Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l`empire
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Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l`empire
Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Analyse statistique préliminaire des données James Lee 1 Souligner l'importance fondamentale des archives judiciaires pour la compréhension des sociétés passées est aujourd'hui devenu une banalité2. Que la Chine n'ait pas encore été beaucoup étudiée sous cet angle vient en grande partie de l'inaccessibilité, jusqu'à une date récente, des principales collections documentaires. Mais la situation a changé : il est désormais possible d'exploiter les archives judiciaires extraordinairement riches et détaillées de la dynastie des Qing (1644-1911), aussi bien à Taiwan qu'en République populaire de Chine, et même hors de Chine puisque une grande partie de James Lee (Li Zhongqing) est Associate Professor au Califomia Institute of Technology, Pasadena. Une première version de ce travail a été présentée en mai 1988 au Centre de Recherches et de Documentation sur la Chine Contemporaine de l'EHESS, où l'auteur séjournait comme directeur d'études associé, et une version révisée en 1989 au China Center de l'Université de Californie à Los Angeles, où il était Adjunct Associate Professor. Texte adapté de l'anglais par Pierre-Etienne Will. Ted Robert Gurr, « Historical trends in violent crime : a critical review of the évidence », Annual Review of Crime and Justice, vol. IH, 1981, pp. 295-352, et Lawrence Stone, « Interpersonal violence in English society 1300-1980 », Past andPresent, 101,1983,pp. 22-33, fournissent entre eux un bon état de la question concernant les travaux sur la Grande Bretagne et les États-Unis. Études chinoises, vol. X, n° 1-2, printemps-automne 1991 James Lee ces documents sont à présent disponibles en reproduction3. À terme, l'analyse de cette documentation devrait nous permettre de largement réécrire l'histoire sociale et institutionnelle des derniers siècles de l'empire, de même que les sources d'archives récemment mises au jour conduisent actuellement à repenser l'histoire économique et démographique des xvnf et xix0 siècles. Je me propose dans les pages qui suivent de décrire les données désormais accessibles aux USA4 et d'en tirer quelques conclusions préliminaires, basées sur des dépouillements et sur un traitement quantitatif réalisés en 1988 et 1989 au California Instruite of Technology et dans le cadre d'un séminaire de l'Université de Californie à Los Angeles5. J'envisageraipourcommencerlaquestiondessourcesetdeleurslimites ; puis je montrerai comment ces sources jettent un jour nouveau sur les procédures et les pratiques relatives à la peine capitale ; enfin j'examinerai l'impact des différences sexuelles et de la position au sein de la structure familiale sur la nature et la répartition des crimes capitaux. Mon ambition, en d'autres termes, est de suggérer comment ce type de données peut aider à mieux saisir les réalités sociales et institutionnelles cachées derrière la façade du code et de la réglementation. Pour une description détaillée de ces matériaux et de leur accès, voir Ted A. Telford et Michael H. Fînegan, « Qing archivai materials from the Number One Historical Archives on microfilm at the Genealogical Society of Utah », Laie Impérial China, 9 (2), 1988, pp. 86-114. Une grande partie de la documentation judiciaire conservée aux Archives historiques n° 1 à Pékin y est disponible en microfilm par l'intermédiaire de la Société généalogique de l'Utah (cf. note précédente), et je souhaite ici remercier Laura Pomroy et Melvin Thatcher pour leur aide. Mes remerciements vont égalementàEdwinaBiermanetàses assis tantspourl'hospitalité dont nous avons bénéficié à la Family History Library de Pasadena. L'essentiel du codage informatique a été effectué par six de nos étudiants (Pan Mingde, David Wakefield, Zhou Guangyuan, et plus particulièrement Chi Shaoai, YanXiaojian etZhang Meizhi). Cameron Campbell et YanXiaojian ont également participé à l'analyse des données. 114 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Les sources et leurs limites Les documents sur lesquels s'appuie cette étude correspondent aux stades ultimes de la procédure complexe de révision et d'appel créée sous la dynastie des Ming et conservée par les Qing et jusqu'à la fin de l'empire6. Pour décrire les choses brièvement : une fois achevé, à la fin de l'année, le réexamen de tous les cas de crimes capitaux survenus dans leur province, les gouverneurs étaient tenus d'expédier à la capitale une série de rapports — aujourd'hui classés aux archives comme xingke tiben — donnant un résumé de chaque cas, indiquant leur verdict, et recommandant l'une des trois options suivantes : exécution (qingshi, ou qingzhen, litt. « culpabilité établie ») ; suspension de la décision (huanjue) ; digne de compassion (jcejin), ou douteux (keyi)1. Ces cas étaient transmis au Sanfasi, sorte de cour d'appel dont la mission était de les examiner un par un avant le cinquième mois de l'année suivante et de faire des recommandations finales à l'usage de l'empereur. Pour les sentences d'exécution « après les assises » (jianhou) — par opposition aux sentences d'« exécution immédiate » (lijue) — ce dernier était supposé examiner personnellement ces recommandations avant de réunir, au début du huitième mois, les fameuses « assises d'automne » au cours desquelles les sentences définitives étaient annoncées après avoir 6 7 Voir la reconstruction détaillée de ce système proposée par Zheng Qin, Qingdai sifa shenpan zhidu yanjiu, Changsha, Hunan jiaoyu chubanshe, 1988. Voir également William Alford, « Of arsenic and old laws : looking anew at criminal justice in late impérial China », California Law Review, 72 (5), 1984, pp. 11801256 ; Marinus J. Meijer, « The Autumn assizes », T'oungPao, 70,1984, pp. 117 ; et Jonathan K. Ocko, « I'H take it ail the way to Beijing : capital appeals in the Qing », Journal ofAsian Studies, 47 (2), 1988, pp. 291-315. Voir pour ces termes E-tu Zen Sun, Ch'ing administrative terms : a translation ofthe Terminology ofthe six boards with explanatory notes, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1961, p. 268 : la suspension de la décision débouchait sur une amnistie, sur une réduction de peine, ou sur un réexamen ; les cas « dignes de pitié » (et, de même, les cas « douteux », keyï) étaient soumis à réexamen. Il existait également une catégorie intitulée « renvoyé chez lui pour s'occuper de ses parents ou continuer le culte ancestral » (liuyang chengsï). Voir aussi Derk Bodde et Carence Morris, Law in impérial China, exemplified by 190 Ch'ing dynasty cases, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1967, pp. 131-143. 115 James Lee été, en principe, débattues. La décision finale appartenait à l'empereur qui, lors d'une cérémonie ultérieure et suivant un rituel précis, marquait {gou) à l'encre vermillon sur une liste des cas de « crime avéré » les noms des criminels à exécuter. Pour les autres, si leur peine n'avait pas été explicitement commuée ou s'ils n'avaient pas été pardonnes, on les gardait en prison pour un nouvel examen aux assises suivantes. La présente étude fait usage de trois types de documents préparés pour l'empereur par le Sanfasi au cours du dernier stade de la procédure8 : les registres statistiques de la criminalité par provinces (gesheng mingdao deng'an shumu huangce),,qui classaient tous les cas en suspens par type de crime ; d'autres registres qui sont de longues listes nominatives fournissant une description abrégée de tous les crimes graves perpétrés dans les différentes provinces {gesheng mingdao zhanjiao zhong'an qingcé) ; et enfin, les mémoires du Sanfasi conservés aux archives dans la section qiushen xingke tiben, eux aussi classés par provinces, résumant les circonstances de chaque cas et recommandant une sentence. Avec les registres provinciaux des dépositions des criminels {gesheng qingzhong zuiren kougong ce), ces documents représentent plusieurs millions de pages et constituent près du cinquième des archives Qing conservées à Pékin et à Taipei. La présente enquête se fonde sur l'analyse d'un modeste échantillon incluant 42 registres statistiques, un peu plus de 20 000 descriptions abrégées de crimes, et un peu plus de 2 000 descriptions détaillées (dans les qiushen xingke tiben). Les principales limites de cette documentation sont celles de toute source bureaucratique. D'abord, il va de soi que l'État n'était pas capable d'enregistrer tous les crimes survenant sur son territoire9. Il n'avait pas non plus les moyens d'identifier et d'arrêter tous les coupables. Enfin, nous 8 9 J'ai choisi ces documents parce qu'ils constituent l'essentiel des sources judiciaires disponibles depuis peu par le canal de la Société généalogique de l'Utah. Celle-ci a également microfilmé de nombreuses autres sources qui resteraient à examiner en détail, en particulier les registres transcrivant les dépositions des criminels (gesheng qingzhong zuiren kougong ce). Sur ce type de problème, voir Gurr, art. cité, et Eric H. Monkkonen, « A disorderly people ? Urban order in the nineteenth and twentieth centuries », Journal of American History, 68 (3), 1981, pp. 539-559. 116 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire sommes obligés d'en passer par ses propres définitions pour répertorier les principaux crimes10. Autrement dit les sources ne mentionnent pas les crimes non signalés ou les cas non résolus (ce que les criminologues appellent le « chiffre obscur ») ; plus important, elles ignorent les crimes non considérés comme « graves » (zhong'ari) par l'appareil d'Etat. Bref, l'image qu'elles livrent ne correspond pas nécessairement à la configuration réelle de la violence. La violence intra-familiale offre un bon exemple de ce genre de distorsion. Le code des Qing était conçu pour renforcer le système patriarcal extrêmement autoritaire sur lequel reposait la société, et incorporait de ce fait les trois principes hiérarchiques mettant le père au dessus du fils, l'époux au dessus de l'épouse, et le frère aîné au dessus du frère cadet — et par extension, les parents au dessus des enfants, les hommes au dessus des femmes, et les aînés au dessus des cadetst11. Du coup, la décision de classer un crime comme « grave » ou non dépendait souvent des positions respectives du coupable et de la victime au sein de la même hiérarchie familiale. Un crime commis par un supérieur contre un inférieur pouvait rester impuni, alors que dans le cas inverse il pouvait être classé comme crime capital. Alors que sous les Qing pratiquement tous les types d'homicide étaient passibles de la peine de mort, tel n'était pas le cas lorsque un parent ou un grand-parent tuait un enfant ou un petit-enfant : de tels meurtres étaient considérés comme excusables si la victime avait manqué de « filialité », et même quand il n'y avait rien eu à lui reprocher la punition n'excédait pas cent coups de bambou12. Même tolérance dans les cas de mari tuant une épouse adultère ou simplement désobéissante13. En revanche, les enfants qui frappaient ou même injuriaient leurs parents pouvaient être 10 11 12 13 Pour un bon exemple de la façon dont les définitions officielles ont pu évoluer au cours des Qing, voir Vivien W. Ng, « Ideology and sexuality : râpe laws in Qing China », Journal ofAsian Studies, 46 (1), 1987, pp. 57-69. L'étude classique sur le droit et la famille demeure Ch'ii T'ung-tsu, Law and Society in traditional China, Paris et La Haye, Mouton, 1961. On se reportera également à Zhu Yong, Qingdai zongzufayanjiu, Changsha, Hunan jiaoyu chubanshe, 1987. Cf. Guy Boulais, S. J., Manuel du code chinois, Shanghai, 1924 (Variétés sino logiques, 55), p. 616 (n° 1420). Cf. ibid., p. 546 (n° 1234), p. 569 (nM 1298,1299). 117 James Lee exécutés par l'État La façon dont le code institutionnalisait les inégalités au sein de la famille se traduit dans nos source par une sur-représentation des crimes contre ceux qui se trouvent au haut de la hiérarchie familiale et une sous-représentation des crimes contre ceux qui se trouvent en bas. Procédure et pratique judiciaires Ce type de biais n'affecte évidemment pas les aspects plus proprement institutionnels de la procédure judiciaire tels qu'ils apparaissent dans nos sources. Un fait inattendu, et tout à fait remarquable, est en particulier mis en évidence : alors que dans la Chine d'aujourd'hui la plupart des accusés convaincus de crime capital sont exécutés, dans la Chine de la fin de l'empire on les épargnait dans leur grande majorité. Le tableau 1 propose une comparaison entre le nombre de tels accusés, basé sur une sélection de 26 « registres statistiques de la criminalité parprovinces » (gesheng mingdao deng'an shumu huangcè), et ceux des commutations et des exécutions effectivement décidées au cours des assises d'automne, tels qu'on les trouve dans les « Annales véridiques » (Shilu)14. La faiblesse du taux d'exécutions est surprenante : en général guère plus d'un cinquième à un tiers des accusés reconnus coupables de crime capital étaient exécutés, parfois moins. La grande majorité voyaient leur cas maintenu dans une sorte de vide judiciaire, sans exécution capitale et sans commutation explicite de peine, et devaient attendre l'année suivante pour connaître leur sort. Ceux qui restaient en prison dix ans sans faire l'objet d'une décision voyaient leur exécution automatiquement commuée en peine d'exil. Autrement dit, la plupart des affaires de crime capital aboutissaient à une commutation non par le fait d'un acte explicite de grâce impériale, mais comme conséquence de l'absence d'action (wuwei) du souverain. Il arrivait que les cours participassent à cette inertie. L'analyse des qiushen xingke tiben proposée dans le tableau 2 montre que, même au milieu du xvaf siècle, la moitié peut-être des provinces se dispensaient de donner des listes de cas méritant soit la « compassion » (kejiri), soit une suspension 14 Les chiffres des commutations et des exécutions (respectivement tingjue et gou) apparaissent dans le courant ou à la suite du huitième mois chaque année où ont eu lieu des assises d'automne. 118 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Tableau 1 La clémence impériale aux assises d'automne : exécutions immédiates et commutations Année Crimes capitaux' Commutationsb N 1760= 1761 1762 1770" 1771' 1777 1789 1805 181(7 1821 1823 1826 1830* 1831 1834° 1835 1837 1840; 1841 1844 1846 1848 1851 1852k 1854' 1855° 1862° 1863 1864 2589 2694 3151 2913 2941 3299 4151 3877 4894 4034 4225 3591 2464 2964 3381 2809 3008 3269 2922 3108 2652 2056 2325 2127 1725 320 767 1088 % - - 56 60 2,2 - - 140 117 4,8 3,9 - - 312 393 100 273 312 149 112 105 137 211 93 101 79 87 107 110 58 80 63 15 7,5 5,1 2,0 6,7 7,3 4,1 4,5 3,5 4,0 7,5 3,1 3,0 2,7 2,8 4,0 5,3 2,5 3,7 3,7 4,6 Exécutions11 N - 782 516 1180 614 - 833 1543 387 531 551 430 446 560 624 506 377 573 422 461 528 545 252 246 225 100 - - - 27 2,4 277 119 % 19,7 41,0 21,1 20,1 19,8 8,0 13,2 13,0 12,0 18,1 19,9 18,5 18,1 12,5 17,5 14,4 14,9 20,0 27,0 11,0 12,0 13,0 31,6 25,6 James Lee 1867 1870 1872 1875 1876° 1878" 1893 1894 1896 1897 1898 1899 1903 1040 1111 397 470 833 1233 1327 1140 1474 1581 1399 1404 1179 . - _ - _ - 17 19 2,0 1,5 91 134 - - - _ 11,0 11,0 - Notes : * b ° d e f 8 h ' ' k 1 m " ° p Source : Gesheng mingdao deng'an shumu huangce, Genealogical Society of Utah, microfilms n" 1357653-1357773. Source : Da Qing shilu, chiffres donnés chaque année à la suite des assises d'automne (huitième mois ou suivant) ; la source donne un chiffre de commutations {tingjue) et un chiffre d'exécutions immédiates (gou). Pas d'assises d'automne en raison du soixante-dixième anniversaire de l'impératrice douairière. Pas d'assises d'automne enraison du quatre-vingtième anniversaire de l'impératrice douairière. Ces chiffres incluent probablement l'année 1770. Chiffres de 1809 et 1810, regroupés en 1811. Chiffres manquant pour le Fujian, le Fengtian et le Shaanxi-Gansu. Assises de 1834 reportées en 1836. Assises de 1840 reportées en 1842. Assises de 1844 reportées en 1846. Chiffres manquant pour le Anhui, le Hubei et le Shandong. Chiffres manquant pour le Hunan, le Henan, le Guangdong et le Zhili. Chiffres manquant pour le Henan et le Huguang. Chiffres manquant pour le Zhili, le Fengtian, le Henan et le Shanxi. Chiffres manquant pour le Henan, le Shandong et le Shanxi. Chiffres manquant pour le Jiangsu, le Anhui, le Jiangxi, le Fujian, le Zhejiang, le Shandong, le Shaanxi et le Guangdong. 120 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire de décision (huanjué) ; la seule catégorie représentée partout est celle des cas recommandés pour exécution immédiate (qingshf)iS. Le résultat est que, dans bien des cas, l'empereur ne disposait tout simplement pas d'une information suffisante pour prendre ses décisions. Tableau 2 Recommandations des provinces en vue des décisions finales de l'empereur (1738-1740) Province Nombre de cas Zhili Fengtian Jiangsu Anhui Jiangxi Fujian Zhejiang Hunan Henan Shandong Shanxi Shaanxi Guangdong Guangxi Yunnan Guizhou Total 350 27 89 106 116 114 129 194 101 310 69 157 84 144 47 34 2142 Exécution (%) 23,4 100,0 91,0 47,2 11,2 22,5 25,3 95,0 28,4 75,0 17,8 61,9 13,2 12,8 82,4 35,8 Recommandation Compassion Suspension (%) (%) 7,1 9,0 4,7 3,6 5,0 2,9 25,0 31,8 38,1 17,6 17,6 7,6 69,1 52,8 88,8 100,0 72,9 71,1 68,7 50,3 86,8 56,5 Source : Qiushenxingke tiben, Genealogical Society of Utah, microfilms n' 1357653-1357773. On notera cependant que le Fujian est complètement absent des documents pendant les années considérées dans le tableau. Les rapports des gouverneurs et leurs résumés étaient transmis au Sanfasi et, enfinde compte, faisaient théoriquement parvenir jusqu'à l'empereur les informations et les recommandations venant des provinces. 121 James Lee Le système était moins cohérent et unifié qu'on pourrait le croire. Un examen plus approfondi des xingke tiben (cf. tableau 3) révèle que les types de « crimes graves » transmis avec demande d'exécution variaient considérablement d'une province à l'autre : certaines, comme le Jiangxi, le Zhejiang ou le Hunan, ne mentionnaient aucun cas de viol. D'autres, comme le Zhili, le Fengtian ou le Shaanxi, donnaient des chiffres très faibles de meurtres. D'autres encore, ainsi le Anhui, le Henan, etc., ne signalaient pratiquement pas de morts accidentelles. En dépit de l'uniformité requise par le code des Qing, l'impression prévaut que les autorités provinciales disposaient d'une grande liberté pour quabfier les crimes commis sur leur territoire et décider de leurs sentences criminelles. Tableau 3 Recommandations des provinces pour exécution immédiate en fonction du type de crime (1738-1740) Province Zhili Fengtian Jiangsu Anhui Jiangxi Zhejiang Hunan Henan Shandong Shanxi Shaanxi Sichuan Guangdong Guangxi Yunnan Guizhou Total Nombre Homici- Meur- Homicide de invo- tre de par lontaire imprucas dence (%) (%) (%) 82 27 81 50 13 29 49 96 88 45 28 71 52 19 6 28 43,9 66,7 18,5 46,0 53,8 17,2 36,7 26,0 50,0 48,9 64,3 71,8 55,8 52,6 66,7 39,3 13,4 14,8 63,0 38,0 46,2 72,4 42,9 50,0 22,7 33,3 17,9 19,7 26,9 47,4 16,7 60,7 764 44,0 36,1 Source : cf. tableau 2. 122 7,4 1,2 2,1 1,9 0,8 Incitation au suicide Viol Autre (%) (%) (%) 4,9 3,7 8,0 8,2 13,5 8,0 4,4 2,8 11,5 16,7 6,2 12,2 7,4 4,9 6,0 2,1 10,2 8,9 7,1 1,4 3,8 5,1 25,6 3,7 8,6 2,0 12,2 6,3 9,1 4,4 10,7 4,2 7,9 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire En outre, comme on pouvait s'y attendre, les registres statistiques montrent que le nombre de cas signalés par les provinces a eu tendance à diminuer progressivement : l'effectif des crimes capitaux transmis au gouvernement central culmine au début du xrx° siècle, pour ensuite décliner graduellement pendant le second quart, et brutalement après 1850 ; une légère croissance correspondant approximativement à la « restauration de Tongzhi » (après 1862) apparaît hésitante et peu cohérente. Autre aspect du même phénomène, les sources révèlent qu'à partir du milieu du XDC siècle un nombre important de provinces avaient cessé de participer pleinement au système judiciaire central. Le Guangxi est la première province à cesser d'envoyer des rapports, dès 1851, ce qui n'est guère surprenant puisque c'est de là qu'est partie la rébellion des Taiping. Le Anhui, le Jiangsu, le Fujian, le Zhejiang, le Hubei et le Gansu font de même en 1854, le Jiangxi en 1855, le Yunnan et le Guizhou en 1862 (probablement plus tôt, mais nous n'avons pas de données entre 1855 et 1862), le Shaanxi en 1863. La plupart de ces provinces ne recommencent à communiquer leurs données aux institutions judiciaires centrales que dans le dernier quart du siècle. Même alors, certaines provinces comme le Fujian se contentent d'envoyer des rapports sur les affaires les plus complexes et traitent la plupart des cas de leur propre autorité. Dans de tels exemples on peut dire que le gouvernement provincial s'est en quelque sorte arrogé une part du pouvoir judiciaire, suivant en cela une démarche qui a déjà été bien décrite dans le domaine financier ou militaire : on aurait là une autre illustration du processus de dévolution du pouvoir d'État qui marque la fin de la dynastie. Sexe, famille et violence En dépit des limitations évoquées à l'instant, les descriptions de cas et les données sur les coupables nous en apprennent beaucoup sur 1 ' histoire sociale de la violence à la fin de l'empire. Dans les pages qui suivent je concentrerai l'analyse sur les relations entre coupables et victimes en termes de sexe et de position au sein de la structure familiale. 123 James Lee Commençons par les quelque 22 000 résumés de cas que nous avons extraits des Gesheng mingdao zhanjiao zhong'an qingce16 ; en dépit de leur brièveté, ils indiquent le type de crime, la forme de châtiment recommandée, le nom et le sexe du coupable et de la (ou des) victime(s), leur relation familiale, la date du crime, et celle à laquelle le cas a été jugé la première fois. Les données que nous avons analysées sont limitées à quatre provinces, mais elles couvrent une période de presque deux siècles, du début du règne de l'empereur Qianlong (1736) à la fin de la dynastie. Les données résumées dans le tableau 4 révèlent une division sexuelle tranchée entre coupables et victimes. Alors qu'au total un peu plus de 2 % seulement (492) de tous les coupables sont de sexe féminin, c'est le cas pour plus de 11% (2 427) des victimes. En outre, quand une femme est effectivement coupable d'homicide, la victime est un homme dans la quasi totalité des cas (477 sur 492), et dans la majorité il s'agit de son mari (323 sur 477). À l'opposé, un peu plus d'un dixième seulement des victimes de criminels hommes sont des femmes (2 284 cas sur un total de 21 743), et apparemment il s'agit dans moins de la moitié des cas de leurs épouses (844 cas). En outre, lorsqu'un homme en tue un autre, c'est en général quelqu'un avec qui il n'entretient aucune relation de parenté, même lointaine: 17 % seulement des victimes de criminels hommes appartiennent à la même famille, contre près de 90 % des victimes de femmes homicides. À l'époque des Qing, en contraste marqué avec ce qui se passe aujourd'hui, lorsque les hommes se rendaient coupables d'homicides leurs victimes étaient le plus souvent extérieures non seulement au cercle de la famille immédiate, mais aussi au cercle beaucoup plus large défini par les cinq degrés de deuil (w«/«)17. 16 17 5804 au Zhili, 4042 au Fengtian, 4152 au Jiangsu, 7855 au Sichuan. Voir là-dessus la description classique de Feng Han-chi, « The Chinese kinship System », Harvard Journal ofAsiatic Studies, 2 (2), 1937, pp. 141-289. Voir également Boulais, op. cit., pp. 17-22, et le tableau in Hugh D.R. Baker, Chinese family and kinship, New York, Columbia University Press, 1979, p. 109. Dans nos tableaux 4 et 7, « proche parent » correspond au premier degré de deuil, les « parents éloignés » se situent du second au cinquième degrés, et les « parents très éloignés » au delà du cinquième degré. 124 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Tableau 4 Relations de parenté entre coupables et victimes, par sexe, dans quatre provinces (1736-1903) Coupables femmes Victimes parents proches parents éloignés conjoint parents beaux-parents enfants beaux-enfants frères et sœurs aînés frères et sœurs cadets autres (non spécifié) beaux-frères et belles-sœurs oncles et tantes neveux et nièces cousins plus âgés cousins plus jeunes autres (non spécifiés) cousins par alliance autres parents Total 323 7 7 3 7 1 4 22 2 1 21 11 399 3 2 4 3 1 5 1 19 parents très éloignés 4 3 7 Coupables hommes parents proches parents éloignés parents très éloignés 844 58 29 3 10 315 33 2 85 51 348 59 13 259 15 - 467 24 - 286 22 6 90 1 43 8 1 60 684 450 1553 813 Total apparentés Non apparentés 425 66 3 816 18 346 TOTAL 491 22 162 Sources : Gesheng mingdao zhanjiao zhong'an qingce, Genealogical Society of Utah, microfilms nM 1357653-1357773, pour les années 1736, 1743, 125 James Lee 1760,1762,1763,1771,1772,1777,1786,1787,1788,1789,1802,1803, 1804,1805,1806,1807,1808,1809,1810,1812,1814,1815,1816,1817, 1818.1819.1820.1821.1826.1830.1831.1837.1842.1843.1844.1845, 1846,1847,1848,1849,1850,1851,1852,1853,1854,1855,1857,1858, 1859,1860,1861,1862,1863,1864,1865,1866,1867,1868,1868,1869, 1870,1871,1875,1876,1877,1878,1879,1880,1881,1891,1892,1893, 1894,1895,1896,1897,1898,1900,1901,1902,1903 (Zhili) ; 1748,1760, 1762.1770.1771.1777.1805.1809.1821.1823.1826.1830.1831.1846, 1848,1850,1851,1852,1855,1856,1862,1863,1864,1867,1870,1872, 1875,1876,1878,1893,1894,1896,1897,1898,1899,1901,1903 (Fengtian) ; 1760,1762,1770,1771,1777,1789,1805,1809,1821,1823,1826, 1830,1831,1846,1848,1850,1851,1852,1855,1856,1862,1863,1864, 1867,1870,1872,1875,1876,1878,1893,1894,1896,1897,1898,1899, 1901, 1903 (Jiangsu) ; 1781, 1783, 1790, 1805, 1809, 1821, 1823, 1832, 1834,1846,1847, 1848,1850,1851,1852,1854,1856,1857,1858,1862, 1863,1864,1867,1870,1872 (Sichuan). Comme on peut s'y attendre, la représentation de la violence familiale offerte par le tableau 4 tend occasionnellement à refléter les préjugés du code des Qing plus que les réalités de la société du temps. On notera par exemple l'énorme disproportion entre le nombre de parents et le nombre d'enfants donnés comme victimes d'homicides, et de même entre le nombre d'aînés et le nombre de cadets. Et pourtant, certaines configurations se dégagent dont je crois qu'elles correspondent assez fidèlement à ce que pouvait être la violence dans les comportements sociaux entre parents durant la période étudiée. D'abord, si l'on excepte les cas de violence entre époux, on constate qu'à l'intérieur de leur parentèle les femmes sont susceptibles dans un peu plus de la moite des cas de s'attaquer à d'autres femmes autant qu'à des hommes, alors que les hommes s'affrontent essentiellement à d'autres hommes18. 18 Les pourcentages respectifs seraient 55 et 81 % : pour ne pas compliquer inutilement le tableau 4 nous n'y avons pas inclus la distribution par sexe. 126 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Par ailleurs, on constate que lorsque les hommes recourent à la violence contre des proches parents leurs victimes appartiennent souvent à la même génération. Parmi les 685 cas où un homme tue un parent proche autre que son épouse, on ne trouve que 87 parents ou beaux-parents, 51 oncles et tantes. On compte en revanche 435 cas d'homicide visant une personne de la même génération (y compris les beaux-frères et les belles-sœurs). Il n'est donc pas impossible que l'ambiguïté inhérente aux relations horizontales ait plus laissé cours à la violence que la hiérarchie rigide dans laquelle étaient enfermées les relations verticales. De fait, malgré la priorité donnée par l'État à l'arrestation et au châtiment des coupables de crimes visant des aînés, ce genre de violence inter-générationnelle apparaît relativement rare. Faut-il en conclure qu'à ce stade de son développement historique l'État impérial avait, dans une large mesure, réussi à faire intégrer ses propres valeurs par le corps social ? Enfin, si les femmes apparaissent proportionnellement plus portées que les hommes à s'attaquer aux générations supérieures, cette violence semble tout particulièrement dirigée contre les tantes (21 cas). Par contraste également avec les hommes, les homicides féminins intra-générationnels visent d'abord les membres de leur belle-famille (26 sur 38), ce qui s'explique très évidemment par les particularités du système patrilocal prévalant en Chine (épouses venant résider dans leur belle-famille). Les femmes, pourrait-on dire, recouraient d'abord à la violence là où les relations familiales étaient à la fois ambiguës et ténues. Là encore l'autorité des parents et des beaux-parents était, semble-t-il, globalement acceptée (ou du moins suffisait-elle à contenir la violence) : le seul « supérieur » contre lequel se dressaient massivement les femmes était leur mari. Les descriptions beaucoup plus détaillées fournies par les qiushenxingke tiben confirment ces intuitions et permettent de préciser certains points. Notre dépouillement a porté sur quelque 2 200 cas survenus dans 19 provinces et soumis à examen entre 1738 et 1740. Chaque cas a été codé en fonction de la date, de la province, du type de crime, du sexe et du métier du (des) coupable(s) et de la (des) victime(s), des liens sociaux et familiaux entre l'un et l'autre, des motifs et circonstances, des moyens de violence utilisés, de l'environnement où s'est déroulé le crime, et finalement de la sentence recommandée. Comme précédemment, les sources révèlent 127 James Lee des configurations fortement contrastées en fonction du sexe et de la position familiale. Les tableaux 5 et 6, par exemple, ainsi que les textes sur lesquels ils se fondent, suggèrent que dans la majorité des cas les femmes allaient jusqu'au meurtre lorsqu'elles avaient une liaison adultère, et ne le faisaient qu'après une préméditation soigneuse. En revanche il était plus typique pour un homme de commettre un homicide au cours d'une dispute portant sur des problèmes de propriété, dans laquelle il cherchait à défendre son bien ou au contraire à s'emparer de celui d'autrui, ou dans une querelle de dette. Les hommes tendaient par conséquent à tuer sans intention de donner la mort, ou du moins sans préméditation. Tableau 5 Crimes capitaux par sexe, 1738-1740 (toutes les provinces) Autresb (%) Homicides involontaires' (%) 74 21 18 43 8 35 95 392 20 20 58 63 23 17 2118 1698 22 21 56 59 22 20 2 213 2 098 Meurtres femmes coupables victimes hommes coupables victimes total coupables victimes Effectif (%) Sources : Qiushen xingke tiben (cf. tableau 2). Notes : * À l'exclusion des homicides par imprudence (accidentels). b Essentiellement les viols et les comportement ayant entraîné un suicide pour les victimes femmes ; les décès accidentels et les vols avec violences pour les victimes hommes. 128 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Tableau 6 Motifs et circonstances des crimes, 1738-1740 (toutes les provinces) sexuel (%) femmes coupables victimes hommes coupables victimes total coupables victimes Motif patrimonial (%) familial (%) autre (%) Effectif 73 45 10 20 9 27 9 9 94 388 17 12 53 60 10 7 20 22 2 087 1673 20 18 51 52 10 10 19 19 2 181 2 061 Sources : cf. tableau 2. Les tableaux 7 (reprenant les classifications du tableau 4 sur un effectif plus étroit mais plus précisément décrit) et 8 suggèrent en outre que les hommes considéraient leur lignage comme leur « patrie », alors que pour les femmes le lignage où elles s'étaient mariées était une sorte de territoire ennemi. Un quart seulement des victimes de coupables hommes leur étaient apparentées, même de loin, alors que trois quarts des victimes des coupables femmes étaient des proches parents par alliance, usuellement leurs maris. En revanche, lorsque les hommes recrutaient des complices, ils tendaient à les rechercher au sein de leur famille proche, tandis que les femmes s'adressaient presque exclusivement à l'extérieur du réseau familial. Manifestement, les liens qu'entretenaient les hommes avec leurs familles étaient forts, et les chances étaient bien plus grandes de les voir coopérer avec leurs parents qu'agir contre eux. De même, les proportions contrastées entre disputes et alliances par type de relation familiale, telles que les résume le tableau 9, fournissent une indication sommaire sur les liens affectifs entre parents proches. Les 129 James Lee Tableau 7 Les coupables des deux sexes et leurs victimes (1738-1740) (toutes les provinces) Coupables femmes parents proches paparents rents éloi- très gnés éloignés Coupables hommes parents proches parents éloignés parents très éloignés Victimes conjoint parents beaux-parents enfant beaux-enfants frères et sœurs aînés frères et sœurs cadets autres (non spécifié) beaux-frères et belles-sœurs oncles et tantes neveux et nièces cousins plus âgés cousins plus jeunes autres (non spécifiés) cousins par alliance autres parents 58 2 3 1 2 1 - - 126 10 5 33 15 4 24 27 16 9 35 31 38 24 27 5 4 4 4 2 2 4 4 33 Total 67 - - 271 164 53 67 95 Total victimes apparentées Total coupables* 488 2118 Sources : cf. tableau 2. Note: * Cf. tableau 5. La comparaison entre les deux dernières lignes du présent tableau (cf. texte) part du principe en général correct qu * il y avait en moyenne une victime par coupable. 130 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Tableau 8 Les coupables des deux sexes et leurs complices (1738-1740) (toutes les provinces) Coupables femmes Complices Coupables hommes papapaparents rents rents rents pro- éloi- très proches gnés éloi- ches gnés parents éloignés parents très éloignés conjoint parents beaux-parents enfant beaux-enfants frères et sœurs aînés frères et sœurs cadets autres (non spécifié) beaux-frères et belles-sœurs oncles et tantes neveux et nièces cousins plus âgés cousins plus jeunes autres (non spécifiés) cousins par alliance autres parents 1 1 - - - 3 21 2 12 27 33 5 3 18 8 7 1 1 3 1 2 - 2 1 1 2 6 Total 2 - - 140 7 12 Total complices apparentés Total coupables" 2 95 Sources : cf. tableau 2. Note: * Cf. tableau 5. 131 159 2 118 James Lee liens les plus forts sont entre parents et enfants : dans presque tous les cas de ce type relatés par les xingke tiben, nous les voyons combattre côte à côte un ennemi commun, pratiquement jamais l'un contre l'autre. En revanche les relations entres frères et sœurs, ou oncles et neveux, apparaissent beaucoup plus complexes, puisqu'on les trouve soit alliés soit ennemis dans une proportion comparable de cas. Les cousins et les parents par alliance, eux, font pencher la balance dans l'autre sens : ils avaient beaucoup plus de chances d'être antagonistes que de s'allier. Tableau 9 Parents complices et adversaires dans les cas d'homicide (1738-1740) (toutes les provinces) parenté parents/enfants frères/sœurs oncles/neveux cousins parents/beaux-enfants beaux-frères/belles-sceurs conjoints* amants* Effectif total 35 117 60 24 17 27 96 10 Complices N (%) 33 65 26 7 2 3 3 10 94 56 43 29 12 11 3 100 Adversaires N (%) 2 52 34 17 15 24 93 0 Sources : cf. tableau 2. Note : * Compte non tenu des cas de meurtre pour cause d'adultère. 132 6 44 57 71 88 89 97 0 Homicide et peine capitale en Chine à la fin de l'empire Dans ce même tableau 9, le contraste entre époux et amants apparaît particulièrement marqué lorsqu'on exclut les cas de meurtres pour cause d'adultère. Nous trouvons alors 93 cas où un mari a tué sa femme, mais seulement 3 cas où il lui est venu en assistance pour l'aider à préserver ses biens ou son honneur. En revanche, pour 10 cas où un homme est venu en aide à sa maîtresse, il n'y en a pas un seul où il l'a tuée. On en conclura d'une part que les hommes étaient plus prompts à battre leurs femmes à l'intérieur des liens du mariage, et d'autre part que les amants risquaient plus de s'assister mutuellement tant qu'ils restaient non mariés. Tout cela reste fort schématique. J'espère néanmoins avoir donné une idée des ouvertures données par les sources judiciaires sur l'histoire sociale et institutionnelle de la fin de l'empire. Pour des raisons de place, les configurations de la violence ont été analysées pour le xvnf siècle surtout, et l'efficacité des institutions qui produisent nos sources pour le xix° siècle plus particulièrement. Une grande quantité d'autres données attendent d'être codées et analysées, et la méthodologie ne peut que s'affiner en cours de route. Il n'en reste pas moins que c'est à de telles analyses de grands ensembles que doivent être confrontés ces milliers de cas individuels dont la lecture demeure à la fois l'exercice le plus divertissant et le meilleur moyen de conserver le contact avec la vie des gens19. Voir à ce sujet l'étude de Paola Pademi dans ce même numéro. 133 James Lee Caractères chinois gesheng mingdao deng'an shumu lijue .iL v^^J^^fai huangce - ê r f e ^ ^ ^ ^ C â liuyang chengsi qingshi ^Hjjjgesheng mingdao zhanjiao qingzhen -+4jtzhong'an qingce J&Qêy qiushen xingke tiben gesheng qingzhongzeiren kougongce -é^^l^M^U gou J{ huanjue ^ ^ ^ jianhou «§£.4^ kejin 5 j ^ keyi Sj. Sanfasi S-b£zé>{ Shilu <^j^ tingjue -f.lpc^wufu 3 - % wuwei -*ïfvJ^ xingbu JffJ-^JJ xingke tiben ^ J ^ - è t M * zhong'an ^[jf-T 134