Outsourcing, le destin des DSI
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Outsourcing, le destin des DSI ? Jérôme CAPIROSSI - décembre 2004 I. Introduction Outsourcing, Offshoring, externalisation, ces mots circulent sur toutes les lèvres des observateurs et des acteurs de la mondialisation. S’agissant du système d’information de la firme, quels sont les enjeux, les facteurs favorables et les risques ? II. Un modèle Soit un premier modèle simplifié de DSI où celle-ci est considérée comme une organisation interne à la firme qui ouvre, à un groupe d’usagers, la possibilité d’utiliser un système informatique constitué d’une seule application hébergée sur une plate-forme unique. Ce modèle ne prend en compte qu’un seul indicateur de capacité : le nombre d’usagers. Comment se forme le coût interne ? La DSI tente de comprendre la structure de la demande de ses usagers. Cette structure qui est formalisée par la Courbe de demande de la « Figure 1. Structure de la Demande » fait apparaître 3 groupes d’usagers : q les usagers à service haut de gamme prêts à payer un prix élevé pour un tel service, q les usagers à service moyen de gamme soucieux de payer un juste prix pour un service répandu, q les usagers à service bas de gamme ne voulant pas payer ou très peu pour un service dont il n’ont pas un besoin vital La DSI calcule la courbe du coût marginal et trouve le point où la courbe de coût marginal coupe la courbe de demande. Ce point, Umax établit le nombre d’usagers optimum pour lequel le service sera fournit à un prix inférieur ou égal au prix qui maximise leur utilité. Si la courbe de coût marginal ne coupe pas la courbe de demande, aucun usager de la firme ne sera pas en mesure de maximiser son utilité grâce au service fournit par la DSI. La maîtrise de la demande, en terme d’écart entre les coûts internes facturés par la DSI et les coûts qui maximisent l’utilité des usagers, est un des fondements de la gestion des DSI. Dans la structure de coût du modèle simplifié, les coûts variables formés des consommations intermédiaires sont négligeables. Les coûts fixes sont composés : q des amortissements q des charges de personnels q des charges de locaux Les DSI sont prises dans un effet de ciseau. entre le coût des investissements qui diminue, les coûts des charges de personnel et des locaux qui augmentent. Faisons l’exercice de simuler la structure des coûts d’acquisition et d’exploitation d’un logiciel métier utilisant un seul serveur. Investissement Serveur Hardware Serveur Software Mise en service 5j.homme TOTAL Amortissement 33% 10 000,00 2 000,00 2 500,00 14 500,00 4 828,50 Figure 2. Simulation d'investissement On fait l’hypothèse d’un taux d’amortissement de 33% et d’un coût journalier de personnel de 500 €. Figure 1. Structure de la Demande Les coûts d’infrastructure comprennent des consommations intermédiaires (réseaux), des amortissements de logiciels de supervi- « Outsourcing, le destin des DSI ? » J. Capirossi décembre 2004 - Page 1/4 sion, mais surtout les charges de personnels devant assurer le service. Dans notre simulation, on classe ¼ de ces coûts en coûts de logiciel et matériel et ¾ en charges de personnel. Coûts d'exploitation Maintenance Hardware 12% Maintenance Software 15% Exploitation 15j/an Locaux : 2 M2 Infrastructure TOTAL Si l’on projette, sur 5 années, une baisse des coûts d’investissement matériel et logiciel de 15% par an, et une hausse des charges de personnel de 5% par an, on obtient le graphique suivant : Progression des coûts d'une DSI 1 200,00 300,00 7 500,00 600,00 9 600,00 19 200,00 120 100 80 60 40 Figure 3. Simulation des coûts d'exploitation Les coûts se rapportant au logiciel métier, sont les suivants : Investissement logiciel Logiciel Mise en service 50j.homme TOTAL Amortissement 33% 30 000,00 25 000,00 55 000,00 18 315,00 Gestion d'application Gestion et support 40j.homme 20 000,00 Maintenance logiciel 5 400,00 TOTAL 25 400,00 Figure 4. Simulation des coûts d'un logiciel métier Les coûts de mise en service comprennent la personnalisation et une part de développement spécifique. Les coûts d’intégration, difficiles à simuler, sont considérés comme nuls. coûts relatifs 20 0 Année 1 Année 2 Année 3 matériel+logiciel Année 4 Année 5 Personnel Figure 6. Bilan des hausses et baisses des coûts de facteurs Au final les coûts augmentent de 6,8% tirés par l’augmentation des charges de personnel. La stratégie de maîtrise des coûts de la DSI passe par la maîtrise des charges de personnel qui pèsent sur son budget de fonctionnement. A cette fin, elle peut agir : q soit par une politique rigoureuse de gestion des ressources humaines permettant la maîtrise des salaires et de la pyramide des âges q ou par la réalisation de gains de productivité. L’offre des constructeurs et des éditeurs de logiciel a évolué au cours de ces dernières années en incorporant des fonctions favorisant la fiabilité et l’automatisation des tâches. 80,00% 70,00% 60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00% 10,00% 0,00% Personnel Locaux Investissement Figure 5. Coûts relatifs de personnels, locaux et investissements Les charges de personnel sont 3 fois plus importantes que les coûts matériel et logiciel. Le coût des locaux, moins de 1%, est négligeable. Néanmoins, dans un métier de service, la substitution du capital au travail trouve rapidement ses limites. III. Retour à la réalité Si l’étude d’un modèle simple permet de tirer certains enseignements, l’organisation d’une DSI est de loin beaucoup plus complexe. Ainsi, un certain nombre d’applications ont un nombre limité d’usagers, les économies d’échelles sont faibles, le coût marginal décroît peu. Les DSI ont depuis longtemps mené une politique de standardisation qui permet, notamment grâce à la maîtrise de « Outsourcing, le destin des DSI ? » J. Capirossi décembre 2004 - Page 2/4 l’architecture technique, une mutualisation des couches réseaux, matérielles et logicielles, système et middleware. Au niveau des applications, les coûts de refonte, en l’absence de gains métier significatifs, freinent la rénovation du parc et maintiennent une hétérogénéité importante. En 2003, le cabinet Celent estimait à $14 Milliards le coût de refonte des systèmes informatiques des 100 plus grandes banques mondiales. Les pratiques relatives aux fonctions de support sont de plus en plus standardisées, elles ne portent plus la différentiation des entreprises. La valeur provient moins de la particularité d’une étape du processus de production que de l’orchestration globale des activités. La mutualisation et la réutilisation, favorisées par les architectures applicatives distribuées - J2EE, Corba, Web services – a du mal à se diffuser car cela demande aux DSI d’acquérir de nouvelles compétences notamment dans les domaines de l’architecture applicative et fonctionnelle. Poussées à l’extrême, ces tendances débouchent sur le concept de « grid computing » qui assimile l’utilisation du système informatique à une consommation intermédiaire de type énergétique. Figure 7. facteurs de maîtrise des coûts Dans ce mouvement de fond qui voit le partage des bonnes pratiques et de la Encadré I Le coût marginal est défini comme le coût de production (CP) d’une unité supplémentaire. Dans le cas de l’outsourcing de service informatique, on prend comme unité l’usager (U ). Le coût de production est donc le coût variable unitaire multiplié par le nombre d’unités servies auquel on ajoute la part des coûts fixes qui revient à une unité multipliée par le nombre d’unités servies. CPU = CV ⋅U + CF ⋅U U U CV CPU + ∆ U = ⋅( U + ∆ U ) + CF ⋅( U + ∆ U ) U U Le coût marginal moyen de l’extension d’un service à ∆ U usagers est l’ augmentation du coût de production rapporté au nombre de nouveaux usagers : Cm = ∆ CP = CV + CF ∆U U U C’est donc la somme du coût variable unitaire, qui est quasi constant, et de la part de coût fixe de l’unité produite. Au fur et à mesure de l’augmentation du nombre d’usagers, le coût marginal dim inue : ∆U 1 ∆ Cm = CF ⋅ − 1 = − CF U +∆U U U U + ∆U La coût variable unitaire étant constant, l’évolution du coût marginal se fait par rapport à la part de coût fixe qui va en dim inuant. C’est le signe d’une production à rendements croissants. La courbe de demande donne en fonction du prix la quantité de service à produite pour maximiser ( ) ( l’utilité des usagers. A un niveau de prix correspond un nombre d’usagers qui considèrent que ce service est nécessaire pour maximiser leur utilité. Pour notre modèle, nous considéreront une courbe de demande linéaire et décroissante du type p = P 0 bq Dans les modèles économiques à rendements croissants, l’incertitude affectant la réalisation de la dernière unité à un impact directe sur le coût global. ) « Outsourcing, le destin des DSI ? » J. Capirossi décembre 2004 - Page 3/4 connaissance, qui connaît l’accélération de la standardisation, les gagnants sont ceux qui ont la capacité de réaliser les plus grandes économies d’échelle. q A moyen terme, les innovations technologiques vont permettre davantage de distribution et de réutilisation des applications. L’amélioration des réseaux va favoriser, plus avant, la centralisation et la délocalisation des activités de service. La pression concurrentielle va apporter plus de justification à la refonte des systèmes informatiques obsolètes. L’externalisation ne doit pas prendre en compte la dimension économique seule, l’entreprise doit avoir atteint une maturité suffisante : q dans la maîtrise de la relation avec ses client q dans l’organisation de ses processus et de son système informatique, q dans la gestion des compétences Les gains de productivité ne pourront pas compenser la différence de charge de personnel entre des pays industrialisés et des pays émergents de plus en plus compétents. C’est l’émergence du concept d’entreprise virtuelle qui connaît ses clients, qui sait orchestrer les processus de sa « supply chain », avec les processus de recherche et développement, les processus de gestion, tous externalisés, dans le but de maximiser l’utilité de ses clients d’un point de vue fonctionnel, qualitatif et économique. Si les grandes multinationales ont, grâce à leur taille, la possibilité de jouer la carte d’un système informatique interne, les PME devront, pour suivre l’élan, avoir recours de plus en plus à l’externalisation de leur production informatique, de leurs applications et de leurs processus de support. Elles doivent cependant veiller à garder la maîtrise de l’orchestration dans laquelle réside leur savoir faire. Le cabinet Mercury et l’EIU (the economist intelligence unit) dans un rapport de décembre 2004 identifient les objectifs d’une l’externalisation réussie : q Réduire les coûts IT dans 50% des cas q Obtenir des compétences non disponibles en interne dans 47 % des cas q Mesurer et améliorer l'apport de l'IT au business dans 39 % des cas q Améliorer la qualité de l'IT dans 35 % des cas Et les craintes : q Le risque de dégradation du service qualité dans 54 % des cas q La difficulté de maintenir une visibilité avec la dispersion des opérations IT dans 53 % des cas q La dépendance face à un tiers dans 48 % des cas Assurer des services respectant les réglementations dans 43 % des cas IV. Conclusion L’externalisation de la plus grande partie du système informatique et des services associés paraît une perspective inéluctable pour l’ensemble des entreprises. Poussée par la raison économique, permise par les innovations technologiques, l’externalisation demande une maîtrise de l’établissement et de la gestion du contrat de service. Celle-ci étant parfois insuffisante, cela a fait naître des difficultés imprévues. Sans l’évolution des pratiques et des savoirfaire des architectes techniques, applicatifs et fonctionnels, les systèmes informatiques n’auraient pas une maturité suffisante pour accompagner ces changements organisationnels. Diana Farrell, du McKinsey's Global Institute pense qu’en réorganisant ses processus, alliant externalisation et offshoring, une entreprise multinationale peut baisser ses coûts de 50% à 70%. Ces espoirs sont équivalents à ceux que portait le commerce électronique B2B en 2000. Bibliographie : Survey Outsourcing – the economist (www.economist.com) – nov 2004 Insee indices et séries statistiques (www.insee.fr) Controlled Offshore Outsourcing with an Active Process S Lidman, I Jacobson - 2004 « Outsourcing, le destin des DSI ? » J. Capirossi décembre 2004 - Page 4/4