Table des matières 1. Droit des sociétés

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Table des matières 1. Droit des sociétés
LETTRE D'INFORMATION MAI
2013
Table des matières
1. Droit des sociétés: explication des conditions relatives à la dissolution et à la
clôture de la liquidation en un seul jour
2. Donation de l'entreprise familiale: délai de 7 ans - Le ministre apporte des
précisions
3. Acheter des biens immeubles à Bruxelles: modification des règles relatives à
l'abattement fiscal
4. Fondation privée: une formule intéressante pour vous également?
1. Droit des sociétés : Explication des conditions relatives à la
dissolution et à la clôture de la liquidation en un seul jour
Depuis le 17 mai 2012, il est légalement possible de décider dans un seul et même acte
notarié de dissoudre et mettre en liquidation une société et de procéder à la clôture
définitive de cette liquidation. Les rares conditions sont fixées dans le nouvel article
184, §5 du Code des sociétés. Dans la pratique toutefois, la condition relative au passif
a suscité de nombreuses questions. Dans l'intervalle, le Ministre de la Justice a
adopté une position très souple le 12 décembre 2012 en ce qui concerne
l'interprétation du terme 'passif'.
La procédure antérieure pour la dissolution et la liquidation était très compliquée
La procédure à appliquer pour la dissolution et la liquidation se compose de différentes étapes:
1. C'est l'assemblée générale de la société qui peut décider la dissolution et la liquidation.
Dans une SCRL, une SCA, une SPRL, une SA ou une société (coopérative) européenne, cette
assemblée doit être tenue devant notaire. Dans ce cas, 2 éléments sont importants:
 L'organe de gestion de la société doit donner des explications sur la décision de dissolution
à prendre dans un rapport spécifique.
 Ce rapport doit être accompagné d'un état résumant la situation active et passive, arrêté à
une date ne remontant pas à plus de 3 mois (avant la date de l'assemblée générale). Le
commissaire de la société doit faire rapport sur cet état auprès d'un réviseur d'entreprises
ou d'un expert-comptable externe. Vous trouverez tous les détails à ce sujet à l'article 181
du Code des sociétés.
L'assemblée générale statue sur la base des rapports de dissolution et de mise en liquidation de
la société.
2. L'assemblée générale désigne un ou plusieurs liquidateurs.
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3. Le président du tribunal de commerce confirme ou homologue la nomination du/des
liquidateur(s).
4. Le liquidateur procède à la liquidation de la société.
5. Le tribunal de commerce approuve le plan de répartition de l'actif.
6. Une nouvelle assemblée générale peut être convoquée pour procéder à la clôture de la
liquidation.
Procédure simplifiée
Cette procédure compliquée était surtout critiquée par les sociétés comptant un faible nombre de
créanciers, voire aucun. C'est pourquoi le Code des sociétés permet d'éviter les lourdeurs de cette
procédure depuis le 17 mai 2012. Il est désormais possible de décider la dissolution/mise en
liquidation et la clôture de la liquidation dans un seul acte. Aussi, cette initiative a été accueillie
positivement.
Conditions pour organiser la dissolution et la liquidation dans un seul acte
Le nouvel article 184, §5 du Code des sociétés dispose qu'une dissolution et une liquidation dans un
seul acte ne sont possibles que si les conditions suivantes sont cumulativement remplies:
a) L'article 181 du Code des sociétés et donc le rapport qui y est prévu doivent être respectés si la
société est une SCRL, une SCA, une SPRL, une SA ou une société (coopérative) européenne.
b) Aucun liquidateur ne peut être désigné. Sinon, la procédure de confirmation ou
d'homologation doit être suivie et un plan de répartition doit être soumis.
c) Il ne peut y avoir de passif selon l'état résumant la situation active et passive visé à l'article 181
du Code des sociétés.
d) Tous les actionnaires ou associés doivent être présents ou valablement représentés à
l'assemblée et décident à l'unanimité des voix.
e) L'actif restant est repris par les associés eux-mêmes.
Explications relatives à la condition interdisant le passif
Les conditions a, b, d et e sont claires et ne nécessitent pas de commentaires. Il en va autrement pour
la condition c. L'état résumant la situation active et passive dont il est question à l'article 181 du Code
des sociétés et qui, comme souligné plus haut, ne peut remonter à plus de 3 mois au moment de
l'assemblée générale, ne peut contenir un passif. Or, tout qui a quelques connaissances en comptabilité
sait qu'un tel état contient toujours un passif.
Pour ne pas devoir abandonner directement la procédure en un jour, il convient d'interpréter
correctement la notion de passif. On peut partir du principe que le législateur a introduit la procédure
en un jour pour en faire usage et que, par passif, il faut plutôt entendre des dettes. A la question, posée
par le député fédéral Luk Van Biesen, de savoir si la condition précitée ne vise pas uniquement les
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dettes à l'égard de tiers, le Ministre a répondu par l'affirmative le 12 décembre 2012. Selon le
Ministre, les éléments suivants ne sont donc pas pris en considération et n'empêchent pas la procédure
en un jour:
 les éléments de passif comme le capital et les réserves,
 les dettes aux associés,
 le coût des provisions liées à la liquidation elle-même (frais de réviseur ou d'expert-comptable,
frais du notaire pour dresser le procès-verbal de l'assemblée générale, provisions pour les
impôts à payer en raison de la clôture anticipée...).
Le ministre interprète donc la notion de "passif" au sens le plus large.
Un nettoyage des dettes entre l'état et l'acte suffit
Selon le Ministre, il est d'ailleurs également satisfait à la condition si les dettes ressortant de l'état
résumant la situation active et passive ont été remboursées entre l'établissement de l'état et la décision
de dissolution de la société. Toutefois, ce point de vue ne semble pas coïncider avec le texte de la loi.
Alors que la notion de 'passif' réclamait une certaine interprétation, il n'en va pas de même pour le
renvoi à l'état résumant la situation active et passive. Sur ce point, la loi est très claire. A condition de
préparer convenablement le dossier de dissolution, établir un état pratique résumant la situation
active et passive ne devrait poser aucun problème.
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2. Donation de l'entreprise familiale: fiction de l'art. 7 du Code
flamand des droits de succession - Délai prolongé à 7 ans - Le
Ministre apporte des précisions
Depuis le 1er janvier 2012, vous pouvez, sous certaines conditions, bénéficier d'un
taux de 0% en Région flamande pour la donation de l'entreprise familiale (art. 140bis
et s. du C. fl. Enr.). La mesure remporte un franc succès depuis cette date. Le
Gouvernement flamand a également profité de cette occasion pour adapter le texte de
l'art. 7 du C. fl. Succ. En vertu de cette disposition, la donation de biens meubles qui a
été exonérée (lisez: sans devoir payer des droits de donation) est imposée à titre de
legs dans le régime des droits de succession au détriment du donataire si le donateur
décède dans les 3 ans suivant la donation. Tel peut notamment être le cas lorsqu'il est
fait usage de la technique du don manuel ou lorsqu'il est fait appel à un notaire
étranger. Le délai de 3 ans a été porté à 7 ans lorsque la donation exonérée a pour
objet l'entreprise familiale. Il règne toutefois une certaine confusion sur les cas
concrets qui sont désormais soumis à ce délai de 7 ans. Ainsi, on s'est demandé si ce
délai s'appliquait également à la donation de sociétés de patrimoine. Le Ministre
flamand des Finances a récemment dissipé cette zone d'ombre.
Délai prolongé à 7 ans en cas de donation de l'entreprise familiale
En introduisant le taux de 0%, le Gouvernement flamand avait l'intention d'encourager les
bénéficiaires à céder les entreprises et sociétés familiales par acte authentique. Si le délai du legs fictif
tel qu'organisé par l'art. 7 du C. Succ. n'est que de 3 ans, le risque de décès dans les 3 ans suivant la
donation non enregistrée est assurable à un coût relativement modique et de nombreuses cessions
d'entreprises et sociétés familiales sont donc réalisées - selon le Gouvernement - sans être soumises à
un quelconque droit d'enregistrement.
C'est pourquoi le Décret du 23 décembre 2011 (M.B. 30 décembre 2011, éd. 4) a prolongé le délai de 3
ans à 7 ans à partir du 1er janvier 2012 en Région flamande si la disposition à titre gratuit "porte
sur des actions et des actifs visés à l'article 140bis du C. Enr.".
La doctrine a toutefois - à raison - émis de vives critiques sur le passage ci-dessous des travaux
préparatoires: "Vu que la période suspecte élargie se rapporte aux actions et actifs visés à l'article
140bis du Code flamand des droits d'enregistrement, des avantages qui ne bénéficient pas de
l'exemption parce qu'ils en sont explicitement exclus sont également soumis à la période suspecte
élargie de sept ans, pour autant, naturellement, que cet acte n'ait pas été enregistré. Ainsi, des
avantages qui ne vont pas dans le sens de la politique poursuivie en vertu de l'article 140bis du Code
flamand des droits d'enregistrement se retrouvent également dans le champ d'application de l'article
7 du Code flamand des droits de succession. Les sociétés de patrimoine précitées seront par exemple
soumises à la période suspecte de sept ans, pour autant que cet acte n'ait pas été enregistré". 1
1
Amendement n° 17, Doc. Parl. Parl fl., 2011-12, n° 1326 /6, 25.
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Selon nous, le texte du décret a toujours été clair comme de l'eau de roche. L'art. 7, alinéa premier, in
fine C. fl. Succ. porte indubitablement sur les actions et actifs visés à l'art. 140bis. On peut donc
raisonnablement en conclure que seules les donations d'entreprises qui auraient normalement pu
bénéficier de l'exemption flamande si on les avait réalisées via un acte authentique passé en Belgique
sont visées par la période suspecte prolongée de 7 ans lorsqu'on réalise cette donation - pour quelque
raison que ce soit - en utilisant une technique de donation qui ne doit pas obligatoirement être
enregistrée. Toutefois, si les actifs ou actions n'entrent pas en ligne de compte pour l'exemption
flamande au moment de la donation et s'il y a donation via une technique de donation ne devant pas
être obligatoirement enregistrée (par ex. via un notaire néerlandais), seul le délai de 3 ans de l'art. 7 du
C. fl. Succ. est d'application.
Un passage des travaux préparatoires (n'étant même pas repris dans le commentaire du Décret) ne
peut selon nous donner une autre signification à un texte de loi limpide et non susceptible
d'interprétation.
Le Ministre met fin au débat !
Dans l'intervalle, le Ministre flamand des Finances a fait la clarté sur le sujet. Dans sa réponse du 11
janvier 2013 à une question parlementaire de Madame Griet Smaers n° 146 du 29 novembre 2012, le
Ministre a indiqué ce qui suit: "Le passage de la circulaire doit être interprété en ce sens que l'article 7
du C. fl. Succ. prolonge le délai à 7 ans si toutes les conditions de l'article 140bis du C. fl. Enr. sont
remplies. L'article 7 du C. fl. Succ. dispose expressément que le délai de trois ans est porté à sept ans
lorsqu'il s'agit d'actions et d'actifs visés à l'article 140bis du C. fl. Enr. Il ressort également de l'article
7 du C. fl. Succ. que les actions concernées doivent satisfaire à toutes les conditions de l'article 140bis
du C. fl. Enr., pour qu'il puisse y avoir prolongation du délai. Ainsi, la donation d'actions d'une
société qui satisfait à la condition de participation, mais qui n'exerce pas une activité industrielle,
commerciale, artisanale ou agricole ou une profession libérale ne tombera pas sous l'application du
délai prolongé de l'article 7 du C. fl. Succ. En effet, elle ne remplit pas toutes les conditions de l'article
140bis du C. fl. Enr. et ne peut donc bénéficier d'une exemption des droits d'enregistrement. S'il est
satisfait aux conditions précédentes, mais qu'il n'y a pas d'activité économique réelle, la donation ne
tombera pas non plus dans le champ d'application du délai prolongé de l'article 7 du C. fl. Succ., et
ce pour la même raison. La circulaire donne des explications sur la réglementation précitée, sans
naturellement porter préjudice à cette réglementation."
Le Ministre apporte donc les éclaircissements nécessaires et donne selon nous une interprétation
conforme à la loi.
Conclusion: affaire classée !
Prolongation non applicable aux créances
Il va de soi que lorsque des créances sont données en même temps que l'entreprise ou société familiale
via une donation non enregistrée, la prolongation de la période suspecte à 7 ans ne peut se rapporter
aux créances ainsi données parce qu'elles ne peuvent jamais bénéficier de l'exemption. On peut par
ailleurs le déduire de l'art. 7 du C. Succ. qui porte uniquement sur les 'actions' et 'actifs' et non sur les
créances.
Application éventuelle du régime de faveur des droits de succession
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Enfin, il convient de souligner que si une donation d'entreprise non enregistrée est intervenue dans la
période suspecte et que le donateur vient à décéder, cette donation sera soumise aux droits de
succession en application de l'art. 7 du C. fl. Succ. Toutefois, si l'entreprise ou la société satisfait aux
conditions visées à l'art. 60/1 et s. du C. fl. Succ. au moment du décès, les héritiers ont la possibilité
de demander une attestation à l'administration fiscale flamande en vue de l'application du taux de
succession flamand réduit de 3% ou 7% qui s'applique aux cessions d'entreprises et sociétés familiales
(pour autant, naturellement, que le critère de localisation en matière de droits de succession désigne la
Région flamande comme région compétente).
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3. Acheter des biens immeubles à Bruxelles: modification des règles
relatives à l'abattement fiscal
Si vous achetez un appartement ou une habitation situé(e) en Région bruxelloise,
vous avez droit à une réduction des droits de vente (également appelée 'abattement')
si certaines conditions sont remplies. Depuis le 1er janvier 2013, une de ces conditions
a été modifiée. Désormais, vous devez occuper le bien acheté sans interruption
pendant 5 années.
L'abattement bruxellois
Les personnes physiques ont droit à une réduction des droits de vente en cas d'achat d'un appartement
ou d'une habitation. L'avantage financier peut s'élever à € 7.500 voire même à € 9.375 si le bien
est situé dans une zone spécifique.
Les conditions sont les suivantes :
L'acheteur ou les acheteurs doivent être des personnes physiques. Les sociétés,
associations, fondations et autres sont donc exclues.
b. L'acheteur ne peut posséder la totalité en pleine propriété d'une autre
habitation ou d'un autre appartement. Il importe peu de savoir dans quel pays ou
quelle partie du monde cette autre habitation ou cet autre appartement se situe. S'il y a
plusieurs acheteurs, chaque acheteur pris isolément ne peut posséder la totalité en pleine
propriété d'une autre habitation ou d'un autre appartement. En outre, les acheteurs ne
peuvent posséder conjointement la totalité en pleine propriété d'une autre habitation ou
d'un autre appartement.
c. Le bien acheté doit être une habitation, un appartement ou un appartement sur
plan ou en construction situé(e) en Région de Bruxelles-Capitale. Sont donc exclus les
terrains à bâtir et les habitations sur plan ou en construction. En revanche, un bâtiment
qui ne peut encore être occupé au moment de l'achat mais qui sera transformé en
habitation ou appartement n'est pas exclu.
d. Tous les acheteurs doivent établir leur résidence principale à l'adresse du bien acheté
dans un délai de 2 ans à compter de l'enregistrement de l'acte de vente notarié ou à partir
de l'enregistrement du compromis de vente. À Bruxelles, on est censé avoir sa résidence
principale à une adresse donnée à partir du moment de l'inscription dans le registre de la
population ou des étrangers. Au moment de l'achat d'un appartement sur plan ou en
construction, le délai de 2 ans susmentionné est porté à 3 ans.
e. L'acheteur ou à tout le moins un des acheteurs doit conserver sa résidence principale
à l'adresse du bien acheté pendant une période ininterrompue de 5 ans à compter de la
date de l'établissement de la résidence principale dans l'habitation achetée ou dans
l'appartement acheté, donc à partir du moment de l'inscription dans le registre de la
population ou des étrangers.
Cette condition s'applique à toutes les ventes à partir du 1er janvier 2013. Auparavant, la
condition était plus souple : il suffisait de conserver sa résidence principale pendant le
a.
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délai de 5 ans susmentionné dans une des 19 communes de la Région de BruxellesCapitale et donc pas obligatoirement dans le bien acheté lui-même. Les compromis qui
datent de fin 2012 sont encore soumis à cette condition souple, sauf s'ils ont été signés
sous une condition suspensive (par exemple l'obtention d'un crédit) qui n'a été remplie
qu'en 2013.
Sanctions
Les sanctions suivantes sont prévues si certaines conditions n'ont pas été respectées:
a. Si l'acheteur ou un des acheteurs détient la totalité d'une autre habitation ou d'un autre
appartement, il faut restituer l'avantage obtenu avec en sus une amende équivalant à la moitié de
l'avantage obtenu. En cas de fraude, l'amende est égale à l'avantage obtenu. En règle générale, on
devra donc payer au fisc € 7.500 + € 3.750.
b. Si l'ensemble des acheteurs ou l'acheteur unique n'établi(ssen)t pas en temps utile sa/leur
résidence principale dans le bien acheté, il faut restituer l'avantage obtenu et payer en sus une
amende équivalant à un tiers de l'avantage obtenu. En cas de fraude, l'amende est égale à l'avantage
obtenu. Si la force majeure peut être prouvée, aucune amende n'est due. En règle générale, on devra
donc payer au fisc € 7.500 + € 2.500.
Si l'achat est réalisé par plus d'une personne et si, par exemple, seul un des trois acheteurs n'y établit
pas à temps sa résidence principale, il devra restituer l'avantage qu'il a obtenu (par exemple un tiers ou
€ 2.500) et payer une amende d'un tiers sur ce montant.
c. Si l'acheteur ou au moins un des acheteurs ne conserve pas sa résidence principale suffisamment
longtemps dans le bien acheté, seul l'avantage obtenu doit être restitué dans son intégralité sans
devoir payer une amende en supplément. Si la force majeure peut être prouvée, l'avantage peut être
maintenu.
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4. Fondation privée: une formule intéressante pour vous également?
Récemment, la Reine Fabiola s'est retrouvée sous les feux de l'actualité en créant une
fondation privée sous le nom 'Fons Pereos'. Elle y a apporté une partie de son
patrimoine dans le but de faire du mécénat au profit d'un certain nombre d'oeuvres
de bienfaisance ainsi que pour assurer le bien-être et la formation de ses (petit(e)s)neveux et nièces à long terme. Un tel dispositif constitue-t-il également une formule
(fiscalement) avantageuse pour vous?
Un but désintéressé au-delà de la mort
La fondation privée a vu le jour en Belgique dans le cadre de la nouvelle loi sur les ASBL du 2 mai
2002. Notre législateur a créé la fondation privée pour permettre à nos dirigeants d'entreprises, à
l'instar de ce qui se fait aux Pays-Bas, d'opérer une scission dans le cadre d'un scénario de succession
d'entreprise entre d'une part la propriété juridique et d'autre part la propriété économique des actions
d'une société commerciale, ce qu'on appelle la 'certification' des actions. En marge du contexte de la
certification, une fondation privée peut également être utile pour bon nombre d'autres finalités dans le
cadre de la planification successorale. La création d'une fondation privée permet en effet d'isoler un
patrimoine dans un but concret (désintéressé) au-delà de la mort. Notre législateur a lui-même donné
les exemples suivants dans le cadre des travaux parlementaires de la loi sur les fondations:





le maintien d'une collection d'œuvres d'art;
l'aide au développement d'une région;
la création d'un prix ou d'une œuvre (scientifique/culturel(le));
l'octroi de bourses d'études à des enfants et futurs petits-enfants ou dans le cadre de la
recherche scientifique ou médicale;
le maintien de l'intégrité d'éléments du patrimoine (par ex. la préservation et la restauration
d'un château avec parc de grande valeur historique/culturelle, mais tombant en ruines).
En outre, la fondation privée est également perçue dans certaines circonstances comme une forme
juridique appropriée pour que des soins continuent à être prodigués à un enfant handicapé après le
décès des parents.
Fiche juridique
La fondation privée peut être créée du vivant d'une personne par un acte authentique. On peut
également décider de ne la créer qu'au jour de sa mort, donc via un testament. Ce testament doit
également être rédigé par un notaire. Un élément essentiel est que la fondation ne peut procurer un
'gain matériel' aux fondateurs, aux administrateurs ou à toute autre personne. On entend par là un
'avantage matériel'. La notion de 'gain matériel' est un concept large qui couvre tout avantage
patrimonial direct. Une fondation privée ne peut pas non plus verser des bénéfices. Cette règle souffre
toutefois une exception notable, à savoir lorsque le versement de fonds à un tiers est précisément
l'objet de la fondation. Il suffit par exemple de songer à la fondation privée qui est créée pour subvenir
aux besoins d'un enfant (handicapé) ou - comme c'était partiellement l'objet de la fondation Fabiola pour assurer le bien-être et l'éducation de certains membres de la famille. Une fondation privée n'a ni
membres ni associés. Par conséquent, il n'y a pas non plus d'assemblée générale des membres comme
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dans une société ou une ASBL. Il y a seulement un conseil d'administration qui doit se composer d'au
moins 3 membres. En principe, la constitution d'une fondation va de pair avec la mise à disposition
d'un patrimoine. La loi ne fixe aucun seuil et n'exige donc pas de patrimoine minimum au moment de
la constitution de la fondation.
Il importe que le fondateur, en présence des héritiers réservataires (comme le conjoint, les enfants, les
parents) ne puisse en principe disposer à titre gracieux que d'une partie de son patrimoine, à savoir la
quotité disponible. Donc, une personne non mariée et sans enfant, comme un oncle ou une tante
isolé(e) à héritage, n'ayant donc pas d'héritiers réservataires (sauf si les parents ou l'un d'eux est/sont
encore en vie) peut disposer de tout son patrimoine et l'affecter en totalité à une fondation s'il ou elle le
souhaite. En revanche, ce n'est possible pour une personne mariée ou ayant des enfants qu'à
concurrence de la quotité disponible.
Cession définitive de votre patrimoine
Tout qui constitue une fondation doit savoir qu'il/elle cède définitivement le patrimoine qu'il/elle y
affecte. Dès que la fondation est créée, les éléments patrimoniaux destinés à la fondation quittent
définitivement le patrimoine du fondateur et sont exclusivement affectés à la réalisation du but
désintéressé choisi. En outre, la dissolution d'une fondation privée est une compétence exclusive du
pouvoir judiciaire. Ni les fondateurs ni les administrateurs ne peuvent décider la dissolution sans
l'intervention d'un juge. Cela s'explique par le fait que les tribunaux peuvent ainsi contrôler la
destination du patrimoine au moment de la dissolution. Lors de la dissolution de la fondation et de la
liquidation qui s'ensuit, aucun boni de liquidation n'est versé. En effet, il n'y a pas de membres. Après
la liquidation, le patrimoine final doit être donné à un but désintéressé qui doit être indiqué dans les
statuts. Toutefois, une exception importante est prévue à l'art. 28, 6° de la loi sur les fondations
privées. En effet, cet article prévoit la possibilité d'un droit de reprise en faveur des fondateurs ou,
après leur mort, de leurs ayants droit. Ce droit de reprise peut se rapporter à un montant (en espèces)
égal à la valeur des biens restant après la dissolution ou aux biens restants eux-mêmes. Pour que le
droit de reprise puisse être exercé, les conditions suivantes doivent être cumulativement remplies:
a) Seuls les biens que le fondateur lui-même a affectés à la réalisation du but de la fondation
peuvent être repris (donc les biens qu'il/elle a par ex. apportés au moment de la constitution
ou qu'il/elle a donnés ultérieurement).
b) Le but désintéressé de la fondation doit avoir été réalisé.
c) Les statuts doivent expressément prévoir la possibilité de reprise (clause de retour).
Formule fiscalement intéressante
La fondation privée présente un certain nombre d'avantages en matière de droits de donation et de
droits de succession, et constitue donc une formule très intéressante dans certains cas dans le cadre la
planification successorale. Le régime fiscal très avantageux de la fondation privée a d'ailleurs une
nouvelle fois été mis en évidence il n'y a pas si longtemps dans la décision anticipée du Service des
décisions anticipées du SPF Finances (Décision anticipée n° 2011.275 du 29 novembre
2011, www.fisconetplus.be; Rec.gén.enr.not., 2012, n° 4, n° 26.376). Si on prête un oeil attentif aux
faits qui sont à la base de cette décision fiscale, on constatera qu'ils sont étonnamment similaires à
ceux caractérisant l'affaire Fabiola...
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 Donation à la fondation
A l'exception du don manuel et du don bancaire, tout don (de biens meubles ou immeubles et aussi
bien entre vifs que par testament) à une fondation requiert une autorisation du Ministre de la Justice
ou de son représentant. Si le Ministre ne réagit pas dans les 3 mois à compter de la demande
d'autorisation, ce don est supposé être autorisé. L'autorisation n'est pas requise pour les dons d'une
valeur n'excédant pas 100.000 euros.
Qu'en est-il de la fiscalité de la donation à une fondation? Lorsqu'une personne (physique ou morale)
procède à un apport 'à titre gratuit' (à l'occasion de la constitution ou ultérieurement) ou à une
donation à une fondation privée, le droit de donation s'élève à seulement 7% (aussi bien en Flandre
qu'à Bruxelles et en Wallonie). Ce taux s'applique aux biens meubles comme aux biens immeubles.
Compte tenu du fait que des droits de donation à hauteur de 7% sont payés, la fiction de l'art. 7 du C.
Succ. ne trouvera pas à s'appliquer si le donateur vient à décéder dans les 3 ans suivant la donation. Il
n'y aura alors plus de droits de succession à payer.
Si vous estimez que des droits de donation de 7% sont encore trop élevés, vous pouvez décider, pour la
donation des biens meubles, d'opter pour un don manuel ou bancaire ou encore pour une donation via
un notaire étranger. Une telle donation peut en effet être exemptée de droits de donation. Toutefois, si
le donateur décède dans les 3 ans, des droits de succession devront être payés par la fondation sur le
montant donné en application de l'art. 7 du C. Succ. (mais ils ne seront pas trop élevés, voir plus loin).
 La fondation comme héritier
Une fondation peut parfaitement bénéficier d'héritages. A l'instar des donations, les legs supérieurs à
100.000 euros sont soumis à une autorisation ministérielle préalable.
En Flandre, le taux des droits de succession est de 8,8%. A Bruxelles, le taux de base est de 25%.
Lorsque la fondation privée est une personne morale qui a obtenu l'agrément fédéral dont il est
question aux articles 104 et 110 du Code des impôts sur les revenus (pouvoir de délivrer des
attestations fiscales en cas de dons), le taux applicable à Bruxelles est de 12,5%. En Wallonie, un taux
de droits de succession de 7% est en vigueur.
Ces faibles taux de droits de succession offrent des perspectives intéressantes. L'oncle/la tante à
héritage sans enfant peut par exemple créer une fondation privée avec un patrimoine très limité de son
vivant. Entre-temps, il/elle vit de ses moyens financiers et peut les dépenser comme bon lui semble.
Il/elle ne doit donc pas se dépouiller de ses avoirs avant son décès comme pour une donation entre
vifs. Si l'oncle/la tante à héritage rédige en même temps un testament et y désigne la fondation privée
comme légataire universel, cette dernière héritera de son patrimoine le jour de son décès aux taux de
succession avantageux susmentionnés et l'administration de la fondation veillera à ce que ce
patrimoine reçoive l'affectation souhaitée (comme un versement aux neveux ou nièces bénéficiaires, le
maintien ou l'entretien d'un patrimoine immobilier familial, des versements à une ou plusieurs
oeuvres de bienfaisance, etc.).
 Versements aux bénéficiaires
Les versements effectués du vivant du fondateur par la fondation privée aux bénéficiaires désignés
dans les statuts n'entraînent pas la perception de droits de donation. En effet, le conseil
d'administration de la fondation exécute simplement ce qui figure dans l'acte constitutif (lisez: la
description de l'objet statutaire) de la fondation et n'agit donc pas dans un but de donation.
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Et quid des versements effectués par la fondation aux bénéficiaires après le décès du fondateur? Des
droits de succession sont-ils dus sur de tels versements? La réponse est négative, comme en a décidé le
service des décisions anticipées dans sa décision précitée du 29 novembre 2011 ! Elle estime que la
fiction de l'art. 8 du C. Succ., qui soumet en principe les 'stipulations au profit d'un tiers' au droit de
succession, ne s'applique pas à de tels versements par des fondations privées. On considère que
l'application de l'art. 8 du C. Succ. suppose un contrat. Les bénéficiaires d'une fondation privée
obtiennent toutefois ces versements suite à un acte unilatéral (l'acte constitutif) et non à la suite d'un
contrat conclu par le fondateur ou l'apporteur, de sorte que l'art. 8 du C. Succ. ne trouve pas à
s'appliquer. Des droits de succession ne peuvent être dus que si le fondateur a effectué des apports ou
des donations à la fondation qui n'ont pas été soumis au droit de donation (comme les dons bancaires
ou les dons manuels) et s'il est ensuite décédé dans les 3 ans suivant une telle donation exonérée. On
applique alors la fiction de l'art. 7 du C. Succ. qui impose une telle donation comme un legs en matière
de droits de succession.
 Dissolution de la fondation avec reprise des biens
Comme indiqué plus haut, les statuts de la fondation privée peuvent prévoir que le fondateur ou ses
ayants droit puissent reprendre les biens apportés dans la fondation privée ou leur contrevaleur si la
fondation privée a atteint son but. Le service des décisions anticipées estime qu'une reprise par le
fondateur lui-même, donc de son vivant, n'entraîne pas la moindre imposition. Les biens repris feront
partie de la succession du fondateur, puis seront soumis aux droits de succession, sauf si le fondateur
dispose de ces biens d'une autre manière dans l'intervalle.
Imaginons que les ayants droit reprennent les biens apportés après le décès du fondateur. Dans ce cas,
ils sont tenus de déposer une déclaration complémentaire de succession du fondateur en application
de l'article 37, 2° du C. Succ. et des droits de succession supplémentaires seront dus.
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éventuellement prendre un rendez-vous par téléphone avec un de nos juristes ou notaires.