Régimes de change, crédibilité et ajustement du taux de

Transcription

Régimes de change, crédibilité et ajustement du taux de
Chapitre 4
Régimes de change, crédibilité
et ajustement du taux de
change
L’intégration financière globale accrue et l’incidence croissante des crises
monétaires dans le monde en développement ont entraîné un renouvellement
de la controverse sur le rôle et la performance des régimes de change. Par
exemple, les effets de crédibilité des différents types de régimes de change,
sont devenus des considérations importantes dans l’évaluation du rôle des
différents facteurs qui peuvent affecter le choix d’un régime de change. Dans
le même temps, des questions telles que l’effet des variations de taux de
change sur les flux commerciaux et la production sont aussi demeurées au
premier rang du débat de politique, avec notamment l’accent mis sur les effets contractionnistes des effets des variations du taux de change en présence
de biens intermédiaires importés.
Les deux premières parties de ce chapitre fournissent une typologie des
régimes de change et un aperçu de l’évolution des régimes de change dans les
pays en développement. Elles considèrent aussi en détail les caractéristiques
et le fonctionnement des deux régimes qui ont retrouvé une certaine faveur
les années récentes : les caisses d’émission et le régime des marges de taux
de change. La troisième partie passe en revue les différents facteurs qui peuvent affecter le choix d’un régime de change et souligne les conflits potentiels
qui peuvent survenir entre eux. La quatrième partie utilise un modèle illustratif simple pour souligner l’importance des interactions de politique dans
leurs effets sur le degré de crédibilité des régimes de rattachement de taux
138
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Chapitre 4
de change à une unité de référence. La cinquième partie se focalise sur les
effets des variations du taux de change sur la compétitivité et la balance
commerciale. Elle commence par passer en revue les mesures de base de la
compétitivité et considère ensuite l’approche d’équilibre partiel pour analyser l’effet des variations du taux de change sur les comptes extérieurs. La
dernière partie élargit l’analyse pour considérer un modèle macroéconomique
totalement spécifié qui capte le rôle des intrants importés dans le processus
de production. Les effets des variations de taux de change sur la production
et la balance commerciale sont étudiées et les limites de l’approche d’équilibre
partiel sont discutées.
1
La nature des régimes de change
Cette section commence par présenter une typologie générale des régimes de
change. Elle founit ensuite une discussion plus détaillée des caisses d’émission
et du régime des marges de fluctuation du taux de change. Elle conclut par
une revue de certaines preuves empiriques récentes de l’évolution des régimes
de change dans les pays en développement.
1.1
Une Typologie de Base
Le champ des régimes de change actuellement en cours dans les pays en
développement est vaste et couvre presque tous les types de régimes.
• Les régimes de rattachement de taux de change, qui sont de
plusieurs formes : caisses d’émission, où la monnaie est irrévocablement fixée contre une monnaie étrangère (voir ci-dessous) ; le régime
des parités ajustables, dans lequel la monnaie est fixée par rapport
à une monnaie étrangère et est rarement modifiée ; le régime des parités rampantes, dans lequel la monnaie est initalement fixée mais les
décideurs politiques ajustent ultérieurement le taux de change à des intervalles réguliers pour prendre en compte les variations des différeniels
d’inflation ou la situation de la balance commerciale.
• Les régimes de taux de changes flexibles, dans lesquels le taux
de change est autorisé à fluctuer en réponse aux variations de l’offre
et la demande des devises. Si la banque centrale n’intervient pas sur le
Régimes de change
140
marché des devises, le régime est un régime de flottement pur, sinon
c’est un un régime de flottement dirigé.
• Les régimes de marges de fluctuation, qui impliquent l’annonce
d’un taux de change pivot et une marge de fluctuation (qui peut être
ou non symétrique) autour de ce taux. Le taux pivot est lui même
géré d’une certaine manière, qui peut être, par exemple, fixe ou rampante. L’engagement implicite de la banque centrale est d’intervenir
activement aux limites de la marge pour empêcher la sortie du taux
de change hors de la marge. L’application d’une marge de fluctuation
requiert aussi l’adoption d’une série de règles pour guider l’intervention
sur le marché des changes, si nécessaire, à l’intérieur de la marge (voir
ci-dessous).
• Les régimes de taux de changes doubles ou multiples, dans lesquels les transactions commerciales sont effectuées à des taux fixes et
les transactions financières à un taux flottant (généralement plus déprécié)1 . En pratique, de tels régimes n’ont pas bien fonctionné en raison
des fuites entre les différents segments du marché des changes. Ils sont
souvent adoptés comme des régimes transitoires avant de fixer le taux
de change à une valeur d’équilibre.
Sous un régime pur de caisse d’émission, le stock de base monétaire est
totalement financé par les réserves extérieures car la caisse d’émission n’émet
de la monnaie qu’uniquement contre la monnaie de réserve à un taux de
change fixe. La monnaie émise par la caisse d’émission est aussi totalement
convertible, sur demande, (à un taux de change fixe) en monnaie de réserve,
et vice versa. Par définition, le ratio du stock de base monétaire au stock
de réserves de devises est donné par le taux de change entre la monnaie
nationale et la monnaie de réserve. Par contraste, les dépôts dans les banques
privées ne sont pas financés par les réserves en devises de la caisse d’émission ;
ceux ci sont des dettes des banques privées. En principe, il n’y a pas de
guichet d’escompte et donc pas de possibilité d’offrir des lignes de crédit
aux institutions financières privées qui sont confrontées aux problèmes de
1
Les régimes de double taux de change peuvent être informels, comme cela apparaît
quand les gouvernements imposent des restrictions de change dans le but de défendre un
taux de change surévalué ; comme on le discute dans l’Annexe B, ceci entraîne l’émergence
d’un marché parallèle de devises.
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Chapitre 4
liquidités à court terme, une limite importante du système, comme on le
discute plus bas.
Les systèmes de taux de change flottants peuvent être soit un système
interbancaire ou un système d’enchères, ou une combinaison de ces deux
systèmes.
• Sous le système interbancaire, le taux de change est négocié sur un
marché de banques commerciales et des négociants étrangers agréés.
En théorie, le taux de change est autorisé à fluctuer à tout moment.
Mais, en pratique, des limites minimales et maximales sont souvent
imposées par la banque centrale aux banques commerciales et aux négociants afin d’empêcher “l’accaparement” de toutes les devises par un
seul membre ou par un groupe de négociants. Ceci empêche aussi l’exposition excessive des banques commerciales au risque de taux de
change.
• Dans le système des enchères, les recettes d’exportation sont remises à
la banque centrale au taux de change prévalent et la banque centrale,
à son tour, décide quel montant de devises doit être mis aux enchères.
En pratique, les deux principales variantes des systèmes des enchères sont
le système d’enchères hollandais et le système du prix marginal (voir Feldman et Mehra, 1993). Sous le premier système, chaque soumissionnaire dont
l’offre est acceptée doit payer son prix d’offre ; un soumissionnaire peut donc
finir par payer un prix significativement plus élevé s’il évalue incorrectement
la demande de devises. Dans le second système, un taux unique dit prix d’équilibre du marché est applicable à tous les soumissionnaires dont les offres
sont acceptées. Spécifiquement, tous les soumissionnaires au dessus du prix
d’équilibre du marché, c’est-à-dire, les offres au dessus de l’offre le plus offrant
qui satisfait pleinement l’offre disponible de devises, se voient donc alloués
les devises.
1.2
Régimes de caisses d’émission
Dans les années récentes, il y a eu une regain d’intérêt pour les caisses d’émission, un régime de taux de change populaire au cours de l’ère coloniale2 .
2
La Malaisie, par exemple, a établi une caisse d’émission en 1897 et l’a démantelée en
1967. Voir Hanke et Schuler (1994) pour une discussion des caisses d’émission au cours de
la période coloniale.
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142
De tels régimes ont été recommandés non seulement aux économies petites
et très ouvertes sur l’extérieur mais aussi aux grands pays (voir Baliño et
Enoch, 1997). Le cas de la caisse d’émission est d’abord similaire au cas d’un
régime de taux de change fixe : en rattachant le taux de change, elle limite
la portée d’une expansion monétaire excessive3 . Cette discipline monétaire
augmente probablement la confiance dans la monnaie nationale et conduit à
un inflation plus faible pour un taux d’expansion monétaire donné. Cependant, deux arguments supplémentaires sont avancés en faveur de l’adoption
des caisses d’émission.
• Ils peuvent aider à résoudre le biais de dévaluation inhérent à une
politique discrétionnaire de taux de change induite par des problèmes
d’inconsistance temporelle, comme on le discute plus loin. En supprimant — ou du moins en limitant sérieusement — la possibilité d’une
politique monétaire discrétionnaire, une caisse d’émission devrait entraîner une plus grande discipline et une plus grande confiance qu’un
simple rattachement du taux de change.
• Le gain de crédibilité additionnelle qu’une caisse d’émission fournit peut
aider à décourager les attaques spéculatives et les crises monétaires,
comme on le discute au chapitre 7.
Bien sûr, la différence entre une caisse d’émission et un régime conventionnel de taux de change fixe est largement plus de un dégré : une caisse
d’émission peut être abandonnée juste comme peut l’être un régime de rattachement. Cependant, des arrangements institutionnels rendent l’abolition
d’une caisse d’émission typiquement beaucoup plus difficile ; c’est précisément, en premier lieu, ce qui fournit la crédibilité additionnelle de tels régimes.
Cependant, La crédibilité additionnelle que fournit une caisse d’émission
peut avoir un prix.
3
On affirme parfois qu’adopter une caisse d’émission entraîne des revenus de seigneuriage. Comme l’ont souligné Baliño et Enoch (1997), ceci n’est pas tout à fait correct car la
banque centrale continue de gagner des intérêts sur ses avoirs extérieurs tout en ne payant
rien sur ses dettes domestiques (la base monétaire). En outre, une banque centrale qui gère
un régime conventionnel de taux de change rattaché sera aussi limitée dans sa capacité
à accroître la crédit domestisque, du moins si elle veut soutenir le rattachement pendant
une durée suffisante. Par conséquent, les arguments de seigneuriage sont largement sans
intérêt dans une quelconque comparaison dans un ensemble de systèmes de taux de change
rattaché.
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Chapitre 4
• Comparées à d’autres régimes de taux de change rattachés, les caisses
d’émission sont plus contraignantes en matière de politique monétaire
et sur la capacité des autorités à modifier le rattachement du taux de
change. Le coût associé à la perte de flexibilité dépend en général du
degré de vulnérabilité de l’économie aux chocs globaux (intérieurs et
extérieurs), et de la disponibilité des instruments de politique alternatifs pour compenser l’impact de ces chocs.
• Le gain de crédibilité qu’apporte une caisse d’émission aux politiques
économiques d’un pays peut ne pas être total, car les agents réalisent
que de tels régimes peuvent aussi être abandonnés, même si cela peut
être difficile. En conséquence, les autorités monétaires peuvent ne pas
être capables d’éliminer totalement le risque de dévaluation et son impact sur la prime de risque que supportent les emprunteurs sur les
marchés internationaux de capitaux.
• Une caisse d’émission réduit la capacité de la banque centrale d’agir
comme prêteur en dernier ressort dans une situation de crises de
liquidités du système tout entier. Parce qu’en principe il n’y a pas de
guichets d’escompte, la banque centrale ne peut pas offrir des lignes de
crédit aux institutions financières privées qui font face aux problèmes de
liquidité. Par conséquent, des pays qui ont des caisses d’émission sont
plus prédisposés aux faillites bancaires et aux paniques financières que
les pays qui ont des banques centrales totalement libres (voir chapitre
15).
Au coeur de ce problème est le fait que les banques commerciales privées
détiennent généralement juste assez de monnaie nationale pour couvrir une
fraction de leurs engagements à vue. Sous un régime de caisse d’émission,
les banques commerciales ne peuvent pas compter sur des emprunts à court
terme auprès de la banque centrale pour financer les problèmes transitoires
de liquidités. Par conséquent, une perte soudaine de confiance des déposants
peut rapidement tourner en panique. La croyance qu’une banque est devenue
insolvable peut déclencher une ruée contre cette banque dans la mesure où
les déposants essaient de retirer des fonds avant que la banque ne manque
de liquidités. La faillite de la banque peut créer ou exacerber des craintes de
faillites d’autres banques, entraînant de ce fait, par un effet de domino,
une crise financière totale. La pénurie de crédit qui peut suivre la crise peut
avoir un effet défavorable important sur la production et l’emploi, mettant
Régimes de change
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la pression sur les décideurs politiques d’abandonner le régime de caisse d’émission. Par contraste, avec une banque centrale totalement libre, une banque
essentiellement solvable avec des problèmes de liquidités à court terme ne va
pas automatiquement faire faillite comme ce serait le cas dans un système de
caisse d’émission car elle peut avoir recours au guichet d’escompte pour couvrir la pénurie temporaire de liquidités. Par conséquent, les caisses d’émission
sont confrontées au même type d’arbitrage entre crédibilité et flexibilité auquel n’importe quel type de régime de rattachement de taux change peut
faire face (voir ci-dessous).
1.3
Régime de marges de fluctuations du taux de change
Comme on l’a indiqué plus tôt, les régimes de marges de fluctuation tentent de
préserver un certain degré de flexibilité du taux de change pour promouvoir
l’ajustement de prix relatif en conservant le rôle du taux de change comme
ancrage nominal. Plus spécifiquement,
• par rapport aux régimes de rattachement du taux de change, les régimes
de marges de fluctuation permettent au taux de change de s’ajuster
aux variations temporaires des prix relatifs et préserve un certain degré
d’autonomie monétaire, dont l’importance dépend positivement de
la largeur de la marge ;
• par rapport aux régimes de taux de change flexibles, les régimes de
marges de fluctuation, en contraignant la marge de fluctuation du taux
de change nominal, continuent de fournir un certain ancrage nominal
au niveau des prix intérieurs, lequel dépend maintenant négativement
de l’étendue de la marge (voir chapitre 5)4 .
La mesure dans laquelle un régime de marges de fluctuation réussit à stabiliser le taux de change nominal dépend de sa crédibilité. Comme l’a formellement démontré Krugman (1991), dans un régime de marges de fluctuation
parfaitement crédible où l’intervention n’a lieu qu’aux bornes extrêmes de la
marge, le taux de change nominal sera plus proche du taux pivot que celui
4
Comme l’ont montré Coles et Philippopoulos (1997), un autre avantage du régime
de marges de fluctuation est qu’il tendrait à stabiliser le taux d’inflation intérieure par
rapport à ce qu’on aurait observé sous un régime de taux de change fixes si l’inflation des
pays partenaires est fortement instable.
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Chapitre 4
qu’il l’aurait été sous les taux de changes flexibles, même sans intervention.
Par conséquent, la simple présence d’une marge de fluctuation annoncée peut
être stabilisante. Cependant, il est important de souligner que la mesure dans
laquelle les autres avantages présumés se concrétiseront ou non dépend de
façon cruciale de la manière dont la marge est gérée.
• Si la banque centrale intervient de façon à conserver le taux de change
très proche du taux pivot, ou lui permettre de demeurer continuellement à la borne supérieure ou inférieure de la marge, le régime de
marges se comportera comme un régime de taux de change fixe, ne
fournissant donc pas de possibilité aux ajustements de prix relatifs et
pas d’autonomie monétaire.
• Si la parité du taux pivot est déterminée pour maintenir par exemple,
le taux de change réel constant, l’ancrage nominal de l’économie devra
être fourni par l’offre de monnaie, comme dans le cas des taux flexibles
(voir chapitre 5).
2
Preuves empiriques sur les régimes de change
Cette section commence par passer en revue l’évolution générale des régimes
de change dans les pays en développement depuis le début des années 80.
Elle se concentre ensuite sur l’expérience récente de certains pays particuliers
(Brésil, Chili, Indonésie et Israël) avec des marges de fluctuation de taux de
changes.
2.1
Tendances générales
En pratique, un système coummunément utilisé pour classer les régimes de
change est celui introduit par le Fonds Monétaire International en 1982. Il
distingue cing catégories : rattachement à une seule monnaie, rattachement
à un panier de monnaies, flexibilité limitée (ou quasi-rattachement), flexibilité dirigée et flottement indépendant. La figure 4.1 montre l’évolution du
pourcentage des pays en développement à régimes de rattachement du taux
de change fondés sur les deux premières catégories de cette classification. La
figure révèle une baisse continue du nombre de taux de changes rattachés depuis l’effondrement du Système de Bretton Woods de parités fixes mais
ajustables du début des années 70. Au milieu des années 70, 86% des pays en
Régimes de change
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développement avaient un certain type de régime de rattachement du taux de
change. En 1996, moins de la moitié avaient un tel régime. Comme l’illustre la
figure 4.2, plusieurs des pays qui continuent à rattacher leur taux de change
sont en Afrique Sub-saharienne et appartiennent à la Zone Franc CFA5 .
Presqu’un tiers des pays en développement prétendent avoir maintenant des
taux de change flottant librement.
En pratique, cependant, les régimes de change sont difficiles à classer pour
différentes raisons :
• La banque centrale peut gérer le taux de change avec une flexibilité
importante mais le fixer de façon quotidienne ou hebdomadaire sur la
base de certains indicateurs, par exemple, les différentiels d’inflation, le
compte courant et la balance des paiements globale, ou des projections
des conditions de l’offre et de la demande sur le marché des changes.
Cependant, dans de telles conditions, le taux de change ne peut pas
être supposé déterminé par le marché ou flottant librement.
• En particulier, le ciblage d’un taux de change réel implique des
fluctuations du taux de change nominal pour compenser les différentiels
d’inflation6 . Il n’est pas clair si un rattachement à un taux d’inflation
ajusté se qualifie comme une forme de taux de change fixe, ou une forme
de régime par lequel le taux de change est géré de façon flexible.
• Déterminer, par exemple, combien l’intervention sur le marché des
changes est compatible avec la catégorie des régimes de flottement
indépendant, requiert d’évaluer le degré auquel l’intervention est destinée uniquement à lisser les mouvements de taux de change, une tâche
difficile en pratique.
5
La Zone Franc CFA consiste en deux groupes séparés de pays d’Afrique Sub-saharienne
et les Comores. Le premier groupe comprend les sept membres de l’Union Monétaire Ouest
Africaine (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Niger, Sénégal, et Togo), dont la
banque centrale (la BCEAO) a la responsabilité de conduire une politique monétaire commune. Le second groupe comprend les six membres d’une autre banque centrale commune,
la BEAC (Cameroun, la République Centrafricaine, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale et le Tchad). Chacun des deux groupes et les Comores ont des monnaies séparées
mais ces monnaies sont communément référées comme, le franc CFA dont la parité par
rapport au franc français a été maintenue fixe de 1948 à Janvier 1994.
6
Pour une discussion du ciblage d’un taux de change réel, voir Lizondo (1993) et Montiel
et Ostry (1991, 1992).
147
Chapitre 4
Ce dernier point est particulièrement important car il suggère que les
systèmes de classification tels que celui qu’utilise le Fonds Monétaire International sont inadéquats car ils ne fournissent pas une information assez détaillée pour déterminer le degré réel de flexibilité (c’est-à-dire l’importance
de l’intervention de la banque centrale) dans les pays qui adoptent les régimes plus flexibles. En particulier, plusieurs des pays qui prétendent avoir
maintenant des taux flottant librement utilisent l’intervention officielle pour
modifier le sentier du taux de change et devraient être classés comme des
régimes de flottement dirigé.
2.2
Marges de fluctuation du taux de change
En pratique, et conformément à la description fournie précédemment, le choix
d’une marge de fluctuation du taux de change couvre quatre dimensions :
• La définition du taux pivot, qui peut être en référence soit à une seule
monnaie ou à un panier de monnaies.
• La question de savoir si le taux pivot devrait être fixe, rampant ou
réajusté irrégulièrement à des quantités discrètes. Le choix entre ces
options dépend en partie du différentiel entre l’inflation intérieure et le
taux d’inflation des principaux partenaires commerciaux, et la mesure
dans laquelle les chocs permanents qui affectent le taux de change réel
devraient être ou non accomodés.
• La largeur de la marge, c’est-à-dire, la marge de fluctuation permise
du taux de change autour du taux pivot.
• Les règles de fonctionnment de l’intervention de la banque centrale sur
le marché des changes à l’intérieur des marges.
Un nombre croissant de pays en développement ont adopté des régimes
de marges de fluctuation du taux de change au cours des quelques années
passées : Brézil (1995-99), Chili (1985), Colombie (1991), Equateur (199499), Indonésie (1994-97), Israël (1989) et Mexique (1989-94)7 . L’expérience de
7
L’expérience du Chili, de la Colombie, de l’ Indonésie et du Mexique est discuté par
Agénor et Montiel (1999, chapitre 7).
Régimes de change
148
ces pays, eu égard aux quatre dimensions de l’application, identifiées précédemment a largement varié. Des exemples de régimes de marges (éventuellement) infructueux sont ceux du Brésil et de l’Indonésie, qui sont illustrés à
la figure 4.3.
Les marges de fluctuation du taux de change ont été introduites au Brésil
en Mars 1995, suite à la crise du peso mexicain (voir chapitre 7). La marge
initiale était fixée à 0,86R$—0,90R$ par dollar américain et devait être effective au 1er Mai 1995. Cependant, à cause de l’incertitude sur la politique de
taux de change qui devrait être adoptée après cette date, de sévères pressions sur le marché des changes se sont développées. Le 10 Mars 1995, les
autorités ont fixé la marge à 0,88R$—0,93R$ par dollar américain et ont annoncé qu’elle devrait être effective pendant une période indéfinie. La marge
a été ultérieurement modifiée le 22 Juin 1995, le 30 Janvier 1996 et le 18 Février 1997. La monnaie est néanmoins demeurée sujette à de fortes pressions
spéculatives. La banque centrale a utilisé une marge commerciale étroite de
1,1975R$—1,2115R$ à l’intérieur d’une limite maximale de 1,12R$—1,22R$
jusqu’au 13 Janvier 1999, date à laquelle elle a décidé de n’utiliser uniquement qu’une marge maximale de 1,20R$—1,32R$. Cependant le 14 Janvier,
sous des pressions spéculatives renouvelées, les autorités ont abandonné le régime de marges, suivi d’une dépréciation immédiate de la monnaie de 1,32R$
un jour plus tôt à 1,50R$.
Un régime de marges de fluctuation a été introduit en Janvier 1994 en Indonésie, avec une marge initiale d’à peu près 1% de chaque côté du taux pivot.
Le taux pivot de la Roupie a été fixé par rapport à un panier de monnaies non
déclaré, et a continué à être déprécié en fonction des différentiels d’inflation,
continuant de ce fait la politique de stabilisation du taux de change effectif
réel8 . La marge d’intervention a été progressivement élargie dans le temps.
Après l’effondrement de la monnaie de la Thaïlande le 2 Juillet 1997 (voir
Chapitre 7), la banque centrale a élargi davantage la marge commerciale le
11 Juillet 1997, mais la monnaie s’est dépréciée jusqu’à un niveau proche du
plancher de la nouvelle marge dès le 21 Juillet. Des pressions continues sur
le marché des changes ont forcé les autorités à abandonner complètement la
marge en Août 1997.
8
Entre 1988 et 1994, l’Indonésie a opéré un régime de parité rampante, dont le principal
objectif était de déprécier le taux de change nominal dans le but de compenser le différentiel
d’inflation avec ses principaux partenaires commerciaux et maintenir un taux de change
réel compétitif.
149
Chapitre 4
Du cas du Brésil, de la revue de l’expérience de marges de fluctuation
du taux de change du Chili, de la Colombie, de l’Indonésie et du Mexique
fournie par Agénor et Montiel (1999, Chapitre 7), et des études de Helpman,
Leiderman et Bufman (1994) et Leiderman et Bufman (1996), quatre leçons
majeures se dégagent :
• Une marge de fluctuation est un engagement d’une flexibilité limitée
du taux de change nominal, non pas d’un choix spécifique d’ancrage
nominal. Les marges sont donc compatibles avec une variété de pondérations différentes que les autorités peuvent attacher aux objectifs de
compétitivité et de stabilité des prix. Des différences dans de telles
pondérations se réflèteront dans les différences dans la gestion du taux
pivot.
• Il n’y a pas de preuve empirique qui suggère qu’une mutation d’un
régime de taux de change fixe vers un régime de marges ait été associée
à une hausse significative de l’inflation. Par conséquent, la flexibilité
plus importante que fournit un régime de marges ne se produit pas
nécessairement au détriment de la stabilité des prix. Cette constatation
suggère qu’un certain degré de flexibilité peut en effet améliorer la
crédibilité.
• Cependant, l’adoption d’un régime de marges ne résout pas les problèmes de crédibilité. Les régimes de marges de fluctuation du Brésil, du
Chili, de la Colombie, du Mexique et d’Israël étaient tous caractérisés
par des périodes de fortes anticipations de réalignement, reflétant
un désalignement perçu du taux de change.
• Une gestion active du taux pivot pour maintenir le taux de change réel
conforme à son niveau d’équilibre peut donc être indispensable pour
assurer la viabilité d’un régime de marges de fluctuation sous une forte
mobilité de capitaux. Si de tels ajustements ne sont pas appliqués avec
à propos, des pressions spéculatives récurrentes peuvent entraîner un
effondrement du régime.
3
Choix d’un régime de change
En partie à cause de l’incidence accrue des crises monétaires au cours des
quelques années passées (voir Chapitre 7), le problème du choix du régime de
Régimes de change
150
change demeure une des questions les plus controversées en matière de gestion
macro-économique. Cette section commence par une revue des problèmes
conceptuels attachés au choix d’un régime de change. Elle examine ensuite
certaines évidences empiriques des déterminants du choix d’un régime.
3.1
Quelques problèmes conceptuels
En pratique, le choix entre taux de change fixes et taux de change flottants
n’est pas toujours très clair. Par exemple, la notion même de régime de
change de flottement libre peut avoir un faible contenu empirique. Comme
on l’a noté précédemment, presqu’aucun pays ne fixe sa politique monétaire
sans prêter au moins une certaine considération aux effets de son taux de
change. En pratique, le degré de flexibilité du taux de change existe presque
continuellement, avec un régime de marges de taux de change, des parités
rampantes et des flottements dirigés de différents types résidant entre les
régimes extrèmes de flottement pur et de taux de changes fixes.
Des arguments conventionnels en faveur d’un taux de change fixe sont qu’il
fournit un ancrage nominal aux prix, qu’il a souvent été un instrument qui
aide à réduire l’inflation (comme on le discute au prochain chapitre) et qu’il
peut aider à promouvoir la discipline budgétaire ou contribuer à la maintenir
une fois qu’elle est réalisée. Le rattachement à un pays à faible inflation peut
aussi aider à donner un signal de l’engagement du gouvernement en faveur
de la stabilité des prix et générer des gains de crédibilité, sous la forme
d’anticipations plus faibles d’inflation et de dévaluation (Agénor (1994)).
Cependant, il y a aussi plusieurs arguments contre le choix d’un taux de
change fixe.
• La preuve empirique de l’effet de discipline d’un taux de change fixe sur
la politique budgétaire apparaît peu concluante, comme l’ont soutenu
Tornell et Velasco (1998).
• Le gain de crédibilité associé au rattachement à un pays à faible inflation tend à être, en pratique, limité (Svensson (1994)). Bâtir une
réputation de crédibilité et établir un engagement ferme en faveur de
la stabilité des prix requiert souvent des réformes de politique nationale
et institutionnelles significatives, telles que accorder l’indépendance à
la banque centrale (voir chapitre 5).
151
Chapitre 4
• Bien que la stabilité du taux de change nominal soit importante, la
flexibilité dans la conception des politiques de taux de change est aussi
nécessaire pour éviter des appréciations réelles excessives et compenser
l’impact des chocs destabilisateurs9 .
• Le rattachement peut en fait empêcher l’ajustement du taux de change
réel en réponse aux grands chocs intérieurs et extérieurs. Glick, Hutchison et Moreno (1997), par exemple, ont soutenu que les régimes de
rattachement du taux de change en place jusqu’en 1997 n’étaient pas
la cause du faible niveau de l’inflation en Asie de l’Est. Au contraire,
le rattachement a empêché l’ajustement du taux de change réel en réponse aux grands chocs intérieurs et extérieurs — notamment la forte
dépréciation du dollar américain par rapport au yen et le deutschemark
entre 1985-87 et la baisse des taux d’intérêt américains entre 1989-93
— et a, par conséquent, compliqué la gestion macroéconomique10 .
• Un taux de change rattaché crée un problème d’aléa moral. En éliminant le risque de change (ou en réduisant la propension à se couvrir),
un taux de change fixe crédible fournit une garantie implicite et encourage les firmes et les banques nationales à emprunter sur les marchés
internationaux de capitaux à des taux d’intérêt qui sont plus faibles
que ceux appliqués sur le marché national11 . Ce surendettement (notamment quand il est en nature à court terme ) accroît la vulnérabilité
de l’économie aux chocs défavorables.
• Dans les pays prédisposés à de larges chocs aléatoires, les agrégats
monétaires peuvent fluctuer de façon erratique.
9
Une vaste littérature analytique a analysé les liens entre le type de perturbations auxquelles une économie est confrontée (par exemple, des chocs réels et nominaux) et le choix
optimal d’un système de taux de change, ainsi que le degré optimal de flexibilité du taux
de change (ou d’intervention sur le marché des changes). Cependant, comme l’a souligné
Van Gompel (1994), dans une vaste synthèse, il y a très peu de résultats robustes qui
émergent, contrairement aux affirmations faites dans la littérature ancienne.
10
Selon leur analyse, le bas niveau de l’inflation dans la région jusqu’au milieu des années
90 était le résultat d’un processus d’une politique budgétaire indépendante.
11
En outre, avec un taux de change rattaché, les agents économiques savent que la garantie implicite de convertibilité est limitée par la disponibilité de réserves internationales
et la capacité du pays à emprunter à l’étranger. Par conséquent, quand des doutes surviennent sur la soutenabilité de son taux de change, un pays attirera principalement des
flux de capitaux de court terme spéculatifs (voir chapitre 6).
Régimes de change
152
Les arguments en faveur d’un taux de change flexible sont qu’il donne aux
autorités monétaires nationales une plus grande indépendance dans le choix
de leur objectif d’inflation, et qu’il fournit une solution (partielle) au problème de hasard moral posé par un taux de change fixe. En laissant à dessein
une certaine possibilité aux variations inattendues du taux de change et en
évitant des garanties implicites de taux de change, les décideurs de politique
économique peuvent entraîner les emprunteurs nationaux à internaliser les
coûts (au moins certains) d’une absence de couverture appropriée contre leurs
dettes en devises. Les arguments contre le choix d’un taux de change flexible
sont qu’ils ne peuvent pas empêcher une appréciation du taux de change réel
(notamment au cours des périodes d’afflux de capitaux, comme on le discute
au chapitre 6) et qu’ils peuvent être caractérisés par une volatilité excessive (
qui peut être exacerbée par un degré élevé de dollarisation, comme indiqué
au chapitre 2) aux effets réels défavorables.
3.2
Les preuves empiriques
Que suggèrent les preuves empiriques concernant les déterminants du choix
d’un régime et de la performance économique sous les différents régimes?
Trois études récentes aident à éclairer ces questions. Collins (1996) a étudié les déterminants du choix d’un régime en Amérique Latine et et aux
Caraïbes, en utilisant un groupe de 24 pays sur la période 1978-92. Les déséquilibres macro-économiques, mesurés par les déficits des comptes courants
et par le passage d’une inflation modérée à une inflation élevée, sont apparus
significativement associés au passage à plus de flexibilité dans les régimes
de change au cours de la période 1978-86 ; cependant, ces indicateurs sont
apparus moins importants au cours de la période 1987-92. Dans les deux
périodes, les économies plus petites et moins ouvertes sont apparues moins
disposées à sélectionner un régime de taux de change flexible. Collins a aussi
soutenu que l’endogénéité du choix d’un régime introduit un biais de
sélection de l’échantillon et rend hasardeuse toute tentative d’associer des
régimes de change à la performance macro-économique (approximée par le
taux de croissance de la production).
Ghosh, Gulde, Ostry, et Wolf (1997), en utilisant un échantillon constitué d’un grand groupe de pays industrialisés et en développement couvrant
la période 1960 à 1990, ont trouvé que les pays ayant une certaine forme de
taux de change fixe enregistraient généralement une inflation plus faible et
moins variable que les pays à régime de taux de change flexible. Cependant,
153
Chapitre 4
la supériorité de la performance en matière d’inflation a été réalisée principalement dans les pays qui ont rarement ajusté ou pas du tout leur taux
de change rattaché. Les pays qui ont fréquemment modifié la parité de leur
taux de change n’ont pas tiré les bénéfices anti-inflationnistes de leur rattachement : en effet, ils ont enregistré des taux d’inflation plus élevés et plus
volatiles que les pays ayant des taux de change fottant librement. Ajoutée
à la récente chute des taux d’inflation à leurs plus bas niveaux depuis les
années 50 dans plusieurs pays à taux de change flexible, cette preuve empirique est en faveur de l’argument selon lequel un simple rattachement du taux
de change n’apporte pas nécessairement une inflation basse. C’est plutôt la
poursuite des politiques macro-économiques appropriées qui est importante,
soit en permettant un maintien du taux de change rattaché, ou dans le cas
des taux de change flexibles, en assurant l’adhérence à un ancrage nominal
tel que l’offre de monnaie.
Dans la même façon, l’étude de Ghosh, Gulde et Wolf (1997) a examiné
la performance de l’inflation des pays qui opéraient sous un régime de caisse
d’émission pendant la période 1970-96. Pour éviter de biaiser les résultats
de leur étude, ils ont contrôlé l’endogénéité du choix du régime, car les pays
qui sont peu enclins à tolérer une forte inflation peuvent être probablement
plus disposés à adopter, en premier lieu, une caisse d’émission . Ils ont
trouvé qu’en moyenne l’inflation, sous des régimes de caisse d’émission,
était substantiellement plus faible que sous d’autres régimes de rattachement. Ils ont soutenu que l’inflation plus faible a été réalisée en partie par
le biais d’un effet de discipline, qui a entraîné une croissance plus faible de
l’offre de monnaie. Mais la différence des taux de croissance de la monnaie ne
suffit pas à expliquer pleinement le différentiel d’inflation ; ce qui suggère un
effet de confiance supplémentaire par lequel une demande de monnaie plus
élevée entraîne une inflation plus faible, pour un taux de croissance monétaire donné. Le dernier effet a semblé être le principal facteur d’explication
de l’ampleur du différentiel. En outre, les déficits budgétaires et la volatilité
de l’inflation ont été aussi réduits sous les régimes de caisse d’émission.
3.3
Un guide pratique
La discussion précédente suggère qu’en pratique il y a de nombreux facteurs
que les décideurs de politique économique devraient considérer lors du choix
d’un régime de change. Comme l’ont souligné Eichengreen et Masson (1998),
ces facteurs peuvent être difficiles à mesurer et peuvent être opposés les uns
Régimes de change
154
aux autres ; la décision finale peut donc dépendre du poids relatif attaché
à chacun d’entre eux dans les pérférences des décideurs de politique économique. En outre, ces pondérations peuvent varier au cours du temps. Néanmoins, des facteurs importants à pondérer lors de la sélection d’un régime de
change comprennent, en pratique :
• La taille et le degré d’ouverture de l’économie. Plus la part du
commerce dans la production est élevée, plus les coûts de la volatilité
du taux de change sont élevés. Par conséquent, les petites économies
très ouvertes devraient opter pour un régime de rattachement.
• Le niveau d’inflation. Un pays qui maintient un taux d’inflation qui est
plus élevé que celui de ses partenaires commerciaux a besoin de maintenir un taux de change flexible pour empêcher une perte de compétitivité.
• Le degré de flexibilité des prix et des salaires. Plus les salaires réels
sont rigides, plus grand est le besoin de flexibilité du taux de change
pour répondre aux chocs extérieurs. En l’absence d’une telle flexibilité,
des chocs réels asymétriques qui requièrent des ajustements du taux de
change réel peuvent causer de larges chutes de la production dans les
pays où les marchés du travail et des biens sont rigides.
• Le degré du développement financier. Dans les pays où les marchés
financiers sont étroits et faiblement développés, un régime de taux de
change flexible peut entraîner de larges fluctuations du taux de change
à cause d’un nombre limité de transactions sur le marché des changes.
• Le degré de crédibilité des décideurs de politique économique.
Plus la réputation anti-inflationniste de la banque centrale est
faible, plus forte est l’utilité d’un rattachement du taux de change dans
le but d’établir la confiance indiquant que l’inflation sera contrôlée. Les
taux de change fixes dans plusieurs pays d’Amérique Latine et d’autres
comme l’Egypte (analysés au chapitre suivant) ont aidé les économies
à réduire l’inflation. Dans les pays ayant une histoire d’échec des tentatives de stabilisation, les formes extrêmes des régimes de rattachement
du taux de change (tels que les caisses d’émission) peuvent être le
choix approprié. Cependant, le gain de crédibilité peut apparaître à un
prix élevé à cause de la perte de flexibilité. L’Argentine en est le cas
approprié (voir chapitre 7).
155
Chapitre 4
• Le degré de mobilité du capital. Plus l’économie est ouverte aux
mouvements de capitaux, plus il est difficile de défendre et de maintenir
un régime de taux de change fixe. Un taux de change fixe, dans un
monde de forte mobilité du capital, est une cible des spéculateurs car
il offre un pari à côté unique. Comme on l’a noté plus tôt, il entraîne
un surendettement sur les marchés internationaux et des hausses de la
dépense et des bulles spéculatives, hausses des prix des actifs (prix
des stocks et de la propriété) qui ne sont pas garantis par l’évolution
des fondamentaux. Ceci affaiblit le secteur financier, qui peut à son
tour réduire la confiance dans la capacité des autorités à défendre le
régime de rattachement du taux de change.
Le degré élevé de la mobilité du capital dans le monde (discuté au chapitre
6) a en effet rendu les régimes de rattachement de taux de change (ajustables
ou non) moins crédibles et plus difficiles à soutenir, même avec des fondamentaux économiques solides et un policy mix cohérent. La vulnérabilité de
tels systèmes aux changements brusques de sentiment de l’investisseur a été
bien illustrée par certaines crises monétaires récentes (voir chapitre 7). En
conséquence, des économistes comme Obstfeld et Rogoff (1995) ont soutenu
que de nos jours il peut être préférable pour les pays d’adopter soit des taux
de changes fixes en permanence (comme dans une union monétaire) ou des
taux de changes totalement flexibles.
Plus généralement, les limites que l’ouverture des marchés de capitaux
et la forte mobilité des capitaux mettent sur la gestion du taux de change
et la politique monétaire sont bien résumées par la notion de trilemme de
l’économie ouverte soulignée par Obstfeld (1998) : un pays ne peut pas
maintenir simultanément des taux de changes fixes et un marché de capitaux
ouvert tout en poursuivant une politique monétaire tournée vers les objectifs
économiques intérieurs. Les décideurs de politique économique ne peuvent
choisir que deux des objectifs ci-dessus. Si la politique monétaire est déterminée par des objectifs économiques intérieurs, soit la mobilité des capitaux
ou l’objectif de taux de change doit être abandonné. Si un régime de taux
de change fixe et une grande ouverture du compte capital sont les objectifs
premiers de politique, l’objectif de maintien d’une politique monétaire autonome doit être abandonné. Par conséquent, plus l’objectif de taux de change
est important, plus la politique monétaire sera contrainte dans sa poursuite
d’autres objectifs (intérieurs) de politique économique.
Régimes de change
156
Enfin, il est aussi important de souligner que des considérations affectant
le choix du régime de taux de change — de même que les préférences des décideurs de politique économique — peuvent varier au cours du temps. Quand
l’inflation est élevée, un régime de rattachement peut être plus efficace pour
la réduire, du moins à court terme (voir chapitre 5). Mais quand la stabilisation est réalisée, les pays devraient évoluer vers un régime plus flexible.
La politique de taux de change d’Israël, par exemple, a entraîné le passage
d’un taux de change fixe (imposé au milieu des années 80 pour stabiliser la
forte inflation) à un régime de marges de fluctuation qui a été ultérieurement élargie pour empêcher une perte de compétitivité. Cette stratégie de
sortie est particulièrement importante quand le regain de l’activité économique est associé aux pressions inflationnistes et dans des cas où de larges
entrées de capitaux surviennent. Sous ces circonstances, un taux de change
plus flexible peut aider à alléger les pressions inflationnistes et empêcher une
surévaluation du taux de change réel (Eichengreen et Masson (1998)).
Une stratégie de sortie qui peut s’avérer intéressante est celle d’un régime de marges rampantes (discuté plus tôt) où le taux de change est
autorisé à flotter à l’intérieur de certaines limites et la marge elle-même
est dévaluée selon un sentier prédéfini, déterminé sur la base, par exemple,
du différentiel d’inflation entre l’économie nationale et ses principaux partenaires commerciaux. L’objectif de ce régime est, comme on l’a indiqué plus
tôt, d’obtenir le meilleur des deux possibilités : donner un certain ancrage
contre les anticipations inflationnistes, mais aussi éviter la surévaluation et
restaurer le pari réciproque des spéculateurs en utilisant des marges suffisamment grandes. L’inflation est donc réduite plus lentement, mais tant que la
discipline budgétaire est maintenue, les marges de fluctuation peuvent être
préservées. Cependant, sans la consolidation budgétaire, ce régime n’est pas
plus fructueux qu’un autre, comme l’illustre la récente décision du Brésil
d’abandonner son régime de marges de fluctuation. Des déséquilibres budgétaires soutenus entraînent des taux d’intérêts nationaux plus élevés, attirant
des entrées de capitaux à court terme ; un changement brutal du sentiment
du marché peut entraîner des sorties insoutenables de capitaux, forçant la
banque centrale à abandonner le taux d’intervention plafond et laisser le
taux de change flotter. Dans cette perpective, la question n’est donc pas
celle des taux de change fixes contre des taux flexibles, mais plutôt celle des
bonnes politiques contre des mauvaises politiques.
157
4
Chapitre 4
Interactions des politiques et crédibilité du
taux de change
Le thème sous-jacent de la majeure partie de la discussion précédente est
l’idée que l’utilisation du taux de change comme instrument de politique
économique entraîne une interaction entre les objectifs de politique économique. Par exemple, des tentatives visant à maintenir un taux de change fixe
en présence d’une inflation intérieure élevée (qui tend à réduire la compétitivité) et un déficit du compte courant large et croissant ne sont généralement
pas viables si les réserves officielles et la capacité d’emprunter sur les marchés
de capitaux internationaux sont limitées. Inversement, bien qu’une dévaluation du taux de change nominal puisse entraîner une dépréciation du taux
de change réel et améliorer la balance commerciale (comme on le discute
dans la prochaine section), elle peut entraîner une hausse des prix intérieurs,
rongeant en définitive l’effet positif initial sur la compétitivité.
Un argument central de la littérature récente sur la gestion du taux de
change est qu’un taux de change fixe peut donner une crédibilité à l’engagement du gouvernement en faveur d’une politique monétaire stable. En réduisant les anticipations inflationnistes et donc les taux d’intérêt, la crédibilité
accrue peut entraîner une production plus élevée. Cependant, le problème est
que l’engagement du gouvernement de fixer le taux de change peut lui-même
manquer de crédibilité. Comme indiqué plus haut, la raison est que les gouvernements sont confrontés aux interactions entre les politiques lors du
choix de fixer ou non le taux de change. En particulier, le gouvernement peut
être tenté de revenir sur sa promesse de conserver le taux de change fixe à
cause des rendements potentiellement élevés d’une dévaluation non-anticipée.
Par conséquent, à moins que le coût (économique ou politique) de la dévaluation soit suffisamment élevé, un taux de change fixe ne réalisera presque
jamais la crédibilité totale.
Un modèle simple qui décrit ce type d’interactions de politique économique auxquelles les gouvernements sont confrontés quand ils choisissent de
fixer le taux de change a été développé par Welch et McLeod (1993) et est
présenté ici. Les autorités font face à une interaction dans la situation suivante.
• D’un côté, une dépréciation du taux de change réel réduit les importations et stimule les exportations, entraînant de ce fait l’accumulation
Régimes de change
158
des réserves de change. Les réserves extérieures, à leur tour, améliorent
l’offre des services de liquidités pour les transactions extérieures12 .
• De l’autre côté, cependant, une dévaluation nominale augmente les prix
intérieurs à travers son effet sur le prix des biens importés (intermédiaires ou finals).
Pour capter cette interaction de politique économique entre l’inflation
et l’accumulation des réserves de change, supposons d’abord que des dépréciations non-anticipées de la monnaie nationale améliorent la balance des
paiements, c’est-à-dire, la variation des réserves de changes de la banque
centrale, ∆R :
∆R = α(ε − εa ) + u, α > 0,
(1)
où ε (εa ) est le taux courant (anticipé) de dépréciation du taux de change
nominal, et u un choc aléatoire extérieur de moyenne nulle et de variance σ 2u .
Cette équation peut être considérée comme une forme quasi-réduite découlant d’un modèle dans lequel la production elle-même dépend des variations
non-anticipées des prix. En effet, en supposant que l’économie produise uniquement un bien échangeable, que la parité de pouvoir d’achat s’applique
continuellement et que l’inflation mondiale est nulle, le taux d’inflation courant, π, est égale au taux de dépréciation, ε. Supposons que le taux d’inflation
anticipé (ou taux de dévaluation) par le secteur privé, π a , est fixé avant que
le gouvernement ne décide de modifier ou non le sentier du taux de change.
π a et π peuvent en général différer, la fonction de perte du secteur privé est
donc une fonction de la différence π − π a . Mais en moyenne, les anticipations
d’inflation doivent être corrigées. Par conséquent, pour minimiser les pertes
dues aux prédictions incorrectes, les agents économiques privés agiront pour
assurer qu’ex-post,
π a = Eπ, or εa = Eε.
(2)
La fonction de perte de la banque centrale, L, est supposée être de
forme quadratique et est donnée par
L=
12
ε2 β
+ (∆R − ∆R̃)2 , β > 0,
2
2
(3)
Comme l’ont noté Welch et McLeod (1993), les réserves de change ont aussi une
valeur d’assurance qui peut être particulièrement élevée pour ceux des pays qui n’ont
pas accès aux instruments commerciaux de dettes conditionnelles émis sur les marchés
internationaux de capitaux.
159
Chapitre 4
où ∆R̃ désigne la variation désirée des réserves (supposées constantes), et
β un coefficient qui mesure l’interaction entre l’inflation et les réserves internationales ; plus β est élevé, plus élevé sera le poids que les décideurs de
politique économique attacheront aux déviations des réserves de leur valeur
cible.
Supposons que la banque centrale puisse réagir plus rapidement aux chocs
que le public, car les prix sont fixés avant que le choc soit révélé. La banque
centrale sera ensuite capable de causer des déviations temporaires de la parité
de pouvoir d’achat en modifiant de façon inattendue le taux de change nominal. Plus spécifiquement, supposons que la synchronisation des évènements
est la suivante :
• Le secteur privé fixe ses anticipations de dévaluation (ou d’infation) et
conclut des contrats basés sur ces anticipations.
• L’économie est frappée par un choc extérieur aléatoire (par exemple,
un choc des termes de l’échange ou du taux d’intérêt mondial), u.
• La banque centrale fixe le taux de dévaluation sur la base de la valeur
observée du choc.
Etant donné cette séquence, les solutions d’équilibre sont données comme
suit. Sous la discrétion, ou d’un régime de taux de change flexible, la banque
centrale choisit le taux de dévaluation pour minimiser sa perte de politique
économique. Formellement, en substituant l’Equation (1) dans l’Equation
(3), il en résulte que :
L=
ε2 β
+ [α(ε − εa ) + u − ∆R̃]2 .
2
2
(4)
La minimisation de cette expression par rapport à ε implique de fixer
∂L/∂ε = 0, ce qui entraîne
ε + αβ[α(ε − εa ) + u − ∆R̃] = 0,
c’est-à-dire, avec Ω = 1 + α2 β :
ε = αβ
α2 β a αβ(∆R̃ − u)
(αεa − u + ∆R̃)
=
ε +
.
1 + α2 β
Ω
Ω
(5)
Régimes de change
160
L’Equation (5) représente la fonction de réaction des décideurs de politique économique, qui considère le taux anticipé d’inflation-dévaluation, εa ,
comme donné. Cependant, à l’équilibre, la valeur de εa doit être compatible
avec la valeur (anticipée) du taux de dévaluation fixé par la banque centrale,
donné par sa fonction de réaction. En fixant εa = Eε dans l’Equation (5), et
en notant que Eu = 0, cette condition implique que
εa = αβ∆R̃.
(6)
En substituant ce résultat dans l’Equation (5) cela entraîne
ε=
αβ
αβ
(Ω∆R̃ − u) = αβ∆R̃ −
u,
Ω
Ω
(7)
ce qui implique que
αβ
u.
(8)
Ω
En substituant l’Equation (8) dans l’Equation (1) cela implique que la
variation actuelle des réserves est
ε − εa = −
∆R = α(−
αβ
u
)u + u = .
Ω
Ω
(9)
Parce que εa = Eε, la perte anticipée du secteur privé est nulle. En
substituant les Equations (6), (8), et (9) dans (4) cela implique que
(
)2
1
αβ
L=
u
αβ∆R̃ −
2
Ω
+
β u
( − ∆R̃)2 .
2 Ω
Parce que u est non-corrélé à ∆R̃, la perte anticipée de la banque centrale
est
(αβ)2
αβ σ 2 β σ 2
∆R̃2 + ( )2 u + ( u2 + ∆R̃2 ),
2
Ω
2
2 Ω
ou de façon équivalente
ELD =
"
#
β
σ 2u
2
EL =
Ω∆R̃ +
.
2
Ω
D
(10)
Sous un pré-engagement crédible, la banque centrale fixe irrévocablement le taux de change ; le taux de dévaluation sera donc nulle (ε = 0) et
le secteur privé s’attendra aussi à ce que εa = 0. En fixant ε = εa = 0 dans
161
Chapitre 4
l’Equation (1) cela entraîne que les variations courantes des réserves sont
données par
∆R = u.
(11)
En substituant ce résultat dans l’Equation (3), avec ε = 0, il en résulte
que
LF = β(u − ∆R̃)2 /2.
A nouveau, parce que ε = εa , la perte anticipée du secteur privée est
nulle. Avec u non correlé à ∆R̃, la perte anticipée du décideur de politique
économique est simplement
ELF =
β
(∆R̃2 + σ 2u ).
2
(12)
En l’absence d’un mécanisme d’engagement qui force la banque centrale
à maintenir le taux de change fixe, la meilleure option (ou stratégie dominante) pour le gouvernement est la discrétion, ou le taux de change flexible.
La raison est que la récompense de la banque centrale quand ε > 0 est
sans ambiguité plus grande que quand ε = 0. En sachant cela, le secteur
privé s’attendra toujours à ce que la banque centrale opte pour un régime de
change flexible. Par conséquent, le résultat d’équilibre sera celui qui est
discrétionnaire.
Au contraire, supposons en effet qu’il y ait un mécanisme d’engagement
(telle qu’une législation ou une adhésion à une union monétaire) qui permet
à la banque centrale de se pré-engager crédiblement pour un taux de change
fixe. Est-ce que l’engagement est toujours préférable? Considérons d’abord
le cas dans lequel il n’y a pas de chocs aléatoires qui frappent l’économie, ou
de façon équivalente ici σ 2u = 0. Des Equations (10) et (12), il en résulte
ELD =
βΩ∆R̃2
,
2
ELF =
β∆R̃2
,
2
(13)
ce qui implique que comme Ω > 1 :
ELD > ELF .
Donc, la perte sous un régime de discrétion est toujours supérieure à la
perte sous un engagement, un régime de taux de change fixe est toujours
préférable.
Régimes de change
162
Est-ce que ce résultat continue de s’appliquer en présence de chocs aléatoires, c’est-à-dire, σ 2u 6= 0? En soustrayant l’expression pour ELC donné
dans l’Equation (12) de l’expression donnée en (10) pour ELD , il en résulte
"
#
(αβ)2
σ2
∆R̃2 − u ,
EL − EL =
2
Ω
D
F
(14)
dont le signe est en général ambigu. Ce que cela signifie est que même s’il
y a en effet un engagement technologique qui permet à la banque centrale
d’établir un taux de change irrévocabement fixe et totalement crédible, une
discrétion peut être préférable à un pré-engagement. Spécifiquement, tant
que ELD −ELF < 0, la banque centrale se porte mieux en choisissant la
discrétion. Il peut être établi que l’effet d’une augmentation de ∆R̃ sur la
quantité ELD −ELF est positif, celui de σ 2u est négatif, et celui de α et β
ambigu. Par exemple, plus le degré de volatilité des chocs extérieurs (σ 2u )
est élevé , plus il est probable que la banque centrale choisira un régime
discrétionnaire.
L’analyse précédente indique aussi que les régimes de taux de change fixes
et flexibles ont différentes implications pour l’inflation et les réserves. Si la
banque centrale peut s’engager crédiblement à la règle de taux de change qui
fixe ε = 0, les taux d’équilibre du taux de dépréciation du taux de change et
d’inflation, ε, seront de zéro, alors que les fluctuations des réserves courantes
s’adapteront totalement aux chocs extérieurs [Equation (11)]. Cependant,
plus la variance du choc extérieur u, est élevée ou plus le niveau désiré d’accumulation des réserves par la banque centrale est grand, plus sa perte en
bien être sera élevée.
Une possibilité apparente pour la banque centrale d’améliorer le résultat
associé à une politique de fixation de ε = 0 devrait impliquer de tromper :
la banque centrale peut commencer par annoncer un taux de change fixe
et ensuite choisir de dévaluer. La raison est que l’inflation anticipée, lors de
l’annonce, tombe à zéro. Formellement, en maximisant l’Equation (4) par
rapport à ε avec εa = 0 [ou en fixant directement εa = 0 dans la fonction de
réaction (5)], il en résulte que
ε=
αβ(∆R̃ − u)
.
Ω
(15)
En substituant ce résultat dans l’Equation (1) avec εa = 0 cela implique
163
Chapitre 4
qu’une accumulation présente de réserves sous la tromperie sera
α2 β∆R̃ u
∆R = αε + u =
+ .
Ω
Ω
(16)
En substituant les Equations (15) et (16) dans (3), il en résulte que
1
L=
2
(
αβ(∆R̃ − u)
Ω
)2
+
α2 β
β u
[ − (1 −
)∆R̃]2 .
2 Ω
Ω
La perte anticipée de la banque centrale est maintenant
ELC = (
αβ 2 ∆R̃2
∆R̃2
αβ σ 2 β σ 2
)
+ ( )2 u + ( u2 + 2 ),
Ω
2
Ω
2
2 Ω
Ω
c’est-à-dire
(
αβ
β
ELC = ( )2 + 2
Ω
Ω
)(
)
∆R̃2 + σ 2u
.
2
car
αβ 2
β
(1 + α2 β)
β
) + 2 =β
,
=
Ω
Ω
Ω2
Ω
ELC peut aussi être écrit comme
(
β
ELC =
Ω
(
)
∆R̃2 + σ 2u
.
2
(17)
Supposons que σ 2u = 0. En utilisant les Equations (13) et (17), on peut
montrer que
ELD > ELF > ELC .
Par conséquent, bien que trois régimes génèrent des pertes attendues positives, la perte attendue sous le régime de tromperie est plus faible que celle
obtenue sous les régimes d’engagement et de discrétion. Cependant, une telle
situation n’est pas conséquente. Le public reconnaîtrait l’incitation de la
banque centrale à tromper, et le résultat d’équilibre reviendrait au cas
du taux de change flexible discrétionnaire13 . Les individus rationnels reconnaîtront la motivation du décideur de politique économique à revenir sur son
13
Aussi, une fois que le public réalise que le gouvernement l’a trompé, il perdra sa
réputation, ce qui peut être difficile à retrouver et augmentera la perte de politique dans
le temps. Voir Agénor (1994) et Cukierman (1992).
Régimes de change
164
annonce de taux de change et fixeront les anticipations et les prix pour assurer que le coût marginal de la dévaluation est égal au bénéfice marginal de
la banque centrale.
L’idée de l’analyse précédente est que, dans un cadre dans lequel une
faible inflation et une accumulation de réserves de change sont les objectifs de
politique économique, la possibilité que la banque centrale puisse augmenter
les réserves en dévaluant affectera la crédibilité d’un régime de taux de change
fixe et entraînera une dévaluation ou un biais inflationniste, tant que
la variation désirée des réserves est positive (∆R̃ > 0), l’accumulation des
réserves de valeurs par la banque centrale (β > 0), et les variations de change
affectent la balance des paiements (α > 0). Les agents privés, sachant que la
banque centrale a une motivation de dévaluation pour accumuler des réserves,
s’attendront à ce qu’une dévaluation se produise. Ils fixeront les prix en
conséquence, générant ainsi une inflation positive sans tenir compte de la
situation de la politique annoncée par la banque centrale. Même si, en réalité,
la banque centrale ne dévalue pas, quand les agents privés s’attendent à la
dévaluation, l’économie souffrira de l’inflation.
Parce que Ω > 1, le coefficient de la variable aléatoire u dans la solution
pour les réserves sous le régime de discrétion [Equation (9)] est plus faible que
le coefficient correspondant sous le régime des taux de change fixes [Equation
(11)]. Le régime des taux de change flexibles est donc mieux à même de réduire
les fluctuations des réserves de change qui proviennent des chocs extérieurs
inattendus. Cependant, comme dans le cas d’un taux de change fixe crédible,
en équilibre la banque centrale ne peut pas affecter la variation anticipée (ou
la variation moyenne) des réserves extérieures.
La discussion précédente est une illustration utile de la manière dont les
interactions politiques affectent le choix d’un régime de change. Bien qu’un
engagement crédible à un régime de taux de change fixe peut éliminer le biais
inflationniste associé à un régime de taux de change flexible, il accroît aussi
la vulnérabilité de l’économie aux chox extérieurs, comme on l’a discuté plus
haut en relation avec l’Equation (14). Le choix du régime dépend donc de
l’importance relative que la banque centrale attache à chacun de ses deux
objectifs de politique économique. Plus généralement, La question de savoir
si un pays devrait opter pour un régime de taux de change fixe dépend aussi
de l’importance relative que la banque centrale accorde aux réserves par
rapport à l’inflation, β, de l’importance de la sensibilité des variations des
réserves aux variations non-anticipées du taux de change, α, et de l’objectif
des variations des réserves, ∆R̃.
165
Chapitre 4
D’autres modèles qui soulignent les interactions que l’utilisation du taux
de change comme un instrument de politique économique entraîne sont ceux
de Agénor (1994), Agénor et Masson (1999), et Devarajan et Rodrik (1992).
Agénor (1994) a souligné l’interaction entre l’effet de compétitivité (le
fait qu’une dévaluation nominale peut entraîner une dépréciation réelle et
une expansion des exportations) et l’effet inflationniste, alors que Agénor et Masson (1999) se sont concentrés sur l’interaction entre l’effet taux
d’intérêt et l’effet inflationniste en présence des chocs extérieurs sur la
balance des paiements et de mobilité imparfaite des capitaux. L’effet taux
d’intérêt résulte du fait qu’un choc défavorable, par exemple des flux de capitaux, réduit les réserves officielles. En l’absence d’une stérilisation complète
( définie au chapitre 6), la chute des réserves se traduit par une baisse de
l’offre de monnaie, qui à son tour entraîne une pression à la hausse des taux
d’intérêt intérieurs. De telles variations des taux d’intérêt peuvent avoir des
effets défavorables sur la production, ou, comme cela est analysé plus en
détail au chapitre 7, peuvent exacerber les faiblesses du système bancaire.
Devarajan et Rodrik (1992) ont considéré un modèle dans lequel l’interaction à laquelle les décideurs de politique économique sont confrontés dans
la gestion du taux de change implique
• le biais inflationniste associé à la flexibilité du taux de change, comme
dans les modèles discutés plus haut ;
• le fait que les variations de taux de change peuvent être utilisées pour
réduire la variabilité de la production en lissant les conséquences des
chocs des termes de l’échange sur la production.
Dans ce modèle, comme dans le cadre de Welch-McLeod décrit plus tôt,
il n’est pas possible de ranger a priori les régimes de taux de changes fixes
et flexibles (ou discrétionnaires).
• Pour des chocs importants des termes de l’échange, les taux de change
flexibles sont probablement supérieurs. De même, plus l’économie réelle
est vulnérable à ces chocs des termes de l’échange, plus les régimes de
taux de change flexibles sont désirables.
• Plus l’encastrement du décideur de politique économique dans le biais
inflationniste (de dévaluation) est grand, plus la tentation est grande
d’appliquer une dévaluation surprise, et moins un régime de change fixe
sera désirable.
Régimes de change
166
Enfin, un point important évoqué par Agell, Calmfors, et Jonsson (1996)
est la nécessité de prendre en compte non seulement les problèmes de crédibilité qui surviennent quand seul le taux de change est utilisé comme instrument de politique économique, mais aussi les problèmes qui peuvent émerger
quand d’autres instruments sont utilisés au même moment par les décideurs
politiques. Spécifiquement, Agell, Calmfors et Jonsson (1996) ont considéré
l’interdépendance entre les politiques de taux de change et budgétaire dans
une petite économie ouverte, et ses implications pour la crédibilité du régime
de rattachement. Leur analyse utilise un modèle dans lequel le décideur de
politique économique peut utiliser à la fois les politiques de taux de change
et budgétaire pour affecter la production et l’emploi. Ils ont montré que l’équilibre sous le régime de discrétion implique l’inflation (c’est-à-dire un biais
de dévaluation, comme dans le modèle décrit plus haut) ainsi qu’une accumulation de la dette publique. Sous le régime d’engagement dans lequel
le taux de change est crédiblement fixé, l’infation est plus faible, mais ceci
n’améliore pas sans ambiguïté le bien-être. La raison est que en l’absence de
restrictions adéquates sur la politique budgétaire, la réduction de l’inflation
est réalisée aux dépens des déficits publics accrus. Les règles budgétaires peuvent, bien sûr, être critiquées. Elles sont souvent de nature arbitraire. Plus
important, les décideurs de politique économique peuvent avoir besoin d’une
flexibilité budgétaire dans le cas des chocs défavorables affectant l’économie.
Néanmoins, l’analyse de Agell, Calmfors et Jonsson fournit un rappel crucial
de l’importance de la compréhension des interactions entre différents instruments de politique économique dans l’analyse des questions de crédibilité.
5
Taux de change, compétitivité et balance
commerciale
L’ajustement du taux de change a souvent figuré de façon remarquable dans
les programmes d’ajustement appliqués dans les pays souffrant des déficits de
comptes courants chroniquement élevés. La raison est que les variations des
taux de change nominaux peuvent avoir des effets significatifs sur la compétitivité internationale et les flux commerciaux, en dépit du fait que ces effets
peuvent prendre un temps substantiellement important pour se réaliser. Il est
donc important de comprendre les mécanismes par lesquels les variations des
taux de changes nominaux affectent les importations et les exportations, et
167
Chapitre 4
plus généralement l’activité économique. Cette section commence par décrire
certaines des mesures de la compétitivité les plus couramment utilisées. En
utilisant une approche d’équilibre partiel, elle examine ensuite l’effet de la
dévaluation sur la balance commerciale. La section suivante étendra l’analyse
pour considérer un modèle macro-économique complet et étudiera l’effet des
variations des taux de changes non seulement sur les flux commerciaux mais
aussi sur la production réelle.
5.1
Mesurer la compétitivité
Les mesures de la compétitivité internationale tentent de capter les variations
du prix relatif des biens extérieurs échangeables par rapport aux biens domestiques échangeables ; elles sont généralement fondées sur les indicateurs
de taux de change réel 14 . Comme l’ont discuté Marsh et Tokarick (1996),
il y a trois mesures de compétitivité très utilisées pour les pays en développement : celles basées respectivement sur les prix à la consommation, les
valeurs unitaires des exportations et les coûts unitaires de la main-d’oeuvre.
La mesure de compétitivité la plus fréquemment utilisée est le taux de
change réel basé sur les prix à la consommation, zC . Cet indice est donné par
zC = E · PC∗ /PC ,
(18)
où E est le taux de change nominal (mesuré en unités de monnaie nationale
par unité de devise), et PC (PC∗ ) est l’indice des prix domestiques (étrangers)15 . Une augmentation de l’indice des prix à la consommation domestique
par rapport à l’indice des prix à la consommation étranger se traduira donc
par une appréciation du taux de change réel (une baisse de zC ).
Une raison majeure pour laquelle le taux de change réel basé sur les
prix à la consommation, Equation (18), est souvent utilisé en pratique pour
évaluer la compétitivité est que les indices des prix sont facilement disponibles
et sont publiés à des intervalles réguliers. Cependant, il y a aussi plusieurs
14
Notons qu’ici le taux de change réel ne correspond pas au prix relatif des biens échangeables et non échangeables à l’intérieur du pays (c’est-à-dire une mesure des termes de
l’échange à travers les secteurs de production) comme c’est le cas ailleurs dans cet ouvrage.
15
Pour la simpicité de l’exposé, la discussion fait l’hypothèse que le reste du monde
consiste en un seul pays étranger. En pratique, tous les partenaires commerciaux sont
pondérés ensemble pour former un pays étranger composite ; le taux de change réel devient
donc un taux de change réel effectif. Pour des détails, voir, par exemple, Bahmani-Oskooee
(1995).
Régimes de change
168
inconvénients associés à l’utilisation de tels indices dans le contexte d’un pays
en développement.
• Les indices des prix à la consommation tendent à exiber une volatilité
significative (due par exemple aux fortes variations du prix des biens
agricoles non-échangés), qui peut être non reliée à la compétitivité.
• L’indice des prix domestique peut être influencé par différents types
d’interventions publiques (comprenant les contrôles des prix et les droits
d’accise), qui peuvent affecter sa fiabilité.
• Les variations des prix des biens intermédiaires (qui comptent pour
une part significative du commerce extérieur de nombreux pays en développement) sont exclues des indices des prix, réduisant de ce fait leur
capacité à mesurer les variations de compétitivité.
• Parce que les indices des prix comprennent des prix des biens finals
importés, ils tendent à refléter les variations du taux de change nominal ;
par conséquent, ils peuvent sous-estimer les variations de compétitivité.
Par exemple, si le taux de change nominal du pays se déprécie, le prix en
monnaie nationale de ses importations augmentera ; et en augmentant
les prix à la consommation, l’ampleur de la dépréciation réelle du pays
sera réduite.
• Souvent, de tels indices ne réflètent pas précisément les développements
sous-jacents des coûts des facteurs.
Un autre indicateur de compétitivité communément utilisé est l’indice
du taux de change réel basé sur les valeurs unitaires des exportations des
produits manufacturés, défini comme
∗
zX = E · PXV
/PXV ,
(19)
où PXV est un indice des valeurs unitaires des exportations du pays domes∗
tique, et PXV
un indice similaire pour les concurrents étrangers. Cet indice est
bien sûr, particulièrement important pour expliquer le comportement des exportations d’un pays. Bien qu’il ne contienne aucune information importante
pour évaluer la performance des importations, il peut être plus approprié que
l’indice basé sur les prix à la consommation (qui inclut le prix des biens nonéchangés) pour expliquer le comportement de la balance commerciale. Un
169
Chapitre 4
inconvénient majeur de cette mesure est que les valeurs unitaires des exportations étant calculées en divisant la valeur nominale des exportations par la
quantité exportée, mesurent uniquement la valeur moyenne des exportations
par unité physique. Elles sont donc des proxy des prix des exportations et
non les vrais prix auxquels les transactions prennent place. Les variations de
l’indice (19) sont donc sensibles aux variations de la composition des exportations entre les pays, qui peuvent elles-mêmes être non-reliées aux variations
de la compétitivité elle-même16 .
Le troisième indicateur de compétitivité couramment utilisé est basé sur
les coûts relatifs unitaires de la main-d’oeuvre dans le secteur manufacturé.
Pour chaque pays, l’indice des coûts unitaires de la main-d’oeuvre est défini
comme le ratio d’un indice de compensation horaire par travailleur dans le
secteur manufacturé (obtenu comme le total des revenus du travail divisés
par l’emploi) rapporté à un indice de la valeur ajoutée horaire par individu,
c’est-à-dire la productivité17 . Formellement, cet indicateur est défini comme
zL =
∗
L∗M /VM∗
EIU∗ LC
EwM
=
,
IULC
wM LM /VM
(20)
∗
, L∗M , et VM∗ ) sont le taux de salaire,
où wM , LM , et VM (respectivement, wM
l’emploi et la valeur ajoutée réelle — ou production réelle — dans le secteur
manufacturé national (respectivement étranger). Cet indice est particulièrement utile comme indicateur de compétitivité (et de profitabilité) dans le
secteur manufacturé pour les pays où les coûts salariaux sont une composante importante des coûts de production. Cependant, il a aussi ses limites
(Marsh et Tokarick, 1996).
• Il devient moins utile quand (comme c’est le cas dans de nombreux
pays en développement) une variété de biens intermédiaires sont utilisés
dans le pocessus de production et quand la compensation des coûts non
salariaux ou coûts du capital sont élevés.
• Les coûts unitaires de main-d’oeuvre ne sont pas toujours fiables et
16
Les prix des exportations peuvent aussi être fortement influencés par des stratégies
de prix à court-terme, telles que la fixation des prix du marché. Voir Marsh et Tokarick
(1996).
17
L’indice est aussi souvent calculé en utilisant des coûts unitaires de main-d’oeuvre
normalisés, qui sont obtenus en enlevant les variations cycliques des coûts, en utilisant par
exemple, le filtre de Hodrick-Prescott discuté au chapitre 9.
Régimes de change
170
peuvent être fortement sensibles aux variations cycliques de la productivité du travail.
• Les variations des coûts unitaires de main-d’oeuvre peuvent aussi refléter la substitution entre les facteurs de production plutôt que les
variations de compétitivité. Par exemple, une hausse de l’intensité capitalistique peut accroître la productivité du travail et réduire les coûts
unitaires salariaux sans améliorer la compétitivité car le capital représente maintenant une part plus grande des coûts unitaires de production.
Les mesures de compétitivité basées sur les coûts et les prix sont liées
de plusieurs façons. Dans la mesure où, par exemple, l’indice des prix à la
consommation est une fonction (linéaire) du prix de la valeur ajoutée de
chaque bien produit dans l’économie (y compris les biens manufacturés) et si
chaque prix de la valeur ajoutée peut être écrit comme une fonction des coûts
salariaux et des coûts du capital (profits), les indices de taux de change réel et
les coûts salariaux unitaires sont clairement liés. Cependant, dans la mesure
où les prix des biens intermédiaires ou du capital varient dans le temps et dans
la mesure où les variations sont reflétées dans les prix à la consommation, le
comportement des deux indices peut être remarquablement différent.
La figure 4.4 compare, pour un groupe de 20 pays en développement pour
lesquels les données étaient disponibles, le coefficient de variation — le ratio
de l’écart-type à la moyenne — du taux de change effectif réel basé sur les
prix à la consommation et sur les coûts unitaires du travail sur la période
1979-95. Très peu d’observations sont en fait situées sur ou proche de la ligne
à 45 degrés, un résultat qui suggère que les deux indices peuvent fournir
des descriptions très différentes des fluctuations du taux de change réel et
donc des variations de la compétitivité. L’implication de l’analyse ci-dessus
est donc que bien que le taux de change effectif réel basé sur les prix à la
consommation reste le principal indice utilisé pour une large majorité de pays
en développement (principalement à cause de la disponibilité des données et
de l’étendue de la couverture), il ne fournit pas nécessairement une mesure
précise de la compétitivité des exportations.
5.2
Dévaluation et balance commerciale
Les effets des variations du taux de change sur les flux commerciaux est le sujet d’une grande controverse en macro-économie d’économie ouverte. L’ana-
171
Chapitre 4
lyse conventionnelle suggère qu’une dévaluation nominale affecte l’économie
à travers deux types de canaux :
• en tant que politique de réduction de la dépense, elle réduit la
dépense privée et la demande globale en augmentant le niveau des prix
et en réduisant les encaisses monétaires réelles ou, plus généralement,
la valeur réelle des actifs financiers ;
• en tant que politique de modification de la dépense, elle influence
la composition de la production et l’absorption domestique entre les
biens échangés (importables et exportables) et les biens non-échangés.
Ces effets d’offre et de demande d’une dévaluation nominale opèrent à travers son impact sur les prix relatifs et dépend de différentes caractéristiques
structurelles, comprenant les mécanismes de formation des prix et des salaires
dans le secteur des biens non-échangeables. Dans la mesure où les prix des
facteurs de production (travail et capital) augmente moins que proportionnellement à l’augmentation du prix de la production en monnaie nationale,
une dévaluation peut entraîner une expansion de l’activité, au moins à court
terme . La hausse du prix relatif des biens importables tend aussi à réduire
leur demande et à accroître la demande des biens non-échangeables ; ceci
tend aussi à stimuler la production domestique à court terme .
L’analyse des effets des variations du taux de change sur la balance commerciale est souvent effectuée dans un cadre d’équilibre partiel, c’est-à-dire en
analysant seulement les effets des variations de parité sur les flux commerciaux. Par simplicité, supposons que le pays considéré ne produit qu’un seul
bien, qui est utilisé pour les exportations et la consommation domestique. Le
prix du bien, P , est fixé sur les marchés domestiques18 . Désignons par X et J
les valeurs nominales des exportations et des importations, respectivement,
définies comme X = P QX et J = PJ QJ , où QX et QJ sont des exportations
réelles et les importations réelles. PJ est le prix des biens importés mesuré
en termes de monnaie nationale, c’est-à-dire, PJ = EPJ∗ , avec E le taux de
change nominal et PJ∗ le prix mondial. La balance commerciale en termes
réels (c’est-à-dire, en termes de prix des biens domestiques) peut être écrite
18
Cette hypothèse n’est pas tout à fait valable pour la plupart des économies en développement (les prix des exportations de ces pays sont généralement fixés sur les marchés
internationaux), mais il sera adopté ici, encore une fois, pour simplifier la présentation.
Régimes de change
172
comme b = QX − zQJ , où z = PJ /P mesure le prix relatif des importations
en termes de biens domestiques. La variation en b est donnée par
∆b = ∆QX − z∆QJ − QJ ∆z,
ce qui implique que
∆QX
∆QJ
∆b
=
− z(
) − QJ ,
∆z
∆z
∆z
ou de façon équivalente
(
QX
∆QJ
z
∆QX z
zQJ
∆b
=(
) (
) − z(
)(
)(
)−
∆z
z
QX ∆z
∆z QX
QX
)
.
Supposons que le commerce extérieur est initialement équilibré, de sorte
que QX = zQJ . L’expression ci-dessus peut être réécrite comme
(
)
QX
∆QJ z
∆QX z
∆b
=(
) (
)−(
)( ) − 1 .
)(
∆z
z
QX ∆z
∆z QJ
(21)
Désignons par ηX ≡ (∆QX /QX )(z/∆z) l’élasticité prix relatif de la demande extérieure des exportations, et désignons par ηJ ≡ −(∆QJ /QJ )(z/∆z)
(la valeur absolue de) l’élasticité de la demande intérieure des importations.
L’équation (21) devient donc
QX
∆b
=(
)(η X + ηJ − 1),
∆z
z
ou de façon équivalente
∆b = (
∆z
)QX (η X + ηJ − 1).
z
(22)
Etant donné les niveaux des prix domestiques et des prix en monnaie
étrangère des importations, ∆z/z = ∆E/E ; une augmentation du prix
relatif z reflète donc seulement une dépréciation nominale. Par conséquent,
l’Equation (22) requiert que, pour que la balance commerciale s’améliore
(∆b > 0) à la suite d’une dévaluation :
η X + ηJ > 1,
(23)
173
Chapitre 4
ce qui est connu sous le nom de condition Marshall-Lerner : la somme
des élasticités d’offre des exportations et de demande des importations doit
être supérieure à l’unité pour que la balance commerciale s’améliore19 .
La condition Marshall-Lerner suggère qu’un pas important de l’évaluation
de l’effet des variations de taux de change sur la balance commerciale est d’évaluer la sensibilité des flux commerciaux aux variations des prix relatifs. En
pratique, de telles tentatives prennent la forme de l’estimation économétrique
des équations dans lesquelles les volumes des exportations et des importations
sont liés aux variations des prix relatifs et aux variations de l’activité réelle
soit dans le pays (pour les importations) ou à l’étranger (pour les exportations). De telles équations ont été constamment utilisées dans des travaux de
politique économique et dans les modèles macro-économiques (voir chapitre
9), bien qu’une grande partie des premiers travaux empiriques dans ce domaine ont manqué de précision dans la détermination des élasticités des taux
de change réel. Cette absence de précision était due à plusieurs facteurs :
• L’utilisation des données agrégées des flux commerciaux, comme c’est
souvent le cas en pratique, peut cacher des différences de comportement
entre différents types de biens, tels que les produits manufacturés et les
produits de base. Les figures 4.5 et 4.6 montrent, pour un groupe de
pays en développement en 1993, la composition des exportations et des
importations de marchandises, respectivement. L’importance relative
des biens alimentaires, par exemple, varie entre les pays ; les élasticitésprix peuvent aussi être très différentes.
• Les mesures du taux de change réel basées sur les prix à la consomation ont souvent été utilisées dans les études empiriques à cause de
leur disponibilité. Cependant, comme on l’a discuté plus tôt, de telles
mesures ne peuvent pas refléter suffisamment les variations du prix
des biens échangeables car elles incluent aussi les prix des biens nonéchangés.
• Les variations du régime de politique commerciale ou les changements
au cours du temps dans le type de biens échangés peuvent être importantes et sont souvent insuffisamment captées dans les régressions
estimées.
19
Les conclusions tirées ici font l’hypothèse que les élasticités d’offre des exportations
et des importations sont infinies. Pour un développement plus détaillé de la condition
Marshall-Lerner, voir Södersten (1980, pp. 363-366).
Régimes de change
174
Des études plus récentes continuent d’être confrontées à certains de ces
problèmes mais reposent de plus en plus sur l’analyse de la cointégration
(comme décrite brièvement à l’Appendice du chapitre 2) pour donner plus
de précision et déterminer les élasticités de court terme et de long terme. Par
exemple, les estimations empiriques des élasticités effectuéés par Reinhart
(1995) ont indiqué une élasticité prix à long terme de la demande d’importation de -0,7 pour le Kenya, et une élasticité prix à long terme de l’offre
d’exportation de 0,2, suggérant que la condition Marshall-Lerner n’est pas
satisfaite. Par contraste, les résultats de la Colombie ont indiqué une élasticité
prix de la demande d’importation de -1,4 et une élasticité d’offre d’exportation de 0,5, ce qui assurait qu’une dépréciation réelle améliorerait la balance
commerciale. En général, des études empiriques soulignent l’importance de la
distinction entre les élasticités de court terme et de long terme. Par exemple,
les résultas économétriques fournis par Senhadji (1998, p. 264) — utilisant
encore les techniques de cointégration — ont indiqué que l’élasticité prix à
court terme des importations réelles de biens et services du Nigéria était de
−0, 3, alors que l’élasticité de long terme était de −0, 8.
Différentes autres études empiriques confirment qu’il y a une différence
significative dans le temps des réponses des volumes du commerce à l’activité
et aux prix relatifs. Bien que l’effet de l’activité réelle apparaisse presque
immédiatement, la réponse des volumes du commerce aux variations des taux
de change réels s’effectue plus graduellement au cours du temps. Parce qu’une
dévaluation produit une réponse des termes de l’échange défavorable, avec la
valeur des prix d’importation en monnaie nationale augmentant par rapport
aux prix des exportations, l’impact initial d’une baisse du taux de change
sur la balance commerciale nominale peut être faible ou pervers. Les effets
attendus du taux de change sur la balance commerciale nominale peuvent
devenir apparents seulement à moyen terme.
Une explication possible de ce résultat empirique est que mis à part les
effets prix induits par une dévaluation sur la valeur des importations et des
exportations, la réponse des quantités à ces variations de prix peuvent impliquer des délais considérables. Si les exportations sont facturées en monnaie
nationale, alors que les importations sont facturées en monnaie étrangère,
l’effet initial de la dévaluation est d’aggraver la balance commerciale dans la
mesure où la valeur des exportations en monnaie étrangère baisse, pendant
que la valeur des importations en dollar augmente. Par conséquent, le résultat
de la dévaluation est que la balance commerciale se détériore d’abord avant
qu’elle ne connaisse une quelconque amélioration. Ce phénomène particulier
175
Chapitre 4
a donné lieu à l’effet connu sous le nom d’effet de la courbe en J.
Plus généralement, la littérature qui se concentre sur les liens entre le
taux de change et les prix des biens échangés internationalement caractérise
le canal du taux de change, ou le degré auquel les variations de taux de
change sont reflétées dans les prix des biens échangés en monnaie du pays de
destination, comme consistant aux phases suivantes (voir Menon, 1995) :
• Une phase initiale, la période du contrat monétaire au cours de laquelle
les gains ou pertes en capital sur les contrats en cours sont observés.
• Une période de transition, au cours de laquelle les prix répondent au
nouveau taux de change mais les quantités commerciales ne sont pas
encore affectées.
• Une période d’ajustement des quantités, au cours de laquelle les quantités et les prix évoluent vers un nouvel équilibre.
La balance commerciale peut évoluer vers presque n’importe quelle direction au cours de chacune de ces sous-périodes, et la durée des délais qui
sont impliqués dans la seconde et la troisième phase, qui dépend, en particulier, des caractéristiques du produit et si le comportement de fixation
des prix du marché est ou non présent (voir Krugman, 1987; et Marsh et
Tokarick, 1996), repose significativement sur le résultat global du processus
d’ajustement. En d’autres termes, un passage faible rendrait possible le fait
que les flux commerciaux demeurent relativement insensibles aux variations
des taux de change, en dépit du fait que la demande soit fortement élastique.
En plus, si des délais significatifs existent dans la transmission des variations
du taux de change aux prix, et que par la suite, le délai de réponse des volumes du commerce à la variation du prix relatif est aussi important, alors
le processus d’ajustement de la balance globale des paiements pourrait être
sévèrement gêné.
Une autre question empirique importante est de savoir si oui ou non les
termes d’offre devraient être aussi inclus dans les équations d’exportation.
Les équations standard du volume des exportations ne prennent en compte
que les facteurs de demande, tels que la croissance du revenu extérieur et
des prix relatifs, comme indiqué plus tôt. Dans un cadre traditionnel de demande et d’offre, l’ajout d’un terme d’offre implique de relaxer l’hypothèse
que l’offre est parfaitement élastique, qui est utilisée pour identifier l’équation
Régimes de change
176
d’exportation. Cependant, une explication alternative est la suivante. Supposons que toutes les économies ont les mêmes élasticités-revenu fondamentales.
Alors, avec des taux de change réels stables, les économies à croissance élevée
devraient montrer une tendance des importations à croître plus vite que les
exportations, alors que les économies à croissance lente devraient montrer
des caractéristiques opposées. Deux facteurs peuvent être responsables :
• Comme la production augmente, il en va de même du nombre de marques
produit par le pays. Parce que les consommateurs désirent la diversité,
cette augmentation des marques génère une hausse de la demande des
exportations (voir Krugman, 1989a).
• L’expansion de l’offre de la production peut être corrélée au développement des produits de meilleure qualité aux prix qui entraînent une augmentation de la demande des exportations.
Ce différentiel entre la croissance des exportations et des importations
devrait être compensé par une appréciation du taux de change réel des économies à croissance rapide, dans la mesure où les consommateurs sont dédommagés en acceptant plus de produits de ces économies20 . Cependant, en
pratique, comme discuté au chapitre 10, les économies aux taux de croissance
de la production élevés ont aussi tendance à avoir des taux de croissance des
exportations élevés, sans une preuve significative d’appréciation réelle. Au
contraire, il semble y avoir une relation parfaite entre les élasticités-revenu
étranger de la demande d’exportation et la croissance de la production nationale, un résultat dont Krugman (1989a) se réfère comme étant la règle
de 45-degrés. La prise en compte des facteurs d’offre peut donc être importante lors de l’estimation des équations d’exportation, dans le but d’éviter
le biais de mauvaise spécification. Les équations d’exportation qui incluent
les termes d’offre ont été estimées par exemple par Muscatelli and Stevenson
(1995) pour un groupe de pays asiatiques avec généralement des résultats
significatifs.
Deux autres questions sont intéressantes à souligner dans l’évaluation des
effets des variations des taux de change sur les flux commerciaux et la balance
commerciale.
20
La discussion ignore l’impact du différentiel de la croissance de la productivité entre les
biens échangés et non-échangés sur le taux de change réel. L’effet connu sous l’appellation
de effet Balassa-Samuelson.
177
Chapitre 4
• Comme l’ont souligné Dixit (1989) et Baldwin et Krugman (1989), les
variations du taux de change peuvent avoir des effets permanents sur
la balance commerciale à travers des coûts fixes d’entrée ou de sortie
d’un marché, l’effet connu sous l’appelation de “effet tête de pont”.
• Plusieurs études suggèrent que bien que la volatilité quotidienne des
taux de change dans les régimes de changes flexibles ne semble pas affecter les flux commerciaux, les fluctuations annuelles semblent avoir un
impact significatif sur ces flux, bien qu’il ne devienne apparent que seulement après une ou deux années. Grobar (1993) a fourni une certaine
preuve empirique dans ce sens.
Un problème plus général a trait à la nature d’équilibre partiel de l’analyse
de laquelle est dérivée la condition Marshall-Lerner. En principe, un modèle
macro-économique complet doit être utilisé pour évaluer les effets d’équilibre
général des variations du taux de change sur la production, l’inflation, les
prix relatifs, le budget de l’Etat et la balance commerciale. La section suivante fournit un cadre simple de ce type dans lequel les biens intermédiaires
importés jouent un rôle dans le processus de production, comme c’est souvent
le cas dans les pays en développement. Ce modèle illustre bien l’inadéquation
de l’approche d’équilibre partiel et de l’importance de la prise en compte des
interactions d’équilibre général.
6
Dévaluation et production avec des intrants
importés
Les biens intermédiaires importés jouent un rôle important dans l’activité
économique des pays en développement. Dans certains pays, la part de l’énergie et des importations de biens intermédiaires non-énergétiques peut dépasser les trois cinquièmes du total des importations. A travers le coût des
biens intermédiaires importés, le taux de change nominal peut donc avoir
des effets d’offre à court terme importants, en plus de ses effets standards de
demande. Intuitivement, donc, les effets réels de la dévaluation dépendront
en général de la force relative des réponses de l’offre et de la demande.
Un modèle simple qui souligne les mécanismes par lesquels une dévaluation nominale influence la production à travers le coût des intrants importés
du côté de l’offre et à travers les flux commercaiux et la dépense du côté de la
Régimes de change
178
demande est un cadre statique proposé par Gylfason et Schmidt (1983). Pour
commencer, considérons une petite économie ouverte opérant sous un régime
de taux de change fixe. La production domestique brute, q, est produite à
partir de deux facteurs de production, travail, n, pétrole importé, v, de sorte
que21
q = q(n, v),
(24)
où le prix en devise du pétrole est fixé sur les marchés mondiaux et normalisé
à l’unité. En faisant l’hypothèse que la fonction de production est linéairement homogène, elle peut être exprimée en termes de taux de variation, de
sorte que 22
q̂ = θv̂ + (1 − θ)n̂, 0 < θ < 1,
(25)
où θ et 1 − θ sont, respectivement, les parts du pétrole et du travail dans la
production. L’élasticité de substitution entre les deux facteurs est définie
comme
v̂ − n̂
σ=−
,
(26)
ε − ŵ
où ε est le taux de dévaluation du taux de change nominal (qui est exogène
et égal au prix domestique du pétrole) et ŵ est le taux de variation du salaire
nominal et est considéré comme donné.
La demande dérivée du pétrole peut donc être exprimée sous la forme de
taux de variation comme
v̂ = q̂ − (1 − θ)σ(ε − ŵ).
(27)
Le revenu national réel, y, diffère de la production brute du montant des
importations de pétrole :
y = q − (E/P )v,
où P est le prix de la production intérieure. Cette équation peut être réécrite
comme
q̂
θ
ŷ =
−
(ε − π + n̂),
(28)
1−θ 1−θ
où π ≡ Ṗ /P . En faisant l’hypothèse d’une fixation des prix au coût
marginal, il en résulte que :
π = θε + (1 − θ)ŵ.
21
(29)
L’analyse peut être élargie au cas où la production est aussi une fonction du capital ;
voir Gylfason et Schmidt (1983).
22
Une fonction f (x1 , ...xn ) est linéairement homogène si, pour une constante α,
f (αx1 , ...αxn ) = αf (x1 , ...xn ),Voir Chiang, (1984, pp. 411-414).
179
Chapitre 4
En combinant les Equations (27), (28) et (29), il en résulte
ŷ = q̂ − θ(1 − σ)(ε − ŵ).
(30)
L’Equation (30) montre que si le degré de substituabilité entre pétrole et
travail est suffisamment faible (σ < 1), une dévaluation (une augmentation
de ε) réduira le revenu réel pour un niveau donné de la production intérieure
et des salaires nominaux.
Considérons maintenant le côté de la demande. Par définition, le revenu
national brut, y, est égale à la somme de la dépense réelle intérieure, c, et les
exportations, x, moins les importations de pétrole, v, et les biens finals, h,
tous mesurés en termes du prix de la production intérieure :
y = c + x − h − (E/P )v.
(31)
En faisant l’hypothèse que la balance commerciale est initiallement en
équilibre, c’est-à-dire,
x − h − (E/P )v = 0,
il en résulte que l’Equation (31) peut être réécrite comme
(
)
θ
[x̂ − (1 − β)ĥ − β(ε − π + n̂)],
ŷ = ĉ + λ +
1−θ
(32)
où 0 < λ < 1 et θ/(1 − θ) sont les parts des importations de biens finals et
des importations de pétrole, respectivement, en revenu national et
β=
θ
,
λ(1 − θ) + θ
0 < β < 1.
(33)
β et 1 − β sont les parts respectives du pétrole et des biens finals dans le
total des importations.
L’absorption intérieure (sous la forme de taux de variation) est supposée
être une fonction linéairement homogène du (taux de variation du) revenu et
des encaisses monétaires réelles :
ĉ = γ ŷ + (1 − γ)(µ − π), 0 < γ < 1,
(34)
où µ ≡ Ṁ/M est le taux de croissance du stock nominal de monnaie, M, et
γ l’élasticité revenu de la dépense à court terme
Régimes de change
180
Les exportations sont supposées dépendre du prix relatif des biens étrangers (ou du taux de change réel), E/P , de sorte que, sous forme de taux de
variation :
x̂ = η(ε − π),
(35)
où η > 0 est la valeur absolue de l’élasticité prix de la demande d’exportation.
Les importations des biens finals, mesurés en termes du prix de la production intérieure, sont supposées dépendre de la dépense intérieure et du
taux de change réel :
ĥ = ĉ − δ(ε − π),
(36)
où δ > 0 est la valeur absolue de l’élasticité prix de la demande d’importations
des biens finals. Par simplicité, l’élasticité de la demande des importations de
biens finals par rapport à la dépense totale est supposée être égale à l’unité.
Enfin, la demande de pétrole (mesurée en unités de production intérieure)
peut être exprimée comme une fonction du revenu et du ratio du prix du
facteur en utilisant les Equations (27), (29), et (30) :
ε + v̂ − π = ŷ + (1 − σ)(ε − ŵ).
(37)
En substituant les Equations (34) à (37) dans (32), il en résulte l’expression suivante de l’effet d’une dévaluation (une hausse de ε) sur le revenu
national, pour un taux de croissance donné de l’offre de monnaie et des salaires nominaux :
ŷ/ε = {[λ(1 − θ) + θ]Ω − θΓ} /∆,
(38)
où
Ω = η + (1 − β)δ + βσ − 1,
∆ = 1 − γ(1 − θ)(1 − λ), 0 < ∆ < 1,
Γ = λ(1 − θ)(η + δ − 1) + θη + (1 − θ)(1 − λ)(1 − γ).
Dans les expressions ci-dessus, le terme composite Ω peut être considéré
comme élargissant le condition traditionnelle Marshall-Lerner [donnée
précédemment dans l’Equation (23)] au cas d’une économie importatrice de
pétrole. En effet, dans le cas particulier où θ = 0, β = 0 et le terme Ω devient
Ω = η + δ − 1,
qui n’est rien d’autre que la condition d’élasticité de Marshall-Lerner. Le
terme composite ∆ est la réciproque du multiplicateur du modèle, et Γ/∆
181
Chapitre 4
peut être considéré comme représentant la valeur absolue de l’élasticité de y
par rapport à P dans l’Equation revenu-dépense (32).
Donc, l’Equation (38) montre que, avec µ et ŵ donnés, le signe de ŷ/ε en
général, ne peut pas être a priori certain.
Dans le cas général, ŷ/ε est, par exemple, positif si le numérateur de
l’expression de la partie gauche de l’Equation (38) est positive, c’est-à-dire
[λ(1 − θ) + θ]Ω − θΓ > 0,
ou de façon équivalente, étant donné la définition ci-dessus de β [Equation
(33)] :
Ω − βΓ > 0.
Plus spécifiquement, l’Equation (38) décompose l’effet de la dévaluation
sur le revenu réel en :
• un effet de demande, qui est positif tant que la condition élargie de
Marshall-Lerner est satisfaite, c’est-à-dire, Ω > 0 ;
• un coût ou effet d’offre, qui est négatif tant que la condition tradionnelle de Marshall-Lerner est satisfaite, (η + δ > 1).
En des termes plus explicites, l’Equation (38) peut être réécrite comme
étant
ŷ/ε = {(1 − θ)[(1 − θ)λ(η + δ − 1) + θη − θ(1 − λ)(1 − γ)] − θ(1 − σ)} /∆.
Dans l’expression ci-dessus, le terme θ(1 − σ) capte l’effet de substitution factorielle de la dévaluation. Plus l’élasticité de substitution entre
les facteurs de production, pétrole et travail est élevée (faible), σ, plus il
est probable qu’une dévalation augmentera (réduira) le revenu réel. Si, par
exemple, le prix intérieur du pétrole importé augmente, les entreprises réduiraient leur demande de pétrole et augmenteraient leur demande de travail,
atténuant de ce fait la réduction de la production et du revenu, dans une
mesure qui dépend de σ. Les autres termes représentent les effets conventionnels qui apparaissent à travers les élasticités-prix des exportations et des
importations η et δ et l’effet de la balance réelle, 1 − γ. En particulier,
plus les élasticités-prix de la demande des exportations et des importations
des biens finals sont élevées (faibles), plus il est probable qu’une dévaluation
augmentera (réduira) le revenu réel.
L’Equation (38) suggère aussi des résultats supplémentaires.
Régimes de change
182
• Toutes choses égales par ailleurs, plus l’effet de la balance réelle sur
l’absorption intérieure est faible (plus γ est élevé), plus il est probable
que la dévaluation augmentera le revenu.
• Dans le cas particulier dans lequel il n’y a pas de pétrole importé,
θ = β = 0 et l’Equation (38) devient
λ(η + δ − 1)
ŷ
=
,
ε
1 − γ(1 − λ)
qui montre qu’une dévaluation augmente le revenu réel (ŷ/ε > 0) tant
que la condition conventionnelle de Marshall-Lerner est satisfaite.
En outre, l’effet d’une part plus grande des importations de pétrole dans
la production brute — et, de façon équivalente, le poids du taux de change
dans l’indice des prix intérieurs — est en général ambigu.
• D’un côté, une hausse de θ augmente l’effet coût des importations
(pourvu que σ < 1) et l’effet balance réelle de la dévaluation. Il réduit
aussi le multiplicateur. Par l’intermédiaire des deux canaux, une valeur
plus élevée de θ tend à augmenter la vraisemblance d’un effet-revenu
négatif.
• D’un autre côté, l’interaction de θ avec η et δ a un effet ambigu sur
ŷ/ε.
Par conséquent, pour résumer, plus le degré de dépendance de l’économie
aux intrants importés est faible (reflété par une valeur élevée de σ), et plus
les effets de modification de la dépense et de réduction de la dépense sont
grands (captés par les valeurs élevées de η, δ, et γ), moins il probable qu’une
dévaluation exercera un effet contractionniste sur le revenu.
A cause de la présence des intrants importés, le revenu et la production
brute diffèrent. Il est utile d’examiner aussi l’effet de la dévaluation sur la
production brute. En résolvant les équations (34)-(37) comme avant avec µ
et ŵ constants, il en résulte que
q̂/ε = ŷ/ε + θ(1 − σ),
qui diffère de l’expression ŷ/ε donnée ci-dessus de θ(1 − σ). Par conséquent,
une dévaluation augmente la production brute plus (ou la réduit moins) que
183
Chapitre 4
le revenu réel tant que σ < 1, c’est-à-dire tant que la facture des importations
réelles de pétrole ne peut pas être réduite proportionnellement en réponse à
la dévaluation du taux de change, en raison du faible degré de substituabilité
entre le travail et le pétrole dans le processus de production.
La discussion précédente a pris les taux de croissance des avoirs monétaires nominaux et des salaires nominaux comme étant donnés. Supposons,
par exemple, que les deux variables croissent au même taux que le taux de
dépréciation du taux de change (µ = ŵ = ε). On peut alors montrer que
q̂/ε = ŷ/ε = 0,
une égalité qui stipule essentiellement qu’une dévaluation n’a pas d’effets réels
si elle ne réussit pas à réduire les salaires réels et le stock réel de monnaie.
Ce résultat est particulièrement important, étant donné la focalisation du
modèle sur le long terme.
Plus généralement, supposons que les salaires nominaux sont partiellement indexés sur le coût de la vie, de sorte que
ŵ = φ[(1 − λ)π + λε], 0 < φ ≤ 1,
qui implique que 0 < ŵ/ε ≤ 1.On peut montrer que étant donné µ,
¯
¯
(
ŷ ¯¯
θ(1 − σ) − (1 − θ)Γ
ŷ ¯¯
¯
¯
=
+
ε ¯φ>0
ε ¯φ=0
∆
)
ŵ
,
ε
où le premier terme du membre de droite correspond à l’équation (38). Il
peut être établi que l’expression entre crochets du membre de droite de cette
équation est négative et plus grande, en valeur absolue, que le premier terme.
Si les salaires nominaux s’ajustent pleinement à la dévaluation (de sorte que
ŵ/ε = 1), alors une dévaluation aura un effet contractionniste sur la
production.
Pour établir les effets d’une dévaluation sur la balance commerciale, définissons d’abord la balance commerciale en termes réels comme
b = y − c.
En utilisant l’Equation (34), et en notant que dx = x̂x pour toute variable
x, une variation de b peut être écrite comme
db = dy − dc = (1 − γ)ŷy + (1 − γ)π = (1 − γ)y(ŷ + π).
Régimes de change
184
En faisant l’hypothèse que les salaires sont aussi donnés, cela implique
que π/ε = θ, de sorte que
db
ŷ
= (1 − γ)y( + θ).
ε
ε
(39)
Par conséquent, une condition suffisante pour que la dévaluation améliore la balance commerciale est qu’elle augmente le revenu réel (ŷ/ε > 0).
Pour que la balance commerciale se détériore à la suite d’une dévaluation,
il faut non seulement un effet-revenu négatif mais aussi que l’effet soit
suffisamment grand pour l’emporter sur l’effet positif non-ambigu à travers
θ, qui reflète l’effet réduction de la dépense de la dévaluation à travers les
avoirs réels. L’Equation (39) montre aussi que dans le cas spécial où θ = 0
(c’est-à-dire qu’ il n’y a pas facteurs de production importés), et pourvu que
γ < 1 (le cas normal), une dévaluation affecte dans la même sens le revenu
et la balance commerciale. En particulier, comme indiqué plus tôt, les deux
effets sont positifs si la condition conventionnelle Marshall-Lerner (η +δ > 1)
est respectée.
Deux exemples numériques considérés par Gylfason et Schmidt (1983)
sont utiles pour illustrer les résultats ci-dessus. Supposons par exemple que
la croissance du salaire nominal et la croissance du stock nominal de monnaie
sont constantes et que σ = 0, 3, η = 0, 1, δ = 1, 7, γ = 0, 7, θ = 0, 06,
λ = 0, 03, et β = 0, 7. Dans ce cas, la condition élargie de Marshall-Lerner
condition n’est pas satisfaite, et une dévaluation de 10% a les effets suivants :
• une réduction de la production brute de −0, 5%
• une réduction du revenu de −0, 9%
• une détérioration de la balance commerciale équivalente à −0, 1%
du PNB.
Par conséquent, une dévaluation a des effets de production et de revenu
négatifs. Supposons, au contraire, que σ, γ, et λ restent identiques mais
que maintenant η = 0, 5, δ = 2, 2, θ = 0, 03, et β = 0, 5. Dans ce cas, la
condition élargie de Marshall-Lerner est satisfaite et une dévaluation de 10%
augmentera la production brute de 1, 1% et le revenu de 0, 9% et améliorera la balance commerciale de 0, 4% du PNB. La leçon importante de ces
expériences simples est que, une fois que les effets d’offre des variations du
taux de change sont pris en compte, le fait que la dévaluation soit ou non
185
Chapitre 4
contractionniste peut être assez sensible à certains paramètres structurels de
l’économie.
La littérature sur la gestion du taux de change a identifié différents autres
canaux par lesquels une dévaluation peut affecter l’offre. En particulier, alors
que l’analyse ci-dessus a été développée dans un contexte statique, des auteurs
tels que Risager (1988) ont souligné les liens entre la dévaluation, l’inertie
du salaire nominal, la profitabilité et l’investissement dans un cadre dynamique. Dans le modèle de Risager, les entreprises produisent un seul bien
aux moyens du travail et du capital. Le bien domestique est un substitut
imparfait des biens étrangers ; son prix est donc déterminé de façon endogène en égalisant l’offre et la demande. Les salaires nominaux s’ajustent
aux variations du taux de change nominal avec seulement un décalage. Les
entreprises sont tournées vers l’avenir et l’investissement est tiré non seulement par les niveaux courants des profits et des taux d’intérêt, mais aussi
par le taux de rendement futur anticipé du capital. Dans ce cadre, et pourvu
que la condition Marshall-Lerner soit satisfaite, une dévaluation (une baisse
du prix relatif du bien domestique par rapport aux biens étrangers) entraîne
une augmentation des exportations nettes, une hausse de la demande globale, et donc une augmentation du prix du bien domestique. Parce que les
salaires nominaux ne varient pas à court terme, le salaire exprimé en unités
de production (le salaire nominal divisé par le prix du bien domestique) et
les coûts réels du travail baissent- augmentant de ce fait la profitabilité et
l’investissement. Cependant, à long terme, les salaires nominaux et les prix
intérieurs s’ajustement pleinement à la dévaluation (faisant retourner, de
ce fait, le salaire exprimé en unités de production à son niveau initial) et
le stock du capital et la production intérieure augmentent. Bien sûr, parce
que les entreprises sont tournées vers l’avenir, plus l’ajustement attendu des
salaires nominaux aux augmentations des prix sera rapide, plus faible sera
l’augmentation perçue de la profitabilité, et donc plus faible sera la hausse
initiale de l’investissement et de la production.
Une dévaluation nominale peut avoir un effet défavorable sur la production par différents autres canaux, comprennant les variations des taux
d’intérêt, l’imposition ou l’effet de la dépréciation nominale sur la valeur
en monnaie nationale de la dette extérieure (discuté par van Wijnbergen,
1986b)23 . La principale leçon de la litérature est que, loin d’être une curio23
Agénor et Montiel (1999, Chapitre 8) fournissent une analyse détaillée de ces différents
canaux.
Régimes de change
186
sité, les effets contractionnistes induits par les variations du taux de change
nominal peuvent être significatifs ; prendre en compte ces effets peut être
important pour assurer la soutenabilité des programmes d’ajustement.
7
Résumé
• Les régimes de taux de change en cours dans les pays en développement couvrent les régimes de rattachement (comprennant les taux
de changes fixes, les parités ajutables et rampantes, et les caisses d’émission, les régimes de taux de change flexibles (qui incluent les
régimes de flottement pur et de flottement dirigé), et les régimes de
marges de fluctuation, qui impliquent l’annonce d’un taux de change
pivot et une bande de fluctuation autour du taux. Le taux pivot est luimême géré d’une certaine manière, il est par exemple fixe ou rampant.
La banque centrale intervient aux marges de la bande, pour empêcher
le taux de sortir en dehors de ces limites.
• Les régimes de rattachement du taux de change peuvent causer
des distorsions dans le système financier. Dans la mesure où le rattachement est considéré comme une garantie implicite qu’il n’y aura pas
de modifications de la valeur de la monnaie, il est une incitation à emprunter en devises et il encourage les secteurs financier et commercial
à contracter un risque de change excessif.
• Le gain de crédibilité supplémentaire fourni par une caisse d’émission,
comparé aux autres régimes de rattachement de taux de change peut
être important pour des pays qui ont une histoire d’instabilité macroéconomique.
• Cependant, les caisses d’émission sont plus contraignantes en matière
de politique monétaire et exercent une contrainte sur la capacité des
autorités à modifier le taux de change de rattachement. Le coût associé
à la perte de flexibilité dépend en général de la sensibilité de l’économie aux chocs globaux, et si les instruments alternatifs de politique
économique sont disponibles. Parce qu’elles réduisent la capacité de
la banque centrale à agir en qualité de prêteur en dernier ressort
en face d’une crise de liquidités de l’ensemble de l’économie, les pays
ayant des caisses d’émission sont plus prédisposés aux faillites bancaires
187
Chapitre 4
et aux paniques financières que les pays ayant des banques centrales
totalement libres.
• Un régime de marges de fluctuation combine les avantages des
régimes de taux de change fixes et de taux de change flottants : il aide
à imposer la discipline sur la politique monétaire, fournit un certain
degré de flexibilité dans la réponse aux chocs extérieurs (tels que les
variations brusques des flux de capitaux, une hausse des prix du pétrole
ou une augmentation des taux d’intérêt internationaux), il aide à limiter
la volatilité du taux de change, à empêcher la surévaluation et introduit
une certaine incertitude sur le sentier du taux de change, réduisant, de
ce fait, les incitations à l’emprunt extérieur.
• L’application d’une marge crédible aura, elle-même, tendance à avoir un
effet stabilisateur sur les mouvements du taux de change. Cependant,
en présence des incohérences de politique fondamentale, un régime de
marges n’est pas plus viable qu’un régime de rattachement.
• Bien que la classification des régimes de change peut être en pratique
difficile, l’évidence empirique suggère que le nombre des régimes de
rattachement a baissé depuis de le début des années 70. Cependant,
dans le même temps, très peu de pays en développement opèrent avec
des régimes de changes flottants qui sont libres de l’intervention de la
banque centrale.
• L’évidence empirique suggère que les pays à régimes de rattachement
ont connu une inflation plus faible et moins variable que les pays à
régimes de changes flexibles. Cependant, le simple rattachement du
taux de change n’entraîne pas nécessairement une inflation plus faible ;
au total, la cohérence du cadre de la politique macro-économique est
nécessaire pour atteindre cet objectif.
• En pratique, les facteurs que les décideurs de politique économique
doivent prendre en compte en choisissant un régime de taux de change
comprennent la taille et le degré d’ouverture de l’économie, le niveau
d’inflation, le degré de flexibilité du marché du travail, le degré de développement financier, le degré de crédibilité des décideurs politiques et le
degré de mobilité du capital. En particulier, un taux de change fixe dans
un monde de forte mobilité du capital est une cible des spéculateurs
car il offre un pari à sens unique.
Régimes de change
188
• La capacité d’un taux de change fixe à donner de la crédibilité à l’engagement pour une politique monétaire stable est limitée par le fait
que l’engagement de fixer le taux de change peut lui-même manquer
de crédibilité. La raison est que les gouvernements sont confrontés aux
interactions politiques en choisissant de fixer ou non le taux de
change. En particulier, le gouvernement peut être tenté de revenir sur
sa promesse de maintenir le taux de change fixe à cause des rendements potentiellement élevés (en termes de production) d’une dévaluation non-anticipée. Par conséquent, à moins que le coût de la dévaluation (économique et politique) soit suffisamment élevé, un taux de
change fixe ne permettra presque jamais de réaliser la crédibilité totale.
• Les mesures de la compétitivité internationale tentent de capter les
variations du prix relatif des biens étrangers échangeables par rapport
aux biens domestiques échangeables ; elles sont généralement basées
sur des indicateurs de taux de change réel. Les trois indicateurs les plus
utilisés pour les pays en développement sont ceux basés sur les indices
des prix à la consommation, les valeurs unitaires des exportations et
les coûts unitaires de main-d’oeuvre. Cependant, ils peuvent fournir, en
pratique, des signaux conflictuels.
• Une dévaluation nominale affecte l’économie à travers son effet de réduction de la dépense (une réduction de la demande globale provenant d’une hausse des prix et d’une baisse de la richesse réelle) et son
effet de modification de la dépense (les variations de la composition
de la production et de l’absorption intérieure entre les biens échangés
et les biens non-échangés).
• Dans un cadre d’équilibre partiel, la condition pour que la balance
commerciale s’améliore à la suite d’une dévaluation est la condition
Marshall-Lerner, qui requiert que la somme des élasticités d’offre
d’exportation et de demande d’importation soit supérieure à l’unité.
Cependant, même si la condition Marshall-Lerner est satisfaite à long
terme , les élasticités de court terme peuvent être assez petites pour
impliquer qu’un ajustement du taux de change n’entraîne pas immédiatement une amélioration de la balance commerciale.
• La règle de 45-degrés rule se refère au fait que les estimations de
l’élasticité-revenu étranger de la demande d’exportation sont élevées
189
Chapitre 4
pour les économies à forte croissance et faibles pour les économies
à faible croissance. La correspondance étroite entre les élasticités estimées de l’activité pour les exportations et la croissance intérieure
réelle suggère que les termes mesurant l’offre intérieure devraient être
incorporés aux équations d’exportation pour éviter des erreurs de spécification.
• Une dévaluation nominale peut avoir un effet de court terme contractionniste sur la production à travers son impact sur le coût des
intrants importés. Différents autres canaux (opérant à travers l’offre et
la demande) peuvent aussi entraîner un effet de production défavorable
des ajustements à court terme du taux de change. Prendre en compte
ces effets défavorables, s’ils se revèlent importants, peut être important
pour la conception des programmes d’ajustement.
Figure 4.1
Pays en développement : Pays à taux de change rattaché, 1970-96
(en % du nombre total de pays)
100
90
80
70
60
50
40
1972
1974
1976
1978
Source : Fonds monétaire international.
1980
1982
1984
1986
1988
1990
1992
1994
1996
Figure 4.2
Pays en dévelopement : Régimes de taux de change 1/
(Nombre de pays)
1982
1989
1997
Asie
Afrique
Taux rattaché à une
unité de référence
Taux rattaché à
une unité de
référence
Flottement
dirigé
Flottement
dirigé
Taux flexible
Taux flexible
0
10
20
30
40
0
50
5
10
15
20
Amérique Latine et Caraïbes
Europe et Moyen-Orient
Taux rattaché à une
unité de référence
Taux rattaché à une
unité de référence
Flottement
dirigé
Flottement
dirigé
Taux Flexible
Taux flexible
0
5
10
15
20
0
5
10
15
20
25
Source : Fonds monétaire international.
Note : La catégorie de pays à taux de change rattaché à une unite de référence se réfere aux pays classés par le FMI
comme ayant un taux de change rattaché à une seule monnaie, à un panier de monnaies ou ayant une parité rampante.
La catégorie de pays à flottement dirigé se réfere aux pays classés par le FMI comme ceux dont le taux de change est ajusté
en fonction des indicateurs économiques et dont le flottement est contrôlé. Les pays à taux de change flexible sont ceux que
le FMI classe comme ayant un taux de change qui flotte librement.
Figure 4.3
Brésil et Indonésie : Taux de change nominal et Bandes d'intervention
Brésil
(Reais par dollar U.S.)
1.8
1.4
Borne d'intervention supérieure
21Jan
31 Jan
1.06
23 Juin
1.12
10 Mars 0.99
0.93
1
1.22
19 Fev
1.14
1.05
0.97
0.88
0.91
Borne d'intervention inférieure
4,000
Indonésie
(Rupee par dollar U.S.)
3,500
3,000
Borne d'intervention supérieure
2,500
Borne d'intervention inférieure
Source : Fonds monétaire international.
Sep97
Oct97
Apr97
May97
Jun97
Jul97
Aug97
Dec96
Jan97
Feb97
Mar97
Feb96
Mar96
Apr96
May96
Jun96
Jul96
Aug96
Sep96
Oct96
Nov96
Oct95
Nov95
Dec95
Jan96
May95
Jun95
Jul95
Aug95
Sep95
Jan95
Feb95
Mar95
Apr95
Oct94
Nov94
Dec94
2,000
Jan99
Nov98
Sep98
Jul98
May98
Mar98
Jan98
Nov97
Sep97
Jul97
May97
Mar97
Jan97
Nov96
Sep96
Jul96
May96
Mar96
Jan96
Nov95
Sep95
Jul95
May95
Mar95
Jan95
Nov94
Sep94
Jul94
0.6
Figure 4.4
Coefficient de variation des taux de change effectifs réels
(Moyennes sur 1979-95)
0.6
Basé sur les coûts unitaires réels de main d'oeuvre
Vénézuéla
0.5
Indonésie
Turquie
Chili
Mexique
0.4
Inde
Argentine
0.3
Hong Kong
Singapour
0.2
Malaisie
Colombie
Philippines
Pérou
Taïwan
Brésil
Afrique du Sud
0.1
Israël
Corée
Bangladesh
Thaïlande
45 o
0
0
0.1
0.2
0.3
0.4
0.5
Basé sur les prix a la consommation
Source : Fonds monétaire international.
Figure 4.5
Composition des exportations de marchandises
(en % du total, 1993)
Combustibles, minerais et métaux
Machines et équipement de transport
Autres produits de base
Autres
Algérie
Kenya
Argentine
Corée
Bangladesh
Malaisie
Bolivie
Mexique
Brésil
Maroc
Cameroun
Pakistan
Chili
Pérou
Colombie
Philippines
Costa Rica
Sri Lanka
Equateur
Thaïlande
Egypte
Tunisie
Inde
Turquie
Indonésie
Uruguay
Jamaïque
Vénézuéla
Jordanie
Zimbabwé
0
20
40
Source : Banque mondiale.
60
80
100
0
20
40
60
80
100
Figure 4.6
Composition des importations de marchandises
(en % du total, 1993)
Biens alimentaires
Combustible
Autres produits primaires
Machines et équipment de transport
Autres produits manufacturés
Algérie
Kenya
Argentine
Corée
Bangladesh
Malaisie
Bolivie
Mexique
Brésil
Maroc
Cameroun
Pakistan
Chili
Pérou
Colombie
Philippines
Costa Rica
Sri Lanka
Equateur
Thaïlande
Egypte
Tunisie
Inde
Turquie
Indonésie
Uruguay
Jamaïque
Vénézuéla
Jordanie
Zimbabwé
0
20
Source: World Bank.
40
60
80
100
0
20
40
60
80
100