wg ahlbrinck
Transcription
wg ahlbrinck
W.G. AHLBRINCK Missionnaire-ethnographe chez les Kali’na du Suriname. Peter KLOOS anthropologue Wilhelmus Gerardus Ahlbrinck est décédé le 27 aout 1966, à l’Hôpital R.K. Ziekenhuis à Paramaribo. Sans être anthropologue, il fut néanmoins de ceux qui ont rendu des services considérables à l’anthropologie. Ahlbrinck naquit le 14 février 1885 à Geldrop (Pays-Bas). Après sa scolarité au Gymnasium de Sint Michielgestel et Roermond, il entra dans l’ordre des Rédemptoristes (C.s.s.R.) où il fut ordonné prêtre en 1909. En 1910 il fut envoyé au Suriname, où il travailla au départ à Nickerie. En 1911 il effectua sa mission principalement parmi les Chinois. Alors qu’à Nickerie déjà, il s’était fait connaître comme un homme avec un don particulier pour l’apprentissage des langues (sa publication « Balataman teki mi » date de cette époque), parmi les Chinois il prêcha rapidement en Chinois. En 1913 il fut nommé en tant que missionnaire auprès des Indiens des rivières Saramacca, Coppename et du fleuve Maroni, avec comme base Albina, sur la rive du Maroni. C’est là qu’il commença l’œuvre qui lui valut une réputation durable dans le monde de l’anthropologie : la collecte de données concernant les Kali’na, couronnée en 1931 par la publication de l’ « Encyclopaedie der Karaïben ». Le travail commença avec la langue. « …parce que, lorsque j’arrivai, beaucoup des hommes du Maroni se retiraient ou ne répondaient pas lorsque je leur parlais. Ils ne comprenaient pas « l’anglais-nègre » (NDT Sranan tongo, créole à base lexicale anglaise issu du créole des plantations), le parlaient encore moins. Il me fallut quelque temps avant de découvrir cette raison ; c’est alors que j’entrepris immédiatement l’étude de leur langue.» (Préface de l’Encyclopédie). Et peu après, également l’étude « d’affaires ethnologiques ». Ahlbrinck obtint l’autorisation de se consacrer entièrement à l’étude de la langue, et visita durant de longues années les différents villages Indiens, jusqu’à ce que la malaria le lui rendit impossible. Son travail continua, mais au lieu de pérégriner, il resta alors à chaque fois quelques jours dans un seul village. Ahlbrinck n’a jamais habité longtemps dans un village : le travail fût complété à l’aide d’informateurs. A cause de sa maladie, Ahlbrinck ne put poursuivre ses travaux parmi les Indiens. Il fût affecté à Copieweg – au sud de Paramaribo – pour se consacrer aux Javanais. Il y habita et travailla de 1925 jusqu'à sa mort. Sa connaissance des Indiens lui valut d’être chargé de la direction de deux expéditions. La première eût lieu en 1926 (en relation avec l’expédition de Stahel) vers les sources de la rivière Corantine, et avait comme objectif la recherche de certains groupes d’Indiens. Il coucha ses expériences dans un livret intitulé : « Vijf maanden in het oerwoud » (« Cinq mois dans la jungle »). En 1938 Ahlbrinck retourna dans la jungle : maintenant en direction des sources du Maroni, à la recherche de ce mystérieux groupe d’Indiens non-sédentarisés, les Wama’s, qu’il trouva effectivement. Des données concernant cette expédition peuvent être trouvées dans un article de De Goeje (voir bibliographie). Ahlbrinck lui-même enfin, publia « Op zoek naar Indianen » (« A la recherche d’Indiens »). Qu’il fût lui-même considéré au Suriname comme connaisseur des Indiens, est illustré par le fait que le gouvernement du Suriname l’envoya en tant que représentant au Congrès des Américanistes de 1958, à San José, Costa Rica. Le nombre de publications d’Ahlbrinck n’est pas important (voir bibliographie). La « pièce de résistance » (NDT en français dans le texte) est son « Encyclopaedie der Karaïben ». Deux articles, à l’origine publiés dans Anthropos, en ont été tirés. « De Karaïben van Suriname » (« Les Karaïbes du Suriname ») est une tentative de vulgarisation de l’Encyclopaedie. C’était conçu comme le premier livret d’une série, mais il n’y a pas eu d’autres publications. A côté de ses publications d’ordre scientifique, il écrivit deux récits : « Tamasu, de Indiaanse verspieder » (« Tamasu, l’espion Indien ») (publié dans De Surinamer), et « De Hoofdman van Grand Carbet » (« Le Chef de Grand Carbet », publié dans Opbouw, 1957-1960). Il a également collaboré au livre de H. Helmer « De laatste der Wajarikoelé’s » (« Le Dernier des Oyaricoulés »), un roman sur ce groupe éteint d’Indiens (qui étaient à l’origine de l’expédition du Maroni). Le travail d’Ahlbrinck est caractérisé par sa très grande connaissance et une approche de travail systématique (cette dernière se reconnait à de nombreux endroits dans les comptes rendus des deux expéditions). L’Encyclopédie -quoiqu’elle était, aux yeux d’Ahlbrinck, incomplète, juste un enregistrement de ce qu’il savait à ce moment-là, pour ne pas perdre le matériel -- comprend une somme extraordinaire de données sur les Kali’na, qui en fait le groupe d’Indiens du Suriname le mieux documenté. Avec cette précision, mais surtout grâce à sa compréhension sans préjugés sur la culture des Indiens, son travail se démarque favorablement des publications de nombreux autres missionnaires au Suriname et autres Guyanes (je pense ici particulièrement aux religions, et à la magie). Son travail est, malgré sa qualité, resté relativement inconnu. Ceci est dû, en premier lieu, à la langue dans laquelle est écrite l’ « Encyclopaedie ». Gillin1 exprime sans ménagement que l’Encyclopédie « is useless to much of the scolarly world by reason of its being published in Dutch» (« est inutilisable pour une grande partie du monde érudit pour la raison qu’il est publié en néerlandais»). La seconde raison pourrait être l’organisation du document : les données sont rangées par mots en caraïbe, et alphabétiquement. Ceci est peut-être une présentation acceptable, voire même 1 J. Gillin, Tribes of the Guyanas. Handbook of South American Indians, Ed. J. H. Steward, Buil. 143 Smithsonian Institution. Washington 1948, vol. III, p. 799-860. louable2 pour le linguiste, pour l’anthropologue c’est « l’avant-dernière plus mauvaise ». Après l’activité d’Ahlbrinck, la recherche sur les Indiens au Suriname à été interrompue pendant un certain temps : on n’a pas construit sur cette base solide. Ce n’est que dix ans après la fin de la guerre, qu’un changement intervint : d’abord le linguiste B.J.Hoff avec sa recherche parmi les Kali’na (NDT Caribs en anglais), et en 1963 et 1964 avec les travaux de deux anthropologues Anglais, Audrey J.Butt et Peter Rivière, respectivement parmi les Wayana et les Trio3. Jusqu'à quelques mois avant sa mort, Ahlbrinck a pu jouir de cet esprit vivant, curieux et vif, dont ses publications sur les Indiens de Suriname sont imprégnées. C’est comme cela que les Kali’na le gardent en leur mémoire : comme un homme qui pouvait leur expliquer des choses sur leur langue qu’ils ignoraient eux-mêmes, comme l’homme qui a écrit un livre sur eux. Otalema ti to tuwayeman tamusji-wja kapu-daka, ou, en traduction libre, il est monté au ciel, vers Dieu, pour s’y reposer. P .KLOOS Bibliographie d’Ahlbrinck. N.B. Dans cette bibliographie ne figurent que les œuvres d’un intérêt pour l’ethnographie du Suriname. — & M. Aurelius Vinken, Zur Lautlehre des Karaibischen. In: Anthropos, Bd XVIIIXIX, 1923-24, pp. 951-957.3 2 B. J. Hoff, The languages of the Indians of Suriname and the comparative study of the Carib and Arawak languages (With bibliography). Bijdragen tot de taal-, land- en volkenkunde, jrg. 111, 1955, p. 325-355. 3 Les données sur cette expédition ont été publiées antérieurement par C. H. de Goeje, Neolithische Indianen in Suriname, avec les données de l’expédition d’Ahlbrinck 1938. T. Kon. Ned. Aardr. Gen., LX 3, 1943, 334-374. — De Karaib en zijn taal. Dans: Koloniaal Missie Tijdschrift, jrg. V (1922), VI (1923), VII (1924), 35 pp. — Over vlechtmethoden gebruikelijk bij de Kalinja (Suriname). Dans : Anthropos, Bd XX, 1925, pp. 638-652. Avec Illustrations.3 — Vijf maanden in het oerwoud. Editions. E. de Bont, Rotterdam z.j. (1929), 155 pp., avec photos. — Encyclopaedie der Karaïben. Behelzend taal, zeden en gewoonten dezer Indianen. Illustré par E. la Rose. Verh. Kon. Ak. v. Wetenschappen, Nieuwe reeks deel XXVII, 1, Amsterdam 1931. 555 pp. avec 160 pp. photos et dessins. — De Karaïben van Suriname. De Wet der Gelijkenissen. Editions. H. v. d. Boomen, Paramaribo, z.j., 50 pp. — Op zoek naar de Indianen. Verslag van een expeditie naar de zuidgrens van Suriname ter opsporing en bestudering van twee onbekende Indianenstammen: de Wama's en de Wajarikoelé's. Kon. Inst. v. d. Tropen, Med. CXVIII, 1956, 184 pp. avec photos, dessins et cartes.4 Auteur : P. Kloos Titre : W.G. Ahlbrinck : Missionaris-etnograaf onder de Karaýben in Suriname Publié dans : « Bijdragen tot de Taal-, Land- en Volkenkunde 123 « (1967), no :1, Leiden, pages 141-144 Document traduit à partir d’un PDF téléchargé du site http://www.kitlv-journals.nl Traduction Dirk Offringa