqu’un qui a des idées -tout le monde peut avoir beaucoup d’idées-, mais l’artiste c’est celui qui donne forme aux idées. Ainsi le musicien, le poète… Tous les êtres humains sont créatifs, tous les êtres humains ont le droit à l’énergie, à la créativité du langage. Il faut que ça sorte pour le donner à la collectivité. Comment vous situez-vous dans la poésie contemporaine qui n’est plus seulement écrite mais parlée, criée… ? …. montrée, performée ! J’écris des poèmes mais ce n’est pas une lecture traditionnelle assis derrière une table. Je veux partager et tenter de changer la structure de la communication, pour une poésie directe. Un art dont la philosophie est la démocratie ? C’est ça, la démocratie directe. C’est-à-dire chaque individu a le droit au bonheur. Simplement il faut qu’il fasse le travail, pour pouvoir sortir le bébé qu’il a en lui. Et votre travail ? Mon travail c’est de provoquer les contractions ! Comme un rituel sacré ? C’est un rituel qui a seulement quelques formes générales, ce n’est pas un truc préparé comme le théâtre. PROPOS RECUEILLIS PAR CLAUDE LORIN Démosthène Davvetas a réalisé une performance le 2 septembre à la Galerie Jean-François Meyer avec la violoniste Christine Cross et la danseuse Tatiana Federspiel ; le 9 septembre à la Galerie du Passage de l’art, avec la chanteuse lyrique Muriel Tomao. Écriture totale, Grafale jusqu’au 10 octobre Passage de l’Art 04 91 31 04 08 Galerie Jean-François Meyer 04 91 33 95 01 54 ARTS VISUELS ATELIER ARCHIPEL | RIP Vanitas electronica L’Atelier Archipel en Arles (Zibeline n°9) confirme la qualité et la pertinence de sa programmation en accueillant deux installations de l’artiste multimédias Claire Pollet À l’instar de la vidéo, depuis leur relative récente apparition, les nouvelles technologies et le numérique en particulier ont provoqué une effervescence, voire une inflation de productions qu’on ne qualifiera pas toujours d’artistiques. Les mirages de l’interactivité ont ajouté à la facilité. Heureusement, quelques créateurs nous sauvent du consumérisme technologique et du naufrage mental. En situant la question du temps au centre de sa réflexion, Claire Pollet conçoit des œuvres qui font réellement sens. Ses dispositifs narratifs, souvent très simples d’apparence, sollicitent le spectateur en tant qu’acteur. La provocation du sens n’en est que plus vive. Ainsi Reste présente-t-elle la force d’un genre pictural hautement symbolique, la vanité. Sauf qu’il est donné ici au spectateur d’intervenir sur le déroulement des choses, de simples fleurs fanées ou bien écloses, en fonction de son mouvement ou bien de son immobilité. tre vivant et donner (ou interdire) la vie. À prendre ou à laisser. C.L. Reste et Stèle installations de Claire Pollet jusqu’au 28 septembre Atelier Archipel en Arles www.atelierarchipelenarles.com www.clairepollet.free.fr Reste, oeuvres de Claire Pollet RIP raque Suite (Zibeline N°9) et fin - hé!… une nouvelle bécane ? - mouais… un… numérique. - bôa ! y z’y viennent tous, même les pros et maintenant les jeunes qui t’en mettent plein la vue ! - tiens, les jeunes ! C’était bien le boulot des trois lauréats de l’école de la photo ; ça se laisse pas aborder du premier coup, il faut tendre l’œil, surtout avec les vues urbaines, tu sais en entrant à droite du style Wall ou Struth. - exact ; mais c’était un peu l’exil la Bourse, de l’autre côté des Lices. - et pourquoi pas les rapprocher des grands ? On pourrait faire la balance avec les pros. Ils se tenaient bien les jeunes -je veux dire leur boulot- chacun(e) dans une démarche singulière, assez clairs dans leurs intentions et enthousiastes malgré cette première intimidante. - effectivement, mais pas très sympa de les faire attendre because retard des officiels ; moi, j’aurais commencé par eux, pour la relève quoi ! - t’as toujours été trop généreux ! - tu conviendras quand-même que c’était d’une belle tenue, je veux dire l’ensemble, et aux ateliers ; repense à la manière de contextualiser Huguier, les histoires des Insoumises, les princesses de Jebb. - évidemment ! C’est aussi un sacré challenge de vous accrocher tout ça sans se planter quelque part et j’ai pas grand’chose à reprocher ; la scénographie était fluide, le travail sur la couleur dynamisant, vraiment en faveur des photos. - alors mais qu’est ce qui fait que les gens sortent un peu fracasse ? - c’est épuisant tout ça ! T’es toujours debout ; ils devraient louer des sièges pliants, pour la contemplation assise. - surtout, on garde de l’insatisfaction parce qu’on n’a pas tout vu ; et de tout ce qu’on a vu, on ne sait plus bien ce qu’on a vu (je me souviens-là sur le moment de Tim Walker et…). Au final t’es jamais content, mais content quand même. - ??? - c’est comme quand tu fais une photo, t’es content d’avoir concrétisé le truc que tu as dans la tête mais tu as toujours quelque chose à reprocher ; et si c’est vraiment très bon (d’après ton intime conviction), ta photo tu te la gardes malgré tout, parce que c’est pas la tienne qui est accrochée ici ; moralité, t’es pas content, toujours. - d’ailleurs vu les tarifs pratiqués même avec les pass ceci cela : cinq euros par atelier, fois sept…, la Cristalline à deux, le parking à trois. - plus la location du pliant, hé, hé ! - si t’es en famille la journée comme moi, tu diaphragmes à mort, d’ailleurs j’ai pas tout vu. - et bien nous, nous sommes sortis heureux (j’insiste !) d’une expo avec un sentiment léger de petit bonheur… - d’où ça ? - Réattu, l’expo Lacroix him-self. Il a entièrement investi le musée, un subtil travail avec… - ah ! oui tu m’avais dit ! Alors Lacroix fait de la photo ? - euh, là, il faut vraiment que je rentre ; j’ai deux rouleaux à développer… et il y a bientôt les Regards Croisés à Aix. - là, t’as p’têt’ une chance ? CLAUDE LORIN ET UN QUIDAM A l'atelier de maintenance © C. Lorin A l'atelier de maintenance © C. Lorin TRETS | AIX Derrière l’œil © Artis Reflex Laurent Pirard À côté des RIP, d’autres expositions plus discrètes annoncent de nouveaux talents. Ainsi, la salle voûtée des remparts de Trets accueillait au début de l’été les premières œuvres de Laurent Pirard. Éclairagiste spécialisé dans la scène contemporaine, l’artiste nous livre une approche du monde particulière : son style ne réside pas dans la sophistication des techniques, il ne contraint pas le réel par l’intermédiaire d’artifices, mais exprime un point de vue ; la photo- graphie, écriture de la lumière, transcrit impeccablement la volonté du preneur d’images. Pour Laurent Pirard, la photographie est avant tout une histoire de rencontre ; entre le regard et des instants particuliers du monde ; entre l’objectif de l’appareil et l’objet. Mais surtout il ne faut pas forcer cette rencontre, ou elle manquera de vérité, de magie… On dirait qu’André Breton et son «hasard objectif» est passé par là. Pas de mysticisme cependant, même si l’orient bouddhiste livre quelques échos, phrases-clé épinglées aux murs, papillons fragiles. Selon Laurent Pirard, «le regard du photographe procède d’un éveil de l’esprit, d’un travail de l’intention, qui se résume en un mouvement subtil de l’intérieur vers l’extérieur». Le résultat, c’est un ensemble remarquable construit à partir de points de vue particuliers, d’images inversées, d’angles surprenants, comme cette étonnante photographie où les blés sont coupés par un ciel nuageux, curieusement incurvé, en fait, le toit bleu de la voiture, dans lequel il se reflète… Les échos, les doubles, les reflets, fascinent le photographe. Que se passe-t-il de l’autre côté du miroir, dans cette eau pétrifiée ? C’est soudain Nicolas de Staël que l’on retrouve à travers ce hublot, Edward Hopper avec cette fille adossée à une vitre, l’école impressionniste dans cette eau mouvante où se reflète une fille en rouge qui tisse… toile de Pénélope ou d’Arachné ? Liens étranges qui relient le regard à l’objet… MARYVONNE COLOMBANI Phot’Aix 2008 s’offre une rétrospective collective particulière en invitant une sélection des photographes déjà présentés lors des Regards Croisés antérieurs. Que promettent ces retrouvailles ? Fernanda Rimini, Mathilde Maccario, Carolle Benitah, Thibaud Yvnine, Anne Barroil, Marie-Anne Hauth, Michel Bettendroffer). Un dépliant est édité à l’occasion, disponible dans tous les lieux d’exposition et à la Fontaine Obscure, structure organisatrice. C.L. Photo d’Anne Barroil qui accueilleront le vernissage le 8 octobre. Jean Arrouye, professeur des universités et spécialiste de la photographie, emmènera une visite commentée. Le 9 octobre, à partir de 18h, l’École Supérieure d’Art vous invite à rencontrer et échanger avec les photographes. De plus, à l’instar de son grand voisin arlésien, Regards Croisés se double d’un Off réparti dans onze lieux de la ville (Henri Kartmann, Françoise Laury, Nina Laury, Jean-Pierre Sepchat, 55 Pour les yeux à ouïr MARSEILLE Autour de Daniel Arasse Colloque national d’histoire de l’art dans le cadre du cycle L’Histoire de l’art en question(s) III proposé par Art, Culture et Connaissance 26 et 27 septembre Bmvr Alcazar 04 91 55 90 00 www.bmvr.marseille.fr Vedutisti, Realismo, Macchiaioli, Futurismo, Arte Povera le cycle de conférences débute le 16 octobre Institut Culturel Italien 04 91 48 51 94 www.iicmarsiglia.esteri.it TRETS L’Art de l’Ephémère par Cécile Aubertin, philosophe samedi 11 octobre, 17h Château Grand Boisé dans le cadre de Préférer l’éclat-act 2 Voyons Voir art contemporain et territoire 04 42 61 48 19 www.voyonsvoir.org CHATEAUNEUF-LE-ROUGE Que sont nos amis devenus ? Le principe à l’origine du projet ne change pas : exposer et mettre en regard des artistes œuvrant sur le sol provençal avec des créateurs venus d’autres contrées. Ainsi est né Regards Croisés en 2000 dans la suite de nombreuses expositions à visée internationale dont le premier Festival International de photo-graphie en 1985 et Tchécoslovaquie, un regard différent en 1989. Depuis, ces échanges n’ont cessé de se poursuivre mettant à l’honneur des cimaises et à la vue du public des photographes de la Russie, Lettonie, Italie, Hongrie, Texas, Allemagne ou encore du Venezuela. Vint alors le besoin de poser, prendre des nouvelles et voir ce que chacun avait pu ourdir entretemps. Les Regards Croisés sont présentés conjointement à la galerie Laurin (Serge Assier, Alexandre Slioussariev, Christine Elsinger, Marc Heller) et au Musée des Tapisseries (Antal Jokesz, Rafaël Navarro, Gilbert Garcin, Nine François, Ulla Reimer, Christian Ramade, Bernard Plossu, Efrain Vivas) ARTS VISUELS Phot’Aix 2008 Regards croisés, Rétrospective du 6 octobre au 10 novembre La Fontaine Obscure 04 42 27 82 41 www.fontaine-obscure.com La nature et le monde, une peinture de paysage par François de Asis mercredi 15 octobre, 18h30 Arteum Musée d’art contemporain 04 42 58 61 53 www.mac-arteum.net AIX dans le cadre de l’exposition André Masson, Georges Duby les ateliers d’Aix-en-Provence 1948-1968 1948-1968, un âge d’or pour Aix-enProvence ? par Alain Paire samedi 20 septembre, 17h Juin 1940-mars 1941, André Masson avant l’exil par Camille Morando jeudi 2 octobre, 18h30 Centre aixois des Archives départementales 04 42 52 81 90 www.archives13.fr dans le cadre de Phot’Aix 2008, Regards Croisés Visite commentée par Jean Arrouye Mercredi 8 octobre 18h galerie Laurin et 19h Musée des tapisseries Rencontre-débat avec les photographes jeudi 9 octobre de 18h à 20h Ecole Supérieure d’Art 04 42 91 88 70 www.ecole-art-aix.fr 56 ARTS VISUELS VASARELY de Vasarhelyi à Vasarely Inaugurée en février 1976, en la bonne ville d’Aix, la Fondation Vasarely était apparu comme un lieu phare (le seul à cette époque ?) consacré de manière permanente à l’art moderne. Puis il y eut les affaires La Fondation Vasarely renaîtra-t-elle bientôt de ses anciens soubresauts administrativo-financiers ? Suite aux malversations de certains de ses dirigeants dans les années 1980/90 doublés de désaccords familiaux de succession (la quasitotalité des œuvres a disparu hormis la série de quarante-deux pièces monumentales encore en place) et ses finances fortement mises à mal, auxquelles se sont rajoutées des dégradations architecturales compromettant lourdement son avenir, les procédures judiciaires sont toujours en cours. Les défenseurs de l’œuvre de Victor Vasarely ont pris les devants pour créer en décembre 2007 l’Association pour la défense et la promotion de l’œuvre de Vasarely et lancer une pétition publique sur Internet (voir lien ci-dessous). À ce jour les œuvres n’ont toujours pas retrouvé leurs cimaises d’exposition conformément aux projets de l’artiste. L’hommage qui lui est rendu aujourd’hui sous la forme d’une exposition itinérante à l’initiative du Regional Cultural Center de Letterkenny (Irlande), la Glebe Gallery et Pierre Vasarely, petit-fils de l’artiste, se compose d’œuvres prêtées par des collectionneurs privés, musées et galeries, dont la majeure partie provient du musée de Pécs (Hongrie), ville natale de Vasarely. Ouvert en 1976, il conserve près de quatre cent œuvres de tous supports et formats. Les quarantecinq exposées à Aix concernent la période des années soixante, une Faut y aller ? à Marseille choisir son salon Art-O-rama fait la Belle (de Mai) jusqu’au 20 septembre Cartonnerie Friche de la Belle de Mai www.art-o-rama.fr en bonus le Château de Servières invite Art-O-rama Show-room#1 jusqu’au 26 septembre Galerie des Ateliers d’artistes de la ville de Marseille 04 91 85 42 78 www.chateauservieres.org effondrement programmé par Anne-Valérie Gasc spécialiste en démolition Restricted Area du 3 octobre au 1er novembre La Compagnie 04 91 90 04 26 www.la-compagnie.org beau design israélien Asa 25 du 6 au 31 octobre Centre Design Marseille et Espace Villeneuve-Bargemon 04 91 54 08 88 www.designmarseille.org Sonora-Do, 1973, 120 x 80 cm, acrylique, collection du Vasarely Muzeum de Pecs des plus exemplaires. On notera la présence aussi de la galerie Denise René, historique pour son travail de promotion de l’art abstrait, notamment avec l’exposition Mouvement, en 1955, lors de laquelle Vasarely lança son célèbre Manifeste Jaune, véritable proclamation des règles de l’art cinétique. CLAUDE LORIN à Trets en zone rurale Hommage à Vasarely oeuvres 1930-1980 du 19 septembre au 30 octobre Fondation Vasarely, Aix 04 42 20 01 09 www.fondationvasarely.fr www.sauvonslafondationvasarely.fr Préférer l’éclat-act 2 du 20 septembre au 12 octobre Voyons Voir art contemporain et territoire 04 42 61 48 19 www.voyonsvoir.org à Avignon les arts dans toute la ville et à côté 14e Edition du Parcours de l’Art du 8 au 29 octobre Galerie le Parcours de l’art 04 90 89 89 88 www.parcoursdelart.com MUSÉE ESTRINE | LA CIOTAT ARTS VISUELS 57 Le corps à l’œil Georges Jeanclos, Dormeur, c.1973, terre cuite, Musee Estrine Récemment labellisé Musée de France pour son importante collection d’art moderne et contemporain, le musée Estrine propose une sélection d’œuvres sur la thématique du corps Edouard Pignon, Nu blanc,1972, huile sur toile, 114 x 152 cm, Musee Estrine Parmi les préoccupations des intellectuels et artistes du vingtième siècle, le sujet du corps est certainement un des champs d’investigation majeurs qui se joue encore, parfois à vif, aujourd’hui. De la vision idéalisante (nu antique, corps sacralisé ou poétisé, le nu comme genre photographique) à la représentation inquiète (apocalypse, enfer, guerre, massacre et torture sous leurs multiples formes), la panoplie des corps de l’art occidental peut également l’impliquer comme support et/ou comme outil : art gestuel, corporel… ou, plus proche de nous, sujet des nouvelles technologies ou d’hybridations. La sélection offerte ici traduit l’usage des médiums traditionnels que sont le dessin (Eugène Leroy, Deux, et… Matisse), la peinture (Le Chénier, Edouard Pignon, Veličković…), techniques mixtes (Janine Mongillat, Alain Grosajt…), la sculpture (Georges Jeanclos, Buffile…). Elle permet aussi de traduire dans son parcours la variété des esthétiques individuelles et les écarts singuliers qui en résultent, entre la présence de son propre corps et le corps de l’autre. Et au peintre Michel Steiner de rappeler : «Trouver la posture regardante et non une pose de goût. Non pas un regard des yeux mais un regard de tout le corps. Un ça nous regarde». Janine Mongillat, Robe de mariée, 1993-1995, triptyque, partie centrale, 160 x 158 cm, technique mixte, Musee Estrine Le corps, métamorphoses et apparitions du 20 septembre au 30 novembre Musée Estrine, Saint-Rémy-de-Provence 04 90 92 34 72 www.ateliermuseal.net C.L. Un chantier en mouvement Le plasticien Marc Ingoglia a conçu le 1er festival des arts contemporains de La Ciotat, Les Arts en chantier, comme s’il créait un objet ou une sculpture. Une démarche atypique qui a sous-tendu la manifestation durant tout le mois d’août Quelles ont été vos motivations pour vous lancer dans cette nouvelle aventure : la nécessité, le besoin ou le manque ? C’est plus positif que cela. C’était avant tout une envie que j’avais de voir un festival popularisant les arts Dessin de Marc Ingoglia contemporains : je voulais rendre accessible à tous l’art dit contemporain, souvent présenté en marge de la société ou trop intellectualisé à mon goût. Je voulais aussi montrer le travail de gens de qualité qui vivent dans notre région, certains ayant déjà exposé à La Ciotat. Mon projet a été monté avec la direction de la culture de la ville, qui a participé à la sélection, sur le principe de montrer un ensemble homogène. Quel premier bilan faites-vous aujourd’hui ? Le festival a attiré 6500 visiteurs en un mois et plus d’une centaine de plasticiens, performers, danseurs, musiciens, photographes, vidéastes… Car Les Arts en chantier, c’est avant tout une manifestation variée et hétéroclite. Par contre, il faudra faire mieux la prochaine fois du côté de l’organisation, des horaires et parfois même de la qualité… Mais cela ne pourra pas se faire sans un soutien plus important des partenaires financiers. Justement, la ville de La Ciotat a déjà annoncé une deuxième édition : quelles sont les perspectives ? L’affiche 2009 sera toujours pluridisciplinaire, avec des expositions, des performances et des spectacles gratuits. C’est le secret de la réussite : être populaire, accessible et de qualité. L’appel à candidatures sera ouvert plus largement sur la région, de Nice à Montpellier par exemple. J’aimerais qu’on ouvre davantage le festival à des artistes de l’image en mouvement avec des installations, de la vidéo, les nouvelles technologies. Que Les Arts en chantier prenne ses racines dans l’histoire de la cité, sans devenir pour autant un festival de cinéma. Cette nouvelle identité permettrait d’être toujours accessible au public tout en offrant une vision plus contemporaine de l’art. PROPOS RECUEILLIS PAR MARIE GODFRIN-GUIDICELLI www.artistic-promotion.com 58 LIVRES LIRE EN FÊTE Vingt ans déjà Pour son entrée dans l’âge adulte, Lire en Fête s’offrira cette année un petit coup de jeune. Les 10, 11 et 12 octobre prochains seront placés sous le signe de la jeunesse, thématique nationale retenue cette année internationales de l’édition de création. Les ateliers Vis à Vis et collectif de la Méditerranée présenteront cette année des ouvrages réalisés en direction d’un public jeune ainsi qu’une exposition de Livres d’artistes/enfants. De nombreuses animations sont prévues : débats, ateliers de lecture et d’écriture, bornes d’écoute…Et l’on souhaite longue vie et bon vent à ces Littorales. Dans le département Trois jours pour plonger dans la lecture et l’écriture ; trois jours pour investir l’espace public qui résonnera de textes lus, de paroles déclamées, chantées, de rencontres et de débats. Autour des albums et de la littérature de jeunesse bien sûr, mais aussi des lectures adolescentes et du rapport à l’enfance des écrivains Marseille fête le livre L’association Libraires à Marseille a décidé de prodiguer une cure de jouvence à la manifestation, appelée désormais Les Littorales. Pour cette édition 2008, on pourra dès le jeudi 9, à partir de 18h30, se délecter de littérature en avant-première au Bouchon Marseillais, nouveau lieu d’élection des Jeudis du comptoir depuis le printemps dernier. Un espace et une ambiance à découvrir d’urgence, si ce n’est déjà fait. Cette séance apéritive sera suivie, vendredi 10, de la Nuit de l’Ecrit. Cette soirée, conçue pour affirmer le lien qui unit le temps nocturne et l’activité littéraire, permettra d’entendre une lecture musicale du texte de Claudine Galéa, Rouge Métro, au Théâtre de Lenche à partir de 19h00 (voir page 16). Les Littorales proprement dites se dérouleront les samedi 11 et dimanche 12 octobre, de 10 à 19 heures (rappelons que l’entrée est libre et gratuite). Fait nouveau cette année, la grande et traditionnelle rencontre entre libraires, éditeurs, auteurs et public ne se produira plus au parc Chanot mais, sous chapiteaux, sur le Cours d’Estienne d’Orves, en plein cœur de la ville, tout près du littoral ! Gageons que ce nouvel espace saura donner aux deux journées une dimension plus chaleureuse et intimiste que ne le faisait le hall d’exposition de naguère. Les jeunes et le roman Si elle change de nom et de lieu, la manifestation n’en reste pas moins fidèle aux rendez-vous qui ont fait son succès. On retrouvera ainsi avec plaisir Pascal Jourdana et son Comptoir Littéraire, qui mettra l’Enfance en débat tout au long des deux jours en recevant les auteurs invités. Ceux-ci seront une vingtaine, venus de toute la France, mais également du Brésil, de Cuba ou d’ailleurs. Certains écrivent principalement pour un lectorat d’enfants ou d’adolescents ; ainsi Guillaume Guéraud (voir page 67), dont Zibeline a déjà chroniqué l’excellente Brigade de l’œil, hommage au célèbre Farenheit 451 de Ray Bradbury. D’autres écrivent aussi pour les jeunes, mais pas seulement, Claudine Galéa par exemple. D’autres encore écrivent pour les adultes, mais mettent en scène des jeunes gens, comme Delphine Bertholon ou Akli La ville d’Aubagne fêtera le livre et l’écrit en organisant, à l’initiative de la librairie L’Etoile bleue, des ateliers d’écriture autour de La gloire de mon père de Marcel Pagnol, une soirée de contes ainsi qu’une «balade d’écriture» (renseignements au 04 42 03 16 61). Quant à la bibliothèque départementale, elle proposera un «voyage dans les littératures nordiques contemporaines». L’exposition-spectacle Cap au Nord sera à Aurons le 12, puis elle circulera dans tout le département (Cabriès, Cadolive, L’Estaque…) au fil du mois d’octobre. De multiples autres manifestations marqueront cette édition 2008 de Lire en Fête dans toute la région. La plupart axées sur la littérature jeunesse. Alors, que la fête commence ! FRED ROBERT Les Littorales Les 11 et 12 octobre Cours d’Estienne d’Orves, Marseille www.lire-en-fete.culture.fr Adjer (voir page 65). Jean-Baptiste Coursaud s’intéresse à cette forme de littérature prolifique et très diversifiée, et il viendra à ce titre présenter le passionnant recueil d’Entretiens qu’il vient de publier aux éditions Thierry Magnier et dans lequel il donne la parole à six auteurs de littérature de jeunesse, «symbolisant autant de générations que de styles ou de voix». Au fil de ces conversations littéraires, Jeanne Benameur, Shaïne Cassim, Arnaud Cathrine, Cédric Erard, Jean-Paul Nozière et Marie-Sabine Roger évoquent leur rapport intime à l’écriture et à la fiction. Parcourir la fête On pourra aussi déambuler entre les stands des libraires, discuter de leurs coups de cœur avec eux, rencontrer les écrivains et se faire dédicacer leurs ouvrages, feuilleter, lire et échanger, un des grands plaisirs de la manifestation. Sous les chapiteaux également, le 12e Salon des Lecteurs en herbe, proposé par la librairie Les trois Mages, la 2e édition de La Méditerranée en Livres organisée par la librairie Regards et les 11e Rencontres Claudine Galéa © X-D.R Guillaume Guéraud © X-D.R LES RENCONTRES D’AVERROÈS | LA SEMAINE NOIRE LIVRES 59 Début de Rencontres Si le temps fort des Rencontres d’Averroès reste les Tables rondes (les 7 et 8 nov), les manifestations culturelles qui l’accompagnent et déclinent sa thématique s’étoffent chaque année, et se répandent sur le territoire. Rien de mieux pour attendre les débats que de se placer Sous le signe, bienveillant, d’Averroès. Le thème des 15e Rencontres, cette année, est direct : Entre Islam et Occident, la méditerranée ? Notre mer est donc interrogée en tant que frontière (cicatrice, tampon, faille ?) : n’est-elle rien d’autre qu’une séparation, ou peut-elle être un lien ? Les artistes invités Sous le Signe sont essentiellement des hommes de culture musulmane, nés ou non de l’autre côté de la faille (Mohamed Kacimi qui lira L’Orient après l’amour, Salim Bachi pour Le silence de Mahomet, mais aussi Mathias Enard pour Zone…). En dehors de ces lectures, Sous le signe décline également des projections (Le destin, chef-d’œuvre de Chahine), des débats, des concerts (Ulas Özdemir, le Trio Chemirami…). Ces manifestations liminaires se dérouleront du 16 octobre au 9 novembre à Marseille, Aix, Apt, Arles, Avignon, La Garde, Martigues et Port-de-Bouc : guettez donc leur passage ! Sous le signe d’Averroès du 16 oct au 9 nov 04 96 11 04 61 www.rencontresaverroes.net AGNÈS FRESCHEL Les écoliers ont rouvert livres et cahiers, les feuilles commencent à tomber, il est temps de retrouver la Semaine Noire Une rentrée à l’encre noire Pour sa 3e édition, du 19 au 29 sept, la manifestation littéraire organisée par l’association L’Écrit du Sud, et soutenue par de nombreux acteurs culturels de la ville, entend continuer à promouvoir la littérature policière de qualité, selon les trois axes principaux qu’elle s’est fixés : une résidence d’auteur, un «jumelage noir» avec une ville étrangère et une grande fête du polar. Die Noire Woche © Agnès Mellon Les deux premiers axes ne formeront qu’un cette année. Dans le cadre du 50e anniversaire du jumelage entre Marseille et Hambourg, c’est logiquement cette dernière qui sera à l’honneur, représentée par la romancière Doris Gercke, invitée en résidence à la Friche du 18 sept au 10 oct. Cette écrivaine de renommée internationale, auteur de plus d’une douzaine de romans policiers (dont un seul traduit en français !), créatrice du personnage de Bella Block, mettra à profit son séjour pour mieux connaître Marseille, cadre, dit la rumeur, de son prochain opus, et participera à de nombreuses rencontres. On peut déjà noter la conférence qu’elle donnera à l’Alcazar le 24 sept : le personnage de la ville dans le roman noir. Tout un programme. Du port aux Terrasses D’autres occasions seront données de rencontrer Doris Gercke, en particulier le grand rassemblement festif des Terrasses du Polar. Une cinquantaine d’auteurs régionaux, nationaux et étrangers participeront à cette 8e édition, qui se tiendra le 19 à Septèmes et le 20 sur le Cours Julien à Marseille, dans le cadre du 10e Festival du Plateau. L’Écrit du Sud, L’Écailler et Serge Scotto, leur initiateur, revendiquent le caractère éclectique et détendu de ces rencontres qui, loin de n’être qu’un événement mercantile, permettent de mieux apprécier des auteurs de genre, parmi lesquels cette année des «pointures», comme Jean-Hugues Oppel ou Maurice Gouiran, pour ne citer qu’eux. La semaine sera ponctuée de dédicaces, conférences de presse et autres apéritifs publics, qui permettront de dialoguer avec les écrivains invités. On pourra ainsi rencontrer Noël Simsolo, qui viendra présenter et dédicacer son dernier roman Quartier Sébastopol, écrit pendant sa résidence de 2007. Il participera également à la rencontre organisée par le Cercle culturel méditerranéen : 2 auteurs, 2 ouvrages, 1 film pour 1 ville : Alger. Le polar a son Prix Le Prix Marseillais du Polar sera décerné cette année pour la troisième fois, toujours par un jury de lecteurs sélectionnés sur lettre de motivation. La délibération du jury se fera en public, le 20 sept à 10h00, à La Baleine Qui Dit «Vagues». À noter également, pour les amateurs, que l’Alcazar, partenaire de la Semaine noire, reprendra dès la fin du mois les Cahiers de L’écailler, son cycle de conférences mensuelles autour de la littérature policière. Une semaine à marquer d’une pierre noire ! FRED ROBERT La Semaine Noire du 19 au 29 septembre L’écrit du Sud www.lecritdusud.com 60 LIVRES ACTORAL | MOD | LES CORRESPONDANCES Aventure littéraire Durant cinq jours Manosque se transforme en scène littéraire où se côtoient écrivains, artistes et publics curieux. La 10e édition le proclame haut et fort : le livre est plus vivant que jamais ! Les Correspondances de Manosque fêtent leurs dix ans ; dix ans d’échanges hors normes entre la littérature et le public, dix ans de croisements inédits autour de l’écrit, du son et de l’image, et dix ans que la ville se prête à ce jeu osé de travestissement en cité littéraire. Elles démontrent que la littérature est vivante, par le biais d’une programmation exigeante qui mêle diverses formes artistiques : le livre s’y habille aussi bien de sons que d’images, selon qui s’en empare. Ainsi, cette année, une spécificité des Correspondances sera mise en avant : musique et littérature feront l’objet d’une programmation riche, avec, entre autres, un dialogue entre Philippe Djian et Stephan Eicher, un café littéraire avec Yann Appery et les musiciens Claude Barthélemy et Massimo Nunzi, deux concerts littéraires, un qui donne carte blanche à Christian Olivier des Têtes Raides, l’autre à Barbara Carlotti, ou encore une lecture musicale d’Alex Baupain et Kéthévane Davrichewy… Pour sceller toutes les aventures passées, et à l’occasion des dix ans, un livre-disque édité aux éditions Le Bec en l’Air, Fantaisie littéraire, reprend les lectures musicales d’une vingtaine de chanteurs et auteurs. Il sera aussi question de la transmission de la littérature, lors d’une table ronde qui réunira Éric Vigne (auteur de Le Livre et l’éditeur, éditions Klincksieck), Paul Otchakovski-Laurens, Bernard Comment, Maryse Pietri et Bruno Patino ; crise du livre, place de l’éditeur, lecture numérique, concentration de la distribution, autant de sujets passionnants qui seront sans doute abordés. Et puis Les Correspondances ce sont aussi, comme chaque année, de nombreux tête-à-tête avec des auteurs Raymond Federman, Gilles Leroy, Pascal Jourdana © Francois Xavier Emery (Olivier Rolin, Jean-Paul Dubois, Annie Ernaux, voir page 66) ou encore Richard Ford (en ouverture) ; des lectures, croisées ou pas (Véronique Ovaldé et Carole Martinez, voir page 64) ; les fameux écritoires, véritables œuvres d’art qui permettent de retrouver le bonheur d’écrire en Jacques Gamblin © Francois Xavier Emery toute liberté ; une carte blanche à Jacques Gamblin… Rendez-vous donc dès le 24 septembre où sera notamment inauguré un nouveau lieu permanent dédié au livre, l’Hôtel Voland, dont le patio accueillera quelques rencontres appétissantes… DOMINIQUE MARÇON Les Correspondances de Manosque du 24 au 28 septembre 04 92 72 16 00 www.correspondances-manosque.org Langues et langages actOral a fait du chemin. En moins de sept ans, le festival des écritures contemporaines fondé par Hubert Colas, auteur, metteur en scène et co-directeur de Montévidéo, s’est forgé une place singulière dans le paysage culturel, français et dorénavant étranger. Chaque année, fort du soutien de nombreux partenaires, il se fait l’écho d’une création contemporaine à la croisée des écritures et des arts, le reflet d’une communauté artistique vivante, mouvante et parfois même mutante, tentant, avec plus ou moins de bonheur, d’inventer d’autres langues, d’autres langages. Chaque nouvelle édition est ainsi l’occasion pour le spectateur de se plonger dans un magma de propositions littéraires, scéniques et plastiques, affi- chant l’ambition de l’emmener ailleurs. Aux côtés des spectacles (voir page 18 la création de Chto de Sonia Chiambretto à La Criée, ou encore le détail du cycle Les écrits de la danse conçu en partenariat avec Marseille Objectif Danse), la programmation fourmille de rendez-vous plus intimistes. On salive, par exemple, à l’idée de passer une heure avec Laurent Mauvignier, formidable metteur en mots de l’absence, du manque, du deuil et de l’amour, auteur des très beaux Loin d’eux et Apprendre à en finir. On se réjouit de goûter, l’espace d’une lecture, la délicate présence de l’actrice Nathalie Richard, associée à celle d’Elina Löwensohn, sur un texte de l’Autrichienne Elfriede Jelinek. On s’interroge aussi sur ce que sera la première Sirène et Midi net confiée à un auteur, Julien Blaine (le 1er octobre voir page 27). Car actOral ne cesse d’élargir le champ de ses investigations, avec cette année, au-delà de cette incursion dans l’espace public, l’apparition dans la programmation du cirque (Warm conçu par David Bobee et Ronan Chéneau, Le grand nain de Jambenoix Mollet et Philippe Eustachon) et un coup de projecteur porté sur les auteurs britanniques et italiens. On aimerait également vous parler du très troublant Jerk, solo pour un marionnettiste, fruit des fantasmes conjugués de Gisèle Vienne et Dennis Cooper qui nous plongent, en apnée, dans la tête d’un serial killer… Mais on manque d’espace ! actOral, lui, n’en manque pas, avec plus de deux semaines de rendez-vous aux quatre coins de Marseille et une reprise, dans un format plus réduit, au Théâtre de la Colline, à Paris. actOral a fait du chemin, on vous le dit. LAURENCE PEREZ actOral festival international des arts et des écritures contemporaines du 29 septembre au 11 octobre 04 91 37 30 27 www.actoral.org Écrits solitaires © Theo Kooijman Les spectacles programmés par Marseille Objectif Danse à l’occasion d’actOral jouent toujours le jeu des mots, empruntant souvent la route du festival à rebours. Les Écrits de la danse parient en effet sur la verbalisation du corps, et non sur l’oralité des formes : la danse, la photo, le mythe, la trace, l’identité sexuelle donnent lieu à une parole qui glose sur eux, secondaire, et accompagne leur trajet. Cette année le cycle se décline en quatre formes courtes. Mark Tompkins y reprend Empty Holes, solo mythique de 1983, où on trouve déjà l’essentiel de sa démarche introspective, fondée sur des travestissements, un dédoublement, et des chansons universelles qui fonctionnent comme autant de madeleines dévoyées. Durant les mêmes soirées (du 1er au 3 octobre) Theo Kooijman présentera lui aussi un solo introspectif, fondé sur l’observation de 4000 négatifs photographiques, auto-portraits du performeur. Une semaine plus tard le second volet mettra également en jeu deux chorégraphes interprètes de leur propre solo. Sylvain Prunenec, en partant de l’idée de démembrement, interroge dans Effroi les mythes antiques qui fragmentent le corps. Antonija Livingstone, dans The part, se dédouble au contraire, se travestit, endossant en particulier des identités masculines (du 8 au 10 octobre). A.F. Les Écrits de la danse 04 96 04 96 42 www.marseille-objectif-danse.org The part © A. Carter 62 LIVRES ÉCRITURES CROISÉES | AGENDA Rushdie, pas moins Pour leur 25e édition, Les Écritures croisées invitent (et réussissent à faire venir !) un des plus grands écrivains d’aujourd’hui : Salman Rushdie sera à la Cité du Livre d’Aix durant trois jours, du 16 au 18 octobre. Victime de la fatwa lancée par Khomeiny en 1989 à la suite de la publication de ses Versets sataniques (fatwa éternelle, imprescriptible, qui le condamne à mort pour apostasie), l’écrivain est mondialement connu, mais pas toujours pour son œuvre. C’est dommage : elle est immense, foisonnante, baroque, émouvante, surprenante, magnifique. Et l’homme, quand il parle littérature, est passionnant. Comme toujours, depuis 25 ans, Annie Terrier et son équipe (restreinte, les temps budgétaires sont durs pour le livre !) croisent les meilleures écritures : aux côtés de Rushdie il y aura donc d’autres écrivains anglophones (voir page 64), son traducteur Gérard Meudal, une exposition photographique de Ketaki Sheth sur les rues de Bombay, la lecture par Alain Simon d’extraits des Enfants de Minuit (voir page 67), et de l’intégralité de Franchissez la ligne au Théâtre des Ateliers, une autre par Denis Podalydes de son dernier roman, trois films choisis et commentés par Rushdie (Godard, Fellini et Buñuel)… et bien sûr des débats, des rencontres, et des séances de signature de L’Enchanteresse de Florence qui vient d’être traduit en français et va paraître… Tout n’est pas encore arrêté, et nous reviendrons sur le détail de la manifestation dans notre prochain numéro ; mais réservez déjà vos journées, l’événement est d’importance. mort cet été, lecture accompagnée par le oud et le violon de Fouad Didi. Un documentaire filmé lors de son passage aux Écritures croisées en 2003 sera également projeté. AGNÈS FRESCHEL Hommage à Darwich Le 5 Oct Franchir la Ligne Du 16 au 18 oct Cité du livre, Aix 04 42 26 16 85 Hommage Avant cela, toujours à la Cité du Livre, les Écritures croisées s’associent à l’hommage mondial qui sera rendu le 5 octobre à Mahmoud Darwich. JeanClaude Nieto lira des textes du poète palestinien Au programme AIX-EN-PROVENCE par des adhérents et des comédiens d’extraits d’œuvre, le 20 septembre à 14h. Cité du Livre – 04 42 91 98 88 Le théâtre d’écriture de Jean Giono : Jacques Meny, président des Amis de Jean Giono, propose une conférence qui permet de pénétrer dans le laboratoire secret de l’écrivain. En avant première, présentation du second numéro de la Revue Giono. Le 20 septembre, à 17h, à la bibliothèque Méjanes. Colloque Napoléon et le Portugal : les aspects d’un échec. Confrontation des points de vue de chercheurs Français et Portugais sur ce qui fut le premier échec de Napoléon. Le 27 septembre à 10h. Librairie Au poivre d’âne – 04 42 71 96 93 Rencontre avec Jean-Michel Sautter autour de son livre Mer des hommes, un tour du monde… paru aux éditions Ancre de Marine. Le 25 septembre à 18h30. Rencontre avec Joëlle Gardes à l’occasion de la parution de son recueil de poésie Dans le silence des mots (éd. L’Amandier). Le 16 octobre à 18h30. FORCALQUIER MARSEILLE Association des Amis de Jean Proal – 04 92 75 33 87 Jean Proal, écrivain d’ombre & de lumière : organisées par les amis de Jean Proal, ces journées proposent expositions, lectures, chansons et théâtre. Les 27 et 28 septembre salle Pierre Michel. Office de tourisme – 04 92 75 10 02 La langue d’Anna : représentation de la pièce de Bernard Noël jouée par Andrée Benchetrit, soirée organisée par l’association Archétype et la revue Marginales. Le 19 septembre aux caves à Lulu. BMVR Alcazar – 04 91 55 56 34 Poulpe et sirènes – La collection du poulpe ; Pascale Lefebvre, œuvres collectives : exposition de trente trois pièces originales de pieuvres peintes à l’encre de chine. Présentation d’objets, de livres, de carnets de croquis autour du poulpe, et projection d’un film de Pascale Lefebvre dans le cadre du cycle Portraits d’artistes. Jusqu’au 11 octobre. Étrangers à Barcelone : représentations littéraires et filmiques. Dans le cadre du festival de cinéma espagnol Cinéhorizontes, conférence proposée par Roxana Nadim, vice-présidente de l’association Cinéhorizontes. Barcelone au travers d’un parcours romanesque et filmique. Le 20 septembre à 17h. Jean Cocteau 1942-1945, tête d’affiche et tête de Turc : conférence de Jean Touzot, suivie d’une table ronde. Le 25 septembre à 17h. GAP Association des Amis de Jean Proal – 04 92 75 33 87 Jean Proal, une écriture saisissante : expo photos de Didier Leclerc tirées du livre Camargue, jusqu’au 4 octobre à la médiathèque départementale ; lecture LA CIOTAT Rencontre avec Claude Mesplède, critique littéraire et spécialiste du roman policier, dans le cadre du cycle Les cahiers de l’Ecailler. Le 27 septembre à 17h. La danse du cheval blême : rencontre avec Nicole Cheverney, à l’occasion du cycle Juste une mer à traverser, sur son dernier roman historique La danse du cheval blême sur la peste à Marseille. La Baleine qui dit «Vagues» - 04 91 48 95 60 Salon du livre de conte, du 10 au 12 octobre. Centre social Mer et colline – 04 91 72 22 91 10e édition de Lire en fête : rencontre avec l’auteur-illustrateur jeunesse Florence Langlois, le 10 octobre à 14h30 ; spectacle conte jeunesse avec la compagnie Masala le 11 octobre à 14h30, et avec la compagnie l’Amoscope pour Le voyage de Capucine à 18h ; rencontre-dédicace avec Philippe Carrèse et Jacques Ferrandez co-auteurs du Jardin des délices et La malédiction de l’enclume (Syros) à 15h ; exposition intitulée 34 illustrateurs africains pour la jeunesse. The Wizz – 06 99 64 69 58 Vernissage de l’exposition de l’artiste brésilien Joelito Da Paixho en sa présence, le 19 septembre dès 18h30. Invité par l’association Brazil, il peindra en direct les robes ou pantalons que vous souhaitez transformer ! Institut culturel Italien – 04 91 48 51 94 Table ronde Antimafia : avec Dino Palumbo, anthropologue à l’Université de Messine, Anna Petrozzi, journaliste et rédactrice en chef de Antimafia 2000, Enrico Colajanni, fondateur des associations anti-racket Addito Pizzo et Libero Futuro et Cesare Mattina, sociologue à l’Université de Provence. Le 18 septembre à 18h. Par ailleurs, du19 septembre au 15 octobre, projections de quatre films sur ce sujet. Festival Actoral : Parole in anteprima, projet d’Antonella Amirante (lecture de trois textes contemporains italiens : Le dernier voyage de Sindbad de Erri de Luca, Mari de Tino Caspanello et Thérapie antidouleur de Laura Forti), le 3 octobre ; Tre studi per una crocifissione, pièce de et avec Danio Manfredini, au Théâtre du Gymnase, le 11 octobre. Exposition Les jardins de Toscane : photos de Massimo Listri des jardins historiques de Toscane, des fastes du XVIIe siècle jusqu’à nos jours. Du 6 au 10 octobre. VAISON-LA-ROMAINE Association BD AOC – 04 90 36 09 80 Festival de la bande dessinée : tables rondes, rencontres-dédicaces, remise des prix du jury des lecteurs… Les 20 et 21 septembre. 64 LIVRES ROMANS Tempête en mère Parce qu’elle ne supporte plus «cette impression de vivre avec des éclats de bombe sous la peau», avec «la guerre en elle» et la peur aussi, parce que son nouvel amour la bouleverse et lui donne envie de fuir, parce qu’elle veut mettre sa mère au centre de son prochain spectacle et tâtonne, Lea, 38 ans, chorégraphe perfectionniste et torturée, prend la route. Pressée par une urgence indicible, elle roule vers l’océan, vers la petite cité portuaire où vit sa mère. Elle roule malgré l’avis de tempête annoncé, et bientôt les éléments furieux. Car, par cette nuit d’ouragan, il faut laver les ombres. Comme le précise Jeanne Benameur en exergue, cette expression, en photographie, «signifie mettre en lumière un visage pour en faire le portrait». Pour Lea et sa mère, réfugiées dans la chambre obscure par une nuit de tourmente, il s’agit aussi de révéler un passé tu, lourd, et par les mots enfin dits, de se laver de la culpabilité et de la peur. La mère réapprend la parole, la fille retrouve le fil de sa danse, et de sa vie. Un ballet auquel elle saura désormais intégrer le faux pas, où l’erreur aura enfin sa place… Dans ce roman bref, tendu comme un corps de danseuse, palpitant comme un cœur de mère et d’amoureuse, Jeanne Benameur dessine le portrait en creux d’un couple hors normes. Au rythme haletant de phrases souvent elliptiques, que des tableaux arrêtent sur image, elle lève le voile sur la passion d’une femme et sur le poids écrasant des secrets de famille. La romancière était l’an passé en résidence à Manosque (voir page 60) ; c’est là que ce texte émouvant, dédié «à celle qui m’a appris à écrire et à lire» est né. FRED ROBERT Laver les ombres Jeanne Benameur éditions Actes Sud 15 euros Sentir Bombay qui palpite Comment rendre compte d’une totalité, comme la vie d’une mégapole, sans être didactique, sans accumuler les redites, en restant vivant, intéressant, drôle ? C’est le tour de force qu’avait réussi Altaf Tyréwala dans un premier roman écrit en anglais : Aucun dieu en vue. Les chapitres courts empruntent tour à tour la voix d’un nouveau personnage qui croise le précédent. Par cet enchevêtrement rapide, l’agitation, le fourmillement de Mumbai (nom moderne de Bombay), ses scandaleux écarts de richesse, ses tensions s’orchestrent en une vaste polyphonie qui permet au lecteur d’appréhender la voix même de cette ville. Avec subtilité, chaque personnage est doté d’une voix unique, particulière, le «je» s’efface parfois pour une troisième personne, qui plonge dans la conscience du protagoniste ou se contente de l’approcher par une observation extérieure de ses gestes et de ses mots. Le vocabulaire suit aussi les mêmes variations. L’épouse qui a renoncé à la poésie côtoie le fakir, le tueur, l’agent de police, l’homme d’affaires, le marchand de chaussures et son rêve américain, le médecin raté avorteur… et tous les autres. Le roman de Tyréwala palpite ainsi d’une vie singulière et multiple. La farandole se résout en une boucle dans laquelle vivent indéfiniment tous ces héros quotidiens qui portent en eux des amorces d’histoire, de roman. Pas de transcendance : la vie dans sa foisonnante complexité suffit. Aucun dieu en vue, certes, mais un remarquable écrivain à découvrir, qui sera aux Écritures Croisées aixoises pour présenter son second roman traduit en français (voir page 62). MARYVONNE COLOMBANI Aucun Dieu en vue Altaf Tyréwala éditions Actes Sud 20 euros Rêve étrange Véronique Ovaldé est une des rares jeunes romancières françaises qui travaille sa langue. Qui fasse varier les modes narratifs, qui tente vraiment, sans artifice, le point de vue interne, qui cherche de nouveaux modes de paroles rapportées, de ponctuation, et brise la linéarité temporelle. Tout en écrivant vraiment des romans : avec des personnages, une intrigue, une progression narrative, un ancrage dans le réel et l’Histoire, et des incursions discrètes, suspendues, irrésolues, dans le merveilleux. Avec Et mon cœur transparent elle a écrit un roman nettement plus léger que ses précédents : noir, bâti comme un polar, fondé sur des mystères qui s’élucident progressivement. Les actions des personnages, décrites sans que l’on ait accès à leurs états d’âme, guident le lecteur vers la résolution progressive d’une intrigue construite avec les chausse-trappes et fausses pistes propres au roman policier : dans un pays froid, glacé et lent, qui ressemble au réel sans s’y confondre, un homme prénommé Lancelot, qui s’est éveillé à la vie en rencontrant Irina, perd sa femme et découvre que cet amour était un mensonge. Mais l’était-il ? Véronique Ovaldé sera présente aux Correspondances de Manosque, pour une lecture croisée avec Carole Martinez (voir page 60). AGNÈS FRESCHEL Et mon cœur transparent Véronique Ovaldé Éditions de l’Olivier 18 euros 65 Grandir en cave Twist, jeune adolescente intelligente, particulière, est enlevée par un malade et retenue prisonnière dans une cave durant cinq années… L’intrigue, qui semble inspirée d’une série américaine ou de faits divers affreux, permet toutefois à Delphine Bertholon de signer un joli roman sur l’enfance, la douleur, et l’éveil du corps à l’amour. Car dans sa cave Twist grandit, devient pubère, se transforme, et l’auteur décrit ce passage et ses tourments avec une finesse certaine : la cave, à cet endroit, y semble une métaphore des carcans et interdits qui pèsent sur les corps des jeunes filles ; tout comme les regards des hommes, déviants, absents, pervers, symbolisent tout le mal que les mâles peuvent faire lorsque les filles accèdent pour eux (et non pour elles) au rang d’objet désirable. Le roman est construit en une succession de trois monologues entrecoupés de divers personnages : celui de Twist, habilement écrit en affinant le style comme si la langue de l’enfant progressait, est passionnant ; celui de sa mère, qui répète de longs cris de douleurs, est émouvant mais peu varié ; celui de Stanislas, jeune homme dont Twist est amoureuse, manque d’intérêt. Mais l’ensemble est haletant, et les 430 pages se dévorent d’un trait ! Delphine Bertholon sera présente lors des Littorales à Marseille (voir page 58). AGNÈS FRESCHEL Twist Delphine Bertholon Editions J.C. Lattès 18 euros Les déserts vibrants du cœur Akli Tadjer a écrit un roman sur la paternité. La vraie, celle qui lie misérablement, indéfectiblement, tendrement, jalousement, douloureusement, un père à sa fille, lorsque celle-ci s’éloigne du logis familial pour y revenir simplement en visite, et avec un homme. La narration épouse le point de vue du père qui assume ses sentiments contradictoires et se dérobe en des agissements irrationnels et bougons… Plus rare, le roman s’attache comme incidemment à décrire la géographie imaginaire des immigrés parisiens, attachés à l’Algérie par des liens symboliques, des contes, mais profondément Parisiens (le narrateur en a l’argot discret et la syntaxe expéditive). Bien sûr, dans ce cadre-là, la relation de Mohamed avec sa «gazelle» de fille se complique : racisme ordinaire des parents du garçon, mas aussi, peu à peu, emprise sur Myriam d’un islamisme menaçant… Le roman, qui débute comme une comédie familiale, est interrompu par des contes qui retracent le passé des ancêtres Algériens, et peu à peu se dessine un drame originel. Qui rend cette relation père-fille, déjà si belle, terriblement émouvante… AGNÈS FRESCHEL Il était une fois peut-être pas Akli Tadjer Editions J.C. Lattès 17 euros Apologie des faibles ? Le court roman de David Descamps laisse un sentiment étrange. D’abord on éprouve une satisfaction évidente à découvrir un jeune auteur (c’est un premier roman, il a 35 ans) au style visiblement affirmé et construit, et à se retrouver dans un décor marseillais nettement plus familier et véridique que Plus belle la vie : la lumière marseillaise y est symboliquement opposée aux horizons bouchés des Flandres, lieux entre lesquels le narrateur se déplace, vers les profondeurs refoulées, puis vers la «joie pure» qui clôt le roman. Puis cette satisfaction se transforme en malaise : les personnages y sont tous des hommes, trentenaires (racontant leurs vingt ans), sans ambition, se promenant de plaisirs ratés en cuites décevantes, et de clitoris en fellation (les femmes n’y sont jamais envisagées comme sujets, mais comme «filles intéressantes» à draguer, ou mères envahissantes, sœur «vouée à s’occuper de la maison»…), n’ayant aucun goût pour l’étude, le monde, les autres hors leurs amis… mais ayant les moyens, doucettement, de vivre (sans luxe) de l’héritage de leurs parents. Exclus du monde fortuitement, mais n’ayant aucun désir d’y entrer, d’y participer. Le portrait est sans complaisance, et le titre les désigne explicitement comme des faibles. Mais la narration à la première personne, qui interdit la distance, met le lecteur mal à l’aise (surtout la lectrice?), face à ses personnages velléitaires qui geignent et tournent en rond… David Descamps sera présent aux Littorales (voir page 58). AGNÈS FRESCHEL L’Apéritif des faibles David Descamps Les Allusifs (Québec) 13 euros 66 LIVRE ROMANS Soixante ans de la vie d’une femme La romancière Annie Ernaux sera à l’honneur aux Correspondances de Manosque (voir page 60). Emmanuelle Devos y proposera une lecture de La place, un de ses romans «autosociobiographiques» les plus connus, qui inaugure les thèmes –famille, appartenance sociale et trahison...– et le style qui sont sa marque. Une écriture aux confins de l’intime et de l’universel, fondée sur la mémoire et sur l’idée qu’écrire, c’est exister et témoigner. À cet égard, on ne peut que saluer son dernier opus, bilan d’une vie sobrement intitulé, comme le chef-d’œuvre de Virginia Woolf, Les années. Un livre conjuratoire, qui débute par l’énoncé de la mort à venir, au futur de la certitude absolue. Alors, puisque «toutes les images disparaîtront», puisque «s’annuleront subitement les milliers de mots», pour ne pas sombrer corps et biens, pour que «le dictionnaire accumulé du berceau au dernier lit» ne s’élimine pas tout à fait, place aux souvenirs et aux images, de la naissance, en 1941, à 2006. L’évocation de cette traversée de plus d’un demi-siècle s’appuie sur une série de photos prises à différentes époques et décrites avec cette neutralité distante et ironique chère à Ernaux, arrêts sur images récurrents qui permettent de faire le point sur une évolution, un parcours, comme le font aussi les récits de repas de famille qui ponctuent le texte. Pourtant, loin de se cantonner à cet ancrage individuel et familial, l’ouvrage adopte une visée plus large. Au travers de l’itinéraire d’une femme, c’est celui de toute une génération qu’il suit : aspirations de l’après-guerre, progrès matériel et course au confort, luttes féministes, manifestations… jusqu’aux désillusions des décennies 1990 et 2000. Ernaux embrasse magistralement les années enfuies, dans la distance du «elle» et la solidarité du «nous», du «on». Un beau panorama, général et si personnel à la fois. FRED ROBERT Les années Annie Ernaux éd. Gallimard, 17 euros Jeune à tout âge ? Les Littorales s’inscrivent cette année sous le double signe de la littérature destinée aux jeunes, et de celle qui parle de la jeunesse. Claudine Galéa était à ce titre désignée pour ouvrir la manifestation : écrivant pour les enfants, les ados et les adultes, son roman le plus marquant est sans doute Jusqu’aux os (2003), qui décrit avec une force émotionnelle peu commune l’anorexie d’une fille de quinze ans, son premier amour, absolu et douloureux, et son terrible rapport à sa mère. Dense, écrit pour les adultes en de longues phrases qui déploient leur souffle, le roman émeut aussi, profondément, les jeunes filles. Posant ainsi avec acuité la question d’une spécificité souhaitable (ou non ?) de la littérature jeunesse. Rouge métro, que Claudine Galéa lira au Théâtre de Lenche le 10 octobre (voir page 16), appartient à l’autre famille : celle de la littérature spécialisée. Construit vers la révélation finale de l’acte de violence qui a traumatisé une adolescente, le roman fait alterner deux voix aux temporalités distinctes : une d’avant l’évènement, l’autre d’après le traumatisme. Les voix bien sûr se rejoignent au bout du voyage. Conçu pour des lecteurs plus jeunes (13/14 ans), le livre pourtant choisit les mots justes, des rythmes inattendus. Parfois un peu répétitif, dans la succession peu variée des voix intérieures. Pour les plus jeunes encore, les enfants, Claudine Galéa a écrit À mes amourEs. Un petit bijou, illustré par Thison, qui donne la parole à une fille dotée de deux mamans. L’homosexualité féminine, et la parentalité qu’elle implique, y sont abordées avec une fraîcheur rafraîchissante, une poésie de la simplicité, une naïveté reconstruite et retrouvée dans le plaisir. Un livre que les ados détesteraient sans doute, mais qui ravira les adultes ! A.F. Claudine Galéa Jusqu’aux os Ed du Rouergue (la Brune), 11,50 euros à Mes amourEs Ed du Rouergue (zigZag), 6,50 euros Rouge Métro Ed du Rouergue (doAdo Noir), 7,50 euros 67 La double voix de la peur Guillaume Guéraud est un auteur marseillais qui affectionne la littérature pour ados, en particulier la noire. Aux deux sens du terme : celle qui repose sur des tensions, des suspenses, et celle qui se penche vers les actes, les faits, les sentiments les plus sombres. Ce qui, dans la littérature pour ado, n’est pas forcément facile à manipuler : l’horreur et le frémissement y sont assez bien admis, mais pas l’humeur noire, suicidaire, autodestructrice, qui pourtant touche tant d’ados. Je ne mourrai pas gibier, et La Brigade de l’œil (voir Zibeline 5), ont fait un certain bruit dans la sphère de la littérature jeunesse. Le Contour de toutes les peurs, paru également dans la collection doAdo Noir, au Rouergue, met en scène un adolescent de quatorze ans confronté à la violence, et à ses propres peurs. Le véritable dédoublement narratif de Clément, fait entendre à la fois sa voix intérieure, en prise aux sentiments les plus noirs, et un récit factuel qui le mène de l’agression jusqu’au jugement de l’agresseur. Le roman avance, bien construit, haletant, parfaitement à la portée d’un lectorat adolescent. Guillaume Guéraud sera présent aux Littorales consacrée à la jeunesse (voir page 58). Le Contour de toutes les peurs Guillaume Guéraud Ed. le Rouergue (doAdo Noir), 7,50 euros A.F Comment plonger sans faire de plat Une plongée en apnée dans un monde familier, proche et pourtant hermétique ; celui des adolescents, en bande, livrés à eux-mêmes au cœur de l’été marseillais. Pourquoi marseillais ? Parce que ça se passe à Marseille, que les minots habitent les quartiers nord et qu’ils font les cons au bord de l’eau… À part ça, ils pourraient être de Tanger, de Haïfa ou de Naples. Signes distinctifs : une jeunesse inouïe, corps et cœur déchaînés, une liberté presque totale, le désir d’aller jusqu’au bout, l’envie d’en découdre avec le destin. Et puis, en toile de fond la mer. La nôtre… Du haut de sa terrasse et du fond de sa solitude, un flic les observe, fasciné par leur ardeur à défier la mort et les adultes dans de nouveaux jeux interdits. Le spectacle de leur jeunesse effrontée le distrait de sa misère métaphysique et de ses troubles pancréatiques qu’il soigne -du moins les premiers- par de grandes rasades de vodka. Car c’est un flic comme on les aime ; revenu de tout, blessé à mort par la vie, tendre et pathétique, caustique et impulsif. Un beau spécimen de littérature! L’histoire nous accroche bien mais l’écriture surtout nous fait plonger. Maylis de Kerangal travaille son réalisme au moyen d’une écriture très poétique, de métaphores violentes et inédites. Le réel reste ce qu’il est ; cruel et brutal mais relooké par un style qui nous fait trouver belle la laideur. Baudelaire est sans doute passé par là… Ce n’est certes pas le lecteur qui s’en plaindra, car si la jeunesse supporte sans difficulté le soleil de midi, la charogne, elle, nécessite une métamorphose esthétique pour devenir respirable. Surtout en plein cagnard. Incarner l’Histoire On n’a pas toujours lu les romans dont chacun connaît le titre. Les Enfants de minuit, chef-d’œuvre de Salman Rushdie publié en 1981 est (relativement) peu lu des Français, qui aiment bien la nouveauté. Les Anglais, quant à eux, viennent encore, il y a quelques mois, de l’élire Best of Bookers. C’est-à-dire, à peu près, qu’il est pour eux leur meilleur Goncourt. Le succès du roman repose sur un alliage rare, et parfaitement réussi : celui de l’Histoire et de la fiction romanesque. Saleem Sinai, enfant (laid) né à l’heure exacte de l’Indépendance de l’Inde (le 15 août 1947), en est la métaphore : jubilant comme elle, souffrant comme elle, morcelé, mutilé, émasculé quand Indira Gandhi déclare l’Etat d’urgence (1975). Avec lui, au jour de l’Indépendance sont nés mille enfants indiens qui communiquent, les Enfants de Minuit : si Saleem Sinai est l’Inde dans sa chair même (de musulman), les autres aussi, plus ou moins, ressentent dans leur corps et leur histoire personnelle les évolutions de leur pays, et savent traverser les miroirs, se joindre en esprit ou changer de sexe… Cruel, extrêmement pessimiste politiquement (son personnage ira jusqu’à l’ésperectomie, l’ablation de l’espoir), le roman n’en est pas moins drôle, sans doute parce que la férocité s’exerce également à l’encontre du narrateur, double de l’auteur en bien des points. Les péripéties s’enchaînent, les personnages sont campés comme dans un roman d’aventure, le style est vif, rapide, et le merveilleux le plus irréaliste se mêle à la description presque naturaliste de la ville indienne. Un grand roman à (re)lire, vite, avant d’aller écouter Rushdie à la Fête du livre d’Aix (voir page 62). A.F. SYLVIA GOURION Corniche Kennedy Maylis de Derangal Éditions Verticales, 15,50 euros Les enfants de Minuit Salman Rushdie Ed. Stock, 1981 Livre de Poche Biblio, 8 euros 68 LIVRES ART Nova musica occitana Dans le débat sur l’appartenance des langues régionales au patrimoine de la Nation, ce livre passionnant, sorte d’état des lieux des Musiques et Chants en Occitanie, tombe à pic ! Il faut dire qu’en demandant à Frank Tenaille d’écrire cet ouvrage, le centre de création des nouvelles musiques traditionnelles Le Chantier (situé à Correns dans le Var), ne pouvait se tromper ! Le journaliste, spécialiste de la première heure du vaste champ des Musiques du monde, replace pertinemment le sujet dans son contexte historique, géographique, linguistique, politique, avant de partir à la rencontre d’une L’invitée Après avoir longuement observé le monde comme photojournaliste (Magnum, Reuter, Sygma) Sophie Elbaz démissionne en 1995 de sa charge de reporter pour se consacrer définitivement à son travail artistique. Des diapositives contaminées par la moisissure, qui constitueront la série Organiques, une révélation lors d’un stage avec Eikoh Hosoe, provoqueront un changement de cap. Sans que jamais elle se départisse d’une approche fondamentalement humaniste comme dans les séries Mémoires d’Elles, Origines, Où en es-tu ? Le sous-titre, Le sacré, le corps, le politique inciterait à croire qu’il s’agit d’une chronique ou une étude socio- Musiques et Chants en Occitanie Franck Tenaille Le Chantier et les Editions du Layeur, 27,50 euros politique. Il n’en est rien, il est question d’un mythe : Cuba. Plusieurs séjours dans l’île du lézard vert, de nombreuses rencontres, l’initiation aux rites de la santeria en particulier ont nourri ces Aleyo Sophie Elbaz Images En Manœuvres Editions, 31 euros trentaine de figures de ce «renouveau musical» né à la fin des années 60. Ces musiciens, poètes-militants en faveur de la langue d’Oc, s’inscrivent dans la lignée d’un félibre «rouge», issu de l’entre-deux guerres (sur le modèle Catalan), faisant front au jacobinisme linguistique de l’école de Jules Ferry. Il en résulte une formidable vitalité dans les domaines de l’expression et de la création musicales, entre langue écrite et tradition orale, recherches sonores et références patrimoniales. Dans ce pluriel occitan, qui s’étend sur 33 départements du sud de la France, (deux millions de locuteurs, et six millions dits «passifs»), on découvre des images et un retour de l’auteur à ses racines africaines. Hormis les effigies des saints et icônes politiques, pas un seul portrait vraiment de face, les regards désignent un ailleurs : le visage se tourne, les yeux sont clos, les prunelles au-delà, la tête s’incline, la masse des cheveux est ramenée par devant, une silhouette sombre en contre-jour, de dos, un écran de fumée, l’ombre portée d’un chapeau ou bien seulement un masque. Sans aucun commentaire, en diptyque ou triptyque, les images s’appréhendent selon plusieurs registres qui s’entremêlent, individuellement ou se faisant écho en vis-à-vis, d’une page puis à une autre. Sophie Elbaz a portraits finement brossés du mythique Claude Marti ou du «trobar» Jean-Mari Carlotti, du «d’oc Quichotte» Manu Théron et des «fadas» de Massilia Sound System, voire du «cousin» d’A Filetta Jean-Claude Aquaviva… Un voyage en Pays d’Oc, de la Provence à l’Auvergne, de la Gascogne au Limousin, où l’on se souvient furtivement de l’âge d’or des troubadours et des Cathares, du Nobel de Mistral en 1904… Et un livre qui donne envie d’entendre, de découvrir aussi ce que ces artistes clament et chantent depuis plus de trente ans ! JACQUES FRESCHEL probablement trouvé une forme de clef personnelle pour les yeux. Une pulsion visuelle pour des images cependant étrangement muettes. La triple thématique innerve le livre qui recommande impérativement un temps long du regard : on n’entre pas ici en touriste mais en invité. C’est le sens profond du mot Aleyo en langue Yoruba. La préface sur Cuba du poète Alain Borer et l’entretien mené avec Seloua Luste Boulbina recontextualisent et explicitent le parcours atypique de la photographe. CLAUDE LORIN Dieu, Satan et le Rock Comment est-il possible de mettre en relation le rock et la religion ? En les évoquant explicitement dès son sous-titre, Fabien Hein nous parle de(s) Dieu(x) et de la musique du diable Docteur en sociologie, Fabien Hein oriente ses travaux de recherche principalement sur les réalités concrètes des pratiques artistiques et culturelles dans le domaine des musiques populaires. Il souligne le fait que, dès son origine, le rock est considéré comme une musique damnée : les acteurs du rock, chanteurs et guitaristes (instrument du diable par excellence) en particulier, étaient considérés comme des adorateurs de satan ! Au fil des pages, l’auteur nous montre comment les rockeurs ont su exploiter le pouvoir médiatique lié à ce phénomène, et en tirer avantage. Rock et Religion Dieu(x) et la musique du diable Fabien Hein Autour du Livre, 2006 (Les cahiers du rock), 10 euros Par ailleurs, l’ouvrage nous informe des transferts et parallèles qui se créent entre la religion et le rock, à travers des termes comme idole, divinité, culte ou pèlerinage. Il y a donc là une véritable analogie, une projection qui s’établit ! Le «King» Elvis n’est-il pas considéré incontestablement comme une divinité ou un prophète avec tout le culte, la dévotion et le pèlerinage qui lui sont dédiés ? L’auteur mentionne dans son étude l’altérité entre les divinités célestes du rock, Elvis en tête (même si cela n’a pas toujours été le cas…) et les divinités infernales avec Mick Jagger et Marilyn Manson, pour ne citer qu’eux. Car les hommes cherchent d’autres vénérations que divines : les stars du sport, du cinéma ou du rock sont donc peut-être aujourd’hui les nouveaux dieux à vénérer ! SONIA BENSAAD 69 En freestyle Cette copieuse monographie, accompagnée de trois CD audio et un CD vidéo, rend compte du travail protéiforme et quelque peu décalé de Denis Brun Accompagné des contributions de différents auteurs, l’artiste commente sa démarche et ses projets réalisés ou restés en l’état, son parcours. À savoir : comment peut-on passer de la pratique de la planche à roulette (pardon, skateboard) avec Depeche Mode dans les oreilles, au statut d’artiste contemporain. En se rappelant intelligemment à Duchamp, au Situationnisme ou encore à Truffaut, avec la New Wave en background ; en se créant un double Toshiro Bishoko mais surtout en inventant sa méthode de remix global : «…la synthèse expérimentale d’idées, de formes, de couleurs et de sons en temps réel, avec parfois une séance d’enregistrement improvisée, immédiatement rangée et répertoriée pour être exhumée le moment venu, lors d’une tentative de création». Si le préambule de Sylvie Coëllier circonscrit bien la production de l’artiste jusqu’en 2005, on aurait aimé une présentation actualisée et développée plus encore, afin de situer ce travail en regard des productions et esthétiques, actuelles et passées, se réclamant en particulier d’une «underground attitude». D’ailleurs, le qualificatif underground n’est plus vraiment approprié ici, on pourra dire au moins branché ou pop au sens anglo-saxon du terme. Dans cet esprit la pop culture n’est pas forcément inconséquente ni commerciale, mais signifie le besoin impérieux de s’affranchir des normes établies de l’art pour ne pas être old school. De toute façon vous en avez pour un bon moment de lecture, d’écoute et de visionnements forts singuliers, et à certains endroits jouissifs. CLAUDE LORIN Overground Denis Brun éditions Cravan et Vidéochroniques, 2008, 35 euros Pékin for ever Réalisé par l’Institut d’Architecture de Pékin, le très bel ouvrage édité chez Parenthèses continue de centrer l’actualité sur la Chine et les controversés Jeux Olympiques qui se sont déroulés en août dernier. L’ouvrage démontre qu’en terme d’architecture au moins, les Chinois ont accompli à l’occasion des jeux des progrès étonnants ! 177 agences internationales ont participé aux concours organisés par la Chine pour construire ou restaurer les 37 sites principaux. Photos remarquables et textes appropriés sans surcharge rendent la lecture agréable. Du désormais renommé et majestueux Stade Olympique «nid d’oiseau» à l’onirisme de l’Aquacube en passant par la façade ultra moderne façon circuit imprimé de l’immeuble Le Pékin Numérique, ce livre témoigne de l’incroyable innova-tion architecturale qui a accompagné les jeux olympiques 2008, et qui fait dorénavant partie du paysage urbain chinois. Architectures Olympiques Pékin 2008 Ed Parenthèses 44 euros F.I N’oubliez pas le sel ! Un livre passionnant mêlant texte et photos raconte l’histoire des Salins en Camargue. Histoire du paysage, des ouvriers, de l’industrie saline, de l’architecture ouvrière, ce livre témoigne de la vie d’une région, d’une population, sur fond de développement industriel et souligne surtout les liens qui unissent l’homme et la nature, et leur inter- action. Dans sa préface, Bernard Picon, sociologue au CNRS, rompt avec le mythe de la Camargue sauvage et précise que ce caractère a pu être préservé grâce, paradoxalement, à son industrialisation. Ce sont en effet les systèmes hydrauliques innovants qui ont permis la conservation du littoral et de sa faune. Le Salin a été créé en 1856 par Henri Merle, englobant peu à peu les étangs de Vaccarès et Giraud. Au début du XIXe siècle, le Salin couvre une superficie de 1000 hectares et produit 80 000 tonnes de sel par an. Des canaux sont creusés, des machines inventées. En 1863, la société Solvay s’installe sur le site pour fabriquer de la soude et construit des logements, puis des équipements publics dans cette zone déserte et insalubre. Les ouvriers ont été beaucoup plus mal lotis que le directeur ou les cadres... Marie-Hélène Guyonnet analyse avec finesse les déplacements et les mélanges des différentes communautés grecques, arméniennes, italiennes dont la «surmasculinisation» a créé une instabilité du personnel. Patrick Box alterne couleur et noir et blanc pour souligner les contrastes des paysages et le réalisme de la vie ouvrière. CHRIS BOURGUE L’empire du sel, Salin-de-Giraud Marie-Hélène Guyonnet et Patrick Box éd. Le bec en l’air 35 euro 70 LIVRES PHILOSOPHIE Qu’est-ce que la philosophie ? On est en droit de se le demander lorsque le titre d’un livre est Donner un sens à l’existence ou pourquoi Le Petit Prince est le plus grand traité de métaphysique du XXe siècle Ce commentaire de l’œuvre se présente en fait comme un recueil de bavardages. C’est le risque que court l’entreprise philosophique lorsqu’elle se donne pour ambition d’éclairer ce qui nous touche pratiquement, avec la noble exigence d’être accessible. On n’y apprend pas grand chose en fait, et ce n’est pas la reprise de formules empruntées à l’histoire de la philosophie qui fait illusion. On a affaire a une série de lieux communs, comme la «prétention de l’homme à se vouloir maître et possesseur de la nature», ou «le problème de l’incommunicabilité des consciences» dans le dialogue avec la rose, «le bon sens qui n’est pas la raison pure mais l’intelligence éclairée par l’amour», ou encore «l’apprivoisement qui n’est rien d’autre que cette disponibilité qui nous permet d’aller à la rencontre des autres, au-delà des préjugés et des apparences, cette ouverture d’esprit qui a besoin de temps pour recevoir et comprendre». À s’engager sur le terrain de la morale, le philosophe dédaigne de fait le réel et dit des bêtises : ainsi ne lisons nous pas dans le commentaire du dialogue du Petit Prince avec le Roi que «le seul pouvoir légitime est celui qui n’exige de chacun que ce qu’il peut donner, qui est le seul moyen de reconnaître la valeur de ceux qu’on sollicite et de favoriser la collaboration» ; à ce compte-là, le pouvoir nazi était légitime ! Et puis encore : «ce pouvoir qui devrait être au fondement d’une vraie démocratie où chacun reste libre en obéissant aux lois dont le chef a fait comprendre la nécessité». Il y a de quoi s’étonner d’une telle définition de la démocratie, mot qui désigne le pouvoir du peuple. Est-il bon de légitimer les préjugés des adultes, et de dire aux enfants que l’homme a besoin d’un chef ? Et le commentaire de la troisième planète habitée par un buveur : «nous sommes entièrement responsables de notre aliénation». Faut-il donc mentir aux enfants ? Le philosophe devrait s’enrichir de la pertinence du psychologue, notamment celle de Bettelheim sur les histoires qui ont du sens pour les enfants, de celle du sociologue quand il faut comprendre la réalité de l’injustice du monde, de celle de l’historien pour connaître la réalité de notre histoire, du pouvoir, des expériences démocratiques, des massacres, des Versaillais, etc… mais on aurait dû se méfier : citer le médiatique et conformiste Raphaël Enthoven était déjà un mauvais signe ! RÉGIS VLACHOS Donner un sens à l’existence... Jean-Philippe Ravoux édition Robert Laffont, 15 euros Philosophie politique «La question est de savoir dans quelle société nous voulons vivre et quelle humanité nous ne voulons pas devenir, à défaut de savoir laquelle nous devrions être. Et la réponse à cette question passe, qu’on le veuille ou non, par des rapports de force et des luttes de pouvoir». Cet étonnant ouvrage de Krivine et Bensaïd est d’une part une lecture événementielle de mai 68, et d’autre part une véritable mine d’analyses de notions comme celle de pouvoir, d’histoire, de violence ; une leçon de politique en bref. La richesse de 68 est justement d’éclairer des notions fortes de la philosophie politique qui gagne à s’enrichir de l’apprentissage du réel, à l’heure où certains philosophes ont retourné leur veste de subversivité. Joli titre en tout cas que ce Fins et suites qui invite à se tenir en alerte face aux «appels du possible qui viennent troubler le sens du réel». Ce livre reprend une série d’articles produits aux fins des commémorations, tel le premier de 1988 qui plaint ceux qui sont nés en 1968 : «Tristesse pour celles et ceux qui n’auront pas connu d’autres passions, d’autres ambitions, d’autres projets à vingt ans que le réformisme sans réforme d’un Jospin, la république de pensionnat d’un Chevènement, le lyrisme mathématique d’un Rocard, la neutralité lisse d’un Fabius. Tristesse pour les tièdes et les tempérés. Tristesse pour ceux qui ne seront jamais révoltés, pas même à vingt ans». Car la parole est aujourd’hui aux opportunistes, «reconvertis dans la pitrerie médiatique, et qui ont désormais tendance à considérer leurs émois de jeunesse avec la tendre commisération d’adultes enfin mûris, adultement vieillis et mûrement rancis». Mais on le disait, le mérite de ce livre ne réside pas dans le seul pamphlet politique aux formules ciselées. C’est un modèle d’analyse de la notion de pouvoir, notamment quand il s’interroge sur le sang froid relatif des responsables de l’ordre. Faire de la philosophie politique, c’est justement s’arracher des considérations sur les qualités du chef pour penser politiquement ; car si en 1968 le pouvoir ne s’est pas acharné sur les grévistes c’est que «la classe dominante a parfaitement compris que l’opposition ne cherchait surtout pas à parvenir au gouvernement, portée par la vague montante d’une grève générale : tous les compteurs étaient réglés sur l’échéance présidentielle de 1972. Il ne fallait surtout pas bousculer le calendrier» ; et même lorsque Mitterrand répondit chiche au chantage de la démission de De Gaulle, en présentant un gouvernement provisoire qui n’avait d’autre but que la sortie élégante du mauvais pas dans lequel s’était mis le vieil homme, qui du coup rengaina son referendum : «parmi ce personnel politique, le sens de la raison d’Etat reste, somme toute, la chose du monde la mieux partagée». Et les deux marxistes de répéter que l’on a toujours injustement reproché à Marx son déterminisme historique alors que ce déterminisme est bien au contraire la trame de la rhétorique néolibérale. C’est bien elle qui présente ce monde comme le seul possible, et le capitalisme comme devant nécessairement advenir, «escamotant par la-même la bifurcation évènementielle et dissolvant la pluralités des possibles dans la fatalité du fait accompli». C’est lumineux, politiquement et philosophiquement. RÉGIS VLACHOS 1968 fins et suites Daniel Bensaïd et Alain Krivine Nouvelles édition Lignes, 12 euros 71 Illettrisme et violence Échange et diffusion des savoirs a invité, pour sa première conférence de la saison, le linguiste Alain Bentolila pour parler de l’illettrisme. Dans le cadre d’un cycle sur L’emprise de la violence sur nos sociétés contemporaines individu à s’insérer socialement ? N’est-elle pas également ce «capital» culturel qui permet aux élites de rester entre elles ? Un réseau de contraintes symboliques permet d’exclure ceux qui pourraient être tout aussi efficaces mais qui ne parlent ou n’écrivent pas bien. C’est ce que nous ne manquerons pas de demander le jeudi 16 octobre à 18h45 à Alain Bentolila, professeur à l’université Paris V, qui animera une conférence intitulée Maîtrise de la langue et destin scolaire à l’hôtel du département (entrée libre dans la limite des places disponibles) Le problème de l’illettrisme n’est pas mince : il conjugue tout à la fois un débat sur le destin social de l’individu, ainsi que celui du caractère disciplinaire que comporte le retour à la bonne vieille école d’antan avec sa fixation sur les seuls socles communs que l’on veut imposer à l’école. Si le problème de nos sociétés actuelles, que chacun peut toucher du doigt, est celui de la ghettoïsation et de l’absence de mixité sociale, alors l’illettrisme est vraiment une cause majeure de la dégénérescence actuelle de notre monde. Reste alors à s’interroger sur la cause de cette cause et sur le paradoxe d’une société plus éduquée qu’il y a 40 ans : il y a plus d’illettrés chez les vieux que chez les jeunes. Les mots manquaient aussi : était-on aussi violent ? Autre problème : la maîtrise de la langue est-elle strictement prépondérante dans la capacité d’un R.V.. Échange et diffusion des savoirs 04 96 11 24 50 Bentolila © drfp odilejacob Joyeuses incertitudes C’est encore un immense éclat de rire au sein d’une lecture sérieuse que nous propose cette dernière livraison des éditions Parenthèses, qui reprend le cycle de conférences programmées par Échange et diffusion des savoirs. Éclat de rire à la lecture de Pascal Picq : on continue de dire que les espèces s’adaptent, ce qui expliquerait les mutations morphologiques ; par exemple l’homme se serait redressé pour voir au dessus des hautes herbes dans la savane «et je vous rappelle qu’il ne fait pas plus de 1,20 m et que les hautes herbes font plus d’un mètre. Se Lexiques de l’Incertain Ouvrage collectif sous la direction de Spyros Théodorou Ed Parenthèses, coll. Savoirs à l’œuvre 17 euros redresse-t-il pour voir les prédateurs ? Il n’est pas besoin d’être un grand naturaliste : les prédateurs chassent de nuit et ils ne se mettent pas dans la savane debout : coucou les proies on arrive !». Très drôle. Aussi étonnant que cela puisse paraître Darwin est donc un gros mot en paléoanthropologie, on n’aime pas l’incertain et le hasard ; comme le singe. C’est vrai quoi, on retrouve systématiquement des fossiles d’humains et jamais de singes, même à 7 millions d’années ! Ça ne peut être un singe, se disent les scientifiques, puisqu’il y a trace d’évolution : «les bonobos et les chimpanzés ont aussi évolué. Quand certains demandent pourquoi le singe n’a pas évolué ils provoquent un ricanement des babouins dans les savanes». Pas mal ! Et sur le sexisme : «n’avez-vous pas remarqué l’idéologie des images de la préhistoire ? L’homme est devant la caverne, il attend le troupeau, la femme est derrière avachie… en espérant que son héros va ramener un bout de mammouth !... On justifie ainsi ce qui se passe aujourd’hui, évidemment…». Très fort ! Bon. On s’attarde là sur un article, mais vous pourrez aussi aller piocher dans l’astrophysique et comprendre que, lorsque Einstein a dit «c’est la plus grosse erreur de ma vie», il ne comprenait pas que l’univers a une histoire, le bêta ! Et chez la douzaine d’autres contributions lumineuses de spécialistes en histoire, politique, architecture, etc… dans ce magnifique Lexiques de l’incertain. R.V. 72 PHILOSOPHIE KANT La rétrolecture est à la mode, mais faut l’oser une double page totalement hors actu ! Sur LE monument de l’histoire de la philosophie qui plus est, un des livres les plus difficiles qu’on ait jamais écrit ! Mais on va pas se gêner dans Zibeline ! Deux pages sur la Raison Pure, je peux ? Et puis il y a derrière ça un immense éclat de rire, un fou rire qui m’a pris en relisant Nietzsche qui a lu la Critique de la raison pure et qui traite Kant de «plus grand difforme des estropiés de l’intellect qu’il y ait jamais eu, ce grand chinois de Königsberg». Alors, même si Kant est moins excitant que Nietzsche, on voulait reparcourir à la hache cette critique et ses chinoiseries parce qu’elle comporte des moments sinon tordants, en tout cas foudroyants, derrière son austérité. Sans Dieu, enfin ! Savez-vous que Galilée refusa de croire aux ellipses de Kepler prétextant, pour d’obscures raisons esthétiques, qu’elles étaient des cercles déformés ? Et Newton alors, quel comique celui-là ! Il découvre et calcule le principe de la gravitation mais persiste à dire que c’est Dieu qui veut bien intervenir pour maintenir en état ce fragile équilibre. Voilà pourquoi Kant a du mérite et que nous vous proposons cette bafouille sur la Critique de la raison pure : il va jusqu’au bout de l’esprit des Lumières, et Dieu dégage du terrain ! Pire encore : Kant réglera son compte à l’homme aussi, en lui rappelant que sa manière de voir les choses dans l’espace n’est pas forcément la seule possible... Commençons par l’espace, tiens ! C’est là le début de la Critique : «l’esthétique transcendantale». Définir ce joli mot ne sera pas de trop, comme ça on vous aura éclairé sur l’aspect le plus révolutionnaire de ce charmant ouvrage. Esthétique vient du grec aisthésis qui signifie sensation ; et transcendantale veut dire qui n’appartient pas à l’expérience immédiate : ainsi pour le grand chinois notre manière de sentir cette pierre ne dépend pas de la pierre mais de nous, nous ajoutons quelque chose qui n’est pas dans la pierre. Voilà (en gros) ce qui est transcendantal. Mais qu’ajoutons-nous à cette (pauvre ?) pierre me direz-vous ? Et bien l’espace et le temps, qui n’appartiennent pas aux choses mais à l’esprit. Pour voir un objet il y a deux conditions primordiales : qu’il soit dans un espace et dans un temps donnés ; je le vois sur cette table et il est 15h. Et voilà la véritable révolution de Kant (qu’il appelle sa révolution copernicienne) : l’homme n’est pas au centre, les choses ne se règlent pas sur lui ; c’est lui qui tourne autour des choses, et qui les perçoit avec ses propres limites, il a besoin de l’espace et du temps pour les saisir. Bref, nous ne connaissons des choses que ce que nous y mettons nous-mêmes : bravo pour le relativisme, l’artiste ! Quand on y pense un peu c’est un véritable gouffre métaphysique : pour Kant nous pouvons poser qu’une intelligence autre qu’humaine pourrait voir les choses sans avoir besoin du temps et de l’espace. Angoisse ! Passons au connaître Pendant qu’on angoisse, la Critique passe par une deuxième partie, moins intéressante, «l’analytique transcendantale» : c’est le stade de la connaissance, des concepts, et donc de l’entendement, après le premier, celui de la perception. Ici nous serons plus facilement en accord avec le côté transcendantal de notre connaissance ; lorsque je dis que je vois une pierre, il est facile d’admettre que le concept de pierre est arbitraire, ainsi que son unité ; ces deux concepts sont proprement humains, ils sont apportés par notre esprit (excepté pour quelques mystiques intuitionnistes comme on les appelle, qui considèrent que l’idée d’unité, et des chiffres en général, est dans la nature. Ou alors l’empiriste qui dit qu’à force de voir des arbres les hommes en ont induit le concept de chiffre un, deux…). Donc, pour résumer, connaître c’est ranger une perception arbitraire (puisque ne correspondant pas à l’objet tel qu’il est en lui-même) sous un concept arbitraire aussi (cette pierre aurait pu s’appeler yaourt, 73 et il aurait été difficile d’y bâtir une église sans en faire un flan). Lorsque je perçois un objet, je le perçois sous la condition de l’espace et du temps, mode de perception proprement humains. Une autre intelligence pourrait le percevoir autrement ; ainsi nous avons affaire à l’objet en tant que phénomène, c’est-à-dire tel qu’il nous apparaît, et non àl’objet tel qu’il est en lui-même, ça on n’en sait rien (cela implique que Dieu nous trompe, mais ça Kant assume complètement, d’autant plus qu’il lui règlera son compte un peu plus loin). Donc l’objet tel qu’il ne m’apparaît pas, tel qu’il est possible qu’il apparaisse à une autre intelligence, est ce que Kant appelle le noumène. Le noumène n’est pas la face sombre, que nous ne verrions pas, des choses ; c’est la reconnaissance, humble, de la possibilité de percevoir autrement le monde ; le noumène est autrement appelé chose en soi, la chose telle qu’on n’en sait rien, limités que nous sommes par notre mode de perception. (Là aussi, grosse trouvaille de Kant : le noumène n’est pas une entité positive, c’est la conséquence logique d’une pensée, celle qui se dit que sa manière de penser n’est pas la seule possible.). Peut-être est-ce la seule ambiguïté de Kant : parler de noumène, de chose en soi sans affirmer leur existence ; dire que les choses peuvent exister autrement que nous les percevons, tout en disant qu’on n’en sait rien ; bref, il y a une voie nécessaire à envisager, mais sans issue : drôle de méthode ! Comme le dira Schopenhauer, tout était sérieux dans ce livre jusqu’à ce qu’on en arrive à cette affaire de noumènes, «nous voilà tout d’un coup au royaume des petits anges» ! Pour critiquer la raison pure Et nous battons des ailes allègrement vers la troisième partie, la plus fameuse : la «dialectique transcendantale». Il faut maintenant régler son compte à la raison parce que, vu le titre du pavé, il ne faudrait pas qu’il y ait tromperie sur la marchandise ! C’est la partie la plus sexy de l’ouvrage puisqu’on plonge en pleine métaphysique. Et d’ailleurs qu’estce que la métaphysique ? La raison qui croit bien faire en s’émancipant du terrain expérimental, pour délirer grave sur l’origine du monde, Dieu, l’âme, tout ça. Et là, Kant commence par ridiculiser Descartes : ce n’est pas parce que nous disons «je» qu’il y a une substance qui s’appellerait le moi ou l’âme ; c’est ce qu’il appelle le «paralogisme de la psychologie rationnelle». Une erreur en fait : un paralogisme est une faute de raisonnement qui, à partir d’un fait, tire une conclusion disproportionnée. Expliquons-nous, puisque l’affaire est torride : le «je» que nous employons pour penser et sentir est une activité de synthèse, qui ne peut en aucun cas être attribuée à un moi comme support. Ce moi est une illusion, une erreur de raisonnement ; ou pour le dire autrement la conscience est activité, elle n’est pas substance, chose. Le «je pense donc je suis» est une sinistre plaisanterie ! Pas de moi, pas de chocolat ! Mais on ne va pas s’arrêter dans les distributions des gifles : c’est Dieu qui tend la joue ! C’est quoi cette idée de Dieu, nous demande Kant (bon pas comme ça, il y va plus poliment, il était très pieux). Et bien Dieu n’est rien d’autre qu’une idée, produite par la raison qui ordonne de considérer l’organisation de la nature comme si elle était le fait d’un grand ordonnateur ; nous ne pouvons connaître le monde (ce qui est l’affaire de l’entendement qui s’occupe des concepts) sans penser (ce qui est l’affaire de la raison qui s’occupe des idées) qu’il y a une organisation de ce monde ; et qui dit organisation dit organisateur. En bref, Dieu est un nom donné à un principe régulateur : celui qui donne envie de comprendre l’ordre de la nature. Mais le plus excitant, on vous le disait, c’est le conflit ! La pénétration d’une série de thèses et d’antithèses ! Kant s’y amuse beaucoup, il va synthétiser les plus grands problèmes de la métaphysique et tout résoudre : le monde a un commencement dans le temps / il n’y a pas de commencement dans le temps ; il y a de la liberté / il n’y a pas de liberté. Que faire ? dirait Lénine. Et bien il n’y a qu’à relire l’esthétique transcendantale pour comprendre le malentendu ! Notre esprit, avec la thèse, fonctionne parfois nouménalement c’est-à-dire en oubliant les conditions de l’espace et du temps et donc tout est possible ; et parfois, phénoménalement, il s’en rappelle, et là bien sûr que nous ne sommes pas libres puisqu’il y a toujours une cause à nos actions, et donc il n’y a jamais, phénoménalement, d’inconditionné : la liberté est donc aussi un principe régulateur, qui donne envie de vivre, et d’attribuer des responsabilités pour vivre en bonne justice. Aussi illusoire que Dieu… Voilà, cher lecteur patient, le terme d’un parcours bien arbitraire dans the pavé de la philosophie. On aime bien Kant, on l’assume : mais la déconstruction en règle de l’idée de Dieu et les patientes analyses donnent parfois du baume au cœur dans nos démocraties qui se meurent de la vitesse et de la fascination du religieux. Pape go home ! RÉGIS VLACHOS 74 HISTOIRE ET PATRIMOINE La création du patrimoine Saint-Victor © A.B Cette année, les journées du patrimoine veulent «mettre en valeur la relation existant entre le patrimoine et la création, ainsi que les possibilités de développement culturel et d’aménagement urbain et paysager qu’elle génère sur l’ensemble du territoire». Cette notion large du patrimoine, reflet d’une évolution, s’énonce comme un dilemme : le patrimoine peut-il être en gestation ? Car, patrimoine (du latin patrimonium) signifie, au sens premier, l’héritage du père, les biens de la famille que l’on a hérité de ses ascendants. Il s’agit avant tout d’une transmission et non d’une possession ! Cette transmission nécessite pour sa préservation le consentement de sacrifices. Pour conserver, pour transmettre, il faut une volonté affirmée que les sociétés ont consenti très tôt. Les Romains conservaient ainsi, sur le Palatin, une cabane de chaume évoquant celle de Romulus et chargée de rappeler aux citoyens les usages antiques et le fondement de la civilisation. Révolution, la politique du patrimoine L’idée d’un patrimoine comme élément national est plus récente. À l’époque moderne, à partir du sentiment d’admiration esthétique ou intellectuelle d’œuvres remarquables, la notion de préservation progresse lentement. Mais si la monarchie française reste attachée à des monuments symboles comme Versailles, écrin de la puissance absolue, elle fait pourtant le tri : en 1777, Louis XVI à qui l’on propose de restaurer Vincennes rétorque : «Est-ce que vous êtes fou, Monsieur Collet, de proposer quelque cent mille écus de dépenses dans un château qui n’est bon à rien et tout au plus à vendre ?». La nation balbutie et le roi, maître de domaine, agit en gestionnaire. L’inflexion décisive ne survint que peu après avec la Révolution de 1789. Il faut dire que la natio-nalisation des biens du Clergé, le 2 novembre 1790, transfère à l’État un ensemble de biens considérable. Mais les nécessités financières (vendre les biens pour désendetter la nation) et le rejet des symboles de l’ancien régime (églises et châteaux) ne poussent pas à la conservation. Pire, avec les tensions révolutionnaires et la guerre, la destruction du passé féodal et monarchique s’impose : c’est l’époque du vandalisme, où le 14 août 1792 est décrétée par l’Assemblée la destruction des symboles de l’oppression (y compris les monuments). A l’opposé, comme souvent dans le balancement révolutionnaire, le souci de la civilisation et de la conservation œuvre aussi. Dès septembre 1790, les Archives Nationales sont créées ; en octobre vient le tour de la Commission des Monuments ; en novembre on élargit la préoccupation aux manuscrits, tableaux, statues et autres objets d’art. Mieux, le 4 septembre 1792, s’opposant au vandalisme, les députés ordonnent un inventaire général «des témoignages du génie». En juillet 1793 on institue le Museum de la République (le musée national) ; en octobre 1795, la Bibliothèque Nationale. Mais la préservation reste erratique : dans le nouvel univers bourgeois on détruit par commodité ou spéculation (la «bande noire», une société financière, s’attache à démanteler châteaux et églises pour en tirer profit.). C’est donc dans le paradoxe que naît la politique du patrimoine en France. Un patrimoine bien installé Avec Guizot et la monarchie de Juillet, la préservation s’impose. Celui-ci présente au roi, en octobre 1830, un rapport sur la création d’une Inspection Générale des Monuments Historiques en France. Prosper Mérimée occupe le poste à partir de 1834. Avec Viollet-le-Duc, il accomplira une œuvre fameuse. En décembre 1837 le Comité historique des monuments et des arts (Hugo, Montalembert en sont Le Chateau d'If © wpopp membres) est chargé d’établir l’inventaire des monuments et veiller à leur conservation. La politique de Guizot s’échine à conserver pour décrire l’histoire vraie ! Avec lui, l’État supplée les individus défaillants dans la préservation du patrimoine. Nouveau propriétaire, financier peu avare, l’État s’active pour mettre à la disposition des classes moyennes les éléments de l’histoire commune. Loin du tumulte révolutionnaire, la politique du patrimoine consiste à écrire l’histoire de la Nation pacifiée et réunifiée. La IIIe République, préoccupée de l’extension démocratique, veut, quant à elle, convaincre de la grandeur patriotique. À l’instar de l’école, le monument devient démonstratif et pédagogique : l’État éduque. Il le fait davantage lorsque la séparation Palais Longchamps © A.B d’avec l’Église lui attribue les lieux de culte : la cathédrale, édifice religieux, devient un monument patrimonial républicain. L’histoire de la nation peut se poursuivre ! Élargissement On l’a vu, dès le départ la notion de patrimoine a largement dépassé le seul bâti, même si celui-ci est rapidement devenu emblématique. Au XXe siècle, les tendances se sont maintenues en se précisant. Dans les années 30 le patrimoine naturel devient objet de protection et donc de classement. En 1960, la création de parcs nationaux symbolise la nouvelle vision. Vingt ans plus tard on célèbre l’année du patrimoine tandis que le patrimoine ethnologique fait son apparition. Avec la décentralisation, le rôle de l’État change, il délègue aux régions et conseils généraux ; à partir de 1984, une place majeure dans la protection : les paysages naturels ou urbains, et les perspectives monumentales, les vestiges et les sites archéologiques font l’objet d’une attention soutenue. On l’aura compris, le patrimoine reste bien un lien essentiel dans la trame nationale. Il s’est adapté au gré des métamorphoses de la société. Aujourd’hui, il est devenu européen ! Cela présage-t-il d’une intégration réussie de l’Europe ? RENÉ DIAZ Quelques visites… Aix-en-Provence Propriété du Jas de Bouffan – 04 42 16 11 61 Bastide du début XVIIIe, ferme et parc arboré avec spécimens centenaires. Forum des métiers du Patrimoine, sur la Place de l’Archevêché de 10h à 18h. Arles Ateliers SNCF - 04 90 49 35 68 Portes ouvertes aux Ateliers SNCF ; maquettes et plans sont exposés pour comprendre le projet de réhabilitation des ateliers. Sam et dim. Abbaye de Montmajour – 04 90 54 64 17 Période historique du monument, Xe au XVIIIe, visites de 10h à 18h30 ; expo Théâtre of fashion, photos du Fonds d’art contemporain. Musée de la Camargue – 04 90 49 35 68 Visites le sam de 10h à 11h30 ; animations le dim où la visite de l’expo La Camargue côté riz (10h30) est suivi d’une démonstration de cuisine et dégustation à base de riz de Camargue avec les Chefs du Conservatoire des cuisines de Camargue. Draguignan Bibliothèque communautaire de Draguignan – 04 94 68 92 87 Conférence sur l’histoire du livre : présentation par Sandrine Le Bel de différents outils et matériaux qui ont permis de faire évoluer l’apparence visuelle du livre. Sam à 18h. Marseille Château d’If – 04 91 59 02 30 Installation multimédia Nightshot If de l’artiste néerlandaise Judith Nab autour d’une machine à captation qui transcrit les rêves comme une boite noire. De 9h30 à 18h, sam et dim. Visite commentée des rocailleurs / paysagistes marseillais – 04 91 90 78 74 Quartier nouveau qui surplombe la Corniche, ouverte au milieu du XIXe siècle, avec demeures et villas bourgeoises mais aussi cabanons et pavillons, terrain privilégié de l’art des rocailleurs. Circuit de 3h, sur inscription. Sam à 9h30. Archives et Bibliothèques départementales – 04 91 08 61 00 Visites thématiques : conservation et restauration des documents d’archives (sam à 15h et dim à 11h et 15h) ; archives orales, de la collecte à la conservation (sam et dim à 16h) ; les archives, écho de la société d’aujourd’hui (dim à 14h et 17h) Lampe 367, déambulation théâtrale dans l’histoire des mineurs de Provence avec la cie La Cohue (sam à 18h, sur réservation) ; espace de jeu interactif et documentaire en lien avec l’expo photo de Samuel Keller sur le Congo (sam et dim). Ferme pédagogique de la Tour des Pins – 04 91 55 25 24 Visite le sam de 14h à 18h30 avec ateliers pour enfants (reliure et empreintes de feuilles au pastel) ; le dim, de 10h30 à 18h30, visite de l’exploitation avec ateliers et découvertes des arbres remarquables. Quartiers des Aygalades Ouverture de la grotte ermitage des Carmes et Guillermy, de l’usine Chimetex, de la salle de la cité des Créneaux : RV à 14h à l’église des Aygalades Balade organisée par les associations du bassin Consolat-Mirabeau Le 21 septembre (mais aussi les 25 oct. et 25 nov.), une balade vous mènera entre les deux sites monticelliens de La Villa favorite et de La Roche percée en passant par l’ancien domaine des Consolats et la cité Saint-Louis : commentaires picturaux et historiques, témoignages, accrochages et repros de photos anciennes. RV à 9h30 à La Villa favorite (119, ch. De Saint-Louis du Rove). À noter, le 15 octobre, la sortie d’un ouvrage de Lucienne Brun, Sur les traces de nos pas, mémoire du quartier né entre Saint-André et Saint-Louis. Parcours culturel dans le 3e – 09 52 43 06 05 D’Esperandieu à Coste – les églises du 3e : RV le sam, à 9h30, devant le Parvis des arts ; D’une belle à l’autre, voyage au cœur du parcours des migrants : RV Place Caffo à 10h (06 63 91 50 01) Association Peau d’Ame – 06 20 74 93 86 Quand le recyclage devient créatif : exposition/animation pour la découverte de l’éco-design. Sam et dim, de 10h à 13h et de 15h à 18h. Ecole Supérieure des Beaux-Arts et d’Architecture de Luminy – 04 91 82 83 10 Ouverture exceptionnelle de 10h à 18h ; expo 40e anniversaire retraçant l’évolution depuis 40 ans de ces deux écoles. Le Comptoir Toussaint Victorine – 04 91 50 77 61 Vide grenier festif (dim de 9h à 18h) et atelier du grenier avec création collective avec objets récupérés dans les vides greniers, projections, expos… Hôpital Caroline, ïles du Frioul – 04 91 54 04 68 Visites de 10h à 17h, atelier de taille de pierre. Martigues Musée Ziem – 04 42 80 66 06 Concert duo Romanesca, avec Sabine Marzé (mandoline) et Ako Ito (guitare). Sam à 19h. Rencontre avec Hervé Nahon, plasticien, Cyrpein Parveix de Collombey, compositeur, à propos du film réalisé autour de l’œuvre de Lisa Barbier, Traces. Dim à 17h. Fort de Bouc – 04 42 44 31 10 À la pointe de Bouc à l’embouchure du Chenal de Caronte : visites commentées des différents espaces du fort et présentation de scènes historiées à l’intérieur. Sam et dim, à 10h, 14h et 16h30. Tarascon Château royal – 04 90 91 01 93 Ouverture du Château royal, de la collégiale Sainte-Marthe, du Cloître des Cordeliers, de la Maison de Tartarin et du Théâtre Municipal pour une balade au cœur du centre historique. Le ven 19, concert de l’ensemble vocal Akané dans la cour d’honneur du Château à 21h. Le sam 20, à 15h, Théâtre au Château avec la cie Les Didascalies ; concert grégorien par la chorale Schola SaintJoseph à la Chapelle Saint-Gabriel à 16h30 ; concert du quatuor vocal Résonances au Château à 21h.Le dim 21 visite du cloître du monastère de SaintMichel de Frigolet à 16h ; Théâtre au Château par la cie Didascalies à 17h. Saint-Chamas Circuit de découvertes d’œuvres d’art contemporain 04 90 50 90 54 Jérémy Blanco (sculpteur) au théâtre de Verdure, René Rovellotti (sculpteur) et Paul Lafran au Musée municipal, les sam et dim à 14h30, 15h30 et 16h30, RV au portail de l’ancienne poudrerie. 76 SCIENCES ET TECHNIQUES De la génétique à la gène éthique Et si l’énorme brassage de la double hélice d’ADN voulait transformer la connaissance scientifique en un chavirant Pitalugue, un navrant navire ? De Lacan à Monod 1932, la thèse du psychiatre, Jacques Lacan, sur «la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité» ouvre de nouvelles voies à l’étude des psychoses infantiles. Son travail ouvre un champ totalement nouveau à l’entendement humain, à la conception de l’univers mental. 1965, «leçon d’ouverture» du psychanalyste Lacan à ses célèbres séminaires sur «l’objet de la psychanalyse» à L’École Normale Supérieure, leçon magistrale et absconse sur «La science et la vérité». Le chercheur déifié pontifie sur la vérité scientifique en incantations d’un Nostradamus de Salon : «C’est la logique qui fait ici office d’ombilic du sujet, et la logique en tant Tonkin Prod./ Photos © X-D.R qu’elle n’est nullement logique liée aux contingences d’une grammaire». La connaissance s’emberlificote dans la cape noire à revers pourpres du narcissisme. Là, quand le chercheur est mort, le spectacle Lacan est né. 1961, la publication des médecins biologistes, Jacques Monod, André Lwoff et François Jacob sur Genetic regulatory mechanisms in the synthesis of proteins révolutionne l’entendement humain sur la transmission de l’information génétique dans le vivant et sa conservation. Cette découverte constitue, jusqu’à nos jours, sans doute la dernière grande révolution conceptuelle de la connaissance. 1965, les trois chercheurs entrent au panthéon de l’imaginaire narcissique scientifique ; ils sont «nobelisés». En 1970, Monod et Jacob produisent leurs évangiles, Le hasard et la nécessité selon Saint Jacques et La logique du vivant selon Saint François. Seul Saint André s’abstient d’un testament épistémologique. Les chercheurs médecins biologistes d’autrefois sont devenus les deux Saints chercheurs du paysage scientifique spectaculaire. Du tout psy à l’étonnant bio-gène 1968, la psychanalyse se popularise. Tout est psy, de la névrose obsessionnelle au rhume de cerveau. La psychosomatique triomphe des bas de barricades aux badauds des terrasses des bars. Le situationnisme institue la psychanalyse comme canal idéologique d’une pseudo révolution de salon sans Nostradamus. Et de bord en bars la découverte de l’inconscient, du désir, du refoulement est vilipendée en galimatias verbeux. La psychanalyse ouvre la voie royale aux psychologies de tous poils, qu’elles soient transactionnelles, quantitatives, psychotechniques… la psychanalyse est réifiée, elle entre dans le marché, elle devient marchandise. 1968, l’antidote de la psychanalyse commence à se distiller quantitativement dans les milieux positivistes : le déterminisme génétique vient d’être synthétisé par Monod et al. Point n’est d’inconscient sans essence bio [rien à voir avec les bio carburants]. Le tout génétique va détrôner lentement le tout psychologique. Maladies génétiques, maladies orphelines, vont supplanter les névroses en les rationalisant. Resteront les psychoses dont désormais certains revendiquent De l’idiot à l’odieux 2007, l’eugénisme triomphe. C’est l’avènement de la monarchie marchande. On parle du gène de la violence chez les petits enfants et de son dépistage précoce. On parle de créer un fichier des empreintes génétiques. On parle du gène de la psychose. On parle de reconnaissance génétique des individus. On parle de déterminisme génétique des personnalités. On parle même d’un déterminisme génétique artistique, par exemple pour «l’oreille absolue» des musiciens. 2008, le département des sciences du vivant du CNRS est mis au service du mercantilisme médical et son cortège pharmaceutique de génome et autre téléthon. La diversité culturelle se reconvertit en diversité génétique dans le désir dément d’abrogation du désir de connaître, c’est à dire de subvertir. Bouffer avec délice le fruit défendu en contrôlant les gênes de sa procréation ! Tout humain vit pour et par le désir, il n’est aucun code programmatique pour cela. Et contrairement à ce que titrait Vernon Sullivan, on ne tuera pas tous les affreux, car il n’y a guère qu’eux qui soient réellement vivants. Paris, Juillet 2008, Madame Sans-Gène, la tenancière du Café du Commerce distribue aux clients du bistrot son dernier album : Je suis la mort heureuse. Le proprio du rade a rassemblé ses amis mutants pour un dernier petit arrosage avant fermeture estivale. Le titre ne lui plait pas mais ça se vend bien. Donc tout va pour le mieux. Même pas besoin d’obtenir la patente élyséenne. Orwell, mon ami, mon frère, reste où tu es, ne bouge pas, j’ai la nausée, je te rejoins bientôt. YVES BERCHADSKY Programme d’avoir trouvé la cause génétique ! Là où il y a du gène y’a plus de désir. C’est la faute au gène «tant» sur le chromosome «untel». La génétique devient un produit, un code, une marchandise. On vend des séquenceurs. On «trace» tout ce qui est traçable. La génétique spectacle est née avec ses papes, ses archevêques, comme aux plus beaux temps de la psychanalyse spectacle. O tempora, O intelligentia. La logique du balancier substitue une oukase théorique par une bulle pas pâle. L’institution sait pervertir les intelligences et les acheter à la cause du narcissisme primaire. Une fois n’est pas coutume, le foisonnement en matière de culture scientifique et technique des mois de septembre et d’octobre nous oblige à être laconique ! Les 20 et 21 septembre 2008, les Journées européennes du patrimoine feront écho aux sciences et techniques dans différents sites de notre région. Le Muséum d’Histoire Naturelle de Marseille profite du ravalement de sa façade pour organiser une animation le 20 septembre autour du problème de la restauration des bâtiments classés en pierre de taille, avec la participation de François Botton, architecte des monuments de France et Anne Medard-Blondel Conservateur en chef du Muséum. D’autre part, à l’occasion de la Fête du vent organisée chaque année par la Ville de Marseille sur les plages du Prado, la Direction de l’Animation et de la Vie Associative, l’Association Amitié ProvenceChine et bien d’autres partenaires s’installent au Muséum et sur le Palais Longchamp avec des cerfs-volants animaliers, créations contemporaines ou pièces historiques. Ateliers de conception et réalisation de cerfs-volants, les 20 et 21 septembre de 10 à 17h, par la DGASSU. Atelier de calligraphie et d’origamis, le samedi 20 septembre à 15h, par l’Association Amitié Provence-Chine. Palais Longchamp (aile droite) - 13004 Marseille Renseignements 04 91 14 59 50 Inscriptions : 04 91 14 59 55 www.museum-paca.org Jusqu’au 31 décembre le Muséum Requien d’Avignon propose une exposition autour du thème de «L’Oiseau». À l’aide de panneaux didactiques et de spécimens choisis, la présentation lèvera le voile sur l’origine et les extraordinaires caractéristiques anatomiques des oiseaux. Beauté et multiplicité des formes et des couleurs, spécificité des pattes et des becs, diversité des nids et des œufs, voies migratoires, espèces menacées ou disparues... autant de thèmes abordés dans cette balade scientifique où le chant des oiseaux et les compositeurs qui ont cherché à retranscrire ces mélodies dans leurs œuvres, tel Olivier Messiaen, seront aussi à l’honneur. 67, rue Joseph Vernet 84000 Avignon 04 90 82 43 51 www.journeesdupatrimoine.culture.fr Le 26 septembre verra s’ouvrir la quatrième édition de La Nuit des chercheurs. Il s’agit d’une intéressante invitation à une rencontre des publics avec les chercheurs, en dehors de cadre institutionnel, dans une manifestation de proximité. Dans notre région élargie, Montpellier, Nîmes et Nice assureront dans ce cadre des animations originales et conviviales. Pour plus amples informations consultez le site : www.nuitdeschercheurs-france.eu. La 1re édition du Salon du Développement Durable ouvrira ses portes, à Marseille, du 17 au 19 octobre prochain au Parc Chanot, hall 2. Cette manifestation ne cache pas ses visées commerciales puisqu’elle se présente comme un forum où «l’ensemble des professionnels et spécialistes du Développement Durable seront réunis sur 2500 m2, pour créer pendant 3 jours la plateforme incontournable d’information, de conseils et de promotion de l’habitat écologique : construction, matériaux, traitement de l’eau, énergies renouvelables… Protéger l’environnement est aujourd’hui une préoccupation majeure pour l’avenir de notre région.» www.salondeveloppementdurablemarseille.com 04 91 16 53 13 Dans le cadre du Colloque thématique de la Société des Neurosciences va se tenir à Marseille la deuxième conférence française de Neurosciences Computationnelles, intitulée Neurocomp08, les 8-11 octobre 2008, http://2008.neurocomp.fr. Ce colloque de spécialistes s’ouvrira une journée au grand public avec une conférence et des animations scientifiques, le samedi 11 octobre à l’Alcazar (BMVR - bibliothèque de Marseille). Si le Zibelecteur veut prendre la mesure du contenu de notre article ci-contre, il ne manquera pas cette journée de «vulgarisation» ! 78 ÉDUCATION FAI AR Une bonne FAI s’est installée à Marseille... Avez-vous déjà entendu parler de la FAI AR, c’est-à-dire la Formation Avancée et Itinérante des Arts de la Rue ? Quelques heureux élus y approfondissent les techniques de spectacle en milieu urbain. Pourquoi heureux ? Parce que c’est une formation unique en Europe, et que son siège se trouve… à Marseille ! Une longue germination La genèse de cette aventure mérite qu’on s’y attarde. Tout est parti en fait de mai 68 : la rue s’y est appréhendée comme un espace à prendre, un champ d’expérience, une occasion de secouer la tradition poussiéreuse du théâtre classique. Ce sont les plasticiens qui ont les premiers tenté l’expérience avec les happenings et les performances : l’espace urbain devenait le champdupossible!Lieuderencontre, de mixité et donc de démocratisation, ouvert à un public hétérogène, les Arts de la Rue ont conquis un public de plus en plus nombreux au fil des saisons et des années ; dans le même temps se développaient les techniques et les savoir-faire. Ainsi le besoin s’est-il fait sentir de fixer les savoirs, d’approfondir les formations. Michel Crespin et Fabien Jannelle créent Lieux Publics, lieu international de rencontres et de Chantier des Apprentis © Agnès Mellon création pour les pratiques artistiques dans les lieux publics et les espaces libres des villes, en région parisienne en 1983, et à Marseille en 1990. Puis en 1994 le Ministère crée Hors les Murs pour la promotion des Arts de la Rue. Parallèlement Michel Crespin créait le premier Festival de Théâtre de Rue à Aurillac, dont il s’occupera de 1986 à 1994. C’est ainsi que peu à peu mûrit l’idée d’apprentissage et d’organisation de la transmission pour aboutir enfin à la création d’une formation supérieure : la FAI AR ! De 2002 à 2005 la FAI AR organise des stages de formation continue en collaboration avec l’AFDAS, puis le premier cursus de la Formation Supérieure démarre en avril 2005 en accueillant 15 Apprentis : c’est ainsi qu’on appelle les participants, en souvenir des artistes allemands du Bauhaus. Ceux-là ont terminé leur formation en mars 2007. La 2e est en cours et se terminera en mars 2009. Une immersion totale L’aventure dure 18 mois et concerne des intermittents, des artistes déjà expérimentés ou possédant une solide formation initiale. Totalement immergés dans un processus de création, ils sont libérés pour la plupart des soucis matériels puisque pris en charge par l’AFDAS, organisme qui finance la formation professionnelle, par les ASSEDIC, et d’autres aides financières sont trouvées au cas par cas. Ils viennent d’horizons divers : metteurs en scène, scénographes, chorégraphes, compositeurs, plasticiens, directeurs de compagnie, constructeurs, paysagistes... Mais avant toute chose ils ont été sélectionnés sur un dossier justifiant d’une formation de base dans un domaine donné, d’une expérience artistique et présentant un projet inventif de façon détaillée (même s’il est appelé à changer) qu’ils défendent ensuite lors d’un entretien oral. Ils doivent aussi justifier de leurs activités dans l’espace public. Cette formation professionnalisante a pour point d’accueil la Cité des Arts de la Rue aux Aygalades et se déplace ensuite dans différents lieux consacrés aux arts de la rue en France et à l’étranger (Pays-Bas, Espagne, Italie, Belgique...). La FAI AR reçoit une centaine de dossiers pour chaque formation, une trentaine est retenue et 15 seulement sont admis. Association loi 1901 sous tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication, conventionnée par la Région PACA et la ville de Marseille, et le soutien du Conseil Général des Bouches-du-Rhône, elle propose une Formation unique et innovante. Apprendre la rue Le développement pédagogique s’appuie sur des Fondamentaux (au nombre de 10), des modules thématiques qui constituent les bases de la formation comme le son, la verticalité, l’objet scénique, l’image, la lumière… éléments indispensables pour qui veut intervenir dans l’espace urbain. Chaque thème initié par un artiste ou un collectif est traité dans un cadre professionnel pour une 79 Portraits durée de 1 à 4 semaines. L’appréhension des politiques culturelles n’est pas oubliée avec l’étude des cadres institutionnels en France et en Europe, formation dispensée d’ailleurs par des hommes politiques de terrain : cette année, tout le monde a planché sur le dossier Marseille, capitale européenne de la Culture en 2013. Puis des Aventures Individuelles offrent aux Apprentis la possibilité de participer à des événements artistiques en s’intégrant au travail d’une compagnie en création ; un Voyage Imaginé permet à des tandems d’apprentis de rentrer en contact avec un pays non occidental, de se faire accepter (le prix du voyage est pris en charge par la formation) et ainsi de se fondre durant une quinzaine de jours dans une culture différente ; chaque Apprenti a aussi un «jardin» à cultiver, c’està-dire une option nouvelle à découvrir et à développer, et un instrument de musique à travailler. Peu à peu le projet personnel se précise avec les conseils d’un tuteur, choisi par les Apprentis, qui offre son regard extérieur, ses questions ou ses contradictions, et aide à la finalisation du projet. Toutes les étapes de travail et d’acquisition sont ponctuées par des chantiers ouverts au public pour finir par une Présentation-panorama qui présente l’ensemble des propositions. Il est alors temps pour ces Apprentis de prendre leur envol, sous le regard complice de la Bonne FAI ! CHRIS BOURGHE Chantier des Apprentis © Agnès Mellon Grands chambellans, elfes, lutins malicieux et gracieuses sylphides s’empressent au service de la Fée Art Pour l’instant leur «Château» n’existe que sur les plans des architectes : la 1re réunion de chantier a lieu en ce moment. Si tout va bien, courant 2010 la Cité des Arts de la Rue devrait être opérationnelle. Les 7 structures qui en font partie travaillent pour l’heure avec les moyens du bord, dans des préfabriqués, sur un terrain de 36 000 m2 et interviennent dans la formation des Apprentis, quand ceux-ci ne sont pas en résidence en Bretagne, en Espagne ou aux Pays-Bas. Deux grands chambellans, compagnons de route À l’origine, il y a Michel Crespin, celui sans qui il n’y aurait rien ! Après s’être occupé de Lieux Publics durant 18 ans, il a voulu mettre en place l’objet de ses recherches et de ses amours depuis 30 ans : une formation professionnelle qualifiante des Arts de la Rue. Dès 2001 il propose une étude de préfiguration, travail collectif qui s’expérimente à Marseille et en Espagne, depuis la réflexion et de l’échange des connaissances jusqu’à la réalisation. «Depuis toujours j’invente mes outils et je les transmets.». Passé par l’École militaire, il a été instit, enseignant de physique, puis saltimbanque... une vraie «saga» comme il dit ! Maintenant il est consultant pédagogique à la FAI AR, enseignant de scénographie. Son enthousiasme est inébranlable et nul doute qu’il le transmette aux jeunes qui montent ! Son alter-ego, Dominique Trichet a eu aussi un parcours engagé. À Nanterre en 68, sa rencontre avec Catherine Dasté l’a lancé vers «l’exigence intellectuelle et le plaisir du risque.». Comédien, metteur en scène , inventeur de spectacles musicaux, il est tout naturellement devenu le compagnon de route de Michel Crespin pendant 5 ans pour le Festival d’Aurillac. En 2005, il accepte la direction de la FAI AR, assume avec ferveur ses fonctions et s’apprête à affronter les mois de construction de pied ferme, mais avec décontraction ! Lutins et sylphides ont suivi la «Fée» de 2005 à 2007... Estelle Charles faisait du Théâtre de Rue en Lorraine (compagnie La Mâchoire 36) d’où elle est originaire. Au bout de 10 ans elle décide qu’il est temps de requestionner sa pratique artistique : «J’ai voulu poser mon savoir-faire, réactiver la machine créatrice... Ça m’a énormément apporté d’un point de vue humain, on s’est mis à travailler ensemble : un spectacle sur l’enfance et ses blessures à partir d’interview.». Elle est maintenant artiste associée de Lézarap’art. Raphaël Caillens, Architecte-Paysagiste formé à l’École de Versailles, enseigne paysage et jardinage, et se livre à des actions de Land-Art. «Mon regard se perdait dans des procédures lourdes pour faire évoluer la ville. J’ai voulu cultiver la légèreté, réveiller le regard des passants, inscrire des lignes de force dans le monde... J’ai assisté presque par hasard aux portes ouvertes de la formation. Tout de suite ce qu’a dit Michel m’a enthousiasmé, je correspondais au profil : bousculer mes horizons et m’ouvrir à d’autres pratiques. J’ai découvert l’importance de la gestuelle et j’effectue des rituels poétiques quand je me sens en phase avec le paysage.» Berta, Lili et Boueb, apprentis-magiciens... Berta, espagnole imagine un spectacle sur le cochon : «Le cochon est l’avenir de l’homme, Porcopolis montrera que l’homme se comporte comme un cochon.». Elle a un projet pour la Léthonie sur la mémoire sonore. Lili, franco-américaine, a beaucoup voyagé et ne se sépare pas de son chien qu’elle intègre à tous ses spectacles. Toutes deux se réjouissent de l’opportunité d’une telle formation qui les ouvre à l’écriture et la mise en scène. Boueb vient de Bretagne : «Je trouve ce que je suis venu chercher : élargir mon expérience en repartant de zéro. C’est une occasion incroyable que de pouvoir se consacrer à la création pendant 18 mois sans soucis matériels !». PROPOS RECUEILLIS PAR CHRIS BOURGUE 80 ÉDUCATION Réforme des Lycées, mise en place du contrôle continu, suppression drastique de postes d’enseignants et hausse notable des effectifs dans les classes… où va l’Éducation Nationale ? Une rentrée blanche et sèche Monsieur Darcos l’affirme, il faut réformer le lycée, qui va mal. Arrêtons-nous un instant sur ce constat. La réforme envisagée par Monsieur Darcos renonce aux filières, envisage un tronc commun avec des enseignements modulaires, des options qui correspondront au profil de l’élève. Ce qui, a priori, peut paraître une solution à l’hégémonie de la section scientifique, qui apparaît aux yeux des parents comme la seule filière fiable de réussite dans une société incapable de résorber le chômage de ses jeunes. Or cette réforme fait peur à plusieurs titres : d’une part, elle coïncide avec la disparition annoncée (et effective dès cette année) de milliers de postes d’enseignants du second degré (- 8830 postes en 2008, - 4500 postes en 2009…), si bien que l’on se demande si c’est l’intérêt des élèves qui est pris en compte lorsqu’il est question de diminuer le nombre d’heures d’enseignement. Ne s’agirait-il pas plutôt de faire des économies ? D’autre part, elle va demander aux Régions, en charge de l’équipement des lycées, des investissements considérables pour adapter les établissements scolaires à leur nouveau profil (création d’amphithéâtres, de salles modulables…). Et cela dans un contexte où la décentralisation consiste à se défausser sur les collectivités territoriales des dépenses auparavant dévolues à l’Etat… enfin, ce modèle de lycée existe dans l’Union Européenne… Et si les reportages télévisés présentent habituellement l’Angleterre ou l’Allemagne comme des pays où le Lycée va bien, parce qu’on y fait de l’art et du sport l’après-midi, les rapports de la Mensuel gratuit paraissant le deuxième jeudi du mois Edité à 25 000 exemplaires Edité par Zibeline SARL 76 avenue de la Panouse | n°11 13009 Marseille Dépôt légal : janvier 2008 Directrice de publication Agnès Freschel Imprimé par Rotimpress 17181 Aiguaviva (Esp.) photo couverture © Cyril Cé Conception maquette Max Minniti Commission Européenne sont à ce sujet alarmant. Faut-il adopter leur modèle ? apaiser les enseignants, troque l’ensemble de ces réformes et disparitions de postes (qui entraînent une surcharge de travail pour les professeurs) contre une augmentation, toute relative, des rémunérations (une prime à l’entrée dans la carrière, une promesse de revalorisation…). Belle carotte, quand les professeurs français sont payés un tiers de moins en moyenne que leurs collègues allemands ou anglais… Constat chiffré Le reste Comment juger de la qualité de l’enseignement au lycée, sinon en observant ce qui se passe dans les premières années de l’enseignement supérieur ? Un Français commence ses études supérieures à 18 ans (et 4 mois) en moyenne, un Anglais à 19, un Allemand à 20. Plus frappant encore : l’âge médian des étudiants est de 24 ans en Allemagne, et de 21 seulement en France… Cette entrée précoce dans le monde étudiant se double d’une réussite analogue des étudiants français à celle de leurs collègues plus âgés : ils n’abandonnent pas plus qu’ailleurs, et finissent leurs études bien plus tôt. (21 % d’abandon durant le premier cycle en France, 24 % en Allemagne, 35 % en Angleterre…). Ils sont plutôt plus nombreux qu’ailleurs (12 % des Français de 18/39 ans font des études, 9 % seulement des Allemands, 10 % des Anglais), et nettement mieux aidés. C’est là le chiffre le plus scandaleux publié par la Commission Européenne1 : l’aide financière accordée par la France à ses étudiants est l’une des plus basse d’Europe ! 8,2 % des dépenses publiques, pour 17,2 % en Allemagne, et 24,76 % dans le Royaume Uni… Si l’on doit chercher une cause à l’échec (relatif) des étudiants durant le premier cycle, ne faudrait-il pas regarder là, et investir massivement dans l’université plutôt que de faire des économies au lycée ? Le plus écœurant est que Monsieur Darcos, pour Et comme tout cela ne suffira pas à diminuer sensiblement la dépense publique d’éducation, d’autres remèdes sont déjà appliqués : la mise en place du contrôle continu en BTS (moins cher que le contrôle final), qui va faire fuir les élèves malins vers les boîtes privées (qui n’hésiteront pas à gonfler les notes pour avoir des clients), alourdir encore la charge des enseignants, tout en rendant invivable leur rapport avec les élèves, les parents et la hiérarchie, puisqu’ils devront donner ou non à LEUR élève l’examen pour lequel ils LE préparent… la concurrence entre établissements, qui proposent des options plus ou moins valorisantes : les collégiens qui n’obtiennent pas les lycées bien classés partent vers le privé. Autant d’économie… la suppression progressive des classes passerelles (entre enseignements professionnel et technologique) ou des classes «rares», qui coûtent trop cher, même si elles forment à des métiers à fort débouchés… Le gouvernement a pris l’habitude d’appeler Réforme les mises à sac en règle de tout ce qui relève de la dépense publique. Il serait naïf de croire que les Lycées feront exception ! DOMINIQUE MARÇON 1 Chiffres clés de l’enseignement supérieur, 2007 Rédactrice en chef Agnès Freschel [email protected] 06 09 08 30 34 Musique et disques Jacques Freschel [email protected] 06 20 42 40 57 Sciences et techniques Yves Berchadsky [email protected] Secrétaire de rédaction Dominique Marçon [email protected] 06 23 00 65 42 Frédéric Isoletta [email protected] 06 03 99 40 07 Maquettiste Philippe Perotti [email protected] 06 19 62 03 61 Cinéma Annie Gava [email protected] 06 86 94 70 44 Responsable commerciale Véronique Linais [email protected] 06 63 70 64 18 Arts Visuels Claude Lorin [email protected] 06 25 54 42 22 Ont également participé à ce numéro : Sonia Bensaad, Armelle Marie, Muriel Bénisty, Maryvonne Colombani, Marie-Jo Dhô, Sylvia Gourion, Yamina Tahri, Dan Warzy, Éducation Chris Bourgue [email protected] 06 03 58 65 96 Spectacle vivant Laurence Perez [email protected] 06 15 78 65 21 Livres Fred Robert [email protected] 06 82 84 88 94 Philosophie Régis Vlachos [email protected] Photographes : Agnès Mellon, 82 FORMULAIRES D’ADHÉSION ANNUELLE ADHÉ REZ ! à l’amicale et recevez Zibeline chez vous! Cochez le type d’adhésion souhaité Adhésion individuelle (11N°) 1 exemplaire mensuel, 1 carte de membre nominative : 40€ Adhésion familiale 1 exemplaire mensuel, …cartes de membre nominatives : 60€ (autant de cartes de membres que de personnes vivant sous le même toit) Adhésions collectives 5 exemplaires mensuels, 1 carte de membre nominative : 60€ 10 exemplaires mensuels, 1 carte de membre nominative : 100€ 15 exemplaires mensuels, 1 carte nominative : 125€ Adhésions de groupes 5 exemplaires mensuels, 5 cartes nominatives : 100€ 10 exemplaires mensuels, 10 cartes nominatives : 140€ Nom du groupe ou Nom et Prénom de chaque membre : Profession : Adresse postale (1 par groupe) Mail Téléphone Chèques à libeller à l’ordre de : L’amicale Zibeline Adhésions à adresser à : L’amicale Zibeline 76 avenue de la Panouse | n°11 13009 Marseille Les cartes de membres vous seront adressées par retour de courrier LA RUBRIQUE DES ADHÉRENTS Nos partenaires vous offrent invitations, réductions et avantages… Pour les places gratuites, téléphonez-leur rapidement pour réserver, puis présentez votre carte de membre (1 place par carte nominative). Pour les réductions, présentez simplement votre carte (réduction valable seulement pour l’adhérent) Théâtre du Gymnase 10 invitations par soir pour La famille Semianyki par le Teatr Licedei le 14 oct à 20h30 le 15 oct à 19h le 16 oct à 20h30 résa par mail à [email protected] La criée 10 invitations pour Personne ne voit la vidéo de Martin Crimp mes Linda Blanchet le 24 sept à 19h 10 invitations par soir pour De Gaulle en mai mes Jean-Louis Benoît le 9 oct à 20h le 11 oct à 15h 10 invitations pour Nicomède de Corneille mes Brigitte Jacques-Wajeman le 17 oct à 20h 04 96 17 80 31 (Bernadette Brisson) La Minoterie 4 invitations par soir pour Boucherie chevaline de Wladyslaw Znorko le 10 et le 11 oct à 20h résa par mail : [email protected] au delà de ce quota, tarif réduit à toutes les représentations du 10 au 18 oct 8 € au lieu de 12 € Théâtre de Lenche tarif réduit pour l’opération Quatre pièces de Sébastien Joanniez par le CDN de l’Océan Indien du 23 sept au 3 oct 04 91 91 52 22 Montévidéo tarif réduit à toutes les représentations 04 91 37 97 35 Les Bancs Publics 1 place offerte pour 1 place achetée pour tous les spectacles 04 91 64 60 00 Les Salins (Martigues) 10 invitations pour Le silence des communistes mes Jean-Pierre Vincent le 23 oct à 20h30 à confirmer avant le 17 oct au 04 42 49 02 00 attention ! le spectacle se joue à la salle du Grès à Martigues Théâtre de l’Olivier (Istres) Scènes et Cinés Ouest Provence 4 invitations pour Silent Ballet et Sixty Four dernières créations du chorégraphe Emanuel Gat le 10 oct à 20h30 à confirmer avant le 3 oct au 04 42 56 48 48 Théâtre d’Arles 2 invitations par soir pour Raté-Rattrapé-Raté de Nokoloas le 11 oct à 20h30 le 12 oct à 17h à confirmer avant le 3 oct 04 90 52 51 51 Théâtre du Jeu de Paume (Aix) 10 invitations pour Les chaussettes opus 124 Michel Galabru / Gérard Desarthe le 30 sept à 20h30 résa par mail à [email protected] Le Pavillon Noir (Aix) 5 invitations pour le CCN-Ballet de Lorraine pgme Preljocaj / Maliphant / Brumachon / Petronio le 5 oct à 17h 04 42 93 48 00 Le Vélo théâtre (Apt) vous invite à un apéro au “Cinérotic” de la compagnie Jamais 2 Sans 3 le 30 sept à partir de 19h 04 90 04 85 25 GRIM tarif réduit pour tous les concerts (10€ au lieu de 12€) O4 91 04 69 59 Le Balthazar entrée gratuite pour tous les concerts du jeudi 04 91 42 59 57 Le festival Courts-Bouillon (Rousset) vous invite à une séance de votre choix le 4 oct à 14h, 16h, 18h ou 20h30 à la salle Emilien Ventre offre réservée à tous les adhérents de Zibeline dans la mesure des places disponibles réservation au 04 42 53 36 39 ou par mail : [email protected] Films, Femmes et méditerranée 10 invitations pour une séance au choix (sauf le 30 sept) résa par mail à [email protected] Librairie Maupetit (Marseille 1er) La Canebière 5% de réduction sur tous les livres Librairie L’écailler (Marseille 1er) 2 rue Barbaroux 5% de réduction sur tous les livres Le Greffier de Saint-Yves (Marseille 1er) librairie générale et juridique 10 rue Venture 5% de réduction sur tous les livres Librairie Regards (Marseille 2ème) Centre de la Vieille Charité 5% de réduction sur tous les livres L’histoire de l’œil (Marseille 6ème) 25 rue Fontange 5% de réduction sur tous les livres Librairie Imbernon (Marseille 8ème) spécialisée en architecture La Cité Radieuse 280 bd Michelet, 3ème étage 5% de réduction sur tous les livres Librairie Arcadia (Marseille 12ème) Centre commercial Saint Barnabé Village 30 rue des électriciens 5% de réduction sur tous les livres Librairie de Provence (Aix) 31 cours Mirabeau 5% de réduction sur tous les livres Librairie Au poivre d’Ane (La Ciotat) 12 rue des frères Blanchard 5% de réduction sur tous les livres La Pensée de Midi vous offre 3 exemplaires du dernier n° de la revue Le Mépris 5 exemplaires de Tanger, ville frontière 1 exemplaire de Beyrouth, XXIème siècle 1 exemplaire de Retrouver Palerme par mail : [email protected] Le Comité régional de Tourisme vous offre 2 guides Le petit futé PACA par mail : [email protected] Si vous souhaitez devenir partenaires et publier ici vos avantages, écrivez à [email protected]