OM 103 Actu 100ans Integral
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OM 103 Actu 100ans Integral
A TIRE D'AILE VERS LE CENTENAIRE DE LA LPO La plumasserie Ce mot est tombé en désuétude, mais il a été pendant de longues années un des éléments de la lutte de la LPO contre une exploitation des plumes d'oiseaux sauvages, surtout des paradisiers et des aigrettes. La mode féminine a amené, parfois, des commentaires sévères contre les femmes portant des chapeaux ornés de plumes d'oiseaux sauvages. L'action de la LPO a contribué à la disparition de cette mode. Depuis, il y a eu la lutte contre l'utilisation des peaux de bêtes et la prise de conscience est passée par la campagne menée pour les bébés phoques. Je ne pense pas que la mode des chapeaux ou de l'habillement utilise encore des oiseaux sauvages, mais ce qui est sûr c'est qu'il y a encore de ces oiseaux qui, à travers le monde, sont décimés pour leurs plumes. Par exemple les ibis rouges dont les plumes sont utilisées pour la fabrication de fleurs artificielles. commercial bien entendu devrait joindre ses efforts à ceux de Schillings, efforts qui seront aussi les nôtres : n'exigeons pas de la Femme un sacrifice de parure, demandons-lui grâce pour le Paradisier, pour l'Aigrette, pour tous les Oiseaux sauvages livrés à leurs propres moyens de défense. La plume d'Autruche provient maintenant de plus de 900.000 de ces Oiseaux qui se reproduisent dans des fermes spéciales ; l'espèce complètement détruite à l'état libre est sauvée de la disparition par cet élevage en captivité. Les Oiseaux de basse-cour, le gibier également peuvent fournir à la plumasserie des matériaux assurés et en grande quantité ; c'est vers leur utilisation que doit tendre le commerce sans attendre qu'il soit trop tard. Partout s'élèvent des voix en faveur des Oiseaux menacés, et Schillings rappelant les 28.000 membres du Bund für Vogelschutz, auquel ont adhéré le Prince et la Princesse impériale d'Allemagne, cite la campagne de M. Roosevelt aux Etats-Unis, et l'approbation donnée en Angleterre, par la reine Alexandra. ALBERT CHAPPELLIER RECHERCHES EFFECTUÉES PAR HENRI JENN Bulletin N° 1-2 février-mars 1912 LE PARADISIER EN NOUVELLE-GUINÉE Dans la revue l'Océanie française, un article de M. G. Regelsperger sur la Nouvelle-Guinée se termine par ces mots : "Il a été tué 5.000 de ces derniers (Oiseaux de Paradis) contre 3.000 l'année précédente, et il faut craindre une destruction totale de cette magnifique espèce d'Oiseaux dans un avenir très rapproché, " LA TRAGÉDIE DE L 'OISEAU DE P ARADIS ET DE L'AIGRETTE Prof C.G. Schillings. PUBLICATION DU BUND FÜR VOGELSCHUTZ (LIGUE POUR LA PROTECTION DES OISEAUX) STUTTGART, JUILLET 1911. - EXTERMINATION D'OISEAUX POUR LA PARURE DE LA FEMME (88E PUBLICATION DU DÜRER BUND (ASSOCIATION DÜRER) NOVEMBRE 1911. Le professeur Schillings a rapporté de ses voyages en Afrique de merveilleuses photographies des grands fauves qu'il a fixé sur la plaque souvent en pleine, à la lumière artificielle (1). Ces documents accompagnés de collections qui ont enrichi les principaux Musées d'Allemagne, Schillings les a recueillis, guidé par cette pensée de vrai naturaliste : garder une image précise et durable de cette faune africaine dont les empiètements de la 32 32 .. L'OISEAU L'OISEAU magazine magazine n° n° 102 103 civilisation feront bientôt disparaître les derniers repré-sentants. Revenu en Europe Schillings n'a pas cessé de plaider leur cause ; ses récits de voyage sont un vivant appel, depuis le premier chapitre de "Avec le magnésium et la carabine" jusqu'à la conclusion de "L'enchantement de l'Elescho". Parmi les animaux que Schillings a remarqué et photographié, parmi ceux dont la destruction est poursuivie avec le plus d'acharnement, l'Aigrette, le gracieux Héron blanc, devait fixer son attention. Il revient sur elle aujourd'hui, après deux articles dans la Gazette de Cologne, articles repris par la Ligue féminine internationale pour la protection des Oiseaux (Internationaler Frauenbund für Vogelschutz. Berlin). Schillings dans un langage coloré et prenant, s'adresse à la Femme et lui montre le supplice des jeunes Aigrettes mourant de faim au nid après que le chasseur de plumes a tué leurs parents dont la dépouille n'a de valeur pour lui qu'en pleine période de reproduction. La destruction totale des Aigrettes dépasse donc de beaucoup les chiffres fournis par la vente de la plume. Si, en 1910, par exemple, il a été vendu au marché de Londres 49.000 onces (1470 kilo-grammes) de plumes représentant environ 290.700 Aigrettes adultes, il faudrait ajouter à ce nombre déjà formidable les couvées disparues, et l'on arriverait, sans exagération, à quelques 500.000 Aigrettes victimes de la mode en une seule année. Nul Oiseau n'est capable de résister à de tels massacres, et les dernières Aigrettes ne tarderaient pas à disparaître si les mesures les plus énergiques n'étaient prises pour les défendre. Schillings montre la prohibition américaine étendue maintenant à presque tous les EtatsUnis ; une loi vient d'être présentée au Parlement anglais. Par contre, l'Allemagne n'a encore rien fait dans ce sens, et Schillings cite ce passage d'un rapport officiel sur le commerce de la Nouvelle-Guinée allemande : "Ont bénéficié également de cette heureuse (!!) augmentation : Oiseaux de Paradis, 1909, 3.270 peaux d'une valeur de 65.000 mark ; 1910, 4.850 peaux d'une valeur de 152.000 mark. ( !!) " Le commerce de la plume, auquel ces destructions en masse sont nécessaires pour pouvoir "lancer" une mode, épuise peu à peu les espèces qu'on lui laisse attaquer ; il serait bientôt sa propre victime : il tue la poule aux oeufs d'or, dit Schillings. C'est pourquoi un intérêt Bulletin N° 6 juillet 1912 LE CONGRÈS DE PROTECTION DES ANIMAUX Ce congrès s'est tenu du 28 mai au 1er juin dernier, à Paris dans l'hôtel Excelsior, sous la présidence d'un membre de notre Ligue, grand protecteur des petits Oiseaux, M. Beauquier*, député du Doubs. ... Parlant de l'emploi des plumes dans la mode, Mlle des Varennes, à qui une documentation plus précise a fait abandonner ses préventions premières, préconise aujourd'hui la plume d'Autruche et, y joignant les dépouilles des Oiseaux de basse-cour (1), constate, avec la Ligue, que le commerce de la plumasserie ne se trouve nullement menacé, si l'on cherche à lui retirer les Oiseaux sauvages. Les principaux représentant de ce commerce, présent à la discussion, parurent d'accord avec le Congrès sur la question de principe. L'un d'eux, décrivant l'importance mondiale de la plumasserie parisienne, insista sur la nécessité qu'il y avait pour elle de reproduire un même modèle à un très grand nombre d'exemplaire ; ceci revient à dire qu'il lui faut abattre un très grand nombre d'Oiseaux d'une même espèce. La conclusion logique est celle-ci : plus d'Oiseaux sauvages dans la mode, quels qu'ils soient. Avec la dépouille des Oiseaux élevés en captivité, la plumasserie peut vivre et prospérer ; qu'elle entre résolument dans cette voie et nous serions les premiers à l'encourager et à susciter de nouveaux matériaux... (1) Ceci a été dit dès 1909, par M. Debreuil, dans le Bulletin de la Société d'Acclimatation. CHARLES BEAUQUIER (1.12.1833 - 12.8.1916), DÉPUTÉ DU DOUBS ; LE 21 AVRIL 1906 IL FAIT V O T E R LA 1 E R L O I D E P R O T E C T I O N D E L 'E NVIRONNEMENT APPELÉE LOI B EAUQUIER . FONDATEUR DE LA SOCIÉTÉ POUR LA PROTECTION DES PAYSAGES ET DE L'ESTHÉTIQUE DE LA FRANCE. Bulletin N° 12 janvier 1913 EXTRAIT DE LA SÉANCE DU COMITÉ DU 22 MARS1912 ... il exprime le désir de voir la Ligue assurer tout d'abord la protection des Oiseaux indigènes, car, s'il est regrettable d'assister à la destruction d'animaux appartenant à des faunes étrangères, il le serait bien d'avantage de voir disparaître notre Rouge-gorge et notre Fauvette : charité bien ordonnée commence par soi-même. Le journal Le Monde ailé et tout l'élevage nous envoie un salut fort cordial, qu'il fait suivre d'un tableau effrayant- des Oiseaux sauvages sacrifiés à la mode. C'est pour une année, plus de 28.000 Oiseaux de Paradis, près de 21.000 Oiseauxmouches et, tout à l'avenant. Il faut espérer que l'heure viendra où la plumasserie se contentera des dépouilles des animaux de basse-cour, qui déjà rendent annuellement de grands services, si nous en croyons les chiffres officiels. Les plumes de Poulet atteignent le chiffre de 3 millions de kilogrammes ; celles de Dindon 470.000 kilogrammes ; celles de Canard 840.000, etc... ..."Le gouvernement est obligé par ses engagements et par la loi à tenir la main à ce que la Convention internationale soit respectée. Le département de l'Agriculture fait tous ses efforts pour obtenir que la loi soit respectée."... EXTRAIT DE LA RÉUNION DU COMITÉ DU 26 AVRIL 1912 ... A propos du passage qui a trait à la plumasserie, M. Ménégaux fait remarquer que la lettre du ministre indique des idées favorables à l'important commerce de la plumasserie, et que ces idées sont en accord avec ce qu'il a dit et soutenu luimême ; à savoir qu'il ne fallait pas chercher à anéantir cette industrie, mais à l'orienter dans une nouvelle direction. M. le Président ajoute que la pensée de la Ligue n'est pas de combattre à fond les plumassiers, elle vient au contraire de montrer ses sentiments d'indépendance en recevant parmi ses membres les présidents des syndicats de la plumasserie. La Ligue veut seulement la suppression dans la mode de l'emploi des dépouilles d'Oiseaux sauvages ; la basse-cour, aidée de l'acclimatation, peut et doit fournir le terrain de la conciliation….. Bulletin N° 2 mars 1913 EXPOSITION DE LA SOCIÉTÉ DES AVICULTEURS FRANÇAIS. CONGRÈS DE LA PLUME ET DU POIL. ... Dans l'intéressante conférence qu'il a faite pendant le Congrès M. Jeanning développa les idées qui l'avaient conduit à montrer aux éleveurs les profits qu'ils pourraient tirer des sousproduits de leurs basses-cours s'ils s'organisaient, d'une façon plus rationnelle, l'exploitation et la vente. Le commerce de la pelleterie, celui de la plumasserie, disait M. Janning, ont creusé de tels vides dans les rangs de espèces sauvages que la matière première se fait de plus en plus rare et plus chère (1). Ces industries doivent donc, dès maintenant, se préoccuper d'un matériel abondant, bon marché et de provenance assurée : toutes ces conditions se trouvent réunies dans les animaux d'élevage, Lapins et cobayes pour la fourrure, Poule, Oie, Canard, Dindon, Paon, faisan pour la plumasserie. Mais, jusqu'ici les éleveurs connaissent mal les races qu'il faudrait préférer pour en avoir le meilleur bénéfice, ils ne savent pas présenter leurs produits dans de bonnes conditions commerciales. M. Janning leur propose de s'unir pour arriver au plus vite à un résultat meilleur ; il appuyait ses paroles d'une démonstration pratique sur la plume d'Oie, de Poulet, de Faisan, sur la fourrure de Lapin, démonstration bien convaincante puisque dans quelques journées de l'Exposition elle amena plusieurs centaines d'adhésions aux groupement qui s'organise. Le mouvement qui se dessine ainsi pour l'emploi de la plume des Oiseaux de basse-cour et d'élevage dans la mode ne pouvait qu'être bien accueilli par notre Ligue dont on connaît les idées à cet égard. Nous avons tenu à les affirmer à nouveau devant le Congrès auquel nous avons présenté la communication suivante : (1) Le Gouvernement russe vient d'interdire la chasse à la Zibeline COMMUNICATION DE M. CHAPPELLIER D ÉLÉGUÉ DE LA LIGUE FRANÇAISE POUR LA L'OISEAUmagazine magazinen° n°103 102. .33 33 L'OISEAU PROTECTION DES OISEAUX. Messieurs, Après la conférence de M. Janning, si pleine d'idées et de faits, je ne reviendrai pas sur l'importance du rôle que doivent jouer, dans l'industrie de la mode, les produits de nos basses-cours et de nos élevages. Cette question intéresse la Ligue française pour la protection des Oiseaux, M. Janning le rappelait fort aimablement tout à l'heure. En effet parmi les causes de disparition des Oiseaux, il en est une de toute actualité ici : c'est la poursuite dont ces Oiseaux sont l'objet pour fournir aux exigences de la mode. Lorsque la mode s'est emparée d'un Oiseau, elle le traque sans relâche et sans merci. Les Paradisiers de la Nouvelle-Guinée ont presque disparu des territoires actuellement exploités, et déjà l'on suppute le nombre de ceux qui existent dans les retraites non encore visitées par les chasseurs. L'Aigrette, tuée en parure de noce, près de ses petits que la disparition des parents condamne à la plus affreuses des morts, la mort par la faim, l'Aigrette succombe chaque année en quantités considérables. Je ne citerai qu'un chiffre : dans le Haut-Sénégal, de 1902 à 1906, 2.000 chasseurs ont, chaque année, tué près de 1.000.000 d'Aigrettes. Ces morts, si nombreuses, sont une nécessité professionnelle pour l'industrie de la mode qui doit pouvoir fournir par grandes quantités le matériel qu'elle met dans le commerce. De toute part on s'est ému, et les amis des Oiseaux multiplient les appels en leur faveur. Notre Ligue ne pouvait rester indifférente ; elle intervient dans un sens de conciliation, et je ne puis mieux faire, pour en donner une idée exacte que de lire un fragment des pages qu'écrivit notre Président, M. Magaud d'Aubusson, en tête du premier numéro de notre bulletin : "La sollicitude de la Ligue ne s'arrêtera pas à la protection des Oiseaux indigènes. Sans parler de l'entente qu'elle établira avec les autres Ligues de défenses formées depuis longtemps chez les grandes nations de l'Europe, elle ira par de là les mers apporter le secours de son influence à la sauvegarde des espèces que la beauté de leur plumage rend victimes des exigences barbares de la mode et des caprices de la parure. Nous poursuivrons cette généreuse croisade avec toute la mesure que commande le respect d'intérêts légitimes, mais avec toute l'énergie qu'impose l'abolition de pratiques détestables. Fournir à l'industrie de la Plume la matière première qui lui est indispensable, sans avoir à porter la 34 . L'OISEAU magazine n° 103 102 dévastation dans les rangs d'espèces exotiques dont les vêtements somptueux excitent l'admiration et la convoitise, sera l'une des préoccupations de la Ligue. L'emploi des dépouilles d'Oiseaux domestiques sacrifiés pour notre consommation, l'élevage en captivité des espèces au brillant plumage, les perfectionnements introduits dans les procédés de teinture peuvent offrir un terrain de conciliation et d'entente favorable à la solution des problèmes. Ce qu'on fait pour l'Autruche, aujourd'hui domestiquée, on peut le tenter pour l'Aigrette dont la parure d'amour a tant de prix, l'obtenir facilement de la nombreuses et éclatante tribu des Faisans, de bien d'autres encore. On en aura fini alors avec ces abominables massacres qui mettent en péril l'existence même des espèces et offensent, à la fois, la sensibilité humaine et les droits de la science." Suppression dans la mode des dépouilles d'Oiseaux sauvages, leur remplacement par les produits de bassecour et d'élevage, voilà donc ce que notre Ligue demande. Et justement, par un heureux contraste, vous avez ici, très complète, la démonstra-tion qu'a voulu M. Janning : d'un côté, de malheureux Paradisiers, de mignons Colibris, des Passereaux exotiques aux brillantes couleurs dont les cadavres sont là, cloués en groupes compact : c'est ce qu'il ne faut plus, ce qui doit disparaître ; puis , d'autre part, dans la salle, ces plumes de Paon, de Faisan, de Dindon, d'Oie, de Canard, de Poulet, dont notre industrie parisienne sait et saura tirer merveilles. Cela, c'est ce que nous demandons, ce que nous obtiendrons grâce aux dévoue-ments qui se font plus nombreux chaque jour. Nous sommes particulièrement heureux de féliciter M. Janning, dont l'oeuvre marquera et fera date dans l'histoire de notre aviculture nationale ; et de remercier la Société des aviculteurs français, à qui nous devons de pouvoir présenter l'une des revendications de notre Ligue dans la solennité si réussie de ce premier Congrès international d'aviculture. Bulletin N° 4 mai 1913 EXTRAIT DE LA SÉANCE DU COMITÉ DU 21 FÉVRIER 1913 ... M. Chappellier a essayé de dresser une statistique de la garniture des chapeaux de dames et, dans les promenades à travers la ville, il a pu noter 4.589 chapeaux : 1.871 étaient garnis de ruban, 215 de fourrures, 219 de fleurs et 2.254 de plumes, c'est-à-dire que les plumes se trouvent pour près de moitié ; le reste étant rubans, fleurs et fourrures, et, dans cette seconde catégorie, le ruban représente 40 p. 100, ce qui fait les quatre cinquièmes. En général, les chapeaux avec rubans sont des chapeaux de deuil ou des chapeaux de fillettes. Sur 1579 rubans, il a été observés 283 deuils et 275 coiffes de fillettes, ce qui, pour les rubans fait 31,53 p. 100 ou près d'un tiers. Arrivons maintenant aux 2 .254 coiffes garnies de plumes. Tout d'abord 958, c'est-à-dire environ 40 p. 100, provient d'Oiseaux d'élevage et 1.296, ou près de 60 p. 100, d'Oiseaux sauvages. Sur les Oiseaux d'élevage, il y a bien quelques Faisans des bois, qui ont donné les grandes plumes de leur queue, quelques Pintades et Paons, mais ce qui domine, c'est l'Autruche, car, sur 958 plumes, il y en a 847 de cet animal, sot plus de 88 p. 100. Pour les plumes d'Oiseaux sauvages, il a été remarqué 171 Aigrettes, en chiffres ronds 13 p. 100, presque exclusivement de grande Aigrette, très peu de Crosses. Le reste est constitué par des Oiseaux sauvages, en partie reconnaissables ; il en a été relevé 315 douteux, c'est-à-dire près d'un quart ; dans cette catégorie, beaucoup pourraient bien être des Oiseaux de basse-cour : petites ailes de Pigeons, teintes ou blanches, plumes diversement colorées, faux Marabout, fausse Crosse. Les Oiseaux entiers sont très peu nombreux : Merles bronzés et surtout Mouettes ; un seul appartenait au pays, une pauvre Effraye. En résumé, sur 500 Oiseaux sauvages, y compris les douteux, il n'y avait que 39 Oiseaux entiers, c'est-à-dire environ 8 p. 100... Bulletin N° 5 juin 1913 EXTRAITS DE LA SÉANCE DU COMITÉ DU 7 MARS 1913 ... M. A. Chappellier, à propos de l'enquête à laquelle il s'est livré au sujet de l'emploi de la plume dans la mode parisienne, dit avoir vu une imitation d'Aigrette en crin, montée de façon à reproduire la disposition des barbes de la plume de l'Oiseau... ... M. le Président nous lit une lettre de M. Ingram, sur les Paradisiers importés dans la petite Tabago, et qui, heureusement, y réussissent parfaitement. Nous nous permettons d'ajouter un seul mot ; il était temps. Lisez plutôt la note publiée dans la Quinzaine coloniale, par M. Camille Martin : "D'après les données officielles, la Nouvelle-Guinée avait exporté, en 1910, 4.847 Oiseaux de Paradis. Ce chiffre est monté en 1911, à 7.376. Dans un article de la Kolonialzeitung, le professeur Preuss, directeur de la Compagnie de la NouvelleGuinée, écrivait, il y a quelque temps, que cet Oiseaux craintif, qui ne chante pas et qui se nourrit principalement de fruits, ne mérite aucunement d'être épargné." Il n'est bon disait-il, qu'à faire rendre des bénéfices aux plantations de cocotiers." La Compagnie de la Nouvelle-Guinée possède de grands domaines, qu'elle ne peut elle-même exploiter faute de maind'oeuvre. Aussi cherche-t-elle à les vendre. Les acheteurs indiqués sont d'anciens employés de la compagnie, que ne possèdent pas un capital suffisant. C'est ici que se révèle l'utilité des Oiseaux de Paradis ? "Tandis que l'un s'en va à la chasse, son compagnon s'occupe de la plantation." Mais aujourd'hui, la chasse est devenue l'affaire principale, à laquelle tout le monde prend part, et ce sont de véritables expéditions, aboutissant à des massacres. Il y a quel-ques années, il était strictement défendu d'avoir plus d'un fusil pour un permis de chasse. Maintenant, chaque société importante a le droit de se servir de six fusils pour un seul permis. Le nombre de ces armes, employées actuellement dans la Nouvelle-Guinée allemande à la chasse aux Oiseaux de paradis dépasse certainement la centaine. Mais le professeur Neuhauss fait remarquer qu'une partie de l'argent gagné ainsi est dépensé ensuite pour faire les frais de représailles exercées contre les indigènes, sous les coups desquels plus d'un chasseur a péri. L'une de ces victimes, Mikulicz, et ses compa-gnons avaient livré quatre combats aux noirs. Le meurtre d'un autre chasseur, Richards, fut impitoyablement châtié. Le rapport officiel relate que le grand village Wamba fut incendié et réduit en cendres, et que les Wambas eurent environs quarante morts. Des assassinats, des soulèvements et des opérations de représailles, voilà où conduit la liberté de chasser les Oiseaux de paradis. L'Angleterre l'a interdite, il y a quelques années déjà, dans ses territoires de la NouvelleGuinée. L'Allemagne se mon-trera-telle moins civilisée ? demande le professeur Neuhausss. Depuis le 1er janvier, est établi un droit de douane de 20 marks par pièce au lieu de 5 marks, et on annonce que de nouvelles mesures préservatrices seront prises... Bulletin N° 6 juillet 1913 PROCÈS-VERBAL DE LA SÉANCE DU 18 AVRIL 1913 ... Dans Comoedia, M. Emile Faguet est plutôt sévère pour les femmes emplumées. L'habitude, chère à nos dames, dit-il, de porter un charnier sur la tête et de placer leur visage dans le cadre d'un cimetière, continue toujours et est bien loin de paraître prendre fin. Elles continuent de surcharger leurs chapeaux de plumes d'Oiseau, de pattes d'Oiseaux et de queues d'Oiseau. L'article qui, il faut l'avouer, n'est pas un chef-d'oeuvre de galanterie, est intitulé : Les porte-plumes. Bulletin N° 1 janvier 1914 EXTRAIT DE L'ALLOCUTION DU PRÉSIDENT LE 19 DÉCEMBRE 1913 ... Enfin, la Ligue a pris part au Congrès de la Plume et du Poil, tenu au Grand Palais, dans les premiers jours de janvier, par la Société des Aviculteurs français. Notre délégué M. A. Chappellier y a prononcé un excellent discours, dans lequel il a exposé d'une façon nette et lumineuse la doctrine de la Ligue, en ce qui concerne l'emploi des plumes d'Oiseaux pour la parure. Elle tient tout entière dans cette formule que je lui emprunte : suppression dans la mode des dépouilles d'Oiseaux sauvages, leur remplacement par des produits de la basse-cour et de l'élevage... Bulletin N° 4 avril 1914 SÉANCE SOLENNELLE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION (SANS DATE) EN PRÉSENCE DE RAYMOND POINCARÉ PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET DE MADAME ... La séance se terminait par une conférence de M. Edmond Haraucourt qui avait choisi pour sujet "La Belle et les bêtes". Ce fut une histoire de la parure depuis les temps les plus reculés - puisque nous débutons avec le serpent tentateur - jusqu'à nos jours. Cette conférence, écrite et dite avec infiniment de charme et d'esprit, fut écoutée par un auditoire attentif et amusé. M. et Mme Poincaré donnèrent, à plusieurs reprises, le signal des applaudissements. Nous regrettons de ne pouvoir, faute de place, reproduire ici le texte entier de la conférence de M. Edmond Haraucourt. Il y plaida avec éloquence, auprès des dames présentes, la cause des animaux dont leur goût de la parure exige le sacrifice ; voici quelles furent ses conclusions : "Les commerçants me traiteront de poète - suprême injure ! Mais pas à mes yeux, j'imagine, mesdames, et je suis bien assuré si on vous le demandait, un moment, votre pensée sur le nombre incommensurable des meurtres accomplis pour décorer votre chapeau, et sur les nids traqués, sur les amours rompus, sur tout le deuil d'un petit monde pitoyable et joli, qui va périr pour vous, vos chapeaux en perdraient du coup beaucoup de plumes, mais votre pitié prendrait des ailes ! "Il faut conclure. J'ai voulu montrer, par cet exposé historique : que le port des fourrures, sinon pour les rois et les reines, s'est limité aux espèces comestibles ou nuisibles, et que le port des plumes, hormis chez les sauvages, est un goût tout récent ; que la vulgarisation du luxe et la facilité des communications mondiales sont en voie de provoquer le disparition imminente de certaines espèces, et que nous n'avons pas le droit d'y consentir ; que vous vous faites tort, mesdames, sans le savoir, en vous prêtant, sans y penser, à des massacres intensifs ; que votre clientèle est la cause unique du mal, car les chasseur ne se risqueraient plus aux fatigues et aux périls d'expéditions lointaines, le jour où vos concurrents, les Sioux amateurs de plumes et les Lapons amateurs de fourrures, ne les rémunéreraient plus que d'une pipe de tabac ou d'un broc d'huile de phoque. "Et, finalement, je demande à votre modestie de croire que vous ne serez pas moins belles ; si on meurt un peu moins pour orner vos chapeaux." Bulletin N° 6 juin 1914 EXTRAIT DE LA SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 1913 ... Il vient de se produire, aux Etats-Unis, un fait de la plus haute importance : il s'agit du Bill voté par le Sénat, interdisant l'emploi, pour la parure, des plumes d'Oiseaux sauvages. Seules désormais celles des Autruches et des Oiseaux de basse-cour seront autorisées. De cette façon, les oiseaux au plumage magni-fique, les espèces si belles employées dans la mode seront protégées et une nouvelle source de revenus se trouve accrue pour les éleveurs. Parmi les Oiseaux visés par la loi américaine, nous citerons les merveilleux Paradisiers dont les différentes espèces, souvent limitées à un territoire de peu d'étendue, sont de plus en plus menacées par la chasse intensive qu'on leur fait pour leur plumage. Dans Ornithologische Monatsschrift, nous lisons que les droits de douane sur l'importation des Paradisiers ont été relevés récemment en Nouvelle-Guinée allemande pour essayer d'arrêter en partie la destruction. D'autre part, un L'OISEAU L'OISEAU magazine magazine n° n° 103 102 .. 35 35 article du professeur Schillings, paru dans le tout récent Vogelschutzkalender, de 1914, édité par la section berlinoise du Bund für Vogelschutz , nous annonce que la Commission allemande du budget vient, à l'unanimité, de demander au Chancelier l'interdiction complète de la chasse aux Paradisiers en NouvelleGuinée allemande. Cette démarche a été appuyée par le secrétaire d'Etat aux colonies, le professeur Neuhausz, qui, accompagné de sa femme, a longuement exploré la NouvelleGuinée et a d'ailleurs confirmé nos craintes à l'endroit de l'Oiseau de Paradis. Dans son article, le professeur Schillings signale le nouveau Bill des Etats-Unis, en ajoutant que l'Australie a déjà agi de même. Il combat les affirmations propagées par les journaux allemands "et naturellement les journaux français", suivant lesquels les plumes d'Aigrette sont ramassées à la mue ; le nombre de plumes ainsi récoltées n'est que de 1 pour 100 ! et la belle plume d'Aigrette n'est fournie que par des Oiseaux tués sur leur nid, ce qui provoque la mort des jeunes après celle des parents. D'après Hagenbeck, cinquante espèces d'Oiseaux sont menacées d'extinction : l'interdiction de chasser l'Aigrette et le Paradisier ne doit donc être qu'une étape vers l'interdiction générale. Il est inexact, dit M. Schillings, que l'interdiction d'employer les plumes des Oiseaux sauvages enlèverait leur gagne-pain aux ouvriers. La préparation de la plume de basse-cour suffirait amplement à les occuper et aurait, en outre, l'avantage de donner de nouveaux béné-fices aux éleveurs de volaille. Enfin M. Schillings demande l'interdiction de l'exportation des plumes dans les colonies allemandes ; ceci existe depuis longtemps dans les colonies anglaises. La France, toujours en retard en la matière, n'a pris encore aucune mesure de ce genre. Il paraît cependant que la chasse des Aigrettes à Madagascar vient d'être interdite pour trois ans. Cette question de la nouvelle loi américaine nous a valu de nombreux articles de presse. Notre collègue M. P,.A. Pichot a consacré à la question plusieurs articles dans le journal Le Chenil. La lutte a été rude aux Etats-Unis comme en témoigne une lettre de M. Hornady, adressée à M. Dufour et que publie le journal Animalia. 36 . L'OISEAU magazine n° 103 102 Tous les points de vue sont envisagés dans la presse. Pour n'en citer que deux, nous voyons Le Radical parler favorablement de la protection, et La Libre Parole, dans sa chronique mondaine, blâmer les massacres d 'Oiseaux tout en regrettant les moyens violents employés par les Américains contre les porteuses de plumes défendues. M. P,-A. Pichot nous donne des nouvelles des Paradisiers apodes dont Sir William Ingram a tenté l'acclimatation à la petite Tabago. A son dernier voyage, leur pro-priétaire a constaté que les Oiseaux y étaient toujours nombreux et très bien portants. On aurait vu des jeunes dans ces derniers temps. Les Paradisiers a-t-on dit, ne se reproduisent que jusqu'à cinq ou six ans ; or, la vérité est qu'ils ne prennent leur beau plumage qu'à cet âge, et, seul le mâle adulte, en possession de son plumage définitif, est complètement apte à la reproduction. Quoique cela sorte un peu du cadre que nous nous sommes tracé, il nous semble utile d'attirer l'attention sur la destruction intensive qui se fait actuellement des animaux à fourrure. Bien des espèces sont menacées. M. Chappellier présente une photographie du Coq Phénix du Japon, de la variété blanche, dont la queue dépasse six mètres. Cette intéressante race pourrait devenir un précieux fournisseur de plume, et son élevage, très facile, ne saurait être trop encouragé... NB Petite Tabago : île des Caraïbes Paradisier apode : Paradisea apode Nouvelle Guinée Coq Phénix du Japon : espèce domestiquée P IERRE , A MÉDÉE P ICHOT , (1841-1921) DIRECTEUR DE LA REVUE BRITANNIQUE CARL, GOTTFRIED, HEINRICH HAGENBECK (18441913) ZOOLOGISTE ET DIRECTEUR DE ZOO L A L IBRE P AROLE (1892-1924) JOURNAL POLITIQUE ET ANTISÉMITE Bulletin N° 7 juillet 1914 EXTRAIT DE LA SÉANCE DU 21 DÉCEMBRE 1913 ... M. le Président annonce qu'à l'ordre du jour de la séance figure une "proposition de la Commission intersyndicale pour la défense des Industrie de la Plume pour la Mode et la Parure", et demande si quelqu'un veut prendre la parole sur ce sujet. M. Mantou, délégué de la Commission intersyndicale, dépose sur le Bureau un projet portant constitution d'un "Comité d'Ornithologie économique" qu'il désire soumettre à l'assemblée. M. le Président demande que ces messieurs veuillent bien développer leur programme. M. Léon Bollack, de la maison Sciama, prend la parole et dit "que le Comité a pour but de concilier les besoins de l'industrie plumassière avec la protection des oiseaux ; que cette industrie est prête à ne plus employer les Oiseaux appartenant à des espèces que l'on reconnaîtrait être menacé de disparition ; que la plumasserie, contraire-ment à ce que croient beaucoup de personnes, au lieu d'être une cause de destruction des Oiseaux, est, au contraire leur meilleure préservatrice, car la plumasserie a tout intérêt à ne pas détruire les Oiseaux afin de s'assurer un approvision-nement régulier". Il ajoute que ses confrères et lui sont tout prêts à examiner toutes mesures de protection que l'on voudra leur proposer. M. Pichot déclare qu'il ne veut pas adhérer à ce Comité, car, dans l'article 6 de son projet la plumasserie s'engage seulement "à ne pas employer pendant une durée à déterminer toutes espèces d'Oiseaux dont la diminution notable serait scientifiquement démontrée". M. Pichot ajoute que, pour lui, il y a deux genres dont la diminution et même la disparition menaçante sont constatées, ce sont les Paradisiers et les Aigrettes. Il demande que le Comité s'engage, dès maintenant, à ne plus les employer. M. Bollack répond que l'avis du commerce de la plumasserie est tout autre ; que le Comité devra faire une enquête sur place pour déterminer les conditions actuelles des Oiseaux ; cette enquête serait faite par un naturaliste et un délégué de la Commission intersyndicale, qui s'engage à faire tous les frais. M. Pichot ne voit, dans cette enquête, qu'un prétexte à reculer indéfiniment la solution de la question ; cette enquête, dit-il, peut durer des années, et pendant ce temps la plumasserie continuera à tuer les Paradisiers et les Aigrettes. M. Bollack répond que l'enquête, rapidement menée peut durer dix-huit mois à deux ans. M. Pichot maintient sa manière de voir et dit que, pour lui, la question est tranchée quand au Paradisier tout au moins ; que les témoignages de voyageurs digne de foi, que toutes les mesures prises par les pays intéressés pour réduire ou empêcher la chasse aux Oiseaux sont une enquête suffisante et que, si l'on cherche à protéger les Paradisiers, ce n'est pas seulement pour des questions de sentiment, mais parce que l'on se trouve en présence de faits précis qui ont démontré l'urgence des mesures. M. Bollack répond que tel n'est pas le sentiment de la plumasserie et que l'enquête lui paraît nécessaire. Pour les Aigrettes, notamment, dit-il, le commerce s'approvisionne maintenant en grande partie avec des plumes ramassées sous les nids, et il montre un échantillon de plumes jaunies et abimées qui peuvent provenir de mue ; mais M. Pichot ne peut reconnaître de la véritable "aigrette" dans ces plumes jaunies qui doivent subir des lavages et des manipulations nombreuses avant de pouvoir être utilisées. M. Chappellier demande quelle est, dans les magasins des plumassiers, la proportion d'Aigrettes ramassées sur la totalité de leur provision ; aucun de ceux qui sont présents ne peut donner le chiffre exact. M. Bollack ajoute que les plumassiers demandent à faire, pour l'Aigrette et le Paradisier, ce qui a été fait pour l'Autruche, c'est-à-dire faire des élevages qui remplaceraient les morts d'Oiseaux sauvages. M. Chappellier demande si les plumes d'Autruche sauvages qui figuraient parmi les chiffres fournis par la Commission intersyndicale ne pro-viennent pas d'Autruche tuées en Afrique. M. Rivière répond que ce sont des Autruches tenues en une demi-captivité dans certaines tribus de l'Est africain. Revenant sur cette question d'élevage, M. Bollack exprime l'opinion que l'on pourrait probablement prendre les plumes des flancs des Paradisiers, seules intéressantes pour la plumasserie, en les recueillant sur des Oiseaux d'élevage. Selon M. Pichot, cela semble bien difficile à réaliser, car, jusqu'à présent, on n'a seulement obtenu en captivité que la ponte de deux oeufs de ces Oiseaux ; or, d'ici à ce que l'on obtiennent l'élevage en quantité suffisante pour pouvoir fournir aux besoins de la plumasserie, les derniers Paradisiers auront disparus. M. Brunot croit avoir trouvé un moyen de concilier les vues des protecteurs des Oiseaux et des plumassiers, c'est d'accepter pour ceux-ci de ne plus tuer d'Oiseaux sauvages pour leur commerce tant que les espèces qu'ils emploient ne seront pas reconnu par le Comité comme étant domestiquées en quantité nécessaire pour fournir une provision suffisante à la mode. M. Chappellier pense que la Ligue n'a qu'à s'en tenir à ce qu'elle a indiqué dans son programme à ses débuts (1), à savoir la suppression des dépouilles et plumes d'Oiseaux sauvages et leur remplacement par des plumes de basse-cour, Paon blanc, Dindon blanc, Poulet blanc, Pigeon blanc …Cette manière de faire ne peut aller contre les intérêts du commerce de la plume, puisque celuici reconnaît employer déjà 98 p. 100 de plumes d'Oiseaux de basse-cour, et en lui demandant de supprimer les 2 p. 100 qui restent, on ne peut nuire également aux ouvriers de la plumasserie, auquel le travail est surtout fourni par la plume de basse-cour. M. Bollack maintient le programme de la Commission intersyndicale et ajoute que, du reste, lui et ses collègues ne sont pas ici pour solliciter l'adhésion de la Ligue, mais pour demander le concours individuel de ses membres qui voudront bien se joindre à eux. M. le Président fait alors remarquer que, dans ces conditions, les membres de la Ligue qui donneraient leur adhésion au Comité ne le feraient qu'à titre absolument personnel et sans pouvoir engager leur titre de membre de la Ligue. M. Loyer, secrétaire général, qui a pris place depuis quelques instants au Bureau, verrait un moyen de concilier les vues de la Ligue et de la Commission syndicale ; il propose une modification du texte déposé sur le Bureau par ces Messieurs. Les plumassiers, dans l'article 6 de leur projet, décideraient de ne plus employer toutes les espèces d'Oiseaux sauvages, tant qu'une enquête n'aurait scientifiquement démontré que ces espèces ne sont pas en voie de disparition. Un échange de vue s'engage à ce sujet et il est décidé que trois représentants de la Ligue : MM. Magaud d'Aubusson, Loyer et Chappellier, se réuniront avec des représentants de la Commission intersyndicale et que, après avoir causé avec eux, une réponse définitive leur sera donnée. (1) Voir le Règlement, par.3 de l'article 15. Bulletin N° 12 Décembre 1919 EXTRAIT DE LA SÉANCE DU 12 MAI 1919 ….Plusieurs collègues signalent que les chapeaux garnis de plumes d'Oiseaux sauvages sont nombreux. La frénésie de luxe qui sévit depuis la fin de la guerre a remis à la mode les dépouilles d'Oiseaux rares, Aigrettes et Paradisiers ; M. Carrié a vu, à plusieurs reprises des plumes de Frégates. Une maison de Paris vient d'importer 15 kilogrammes d'Aigrette : le massacre continue ! Bulletin N° 7 Juillet 1920 FLAMME D'AIGRETTE Dans Sciences et Voyages, M. Paul Cordelier a décrit, en deux pages qui paraissent vécues, la chasse à l'aigrette au Brésil équatorial. Les places à nids sont près des marécages, en pleine savane noyée, là où les Hérons blancs trouvent facilement les petits poissons indispensables à la nourriture de leurs jeunes. Après avoir repéré une colonie, le chasseur d'Aigrettes établit une hutte d'affût ; il empale, en guise d'appelants, des cadavres d'Aigrettes, puis se cache pour abattre les Oiseaux qui rentrent aux nids, volant toujours la même route ; "la carabine accrochée à portée à une fourche ad hoc, le fusil en main, dans l'eau noire et putride jusqu'au ventre, le cou, la figure et les mains enduits de pétrole afin de pouvoir résister un peu aux piqûres des Maringouins qui font rage autour de lui, il attend inlassablement pendant des heures, immobile, scrutant le ciel jusqu'à l'éblouissement… ". Nuit venue, le chasseur ramasse ses victimes, les plume, garde les plus grasses pour les faire rôtir et installe son hamac haut dans les branches, pour éviter les bonds du Crocodile affamé ou la venue du gigantesque Boa d'eau. Quand la chasse au passage ne donne pas assez, le tueur d'Aigrettes s'attaque à la place des nids - "au ninhal" - : "l'Aigrette qui a des petits grandelets ne les abandonne jamais, quel que soit le péril qui la menace, elle revient toujours au nid pour les nourrir et les protéger. C'est à cause de ce dévouement maternel incroyable qu'en chassant dans l'intérieur du "ninhal" beaucoup d'Aigrettes sont tuées sur leur nid ou bien blessées à mort, vont y tomber pour achever d'y mourir. En ce cas, elles sont généralement perdues pour le chasseur, mais le dommage ne se borne pas à cette perte, car, le plus communément, les petits, faute d'aliments, ne tardent pas à succomber. "Chasser de cette façon équivaut à tuer le Poule aux oeufs d'or. C'est une chose qu'un chasseur prévoyant ne pratique pas." "Pour terminer, écrit M. Cordelier , je dirai qu'un chasseur d'Aigrettes digne de ce nom, s'il échappe au paludisme, à la bilieuse, à la dysenterie, à l'enlisement, à la noyade, aux Caïmans, aux Boa d'eau, etc... peut arriver à Paris muni de 3 à 4 kilogrammes de plumes d'Aigrettes et en obtenir 7 à 8.000 francs le kilogramme." Faut-il que la mode et la femme aient des cruautés dans leurs exigences futiles pour traquer ainsi de beaux Oiseaux innocents et imposer à l'homme cette vie de risques et L'OISEAU magazine n° 103 102 . 37 d'aventures ! "On s'apitoie souvent, s'écrie M. Cordelier, sur le prétendu "massacre" des Aigrettes, ces Hérons blancs, dont le magnifique panache est si fort en faveur auprès de la belle moitié du genre humain, mais jamais on ne plaint le chasseur, car le public ignore généralement combien cette chasse demande d'endurance et représente de réels danger pour celui qui s'y livre ". Cette phrase ouvre l'article de M. Cordelier, il y parle de prétendus massacres. La suite de son récit n'estelle pas le meilleur aveu que ces massacres existent ? L'auteur reconnaît lui-même la mort de faim des jeunes, après que les parents se sont fait tuer en leur apportant la nourriture. Pour que l'on ne puisse douter, il illustre son passage d'une des belles photos australiennes que les Ligeurs connaissent bien ; elle porte ici cette légende : "L'angoisse d'une jeune famille. Les nouveau-nés s'inquiètent de l'absence prolongée de la mère. Pourvu qu'elle ne soit pas tombée sous le plomb d'un cruel chasseur ! Toute la couvée serait condamnée à mourir de faim..." La flamme d'Aigrette de nos élégantes est faite du meurtre de beaux Oiseaux tout blancs, victimes de leur amour pour leurs jeunes, de la mort des jeunes privés de leurs parents et succombant aux affres de la faim. Parfois aussi un cadavre d'homme reste au marécage brésilien, revanche de la savane aux mille embûches. M. Paul Cordelier veut s'apitoyer sur le sort du chasseur d'Aigrettes. Pourquoi ne pas laisser les Aigrettes à leur savane, à leurs nids, à leurs jeunes ? La Nature et la bonté y gagneraient en tout, la Femme n'y perdrait rien. Elle peut se faire aussi belle, sans ramasser sa parure dans le meurtre et dans le sang. A. C. Bulletin LPO N° 8-9 Août-Septembre 1920 POUR LE PLUMAGE BILL Peu après la décision prise par notre Comité dans sa séance du 17 mai, nous recevions de M. Lemon, secrétaire de la Royal Society for the Protection of Birds, avis que le représentant français à Londres était intervenu auprès du Gouvernement anglais, pour présenter les arguments du commerce français de la plumasserie, contre le Bill qui allait revenir devant la Chambre des communes. En réponse à sa démarche du commerce, il fallait faire entendre la voix des Oiseaux menacés et nous avons remis aux mains de M. Queuille, Sous38 . L'OISEAU magazine n° 103 102 secrétaire d'Etat à l'Agriculture, la lettre ci-dessous de notre Président, lettre que M. Queuille voulut bien accepter de transmettre à son collègue des affaires étrangères. Monsieur le Ministre, "La Société royale anglaise pour la Protection des Oiseaux de Londres m'avise que le Gouvernement français aurait donné à M. Paul Cambon, son ambas-sadeur à Londres, des instructions pour signaler au Gouvernement anglais les difficultés que susciterait au commerce de la plumasserie française l'adoption de la loi soumise en ce moment à la Chambre des communs, tendant à la prohibition de l'importation des plumes d'Oiseaux sauvages. "La Société royale anglaise pour la Protection des Oiseaux me demande d'intervenir auprès du Gouvernement français pour que son ambassadeur à Londres veuille bien faire ressortir qu'à côté de l'opinion des plumassiers, il y a celle d'une grande partie du public français qui admet difficilement que l'intérêt commercial de quelques négociants, dont plusieurs sont des étrangers et dont quelques-uns, avant la guerre n'ont pas craint d'oublier les égards qu'ils devaient au Président de la République lui-même en empêchant la réunion d'une assemblée qu'il devait présider, puisse primer l'intérêt général du pays et porter atteinte aux droits de ceux qui s'efforcent de protéger les Oiseaux dont l'existence est si compromise par le commerce de la plumasserie. "S'il est un commerce que le gouvernement ne doit pas encourager en ce moment, c'est celui de la mode féminine qui contribue tant à la continuation de la "vie chère" et qui donne lieu dans les familles à tant de gaspillages et d'abus. L'exportation et l'importation des plumes d'Oiseaux exotiques sont un commerce de luxe, dont la suppression ne toucherait en rien la corporation des ouvriers et ouvrières en plumes. Pendant la guerre, cette corporation a travaillé quand même et nous demandons au Gouvernement de nous aider dans la campagne que nous avons entreprise en faveur du commerce des plumes d'Oiseaux domestiques, d'Oiseaux de basse-cour, commerce qui ne serait pas de nature à compromettre l'existence des races d'Oiseaux exotiques et des Oiseaux sauvages, et qui en même temps apporterait un appoint importants aux bénéfices des agriculteurs et éleveurs d'Oiseaux domestiques. "Les Anglais, très pratiques, ont compris que le commerce des plumes d'Oiseaux sauvage amène la disparition de beaucoup d'espèces utiles, c'est pourquoi ils ont soumis à la Chambre des communes le bill contre l'importation de ces plumes. "Il serait regrettable que l'intervention du Gouvernement français puisse risquer de faire rejeter un projet de loi inspiré par les mesures prises dans le même sens par les américain dont on ne saurait contester l'esprit pratique. "Je vous serais donc très reconnaissant, monsieur le Ministre, au nom de la Ligue française pour la Protection des Oiseaux, de bien vouloir prier M. l'ambassadeur de France à Londres de transmettre notre protestation au même titre que celles des plumassiers. "Veuillez agréer, monsieur le Ministre, l'assurance de mes sentiments les plus distingués." Louis Ternier Président de la L.P.O. Membre de la commission de la Chasse au ministère de l'Agriculture Vice-président d'arrondissement de la Société centrale pour la répression du braconnage et délégué du S.H.C.F. " A la suite de la communication de cette lettre par M. le Sous-secrétaire d'Etat à l'Agriculture au Président du Conseil, ministre des Affaires étrangères, M. le ministre de l'Agriculture a reçu de ce dernier la lettre suivante qu'il a bien voulu nous communiquer. Paris, le 27 juillet 1920 "Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères, (Alexandre Millerand, note du scripteur) "A Monsieur le ministre de l'Agriculture (Direction des Eaux et Forêts) (Forêts), "Vous avez bien voulu me transmettre, à la date du 29 juin dernier (n° 102 F1/ 1), une lettre de M. Louis Ternier, président de la Ligue française pour la Protection des Oiseaux, relative au projet de loi soumis à la Chambre de communes tendant à la prohibition de l'importation en Angleterre des plumes d'Oiseaux sauvages. "Le projet de loi actuellement en discussion au Parlement britannique doit être discuté "en Comité" par toute la Chambre des communes, ce qui empêchera le bill de passer cette année. "Quoi qu'il en soit, les propositions dont vous m'avez saisi allant à l'encontre des intérêts de certains commerçants français, je n'ai pu que les communiquer à M. le ministre du Commerce qui s'était fait le défenseur de ces intérêts, en lui demandant ses observations sut la question. "Pour le Ministre et par autorisation Le Ministre plénipotentiaire Sous-directeur des relations commerciales Signé... (illisible)" Nous attendons les observations du ministre du Commerce, tout en faisant remarquer que si les propositions dont M. le ministre de l'Agriculture a bien voulu saisir le Président du Conseil, les propositions transmises au Gouvernement anglais au nom du commerce de la plumasserie vont à l'encontre des intérêts des agriculteurs et aviculteurs français plus nombreux que les plumassiers, ainsi qu'à l'encontre d'intérêts économiques intéressants tous les Etats du monde ; qu'à ce titre nous ne pouvons que persister dans notre demande et prier M. le Président du Conseil, ministre des Affaires étrangères notre protestation au même titre que celle des plumassiers. Bulletin N°5- 6 Mai- Juin 1921 COMITE DE LA LIGUE ALLOCUTION DE M. JEAN DELACOUR ... Contre l'emploi de la plume des Oiseaux sauvages dans la parure, qui menace d'extinction prochaine tant de merveilleuses espèces exotiques, nous devons, en attendant que nous puissions envisager l'adoption d'une loi dans notre pays, soutenir les campagnes que mènent pour sa prohibition les associations étrangères analogues à la nôtre elles ont abouti en Amérique, depuis plusieurs années, à la suppression de l'usage de ces plumes (1). Nous pouvons dire aussi autour de nous quelle honte ce serait pour notre génération d'avoir fait disparaître pour des raisons futiles et vénales, plusieurs des plus belles espèces animales. Le Naturaliste ne peut supporter sans protester, les agissements des commerçants qui menacent de priver la terre d'une partie de son capital vivant... Bulletin N° 6 Juin 1922 PARURES GRATUITES Par Mme A. Feuillée A l'approche de l'automne, les éleveurs d'Oiseaux domestiques trouvent souvent de jolies plumes, et souvent ils n'y prêtent aucune attention. Cependant ces plumes peuvent être utilisées pour la parure féminine, ainsi que celles des Oiseaux sacrifiés à la consommation. En me promenant dans un parc, j'ai ramassé quelques plumes d'un Paon en mue - de ces plumules du dos qui semblent un bijou inachevé - et je pensais qu'en les groupant, on aurait pu composer un motif d'ornement. J'ai remarqué quelques feutres joliment garnis de deux longues plumes de Paon, car on commence à revenir de la sotte prévention attachée à ce magnifique Oiseau. Les plus grands magasins offrent, en ce moment, des éventails en Paon blanc de toute beauté. Le Faisan, la Pintade, fournissent de ravissantes garnitures de chapeaux. Le Cygne, le Dindon, l'Oie donnent de beaux "couteaux". Le Canard, le Pigeon, etc. apportent également leur tribut à la mode. Tous sont en faveur. Mais c'est surtout le Coq qui procure de gentilles fantaisies à la portée de toutes. Sans parler de ces merveilleux Coqs japonais dont les plumes ornementales sont d'un emploi si facile, les races courantes présentent une extrême variété de coloris et de genres qui méritent de jouer un rôle décoratif. Les plumes de nos Oiseaux de bassecour sont aussi belles et plus solides que celles des infortunés Oiseaux sauvages gâtées par de malencontreuses préparations : Paradisiers teint en noir, - Pigeon goura (tel que l'exposait une grande modiste) teint en bleu très foncé, diminué, défiguré, enlaidi à faire pleurer ceux qui aiment la Nature. Si l'on veut employer la plume dans sa teinte naturelle, il suffit de la nettoyer. On prépare une solution tiède de savon à 6 % ; on y plonge les plumes pendant quelques heures ; ensuite on renouvelle cette opération dans un autre bain de savon. Enfin, on les lave à grande eau. Une fois séchées, les plumes sont lustrées et elles peuvent être frisées ou courbées au moyen d'un couteau de corne polie, d'argent ou d'ivoire. Suivant ce que l'on désire obtenir, si l'on veut par exemple assembler de petites plumes, on amincit la hampe en la coupant en dessous. S'il s'agit de plumes blanches, après nettoyage au savon, et rinçage, on peut les soumettre à l'action de la vapeur de soufre. (Cette opération se ferait naturellement dans un local ne contenant aucun objet susceptible d'être abîmé par la dite vapeur). M. Chappelier m'a demandé si l'on pouvait teindre les plumes soi-même. Rien n'est plus facile en effet. Des plumes de Coq Leghorn blanc, dégraissées comme il a été dit plus haut ont été teintées en bleu ou rose, au moyen de boules et sachets vendus communément dans le commerce. Il faut avoir soin d'envelopper la boule à teindre dans un petit linge ; les sachets donnent plutôt de meilleurs résultats. Avant de teindre, on peut blanchir par le soufre, ou à l'aide de sachets à décolorer vendus dans le commerce depuis peu. Les plumes ne doivent pas être plongées dans un bain trop chaud, et il est essentiel qu'elles soient bien nettoyées. Quand on a obtenu la teinte désirée, on les lave et on les sèche. La pelure d'oignon qui teint en un beau jaune la soie et le coton, peut être employée pour les plumes. Il suffit de mettre les épluchures dans une légère dissolution d'alun pendant 24 heures, on fait bouillir la préparation, puis on la passe. On fait tremper les plumes dans la décoction plus ou moins longtemps, suivant l'intensité de la teinte à obtenir. La cochenille employée pour teindre les oeufs de Pâques donne toute la gamme du plus beau carmin et offre l'avantage d'être inoffensive. Quand aux couleurs à base d'aniline, elles teignent, paraît-il avec autant d'éclats, les plumes que la laine et le coton. On fait dissoudre la couleur dans un peu d'alcool, puis on étend le liquide avec de l'eau. Les plumes sont mises dans ce bain chaud jusqu'à ce qu'elles soient parfaitement teintes. D'une manière générale, il est bon d'expérimenter sur de petites plumes avant que de teindre des pièces importantes. Tout ce que nous venons d'indiquer n'est qu'un thème sur lequel les dames adroites sauront certainement broder, afin de transformer les plumes de leurs Coqs en de gracieuses parures qui ne leur auront presque rien coûté. En attirant l'attention sur ces préparations qui sont à la portée de la plus modeste ménagère, nous n'avons pour but que de lutter contre l'emploi des plumes d'Oiseaux sauvages dont la Mode pourrait fort bien se passer si elle le voulait et si les dames s'y prêtaient. Avant de clore cette causerie sur les plumes, rappelons qu'il est facile de préparer soi-même les plumes pour écrire. Ce sont les pennes de l'aile de l'Oie que l'on prépare pour cet usage. Si elles sont fraîches, il faut les plonger dans un bain de cendre ou de sable très fin et chauffé à environ 60°. Au bout de quelques instants, on les retire et on les frotte avec un marceau de laine. Elles sont alors blanches et transparentes, il ne reste plus qu'à les tailler. Les plumes d'Oie ont plus de valeur quand elles sont vieilles parce qu'elles L'OISEAU magazine n° 103 102 . 39 ont perdu toute leur graisse : ainsi, elles sont jaunâtres. Si l'on veut donner cet aspect à des plumes fraîches, il suffit de les tremper dans de l'acide chlorhydrique étendu d'eau, après leur avoir fait subir l'action du bain de sable chaud. Les plumes d'Oie pour écrire sont redevenues à la mode…Elles présentent le triple avantages d'être légères, de pouvoir se tailler indéfiniment et de ne pas s'oxyder comme les plumes métalliques. Si l'on aime s'en servir et si l'on préfère les transformer en porte-plumes, il est facile de leur adapter une carcasse ordinaire. Enfin, n'oublions pas que, à défaut de duvet d'Oie, le duvet de Poule peut être utilisé pour la literie. Les plumes seront nettoyées (par savonnage), puis séchées. Ensuite, il faudra couper les barbes des plumes de chaque côté et le long de la côte. Cette côte qui donne de la raideur, sera jetée. Les barbes seront enfermées dans un sac de toile que l'on frottera en tous sens, afin de les emmêler, de les feutrer jusqu 'à ce qu'elles constituent un duvet très doux. N'importe quelles plumes d'Oiseau de basse-cour, pareillement traitées, peuvent donner le même résultat. Sans doute, l'opération nécessite beaucoup de temps, mais elle peut occuper un enfant, un vieillard, un malade, une personne qui jouit de loisirs. Toutes ces plumes sont ordinairement jetées parce qu'on les croit inutilisables. A PROPOS DE MODE Par Mme de Gourcuff Un grand journal a publié ce mois-ci, en première page, deux articles, stigmatisant avec une indignation motivée, la fantaisie odieuse et ridicule de la dernière mode, laquelle consiste à orner les chapeaux d'été des femmes d'une quantité de petits Oiseaux utiles à l'Agriculture - et d'ailleurs protégés par la convention internationale du 19 mars 1902 - c'est-à-dire des RougesGorges, Mésanges diverses, Roitelets huppés, Chardonnerets etc. A ces deux cris d'alarme, un autre grand journal a répondu, en date du 15 février, un article signé Rodolphe Darzens, dont la bonne foi semble avoir été surprise et qui oppose divers arguments contraires auxquels je vais m'efforcer de répondre : 1° Il ne s'agirait pas en l'espèce de vrais Oiseaux, dont le prix serait beaucoup trop élevé puisque l'on ne pourrait acheter (et encore clandestinement) le 40 . L'OISEAU magazine n° 102 103 moindre Rouge-gorge ou Chardonnerets à moins de 50 ou 60 francs pièces - Ne faudrait-il pas barrer un zéro ? Je ne crois pas qu'on trouverait beaucoup d'amateurs consentant à donner une telle somme lorsqu'il est plus facile, par les grands froids et surtout quand la neige est abondante, d'attirer dans les pièges les pauvres bêtes affamées ! Le nombre interlope des piégeurs serait bien étonné, je crois, d'apprendre la valeur marchande de leurs captures, car le métier, malgré tout, ne doit pas leur rapporter de si mirifiques bénéfices ! 2° Les vrais Oiseaux étant écartés pour la raison ci-dessus (à laquelle on veut bien ajouter le souci louable de ne pas détruire inconsidérément nos plus précieux auxiliaires) la fabrication des simili-Oiseaux serait obtenue en quantité innombrable et à très peu de frais, à l'aide de plumes d'Oies, de Poules, Pigeons, etc. A cela, certes, rien à répliquer : la Ligue française de Protection des Oiseaux ne cesse depuis sa fondation, de prêcher la bonne croisade en faveur de l'utilisation rationnelle des produits de basse-cour, afin de sauver des races entières d'Oiseaux sauvages de la destruction dont il n'y a que trop d'exemple. Il paraîtrait (c'est M. Darzens qui parle) qu'une ouvrière, en huit heures de travail, parvient à fabriquer une centaine de petits Oiseaux colorés diversement, ce qui abaisserait le prix de l'un d'eux à 0 fr. 50. Ne faudrait-il pas déplacer la virgule ? Car, depuis la guerre, je n'ai jamais vu aucune fantaisie de plumes ou d'Oiseaux quelconque à ces prix inconnus maintenant. De deux choses l'une : ou la bête est réussie et alors il est matériellement impossible, avec le coût des plumes, du coton, du fil de fer, des colorants, de la colle etc., de produire quoi que ce soit au prix indiqué, ou la bête est affreuse et personne n'en voudra. D'ailleurs, en admettant les raisons du plaidoyer de M.R.D., n'est-il pas dangereux pour nos petits alliés de le clouer, même en effigie, sur le pilori de la mode ? Cette vue ne donnera-t-elle pas aux villageoises (qui maintenant sont bien renseignés sur les fluctuations de la mode parisienne) l'idée mauvaise de se faire tuer par leurs galants de belles garnitures de chapeaux ? Avec les lacets ou filets, il n'est pas difficile de faire de vraies hécatombes d'Oiseaux de toutes sortes et la vulga-risation pénétrant partout, il ne sera pas difficile non plus, dans les longues soirées d'hiver, de naturaliser suffisamment, à l'aide d'alun, de chrome, etc., ces pauvres dépouilles qui permettront aux campagnardes d'être aussi élégantes que les Parisiennes. Il y a, somme tout, un champ assez vaste pour le goût si sûr de nos modistes, sans qu'il soit besoin de copier nos petits amis dans un but aussi futile. Ceux-ci doivent nous être sacrés et leur image n'être représentée que pour les faire aimer et respecter. Il est mauvais d'habituer les femmes à se parer avec de la cruauté car, même si les Oiseaux sont fabriqués en coton et plumes, elles n'en croiront pas moins dur comme fer qu'elles exhibent fièrement une brochette de vrais Oiseaux. Jamais une coquette ne s'arrêtera à l'idée de la souffrance occasionnée par sa parure : voyez à propos de l'Aigrette, à quel résultat négatif on est arrivé ?... Non supprimons absolument de nos coiffures les Rougesgorges faux et les similis Chardonnerets. Révoltons-nous contre l'odieuse et criminelles tyrannie du plus aristocratique souverain qui ne connaît jusqu'à présent aucune révolution : la Mode, et prouvons que les femmes peuvent être élégantes tout en restant indépendantes, bonnes et intelligentes. LA LOI ANGLAISE CONTRE L'EMPLOI DE LA PLUME DES OISEAUX SAUVAGES Ainsi que nous l'avons dit dans notre Bulletin de Mai-Juin 1921 (Voir allocution de M. Delacour), une loi a été votée en Angleterre contre l'importation des plumes d'Oiseaux sauvages et elle est entrée en application. Voici quelques extraits du texte officiel : "Prohibition d'importation des plumes de parures.- "L'importation des plumages d'Oiseaux est interdite en Grande Bretagne, depuis le 1er avril 1922 "."Sont exempt de la prohibition d'importation mentionnée ci-dessus : a) Autruches africaines, Canards-eiders, et Rhoa Rothschildi ; b) Oiseaux importés vivants ; c) Oiseaux utilisés ordinaire-ment dans le Royaume-Uni " pour la nourriture. " "Le Board of Trade peut ajouter ou supprimer le nom de n'importe quel Oiseau sur le tableau annexé à la loi prohibant l'importation de plumes de parure ". "Le Board of Trade peut accorder une licence soumise aux conditions et aux "règlements qu'il juge nécessaires, autorisant l'importation des plumages pour un musée " d'histoire naturelle ou autre, ou dans le but de recherches scientifiques ou pour toute autre raison particulière". "Dans les quatre mois qui ont suivi l'adoption de cette loi, le Board of Trade a nommé un comité consultatif composé de : a) un président indépendant ; b) deux experts en ornithologie ; c) Trois experts dans le commerce des plumes ; d) Quatre autres membres ". NOTA. - L'expression " plumage " désigne, dans la loi, la peau ou le corps de l'Oiseau " recouvert de son plumage ". Cette citation abrégée donne une idée de cette loi opportune qui a pour but de supprimer l'usage de plumes d'Oiseux sauvage dont la mode a si immodérément usé. Londres étant le plus grand marché de plumes de l'Europe, nous espérons que cette loi aura sa répercussion en France et que nous verrons un peu moins sur les chapeaux de ces plumages d'Oiseaux menacés d'extermination. Cependant il paraît que la NouvelleGuinée expédie ses produits directement à Paris et ce serait la raison pour laquelle nous voyons tant et tant de coiffures féminines ornées de Paradisiers. Aussi nous souhaitons ardemment que la France, à l'exemple de l'Amérique et de l'Angleterre, prenne des mesures prohibant l'importation des plumes d'Oiseaux sauvages. L.P.O. PARURES PROHIBEES Nous avons eu la désagréable surprise de voir de nombreux chapeaux garnis de petits Oiseaux protégés par la Loi et notamment de Chardonnerets. Soit simplement naturalisés, soit formant des motifs d'ornements composés de têtes entourées de paires d'ailes, les Chardonnerets deviennent fort à la mode. Cependant à la suite d'incidents qui se sont produits, il y a quelques années entre la Ligue pour la protection des Oiseaux et le commerce de la plume, celui-ci nous avait formellement promis de ne pas utiliser pour la parure des dépouilles d'Oiseaux utiles. Il avait même édité un tableau-maxime ainsi libellé : COMMISSION INTERSYNDICALE POUR LA DEFENSE DES INDUSTRIES DE LA PLUME POUR MODES ET PARURES N'EMPLOYER JAMAIS D'OISEAUX UTILES à l'Agriculture française Tableau édité par le commerce de la Mode Et le verso du dit tableau portait la liste n° 1 des Oiseaux protégés par la Convention internationale du 19 mars 1902 sur laquelle figure en toutes lettres le Chardonneret. Nous serions reconnaissant au commerce de la plume et aux modistes de s'en souvenir, et de bien vouloir tenir compte de leur promesse. Bulletin N° 1 Janvier 1932 ACTES DES SOCIETES AFFILIEES Ligue Française pour la Protection des Oiseaux LES PLUMES ET LA MODE Nous publions ci-après deux lettres adressées à la Ligue P.O. par le président de la Société d'Histoire Naturelle de Loiret-Cher et de la Société d'Aviculture de Loir-et-Cher, à propos des plumes employées pour la parure. Monsieur le Secrétaire Général de la L.P.O., Paris Mon cher Ami, Depuis quelque temps, on voit reparaître des plumes sur certains chapeaux féminins et nombres d'entre eux sont ornés de têtes d'Oiseaux exotiques, dont plusieurs espèces méritent protection. Je viens, en conséquence, vous priez, au nom de notre Société, affiliée à la L.P.O., de vouloir saisir cette dernière de l'étude de la question. Il ne s'agit pas ici d'entraver une renaissance possible du commerce de la plume, mais d'orienter ceux qui tentent de la réaliser, et la mode ellemême, vers l'utilisation des plumes d'élevage, teintes ou naturelles, et notamment vers celles de l'Autruche, qui paraissent reprendre quelques faveurs. Vous serez bien aimable de nous tenir au courant de ce que la Ligue et la Fédération, auront pu faire ou décider, afin que je puisse en entretenir utilement ma Société. Croyez, mon cher collègue et ami, à tous mes meilleurs sentiments. Le Président de la Société d'Histoire Naturelle de Loir-et-Cher Comte Delamarre de Monchaux Monsieur le secrétaire général de la L.P.O. Paris Monsieur le Secrétaire général Notre Société se préoccupe de l'utilisation possible des plumes d'Oiseaux de basse-cour pour la parure, et l'ornement des chapeaux de dames. Ce but pratique qui concerne l'écoulement rémunérateur des produits de la basse-cour, nous paraît coïncider avec les intentions protectrices de votre Ligue, qui cherche à faire épargner par la mode des Oiseaux sauvages auxquels vous vous intéressez. Nous vous serons obligés, si vous voulez bien nous faire connaître ce qui pourrait nous aider, au point de vue spécial où nous nous plaçons. Avec nos remerciements anticipés, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Secrétaire général, l'assurance de nos dévoués sentiments. Le Président, Comte Delamarre de Monchaux Le secrétaire de la Ligue a répondu à M. Delamarre de Monchaux, d'une part, que la question des plumes dans la parure mérite toute notre attention et que la Ligue demeure vigilante, prête à intervenir si cela est nécessaire contre l'emploi des plumes d'Oiseaux protégés par la loi ; d'autre part que la Ligue a toujours préconisé l'utilisation des plumes d'Oiseaux de basse-cour pour la mode. Notamment, ce sujet a été porté à l'ordre du jour d'une séance de la Ligue en 1922 (voir le bulletin de la L.P.O., numéro de juin 1922). SOYER PRECIS Quelques personnes ont adressé à la Ligue des protestations contre le port, sur des chapeaux, de têtes et de plumes d'Oiseaux insectivores ; mais la Ligue n'a pu agir faute de précisions. Nous prions nos collègues qui veulent bien nous signaler des faits, d'accompagner leur texte de renseignements très exact des lieux, dates, etc., qui nous permettront d'intervenir utilement. Nous les assurons de notre entière discrétion. L'OISEAU magazine n° 103 102 . 41