Il y a des appels en attente, mettez vous en maintenance

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Il y a des appels en attente, mettez vous en maintenance
« Il y a des appels en attente, mettez vous en maintenance » et plus tard, « plus de maintenant,
nous sommes écoutés ! »
Bienvenus dans le monde de la relation cotisants du RSI. Ces deux phrases illustrent à merveille le
pilotage du plateau RSI chez H2A.
Beaucoup de choses ont été écrites sur les dérives du prestataire. je souhaiterais ici, éclairer le
lecteur, non pas sur les conditions de travail déplorables rappelant les pires moments des centres
d'appels, mais sur le pilotage de ce type de prestation de service.
La simple observation du quotidien permet de voir et de comprendre comment une société privée
arrive avec brio, il faut le reconnaître, à duper le RSI.
J'apporte ici mon modeste éclairage sur la façon dont s'organise cette escroquerie.
Je me demande souvent comment un organisme public peut confier, à une entreprise aussi peu
scrupuleuse que H2A, le soin de répondre aux cotisants dont on sait les difficultés.
Il faut bien reconnaître à ce prestataire un savoir faire crapuleux hors normes.
« Il y a des appels en attente, mettez vous en maintenance »
Pour bien saisir le sens de cet ordre, venu des hauteurs de la hiérarchie du prestataire, il faut d'abord
comprendre ce qu'un client donneur d'ordre attend d'un centre d'appels et les moyens d'atteindre les
objectifs fixés.
Tout le monde s'en doute, l'objectif du centre d'appels est de répondre aux appels. C'est élémentaire
mais si malgré tout, il est normal d'en perdre, il faut garder à l'esprit que le nombre d'appels
« perdus » doit rester limité.
La qualité de travail d'un centre d'appels se mesure par sa capacité à perdre un minimum d'appels.
Ainsi, il est admis de perdre moins de 1 appel sur 10 reçus, ou 8 appels sur 100. Cet indicateur est
bien connu des professionnels sous le nom de QS (Qualité de Service). La QS est généralement
fixée aux alentours de 92%. Le prestataire doit donc décrocher et répondre à 92% des appels reçus
sur ses plateaux et ce dans un temps donné de quelques secondes.
Cette mesure de qualité s'exprime via cet indicateur mensuel mais nécessite un suivi quotidien pour
ne pas dire heure par heure, tant une dérive peut être difficiles à rattraper ensuite.
Pour arriver à l'objectif, le prestataire doit donc d'une part, anticiper mais aussi surveiller et piloter
en temps réel son niveau de prise d'appels.
C'est précisément sur ces deux points que les surprises commencent quand on parle de la prestation
RSI.
En effet, il semblerait qu'aucune mesure d'anticipation, c'est à dire prévision de volumes d'appels, de
planification, de management ou encore de maîtrise des temps de traitements des appels ne soit
prise.
Le suivi en temps réel est préféré et ses conséquences assumées, enfin pas vraiment.
Cet ordre venu d'en haut, « Il y a des appels en attente, mettez vous en maintenance » est la
conséquence directe de ce comportement irresponsable. En effet, c'est en fonction du nombre
d'appels en attente, que les Superviseurs et autres « décideurs » prennent cette mesure d'urgence, de
panique.
Pour bien comprendre : Tous les appels arrivent dans une file d'attente. Quand les télé conseillers ne
sont pas en appels, ils peuvent répondre de suite, les appels ne restent donc pas dans la file.
Quand ils sont déjà en train de répondre aux cotisants et qu'aucun n'est disponible, les appels sont
gardés dans cette file d'attente jusqu'à ce qu'un télé conseiller se libère.
Imaginez ce qui se passe aux caisses des supermarchés, c'est exactement la même chose, à ceci près,
qu'un cotisant peut raccrocher et mettre en danger la fameuse QS.
Pour éviter ça, il y a un moyen simple ; Prendre au plus vite le maximum d'appels. Vous l'avez
compris, en prétextant une panne informatique pour limiter la durée de traitement.
Cette pratique est tout simplement intolérable, non seulement pour les cotisants qui n'obtiennent pas
l'aide qu'ils attendent mais aussi parce que contraire à l’éthique même du métier.
Je peux vous assurer que les centres d'appels professionnels ne recourent jamais à ce genre de
pratique pour masquer leur incompétence.
Je doute d'ailleurs que le RSI cautionne cette attitude car en cas d'écoutes réalisées par les membres
du comité de projet, on nous on nous ordonne énergiquement « plus de maintenant, nous sommes
écoutés ! ».
Quelle est la conséquence d'une QS dégradée pour le prestataire ?
Des pénalités financières.
Une prestation de service de relation clients (ici des cotisants) est généralement facturée à l'appel
traité, ou décroché. On parle de facturation à l'acte.
Bien entendu, il est aussi prévu et fixé des objectifs de QS et de qualité de traitement notamment.
Si le prestataire ne réalise pas ses objectifs, il a des pénalités financières, autrement dit une baisse
de sa rémunération. Donc, ne pas dégrader sa QS … c'est l'astuce.
Pour autant, il existe des moyens de répondre aux exigences de son client tout en restant
professionnel et pragmatique.
Comme je l'écrivait plus haut, toute prestation de service de centre d'appels suppose de
l'anticipation pour garantir les résultats attendus.
L'anticipation par la prévision des volumes d'appels.
Parce que les flux d'appels ne sont jamais équirépartis sur une journée de travail, il est impératif
d'en connaître les variations pour organiser la présence des télé conseillers.
J'en reviens à mon exemple du supermarché. Les flux de clients sont très différents entre un lundi et
un samedi, de même que la fréquentation du magasin est très différente entre un lundi matin et un
vendredi soir. Pour un centre d'appels, c'est exactement la même chose.
Pour anticiper les volumes et ses variations, deux sources sont disponibles:
Soit le client donneur d'ordre est capable de telles prévisions, et le cas échéant, le prestataire se
servira d'un historique qu'il prendra soin d'ajuster avec les événements de la vie de son client.
Dans le cas du RSI, il semblerait que les volumes sont communiqués au prestataire de semaine en
semaine, sans précision sur leurs variations. Il faut bien l'admettre, ça rend l'anticipation très
difficile, voir impossible.
Cela impose alors de concilier les deux sources de prévisions. Les volumes donnés par le client et
l'historique connu du prestataire.
Manifestement, le prestataire du RSI ne prend pas cette peine, il a d'autres outils de pilotage
beaucoup moins contraignantes et difficiles à manipuler.
Cette prévision de volumes prend la forme d'une courbe dite de charge ou encore en chameau. Oui,
le nombre d'appels atteint son maximum en milieu de matinée, puis baisse fortement entre 12h et
14h puis remonte pour atteindre un second pic en milieu d'après midi.
Cette courbe ressemble donc à une grande sinusoïde qui varie suivant les heures, les jours de la
semaine et la saisonnalité et autres événements client.
Une fois cette courbe établit, il faut appliquer une planification des ressources pour couvrir la
charge.
L'anticipation par la planification des télé conseillers.
Je reviens à mon exemple du supermarché. Le magasin connaît le nombre de clients attendus sans
savoir à quels moments ils viendront faire leurs courses. Comment donc organiser la présence des
hôtesses de caisses ? Cette question est traitée avec la plus grande attention et le plus grand sérieux
car de cette planification, dépend le résultat opérationnel attendu mais aussi la rentabilité du service.
Chez ce prestataire, la réponse est tout aussi inattendue que simpliste.
Sur le site de Bagneux, les télé conseillers peuvent arriver entre 8h et 10h selon leurs souhaits. Sur
le site de Saint-Ouen, entre 8h et 9h. Cette différence de traitement entre les deux sites est curieuse
et symptomatique d'une approximation grossière. Les seuls à y trouver un intérêt sont les télé
conseillers eux même. Merci pour eux !
Les conséquence ne se font jamais attendre bien longtemps. Les télé conseillers arrivent alors qu'il y
a autant d'appels en attente que de conseillers présents. Dans ce cas, la QS est donc au plus bas.
Il arrive aussi qu'il n'y ait pas d'appels en nombre suffisant pour occuper tout le monde. On appel
cela de la disponibilité. Dans ce cas, la QS est plutôt au dessus de l'objectif mais le service lui n'est
pas du tout rentable pour le prestataire qui paie des Télé conseillers à rien faire.
Bref, il n'y a aucune maîtrise des flux, aucune prévision, aucune anticipation des besoins.
La maintenance informatique devient donc le premier outil de pilotage. Il y a des appels en
attentes ? On fait de la maintenance et on sauve la QS. Enfin, on essaie car une fois les appels en
attente, il est déjà trop tard. En effet, une QS intègre une notion de délai moyen de réponse. 92%
des appels pris en 20 secondes par exemple.
Mais alors, quand il n'y a pas assez d'appels que se passe t'il ? La réponse est élémentaire.
On demande aux Télé conseillers de partir. Ainsi, on sait à quelle heure on arrive mais jamais à
quelle heure on repart. On appelle cela le destaffing, second outil de pilotage.
Le plus drôle dans cette histoire est qu'au moment du départ de quelques télé conseillers, on
remarque très souvent une hausse subite des appels en attentes … et l'histoire recommence.
Mais que veut dire cette absence totale d'anticipation et de planification ?
Une incompétence pitoyable du prestataire ? Un mépris total de son personnel ? Un escroquerie de
son client ? Sûrement un peut de tout cela en même temps.
On parle souvent des conditions de travail des télé conseillers, conditions d’hygiène déplorables. On
se demande d'ailleurs si les membres du CHSCT travaillent encore dans cette entreprise tant leur
immobilisme est surprenant.
Je remarque aussi très souvent, les superviseurs qui n'ont de leur fonction que le titre. Ils pataugent
dans leur incompétence, leur arrogance, leur médiocrité et la peur de la hiérarchie. Ils font peine à
voir.
Il faut maintenant parler du troisième outils de pilotage : La durée de traitement des appels.
Chez les professionnels du métier on parle de DMT (Durée Moyenne de Traitement) qui intègre
plusieurs éléments.
1 - La durée moyenne de conversation (je parle avec mon interlocuteur)
2 - La durée moyenne de mise en attente (Je fais patienter mon interlocuteur pour rechercher une
information ou accéder à son dossier)
3 - La durée moyenne de travail post-appel (Je termine de rédiger un message par exemple après
avoir pris congé de mon interlocuteur)
D'autres éléments composent une DMT mais sans intérêt ici.
Chez la prestataire, on parle de DMC (Durée moyenne de communication). Conversation –
communication, la nuance est subtile mais importante. Dans un cas, j'intègre uniquement le temps
de parole et dans l'autre, d'autres éléments, mais lesquels ? Personne parmi les superviseurs du
prestataire ne sait répondre. Affligent.
La seule réponse connue est le temps de traitement, soit 210 secondes. Certains communiquent 180
secondes … allez savoir.
Quelque soit le bon chiffre, ce temps est assez court et il ne faut donc pas perdre de temps avec son
interlocuteur. De ce temps, dépend aussi de l'atteinte de la QS.
Alors comment gère t'on le temps de traitement des appels ?
1 - On le sait, on peut utiliser l'arme de la maintenant informatique. Certains télé conseillers
l’utilisent à leur initiative pour réduire ou compenser un temps de traitement en dérive.S'il pesse 7
minutes ou plus avec un cotisant ? Les suivants auront droit à la maintenance. Comment leur en
vouloir … Les superviseurs ignorants guettent les dérives. Ils sont là pour ça. Je passe ici, le
management terrain dont le terme même n'est jamais prononcé dans cette entreprise.
Je revoie le lecteur sur le site de l'AFRC (Association Française de la Relation clients) pour trouver
les définitions de postes.
2 - Il faut aussi limiter au stricte minimum les envois de messages aux chargés de comptes. Ça
prend trop de temps et donc dégrade le temps de traitement et donc la QS. Il est demandé aux
cotisants d'écrire à leur centre de paiement ou caisse RSI.
3 - On réduit au minimum les explications données aux cotisants et on ne cherche surtout pas
enrichir le niveau de connaissance des télé conseillers en cas de doute ou d'absence de réponse. Pas
de réponse ? Le cotisant pose sa question par écrit et peu importe s'il obtient une réponse.
4 - Enfin, la coupure pure et simple des appels. Passé le temps de traitement, le cotisant se voit
raccroché au nez puis rappelle. Il y en a de plus en plus.
Les deux obligations de traitement sont les suivantes :
« Ai-je bien répondu à votre demande? » On comprends mieux l'absurdité et l'ironie de la
question quand on sait le peu de cas qui est fait des cotisants.
« Nous sommes joignables de 8h à 18h30 du lundi au vendredi sans interruption ». Là aussi, la
joignabilité est un leurre, en fait une roulette russe entre maintenance et réponse tronquée ou fausse.
La dernière trouvaille en cas de maintenance informatique :
Il est demandé aux télé conseillers de prendre les noms, adresse et numéro de téléphone avant
d'annoncer aux cotisants que nous sommes en maintenance. Pourquoi cette précaution ? J'avoue ici
mon ignorance et mon incompréhension comme tous mes collègues d'ailleurs.