Dur de rater le bac... mais difficile de réussir sans
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Dur de rater le bac... mais difficile de réussir sans
25 JUIN 14 Quotidien Paris OJD : 317225 14 BOULEVARD HAUSSMANN 75438 PARIS CEDEX 09 - 01 57 08 50 00 Surface approx. (cm²) : 774 N° de page : 18 Page 3/4 Dur de rater le bac... mais difficile de réussir sans ! arents et enfants, dormez tranquilles : cette annee encore, près de 90 % de ceux qui passeront le bac l'obtiendront, et souvent avec mention bien ou très bien. Ce n'est pas le niveau qui monte, mais les exigences qui baissent. Proposons aux prochains ministres de l'Éducation un objectif ambitieux : que 80 % des bacheliers sachent lire, écrire et compter correctement ! Ce que garantissait le certificat d'études. Ainsi il est plus difficile aujourd'hui et surtout plus coûteux de passer le permis de conduire que d'obtenir celui d'accéder à l'enseignement supérieur. S'il est dur de rater le bac, il est aussi de plus en plus difficile de reussir sans lui. C'est la conséquence de la course aux diplômes dont nous dénonçons depuis trente ans les effets pervers. Plus les diplômes sont dévalues et distribues comme des assignats, moins ils valent. A l'inverse, leur nondétention devient un facteur de marginalisation et d'exclusion. Quand un diplôme ne vaut plus rien, celui qui ne l'a pas vaut moins que rien. C'est en ce sens que le diplôme constitue une forme de discrimination sociale légale. Et que son obtention jusqu'à un certain seuil est un antidote au chômage. La course aux MICHEL GODET parchemins a donc des effets certains Pour l'auteur*, professeur au Conservatoire de relegation pour national des arts et métiers, la démocratisation ceux qui n'en ont de l'enseignement supérieur a contribué pas (faute d'un minimum de savoir à accentuer le poids des inégalités sociales. P JACOB2 1604260400502/XTO/MFG/1 de base ou de savoir-être) et de frustration pour les surdiplômés. Le système educatif est concentré sur la selection des champions de l'intelligence, quitte à dégoûter une partie des autres du sport educatif. Tous ceux qui ont un diplôme finiront par trouver un emploi, même s'ils devront pour beaucoup revoir a la baisse leurs prétentions et/ou accepter une mobilite géographique et professionnelle. Les récents travaux du Cereq (Centre d'études et de recherches sur les qualifications) donnent une bonne nouvelle : les deux tiers des jeunes sortis du système scolaire en 2010 avaient un CDI en 2013. Cependant, la protection relative du diplôme perdure mais se degrade. Pour ceux sortis trois ans plus tôt, le taux de chômage des sans-diplôme était de 48 % en 2013 contre 32 % en 2007 ; de 25 % pour les diplômés du secondaire contre 15 % en 2007, de ll % contre 7 % pour les diplômés du supérieur court et de 9 % contre 6 % six ans auparavant pour le superieur long. Ainsi, il est toujours rentable sur le plan individuel d'aller le plus loin possible dans la course aux diplômes. Mais collectivement cette course est un gaspillage collectif qui engendre de multiples frustrations. Nombre de parents de milieux modestes qui se sont saignes pour payer les études de leurs enfants découvrent que l'ascenseur social par les études est en panne car la demande des entreprises s'ajuste tout simplement a l'inflation de l'offre de diplômes. Retenons le message : le diplôme protège de moins en moins et exclut de plus en plus. Eléments de recherche : *** DONNER LA PAGE ENTIERE ET LES DOSSIERS ENTIERS*** EDITIONS ODILE JACOB ou ODILE JACOB : maison d'édition à Paris 5ème, toutes citations Partie 1/2 25 JUIN 14 Quotidien Paris OJD : 317225 14 BOULEVARD HAUSSMANN 75438 PARIS CEDEX 09 - 01 57 08 50 00 Surface approx. (cm²) : 774 N° de page : 18 Page 4/4 En outre, ces moyennes cachent de profondes disparités entre filieres sélectives ou non. Les jeunes ingénieurs ont un taux de chômage stabilisé a 4 %. Tel n'est pas le cas des ecoles de commerce, qui ont prolifère. Trois ans après la sortie, le chômage de leurs jeunes diplômés était de 9 % en 2013 contre 5 % en 2010. Mais pour les filières universitaires, le taux de chômage d'un bac + 5 (12 %) était même un peu superieur à celui d'un bac + 2 (ll %) ! Certaines études sont rentables à condition de ne pas aller trop loin. Les surdiplômes la formation continue ouverte en fonction des compétences réelles prouvées sur le terrain. Nous avons commis une grave erreur collective depuis quarante ans avec l'allongement de la scolarité obligatoire, le niveau bac pour près de 70 % d'une géneration, la démocratisation de l'enseignement superieur. D'autant que cela a éte fait dans une hiérarchie des formations où l'enseignement technique et professionnel est relègue au second plan par rapport a l'enseignement general. En Allemagne, l'apprentissage attire un jeune sur deux, et constitue Le système éducatif est concentré une filière d'excellence sur la sélection des champions normale pour de l'intelligence, quitte à dégoûter devenir ingénieur ou cadre. Ceux une partie des autres du sport éducatif qui accèdent à des fonctions dirigeantes ont eu un long universitaires coupés des réalités parcours initiatique dans les différentes du marché du travail font peur fonctions de l'entreprise. Autre aux employeurs. Dans une societé hiérarchisée par les conséquence de la bonne formation diplômes, l'allongement de la scolarité professionnelle des ouvriers d'outreinitiale a accentué le poids des inégalités Rhin, un encadrement deux fois plus sociales d'origine et favorise faible qu'en France leur suffit. A coût la reproduction des classes dominantes du travail comparable, les entreprises avec la complicité active allemandes sont ainsi plus des enseignants (la moitié des reçus compétitives. L'apprentissage n'attire aux concours des grandes ecoles ont chez nous qu'un jeune sur dix et le taux au moins un parent enseignant). de chômage des jeunes actifs y est deux On le comprend, dans une societé où fois plus eleve ! Messieurs les ministres, seuls 5 % d'une génération accédaient vous savez ce qu'il faut faire, alors bon au baccalauréat comme dans la France courage ! de 1950, l'égalité des chances était finalement meilleure, puisque les 95 % * « Libérez l'emploi pour sauver les retrai restants allaient pouvoir progresser par tes», Odile Jacob, 2014. JACOB2 1604260400502/XTO/MFG/1 Eléments de recherche : *** DONNER LA PAGE ENTIERE ET LES DOSSIERS ENTIERS*** EDITIONS ODILE JACOB ou ODILE JACOB : maison d'édition à Paris 5ème, toutes citations Partie 1/2