Témoignage de Michel Cool Michel Cool converti au silence pour

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Témoignage de Michel Cool Michel Cool converti au silence pour
Témoignage de Michel Cool
Michel Cool converti au silence pour mieux être un journaliste chrétien
Michel Cool s’est dit heureux de revenir en Béarn car il se dit gourmand des bonnes choses de la région, mais il a aussi
d’autres « gourmandises », écoutons-le :
Ma gourmandise est de venir écouter : écouter, c’est mon bonheur. Mes maîtres en silence, mes bergers du silence,
ce sont les moines… Ce sont de petits bergers car le Grand Berger, c’est le Christ !
Témoignage humble et personnel de mon expérience
En février 2007, en tant que journaliste, j’ai voulu faire une enquête sur les moines : je les croyais extraordinaires et
je voulais les toucher, voir leur étoffe humaine. J’ai visité 22 monastères de toutes les spiritualités, à condition de
pouvoir rencontrer des hommes ou des femmes qui acceptaient de se confier. (Livre : Messagers du silence)
Un jour j’ai fait une halte dans un monastère belge, le matin j’ai assisté aux Laudes (action de grâce pour ce nouveau
jour qui vient) puis je suis allé marcher dans un petit bosquet et, j’ai soudain été pris par une crise de larmes très
profonde. A l’issue de cette crise de larmes, j’ai ressenti une sérénité que je n’avais jamais éprouvée auparavant.
J’avais eu à la fois l’impression de me vider et de me remplir - Me vider : me libérer d’une cargaison puante, de
déchets, de peurs… Me remplir comme par un baume… J’en suis rentré fatigué et léger, mais, qu’est-ce qui m’arrive
? Moi qui suis très rationnel ! Je n’avais pas de souci ce jour-là, j’étais plutôt heureux... Contrairement à mon
habitude où, lorsque je rentre, je mets tout de suite la radio pour me tenir au courant des évènements, ce jour-là, je
rentre en silence. Sur le moment, je n’arrive pas à mettre un nom sur ce qui m’arrive, je n’ai pas entendu de voix
comme Jeanne d’Arc, mais j’ai ressenti comme un message qui me disait « Tu m’avais oublié, Je suis là, tu n’es pas
seul et je t’aime »
Il m’a fallu trois ans d’accompagnement pour une révision de vie, pour comprendre. J’ai vu que j’étais dans une
période de fragilité : chômage, problème de santé et perte de mon père. Je me suis souvenu de la parole de Saint
Paul : « C’est lorsque je suis faible, que je suis fort » (2 Co 12, 10)
Je me suis toujours intéressé aux grands maîtres spirituels et j’ai découvert que dans la grande spiritualité d’Orient, il
y avait le « baptême des larmes » et le « baptême du silence », l’un ne va pas sans l’autre - Le « baptême des
larmes » : le péché est une tache que les larmes enlèvent… (Anne Lécu a écrit Des larmes – Cerf collection
Epiphanie : ce qui provoque les larmes, ce qu'elles viennent dire et guérir en celui qui les verse. Bienfait et don, les
larmes révèlent la grandeur de l'homme au cœur de sa finitude et de sa faiblesse)
En quoi ça a changé ma vie
Mon chemin m’a rappelé que quelqu’un était venu vers moi et m’aimait. Etre chrétien, c’est suivre le Christ, être aux
aguets de sa présence, être toujours en éveil, y penser pas seulement lorsque l’on est malheureux mais aussi lorsque
l’on est heureux.
Ma vie en a été changée car j’ai pris conscience de ma vulnérabilité. La réussite n’est plus mon moteur, maintenant
mon moteur est : accepter ma faiblesse, car, dépouillé des fausses idolâtries, on apprend à se connaître soi-même.
J’ai aussi découvert la prière, c’est la prière qui donne sens à l’action. Ma première urgence, chaque jour, c’est de
me reposer dans mes trois-quarts d’heure de prière silencieuse : je me lève à 6h du matin pour prier, et après
seulement je vais déjeuner avec ma femme. Je suis bien pendant cette prière et, sans cela, sans ce cœur à cœur, je
suis mal. Quand on aime, on ne veut pas rater une miette de sa rencontre. Ça me donne la force pour aimer un peu
ceux que je vais rencontrer et que je n’aime pas trop – Question : le silence dans le couple ? Sa femme s’est convertie
au Christ avant lui, à 15 ans à Tamier. Ils ont une vie de prière conjugale le week-end et aux vacances. Ils ne peuvent
le faire régulièrement faute d’avoir les mêmes rythmes, mais elle accepte très bien son choix des Laudes.
La conversion n’est pas qu’un moment, car maintenant Foi et Raison cheminent harmonieusement, ce sont mes
deux poumons. La conversion est permanente, je suis sur un chemin, j’aime l’ascèse des Laudes, ça m’aide à me
retenir et à me dire que l’important, c’est l’autre. Je sais que je vis sous le regard de quelqu’un qui m’aime et que je
ne veux pas décevoir. Tout chrétien est appelé à se convertir, ça prend toute une vie.
En quoi ça a changé ma vie de journaliste
Qu’est-ce qu’un journaliste chrétien ? Ce sont les mêmes droits, les mêmes devoirs, les mêmes valeurs, mais en plus,
j’ai un Grand Patron envers qui j’ai une dette. Donc, dans ma manière d’être plus que par le discours, je dois suivre le
Christ, je dois le suivre toute ma vie, toute ma journée, par l’accueil et l’écoute de l’autre.
Le journalisme a subi des mutations, il devient spectaculaire et on devient des amuseurs publics du spectacle du
monde. Tous les jours, les journaux martèlent les mêmes infos en désinformant, et sans donner les outils pour
mettre du sens. Tout ceci a un but lucratif. On est plus dans la superficialité des choses que dans la profondeur. La
technologie passe au-dessus du message.
Il ne faut pas bannir pour autant les nouvelles technologies et le progrès, mais il faut rester maître de l’info et ne pas
être asservi par les technologies. Un jour où je faisais un cours à des étudiants en journalisme, un jeune m’a dit :
« Inutile de nous parler d’éthique, il faut être le premier ! ». Ce n’est pas ce que j’ai appris et qui m’a motivé à faire
ce métier. Il y a des défis à relever pour le journaliste, il doit être un éveilleur et donner du sens. La revue « Le 21 »
pose ce problème car, si ça continue, il n’y aura plus de journalisme.
Nous avons deux obligations : mettre à jour et donner du sens. On rencontre, on écoute, on voit, on a aussi les
problèmes technologiques, et c’est difficile de tout mener de front. J’ai donc décidé que, dans l’action, on ferme les
portables et on se parle.
Etre journaliste chrétien, c’est être un observateur engagé, c’est-à-dire : Vivre ensemble – Etre des artisans de
dialogue – Pas d’exclusion mais droit au désaccord. Nous devons aller au-devant des autres sans couper les
passerelles. Il faut entretenir la flamme du dialogue, créer des liens.
Monseigneur Albert Rouet m’avait dit : « Comme journaliste, tu as mission d’aimer le monde d’un amour chaste,
c’est-à-dire qui ne manipule pas ». Je veux essayer d’être cela et d’être un annonciateur de bonnes nouvelles, même
si ça ne paie pas. C’est important qu’il y ait un équilibre entre ceux qui vivent des drames et ceux qui se relèvent ou
qui créent de la beauté.
Faut-il faire du bruit pour se faire entendre ?
Comme chrétiens, nous sommes minoritaires et nous le serons de plus en plus, mais, être minoritaire, c’est peutêtre une chance, car c’est dans la fragilité qu’on va réinventer un christianisme authentique. N’oublions pas qu’à
l’origine les communautés chrétiennes étaient très petites.
Il faut parfois se taire, parfois parler. On parle bien quand on sait se taire. Jésus s’est sans arrêt retiré au désert…
Après le silence, on peut faire entendre une parole pétrie de la Parole de Dieu. Que la parole n’écrase jamais l’autre,
elle doit au contraire libérer. N’ayons pas peur de parler mais sans museler l’autre, car notre parole doit être une
parole de résurrection et non une parole de mort.
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Regardez les cercles de silence : le silence y est subversif car le silence rompt le silence sur la situation de
certains. Le silence peut faire prendre conscience. Avoir une foi authentique plus que tapageuse.
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L’œcuménisme avancera davantage par l’amitié dans le silence, elle donne l’impression de se parler, de se
comprendre. Des moniales protestantes proposent des randonnées en silence dans la montagne : prier, dire des
poèmes, mais ne pas se parler… et pourtant des amitiés sont nées.
Cheminer dans le silence va peut-être féconder un christianisme fragile mais qui ira loin…
Autres réflexions suite aux questions
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Parole et silence ne vont pas l’un sans l’autre : au Viêt-Nam, il est difficile d’être chrétien car il n’y a pas de
parole publique, et le silence ne suffit pas. Il leur manque, comme au Brésil, un Elder Camara : « la voix des
sans-voix »
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Un chrétien est-il une parole vivante ? Ce que l’on médite, ce que l’on prie, est-ce qu’on le vit ?
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Dans les évènements actuels au sujet du projet de loi sur le mariage homosexuel, les positions se radicalisent
des deux côtés. Attention ! Il est nécessaire de trouver des paroles justes pour ne pas couper les ponts et
rentrer dans une « guerre des religions ». Il est important de se parler avec le souci du bien-commun, et de
résister à une sorte de dictat de la pensée. Ne pas répondre à la violence par la violence, ne pas montrer
arrogance, mépris.
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Le silence et les jeunes : Frère Aloïs de Taizé me disait que quand les jeunes arrivaient, c’était effrayant au
début, puis, les temps de dialogue et d’échange, où ils pouvaient se défouler, les amenaient au silence. Aller sur
leur terrain pour les amener au silence.
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La prière ne doit-elle pas passer, elle aussi, par le tamis du silence ?
Son dernier livre : Conversion au silence – Edition Salvator : au cœur de ce livre, témoignage autant spirituel que
personnel, se cache la réalité tangible du Dieu vivant. Homme de médias, toujours "en route", Michel Cool raconte
une vie de passion professionnelle jalonnée par la rencontre des "grands" et des "petits" de ce monde et la certitude
de la présence divine dans la vie des hommes. Un livre extrêmement sincère et émouvant qui laisse entrevoir la face
intérieure de chacun d'entre nous.