La position de la Fédération des pourvoiries du Québec

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La position de la Fédération des pourvoiries du Québec
Mémoire adressé à la
Commission sur les enjeux énergétiques du Québec
La position de la
Fédération des pourvoiries du Québec
1er octobre 2013
Commission sur les enjeux énergétiques du Québec – Position de la FPQ
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Nécessité de prendre le virage des technologies de l’énergie renouvelable
et de l’efficacité énergétique en pourvoirie
1.
Introduction
Merci de nous accorder l’opportunité de présenter notre point de vue sur ce que pourrait inclure la politique
énergétique du Québec. En raison de leur éloignement et de leur éparpillement partout sur le vaste territoire de la
province de Québec, les pourvoiries sont particulièrement concernées par la question de l’énergie. Dans la majorité
des cas, les pourvoiries ne sont pas reliées au réseau de distribution d’électricité d’Hydro Québec. Elles doivent
donc produire elles-mêmes l’énergie répondant aux besoins de leurs clientèles touristiques.
Après avoir brossé un bref portrait de l’industrie de la pourvoirie, le présent mémoire s’attardera à commenter les
liens étroits qui existent entre les objectifs poursuivis par le gouvernement et ceux qui sont poursuivis par les
opérateurs de pourvoiries.
2.
L’industrie de la pourvoirie en bref
La Fédération des pourvoiries du Québec
Créée en 1948, la Fédération des pourvoiries du Québec (FPQ) a pour mission principale de Représenter et
promouvoir l’intérêt collectif des membres dans une perspective de développement durable. Elle compte environ 365
pourvoiries membres, représentant plus de 70% de l’offre disponible. Elle compte de plus sur un réseau de membres
associés et de partenaires fidèles œuvrant dans plusieurs domaines d’activités. Le Conseil d’administration de la FPQ
compte 18 membres, dont le président de chacune de ses 12 associations régionales de pourvoiries.
La FPQ fournit de l’emploi à une quinzaine de personnes et offre des services spécialisés dans divers domaines, dont
la foresterie, la commercialisation et le marketing, la comptabilité, le droit ainsi que l’aménagement et la gestion de
la faune.
Les pourvoiries
Les pourvoiries sont, au sens de la loi, des entreprises qui offrent, contre rémunération, de l’hébergement et des
services ou équipements reliés à la pratique d’activités de chasse, de pêche ou de piégeage et elles sont établies
sous l’autorité de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune (L.R.Q., c. C-61.1).
Il y a environ 645 permis de pourvoirie en vigueur au Québec. Ensemble, elles constituent une industrie qui génère
des retombées économiques directes et indirectes de plus de 210 millions de dollars annuellement et qui procure de
l’emploi à plus de 3 000 personnes. Environ 426 000 personnes, dont plus de 20% sont des non-résidents, utilisent
chaque année les services d’une pourvoirie. Les pourvoiries offrent le plus grand réseau d’hébergement touristique
en forêt avec près de 4 700 unités et plus de 31 000 places.
Il existe deux types de pourvoiries : les pourvoiries avec droits exclusifs (PADE) et les pourvoiries avec droits nonexclusifs (PDNE). Les premières opèrent sur terres publiques en vertu de leur permis de pourvoirie et d’un bail leur
octroyant l’exclusivité des activités de chasse et de pêche sur un territoire donné, qui varie entre quelques dizaines
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et quelques centaines de kilomètres carrés . Les secondes sont situées en terres publiques ou en terres privées et
opèrent en vertu de leur permis de pourvoirie uniquement. Les PDNE localisées sur les terres de l’État doivent
obtenir du ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF) un bail de villégiature commerciale pour
chacune de leurs unités d’hébergement.
Le secteur de la pourvoirie constitue une part non-négligeable de l’industrie touristique des régions du Québec. Ce
produit touristique spécialisé est offert d’une manière continue, année après année. Les retombées économiques
engendrées par les activités de pourvoiries sont durables et se traduisent notamment par le maintien d’un nombre
d’emplois élevés, d’autant plus importants qu’ils sont offerts dans des régions rurales et/ou isolées.
La portion des coûts d’opération liés à l’énergie est en croissance relativement importante depuis quelques années
dans les pourvoiries. Les pourvoyeurs sont à la recherche de moyens leur permettant d’abaisser leur consommation
d’énergie fossile. D’autre part, la clientèle exige de plus en plus de la part des opérateurs touristiques des produits à
faible impact environnemental.
3.
Sources d’énergies utilisées en pourvoirie
Selon un bilan partiel réalisé en 2007 dans 150 pourvoiries et extrapolé par la suite dans les 675 pourvoiries du
Québec, ces dernières consomment annuellement 1 664 tonnes de bois de chauffage, 855 943 litres de gaz propane
et 720 268 litres d’huile à chauffage (pour le chauffage des chalets). Malheureusement, nous n’avons pas de chiffres
en ce qui concerne la consommation d’essence et de carburant diésel requis par les groupes électrogènes
produisant de l’électricité. Mais nous estimons que cette consommation est importante et prohibitive pour plusieurs
pourvoiries. D’autre part, nous considérons que ces chiffres ont peu évolué depuis 2007 et qu’ils sont encore
d’actualité.
Toujours d’après ce bilan partiel, le secteur des pourvoiries produirait 3 440 tonnes équivalent CO2 annuellement ce
qui correspond à 0,004% des émissions québécoises (90,1 Mt éq. CO 2). Ces données n’incluent pas les émissions
associées aux générateurs d’électricité fonctionnant à l’essence et au diésel.
Bien que la contribution de l’industrie de la pourvoirie aux émissions de GES soit faible et se situe sous la barre du
1% des émissions québécoises, même en incluant les émissions provenant des génératrices, les pourvoyeurs tentent
de plus en plus de se tourner vers les technologies de l’énergie renouvelable (TER). Depuis quelques années, la FPQ
encourage d’ailleurs les pourvoyeurs à se tourner vers les TER non seulement pour des raisons environnementales,
mais également pour des raisons de sécurité, de rentabilité et d’image corporative.
4.
Réduire les émissions de GES
Les gains les plus significatifs pouvant être réalisés pour réduire les émissions de GES dans les pourvoiries peuvent
être effectués en remplaçant les groupes électrogènes actuels qui sont polluants, bruyants et énergivores de même
que les lampes fonctionnant au gaz propane. Dans la plupart des cas, le photovoltaïque constitue la solution la plus
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À l’exception de l’Île d’Anticosti, la superficie totale occupée par les PADEs équivaut à environ 1% de l’ensemble des terres du
domaine de l’État.
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logique à déployer. Cependant, pour les grosses pourvoiries, cette technologie n’est pas suffisante et la production
d’hydro électricité doit alors être envisagée.
Évidemment, les investissements requis pour effectuer ce virage vers les TER sont très importants. Même si les
opérateurs savent que ces investissements sont rentables à long terme, ils n’ont pas souvent les liquidités
nécessaires pour y faire face. Le soutien du gouvernement du Québec par le biais d’un programme d’investissement
bien adapté à la réalité des pourvoiries est donc absolument essentiel.
5.
Favoriser l’efficacité énergétique
De concert avec ses membres pourvoyeurs, la FPQ travaille avec un réseau de membres associés offrant divers
produits et services aux pourvoiries. Certains des membres associés de la FPQ sont spécialisés et qualifiés dans la
planification, l’installation et le service après-vente de systèmes de production d’énergie solaire, lesquels sont
souvent couplés à d’autres sources de production d’énergie (systèmes hybrides), notamment des génératrices de
nouvelle génération beaucoup plus performantes que les anciens modèles. Cela permet de faire face aux pointes de
consommation qui surviennent le matin et en fin de journée.
Par ailleurs, aucun système de TER n’est installé en pourvoirie sans faire un exercice d’efficacité énergétique. Dans
chacun des projets d’investissement, nous travaillons non seulement sur la production de l’énergie, mais également
sur les appareils qui la consomment. Ainsi, les appareils énergivores sont remplacés et les habitudes de
consommation sont adaptées afin de réduire les besoins énergétiques et d’optimiser l’ensemble des systèmes au
maximum. Comme la clientèle est de plus en plus sensible aux impacts sur l’environnement, elle est disposée à faire
sa part pour réduire sa consommation.
6.
Développement et innovation
Les pourvoiries étant pour la plupart non reliées au réseau de distribution d’Hydro-Québec, elles sont de ce fait
d’extraordinaires territoires pour le développement et l’innovation des TER. Ces territoires diversifiés sur le plan
géographique et géophysique offrent de nombreuses possibilités, notamment pour les petites éoliennes, les microturbines et les hydroliennes. La FPQ travaille d’ailleurs avec la chaire TERRE du cégep de Jonquière pour le
développement et l’installation expérimentale d’hydroliennes dans quelques pourvoiries. Considérant que le
photovoltaïque ne suffit pas pour combler les besoins dans certaines pourvoiries, la diversification des modes de
production d’énergie renouvelable constitue un enjeu important pour les pourvoiries.
7.
Exploration et exploitation des réserves d’hydrocarbure
La clientèle qui fréquente les territoires des pourvoiries recherche avant tout la quiétude et un environnement de
qualité. Il s’agit non seulement d’un constat logique, mais également démontré par des sondages menés auprès des
clients. Une attention toute particulière doit donc être portée à la protection de l’intégrité du produit offert par les
pourvoiries. Cette industrie repose également sur des entrepreneurs audacieux et visionnaires, qui investissent
personnellement des centaines de milliers, voire des millions de dollars dans des infrastructures pourtant localisées
sur des terres qui ne leurs appartiennent pas. Il est essentiel que cette caractéristique particulièrement rébarbative
soit compensée par une certitude minimale que la planification de leurs activités, donc de la rentabilisation de
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l’opération de pourvoirie, ne sera pas contrecarrée par l’exercice des droits d’un tiers, sans qu’une harmonisation de
leurs exercices ne soit assurée.
C’est pourquoi nous demandons que les projets d’exploration et d’exploitation des réserves d’hydrocarbures situés
dans les territoires des pourvoiries se fassent de manière responsable, non seulement dans le discours, mais
également dans les faits.
8.
Conclusion
Notre mémoire présente de manière assez évidente les points de convergence qui existent entre les pourvoyeurs et
le gouvernement du Québec en ce qui concerne les objectifs qu’il poursuit en lien avec les enjeux énergétiques du
Québec. Si le gouvernement souhaite vraiment une économie durable, qui tient compte des PME en régions (dont
les pourvoiries) et qu’il reconnaît aussi l’importance sociale de celles-ci, les recommandations que nous faisons ici
devraient être considérées avec tout le sérieux qu’elles méritent.
Dans sa forme connue en 2012, le Programme d’aide à l’installation d’équipements solaires opérationnels (PAIESO)
répondait très bien aux besoins des pourvoyeurs. Ce programme est actuellement en restructuration au Bureau de
l’efficacité et de l’innovation énergétiques (BEIE). Plusieurs pourvoyeurs ont déjà déposé des projets dans le cadre du
PAIESO et plusieurs autres ont des projets en attente. Si des changements importants sont apportés au programme,
rien ne nous indique pour l’instant ce qui adviendra des projets en attente ni si le nouveau programme permettra
aux pourvoyeurs de s’en prévaloir de manière avantageuse.
Nous savons qu’il est important pour le gouvernement de s’impliquer dans des projets avantageux au niveau du
ratio d’investissement versus les GES épargnés. Mais dans le cas des pourvoiries, il ne faut pas uniquement
considérer les litres de diesel épargnés pour la production électrique. Ces petites entreprises touristiques opèrent
dans l’arrière-pays et elles doivent transporter le carburant en camion ou en avion ce qui augmente
considérablement les émissions de GES pour chaque litre consommé en bout de ligne. À ce contexte spécifique de
l’éloignement s’ajoute des enjeux tels que la santé et la sécurité de la clientèle et des employés ainsi que les risques
de déversement liés à la manutention. Les pourvoiries sont également une bonne vitrine de l’industrie touristique
québécoise pour les produits grande nature (un des axes prioritaires de développement de Tourisme Québec) et
elles se doivent à ce titre d’améliorer leur image corporative et environnementale.
Par ailleurs, dans certaines situations particulières en pourvoirie, l’énergie solaire n’est pas la meilleure solution ni
sur le plan environnemental, ni sur le plan économique. Par exemple, l’installation d’une micro turbine peut parfois
s’avérer beaucoup plus avantageuse. Or, dans sa forme connue en 2012, le PAIESO ne permettait pas de
subventionner de tels projets.
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9.
Recommandations
1.
Relancer le programme PAIESO, idéalement dans sa forme connue de 2012 pour le volet photovoltaïque, le
plus rapidement possible.
2.
Ajouter un volet complémentaire au programme PAIESO (ou développer une autre programme) afin de
permettre de subventionner des projets d’implantation de petites éoliennes, de micro-turbines et
d’hydroliennes en pourvoirie dans une optique de développement des énergies renouvelables émergentes et
de diversification des sources d’approvisionnement.
3.
Obliger le promoteur d’un projet d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures situé sur ou à proximité
immédiate du territoire d’opération d’une pourvoirie, à conclure une entente avec cette dernière afin de
s’assurer que l’éventuel développement pétrolifère ou gazier ne puisse s’effectuer sur ce territoire sans
modalités régissant l’harmonisation des activités des deux parties.
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