OM 103 Actu 100ans Integral

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OM 103 Actu 100ans Integral
A TIRE D'AILE VERS LE CENTENAIRE DE LA LPO
La plumasserie
Ce mot est tombé en désuétude, mais il a été pendant de longues années un des éléments de la
lutte de la LPO contre une exploitation des plumes d'oiseaux sauvages, surtout des paradisiers et
des aigrettes. La mode féminine a amené, parfois, des commentaires sévères contre les femmes
portant des chapeaux ornés de plumes d'oiseaux sauvages. L'action de la LPO a contribué à la
disparition de cette mode. Depuis, il y a eu la lutte contre l'utilisation des peaux de bêtes et la prise
de conscience est passée par la campagne menée pour les bébés phoques. Je ne pense pas que
la mode des chapeaux ou de l'habillement utilise encore des oiseaux sauvages, mais ce qui est sûr
c'est qu'il y a encore de ces oiseaux qui, à travers le monde, sont décimés pour leurs plumes. Par
exemple les ibis rouges dont les plumes sont utilisées pour la fabrication de fleurs artificielles.
commercial bien entendu devrait
joindre ses efforts à ceux de Schillings,
efforts qui seront aussi les nôtres :
n'exigeons pas de la Femme un sacrifice
de parure, demandons-lui grâce pour
le Paradisier, pour l'Aigrette, pour tous
les Oiseaux sauvages livrés à leurs
propres moyens de défense.
La plume d'Autruche provient maintenant de plus de 900.000 de ces Oiseaux
qui se reproduisent dans des fermes
spéciales ; l'espèce complètement
détruite à l'état libre est sauvée de la
disparition par cet élevage en captivité.
Les Oiseaux de basse-cour, le gibier
également peuvent fournir à la
plumasserie des matériaux assurés et
en grande quantité ; c'est vers leur
utilisation que doit tendre le commerce
sans attendre qu'il soit trop tard. Partout
s'élèvent des voix en faveur des Oiseaux
menacés, et Schillings rappelant les
28.000 membres du Bund für
Vogelschutz, auquel ont adhéré le
Prince et la Princesse impériale
d'Allemagne, cite la campagne de M.
Roosevelt aux Etats-Unis, et
l'approbation donnée en Angleterre,
par la reine Alexandra.
ALBERT CHAPPELLIER
RECHERCHES EFFECTUÉES PAR HENRI JENN
Bulletin N° 1-2 février-mars 1912
LE PARADISIER EN NOUVELLE-GUINÉE
Dans la revue l'Océanie française, un
article de M. G. Regelsperger sur la
Nouvelle-Guinée se termine par ces
mots : "Il a été tué 5.000 de ces derniers
(Oiseaux de Paradis) contre 3.000 l'année
précédente, et il faut craindre une
destruction totale de cette magnifique
espèce d'Oiseaux dans un avenir très
rapproché, "
LA TRAGÉDIE DE L 'OISEAU DE P ARADIS ET DE
L'AIGRETTE
Prof C.G. Schillings.
PUBLICATION DU BUND FÜR VOGELSCHUTZ (LIGUE
POUR LA PROTECTION DES OISEAUX) STUTTGART,
JUILLET 1911. - EXTERMINATION D'OISEAUX POUR
LA PARURE DE LA FEMME (88E PUBLICATION DU
DÜRER BUND (ASSOCIATION DÜRER) NOVEMBRE
1911.
Le professeur Schillings a rapporté de
ses voyages en Afrique de merveilleuses
photographies des grands fauves qu'il
a fixé sur la plaque souvent en pleine,
à la lumière artificielle (1).
Ces documents accompagnés de
collections qui ont enrichi les
principaux Musées d'Allemagne,
Schillings les a recueillis, guidé par cette
pensée de vrai naturaliste : garder une
image précise et durable de cette faune
africaine dont les empiètements de la
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32 .. L'OISEAU
L'OISEAU magazine
magazine n°
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civilisation feront bientôt disparaître
les derniers repré-sentants. Revenu en
Europe Schillings n'a pas cessé de
plaider leur cause ; ses récits de voyage
sont un vivant appel, depuis le premier
chapitre de "Avec le magnésium et la
carabine" jusqu'à la conclusion de
"L'enchantement de l'Elescho".
Parmi les animaux que Schillings a
remarqué et photographié, parmi ceux
dont la destruction est poursuivie avec
le plus d'acharnement, l'Aigrette, le
gracieux Héron blanc, devait fixer son
attention. Il revient sur elle aujourd'hui,
après deux articles dans la Gazette de
Cologne, articles repris par la Ligue
féminine internationale pour la
protection des Oiseaux (Internationaler
Frauenbund für Vogelschutz. Berlin).
Schillings dans un langage coloré et
prenant, s'adresse à la Femme et lui
montre le supplice des jeunes Aigrettes
mourant de faim au nid après que le
chasseur de plumes a tué leurs parents
dont la dépouille n'a de valeur pour lui
qu'en pleine période de reproduction.
La destruction totale des Aigrettes
dépasse donc de beaucoup les chiffres
fournis par la vente de la plume. Si, en
1910, par exemple, il a été vendu au
marché de Londres 49.000 onces (1470
kilo-grammes) de plumes représentant
environ 290.700 Aigrettes adultes, il
faudrait ajouter à ce nombre déjà
formidable les couvées disparues, et l'on
arriverait, sans exagération, à quelques
500.000 Aigrettes victimes de la mode
en une seule année.
Nul Oiseau n'est capable de résister à
de tels massacres, et les dernières
Aigrettes ne tarderaient pas à
disparaître si les mesures les plus
énergiques n'étaient prises pour les
défendre. Schillings montre la
prohibition américaine étendue
maintenant à presque tous les EtatsUnis ; une loi vient d'être présentée au
Parlement anglais. Par contre,
l'Allemagne n'a encore rien fait dans
ce sens, et Schillings cite ce passage d'un
rapport officiel sur le commerce de la
Nouvelle-Guinée allemande : "Ont
bénéficié également de cette heureuse (!!)
augmentation : Oiseaux de Paradis, 1909,
3.270 peaux d'une valeur de 65.000 mark
; 1910, 4.850 peaux d'une valeur de
152.000 mark. ( !!) "
Le commerce de la plume, auquel ces
destructions en masse sont nécessaires
pour pouvoir "lancer" une mode, épuise
peu à peu les espèces qu'on lui laisse
attaquer ; il serait bientôt sa propre
victime : il tue la poule aux oeufs d'or,
dit Schillings. C'est pourquoi un intérêt
Bulletin N° 6 juillet 1912
LE CONGRÈS DE PROTECTION DES ANIMAUX
Ce congrès s'est tenu du 28 mai au 1er
juin dernier, à Paris dans l'hôtel
Excelsior, sous la présidence d'un
membre de notre Ligue, grand
protecteur des petits Oiseaux, M.
Beauquier*, député du Doubs.
... Parlant de l'emploi des plumes dans
la mode, Mlle des Varennes, à qui une
documentation plus précise a fait
abandonner ses préventions premières,
préconise aujourd'hui la plume d'Autruche et, y joignant les dépouilles des
Oiseaux de basse-cour (1), constate,
avec la Ligue, que le commerce de la
plumasserie ne se trouve nullement
menacé, si l'on cherche à lui retirer les
Oiseaux sauvages. Les principaux
représentant de ce commerce, présent à
la discussion, parurent d'accord avec
le Congrès sur la question de principe.
L'un d'eux, décrivant l'importance
mondiale de la plumasserie parisienne,
insista sur la nécessité qu'il y avait pour
elle de reproduire un même modèle à
un très grand nombre d'exemplaire ;
ceci revient à dire qu'il lui faut abattre
un très grand nombre d'Oiseaux d'une
même espèce. La conclusion logique est
celle-ci : plus d'Oiseaux sauvages dans
la mode, quels qu'ils soient. Avec la
dépouille des Oiseaux élevés en
captivité, la plumasserie peut vivre et
prospérer ; qu'elle entre résolument
dans cette voie et nous serions les
premiers à l'encourager et à susciter de
nouveaux matériaux...
(1) Ceci a été dit dès 1909, par M. Debreuil,
dans le Bulletin de la Société d'Acclimatation.
CHARLES BEAUQUIER (1.12.1833 - 12.8.1916),
DÉPUTÉ DU DOUBS ; LE 21 AVRIL 1906 IL FAIT
V O T E R LA 1 E R L O I D E P R O T E C T I O N D E
L 'E NVIRONNEMENT APPELÉE LOI B EAUQUIER .
FONDATEUR DE LA SOCIÉTÉ POUR LA PROTECTION
DES PAYSAGES ET DE L'ESTHÉTIQUE DE LA FRANCE.
Bulletin N° 12 janvier 1913
EXTRAIT DE LA SÉANCE DU COMITÉ DU 22 MARS1912
... il exprime le désir de voir la Ligue
assurer tout d'abord la protection des
Oiseaux indigènes, car, s'il est
regrettable d'assister à la destruction
d'animaux appartenant à des faunes
étrangères, il le serait bien d'avantage
de voir disparaître notre Rouge-gorge
et notre Fauvette : charité bien ordonnée
commence par soi-même.
Le journal Le Monde ailé et tout
l'élevage nous envoie un salut fort
cordial, qu'il fait suivre d'un tableau
effrayant- des Oiseaux sauvages
sacrifiés à la mode. C'est pour une
année, plus de 28.000 Oiseaux de
Paradis, près de 21.000 Oiseauxmouches et, tout à l'avenant. Il faut
espérer que l'heure viendra où la
plumasserie se contentera des
dépouilles des animaux de basse-cour,
qui déjà rendent annuellement de
grands services, si nous en croyons les
chiffres officiels. Les plumes de Poulet
atteignent le chiffre de 3 millions de
kilogrammes ; celles de Dindon 470.000
kilogrammes ; celles de Canard 840.000,
etc...
..."Le gouvernement est obligé par ses
engagements et par la loi à tenir la main à
ce que la Convention internationale soit
respectée. Le département de l'Agriculture
fait tous ses efforts pour obtenir que la loi
soit respectée."...
EXTRAIT DE LA RÉUNION DU COMITÉ DU 26 AVRIL
1912
... A propos du passage qui a trait à la
plumasserie, M. Ménégaux fait
remarquer que la lettre du ministre
indique des idées favorables à
l'important commerce de la
plumasserie, et que ces idées sont en
accord avec ce qu'il a dit et soutenu luimême ; à savoir qu'il ne fallait pas
chercher à anéantir cette industrie,
mais à l'orienter dans une nouvelle
direction.
M. le Président ajoute que la pensée de
la Ligue n'est pas de combattre à fond
les plumassiers, elle vient au contraire
de
montrer
ses
sentiments
d'indépendance en recevant parmi ses
membres les présidents des syndicats de
la plumasserie. La Ligue veut seulement
la suppression dans la mode de l'emploi
des dépouilles d'Oiseaux sauvages ; la
basse-cour, aidée de l'acclimatation,
peut et doit fournir le terrain de la
conciliation…..
Bulletin N° 2 mars 1913
EXPOSITION DE LA SOCIÉTÉ DES AVICULTEURS FRANÇAIS.
CONGRÈS DE LA PLUME ET DU POIL.
... Dans l'intéressante conférence qu'il
a faite pendant le Congrès M. Jeanning
développa les idées qui l'avaient
conduit à montrer aux éleveurs les
profits qu'ils pourraient tirer des sousproduits de leurs basses-cours s'ils
s'organisaient, d'une façon plus
rationnelle, l'exploitation et la vente.
Le commerce de la pelleterie, celui de
la plumasserie, disait M. Janning, ont
creusé de tels vides dans les rangs de
espèces sauvages que la matière
première se fait de plus en plus rare et
plus chère (1).
Ces industries doivent donc, dès
maintenant, se préoccuper d'un
matériel abondant, bon marché et de
provenance assurée : toutes ces
conditions se trouvent réunies dans les
animaux d'élevage, Lapins et cobayes
pour la fourrure, Poule, Oie, Canard,
Dindon, Paon, faisan pour la
plumasserie. Mais, jusqu'ici les éleveurs
connaissent mal les races qu'il faudrait
préférer pour en avoir le meilleur
bénéfice, ils ne savent pas présenter
leurs produits dans de bonnes
conditions commerciales. M. Janning
leur propose de s'unir pour arriver au
plus vite à un résultat meilleur ; il
appuyait
ses
paroles
d'une
démonstration pratique sur la plume
d'Oie, de Poulet, de Faisan, sur la
fourrure de Lapin, démonstration bien
convaincante puisque dans quelques
journées de l'Exposition elle amena
plusieurs centaines d'adhésions aux
groupement qui s'organise.
Le mouvement qui se dessine ainsi pour
l'emploi de la plume des Oiseaux de
basse-cour et d'élevage dans la mode
ne pouvait qu'être bien accueilli par
notre Ligue dont on connaît les idées à
cet égard. Nous avons tenu à les
affirmer à nouveau devant le Congrès
auquel nous avons présenté la
communication suivante :
(1) Le Gouvernement russe vient d'interdire la
chasse à la Zibeline
COMMUNICATION DE M. CHAPPELLIER
D ÉLÉGUÉ DE LA LIGUE FRANÇAISE
POUR LA
L'OISEAUmagazine
magazinen°
n°103
102. .33
33
L'OISEAU
PROTECTION DES OISEAUX.
Messieurs,
Après la conférence de M. Janning, si
pleine d'idées et de faits, je ne reviendrai
pas sur l'importance du rôle que
doivent jouer, dans l'industrie de la
mode, les produits de nos basses-cours
et de nos élevages. Cette question
intéresse la Ligue française pour la
protection des Oiseaux, M. Janning le
rappelait fort aimablement tout à
l'heure. En effet parmi les causes de
disparition des Oiseaux, il en est une
de toute actualité ici : c'est la poursuite
dont ces Oiseaux sont l'objet pour
fournir aux exigences de la mode.
Lorsque la mode s'est emparée d'un
Oiseau, elle le traque sans relâche et
sans merci. Les Paradisiers de la
Nouvelle-Guinée ont presque disparu
des territoires actuellement exploités, et
déjà l'on suppute le nombre de ceux qui
existent dans les retraites non encore
visitées par les chasseurs.
L'Aigrette, tuée en parure de noce, près
de ses petits que la disparition des
parents condamne à la plus affreuses
des morts, la mort par la faim, l'Aigrette
succombe chaque année en quantités
considérables. Je ne citerai qu'un chiffre
: dans le Haut-Sénégal, de 1902 à 1906,
2.000 chasseurs ont, chaque année, tué
près de 1.000.000 d'Aigrettes.
Ces morts, si nombreuses, sont une
nécessité professionnelle pour
l'industrie de la mode qui doit pouvoir
fournir par grandes quantités le
matériel qu'elle met dans le commerce.
De toute part on s'est ému, et les amis
des Oiseaux multiplient les appels en
leur faveur. Notre Ligue ne pouvait
rester indifférente ; elle intervient dans
un sens de conciliation, et je ne puis
mieux faire, pour en donner une idée
exacte que de lire un fragment des pages
qu'écrivit notre Président, M. Magaud
d'Aubusson, en tête du premier numéro
de notre bulletin :
"La sollicitude de la Ligue ne s'arrêtera pas
à la protection des Oiseaux indigènes. Sans
parler de l'entente qu'elle établira avec les
autres Ligues de défenses formées depuis
longtemps chez les grandes nations de
l'Europe, elle ira par de là les mers apporter
le secours de son influence à la sauvegarde
des espèces que la beauté de leur plumage
rend victimes des exigences barbares de la
mode et des caprices de la parure.
Nous poursuivrons cette généreuse croisade
avec toute la mesure que commande le
respect d'intérêts légitimes, mais avec toute
l'énergie qu'impose l'abolition de pratiques
détestables. Fournir à l'industrie de la
Plume la matière première qui lui est
indispensable, sans avoir à porter la
34 . L'OISEAU magazine n° 103
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dévastation dans les rangs d'espèces
exotiques dont les vêtements somptueux
excitent l'admiration et la convoitise, sera
l'une des préoccupations de la Ligue.
L'emploi des dépouilles d'Oiseaux
domestiques sacrifiés pour notre
consommation, l'élevage en captivité des
espèces au brillant plumage, les perfectionnements introduits dans les procédés de
teinture peuvent offrir un terrain de
conciliation et d'entente favorable à la
solution des problèmes. Ce qu'on fait pour
l'Autruche, aujourd'hui domestiquée, on
peut le tenter pour l'Aigrette dont la parure
d'amour a tant de prix, l'obtenir facilement
de la nombreuses et éclatante tribu des
Faisans, de bien d'autres encore. On en
aura fini alors avec ces abominables
massacres qui mettent en péril l'existence
même des espèces et offensent, à la fois,
la sensibilité humaine et les droits de la
science."
Suppression dans la mode des
dépouilles d'Oiseaux sauvages, leur
remplacement par les produits de bassecour et d'élevage, voilà donc ce que
notre Ligue demande. Et justement, par
un heureux contraste, vous avez ici, très
complète, la démonstra-tion qu'a voulu
M. Janning : d'un côté, de malheureux
Paradisiers, de mignons Colibris, des
Passereaux exotiques aux brillantes
couleurs dont les cadavres sont là,
cloués en groupes compact : c'est ce qu'il
ne faut plus, ce qui doit disparaître ;
puis , d'autre part, dans la salle, ces
plumes de Paon, de Faisan, de Dindon,
d'Oie, de Canard, de Poulet, dont notre
industrie parisienne sait et saura tirer
merveilles. Cela, c'est ce que nous
demandons, ce que nous obtiendrons
grâce aux dévoue-ments qui se font
plus nombreux chaque jour.
Nous sommes particulièrement
heureux de féliciter M. Janning, dont
l'oeuvre marquera et fera date dans
l'histoire de notre aviculture nationale ;
et de remercier la Société des aviculteurs
français, à qui nous devons de pouvoir
présenter l'une des revendications de
notre Ligue dans la solennité si réussie
de ce premier Congrès international
d'aviculture.
Bulletin N° 4 mai 1913
EXTRAIT DE LA SÉANCE DU COMITÉ DU 21 FÉVRIER
1913
... M. Chappellier a essayé de dresser
une statistique de la garniture des
chapeaux de dames et, dans les
promenades à travers la ville, il a pu
noter 4.589 chapeaux : 1.871 étaient
garnis de ruban, 215 de fourrures, 219
de fleurs et 2.254 de plumes, c'est-à-dire
que les plumes se trouvent pour près de
moitié ; le reste étant rubans, fleurs et
fourrures, et, dans cette seconde
catégorie, le ruban représente 40 p. 100,
ce qui fait les quatre cinquièmes.
En général, les chapeaux avec rubans
sont des chapeaux de deuil ou des
chapeaux de fillettes. Sur 1579 rubans,
il a été observés 283 deuils et 275 coiffes
de fillettes, ce qui, pour les rubans fait
31,53 p. 100 ou près d'un tiers.
Arrivons maintenant aux 2 .254 coiffes
garnies de plumes. Tout d'abord 958,
c'est-à-dire environ 40 p. 100, provient
d'Oiseaux d'élevage et 1.296, ou près de
60 p. 100, d'Oiseaux sauvages.
Sur les Oiseaux d'élevage, il y a bien
quelques Faisans des bois, qui ont
donné les grandes plumes de leur
queue, quelques Pintades et Paons, mais
ce qui domine, c'est l'Autruche, car, sur
958 plumes, il y en a 847 de cet animal,
sot plus de 88 p. 100.
Pour les plumes d'Oiseaux sauvages, il
a été remarqué 171 Aigrettes, en chiffres
ronds 13 p. 100, presque exclusivement
de grande Aigrette, très peu de Crosses.
Le reste est constitué par des Oiseaux
sauvages, en partie reconnaissables ; il
en a été relevé 315 douteux, c'est-à-dire
près d'un quart ; dans cette catégorie,
beaucoup pourraient bien être des
Oiseaux de basse-cour : petites ailes de
Pigeons, teintes ou blanches, plumes
diversement colorées, faux Marabout,
fausse Crosse.
Les Oiseaux entiers sont très peu
nombreux : Merles bronzés et surtout
Mouettes ; un seul appartenait au pays,
une pauvre Effraye. En résumé, sur 500
Oiseaux sauvages, y compris les
douteux, il n'y avait que 39 Oiseaux
entiers, c'est-à-dire environ 8 p. 100...
Bulletin N° 5 juin 1913
EXTRAITS DE LA SÉANCE DU COMITÉ DU 7 MARS 1913
... M. A. Chappellier, à propos de
l'enquête à laquelle il s'est livré au sujet
de l'emploi de la plume dans la mode
parisienne, dit avoir vu une imitation
d'Aigrette en crin, montée de façon à
reproduire la disposition des barbes de
la plume de l'Oiseau...
... M. le Président nous lit une lettre de
M. Ingram, sur les Paradisiers importés
dans la petite Tabago, et qui,
heureusement,
y
réussissent
parfaitement. Nous nous permettons
d'ajouter un seul mot ; il était temps.
Lisez plutôt la note publiée dans la
Quinzaine coloniale, par M. Camille
Martin :
"D'après les données officielles, la
Nouvelle-Guinée avait exporté, en 1910,
4.847 Oiseaux de Paradis. Ce chiffre est
monté en 1911, à 7.376. Dans un article
de la Kolonialzeitung, le professeur Preuss,
directeur de la Compagnie de la NouvelleGuinée, écrivait, il y a quelque temps, que
cet Oiseaux craintif, qui ne chante pas et
qui se nourrit principalement de fruits, ne
mérite aucunement d'être épargné." Il n'est
bon disait-il, qu'à faire rendre des
bénéfices aux plantations de cocotiers." La
Compagnie de la Nouvelle-Guinée
possède de grands domaines, qu'elle ne
peut elle-même exploiter faute de maind'oeuvre. Aussi cherche-t-elle à les
vendre. Les acheteurs indiqués sont
d'anciens employés de la compagnie,
que ne possèdent pas un capital
suffisant. C'est ici que se révèle l'utilité
des Oiseaux de Paradis ? "Tandis que l'un
s'en va à la chasse, son compagnon
s'occupe de la plantation." Mais
aujourd'hui, la chasse est devenue
l'affaire principale, à laquelle tout le
monde prend part, et ce sont de
véritables expéditions, aboutissant à des
massacres. Il y a quel-ques années, il
était strictement défendu d'avoir plus
d'un fusil pour un permis de chasse.
Maintenant, chaque société importante
a le droit de se servir de six fusils pour
un seul permis. Le nombre de ces armes,
employées actuellement dans la
Nouvelle-Guinée allemande à la chasse
aux Oiseaux de paradis dépasse certainement la centaine. Mais le professeur
Neuhauss fait remarquer qu'une partie
de l'argent gagné ainsi est dépensé
ensuite pour faire les frais de
représailles exercées contre les
indigènes, sous les coups desquels plus
d'un chasseur a péri. L'une de ces
victimes, Mikulicz, et ses compa-gnons
avaient livré quatre combats aux noirs.
Le meurtre d'un autre chasseur,
Richards, fut impitoyablement châtié.
Le rapport officiel relate que le grand
village Wamba fut incendié et réduit
en cendres, et que les Wambas eurent
environs quarante morts. Des
assassinats, des soulèvements et des
opérations de représailles, voilà où
conduit la liberté de chasser les Oiseaux
de paradis. L'Angleterre l'a interdite, il
y a quelques années déjà, dans ses
territoires
de
la
NouvelleGuinée. L'Allemagne se mon-trera-telle moins civilisée ? demande le
professeur Neuhausss. Depuis le 1er
janvier, est établi un droit de douane
de 20 marks par pièce au lieu de 5
marks, et on annonce que de nouvelles
mesures préservatrices seront prises...
Bulletin N° 6 juillet 1913
PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 18 AVRIL 1913
... Dans Comoedia, M. Emile Faguet est
plutôt sévère pour les femmes
emplumées. L'habitude, chère à nos
dames, dit-il, de porter un charnier sur
la tête et de placer leur visage dans le
cadre d'un cimetière, continue toujours
et est bien loin de paraître prendre fin.
Elles continuent de surcharger leurs
chapeaux de plumes d'Oiseau, de pattes
d'Oiseaux et de queues d'Oiseau.
L'article qui, il faut l'avouer, n'est pas
un chef-d'oeuvre de galanterie, est
intitulé : Les porte-plumes.
Bulletin N° 1 janvier 1914
EXTRAIT DE L'ALLOCUTION DU PRÉSIDENT LE 19
DÉCEMBRE 1913
... Enfin, la Ligue a pris part au Congrès
de la Plume et du Poil, tenu au Grand
Palais, dans les premiers jours de
janvier, par la Société des Aviculteurs
français. Notre délégué M. A.
Chappellier y a prononcé un excellent
discours, dans lequel il a exposé d'une
façon nette et lumineuse la doctrine de
la Ligue, en ce qui concerne l'emploi
des plumes d'Oiseaux pour la parure.
Elle tient tout entière dans cette formule
que je lui emprunte : suppression dans
la mode des dépouilles d'Oiseaux
sauvages, leur remplacement par des
produits de la basse-cour et de
l'élevage...
Bulletin N° 4 avril 1914
SÉANCE SOLENNELLE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE
D'ACCLIMATATION (SANS DATE) EN PRÉSENCE DE
RAYMOND POINCARÉ PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET
DE MADAME
... La séance se terminait par une
conférence de M. Edmond Haraucourt
qui avait choisi pour sujet "La Belle et
les bêtes". Ce fut une histoire de la
parure depuis les temps les plus reculés
- puisque nous débutons avec le serpent
tentateur - jusqu'à nos jours. Cette
conférence, écrite et dite avec
infiniment de charme et d'esprit, fut
écoutée par un auditoire attentif et
amusé. M. et Mme Poincaré donnèrent,
à plusieurs reprises, le signal des
applaudissements.
Nous regrettons de ne pouvoir, faute de
place, reproduire ici le texte entier de la
conférence de M. Edmond Haraucourt.
Il y plaida avec éloquence, auprès des
dames présentes, la cause des animaux
dont leur goût de la parure exige le
sacrifice ; voici quelles furent ses
conclusions :
"Les commerçants me traiteront de
poète - suprême injure ! Mais pas à mes
yeux, j'imagine, mesdames, et je suis
bien assuré si on vous le demandait,
un moment, votre pensée sur le nombre
incommensurable des meurtres
accomplis pour décorer votre chapeau,
et sur les nids traqués, sur les amours
rompus, sur tout le deuil d'un petit
monde pitoyable et joli, qui va périr
pour vous, vos chapeaux en perdraient
du coup beaucoup de plumes, mais
votre pitié prendrait des ailes !
"Il faut conclure. J'ai voulu montrer, par
cet exposé historique : que le port des
fourrures, sinon pour les rois et les
reines, s'est limité aux espèces
comestibles ou nuisibles, et que le port
des plumes, hormis chez les sauvages,
est un goût tout récent ; que la
vulgarisation du luxe et la facilité des
communications mondiales sont en
voie de provoquer le disparition
imminente de certaines espèces, et que
nous n'avons pas le droit d'y consentir ;
que vous vous faites tort, mesdames,
sans le savoir, en vous prêtant, sans y
penser, à des massacres intensifs ; que
votre clientèle est la cause unique du
mal, car les chasseur ne se risqueraient
plus aux fatigues et aux périls
d'expéditions lointaines, le jour où vos
concurrents, les Sioux amateurs de
plumes et les Lapons amateurs de
fourrures, ne les rémunéreraient plus
que d'une pipe de tabac ou d'un broc
d'huile de phoque.
"Et, finalement, je demande à votre
modestie de croire que vous ne serez pas
moins belles ; si on meurt un peu moins
pour orner vos chapeaux."
Bulletin N° 6 juin 1914
EXTRAIT DE LA SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 1913
... Il vient de se produire, aux Etats-Unis,
un fait de la plus haute importance : il
s'agit du Bill voté par le Sénat,
interdisant l'emploi, pour la parure, des
plumes d'Oiseaux sauvages. Seules
désormais celles des Autruches et des
Oiseaux de basse-cour seront
autorisées. De cette façon, les oiseaux
au plumage magni-fique, les espèces si
belles employées dans la mode seront
protégées et une nouvelle source de
revenus se trouve accrue pour les
éleveurs.
Parmi les Oiseaux visés par la loi
américaine, nous citerons les
merveilleux Paradisiers dont les
différentes espèces, souvent limitées à
un territoire de peu d'étendue, sont de
plus en plus menacées par la chasse
intensive qu'on leur fait pour leur
plumage.
Dans Ornithologische Monatsschrift, nous
lisons que les droits de douane sur
l'importation des Paradisiers ont été
relevés récemment en Nouvelle-Guinée
allemande pour essayer d'arrêter en
partie la destruction. D'autre part, un
L'OISEAU
L'OISEAU magazine
magazine n°
n° 103
102 .. 35
35
article du professeur Schillings, paru
dans le tout récent Vogelschutzkalender, de 1914, édité par la section
berlinoise du Bund für Vogelschutz ,
nous annonce que la Commission
allemande du budget vient, à
l'unanimité, de demander au
Chancelier l'interdiction complète de la
chasse aux Paradisiers en NouvelleGuinée allemande. Cette démarche a été
appuyée par le secrétaire d'Etat aux
colonies, le professeur Neuhausz, qui,
accompagné de sa femme, a
longuement exploré la NouvelleGuinée et a d'ailleurs confirmé nos
craintes à l'endroit de l'Oiseau de
Paradis.
Dans son article, le professeur Schillings
signale le nouveau Bill des Etats-Unis,
en ajoutant que l'Australie a déjà agi
de même. Il combat les affirmations
propagées par les journaux allemands
"et naturellement les journaux
français", suivant lesquels les plumes
d'Aigrette sont ramassées à la mue ; le
nombre de plumes ainsi récoltées n'est
que de 1 pour 100 ! et la belle plume
d'Aigrette n'est fournie que par des
Oiseaux tués sur leur nid, ce qui
provoque la mort des jeunes après celle
des parents.
D'après Hagenbeck, cinquante espèces
d'Oiseaux sont menacées d'extinction :
l'interdiction de chasser l'Aigrette et le
Paradisier ne doit donc être qu'une
étape vers l'interdiction générale.
Il est inexact, dit M. Schillings, que
l'interdiction d'employer les plumes des
Oiseaux sauvages enlèverait leur
gagne-pain aux ouvriers. La
préparation de la plume de basse-cour
suffirait amplement à les occuper et
aurait, en outre, l'avantage de donner
de nouveaux béné-fices aux éleveurs
de volaille.
Enfin M. Schillings demande l'interdiction de l'exportation des plumes dans
les colonies allemandes ; ceci existe
depuis longtemps dans les colonies
anglaises. La France, toujours en retard
en la matière, n'a pris encore aucune
mesure de ce genre.
Il paraît cependant que la chasse des
Aigrettes à Madagascar vient d'être
interdite pour trois ans.
Cette question de la nouvelle loi
américaine nous a valu de nombreux
articles de presse. Notre collègue M. P,.A. Pichot a consacré à la question
plusieurs articles dans le journal Le
Chenil.
La lutte a été rude aux Etats-Unis
comme en témoigne une lettre de M.
Hornady, adressée à M. Dufour et que
publie le journal Animalia.
36 . L'OISEAU magazine n° 103
102
Tous les points de vue sont envisagés
dans la presse. Pour n'en citer que deux,
nous voyons Le Radical parler
favorablement de la protection, et La
Libre Parole, dans sa chronique
mondaine, blâmer les massacres d
'Oiseaux tout en regrettant les moyens
violents employés par les Américains
contre les porteuses de plumes
défendues.
M. P,-A. Pichot nous donne des
nouvelles des Paradisiers apodes dont
Sir William Ingram a tenté
l'acclimatation à la petite Tabago. A son
dernier voyage, leur pro-priétaire a
constaté que les Oiseaux y étaient
toujours nombreux et très bien portants.
On aurait vu des jeunes dans ces
derniers temps. Les Paradisiers a-t-on
dit, ne se reproduisent que jusqu'à cinq
ou six ans ; or, la vérité est qu'ils ne
prennent leur beau plumage qu'à cet
âge, et, seul le mâle adulte, en
possession de son plumage définitif, est
complètement apte à la reproduction.
Quoique cela sorte un peu du cadre que
nous nous sommes tracé, il nous semble
utile d'attirer l'attention sur la
destruction intensive qui se fait
actuellement des animaux à fourrure.
Bien des espèces sont menacées.
M. Chappellier présente une photographie du Coq Phénix du Japon, de la
variété blanche, dont la queue dépasse
six mètres. Cette intéressante race
pourrait devenir un précieux
fournisseur de plume, et son élevage,
très facile, ne saurait être trop
encouragé...
NB Petite Tabago : île des Caraïbes
Paradisier apode : Paradisea apode
Nouvelle Guinée
Coq Phénix du Japon : espèce
domestiquée
P IERRE , A MÉDÉE P ICHOT , (1841-1921)
DIRECTEUR DE LA REVUE BRITANNIQUE
CARL, GOTTFRIED, HEINRICH HAGENBECK (18441913) ZOOLOGISTE ET DIRECTEUR DE ZOO
L A L IBRE P AROLE (1892-1924) JOURNAL
POLITIQUE ET ANTISÉMITE
Bulletin N° 7 juillet 1914
EXTRAIT DE LA SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 1913
... M. le Président annonce qu'à l'ordre
du jour de la séance figure une
"proposition de la Commission
intersyndicale pour la défense des
Industrie de la Plume pour la Mode et
la Parure", et demande si quelqu'un
veut prendre la parole sur ce sujet.
M. Mantou, délégué de la Commission
intersyndicale, dépose sur le Bureau un
projet portant constitution d'un "Comité
d'Ornithologie économique" qu'il désire
soumettre à l'assemblée. M. le Président
demande que ces messieurs veuillent
bien développer leur programme. M.
Léon Bollack, de la maison Sciama,
prend la parole et dit
"que le Comité a pour but de concilier les
besoins de l'industrie plumassière avec la
protection des oiseaux ; que cette industrie
est prête à ne plus employer les Oiseaux
appartenant à des espèces que l'on
reconnaîtrait être menacé de disparition ;
que la plumasserie, contraire-ment à ce
que croient beaucoup de personnes, au lieu
d'être une cause de destruction des
Oiseaux, est, au contraire leur meilleure
préservatrice, car la plumasserie a tout
intérêt à ne pas détruire les Oiseaux afin
de s'assurer un approvision-nement
régulier".
Il ajoute que ses confrères et lui sont
tout prêts à examiner toutes mesures
de protection que l'on voudra leur
proposer.
M. Pichot déclare qu'il ne veut pas
adhérer à ce Comité, car, dans l'article
6 de son projet la plumasserie s'engage
seulement "à ne pas employer pendant
une durée à déterminer toutes espèces
d'Oiseaux dont la diminution notable
serait scientifiquement démontrée". M.
Pichot ajoute que, pour lui, il y a deux
genres dont la diminution et même la
disparition menaçante sont constatées,
ce sont les Paradisiers et les Aigrettes. Il
demande que le Comité s'engage, dès
maintenant, à ne plus les employer. M.
Bollack répond que l'avis du commerce
de la plumasserie est tout autre ; que le
Comité devra faire une enquête sur
place pour déterminer les conditions
actuelles des Oiseaux ; cette enquête
serait faite par un naturaliste et un
délégué de la Commission intersyndicale, qui s'engage à faire tous les
frais. M. Pichot ne voit, dans cette
enquête, qu'un prétexte à reculer
indéfiniment la solution de la question
; cette enquête, dit-il, peut durer des
années, et pendant ce temps la
plumasserie continuera à tuer les
Paradisiers et les Aigrettes. M. Bollack
répond que l'enquête, rapidement
menée peut durer dix-huit mois à deux
ans. M. Pichot maintient sa manière de
voir et dit que, pour lui, la question est
tranchée quand au Paradisier tout au
moins ; que les témoignages de
voyageurs digne de foi, que toutes les
mesures prises par les pays intéressés
pour réduire ou empêcher la chasse aux
Oiseaux sont une enquête suffisante et
que, si l'on cherche à protéger les
Paradisiers, ce n'est pas seulement pour
des questions de sentiment, mais parce
que l'on se trouve en présence de faits
précis qui ont démontré l'urgence des
mesures. M. Bollack répond que tel n'est
pas le sentiment de la plumasserie et
que l'enquête lui paraît nécessaire. Pour
les Aigrettes, notamment, dit-il, le
commerce s'approvisionne maintenant
en grande partie avec des plumes
ramassées sous les nids, et il montre un
échantillon de plumes jaunies et
abimées qui peuvent provenir de mue ;
mais M. Pichot ne peut reconnaître de
la véritable "aigrette" dans ces plumes
jaunies qui doivent subir des lavages
et des manipulations nombreuses avant
de pouvoir être utilisées.
M. Chappellier demande quelle est,
dans les magasins des plumassiers, la
proportion d'Aigrettes ramassées sur la
totalité de leur provision ; aucun de
ceux qui sont présents ne peut donner
le chiffre exact.
M. Bollack ajoute que les plumassiers
demandent à faire, pour l'Aigrette et le
Paradisier, ce qui a été fait pour
l'Autruche, c'est-à-dire faire des élevages
qui remplaceraient les morts d'Oiseaux
sauvages.
M. Chappellier demande si les plumes
d'Autruche sauvages qui figuraient parmi
les chiffres fournis par la Commission
intersyndicale ne pro-viennent pas
d'Autruche tuées en Afrique. M. Rivière
répond que ce sont des Autruches tenues
en une demi-captivité dans certaines
tribus de l'Est africain.
Revenant sur cette question d'élevage,
M. Bollack exprime l'opinion que l'on
pourrait probablement prendre les
plumes des flancs des Paradisiers, seules
intéressantes pour la plumasserie, en
les recueillant sur des Oiseaux
d'élevage. Selon M. Pichot, cela semble
bien difficile à réaliser, car, jusqu'à
présent, on n'a seulement obtenu en
captivité que la ponte de deux oeufs de
ces Oiseaux ; or, d'ici à ce que l'on
obtiennent l'élevage en quantité
suffisante pour pouvoir fournir aux
besoins de la plumasserie, les derniers
Paradisiers auront disparus.
M. Brunot croit avoir trouvé un moyen
de concilier les vues des protecteurs des
Oiseaux et des plumassiers, c'est
d'accepter pour ceux-ci de ne plus tuer
d'Oiseaux sauvages pour leur
commerce tant que les espèces qu'ils
emploient ne seront pas reconnu par le
Comité comme étant domestiquées en
quantité nécessaire pour fournir une
provision suffisante à la mode.
M. Chappellier pense que la Ligue n'a
qu'à s'en tenir à ce qu'elle a indiqué dans
son programme à ses débuts (1), à savoir
la suppression des dépouilles et plumes
d'Oiseaux sauvages et leur remplacement
par des plumes de basse-cour, Paon
blanc, Dindon blanc, Poulet blanc,
Pigeon blanc …Cette manière de faire
ne peut aller contre les intérêts du
commerce de la plume, puisque celuici reconnaît employer déjà 98 p. 100 de
plumes d'Oiseaux de basse-cour, et en
lui demandant de supprimer les 2 p. 100
qui restent, on ne peut nuire également
aux ouvriers de la plumasserie, auquel
le travail est surtout fourni par la plume
de basse-cour.
M. Bollack maintient le programme de
la Commission intersyndicale et ajoute
que, du reste, lui et ses collègues ne sont
pas ici pour solliciter l'adhésion de la
Ligue, mais pour demander le concours
individuel de ses membres qui voudront
bien se joindre à eux. M. le Président
fait alors remarquer que, dans ces
conditions, les membres de la Ligue qui
donneraient leur adhésion au Comité
ne le feraient qu'à titre absolument
personnel et sans pouvoir engager leur
titre de membre de la Ligue.
M. Loyer, secrétaire général, qui a pris
place depuis quelques instants au
Bureau, verrait un moyen de concilier
les vues de la Ligue et de la Commission
syndicale ; il propose une modification
du texte déposé sur le Bureau par ces
Messieurs. Les plumassiers, dans
l'article 6 de leur projet, décideraient
de ne plus employer toutes les espèces
d'Oiseaux sauvages, tant qu'une
enquête n'aurait scientifiquement
démontré que ces espèces ne sont pas
en voie de disparition. Un échange de
vue s'engage à ce sujet et il est décidé
que trois représentants de la Ligue :
MM. Magaud d'Aubusson, Loyer et
Chappellier, se réuniront avec des
représentants de la Commission
intersyndicale et que, après avoir causé
avec eux, une réponse définitive leur
sera donnée.
(1) Voir le Règlement, par.3 de l'article 15.
Bulletin N° 12 Décembre 1919
EXTRAIT DE LA SÉANCE DU 12 MAI 1919
….Plusieurs collègues signalent que les
chapeaux garnis de plumes d'Oiseaux
sauvages sont nombreux. La frénésie
de luxe qui sévit depuis la fin de la
guerre a remis à la mode les dépouilles
d'Oiseaux rares, Aigrettes et Paradisiers
; M. Carrié a vu, à plusieurs reprises des
plumes de Frégates. Une maison de
Paris vient d'importer 15 kilogrammes
d'Aigrette : le massacre continue !
Bulletin N° 7 Juillet 1920
FLAMME D'AIGRETTE
Dans Sciences et Voyages, M. Paul
Cordelier a décrit, en deux pages qui
paraissent vécues, la chasse à l'aigrette
au Brésil équatorial.
Les places à nids sont près des
marécages, en pleine savane noyée, là
où les Hérons blancs trouvent
facilement les petits poissons
indispensables à la nourriture de leurs
jeunes.
Après avoir repéré une colonie, le
chasseur d'Aigrettes établit une hutte
d'affût ; il empale, en guise d'appelants,
des cadavres d'Aigrettes, puis se cache
pour abattre les Oiseaux qui rentrent
aux nids, volant toujours la même
route ; "la carabine accrochée à portée à
une fourche ad hoc, le fusil en main, dans
l'eau noire et putride jusqu'au ventre, le
cou, la figure et les mains enduits de pétrole
afin de pouvoir résister un peu aux piqûres
des Maringouins qui font rage autour de
lui, il attend inlassablement pendant des
heures, immobile, scrutant le ciel jusqu'à
l'éblouissement… ".
Nuit venue, le chasseur ramasse ses
victimes, les plume, garde les plus
grasses pour les faire rôtir et installe son
hamac haut dans les branches, pour
éviter les bonds du Crocodile affamé ou
la venue du gigantesque Boa d'eau.
Quand la chasse au passage ne donne
pas assez, le tueur d'Aigrettes s'attaque
à la place des nids - "au ninhal" - :
"l'Aigrette qui a des petits grandelets ne
les abandonne jamais, quel que soit le
péril qui la menace, elle revient
toujours au nid pour les nourrir et les
protéger. C'est à cause de ce
dévouement maternel incroyable
qu'en chassant dans l'intérieur du
"ninhal" beaucoup d'Aigrettes sont
tuées sur leur nid ou bien blessées à
mort, vont y tomber pour achever d'y
mourir. En ce cas, elles sont
généralement perdues pour le
chasseur, mais le dommage ne se borne
pas à cette perte, car, le plus
communément, les petits, faute
d'aliments, ne tardent pas à succomber.
"Chasser de cette façon équivaut à tuer le
Poule aux oeufs d'or. C'est une chose
qu'un chasseur prévoyant ne pratique
pas."
"Pour terminer, écrit M. Cordelier , je dirai
qu'un chasseur d'Aigrettes digne de ce
nom, s'il échappe au paludisme, à la
bilieuse, à la dysenterie, à l'enlisement, à
la noyade, aux Caïmans, aux Boa d'eau,
etc... peut arriver à Paris muni de 3 à
4 kilogrammes de plumes d'Aigrettes et en
obtenir 7 à 8.000 francs le kilogramme."
Faut-il que la mode et la femme aient
des cruautés dans leurs exigences
futiles pour traquer ainsi de beaux
Oiseaux innocents et imposer à
l'homme cette vie de risques et
L'OISEAU magazine n° 103
102 . 37
d'aventures !
"On s'apitoie souvent, s'écrie M. Cordelier,
sur le prétendu "massacre" des Aigrettes,
ces Hérons blancs, dont le magnifique
panache est si fort en faveur auprès de la
belle moitié du genre humain, mais jamais
on ne plaint le chasseur, car le public ignore
généralement combien cette chasse
demande d'endurance et représente de
réels danger pour celui qui s'y livre ".
Cette phrase ouvre l'article de M.
Cordelier, il y parle de prétendus
massacres. La suite de son récit n'estelle pas le meilleur aveu que ces
massacres existent ? L'auteur reconnaît
lui-même la mort de faim des jeunes,
après que les parents se sont fait tuer en
leur apportant la nourriture. Pour que
l'on ne puisse douter, il illustre son
passage d'une des belles photos
australiennes que les Ligeurs
connaissent bien ; elle porte ici cette
légende : "L'angoisse d'une jeune famille.
Les nouveau-nés s'inquiètent de l'absence
prolongée de la mère. Pourvu qu'elle ne
soit pas tombée sous le plomb d'un cruel
chasseur ! Toute la couvée serait
condamnée à mourir de faim..."
La flamme d'Aigrette de nos élégantes
est faite du meurtre de beaux Oiseaux
tout blancs, victimes de leur amour
pour leurs jeunes, de la mort des jeunes
privés de leurs parents et succombant
aux affres de la faim. Parfois aussi un
cadavre d'homme reste au marécage
brésilien, revanche de la savane aux
mille embûches.
M. Paul Cordelier veut s'apitoyer sur le
sort du chasseur d'Aigrettes. Pourquoi
ne pas laisser les Aigrettes à leur savane,
à leurs nids, à leurs jeunes ? La Nature
et la bonté y gagneraient en tout, la
Femme n'y perdrait rien. Elle peut se
faire aussi belle, sans ramasser sa
parure dans le meurtre et dans le sang.
A. C.
Bulletin LPO N° 8-9 Août-Septembre
1920
POUR LE PLUMAGE BILL
Peu après la décision prise par notre
Comité dans sa séance du 17 mai, nous
recevions de M. Lemon, secrétaire de la
Royal Society for the Protection of Birds, avis
que le représentant français à Londres
était
intervenu
auprès
du
Gouvernement anglais, pour présenter
les arguments du commerce français de
la plumasserie, contre le Bill qui allait
revenir devant la Chambre des
communes.
En réponse à sa démarche du commerce,
il fallait faire entendre la voix des
Oiseaux menacés et nous avons remis
aux mains de M. Queuille, Sous38 . L'OISEAU magazine n° 103
102
secrétaire d'Etat à l'Agriculture, la lettre
ci-dessous de notre Président, lettre que
M. Queuille voulut bien accepter de
transmettre à son collègue des affaires
étrangères.
Monsieur le Ministre,
"La Société royale anglaise pour la
Protection des Oiseaux de Londres
m'avise que le Gouvernement français
aurait donné à M. Paul Cambon, son
ambas-sadeur à Londres, des
instructions pour signaler au
Gouvernement anglais les difficultés
que susciterait au commerce de la
plumasserie française l'adoption de la
loi soumise en ce moment à la Chambre
des communs, tendant à la prohibition
de l'importation des plumes d'Oiseaux
sauvages.
"La Société royale anglaise pour la
Protection des Oiseaux me demande
d'intervenir auprès du Gouvernement
français pour que son ambassadeur à
Londres veuille bien faire ressortir qu'à
côté de l'opinion des plumassiers, il y a
celle d'une grande partie du public
français qui admet difficilement que
l'intérêt commercial de quelques négociants, dont plusieurs sont des étrangers
et dont quelques-uns, avant la guerre
n'ont pas craint d'oublier les égards
qu'ils devaient au Président de la
République lui-même en empêchant la
réunion d'une assemblée qu'il devait
présider, puisse primer l'intérêt général
du pays et porter atteinte aux droits de
ceux qui s'efforcent de protéger les
Oiseaux dont l'existence est si
compromise par le commerce de la
plumasserie.
"S'il est un commerce que le
gouvernement ne doit pas encourager
en ce moment, c'est celui de la mode
féminine qui contribue tant à la
continuation de la "vie chère" et qui
donne lieu dans les familles à tant de
gaspillages et d'abus. L'exportation et
l'importation des plumes d'Oiseaux
exotiques sont un commerce de luxe,
dont la suppression ne toucherait en
rien la corporation des ouvriers et
ouvrières en plumes. Pendant la guerre,
cette corporation a travaillé quand
même et nous demandons au
Gouvernement de nous aider dans la
campagne que nous avons entreprise
en faveur du commerce des plumes
d'Oiseaux domestiques, d'Oiseaux de
basse-cour, commerce qui ne serait pas
de nature à compromettre l'existence
des races d'Oiseaux exotiques et des
Oiseaux sauvages, et qui en même
temps apporterait un appoint
importants aux bénéfices des
agriculteurs et éleveurs d'Oiseaux
domestiques.
"Les Anglais, très pratiques, ont compris
que le commerce des plumes d'Oiseaux
sauvage amène la disparition de beaucoup d'espèces utiles, c'est pourquoi ils
ont soumis à la Chambre des
communes le bill contre l'importation
de ces plumes.
"Il serait regrettable que l'intervention
du Gouvernement français puisse
risquer de faire rejeter un projet de loi
inspiré par les mesures prises dans le
même sens par les américain dont on
ne saurait contester l'esprit pratique.
"Je vous serais donc très reconnaissant,
monsieur le Ministre, au nom de la
Ligue française pour la Protection des
Oiseaux, de bien vouloir prier M.
l'ambassadeur de France à Londres de
transmettre notre protestation au même
titre que celles des plumassiers.
"Veuillez agréer, monsieur le Ministre,
l'assurance de mes sentiments les plus
distingués."
Louis Ternier
Président de la L.P.O.
Membre de la commission de la Chasse
au ministère de l'Agriculture
Vice-président d'arrondissement de la
Société centrale pour la répression du
braconnage et délégué du S.H.C.F. "
A la suite de la communication de cette
lettre par M. le Sous-secrétaire d'Etat à
l'Agriculture au Président du Conseil,
ministre des Affaires étrangères, M. le
ministre de l'Agriculture a reçu de ce
dernier la lettre suivante qu'il a bien
voulu nous communiquer.
Paris, le 27 juillet 1920
"Le Président du Conseil, Ministre des
Affaires étrangères, (Alexandre
Millerand, note du scripteur)
"A Monsieur le ministre de l'Agriculture
(Direction des Eaux et Forêts)
(Forêts),
"Vous avez bien voulu me transmettre,
à la date du 29 juin dernier (n° 102 F1/
1), une lettre de M. Louis Ternier,
président de la Ligue française pour la
Protection des Oiseaux, relative au
projet de loi soumis à la Chambre de
communes tendant à la prohibition de
l'importation en Angleterre des plumes
d'Oiseaux sauvages.
"Le projet de loi actuellement en
discussion au Parlement britannique
doit être discuté "en Comité" par toute
la Chambre des communes, ce qui
empêchera le bill de passer cette année.
"Quoi qu'il en soit, les propositions dont
vous m'avez saisi allant à l'encontre des
intérêts de certains commerçants
français, je n'ai pu que les
communiquer à M. le ministre du
Commerce qui s'était fait le défenseur
de ces intérêts, en lui demandant ses
observations sut la question.
"Pour le Ministre et par autorisation
Le Ministre plénipotentiaire
Sous-directeur des relations commerciales
Signé... (illisible)"
Nous attendons les observations du
ministre du Commerce, tout en faisant
remarquer que si les propositions dont
M. le ministre de l'Agriculture a bien
voulu saisir le Président du Conseil, les
propositions transmises au Gouvernement anglais au nom du commerce
de la plumasserie vont à l'encontre des
intérêts des agriculteurs et aviculteurs
français plus nombreux que les
plumassiers, ainsi qu'à l'encontre
d'intérêts économiques intéressants
tous les Etats du monde ; qu'à ce titre
nous ne pouvons que persister dans
notre demande et prier M. le Président
du Conseil, ministre des Affaires
étrangères notre protestation au même
titre que celle des plumassiers.
Bulletin N°5- 6 Mai- Juin 1921
COMITE DE LA LIGUE
ALLOCUTION DE M. JEAN DELACOUR
... Contre l'emploi de la plume des
Oiseaux sauvages dans la parure, qui
menace d'extinction prochaine tant de
merveilleuses espèces exotiques, nous
devons, en attendant que nous
puissions envisager l'adoption d'une loi
dans notre pays, soutenir les
campagnes que mènent pour sa
prohibition les associations étrangères
analogues à la nôtre elles ont abouti
en Amérique, depuis plusieurs années,
à la suppression de l'usage de ces plumes
(1). Nous pouvons dire aussi autour de
nous quelle honte ce serait pour notre
génération d'avoir fait disparaître pour
des raisons futiles et vénales, plusieurs
des plus belles espèces animales. Le
Naturaliste ne peut supporter sans
protester, les agissements des commerçants qui menacent de priver la
terre d'une partie de son capital vivant...
Bulletin N° 6 Juin 1922
PARURES GRATUITES Par Mme A. Feuillée
A l'approche de l'automne, les éleveurs
d'Oiseaux domestiques trouvent
souvent de jolies plumes, et souvent ils
n'y prêtent aucune attention.
Cependant ces plumes peuvent être
utilisées pour la parure féminine, ainsi
que celles des Oiseaux sacrifiés à la
consommation.
En me promenant dans un parc, j'ai
ramassé quelques plumes d'un Paon en
mue - de ces plumules du dos qui
semblent un bijou inachevé - et je
pensais qu'en les groupant, on aurait
pu composer un motif d'ornement.
J'ai remarqué quelques feutres joliment
garnis de deux longues plumes de
Paon, car on commence à revenir de la
sotte prévention attachée à ce
magnifique Oiseau. Les plus grands
magasins offrent, en ce moment, des
éventails en Paon blanc de toute
beauté.
Le Faisan, la Pintade, fournissent de
ravissantes garnitures de chapeaux. Le
Cygne, le Dindon, l'Oie donnent de
beaux "couteaux". Le Canard, le Pigeon,
etc. apportent également leur tribut à
la mode. Tous sont en faveur.
Mais c'est surtout le Coq qui procure de
gentilles fantaisies à la portée de toutes.
Sans parler de ces merveilleux Coqs
japonais dont les plumes ornementales
sont d'un emploi si facile, les races
courantes présentent une extrême
variété de coloris et de genres qui
méritent de jouer un rôle décoratif.
Les plumes de nos Oiseaux de bassecour sont aussi belles et plus solides que
celles des infortunés Oiseaux sauvages
gâtées par de malencontreuses
préparations : Paradisiers teint en noir,
- Pigeon goura (tel que l'exposait une
grande modiste) teint en bleu très foncé,
diminué, défiguré, enlaidi à faire
pleurer ceux qui aiment la Nature.
Si l'on veut employer la plume dans sa
teinte naturelle, il suffit de la nettoyer.
On prépare une solution tiède de savon
à 6 % ; on y plonge les plumes pendant
quelques heures ; ensuite on renouvelle
cette opération dans un autre bain de
savon. Enfin, on les lave à grande eau.
Une fois séchées, les plumes sont
lustrées et elles peuvent être frisées ou
courbées au moyen d'un couteau de
corne polie, d'argent ou d'ivoire.
Suivant ce que l'on désire obtenir, si l'on
veut par exemple assembler de petites
plumes, on amincit la hampe en la
coupant en dessous.
S'il s'agit de plumes blanches, après
nettoyage au savon, et rinçage, on peut
les soumettre à l'action de la vapeur de
soufre. (Cette opération se ferait
naturellement dans un local ne
contenant aucun objet susceptible
d'être abîmé par la dite vapeur).
M. Chappelier m'a demandé si l'on
pouvait teindre les plumes soi-même.
Rien n'est plus facile en effet. Des plumes
de Coq Leghorn blanc, dégraissées
comme il a été dit plus haut ont été
teintées en bleu ou rose, au moyen de
boules
et
sachets
vendus
communément dans le commerce. Il
faut avoir soin d'envelopper la boule à
teindre dans un petit linge ; les sachets
donnent plutôt de meilleurs résultats.
Avant de teindre, on peut blanchir par
le soufre, ou à l'aide de sachets à
décolorer vendus dans le commerce
depuis peu.
Les plumes ne doivent pas être plongées
dans un bain trop chaud, et il est
essentiel qu'elles soient bien nettoyées.
Quand on a obtenu la teinte désirée,
on les lave et on les sèche.
La pelure d'oignon qui teint en un beau
jaune la soie et le coton, peut être
employée pour les plumes. Il suffit de
mettre les épluchures dans une légère
dissolution d'alun pendant 24 heures,
on fait bouillir la préparation, puis on
la passe. On fait tremper les plumes
dans la décoction plus ou moins
longtemps, suivant l'intensité de la
teinte à obtenir.
La cochenille employée pour teindre les
oeufs de Pâques donne toute la gamme
du plus beau carmin et offre l'avantage
d'être inoffensive.
Quand aux couleurs à base d'aniline,
elles teignent, paraît-il avec autant
d'éclats, les plumes que la laine et le
coton.
On fait dissoudre la couleur dans un
peu d'alcool, puis on étend le liquide
avec de l'eau. Les plumes sont mises
dans ce bain chaud jusqu'à ce qu'elles
soient parfaitement teintes.
D'une manière générale, il est bon
d'expérimenter sur de petites plumes
avant que de teindre des pièces
importantes.
Tout ce que nous venons d'indiquer
n'est qu'un thème sur lequel les dames
adroites sauront certainement broder,
afin de transformer les plumes de leurs
Coqs en de gracieuses parures qui ne
leur auront presque rien coûté.
En attirant l'attention sur ces
préparations qui sont à la portée de la
plus modeste ménagère, nous n'avons
pour but que de lutter contre l'emploi
des plumes d'Oiseaux sauvages dont la
Mode pourrait fort bien se passer si elle
le voulait et si les dames s'y prêtaient.
Avant de clore cette causerie sur les
plumes, rappelons qu'il est facile de
préparer soi-même les plumes pour
écrire.
Ce sont les pennes de l'aile de l'Oie que
l'on prépare pour cet usage. Si elles sont
fraîches, il faut les plonger dans un bain
de cendre ou de sable très fin et chauffé
à environ 60°. Au bout de quelques
instants, on les retire et on les frotte
avec un marceau de laine. Elles sont
alors blanches et transparentes, il ne
reste plus qu'à les tailler.
Les plumes d'Oie ont plus de valeur
quand elles sont vieilles parce qu'elles
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ont perdu toute leur graisse : ainsi, elles
sont jaunâtres. Si l'on veut donner cet
aspect à des plumes fraîches, il suffit de
les tremper dans de l'acide
chlorhydrique étendu d'eau, après leur
avoir fait subir l'action du bain de sable
chaud.
Les plumes d'Oie pour écrire sont
redevenues à la mode…Elles présentent
le triple avantages d'être légères, de
pouvoir se tailler indéfiniment et de ne
pas s'oxyder comme les plumes
métalliques.
Si l'on aime s'en servir et si l'on préfère
les transformer en porte-plumes, il est
facile de leur adapter une carcasse
ordinaire.
Enfin, n'oublions pas que, à défaut de
duvet d'Oie, le duvet de Poule peut être
utilisé pour la literie. Les plumes seront
nettoyées (par savonnage), puis
séchées. Ensuite, il faudra couper les
barbes des plumes de chaque côté et le
long de la côte. Cette côte qui donne de
la raideur, sera jetée. Les barbes seront
enfermées dans un sac de toile que l'on
frottera en tous sens, afin de les
emmêler, de les feutrer jusqu 'à ce
qu'elles constituent un duvet très doux.
N'importe quelles plumes d'Oiseau de
basse-cour, pareillement traitées,
peuvent donner le même résultat.
Sans doute, l'opération nécessite
beaucoup de temps, mais elle peut
occuper un enfant, un vieillard, un
malade, une personne qui jouit de
loisirs.
Toutes ces plumes sont ordinairement
jetées parce qu'on les croit inutilisables.
A PROPOS DE MODE
Par Mme de Gourcuff
Un grand journal a publié ce mois-ci,
en première page, deux articles,
stigmatisant avec une indignation
motivée, la fantaisie odieuse et ridicule
de la dernière mode, laquelle consiste à
orner les chapeaux d'été des femmes
d'une quantité de petits Oiseaux utiles
à l'Agriculture - et d'ailleurs protégés
par la convention internationale du 19
mars 1902 - c'est-à-dire des RougesGorges, Mésanges diverses, Roitelets
huppés, Chardonnerets etc. A ces deux
cris d'alarme, un autre grand journal
a répondu, en date du 15 février, un
article signé Rodolphe Darzens, dont
la bonne foi semble avoir été surprise
et qui oppose divers arguments
contraires auxquels je vais m'efforcer
de répondre :
1° Il ne s'agirait pas en l'espèce de vrais
Oiseaux, dont le prix serait beaucoup
trop élevé puisque l'on ne pourrait
acheter (et encore clandestinement) le
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moindre
Rouge-gorge
ou
Chardonnerets à moins de 50 ou 60
francs pièces - Ne faudrait-il pas barrer
un zéro ? Je ne crois pas qu'on
trouverait beaucoup d'amateurs
consentant à donner une telle somme
lorsqu'il est plus facile, par les grands
froids et surtout quand la neige est
abondante, d'attirer dans les pièges les
pauvres bêtes affamées !
Le nombre interlope des piégeurs
serait bien étonné, je crois,
d'apprendre la valeur marchande de
leurs captures, car le métier, malgré
tout, ne doit pas leur rapporter de si
mirifiques bénéfices !
2° Les vrais Oiseaux étant écartés pour
la raison ci-dessus (à laquelle on veut
bien ajouter le souci louable de ne pas
détruire inconsidérément nos plus
précieux auxiliaires) la fabrication des
simili-Oiseaux serait obtenue en
quantité innombrable et à très peu de
frais, à l'aide de plumes d'Oies, de
Poules, Pigeons, etc. A cela, certes, rien
à répliquer : la Ligue française de
Protection des Oiseaux ne cesse depuis
sa fondation, de prêcher la bonne
croisade en faveur de l'utilisation
rationnelle des produits de basse-cour,
afin de sauver des races entières
d'Oiseaux sauvages de la destruction
dont il n'y a que trop d'exemple. Il
paraîtrait (c'est M. Darzens qui parle)
qu'une ouvrière, en huit heures de
travail, parvient à fabriquer une
centaine de petits Oiseaux colorés
diversement, ce qui abaisserait le prix
de l'un d'eux à 0 fr. 50. Ne faudrait-il
pas déplacer la virgule ? Car, depuis la
guerre, je n'ai jamais vu aucune
fantaisie de plumes ou d'Oiseaux
quelconque à ces prix inconnus
maintenant.
De deux choses l'une : ou la bête est
réussie et alors il est matériellement
impossible, avec le coût des plumes, du
coton, du fil de fer, des colorants, de la
colle etc., de produire quoi que ce soit
au prix indiqué, ou la bête est affreuse
et personne n'en voudra.
D'ailleurs, en admettant les raisons du
plaidoyer de M.R.D., n'est-il pas
dangereux pour nos petits alliés de le
clouer, même en effigie, sur le pilori de
la mode ?
Cette vue ne donnera-t-elle pas aux
villageoises (qui maintenant sont bien
renseignés sur les fluctuations de la
mode parisienne) l'idée mauvaise de se
faire tuer par leurs galants de belles
garnitures de chapeaux ? Avec les lacets
ou filets, il n'est pas difficile de faire de
vraies hécatombes d'Oiseaux de toutes
sortes et la vulga-risation pénétrant
partout, il ne sera pas difficile non plus,
dans les longues soirées d'hiver, de
naturaliser suffisamment, à l'aide
d'alun, de chrome, etc., ces pauvres
dépouilles qui permettront aux campagnardes d'être aussi élégantes que les
Parisiennes.
Il y a, somme tout, un champ assez vaste
pour le goût si sûr de nos modistes, sans
qu'il soit besoin de copier nos petits amis
dans un but aussi futile. Ceux-ci doivent
nous être sacrés et leur image n'être
représentée que pour les faire aimer et
respecter. Il est mauvais d'habituer les
femmes à se parer avec de la cruauté
car, même si les Oiseaux sont fabriqués
en coton et plumes, elles n'en croiront
pas moins dur comme fer qu'elles
exhibent fièrement une brochette de
vrais Oiseaux. Jamais une coquette ne
s'arrêtera à l'idée de la souffrance
occasionnée par sa parure : voyez à
propos de l'Aigrette, à quel résultat
négatif on est arrivé ?... Non supprimons
absolument de nos coiffures les Rougesgorges
faux
et
les
similis
Chardonnerets. Révoltons-nous contre
l'odieuse et criminelles tyrannie du plus
aristocratique souverain qui ne connaît
jusqu'à présent aucune révolution : la
Mode, et prouvons que les femmes
peuvent être élégantes tout en restant
indépendantes, bonnes et intelligentes.
LA LOI ANGLAISE CONTRE L'EMPLOI
DE LA PLUME DES OISEAUX SAUVAGES
Ainsi que nous l'avons dit dans notre
Bulletin de Mai-Juin 1921 (Voir
allocution de M. Delacour), une loi a
été votée en Angleterre contre
l'importation des plumes d'Oiseaux
sauvages et elle est entrée en
application.
Voici quelques extraits du texte
officiel :
"Prohibition d'importation des plumes
de parures.- "L'importation des
plumages d'Oiseaux est interdite en
Grande Bretagne, depuis le 1er avril
1922 "."Sont exempt de la prohibition
d'importation mentionnée ci-dessus :
a) Autruches africaines, Canards-eiders,
et Rhoa Rothschildi ;
b) Oiseaux importés vivants ;
c) Oiseaux utilisés ordinaire-ment dans
le Royaume-Uni " pour la nourriture. "
"Le Board of Trade peut ajouter ou
supprimer le nom de n'importe quel
Oiseau sur le tableau annexé à la loi
prohibant l'importation de plumes de
parure ".
"Le Board of Trade peut accorder une
licence soumise aux conditions et aux
"règlements qu'il juge nécessaires,
autorisant l'importation des plumages
pour un musée " d'histoire naturelle ou
autre, ou dans le but de recherches
scientifiques ou pour toute autre raison
particulière".
"Dans les quatre mois qui ont suivi
l'adoption de cette loi, le Board of Trade
a nommé un comité consultatif
composé de :
a) un président indépendant ;
b) deux experts en ornithologie ;
c) Trois experts dans le commerce des
plumes ;
d) Quatre autres membres ".
NOTA. - L'expression " plumage "
désigne, dans la loi, la peau ou le
corps de l'Oiseau " recouvert de son
plumage ".
Cette citation abrégée donne une idée
de cette loi opportune qui a pour but de
supprimer l'usage de plumes d'Oiseux
sauvage dont la mode a si
immodérément usé.
Londres étant le plus grand marché de
plumes de l'Europe, nous espérons que
cette loi aura sa répercussion en France
et que nous verrons un peu moins sur
les chapeaux de ces plumages
d'Oiseaux menacés d'extermination.
Cependant il paraît que la NouvelleGuinée expédie ses produits
directement à Paris et ce serait la raison
pour laquelle nous voyons tant et tant
de coiffures féminines ornées de
Paradisiers. Aussi nous souhaitons
ardemment que la France, à l'exemple
de l'Amérique et de l'Angleterre, prenne
des mesures prohibant l'importation
des plumes d'Oiseaux sauvages.
L.P.O.
PARURES PROHIBEES
Nous avons eu la désagréable surprise
de voir de nombreux chapeaux garnis
de petits Oiseaux protégés par la Loi et
notamment de Chardonnerets.
Soit simplement naturalisés, soit
formant des motifs d'ornements
composés de têtes entourées de paires
d'ailes, les Chardonnerets deviennent
fort à la mode.
Cependant à la suite d'incidents qui se
sont produits, il y a quelques années
entre la Ligue pour la protection des
Oiseaux et le commerce de la plume,
celui-ci nous avait formellement
promis de ne pas utiliser pour la parure
des dépouilles d'Oiseaux utiles.
Il avait même édité un tableau-maxime
ainsi libellé :
COMMISSION INTERSYNDICALE POUR LA
DEFENSE DES INDUSTRIES DE LA PLUME
POUR MODES ET PARURES
N'EMPLOYER JAMAIS D'OISEAUX UTILES
à l'Agriculture française
Tableau édité par le commerce de la
Mode
Et le verso du dit tableau portait la liste
n° 1 des Oiseaux protégés par la
Convention internationale du 19 mars
1902 sur laquelle figure en toutes lettres
le Chardonneret.
Nous serions reconnaissant au
commerce de la plume et aux modistes
de s'en souvenir, et de bien vouloir tenir
compte de leur promesse.
Bulletin N° 1 Janvier 1932
ACTES DES SOCIETES AFFILIEES
Ligue Française pour la Protection des
Oiseaux
LES PLUMES ET LA MODE
Nous publions ci-après deux lettres
adressées à la Ligue P.O. par le président
de la Société d'Histoire Naturelle de Loiret-Cher et de la Société d'Aviculture de
Loir-et-Cher, à propos des plumes
employées pour la parure.
Monsieur le Secrétaire Général de la
L.P.O., Paris
Mon cher Ami,
Depuis quelque temps, on voit
reparaître des plumes sur certains
chapeaux féminins et nombres d'entre
eux sont ornés de têtes d'Oiseaux
exotiques, dont plusieurs espèces
méritent protection.
Je viens, en conséquence, vous priez,
au nom de notre Société, affiliée à la
L.P.O., de vouloir saisir cette dernière
de l'étude de la question.
Il ne s'agit pas ici d'entraver une
renaissance possible du commerce de
la plume, mais d'orienter ceux qui
tentent de la réaliser, et la mode ellemême, vers l'utilisation des plumes
d'élevage, teintes ou naturelles, et
notamment vers celles de l'Autruche,
qui paraissent reprendre quelques
faveurs.
Vous serez bien aimable de nous tenir
au courant de ce que la Ligue et la
Fédération, auront pu faire ou décider,
afin que je puisse en entretenir
utilement ma Société.
Croyez, mon cher collègue et ami, à
tous mes meilleurs sentiments.
Le Président de la Société d'Histoire
Naturelle de Loir-et-Cher
Comte Delamarre de Monchaux
Monsieur le secrétaire général de la
L.P.O. Paris
Monsieur le Secrétaire général
Notre Société se préoccupe de
l'utilisation possible des plumes
d'Oiseaux de basse-cour pour la parure,
et l'ornement des chapeaux de dames.
Ce but pratique qui concerne
l'écoulement rémunérateur des
produits de la basse-cour, nous paraît
coïncider avec les intentions
protectrices de votre Ligue, qui cherche
à faire épargner par la mode des
Oiseaux sauvages auxquels vous vous
intéressez.
Nous vous serons obligés, si vous
voulez bien nous faire connaître ce qui
pourrait nous aider, au point de vue
spécial où nous nous plaçons.
Avec nos remerciements anticipés, nous
vous prions d'agréer, Monsieur le
Secrétaire général, l'assurance de nos
dévoués sentiments.
Le Président,
Comte Delamarre de Monchaux
Le secrétaire de la Ligue a répondu à M.
Delamarre de Monchaux, d'une part,
que la question des plumes dans la
parure mérite toute notre attention et
que la Ligue demeure vigilante, prête à
intervenir si cela est nécessaire contre
l'emploi des plumes d'Oiseaux protégés
par la loi ; d'autre part que la Ligue a
toujours préconisé l'utilisation des
plumes d'Oiseaux de basse-cour pour
la mode. Notamment, ce sujet a été porté
à l'ordre du jour d'une séance de la
Ligue en 1922 (voir le bulletin de la
L.P.O., numéro de juin 1922).
SOYER PRECIS
Quelques personnes ont adressé à la
Ligue des protestations contre le port,
sur des chapeaux, de têtes et de plumes
d'Oiseaux insectivores ; mais la Ligue
n'a pu agir faute de précisions. Nous
prions nos collègues qui veulent bien
nous signaler des faits, d'accompagner
leur texte de renseignements très exact
des lieux, dates, etc., qui nous
permettront d'intervenir utilement.
Nous les assurons de notre entière
discrétion.
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