Le dépistage du cancer du sein en Suisse

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Le dépistage du cancer du sein en Suisse
Le dépistage du cancer du sein en Suisse
r
Avis d’expert, D Chris J. M. de Wolf
Consultant en Santé publique à l’European Breast Cancer Network (EBCN)
ADSAN: Agence pour le développement et l'évaluation des politiques de santé
Document préparé pour la Ligue suisse contre le cancer
Synthèse
En raison du vieillissement de la population, l'incidence du cancer ne cesse de progresser à l'échelle
internationale. En Europe, le cancer du sein est le deuxième cancer le plus fréquent après le cancer
colorectal. Lorsqu'elle est à un stade précoce et localisée, cette affection n'est pas mortelle, mais en
cas de métastases à distance, l'espérance de vie moyenne est de deux ans. Le dépistage détecte les
cancers à un stade précoce, souvent non métastasé, ce qui permet d'améliorer considérablement le
pronostic de survie à long terme et la qualité de vie des patientes.
Stimulés par une résolution du Parlement européen encourageant les Etats membres à offrir aux
femmes de la tranche d’âge cible une mammographie de qualité dans le cadre d'une procédure de
dépistage organisé, de nombreux pays ont mis en place des examens systématiques au niveau national ou régional. En 2001, une revue Cochrane a remis en question la légitimité des conclusions des
essais de dépistage, mais la communauté internationale a rejeté cette position l'année suivante. Aujourd'hui, les pays pratiquant la mammographie de dépistage depuis longtemps affichent des taux de
mortalité par cancer du sein en franche diminution, démontrant que la réduction de mortalité annoncée dans les études est atteignable dans le cadre d’un programme de dépistage organisé.
Pratiquement toute intervention d'ordre médical a ses inconvénients. Pour la mammographie, il s'agit
le plus souvent des résultats faux-positifs ou faux-négatifs, de la dose de radiation, des traitements
inutiles et de troubles psychologiques comme l'anxiété. Appliqué méticuleusement, un programme
d'assurance qualité peut minimiser ces effets indésirables, sans pour autant les éliminer complètement.
En Suisse, le cancer du sein représente 8510 années potentielles de vie perdue (APVP) avant 70
ans, soit plus que toute autre cause de mortalité. Une forte proportion de ces APVP, qui s’élèvent en
moyenne à 18,8 par femme, portent sur la tranche d'âge 50-69 ans, laquelle représente 36% de
l’ensemble des décès par cancer du sein. Une réduction de 25% de la mortalité dans cette tranche
d’âge permettrait de sauver au moins 120 femmes chaque année.
La littérature internationale démontre l'intérêt du dépistage mammographique par rapport à d’autres
interventions médicales en termes de coût par année de vie sauvée. Un programme de dépistage à
l’échelle nationale est estimé à CHF 50 millions, soit 1‰ de l'ensemble des dépenses de santé. Dans
l'absolu, une telle initiative peut déboucher sur une réduction de 0,5% de la mortalité féminine. A
l’heure actuelle, aucune autre intervention médicale n’est susceptible d’offrir de tels résultats.
1
Introduction
Professionnels de la santé, hommes politiques et prestataires de services suisses ne semblent pas
d'accord quant aux avantages et au rapport coût/bénéfice du dépistage du cancer du sein. En Romandie, les cantons ont décidé d'offrir un dépistage de qualité à toutes les femmes âgées de 50 à 69
ans. En Suisse alémanique, au contraire, aucun projet n’a pu aboutir à un consensus.
Ce document présente les derniers développements à l'échelle internationale en matière de dépistage, autant d'arguments pour reconsidérer la position de plus en plus isolée de la Suisse alémanique
dans ce domaine.
Aspects biologiques du cancer du sein importants dans le cadre de programmes de dépistage
Pour comprendre l'intérêt d’une détection précoce, il est essentiel de connaître le mode de progression du cancer du sein. Le terme de «cancer» désigne de manière générale une croissance incontrôlée de la cellule. Son nom dépend de son emplacement anatomique. L'incidence des cancers humains ne cesse de progresser en raison de l'augmentation de l'espérance de vie. La plupart des cancers étant liés à l'âge, cette affection est en train de rattraper les maladies cardiovasculaires en tant
que première cause de mortalité.
Une tumeur est généralement décrite comme une prolifération pathologique liée à des mécanismes
biochimiques complexes et fondamentaux régulés par les gènes. Elle est composée d'une masse tissulaire normale, à laquelle viennent s'ajouter des cellules cancéreuses issues de la prolifération d'une
seule cellule ayant subi une transformation maligne. Au niveau cellulaire, la croissance exponentielle
n
de la tumeur peut être calculée via l'équation 2 , où n représente le nombre de duplications intervenues dans un intervalle de temps donné. Cependant, cette croissance exponentielle n’est pas infinie.
Dans un premier temps, la croissance de la tumeur dépend de la disponibilité en apports nutritionnels
externes. A un stade plus avancé, c'est la néovascularisation du tissu tumoral qui est le facteur de
régulation. La croissance d'une tumeur de type solide comme le cancer du sein est donc tributaire de
facteurs externes tels que la vascularisation, l'apoptose (mort cellulaire programmée), la libération de
facteurs de croissance, la disponibilité de nutriments et d'oxygène et la densité du tissu tumoral envi123
ronnant .
L'organisation d'une tumeur solide est liée à la vitesse de néovascularisation. Les cellules externes de
la tumeur disposent d'assez de nutriments pour poursuivre leur croissance exponentielle, mais dans
les parties plus centrales, la compétition devient plus forte. Résultat, des cellules meurent, se nécrosent, et des groupes de cellule se détachent du tissu conjonctif. Ces petits groupes peuvent alors migrer via le système lymphatique et évoluer en métastases à distance.
Un cancer primaire du sein, sans métastase, n’est pas une maladie mortelle. En revanche, si elles
sont retenues par les filtres de la circulation sanguine (foie, moelle osseuse, poumons et cerveau), les
métastases retrouvent toutes les conditions nutritionnelles dont elles ont besoin pour se développer et
interférer avec les fonctions vitales de l'organisme.
La probabilité de métastases du cancer du sein augmente considérablement pendant la période de
croissance charnière où la tumeur passe de 0,5 à 2 cm. Ceci a pour cause la perturbation de la croissance, la malnutrition, la nécrose et la désintégration des cellules. Les cancers du sein sont classés
en quatre stades (T1-T4) en fonction du degré d'invasion, de la taille, de l’envahissement des ganglions lymphatiques et des métastases. La meilleure stratégie/thérapie pour éviter la formation de métastases consiste à détecter et éliminer les cancers à un stade précoce. Car en cas de métastases à
distance, l'espérance de vie moyenne est de deux ans.
La modification de la répartition de ces quatre stades est appelée amélioration du stade de découverte (stage shifting). Cette dernière est observée dans beaucoup de programmes de dépistage organisés. Par ailleurs, les patientes dont le cancer a été détecté par dépistage organisé présentent, semble-t-il, des chances de survie significativement plus élevées, indépendamment de l’amélioration du
stade de découverte. Ainsi la méthode de détection serait un facteur de pronostic important.
1
Byrne HM. The effect of time delays on the dynamics of a vascular tumor growth. Math Biosci. 1997; 144: 83–117
Byrne HM, Chaplain MA. Growth of non necrotic tumors in the presence and absence of inhibitors. Math Biosci. 1995; 130:
151–181
3
Wasserman R, Acharya R. A patient-specific in vivo tumor model. Math Biosci. 1996; 136: 111–140
2
2
L’amélioration du stade de découverte et la méthode de détection expliquent les meilleurs résultats
45
des traitements, qui nécessitent moins fréquemment des interventions chirurgicales mutilantes .
Des politiques nationales basées sur des preuves scientifiques
Le lien entre la baisse de la mortalité par cancer du sein et le dépistage mammographique a été analysé de manière rigoureuse dans le cadre de sept essais randomisés et contrôlés en Suède, au
Royaume-Uni, au Canada et aux Etats-Unis, ainsi que dans plusieurs études cas-témoins. Ces études
de dépistage mammographique ont établi de manière concluante que le dépistage organisé entraînait
une réduction substantielle de la mortalité par cancer du sein. La méthodologie et la qualité des différents programmes sont bien documentées. Sur la base de ces résultats, de nombreux pays ont mis en
œuvre des programmes de dépistage du cancer du sein à l'échelle nationale.
Au cours des 15 dernières années, 9 pays européens ont décidé de lancer des programmes nationaux de dépistage du cancer du sein (Belgique, Luxembourg, France, Espagne, Irlande, Norvège,
Hongrie, République tchèque et Allemagne), emboîtant ainsi le pas aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, à
la Finlande, à la Suède et à l'Islande. Par ailleurs, le Portugal, l'Italie et le Danemark ont mis en place
d'importants programmes régionaux. De leur côté, la Grèce et l'Autriche possèdent deux projets pilotes. En d'autres termes, en 2005, les 15 premiers Etats membres de l'UE disposaient d'un programme
national ou d'au moins plusieurs programmes régionaux.
Les cartes suivantes illustrent l'évolution de la couverture européenne.
Systematic breast screening in Europe
Situation
in 2004
Situation
in 1990
Coverage of target population:
0%
1-33%
34-66%
67-100%
Dépistage systématique du cancer du sein en Europe, carte: EBCN network
4
Elkin EB, Hudis C, Begg CB, Schrag D. The effect of changes in tumor size on breast carcinoma survival in the U.S.: 1975–
1999. Cancer. 15 septembre 2005; 104 (6): 1149–1157
5
Shen Y, Yang Y, Inoue LY, Munsell MF, Miller AB, Berry DA. Role of detection method in predicting breast cancer survival:
analysis of randomized screening trials. J Natl Cancer Inst. 17 août 2005; 97 (16): 1195–1203
3
En juin 2003, le Parlement européen a adopté une résolution importante sur le cancer du sein dans
l’UE (P5_TA(2003)0270). Cette résolution invite les Etats membres à proposer un dépistage, un diagnostic, un traitement et un suivi de qualité à toutes les femmes européennes, quels que soient leur
lieu de résidence, leur statut social et leur niveau de formation. Elle établit par ailleurs des normes de
qualité pour le dépistage mammographique, le traitement et l'établissement d'unités spécialisées
conformément aux lignes directrices européennes. L'application de cette résolution sera évaluée en
2008.
Après de longues discussions, l'Allemagne a décidé de mettre en œuvre un programme de dépistage
national, muni d’un programme d’assurance qualité impliquant 80 unités de dépistage soutenues par
plusieurs centres de référence (jusqu’à 6). Cette décision a été approuvée en décembre 2003 par la
Gemeinsamer Bundesausschuss. L'implémentation échelonnée et les formations complémentaires
destinées aux professionnels de la santé sont régies par un bureau de coordination nationale, à Cologne.
Le débat international de 2001 à 2002
A l'automne 2001, la Cochrane Library et le Lancet ont publié les résultats d'une revue systématique
des essais randomisés de détection précoce du cancer du sein par mammographie. Deux scientifiques danois y estimaient que le dépistage mammographique ne se justifiait pas, car rien ne prouvait
clairement qu'il réduisait la mortalité. Pour eux, la mortalité par cancer du sein constituait un critère de
jugement peu fiable, favorisant le dépistage et devant être remplacé par la mortalité toutes causes. Et
d'ajouter que cette pratique n’avait aucun impact en termes de survie. Ce thème a fait couler beaucoup d'encre dans la littérature scientifique et la presse.
Car la revue Cochrane soulevait une question importante: la mortalité par cancer du sein est-elle un
critère de jugement valable pour déterminer l'efficacité du dépistage du cancer du sein? Cette interrogation d'ordre épidémiologique est liée à la conception, à l'analyse et aux difficultés méthodologiques
des essais randomisés de dépistage.
La quasi-totalité des organismes de santé du monde, notamment l'American Cancer Society, les
conseils nationaux de la santé suédois et danois et l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), ont
rejeté l’allégation des auteurs danois. Tous ces organismes ont conclu qu'il était exagéré de considérer la mortalité par cancer du sein comme un critère de jugement peu fiable favorisant le dépistage. La
revue Cochrane indiquait il est vrai certaines sources possibles de biais dans les études, mais les auteurs n’apportaient pas la preuve de biais importants en faveur du dépistage. La thèse selon laquelle
la mortalité par cancer du sein doit être remplacée par la mortalité toutes causes en tant que premier
critère de jugement a elle aussi été rejetée. Notons au passage que cette même revue Cochrane rap6
porte dans ses conclusions une réduction statistique de 20% de la mortalité par cancer du sein .
La controverse a pris fin en mars 2002, lorsqu'un groupe de travail de 24 experts issus de 11 pays
réuni par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) de l'OMS a conclu que les essais
effectués avaient suffisamment fait la preuve de l'efficacité du dépistage mammographique chez les
femmes âgées de 50 à 69 ans. Chez celles ayant choisi de participer aux programmes de dépistage,
la réduction de la mortalité par cancer du sein a été évaluée à environ 35%.
Cette conclusion ne semble pourtant pas avoir atteint le cœur de la communauté médicale suisse.
Quatre ans plus tard, certains professionnels de la santé rappellent encore qu'une méta analyse a
7
démontré le manque de légitimité du dépistage du cancer du sein . Comment cela est-il possible dans
un pays où le corps médical est d'ordinaire à la pointe du progrès?
6
Olsen O, Gøtzsche PC. Screening for breast cancer with mammography (Cochrane Review). Cochrane Library, nr 4, 2001
GDK-Notiz: http://www.gdk-cds.ch/fileadmin/pdf/Gesundheitsstrategien/Praevention/Krebspraevention/Notiz-BrustkrebsScreening-d.pdf
7
4
Complexité et justification scientifique
Soulignons ici que les essais randomisés sur le dépistage mammographique comptent parmi les données qui ont fait l’objet des analyses les plus fréquentes et les plus poussées dans l'histoire de la recherche sur le cancer. Ces études ont des limitations méthodologiques, en partie à cause des énormes défis logistiques qu'implique la réalisation d'essais de cette nature. En rejetant ces essais, nous
remettrions en question toutes les preuves scientifiques apportées par la recherche sur le cancer.
Si l’efficacité des essais est établie, l'étape suivante consiste alors à démontrer que le dépistage de
masse peut atteindre les mêmes résultats en conditions de routine que les essais réalisés en situation
idéale. Aujourd'hui, la Suède, le Royaume-Uni et les Pays-Bas disposent de données suffisantes sur
les femmes dépistées et traitées pour prouver qu’un dépistage systématique et un traitement précoce
se traduisent par une réduction de la mortalité.
•
•
•
Suède: les programmes de dépistage organisés dans 7 comtés ont couvert 33% de la population
et entraînés une réduction de 40 à 45% de la mortalité par cancer du sein chez les femmes dépis8
tées .
Royaume-Uni: le NHS Breast Screening Programme met en avant une baisse de la mortalité par
9
cancer du sein d’environ 24% dans la tranche 55-69 ans .
Pays-Bas: le rapport 2005 de la LETB XI, l'équipe d'évaluation nationale néerlandaise du dépistage du cancer du sein, indique une réduction statistiquement significative de 25,5% de la mortali10
té par cancer du sein (21,5-32,2%) dans la tranche d’âge 55-74 ans .
Le rôle respectif du dépistage et du traitement dans la baisse de la mortalité par cancer du sein a fait
l'objet d'études. Dernièrement, un article du New England Journal of Medicine (NEJM) indiquait que la
réduction de la mortalité s’explique à 46% (28-65%) par le dépistage mammographique, l'autre moitié
11
par les thérapies adjuvantes . Il serait très intéressant de connaître le coût annuel total de ces thérapies adjuvantes afin d’établir une comparaison avec les coûts du dépistage.
Avantages et inconvénients: un équilibre délicat
L'évaluation des programmes de dépistage est devenue une branche extrêmement spécialisée de la
recherche évaluative. Elle prend en compte les améliorations potentielles et les conséquences négatives sur la santé des patients ainsi que le rapport entre ces deux composantes.
Selon une étude de simulation menée aux Pays-Bas en 2001, un programme de dépistage accompagné d’un suivi intégral peut entraîner, dans le cas d’une performance optimale, une réduction de la
mortalité d'environ 27% (20-35%) chez les participantes dont le cancer a été détecté à un stade précoce. Chez les 73% restant, même si l'affection a été identifiée quelques années plus tôt, les chances
de survie restent inchangées. Même sans prendre part au programme, 48% des femmes recevront un
traitement suffisamment tôt pour empêcher la propagation de la maladie. Cependant, certaines de ces
patientes ont désormais la possibilité d'opter pour une chirurgie mammaire conservatrice, chose impossible en cas de diagnostic plus tardif. Par ailleurs, 18% des femmes décéderont malgré la précocité de la détection. Enfin, sans programme de détection, 7% auraient ignoré qu'elles avaient le cancer
12
du sein puisqu'elles seraient mortes d'une autre maladie avant qu'il ne se manifeste cliniquement . Il
existe un autre groupe non négligeable, celui des patientes dont le cancer du sein se développe cliniquement entre deux dépistages, malgré les contrôles réguliers par mammographie. Ces cancers, dont
la plupart sont inéluctables compte tenu du niveau technologique actuel, entraînent d'énormes troubles émotionnels, voire des suites juridiques.
8
Effect of service screening mammography on population mortality from breast carcinoma. Stephen W. Duffy et al. Cancer.
2002 Aug 1;95(3):458-69.
9
Analysis of benefit:risk ratio and mortality reduction for the UK Breast Screening Programme. J R Beckett, C J Kotre, J S
Michaelson, British Journal of Radiology (2003) 76, 309-320
10
LETB XI (Landelijk Evaluatie Team voor Bevolkingsonderzoek naar Borstkanker): Fracheboud J, Groenewoud JH, Boer R,
Broeders MJM, Baan CA, Verbeek ALM et al. Erasmus Universiteit Rotterdam, instituut maatschappelijke gezondheidszorg, in
press 2006
11
Effect of Screening and Adjuvant Therapy on Mortality from Breast Cancer
Berry D. A., Cronin K. A., Plevritis S. K., Fryback D. G., Clarke L., Zelen M., Mandelblatt J. S., Yakovlev A. Y., Habbema J. D.
F., Feuer E. J., the Cancer Intervention and Surveillance Modeling Network (CISNET) Collaborators. N Engl J Med 2005;
353:1784-1792, Oct 27, 2005.
12
Breast cancer screening in the Netherlands. de Koning, HJ, Fracheboud J, Maas, PJ van der. The Breast 2001, 10. 12-14
5
Certes, la réduction de la mortalité représente une formidable avancée, qui compense largement les
effets indésirables. Mais l’équilibre reste fragile. Pour que la pratique offre d’aussi bons résultats que la
théorie, un programme de dépistage doit obéir à une organisation sans faille assortie d'un système de
contrôle de qualité élaboré et d'une évaluation exhaustive de l'efficacité.
Dans le cadre des programmes de dépistage, les paramètres de radiation sont enregistrés et les
mammographies sujettes au principe ALARA (as low as reasonably attainable = doses aussi faibles
que possible). Aux Pays-Bas, une étude sur la radiation dans le programme de dépistage national
montre que, si les risques sont très faibles, les doses de radiation ne sont pas à négliger. Ainsi, pour la
tranche 50-69 ans, à raison de 2mGy par cliché tous les deux ans, le rapport entre les décès induits par la
13
radiation et ceux évités par la détection précoce s'élève à 1 pour 242 .
En Suisse, les femmes se voient souvent prescrire une mammographie par leur gynécologue ou leur médecin généraliste. Une mammographie de dépistage individuel n’étant pas à la charge de l’assurance-maladie,
on établit une demande de mammographie diagnostique. Beaucoup plus onéreux, ce dépistage opportuniste
ne répond pas à des critères de performance tels que le taux de rappel, la valeur prédictive positive (VPP)
de la biopsie chirurgicale et le taux de détection du cancer. La compression du sein, la dose de radiation
et les résultats faux-positifs ou faux-négatifs ne se limitent pas au dépistage organisé. Leur occurrence dans
le cadre d’un dépistage individuel n'a jamais fait l'objet d'études.
Aucune intervention médicale n'est dépourvue de risques et la mammographie présente, pour l'instant, le
meilleur rapport coût/efficacité dans la détection des signes précoces du cancer. Le dépistage mammographique organisé consiste à sélectionner des personnes à risque, ce qui le différencie de la mammographie
diagnostique. L'objectif est de réduire la mortalité au sein d’une population et non d'opérer des diagnostics
individuels. Les femmes invitées à participer au dépistage ne sont pas des patientes, mais bien des
consommatrices ayant le droit d'être informées. Les professionnels de la santé, les fournisseurs de prestations et les autorités sanitaires sont des sources d'informations essentielles, mais pas uniques. Chaque
14
femme a aussi la responsabilité de se renseigner par elle-même .
Risque absolu ou risque relatif?
Pour comprendre la causalité d'une maladie et décrire l'impact des facteurs de risque, l'épidémiologie
fournit deux mesures: le risque absolu et le risque relatif. Toutefois, ces mesures ne donnent pas une
indication claire du facteur de risque au niveau de la population puisqu'elles ne tiennent pas compte
de sa prévalence. Or pour le cancer du sein, cette prévalence est considérable: à l'âge de 80 ans, une
femme sur 8 à 10 aura eu un diagnostic de cancer du sein.
La perception du risque dépend tout particulièrement de l'angle sous lequel les informations sont livrées. C'est notamment le cas avec les risques relatif et absolu. Par exemple, si une intervention fait
passer de 20 à 15% le risque d’une issue défavorable, la réduction du risque absolu est de 5% et la
réduction du risque relatif de 25%. Toujours est-il que l'angle de présentation ne change en rien l'efficacité de l'intervention. Dans la littérature scientifique, c'est le risque relatif qui est généralement utilisé, notamment pour les essais de médicaments.
Les avantages et inconvénients des mammographies de dépistage biennales ont été exprimés en
nombres absolus sur la base des données récoltées dans le cadre du programme de dépistage du
15
cancer du sein (BreastScreen) mis en place en Australie . Ces calculs montrent les effets de dépistage pour 1000 femmes dépistées sur une période de 10 ans. Au total, 167 à 242 femmes (suivant
l'âge) ont reçu un résultat anormal; 56 à 64 ont subi au moins une biopsie; 18 à 26 se sont vu détecter
un cancer invasif; enfin, 5 à 6 avaient un carcinome canalaire in situ (CCIS). Il y a eu davantage de
cancers du sein diagnostiqués (invasifs et CCIS) chez les femmes ayant bénéficié du dépistage que
chez les autres. Sur une période de 10 ans et pour 1000 femmes, il y a eu deux fois (50 ans), trois fois
(60 ans) et deux fois (70 ans) moins de décès par cancer du sein chez les femmes ayant choisi le dépistage que chez celles l'ayant refusé.
13
Radiation risk of mammography related to benefit in screening programmes: a favourable balance? Beemsterboer PM,
Warmerdam PG, Boer R, de Koning HJ. J Med Screen. 1998;5(2):81-7.
14
Recommandations pour une meilleure information sur le cancer du sein. Bressoud D., Casabianca A., De Wolf C., Jemelin C.
Medecine & Hygiene, 2430, mars 26 2003.
15
Model of outcomes of screening mammography, information to support informed choices. Alexandra Barratt, Kirsten Howard,
Les Irwig, Glenn Salkeld and Nehmat Houssami BMJ 2005;330;936
6
Cette étude nous montre qu’au bout de 10 ans, 2300 à 3200 cancers sont détectés par dépistage
pour 100 000 femmes âgées de 50 à 70 ans, ce qui équivaut à 250 morts évitées.
Le calcul des effets du dépistage sur une période de 10 ans s'obtient par cumul alors que la réduction
de la mortalité n'est quantifiable qu'au bout d'un certain temps. Pendant les premières années, la réduction de la mortalité n'est pas mesurable, mais cet effet est cumulatif et devient de plus en plus fort
au fil des ans. Cela explique les bénéfices plus élevés obtenus dans les programmes de dépistage
16
établis depuis longtemps comme dans l’étude de Tabar , portant sur l’un des programmes les plus
anciens.
Le programme de dépistage néerlandais est soumis à une condition spécifique fixée au moment de sa
mise en place. Il est ainsi établi que le programme sera arrêté en 2015 (27 ans après son lancement)
si la mortalité par cancer du sein n'a pas chuté d'au moins 700 femmes par an. Les projections actuelles (LETB XI) suggèrent que cet objectif sera atteint.
120
100
80
- 2 5.5%
60
LETB, 2005; taux de mortalité pour 100 000 femmes
Taux de mortalité par cancer du sein observé aux Pays-Bas (en gras), projeté par MISCAN (modèle de simulation) avec (courbe en pointillés) et sans (courbe fine continue) dépistage chez les femmes âgées de 55 à 74 ans
sur la période allant de 1986 à 2004
Conséquences positives des programmes de dépistage systématique
La réduction de la mortalité a toujours été considérée comme le seul résultat digne d'intérêt des programmes de dépistage. Pourtant, les tumeurs détectées par dépistage sont généralement plus petites, moins susceptibles d'entraîner une invasion vasculaire et de moindre degré histologique (ayant
trait à la structure microscopique des tissus). On a en outre le plus souvent affaire à des carcinomes
canalaires in situ (CCIS) sans composante invasive. Les récepteurs œstrogènes ont plus de chances
d'être positifs et l'envahissement ganglionnaire a tendance à être moindre. Pour soigner les cancers
du sein détectés par dépistage, on a plus souvent recours à des thérapies locales qu'à des thérapies
17
systémiques . L'amélioration du stade de découverte induite par le dépistage a permis d’améliorer la
survie à cinq ans. Et les femmes affirment souvent qu'un résultat négatif les rassure dans la mesure
où il souligne l'absence de toute anomalie.
16
Beyond Randomized Controlled Trials. Tabar L et al. Cancer 2001, 1724-31
Clayforth C, Fritschi L, McEvoy S, Byrne MJ, Wylie E, Threlfall T, Sterrett G, Harvey JM, Jamrozik K. Assessing the effectiveness of a mammography screening service. ANZ J Surg. 2005 Aug;75(8):631-6
17
7
Pour la société, les conséquences positives du dépistage systématique résident dans l'amélioration
qualitative des résultats radiologiques. Comme c’est le cas dans la plupart des procédures médicales,
les progrès des radiologues sont liés au volume de clichés lus chaque année ainsi qu'à la qualité du
positionnement et des films. Le seuil d'interprétation optimal se situe entre 2000 et 5000 mammogra18
phies par an , une quantité rarement atteinte par un radiologue dans le cadre de mammographies
diagnostiques. Le suivi et la répercussion des résultats médicaux du programme de dépistage sont
essentiels à l'amélioration de la qualité et de l'efficacité. Les programmes de dépistage organisé ont
également renforcé le souci de qualité en matière de diagnostic et de traitement du cancer du sein.
En tant qu'action sanitaire publique, un programme de dépistage peut être considéré comme un outil
de maîtrise des dépenses de santé. Une mammographie de dépistage est un produit médical à prix
fixe dont l'objectif de qualité est bien défini. Les taux de participation annuels pouvant être estimés, il
est possible de calculer des budgets réalistes. Les programmes de dépistage néerlandais et britanniques
font probablement partie des rares exceptions pour lesquelles les dépenses sont restées dans les marges
prévues il y a 10 ans.
Les statistiques en Suisse
En Suisse, le cancer du sein est la première cause de mortalité par cancer chez les femmes. En
2002, 1340 femmes en sont mortes. Le cancer du sein est la deuxième cause la plus fréquente de
mortalité par cancer dans la population. Chez l’homme, c’est le cancer du poumon qui occupe la première place. Le cancer du sein représente 8510 années potentielles de vie perdue (APVP), le chiffre
le plus élevé parmi toutes les causes de mortalité. Aucune maladie n'approche cette statistique – en
considérant que le suicide n'est pas une maladie à proprement parler.
Si la baisse de la mortalité est un aspect essentiel du dépistage du cancer du sein, la réduction des
APVP est peut-être beaucoup plus importante, car la plupart d’entre elles sont à mettre sur le compte
19
de nombreux décès dans la tranche d’âge 50-69 ans, soit 478 femmes (36%) . L’exemple d’autres
pays nous montre que l’on peut envisager de manière tout à fait réaliste une réduction de la mortalité
de 25% dans cette tranche d’âge. Cela correspond à 120 vies sauvées dans la tranche d’âge bénéficiant d’un dépistage systématique. La comparaison des coûts par année de vie sauvée confirme l'in20 21
térêt du dépistage mammographique par rapport à d’autres interventions médicales
.
Le coût du dépistage par mammographie en Suisse
Trois cantons (Vaud, Valais, Genève) offrent un programme de dépistage à leurs habitantes depuis
1999. Fribourg s’est lancé en 2004, le Jura en 2005. Sur la base des rapports annuels de ces programmes, voici les coûts par femme dépistée pour le troisième tour biennal de dépistage dans les
cantons de Vaud, du Valais et de Genève. Pour le canton de Fribourg, le programme n’ayant démarré
qu’en 2004, les coûts sont calculés à partir de la participation enregistrée jusqu'en décembre 2005. Le
Jura, quant à lui, ne disposait pas encore de données exploitables. Rappelons que les taux de participation augmentent régulièrement dans les premières années d’un programme.
Canton
Vaud
Valais
Genève
Fribourg
Tour de
dépistage
e
3
e
3
e
3
re
1
Taux de
participation
Coût de la
mammographie*
48,8%
61,5%
30,1%
32,6%
140
110
200
143
Coût total
du tour de
dépistage
(2 ans)*
6 350 656
3 536 500
4 416 600
1 895 740
Coût approximatif par
femme dépistée*
198.61
194.60
365.52
245.75
Coût approximatif par femme
dépistée à 70%
de participation*
180.51
186.56
251.17
191.69
*tous les prix sont indiqués en francs suisses (CHF)
18
European guidelines for quality assurance in breast cancer screening and diagnosis – fourth edition ISBN 92-79-01258-4
Statistique des causes de décès 2002. Office fédéral de la statistique (OFS)
Effect of screening for cancer in the Nordic countries on deaths, cost and quality of life up to the year 2017, Hristova L,
Hakama M. Acta Oncol. 1997;36 Suppl 9:1-60.
21
Breast cancer screening and cost-effectiveness; policy alternatives, quality of life considerations and the possible impact of
uncertain factors. de Koning HJ, van Ineveld BM, van Oortmarssen GJ, de Haes JC, Collette HJ, Hendriks JH, van der Maas
PJ. Int J Cancer. 1991 Oct 21;49(4):531-7.
19
20
8
Les variations de coûts par femme dépistée s'expliquent par la disparité des taux de participation et
des régimes de remboursement dans chaque canton. Dans les cantons de Fribourg et du Jura, les
remboursements s'effectuent en fonction du TarMed. Les autres cantons avaient déjà établi des
conventions avant l'introduction du TarMed. Pour le Valais et le canton de Vaud, les bases sont inférieures à celles du TarMed. Si les mammographies de dépistage coûtent plus cher dans le canton de
Genève, c'est qu'elles sont remboursées à un tarif supérieur par leur convention. Cette dernière fait
l’objet d’un réexamen, et de nouveaux tarifs devront être négociés.
Les frais généraux inhérents à l'organisation, à l'administration, à l'invitation, à l'assurance qualité, à la
formation et aux salaires comptent pour 30 à 45% des coûts par femme dépistée. Avec des taux de
participation plus élevés, la part de ces frais tomberait à 25%. Conformément au TarMed 2006, une
mammographie de dépistage est remboursée à hauteur de 145,04 points. Une mammographie diagnostique, prescription comprise, l'est à hauteur de 209,82 points, et de 397,73 points avec ultrasons.
En d'autres termes, le coût d'une mammographie de dépistage représente 36% de celui d'une procédure diagnostique complète, et est inférieur de 30% à celui d'une mammographie diagnostique.
Une enquête internationale montre, à pouvoir d’achat égal, que le niveau de remboursement en
Suisse du coût des mammographies et du coût par femme dépistée se situe juste en dessous de celui
de la France et de l'Allemagne. Par ailleurs, les programmes nationaux dotés d'une organisation centralisée et bénéficiant de taux de participation élevés ont des frais généraux de l’ordre de 10-15% du
22
coût par femme dépistée .
Une évaluation du rapport coût/efficacité du dépistage du cancer du sein pourrait s'avérer très précieuse. Cependant, elle serait difficile à réaliser dans la mesure où les coûts réels des interventions à
comparer ne sont pas connus. En effet, l'administration des 70 caisses d'assurance maladie suisses
n'est pas ouverte à l'analyse publique et les coûts de certaines affections sont considérés comme
confidentiels, concurrence oblige. 50 milliards de francs, voilà le total des dépenses de santé enregistré en 2002. Un total qui représente les remboursements effectués par les caisses d'assurance maladie sur les dépenses déclarées, mais qui est certainement en deçà de la réalité dans la mesure où la
franchise et la contribution de chaque patient n'y sont pas incluses.
Selon les calculs de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS),
un programme national de dépistage coûterait 50 millions de francs par an. Ceci représente 1‰ de
l'ensemble des dépenses de santé et pourrait amener une réduction absolue de 0,5% de la mortalité
féminine. Aucune autre intervention de la médecine actuelle ne pourrait apporter un tel gain potentiel
de santé. Dans d'autres pays, des études coût/utilité parlent en faveur de la mammographie, qu’il
s’agisse du coût par QALY (Quality Adjusted Life Year = année de vie pondérée par la qualité) ou du
coût par année de vie gagnée. Les analyses coût/utilité sont souvent préférées aux analyses
coût/bénéfice, celles-ci étant limitées par la nécessité d'évaluer financièrement les gains de santé.
23
Une analyse coût/utilité basée sur les 8510 APVP par cancer du sein en Suisse est plus à même de
fournir des résultats intéressants que des calculs hypothétiques fondés sur une prédiction à dix ans
des coûts des cancers évités.
En 2003, une revue de la littérature sur l'analyse coût/efficacité du dépistage du cancer du sein chez
les femmes de plus de 65 ans a démontré qu'il reste intéressant, compte tenu des dépenses de santé
actuelles, de dépister ces femmes âgées tous les deux ans. En effet, le surcoût de $ 34 000 à $
88 000 par année de vie gagnée grâce au dépistage est comparable aux $ 16 000 à $ 72 000 (dollars
américains 1992) par année de vie gagnée avec la monothérapie chez les adultes souffrant d'hypertension légère à modérée, personnes âgées mises à part. En détectant précocement des tumeurs, le
dépistage peut offrir un bénéfice secondaire: il permet d’envisager des opérations (par exemple: chirurgie mammaire conservatrice sous anesthésie locale plutôt que mastectomie sous anesthésie générale) et des thérapies adjuvantes (par exemple: Tamoxifen au lieu de polychimiothérapie) moins risquées. Il a ainsi été constaté que les femmes dont le cancer a été détecté par dépistage ont plus sou24
vent le choix quant à leur traitement (chirurgie conservatrice mammaire ou mastectomie) .
22
http://www.epgbc.com/news.asp?id=90&sec=news&action=content
www.bfs.admin.ch/bfs/portal/de/index/themen/gesundheit/gesundheitszustand/sterblichkeit__todesursachen/kennzahlen0/
todesursachen0/verlorene_potentielle_lebensjahre.html
24
The Cost-Effectiveness of Screening Mammography Beyond Age 65 Jeanne Mandelblatt, Somnath Saha, Steven Teutsch,
Tom Hoerger, Albert L. Siu, David Atkins, Jonathan Klein, Mark Helfand (Cost Work Group of the U.S. Preventive Services Task
Force) Ann Intern Med 2003;139(10):835-42
23
9
Conclusion
Cet aperçu de la situation actuelle nous montre qu’il existe des arguments convaincants en faveur des
programmes de dépistage organisé du cancer du sein. Nous avons de plus à notre disposition les résultats obtenus par les pays qui ont lancé de tels programmes il y a plusieurs années de cela: les bénéfices qu’ils en ont retirés ont de quoi inciter la Suisse à suivre à son tour cette voie. Il n’y a selon
moi aucune raison de ne pas le faire
Néanmoins, la décision revient au monde politique. Il faudra s’efforcer de trouver un délicat équilibre
entre les avantages et les inconvénients pour l’individu, la population dans son ensemble, les médecins et le système de santé.
J'estime qu'en Suisse, le débat autour du dépistage est trop tourné vers le monde médical. Il n'est pas
toujours basé sur des faits, mais plutôt sur la peur de bouleverser l’ordre établi et, peut-être, de perdre
une certaine autonomie professionnelle. Les médecins bâtissant leur réputation sur le traitement des
maladies, la prévention n’arrive pas à passer au premier plan. Dans les cas les plus extrêmes, des
praticiens s'emploient même à discréditer les stratégies de prévention. Considérant les femmes en
âge d'être dépistées comme leurs patientes, les spécialistes ne veulent pas les «perdre» à cause d'un
programme de dépistage de santé publique. Par ailleurs, beaucoup sont convaincus que la mammographie diagnostique est meilleure que la mammographie de dépistage, même si les performances de
cette pratique fréquente n'ont jamais été vraiment documentées.
Les programmes de dépistage du cancer du sein mis en place dans cinq cantons démontrent qu'il est
possible d'offrir un service de qualité en Suisse, et ce à toutes les femmes, indépendamment de leur
classe sociale. Voilà un élément essentiel, car on sait qu’il existe en Suisse des inégalités dans le diagnostic et le traitement du cancer du sein. En outre, l'augmentation des taux de participation dans les
différents cantons et la préférence des femmes pour les mammographies hors franchise démontrent
tout l'intérêt accordé à ce service.
Après tout, c'est bien au public, et non aux professionnels de la santé, que s'adresse un service de
santé publique. Encore une fois, c’est à nos responsables politiques qu’il incombe d’écouter les divers
arguments, de comparer avec ce qui se fait ailleurs en Europe et dans le monde et de prendre une
décision au meilleur des intérêts de la Confédération.
r
D Chris de Wolf, diplômé en Santé publique
Janvier / mai 2006
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