Examen publié 2011–2012 : corrigé
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Français langue première 12 Examen publié 2011–2012 Août 2011 — Examen A Examen du Ministère — Corrigé Composantes 1. Grammaire 2. Poésie 3. Texte littéraire en prose 4. Texte d’information 5. Intégration de la lecture 6. Composition 7. Composante orale Numéro de la question Réponse inscrite Pondération (10 %) ⎫ ⎬ ⎭ (25 %) (10 %) (25 %) (30 %) Type de question 35 = à choix multiple (CM) 3 = à réponse écrite (RÉ) 3 = aspects oraux (ORAL) Niveaux cognitifs G = Grammaire W = Extraire de l’information (L1) X = Manifester sa compréhension (L2) Y = Produire des hypothèses (L3) Z = Faire preuve d’esprit critique (L4) C = Composition O = Composante orale Niveau cognitif Note Composante RAP Type de question G G G G G G G G G G 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 – – – – – – – – – – CM CM CM CM CM CM CM CM CM CM Y Y Y Y X X X Z 1 1 1 1 1 1 1 4 3 3 3 3 3 3 3 3 – – – – – – – – CM CM CM CM CM CM CM RÉ Y Y Y Y X X X X X 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 2 2 2 2 2 2 2 2 – – – – – – – – – CM CM CM CM CM CM CM CM CM Amérique du Nord : la fin des banlieues? 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. B C C B C B C D A D La gestion de l’eau : un défi mondial 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. D A D C D A A – Héros entre quatre murs 19. 20. 21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. C D D D C D D C B Français langue première 12 – Examen A 1108 – Corrigé Page 1 Numéro de la question Réponse inscrite Niveau cognitif Note Composante RAP Type de question C B D C A A C D C Y Y Y Y X X X X X 1 1 1 1 1 1 1 1 1 3 3 3 3 3 3 3 3 3 – – – – – – – – – CM CM CM CM CM CM CM CM CM Réponse inscrite Niveau cognitif Note Composante RAP Type de question Paris 28. 29. 30. 31. 32. 33. 34. 35. 36. Numéro de la question Réponse – Question de synthèse 37. Composition – Z 12 5 – RÉ 38. Composante orale 39. 40. 41. – C 24 6 – RÉ – – – O O O 8 24 16 7 7 7 – – – ORAL ORAL ORAL Français langue première 12 – Examen A 1108 – Corrigé Page 2 Français langue première 12 Examen publié 2011–2012 Août 2011 — Examen A Examen du Ministère — Guide de notation Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 1 PARTIE B : COMPRÉHENSION DE TEXTES QUESTION À RÉPONSE ÉCRITE SUR UN TEXTE TEXTE D’INFORMATION Réussira-t-on à gérer l’eau de manière efficace? La gestion de l’eau : un défi mondial 1 Des bâtiments énergétiquement vertueux exhibant fièrement des panneaux solaires et des transports maîtrisés ne suffisent pas à faire une ville « durable » : il existe aussi des réseaux souterrains, invisibles, mais essentiels. La gestion de l’eau constitue en effet une des clés du bon fonctionnement du milieu urbain. L’eau et la ville font rarement bon ménage. Les grandes concentrations d’individus génèrent de graves pollutions des milieux aquatiques. Dans les pays développés, cent cinquante ans de travaux ininterrompus n’ont pas permis de concilier les exigences du cycle de l’eau avec l’émergence des grandes mégapoles. Les villes des pays en voie de développement affrontent aujourd’hui les mêmes difficultés, sans avoir ni le temps ni l’argent pour les résoudre. 2 « Au début du XIXe siècle, les excréments des citadins européens étaient recueillis dans des fosses qu’on vidangeait périodiquement », raconte Bernard Chocat, du groupe de recherche Rhône-Alpes sur les infrastructures de l’eau (GRAIE). « L’augmentation de la population urbaine a vite posé des problèmes d’insalubrité. D’où la réalisation progressive du réseau d’eau potable et du tout-à-l’égout. » L’idée est empruntée au fonctionnement du corps humain. L’eau est comme le sang. Elle irrigue la ville, se charge des miasmes et les évacue loin des habitants, leur évitant ainsi de vivre dans l’insalubrité. L’expérience française 3 Les premières stations d’épuration n’apparaissent aux États-Unis qu’au début des années 1930. Paris est la première ville française à se doter de bassins de traitement en 1940. Les différents plans de financement portés par les agences de l’eau ont petit à petit permis l’équipement des villes de la métropole. Entre 1990 et 2003, les dépenses en traitement des eaux usées d’une France à 80 % urbaine ont grimpé de 6,3 à 11,2 milliards d’euros. Pourtant, la France n’arrive pas à suivre les échéances imposées par la directive européenne sur les eaux résiduaires urbaines de 1991. Cet automne, le Parlement européen a menacé Paris d’une amende de plusieurs centaines de millions d’euros pour des rejets excessifs en phosphore et en azote dans les rivières. Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 2 Eau en stock 4 Les villes françaises doivent par ailleurs faire face à une nouvelle difficulté. Entre 1990 et 2000, elles ont gagné 1 230 km2. L’étalement urbain augmente les surfaces imperméables et donc les volumes d’eau de pluie s’engouffrant dans les réseaux. Dès la fin des années 1980, des inondations spectaculaires de centres-villes généralement construits en bord de rivière ou de fleuve, donc sur les terrains les plus bas, ont mis en exergue cette difficulté. « Pour y remédier, on réutilise paradoxalement la technique des citernes abandonnée il y a deux siècles », s’amuse Bernard Chocat. « Les systèmes de bassins d’orage permettent de stocker les flux soit pour infiltrer les flots dans le sol, soit pour les acheminer vers les stations d’épuration une fois le temps sec rétabli. » La ville n’est donc plus un corps irrigué par une eau toujours en mouvement. Celle-ci est retenue dans les quartiers et réutilisée au mieux. Les particuliers sont invités à se doter de systèmes de récupération pour laver la voiture ou arroser le jardin et l’on envisage d’en doter les immeubles d’habitation et de bureaux pour alimenter les toilettes ou faire tourner les machines à laver. L’expérience marocaine 5 Ces questions sont des problèmes de riches. Dans les villes des pays pauvres, qui se gonflent de milliers de nouveaux habitants tous les jours, la gestion urbaine de l’eau est une gageure. Les agglomérations grandissent trop vite et de façon anarchique, sans schéma d’urbanisme. Les quartiers se construisent au gré des arrivées des campagnes dans des pays encore très largement ruraux. Tanger est une ville assez représentative de ces difficultés. C’est par centaines que débarquent les paysans du Nord marocain, attirés par une cité en plein développement. Le port compte officiellement 750 000 habitants. En réalité, le million est largement dépassé. 6 L’approvisionnement en eau des quartiers champignons de la périphérie ne peut passer que par des fontaines, ce qui oblige les femmes à de fréquents allers et retours. L’évacuation des eaux usées se fait par les oueds. L’été, quand ces cours d’eau sont à sec, ils se transforment en égouts à ciel ouvert se jetant directement dans la baie. En 2000, le Club Méditerranée a ainsi fermé l’un de ses plus beaux sites. La mer puait. 7 Dans un partenariat public-privé prôné depuis quelques années par l’ONU, la gestion de l’eau a été confiée à Amendis, une société propriété à 50/50 des pouvoirs publics marocains et de la multinationale française Véolia. La société franco-marocaine tente de résoudre un sacré casse-tête : « La consommation d’eau passe de 20 litres par jour et par habitant aux fontaines de quartier à 130 litres quand on apporte l’eau au robinet dans la maison », explique François de Rochambeau, directeur général adjoint d’Amendis. « On ne peut donc pas créer un réseau d’eau potable sans faire en même temps les égouts. Or les quartiers existent déjà. Donc, pour faire passer le réseau d’évacuation, il faut détruire des immeubles construits illégalement. » Le réseau d’égouts s’étend pourtant et la station d’épuration de Tanger vient d’être inaugurée. Et l’avenir? 8 Les objectifs du Millénaire pour le développement, adoptés par l’ONU en 2000, imposent pour 2015 qu’au moins la moitié des 1,2 milliard d’individus sans eau potable et la moitié des 2,4 milliards sans assainissement soient enfin équipés. Dans le contexte actuel d’un exode rural massif, il est probable que les États n’y arriveront pas. Loïc Chauvreau Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 3 Question à réponse écrite sur un texte (« La gestion de l’eau : un défi mondial ») Classe de l’item : L4 (Z) : Faire preuve d’esprit critique Question 18 : Quel procédé littéraire l’auteur utilise-t-il pour présenter les problèmes reliés à la gestion de l’eau? Explique et appuie ta réponse à l’aide de citations et/ou d’exemples tirés du texte. La réponse sera corrigée pour les idées et pour l’expression écrite et doit avoir environ 150 mots. Réponse attendue : La comparaison est utilisée pour mettre en lumière les différences entre les situations vécues dans les pays riches et les pays en développement. Explication satisfaisante L’auteur utilise la comparaison pour mettre en évidence les problèmes des pays pauvres et des pays riches. Citations et/ou Exemples pertinents Pollution de l’eau • « Dans les pays développés, cent cinquante ans de travaux… ni le temps ni l’argent pour les résoudre. » (paragraphe 1) Insuffisance des infrastructures • « Dans les pays développés, cent cinquante ans de travaux ininterrompus n’ont pas permis de concilier les exigences du cycle de l’eau avec l’émergence des grandes mégapoles. » (paragraphe 1) • « Entre 1990 et 2003, les dépenses en traitement des eaux usées d’une France à 80 % urbaine ont grimpé de 6,3 à 11,2 milliards d’euros. Pourtant, la France n’arrive pas à suivre les échéances imposées par la directive européenne sur les eaux résiduaires urbaines de 1991. » (paragraphe 3) • « Dans les villes des pays pauvres, qui se gonflent de milliers de nouveaux habitants tous les jours, la gestion urbaine de l’eau est une gageure. Les agglomérations grandissent trop vite et de façon anarchique, sans schéma d’urbanisme. » (paragraphe 5) • « L’approvisionnement en eau des quartiers champignons de la périphérie ne peut passer que par des fontaines,… le Club Méditerranée a ainsi fermé l’un de ses plus beaux sites. La mer puait. » (paragraphe 6) • « “La consommation d’eau passe de 20 litres par jour et par habitant aux fontaines de quartier à 130 litres quand on apporte l’eau au robinet dans la maison”, explique François de Rochambeau, directeur général adjoint d’Amendis. “On ne peut donc pas créer un réseau d’eau potable sans faire en même temps les égouts. Or les quartiers existent déjà. Donc, pour faire passer le réseau d’évacuation, il faut détruire des immeubles construits illégalement.”» (paragraphe 7) • « Le réseau d’égouts s’étend pourtant et la station d’épuration de Tanger vient d’être inaugurée. » (paragraphe 7) Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 4 Insuffisance des ressources financières • « Les villes des pays en voie de développement affrontent aujourd’hui les mêmes difficultés, sans avoir ni le temps ni l’argent pour les résoudre. » (paragraphe 1) • « Entre 1990 et 2003, les dépenses en traitement des eaux usées d’une France à 80 % urbaine ont grimpé de 6,3 à 11,2 milliards d’euros. Pourtant, la France n’arrive pas à suivre les échéances imposées par la directive européenne sur les eaux résiduaires urbaines de 1991. » (paragraphe 3) Croissance de la population • « L’eau et la ville font rarement bon ménage. Les grandes concentrations d’individus génèrent de graves pollutions des milieux aquatiques. » (paragraphe 1) • « Dans les pays développés, cent cinquante ans de travaux ininterrompus n’ont pas permis de concilier les exigences du cycle de l’eau avec l’émergence des grandes mégapoles. » (paragraphe 1) • « Dans les villes des pays pauvres, qui se gonflent de milliers de nouveaux habitants tous les jours, la gestion urbaine de l’eau est une gageure. Les agglomérations grandissent trop vite et de façon anarchique, sans schéma d’urbanisme. » (paragraphe 5) • « Les objectifs du Millénaire pour le développement, adoptés par l’ONU en 2000, imposent pour 2015 qu’au moins la moitié des 1,2 milliard d’individus sans eau potable et la moitié des 2,4 milliards sans assainissement soient enfin équipés. Dans le contexte actuel d’un exode rural massif, il est probable que les États n’y arriveront pas. » (paragraphe 8) Note : Une explication commande une reformulation de la part de l’élève. Elle devrait être fondée sur l’information dans le texte et non sur des connaissances préalables. L’élève est tenu de prendre en considération et d’analyser toutes les informations pertinentes pour arriver à une explication satisfaisante. L’élève qui ne tient compte que d’une partie de l’information disponible, affiche une compréhension partielle de la situation. Une citation ne peut constituer une explication valable que si l’explication est donnée dans le texte. L’élève ne fait alors que du repérage. Note : Toutes les autres formulations jugées équivalentes peuvent être admises par les correcteurs. Note : Toute nouvelle réponse jugée pertinente doit être soumise au chef de groupe avant d’être admise par les correcteurs. Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 5 FRANÇAIS LANGUE PREMIÈRE 12 BARÈME DE NOTATION POUR LA QUESTION À RÉPONSE ÉCRITE SUR UN TEXTE 4 Vue d’ensemble L’élève manifeste une très bonne compréhension du texte et de la question et fonde sa réponse sur des éléments explicites et implicites. L’élève formule sa réponse de façon étoffée. Il utilise de façon critique des éléments tirés du texte. Il transmet et organise les idées et les éléments du texte avec beaucoup de clarté et de cohérence. Il démontre une très bonne maîtrise des conventions de la langue. 3 Vue d’ensemble L’élève manifeste une bonne compréhension du texte et de la question et fonde sa réponse principalement sur des éléments explicites et implicites. L’élève formule sa réponse de façon adéquate. Il utilise de façon appropriée des éléments tirés du texte. Il transmet et organise les idées et les éléments du texte avec clarté et cohérence. Il démontre une bonne maîtrise des conventions de la langue. 2 Vue d’ensemble L’élève manifeste une compréhension partielle du texte ou de la question et fonde sa réponse sur certains éléments. L’élève formule sa réponse de façon partielle. Il utilise des éléments du texte et établit quelques liens entre eux. Il transmet et organise les idées et les éléments du texte avec une certaine clarté et cohérence. Il démontre une maîtrise acceptable des conventions de la langue. 1 Vue d’ensemble L’élève manifeste une compréhension limitée du texte ou de la question. L’élève formule sa réponse de façon simple. Il utilise des éléments tirés du texte. Il transmet et organise les éléments du texte sans grande clarté et cohérence. Il démontre une maîtrise insuffisante des conventions de la langue. 0 L’élève ne répond pas à la question. L’élève tient des propos choquants. Pas de réponse Aucune réponse n’est écrite dans l’espace prévu. Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 6 PARTIE C : INTÉGRATION DE LA LECTURE : QUESTION DE SYNTHÈSE POÉSIE Le poète évoque les difficultés de la vie en ville. Héros entre quatre murs Tu vis dans une ville grise Un bien triste paysage Le contraire de la terre promise Juste un moderne marécage 5 10 15 20 C’est une ville si gigantesque Qu’elle en a perdu son âme On pourrait la croire morte ou presque Comme désertée de toute flamme Il est vrai que ceux que tu croises Paraissent vides de toute vie Mis à part ces gens qui te toisent Gorgés de haine et de mépris Tu ressens de la compassion Pour tous ces visages inconnus Tu vis les mêmes émotions Dans le dédale de ces rues Tu as l’impression d’étouffer D’être dans une bulle d’air Tu es ce que tu détestais Et bien sûr tu n’en es pas fier Tu ne veux pas être cela Tu penses à changer d’existence Mais la ville annihile 1 le soi En imposant la dépendance 25 30 En conséquence tu t’enfuis Dans la fiction et dans les arts L’imaginaire est ton logis Au gré et au fil des histoires Symbole d’un passeport pour vivre Dans la réalité obscure Tu deviens en ouvrant un livre Un héros entre quatre murs François Ville 1 annihiler : anéantir Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 7 TEXTE EN PROSE Au début du 20e siècle, un jeune Canadien part tenter sa chance à Paris. Paris 1 Il y a cinq ans et demi, je crus faire un beau coup en quittant le Canada, mes amours, pour aller à Paris, capitale du monde civilisé. 2 Paris! c’est un nom qui donne le vertige et j’étais allé me jeter dans le gouffre. J’étais seul, sans appui, ignorant le sombre et délicieux enfer où s’engloutissent tous les jours tant de vigoureuses espérances. 3 J’avais dit adieu à mes dernières affections et serré la main de mes nombreux amis qui étaient venus me reconduire à la gare Bonaventure. J’étais ruiné, ce qui paraîtra surprenant, et j’étais ambitieux, chose digne de remarque. 4 Mon ambition était d’étonner mes contemporains par mon style. 5 Ne pouvant prétendre à aucune renommée littéraire dans un pays où disparaît de jour en jour la langue de la France, je m’exilais à la recherche d’un nom dans la ville du monde où il est le plus difficile à conquérir. Un fantôme allait devant moi et me sollicitait à le suivre, je le suivis, ne pouvant résister, faiblesse particulière aux grands hommes que, seule, la réalité ne peut émouvoir. Je songeais aux applaudissements qui m’attendaient; je me voyais déjà l’auréole de la gloire au front, j’avais franchi d’un pas impérieux les portes de son temple, ne sachant pas que ce temple ne reçoit que des victimes couronnées. 6 Je tombai donc dans cet immense Paris, et dès le premier jour j’eus peur. Il n’est pas de solitude plus déserte qu’une grande ville où l’on ne connaît personne. 7 J’errai, et bientôt je sentis le vide, l’angoisse, le vague saisissement de l’inconnu. J’étais venu plein d’illusions et rien ne me frappait. Je marchai sans but. Je vis passer le flot de la multitude, cet océan de têtes toujours renouvelées qui vont et viennent, confuses, tourmentées, sombres, avides, inquiètes. Je me sentis seul. Puis un accablement subit s’appesantit sur tout mon être, l’angoisse étreignit mon cœur; mon front se couvrit de sueurs et je m’assis haletant, près de défaillir, sur un des bancs qui se trouvaient le long du chemin. Je restai longtemps dans cette prostration; car, lorsque je me levai, des flots de lumière tombaient sur moi de toutes parts; la foule joyeuse et blasée se rendait aux théâtres, aux cafés, aux concerts; les équipages ruisselaient sur le boulevard, les boutiques étincelaient, l’air était chargé de parfums et l’on entendait au loin le murmure bruyant de la grande ville s’ébattant dans les plaisirs avant de se plonger dans la nuit. 8 Je partis lentement. De sinistres présages commençaient à s’éveiller dans mon esprit; l’horrible doute, précurseur du désespoir, saisissait mon esprit pour la première fois. Le bruit retentissant de la ville, les mille séductions de l’élégance, la grandeur des monuments, le raffinement du luxe, tout cela m’apparaissait comme autant de pompeux supplices imaginés pour les malheureux. Oh! quelle Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 8 désillusion m’avait surpris tout à coup, dans ce Paris que j’avais tant désiré voir, cette reine des arts et de la pensée dont le nom rayonne sur le monde, éblouissant les imaginations. Je ne le connaissais pas encore et, déjà, j’aurais voulu l’ignorer toujours; de toutes les figures qui passaient, pas une qui me fut connue… pas une main à serrer dans la mienne!… 9 Alors le regret amer, le remords déchirant pénétrèrent en moi. Il me vint en souvenir les vieilles forêts d’Amérique où j’avais tant rêvé, les rives profondes du grand fleuve où souvent j’avais bercé avec les flots mes joyeuses pensées d’avenir. Je me rappelai mes amis et mon cœur vola vers eux sur un flot de larmes; je les nommai tous, je leur parlai; un instant je fus emporté près d’eux, mais, l’instant d’après, l’affreuse réalité retomba sur moi de tout son implacable poids… 10 Il était tard quand je rentrai à mon hôtel. Je montai à ma chambre, je m’assis en soupirant et me mis à réfléchir. La lassitude avait succédé à l’accablement. Mais le ciel m’a donné une nature élastique, prompte à la réaction. Je sentis de nouveau mon sang s’animer, j’eus honte de tant de faiblesse et m’arrachant à ma torpeur, je me mis à marcher précipitamment. Un flot d’idées nouvelles bondit à mon cerveau; c’était l’énergie réparatrice et vigoureuse qui reprenait son empire. Une voix me dit qu’on n’est pas vaincu avant la lutte et qu’il reste toujours à l’homme quelque chose qui survit à toutes les défaites, l’espérance. 11 J’étais seul, je me sentis renaître, ou plutôt non, je n’étais pas seul. Qu’est-ce que l’isolement quand la foule des souvenirs vous enveloppe, quand tout le passé vous accompagne, quand l’espoir et le regret, se combattant, forment autour de vous une atmosphère brûlante? On n’est jamais seul quand on pense et qu’on se souvient. 12 J’avais quelques manuscrits; je les rassemblai, je les relus; je me dis : « On doit être avide de connaître tout ce qui se passe en ce moment en Amérique; voilà cinq ans que l’Europe a les yeux tournés vers elle; commençons par un article de journal; s’il est accepté, je verrai bien ensuite ce que je puis faire. » 13 Et je me mis à travailler fiévreusement. Un premier article! Savez-vous ce que c’est qu’un premier article? C’est l’épreuve terrible de l’initié. S’il en sort victorieux, l’avenir est à lui. Je me creusai la tête pour donner à mon article une originalité saisissante, je dis des choses certainement ignorées, je fis des considérations toutes neuves. En voyant mon nom au bas de cet article qui cependant n’était qu’une ébauche inconnue, j’eus un frémissement. Oh! qui ne connaît pas les émotions d’un début? Qui n’est pas familier avec ces combats intérieurs de l’espoir et de la crainte qui vous laissent haletant, effrayé, enchanté, inquiet et rassuré tout ensemble? On se dit que ce qu’on a fait est admirable, qu’il est impossible de ne pas réussir, et l’on est épouvanté. Mais l’espoir l’emporte; la jeunesse, la confiance en soi, l’élan de la volonté sont comme le torrent qui bondit sur l’obstacle, ou l’enlève quand il ne peut le franchir. 14 Je m’endormis au milieu de chimères souriantes; mon sommeil fut bienfaisant; quand je m’éveillai vers onze heures, ma chambre me parut enchantée. Le soleil essayait de m’envoyer quelques-uns de ses rayons joyeux; mille rumeurs s’élevaient du sein des rues, mais ce n’était pas ce bruit de la veille, étourdissant, fatigant, mêlé de notes aiguës, de clameurs douloureuses, c’était un vaste concert plein de force et d’harmonie, la grande ville au travail. Je me levai à la hâte, brûlant de voir Paris dans sa fiévreuse activité; je ne le redoutais plus : au contraire, il me tardait d’aspirer son souffle puissant, de saisir le sein toujours gonflé où s’alimentent le génie défaillant, l’espérance lasse d’attendre. Arthur Buies Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 9 PARTIE C : INTÉGRATION DE LA LECTURE : QUESTION DE SYNTHÈSE Valeur : 10 % Durée suggérée : 20 minutes DIRECTIVES : Réponds à la question 37 dans ton cahier de réponses à la page portant le titre « Question de synthèse ». La note attribuée sera basée sur la pertinence des exemples et de l’explication fournie ainsi que sur la qualité de l’expression écrite. 37. Compare et analyse la relation que le personnage entretient avec la ville dans le poème « Héros entre quatre murs » à celle du personnage dans le texte en prose « Paris ». Directives pour ta réponse • Ta réponse doit avoir environ 250 mots. • Tu dois faire référence aux deux textes. Sinon, tu seras pénalisé. • Écris ta réponse dans le cahier de réponses. Utilise un stylo à encre bleue ou noire. Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 10 PARTIE C : INTÉGRATION DE LA LECTURE : QUESTION DE SYNTHÈSE Question de synthèse Classe de l’item : É1 : Faire preuve d’esprit critique Question 37 : Compare et analyse la relation que le personnage entretient avec la ville dans le poème « Héros entre quatre murs » à celle du personnage dans le texte en prose « Paris ». Réponse suggérée : Les élèves doivent expliquer que, dans les deux cas, la relation avec la ville est capitale parce qu’elle a une influence sur le vécu des personnages. Cette influence se vit de façon différente. Dans « Héros entre quatre murs », le personnage se réfugie dans l’imaginaire pour contrebalancer les effets déshumanisants de la ville. Elle est source d’aliénation et c’est dans l’imaginaire qu’il retrouve sa dignité d’être humain. Dans « Paris », malgré le fait que le personnage principal connaisse des débuts difficiles, la ville devient essentielle à son épanouissement. C’est là qu’il y puise sa motivation et son inspiration ainsi que les moyens pour réaliser ses ambitions. Citations et/ou Exemples pertinents Héros entre quatre murs Paris « Il est vrai que ceux que tu croises Paraissent vides de toute vie » (vers 9 et 10) « … je m’exilais à la recherche d’un nom… » (paragraphe 5) « Tu as l’impression d’étouffer D’être dans une bulle d’air » (vers 17 et 18) « … je me voyais déjà l’auréole de la gloire au front,… » (paragraphe 5) « Tu es ce que tu détestais Et bien sûr tu n’en es pas fier » (vers 19 et 20) « Je tombai donc dans cet immense Paris, et dès le premier jour j’eus peur. » (paragraphe 6) « Mais la ville annihile le soi En imposant la dépendance » (vers 23 et 24) « J’errai, et bientôt je sentis le vide,… trouvaient le long du chemin. » (paragraphe 7) « En conséquence tu t’enfuis Dans la fiction et dans les arts » (vers 25 et 26) « … l’horrible doute, précurseur du désespoir, saisissait mon esprit pour la première fois. » (paragraphe 8) « L’imaginaire est ton logis Au gré et au fil des histoires » (vers 27 et 28) « Oh! quelle désillusion m’avait surpris tout à coup,… » (paragraphe 8) « Tu deviens en ouvrant un livre Un héros entre quatre murs » (vers 31 et 32) « … de toutes les figures qui passaient, pas une qui me fut connue… » (paragraphe 8) « Un flot d’idées nouvelles bondit à mon cerveau; c’était l’énergie réparatrice et vigoureuse qui reprenait son empire. » (paragraphe 10) Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 11 « On doit être avide de connaître tout ce qui se passe en ce moment en Amérique;… » (paragraphe 12) « Et je me mis à travailler fiévreusement. » (paragraphe 13) « S’il en sort victorieux, l’avenir est à lui. » (paragraphe 13) « … mille rumeurs s’élevaient du sein des rues,… l’espérance lasse d’attendre. » (paragraphe 14) Cette liste ne contient pas toutes les réponses possibles. Les points seront attribués en fonction du contenu et de l’expression écrite. Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 12 Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation fait preuve d’une bonne maîtrise des conventions de la langue. commet quelques erreurs d’orthographe qui ne nuisent pas à la compréhension. Pas de réponse Aucune réponse n’est écrite dans l’espace prévu. fait preuve d’une maîtrise insuffisante des conventions de la langue. commet des erreurs d’orthographe qui sont fréquentes et qui peuvent nuire à la compréhension. transmet et organise les éléments des textes sans grande clarté et cohérence. ne démontre aucune intégration des idées, de l’information ou des preuves tirées des textes. démonte peu d’intégration des idées, de l’information ou des preuves tirées des textes. transmet et organise les idées et les éléments des textes avec une certaine clarté et cohérence. fait preuve d’une maîtrise acceptable des conventions de la langue. commet des erreurs d’orthographe qui peuvent distraire mais ne nuisent pas à la compréhension. L’élève justifie de façon simple sa compréhension à l’aide d’éléments des textes. L’élève justifie de façon partielle son interprétation à l’aide d’éléments des textes. L’élève justifie de façon adéquate son interprétation à l’aide de preuves pertinentes tirées des textes. démontre une bonne intégration des idées, de l’information ou des preuves tirées des textes. transmet et organise les idées et les éléments des textes avec clarté et cohérence. 1 Vue d’ensemble L’élève manifeste une compréhension limitée des textes ou de la question. 2 Vue d’ensemble L’élève manifeste une compréhension des textes ou de la question et fonde son interprétation sur certains éléments. 3 Vue d’ensemble L’élève manifeste une bonne compréhension des textes et de la question et fonde son interprétation sur des éléments explicites et implicites. 0 L’élève ne répond pas à la question. L’élève tient des propos choquants. transmet et organise les idées et les éléments des textes avec beaucoup de clarté et de cohérence. fait preuve d’une très bonne maîtrise des conventions de la langue. commet de rares erreurs d’orthographe qui ne nuisent pas à la compréhension. 4 Vue d’ensemble L’élève manifeste une très bonne compréhension des textes et de la question et fonde son interprétation sur des éléments explicites et implicites. L’élève justifie de façon étoffée son interprétation à l’aide de preuves pertinentes tirées des textes. démontre une très bonne intégration des idées et des éléments des textes. BARÈME DE NOTATION POUR LA QUESTION DE SYNTHÈSE FRANÇAIS LANGUE PREMIÈRE 12 Page 13 FRANÇAIS LANGUE PREMIÈRE 12 BARÈME DE NOTATION POUR LA COMPOSITION – TEXTE ARGUMENTATIF La composition valant six points est de qualité supérieure. 6 L’argumentation est sophistiquée. La position liée au sujet est clairement énoncée et tous les arguments présentés soutiennent cette position. Les arguments sont développés avec profondeur et clarté. Le texte est organisé de façon cohérente. Le vocabulaire est précis, varié et approprié au texte argumentatif. La maîtrise des conventions de la langue est excellente. Les rares erreurs ne nuisent pas à la compréhension. La composition valant cinq points est de très bonne qualité. 5 L’argumentation est très convaincante. La position liée au sujet est clairement énoncée et la plupart des arguments présentés soutiennent cette position. Les arguments sont développés avec clarté. Le texte est organisé de façon cohérente. Le vocabulaire est varié et approprié au texte argumentatif. La maîtrise des conventions de la langue est très bonne. Les quelques erreurs ne nuisent pas à la compréhension. La composition valant quatre points est de bonne qualité. 4 L’argumentation est convaincante. La position liée au sujet est énoncée et quelques arguments présentés soutiennent cette position. Les arguments sont développés de façon efficace. Le texte est organisé. Le vocabulaire est varié. La maîtrise des conventions de la langue est bonne. Les erreurs peuvent distraire mais ne nuisent pas à la compréhension. La composition valant trois points est suffisante. 3 L’argumentation est superficielle. La position liée au sujet est énoncée et certains des arguments soutiennent cette position. Les arguments sont développés de façon sommaire. Le texte est organisé. Le vocabulaire est adéquat. La maîtrise des conventions de la langue est acceptable. Les erreurs sont fréquentes et peuvent nuire à la compréhension. La composition valant deux points est insuffisante. 2 L’argumentation est simple. La position liée au sujet est vague. Le texte se résume à une liste d’arguments. Le texte n’est pas organisé. Le vocabulaire est familier. La maîtrise des conventions de la langue est insuffisante. Les erreurs nuisent à la compréhension. La composition valant un point est faible. 1 L’argumentation est à peine amorcée. La position est inexistante. Le texte n’est pas organisé. Le vocabulaire est familier. La maîtrise des conventions de la langue est nettement insuffisante. Les erreurs empêchent la compréhension. Le niveau «0 » est un cas exceptionnel. 0 • l’élève n’a fait aucun effort pour traiter le sujet ou il a simplement reformulé le sujet proposé ou l’information fournie; • l’élève n’écrit qu’une phrase; • l’élève tient des propos grossiers; • l’élève est hors-sujet. * Toute composition notée zéro doit être vue par le chef de section. Pas de réponse L’élève n’a écrit aucune réponse. Français langue première 12 – Examen A 1108 – Guide de notation Page 14