contexte Pourquoi la France et l`Egypte sont des cib

Le Soir Vendredi 20 mai 2016
2 L’ACTU
DISPARITION DE L’AVION D’EGYPTAIR
Tout laisse à penser que c’était
J
« C’est surtout l’ambiance
politique qui fait que l’on
tend vers cette hypothèse »
UN EXPERT
L’appareil effectuait un vol sans
problème lorsqu’il a disparu des
écrans radars. Il n’avait lancé aucun appel de détresse. Son transpondeur a continué à émettre
1455 (chiffre qui l’identifiait auprès du contrôle aérien). Les pilotes seraient passés sur le chiffre
7700 en cas de pépin grave. Soudain l’Airbus a plongé, hors de
tout contrôle. Ce qui laisse supposer qu’un événement extrêmement brutal s’est produit.
L’hypothèse de la défaillance
technique ne peut être écartée.
Un problème de pression – l’ouverture d’une porte mal fermée,
par exemple – peut entraîner la
désintégration immédiate de la
carlingue. L’avion était déjà en
vol depuis plus de trois heures ;
des matériaux ont pu, à la longue,
céder et provoquer une brèche,
puis l’« explosion »…
L’Airbus a pu aussi être touché
par un missile. Nul ne pense que
des terroristes disposent de matériel suffisamment sophistiqué
pour abattre un avion volant à
37.000 pieds (11.270 mètres) audessus de la Méditerranée. La
mer entre Karpathos et la côte
égyptienne n’est pas l’est de
l’Ukraine… Mais une erreur de
tir, provenant du sol ou d’un autre
avion, n’est pas à exclure totalement. Les Italiens se souviennent
encore du « mystère d’Ustica »
(du nom de la petite île au large
de la Sicile). C’était en 1980. Un
appareil civil assurant la liaison
entre Bologne et Palerme s’était
désintégré en vol, tuant ses 81
passagers et membres d’équipage. Les circonstances de cet accident n’ont jamais été vraiment
éclaircies, et on parle toujours
d’un missile allié qui se serait
trompé de cible.
Reste que l’hypothèse de l’attentat semblait la plus plausible,
à l’heure de boucler cette édition.
« C’est surtout l’ambiance politique qui fait que l’on tend vers
cette hypothèse », résumait un expert interrogé par nos confrères
de l’AFP. La France et l’Egypte
font figure d’ennemis de choix
pour les groupes djihadistes.
Ceux-ci mènent une véritable
guerre contre le régime al-Sissi
dans le Sinaï. Et ils s’en sont déjà
pris à des appareils civils. Le
drame de l’avion russe est encore
dans toutes les mémoires. Le
31 octobre dernier, une bombe
avait explosé à bord d’un avion
russe ramenant des touristes de
la station balnéaire de Charm elCheikh à Moscou. L’attentat, revendiqué par Daesh, avait fait
224 morts.
Si la disparition de l’avion
égyptien est due à un attentat, où
la bombe a-t-elle pu être introduite à bord ? La question est évidemment angoissante. A Roissy ? Au Caire, d’où l’Airbus était
arrivé mercredi à 22h10 ? Plus tôt
le même jour, l’avion était passé
par l’Erythrée et la Tunisie.
Les débris répondront à une
partie des questions qui se
posent. « La première chose à
faire est de récupérer des débris
qui donneront des indications
sur l’accident. (…) S’il y a eu explosion, il y aura peut-être des
traces d’explosifs », a souligné
Jean-Paul Troadec, l’ancien directeur du Bureau français d’enquêtes et analyses (BEA). Selon
lui, « les services chargés de la sûreté sont en train d’examiner
toutes les conditions dans lesquelles le départ de cet avion a été
préparé, quelles sont les personnes qui ont pu avoir accès sur
la piste aux soutes de l’avion et
aussi, bien entendu, tous les passagers ». Il ne suffira pas d’une revendication pour classer l’affaire. ■
ême en l’absence de revendication ce jeudi soir, la piste
M
terroriste apparaît tout à fait possible. D’abord pour la raison technique de la soudaineté du crash de
l’appareil d’Egypt Air et ensuite
pour des raisons de logique géopolitique. Qu’ils évoluent au sein de
« l’Etat islamique » ou au service
de son rival Al-Qaïda, les djihadistes ont en effet déjà montré ces
dernières années que l’Egypte et la
France constituaient pour eux des
cibles privilégiées.
L’Egypte ? Oui, celle du maréchal Abdelfattah al-Sissi. Celui qui
a écarté le 3 juillet 2013 par un
coup d’Etat militaire le régime des
Frères musulmans et le président
Mohamed Morsi, démocratiquement élu un an plus tôt. Un déve-
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nières années, bénéficiant surtout
du ralliement des redoutables
« Partisans de Jérusalem » (Ansar
Bayt al-Maqdis) qui se rebaptisèrent Province du Sinaï (« Wilayat
Sinai ») en novembre 2014, une
époque où l’EI atteignait l’apogée
de ses conquêtes en Syrie et en Irak
et venait, quatre mois tôt, de pro-
30
Français
15
Algérien
Belge
Britannique
Canadien
Koweïtien
Portugais
Saoudien
Soudanais
Tchadien
9
Irakiens
2
Caractéristiques générales de l’Airbus A320 d’EgyptAir
A320-200
Numéro de série 2088
1er vol juillet 2003
Heures de vol 48.000
PARMI LES DISPARUS
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Les actions terroristes, nourries
par ce terreau, allaient dès lors
faire florès en Egypte, surtout à
partir du foyer incandescent du
nord Sinaï, où les tribus bédouines,
par tradition atavique hostiles au
pouvoir central, fournirent des djihadistes en nombre aux organisations extrémistes qui recrutaient.
Egyptiens
Départ de Paris
mercredi
à 23 h 09
Autonomie 5.700 km
Passagers 145
Poids maxi au décollage 73,5 tonnes
Entrée en service 1988
Avions en service 6.700
FRANCE
Source : Airbus
GROUPE
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1000 Bruxelles
Les actions terroristes, nourries par le coup d’Etat
militaire, allaient dès lors faire florès en Egypte
PASSAGERS 56
37,57m
Très rapidement, l’information selon
laquelle un des passagers de
l’Airbus égyptien – qui a
brusquement disparu des
radars – était de nationalité
belge, a circulé. Il s’agit de
Geert Supré, 56 ans, originaire de Flandre-Orientale.
Cette information a
d’ailleurs été confirmée par
le bourgmestre de SintLaureins, Franki Van de
Moere au journal flamand
Het Nieuwsblad. Déjà dans la
matinée de jeudi, les autorités belges avaient eu un
contact téléphonique avec
l’épouse du disparu. Le ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders
(MR), a déjà fait part de ses
condoléances aux proches
de la victime, et témoigné
son soutien à toutes les
familles endeuillées.
clamer à Mossoul le retour du « califat ».
Pour autant qu’on puisse savoir,
c’est bien cette organisation, filiale
« officielle » du Sinaï de Daesh, qui
s’est rendue coupable de l’attentat
contre un Airbus russe, le 31 octobre 2015, avion de ligne qui s’est
écrasé après son décollage entraînant la mort des 224 personnes à
bord. En tout cas, l’EI a revendiqué
l’acte et personne n’a pu le contredire depuis lors.
La France aussi constitue une
cible de choix pour les djihadistes.
Pour toutes les raisons que les commentateurs ont déjà énumérées en
2015 après les attentats à Paris de
janvier puis de novembre (146
morts sans compter les auteurs).
Patrie assumée de la laïcité mili-
La répression inouïe et inédite qui
s’abattit sur toute la population allait ensuite sans doute également
contribuer à galvaniser les vocations djihadistes.
Si Al-Qaïda semble peu efficace
au pays des pharaons, Daesh s’y est
développé à grande vitesse ces der-
PERSONNEL DE BORD 10
M.Li
Geert
Supré,
la victime
belge
loppement qui tombait alors
comme du pain bénit pour les radicaux de la mouvance islamiste, qui
pouvaient arguer que la voie démocratique suivie par les Frères avait
montré ses limites et que seule la
lutte armée – le terrorisme – pouvait incarner le salut.
Les personnes à bord
34,10 m
eudi soir, aucun élément
matériel ne permettait d’affirmer que la disparition de
l’Airbus égyptien était le fruit
d’un attentat. Mais l’hypothèse
était, de toutes parts, considérée
comme la plus plausible. Le ministre égyptien de l’Aviation civile, Chérif Fathy, a-t-il ainsi estimé, tout en disant ne pas vouloir
« se perdre en conjectures », que
la situation pouvait « laisser penser que la probabilité, la possibilité d’une action à bord, d’une attaque terroriste, est plus élevée
que celle d’une défaillance technique ».
La compagnie aérienne égyptienne a simplement annoncé en
fin de journée « la découverte de
débris du vol MS804 », précisant
sur Twitter que « des gilets de
sauvetage et des morceaux de
plastique » ont été retrouvés flottant en mer au large de l’île
grecque de Karpathos. Il s’est
avéré durant la soirée que ces débris ne provenait pas d’un avion.
contexte Pourquoi la France et l’Egypte sont des cib
11,76m
L’Airbus égyptien qui devait relier Paris au Caire,
a disparu des écrans radars sans le moindre appel
de détresse.
L’hypothèse d’une défaillance technique
du vol MS804 n’est pas exclue, mais semble
moins plausible.
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