le rapport moral l`humanisation

Transcription

le rapport moral l`humanisation
48
janvier
> mars 05
le Journal de
l’humanisation
des prisons en Afrique
Chrétiens & sida :
le rapport moral
2
à la une
édit :
s mmaire :
1 ÉDITO
>>> par Blaise Noël
L ’ ASSOCIATION
Le rapport moral 2004
>>> par Jean-Louis Vildé
MILIEU
CARCÉRAL
Parce que l’avancée de la démocratie
passe aussi par l’humanisation des prisons
>>> par PRSF
I PERSONNALITÉ
Le secret
>>> par Corinne Chabaud
“”
TÉMOIGNAGES
La foi pour faire face
>>> par Benoît HERVIEU-LEGER
Il n’y a pas de jugement
>>> par Pierre SCHMIDT
SANTÉ
Nelson Mandela au service de la lutte
contre le sida à Bangkok
CHIFFRES
Rapport Onusida :
des faits et des chiffres en 2004
COMMUNIQUÉ
Appel à volontaires de l’ANRS
pour un essai de vaccin préventif
PORTRAIT
En souvenir de Pierre Mauriès
>>> par Marie-Ange Geoffroy
ACTUALITÉ
Revue de presse
>>> par Joseph Templier
« Les Églises au service de l’humain
dans une éthique libératrice. »
Voilà bien un programme qui n’est pas
seulement celui de Chrétiens & sida
mais qui est aussi le sien. S’y croisent
les thèmes de l’autorité et donc du
service des « valeurs » et de la liberté.
« Ce n’est pas, dit l’apôtre Paul, que
nous entendions régenter votre foi. Non, nous contribuons à
votre joie... » (2 Cor. 1,24).
L’administration pénitentiaire est un service de l’Etat sur
lequel nos regards sont fort attirés par les temps qui
courent : « il n’y a pas assez de prisons ! ». Le recrutement et
la formation des surveillants exigent de constants efforts ».
PRisonniers sans Frontières (PRSF) lance un cri d’alarme sur
la détention en Afrique, mais il devrait avoir un écho sur ce
qui se vit aussi en France. La resocialisation des détenus,
leur état de santé physiologique, mentale, spirituelle ne peut
nous laisser indifférents. « Quand donc nous est-il arrivé,
Seigneur, de te voir en prison ? » (Mat. 25,44)
L’étude publiée au début du mois de novembre par le
bulletin mensuel ‘’Populations et société‘’ (n°406) de l’INED
(Institut National d’Etudes Démographiques) souligne la
vulnérabilité face à l’infection par le VIH de personnes
déjà dans une situation précaire : les étrangers (6% de la
population ; 18% des personnes séropositives). Françoise
Rudetzki creuse sa douleur et s’en libère En la confiant aux
autres, et se fait confidente des souffrances d’autrui que
seul le partage allège.
Bernard Bassama stimule nos énergies à Chrétiens & sida.
La maladie l’a bousculé, ô combien, mais c’est ce sens
dessus dessous qui provoque chez lui une « conversion »,
un retournement qui le fait ce qu’il est aujourd’hui un
chrétien en quasi-perpétuelle action de grâce. « L’espérance
enracinée dans la gratitude » (Gustave Thibon, L’échelle de
Jacob).
Le sida nous lance toujours le même défi, celui d’une
solidarité, -ecclésiale, économique, politique- dont il faut
faire une réalité concrète par l’accompagnement, l’écoute, le
partage du parcours, fut-il inévitable en tout un chacun que
provoquent les aléas de la vie.
SPIRITUALITÉ
Blaise Noël
Prières
>>> par Violette
Parole d’évangile
>>> par Joseph Templier
Qretrouvez le bulletin d’abonnement en page 16
erratum :
dans le numéro 47, le texte d’ouverture de l’Assemblée Générale
n’a pas été écrit mais lu par Jacques Gradt (contrairement à ce
que laisse à penser l’intitulé présent dans le sommaire).
l’association
Le rapport moral 2004
de Jean-Louis Vildé
L’épidémie de sida et l’infection par le VIH continuent de s’étendre
en Afrique, maintenant en Asie du sud-Est, en Inde, probablement
en Chine et plus près de nous en Europe de l’Est. En France, la
prévention marque le pas et 3000 à 5000 nouveaux cas sont
identifiés chaque année. Ce sont pour beaucoup des personnes
originaires d’Afrique, ou des Départements Français d’Amérique,
de jeunes homosexuels, moins souvent maintenant des personnes
contaminées par usage de drogues intraveineuses.
U
NE AUTRE PARTICULARITÉ, EN FRANCE,
c’est que près de la moitié des
patients sont à un stade déjà
avancé de la maladie lors de la
découverte de la séropositivité.
Bien sûr, les traitements antirétroviraux
efficaces, sans pour autant faire disparaître le virus et le risque de transmission,
permettent aujourd’hui à près de 50% des
patients de rester asymptomatiques, de
recouvrer une défense immunitaire suffisante et de voir la réplication du virus rester
à un niveau très faible. Cependant pour
beaucoup de personnes infectées, cette
situation est encore très lointaine et ceci
concerne particulièrement les situations de
précarité, de fragilité, qu’elles soient administratives, financières, psychosociales, très
fréquentes parmi la population infectée.
d’une mise en commun, sous la forme d’assises au cours de la même année.
2 - La voie est étroite
Ces assises et ce colloque apporteront un
cadre à notre parole et à notre message.
Les questions sur un sujet aussi sensible
sont nombreuses ; les réponses encore
incertaines ou nuancées. Au sein de notre
association, nous les croisons constamment
puisqu’elles ont une étroite relation avec le
sida et les patients qui nous sont proches :
Nous devons garder la liaison avec les institutions ecclésiales qui sont les nôtres, et
dont chacun de nous est partie intégrante
ou proche.
Comment notre association peut-elle
s’adapter à cette évolution du sida ? Quels
peuvent être ses points d’orientation ?
1 - Formuler et diffuser
notre message
Les principaux éléments de notre message
ont été rappelés avec force et parfois vivacité dans le rapport moral 2003 présenté
par Jean de Savigny, auquel je succède
et que je remercie pour son action et son
engagement.
4
Sans aucun doute, ce colloque, et les assises
qui le prépareront, permettra une meilleure
lisibilité du message de notre association,
en particulier pour nos Églises. Ce colloque
sera le lieu pour témoigner de ce qui nous
anime, pour redire nos préoccupations spirituelles et intellectuelles sur toutes ces
questions.
Dans une société marquée par la déchristianisation, nous devons à notre niveau et
sur les questions que nous connaissons,
nous efforcer de réduire le fossé qui s’installe entre la société et nos lieux d’Eglises. Après tout, ceux-ci sont capables de
retournement, d’évolution, sans s’éloigner
des valeurs essentielles qui depuis deux
millénaires ont été le principal fondement
de notre vie en société. Pensons aussi aux
générations futures, à ceux qui entrent
aujourd’hui dans la vie adulte et découvrent la rencontre de l’Autre et à ce que
nous devons leur transmettre.
3- Les moyens d’agir
Afin de mener à bien les missions spécifiques de Chrétiens & sida, notre association
doit se donner toutes les conditions de
succès et la possibilité d’un développement
durable.
Les moyens existent : locaux fonctionnels, journal de qualité, res-
;
La préparation d’un colloque « Chrétiens &
sexualité au temps de sida » qui se tiendra
fin 2005 doit nous mobiliser. Il sera précédé
d’une réflexion et de débats dans les
groupes locaux, qui fera l’objet ensuite
prévention, procréation et plaisir, relation
à l’autre, fidélité, etc. Nous souhaitons au
travers de ces journées de 2005 évaluer
comment ces interrogations interagissent
avec les valeurs chrétiennes, comment elles
s’inscrivent aussi dans l’évolution de nos
sociétés.
Ce dialogue n’est pas nouveau, il s’est
poursuivi ; il pourrait se renforcer tant
au niveau de responsables qu’au niveau,
dirions-nous, de la base, des paroisses,
des lieux de formation et d’enseignement,
des aumôneries, ou de nouvelles formes et
missions de communautés de Chrétiens.
milieu carcéral
sources humaines, et je pense en
particulier à notre Directeur, Chris
Lomon qui assure
avec Catherine
et Chrystelle une
permanence dans
les tâches essentielles à notre
fonctionnement
et à notre existence.
;
définition précise, claire pour tous, entre les
diverses instances de notre association qui
sont la vie
même de
l’association (siège,
Comités
élus ou désignés, groupes locaux),
devra être
reformulée
Je saisis l’occaen concersion d’un « audit
tation avec
» externe, coml’ensemmandité par notre
ble de l’asStand de Chrétiens & sida,
principal financeur, la Direction générale
sociation,
le 1er décembre à l’hôpital Bichat
de la Santé, pour initier avec vous une
de
façon
réflexion sur notre organisation interne et à réduire tout ce qui pourrait apparaître
le renforcement de notre cohésion. Une défraîchi, ou susceptible de flottement.
Donnons-nous les moyens pour agir individuellement, collectivement partout où nous
le pouvons. Il nous faut incessamment
expliquer, informer, débattre. Poursuivons
et développons nos actions de formation,
de partenariat avec les autres associations
de lutte contre le sida, malgré des difficultés parfois épidermiques.
Amplifions surtout notre solidarité avec
l’Afrique, restons vigilants sur la grande
précarité qui frappe trop de personnes,
soyons là où les besoins de libérer la
parole sont devenus vitaux, comme dans
les Départements Français d’Amérique où
nos actions, pourtant initiées récemment,
portent déjà des beaux fruits.
Jean-Louis Vildé,
Président
Pa rc e q u e l ’ a v a n c é e d e l a
démocratie passe aussi par
l’humanisation des prisons
Née en 1995, l’association PRisonniers Sans Frontières (PRSF)
s’est donné pour mission d’humaniser les prisons d’Afrique où
les conditions de vie misérables -facteurs d’infection par le VIHrivalisent avec celles des camps de réfugiés.
E
N
AFRIQUE,
les détenus
font
figure de
pauvres parmi les
plus pauvres. Dans
les prisons surpeuplées s’entassent des hommes aux corps
décharnés par la faim, parfois rongés
par la tuberculose ou tavelés par la gale.
Malnutrition, maladie, mortalité souvent
supérieure à celle enregistrée dans les
camps de réfugiés, s’ajoutent au poids
de la détention et contribuent à rendre
inhumaines les conditions d’incarcération.
C’est dans ce contexte difficile qu’a
choisi
d’intervenir
l’association
Prisonniers sans Frontières dont
l’objectif est d’humaniser les prisons
d’Afrique, par des interventions de
terrain comme par l’injection régulière
de fonds à destination des structures
pénitentiaires. Crée en 1995, par un
Français, Jacques Risacher, PRSF est
d’abord intervenue en Côte d’Ivoire.
Puis, forte de ce premier succès,
l’expérience s’est multipliée dans de
nombreux pays d’Afrique francophone,
au point que l’association est solidement
implantée aujourd’hui dans 6 de pays
(Burkina Faso, République de Côte
d’Ivoire, Togo, Bénin, Niger, Cameroun)
et présente dans 3 autres (Mali, Sénégal,
Congo Brazza).
Difficile, pourtant, d’humaniser le
quotidien des prisons quand tout est
à faire, que rien n’existe hormis quatre
murs et une cour centrale où hommes,
femmes et mineurs se tiennent assis
en cercle, sous le soleil comme sous la
pluie. L’étendue des besoins, pour vaste
qu’elle soit, est cependant susceptible de
réponses efficaces.
Pour assurer au mieux le but qu’elle
s’est fixé, l’association distingue ainsi
dans son action les opérations revêtant
un caractère d’urgence et les autres
nécessitant un travail de plus longue
haleine.
Cours d’alphabétisation pour les mineurs
Répondre aux besoins d’urgence des
détenus c’est par exemple permettre
à des sortants de prisons de rejoindre
leurs familles en prenant en charge le
transport jusqu’au village d’origine.
Dans des conditions d’extrême pauvreté,
un simple titre de transport peut
éviter à d’aucun de retomber dans la
délinquance. Et c’est par le biais d’une
création originale, les équipes de
soutien, que PRSF finance de telles
initiatives.
5
milieu carcéral
;
Comment l’association
agit-elle ?
Établies en France, les équipes de soutien
fédèrent un groupe de personnes qui
chaque mois réunit 80 € afin de parrainer
une équipe terrain de PRSF (visiteurs de
prison locaux bénévoles). Cette équipe terrain utilise ce budget pour répondre aux
besoins les plus urgents des détenus.
À plus long terme, dans les 70 prisons où
PRSF intervient, l’accent est prioritairement
mis sur l’amélioration de l’apport nutritionnel des détenus, dont la ration journalière
est proche du néant.
Ainsi les prisonniers se contentent-ils d’une
cuillère à soupe de maïs en grain mélangée
à une cuillère à café de haricot par jour, le
budget alloué à la nourriture étant en moyenne estimé à 1 franc CFA par jour et par
détenu. Grâce à l’action de PRSF, des jardins
le principe de non dénonciation auquel elle
s’astreint.
C’est à ce seul prix que l’association peut en
Regardez-moi
intérieur de cellule
effet espérer opérer
durablement dans
les prisons africaines. « La dénonciation,
explique-t-on au siège de PRSF, n’est pas
notre rôle », tout en reconnaissant effectivement qu’il est important de mettre le
doigt sur ce qui ne va pas.
Une démarche pragmatique qui se comprend aisément au regard
de la spécificité africaine.
D’abord, il n’est possible
d’intervenir sur les sites
que par la constitution de
réseaux de collaboration,
ce qui interdit de stigmatiser d’emblée la situation
dans tel ou tel pays. Ensuite,
parce que le plus souvent
ce n’est pas le manque de
volonté des autorités qui est
en cause, mais le manque
de moyens financiers. Ainsi
Irrigation et création de jardins maraîchers ayant pour plusieurs pays, qui se sont
objectifs : la lutte contre l’oisiveté, l’amélioration de la ration dotés d’un arsenal juridique
prenant en considération les
alimentaire et la formation professionnelle des détenus.
droits des détenus, ne peumaraîchers ont vu le jour dans les prisons, vent les appliquer faute de moyens.
ainsi que des élevages, qui permettent
d’augmenter les rations.
Au Bénin, il existe une loi prescrivant de
D’autres interventions concernent le ne plus incarcérer les mineurs, mais de
volet médical et sanitaire : en prison, les les envoyer en centre de formation. PRSF
infirmeries sont rares, le personnel médical tente actuellement de rassembler les fonds
exceptionnel et les quelques médicaments nécessaires à la réalisation d’une projet
obtenus le sont par les bons offices des reli- d’alternative à la détention des mineurs au
gieuses. Pour être à même de dispenser des Togo, Bénin et Niger en partenariat avec
soins aux détenus, la création d’infirmeries des associations locales.
est donc indispensable.
Dans l’esprit de collaboration avec
l’administration pénitentiaire, des guérites et des bancs sont construits pour les
surveillants, habituellement contraints à
rester debout. Cette amélioration de leurs
conditions de travail, obtenue à peu de
frais (quelques planches et de la tôle), les
gardiens savent qu’ils la doivent aussi aux
détenus auprès desquels intervient PRSF.
6
Si vous souhaitez soutenir les
actions de PRisonniers Sans Frontières,
merci d’adresser vos dons à :
PRisonniers Sans Frontières
43, rue d’Aubervilliers
75018 PARIS
Pour en savoir plus sur les actions
menées par l’association, devenir
bénévole ou créer une équipe de soutien :
Tel : 01 40 38 24 30
Fax : 01 40 38 30 41
Mail : [email protected]
Site : www.prsf.net
De ce corps contaminé,
ne voyez pas que l’ombre d’un virus.
Regardez-moi,
apprenez à me regarder
et peut-être alors
verrez-vous ce que je suis.
Je suis un homme,
un être unique
comme chacun de nous.
J’ai des idées à exprimer,
des projets plein la tête,
un travail où je me sens utile.
J’aime et je pense être aimé.
J’ai parfois des jours de désespoir.
Qui n’en a pas ?
Mais je veux vivre, profiter du soleil,
de la beauté de la nature.
Tout n’est pas rose.
Je sais bien qu’aujourd’hui encore
ma vie ne tient qu’à un fil.
C’est fort de ce réalisme
que je me bats.
Et si parfois
tout est trop insupportable,
j’ai encore un peu d’espoir,
de forces et d’envies
pour croire en toi, Dieu,
juste et triomphant du mal.
Action de grâce
Le bonheur...
tient vraiment à très peu de choses.
Mais avant... je ne savais pas
que le plus beau des spectacles
pouvait être celui du soleil...
Avant... je n’avais jamais vu
la nature aussi resplendissante...
Tant de variations de couleurs,
les feuilles, la rosée, les fleurs
et tous ces animaux.
J’entendis le chant
le plus merveilleux.
;
Et c’est peut-être là la clé du succès rencontré par l’association : permettre à tous, et
non pas seulement aux détenus, de bénéficier de sa présence.
Mais un autre élément contribue à la
réussite de Prisonniers sans Frontières,
~Prière~
personnalité
Le secret
;
Une prière du fond de moi
montait vers Dieu :
merci, Seigneur !
Avant... le sida...
je ne savais pas
ce que pouvait vouloir
dire la Vie et être en vie...
Avais-je besoin de ce virus pour savoir
que chaque seconde compte ?
Rire avec les enfants, souffrir... aimer...
En remercier Dieu,
qui aurait cru que ce soit possible ?
Et pourtant...
Merci, Seigneur, de ce bonheur.
La fondatrice de SOS Attentats, Françoise
Rudetzki, n’a pas simplement été victime
de la violence aveugle, le terrorisme. Deux
autres catastrophes lui sont tombées dessus :
la shoah et le sida. Ce trio, c’est la triple
peine qu’elle raconte dans un livre éponyme.
A 55 ans, après près de soixante opérations
chirurgicales pour reconstruire son corps
meurtri, elle témoigne de la souffrance, de
l’engagement pour les victimes d’attentats
et de la vie avec le virus.
H
Entre inquiétude
et espérance
Seigneur,
je veux noyer mon inquiétude
dans la prière
qui est source de Vie
et d’Espérance !
Je veux vivre de ton Amour
Pour faire vivre,
rayonner ta Lumière
dans le cœur de mon enfant,
dans le cœur
de tous tes enfants !
Au doute,
je veux opposer la confiance !
Accorde-moi, Seigneur,
ton aide pour devenir ton pèlerin.
Armée de ta force,
je veux vaincre la peur du sida
dans le cœur des angoissés !
Leur transmettre l’espérance !
La certitude de leur victoire !
Leur apprendre à abandonner
le passé à ta miséricorde,
le présent à ta fidélité,
l’avenir à ta divine
Providence !
Violette
(mère d’un fils
en trithérapie),
Claire Demeure
OSPITALISÉE PENDANT DE LONGS MOIS, EN
1984, Françoise Rudetzki écoute
la radio. A cette époque, il y est
souvent question de sida et, déjà,
des hémophiles contaminés. L’intuition
se fait jour : massivement transfusée
après 1’attentat, elle est persuadée d’être
séropositive. Il lui faut batailler avec ceux
qui la soignent pour subir un test. En
novembre 1984, son médecin, Thierry Judet,
s’assoit pour la première fois sur le bord de
son lit, pour lui annoncer le résultat : positif.
« Cet instant capital me parait comparable
au moment où la bombe a explose dans le
Grand Vefour », écrit-elle dans son livre.
Mais cette femme de caractère, pour
protéger sa fille et ses parents, garde
le secret. « C’est vrai que j’ai parfois été
tentée de le révéler, explique-t-elle. A la fin
des années 1980, je fréquentais souvent
des dîners au cours desquels on entendait
des choses hallucinantes. Des remarques
homophobes, des blagues douteuses.
C’était aussi
l’époque où Le
Pen parlait des
sidatoriums.
J’avais parfois
envie d’exploser, de dire a
ces gens : ‘’ Regardez, je suis
a votre table
et j’ai le sida,
cette maladie
n’est pas ce que
vous croyez. ‘’ »
En 1991, Françoise Rudetzki
apprend qu’elle a
développé la maladie. Ses parents
sont morts sans
savoir, comme elle
le souhaitait, mais
il lui faut parler a sa
fille Deborah, âgée
de 17 ans. « On
ne savait pas alors
comment marcheraient les traitements. Je pouvais très vite
aller mal, contracter des maladies opportunistes : je lui devais la vérité... L’épée
de Damoclès, au-dessus de ma tête, s’est
faite plus présente.»
Même lourds et fatigants, les traitements,
des bithérapies, puis des trithérapies lui
ont laisse la vie sauve. Il lui faut seulement
aller les chercher régulièrement à la
Pitié-Salpêtrière, au sous-sol, au terme
d’un parcours maladroitement fléché
« la morgue ». « Si j’ai décidé de révéler
que je suis malade, c’est aussi parce que
j’imagine qu’il y a en France des centaines
de gens qui, comme moi, ont contracte le
sida par une transfusion. S’ils faisaient un
test, ils pourraient se faire soigner.
C’est une chance, en France, de disposer
de médicaments. Et moi, moyennant ces
soins, je vais bien », lâche-t-elle, soudain
joyeuse.
Extrait de l’article de
Corinne Chabaud,
La Vie n°3049
(5 février 2004)
7
témoignages
Bernard Bassama :
La foi pour faire face
Atteint du sida il y a dix ans, Bernard Bassama a quitté le Cameroun
pour la France où il poursuit son traitement depuis janvier. S’il survit
grâce à la trithérapie, cet ingénieur de 45 ans dit avoir retrouvé la foi
dans sa lutte contre la maladie. Membre de l’association Chrétiens
& sida, il milite contre la discrimination dont sont encore victimes
les séropositifs.
Q
UAND
J’AI
appris que
j’avais le
sida, j’ai
tout de suite rédigé
mon testament. Je ne
pensais qu’à la mort.
Je fuyais le regard des
autres. » Une décennie
plus tard, Bernard Bassama esquisse un
sourire en confiant qu’au foyer de Sarcelles
(Val-d’Oise) où il réside actuellement «
la femme de ménage a encore peur d’un
mouchoir que j’aurais pu laisser traîner ».
Raconter l’anecdote avec légèreté vaut
déjà une petite victoire pour un homme
qui, lorsqu’il apprit la nouvelle de sa
séropositivité, ne se donnait « guère plus
d’un an à vivre » et vivait la maladie comme
une condamnation morale. Mais Bernard
reste lucide, habité du devoir de prévenir
des illusions générées par l’amélioration des
traitements. « La maladie n’est plus taboue.
On en parie. La discrimination envers les
malades a diminué, mais trop souvent
parce que les gens s’imaginent qu’on
peut aujourd’hui guérir du sida.» Or, non
seulement les séropositifs ne sont pas tout
à fait à l’abri du rejet, mais les traitements
demeurent inaccessibles à la plupart des
individus contaminés, en premier lieu sur le
sol africain dont Bernard est issu. C’est le
message qu’il s’apprête d’ailleurs à réitérer
le 1er décembre dans le cadre de la Journée
mondiale contre le sida.
Une vie brisée
8
« Officiellement », car les circonstances
vont évidemment compromettre la carrière
que Bernard espérait. Tout comme sa vie
de famille. En 1995, Bernard, déjà père
de trois enfants, prend une épouse qui
lui en donnera deux autres. Ces instants
de bonheur lui font oublier les fièvres
et les diarrhées qui le frappent depuis
deux ans. « J’ai commencé à tomber malade il y a dix ans », souligne-t-il par une
formule qui trahit sa volonté d’alors de ne
pas même envisager qu’il puisse s’agir de
cette maladie-là. « A l’époque, les médecins
avaient pratiqué un examen sanguin mais
sans m’en donner le résultat. A ma sortie
d’hôpital, ils m’ont demandé d’effectuer un
test de confirmation, j’ai accepté, mais je
n’ai pas eu le courage d’en prendre connaissance. » Bernard met quatre ans avant de
savoir la vérité. « En 1997, égrène-t-il avec
ce souci d’exactitude mâtiné de son goût
du mot juste, j’ai rechuté. C’est là que j’ai
su que j’avais le sida. J’ai immédiatement
demandé que ma femme et mes enfants
passent un test, qui a heureusement révélé
qu’ils n’étaient pas infectés. J’ai remercié
Dieu pour cela. »
Sentiment d’exclusion
Mais le ciel est-il vraiment avec Bernard,
qui voit sa femme craquer et partir au bout
d’un an avec les enfants et les économies
du ménage ? « Je me suis retrouvé seul,
incapable de payer un traitement aux
anti-rétroviraux qui était encore rare et
donc cher, aux alentours de 5 000 francs
français. C’est aussi là que j’ai appris ce
qu’était le rejet. La société camerounaise
refusait encore dans sa majorité d’aborder
le sujet. Le gouvernement a pris trop tard
conscience de la gravité de la situation.
» Et certains discours n’ont pas aidé. Par
exemple, celui du pape, qui ose prêcher
l’interdiction du préservatif devant une
population contaminée au tiers. « J’aurais
aimé qu’il prône l’usage du préservatif si
vraiment on ne peut pas se retenir [sic],
regrette Bernard. Mais les prêtres de base,
comme les pasteurs, le font à sa place. »
Et Bernard s’estime redevable à l’égard des
cléricatures,nonseulementdes’êtreemparé
du plus grave problème de santé publique,
mais de l’avoir, lui, sorti de son isolement.
« Ce sont les milieux chrétiens qui m’ont
encouragé à parler de ma séropositivité.
A ma famille, qui a dans l‘ensemble plutôt
bien réagi. A la télévision camerounaise,
où j’ai été invité à m’exprimer. Et à mes
employeurs, qui ont accepté d’assumer les
frais de traitement. »
Or, le virus ne se laisse pas si facilement
dompter aux anti-rétroviraux. Cinq ans de
traitement, dont deux à la charge de
la Société d’électricité du Cameroun,
;
Né en 1959 à Douala, la capitale économique
du Cameroun, dans une famille de l’ethnie
Bafia, Bernard est l’aîné d’une (très) nombreuse fratrie de 17 enfants. « Je ne
sais pas quel âge doit avoir le petit
dernier. Je crois qu’il a dix ans », glisse-til, non sans avoir précisé que ses parents
ont eu ensemble sept enfants, avant que
son père n’élargisse le clan avec une autre
femme. Un catholicisme fervent unit tout ce
petit monde et Bernard se destine au petit
séminaire dès la classe de sixième. « Je l’ai
suivi pendant deux ans, mais en fait je ne
voulais pas être prêtre, je me suis même un
peu détaché de la foi par la suite, avant de la
redécouvrir quand j’ai su que j’étais atteint
du sida. C’est maintenant que je comprends
ce que m’ont apporté ces années-là. » Avant
de revenir à la foi, Bernard fait un crochet
par la science. A vingt ans, il quitte Douala
pour Yaoundé, la capitale politique du pays,
et y entame ses études d’ingénieur. 11 les
poursuit à l’école polytechnique de Montréal,
à partir de 1982 et pour trois ans. « A mon
retour au Cameroun, j’ai été embauché
par la Société d’électricité nationale, qui
m’emploie toujours officiellement. »
témoignages
;
aboutissent à une nouvelle impasse.
« Un génotype a révélé que je
devenais réfractaire aux molécules,
raconte Bernard. En octobre 2002, il a
fallu tout arrêter. » Par « chance », les
trithérapies, qui conjuguent la contention
du virus et la prévention de maladies «
opportunistes », ont fait dans l’intervalle
leur apparition.
Une ‘‘renaissance‘‘
Le traitement reste, encore à ce jour, hors
de portée d’une bourse camerounaise.
Bernard peut néanmoins compter sur son
généreux employeur et s’installe en janvier
en France, d’où il poursuit son long arrêt
maladie. Le traitement est lourd. « Vingtcinq comprimés et deux injections par jour.
Une telle dose pourrait me renvoyer en
permanence à la conscience d’être atteint
d’une maladie incurable. Je sais bien
qu’une maladie opportuniste peut surgir
et m’emporter. Mais la foi chrétienne
me donne chaque jour envie de lutter.
La maladie me l’a fait retrouver. J’ai le
sentiment de comprendre vraiment ce que
représente la valeur d’une vie. »
Fort du sentiment d’avoir la sienne devant
lui, Bernard dit aussi avoir retrouvé un
« chez-lui » dans le milieu militant. « J’ai
rejoint Chrétiens & sida il y a deux mois,
via l’association Aides. Je me suis senti en
famille. » Le sentiment d’exclusion a donc
cédé au prix d’années de lutte contre la
Il n’y a pas de
maladie, dont l’antidote se fait attendre.
Bernard estime qu’une partie du combat
est presque gagnée. Presque. « Car ce
sont souvent les malades eux-mêmes
qui nourrissent ce sentiment d’exclusion,
en se marginalisant de leur propre fait.
Cette tendance existe encore et il faut en
finir. C’est ce que j’attends de la prochaine
Journée mondiale. » On peut supposer que
cette tendance disparaîtra complètement
du jour où le remède aura enfin été trouvé.
En attendant, on peut regretter qu’après
une forte période de médiatisation la prévention contre la maladie se limite de plus
en plus à une seule journée mondiale.
Benoît HERVIEU-LEGER,
Réforme
27 novembre 2003
jugement
Martine, 36 ans, atteinte du VIH, est suivie depuis sept ans par
l’association œcuménique Chrétiens & sida.
E
LLE NE S’ALIMENTAIT PLUS. ELLE N’ALLAIT
pas bien. Elle a alors appelé
Evelyne, sa sœur, atteinte «
du même mal » : le virus de
l’immunodéficience humaine (VIH). Son
conseil ? Appeler Aides. Martine a donc
contacté l’association de lutte contre le
sida. « Ils m’ont proposé une journée
pour décompresser...
Mais ce n’était pas le genre de soutien
que je cherchais, explique-t-elle. Je
voulais qu’on puisse me responsabiliser
par rapport à ma
vie. » De nouveau,
elle a appelé sa sœur.
« Elle m’a dit qu’elle
faisait partie d’une
association que je
ne connaissais pas :
Chrétiens & sida.
Et m’a proposé de les contacter...
Deux jours après le coup de téléphone de
ma sœur, l’association m’a rappelée, se
souvient-elle, et m’a proposé de venir me
chercher pour me faire aider sur Quimper
(Finistère). » C’était il y a sept ans.
;
Evelyne suivra alors un traitement. Et sur la
route de cette maladie «encore aujourd’hui
assez honteuse», se fait accompagner
par Marie-Thérèse, de Chrétiens
& sida - Quimper. Reçoit une
C
’ÉTAIT LA PREMIÈRE FOIS QUE J’ÉTAIS SOLLICITÉE
pour participer à Solidays qui
m’était inconnu. J’avais pris connaissance
de l’organisation de ce festival, du nombre
d’associations qui militent contre le sida,
des artistes qui y étaient présents.
J’étais impressionnée par le nombre
de bénévoles qui s’y trouvaient et de
festivaliers que Solidays attirait.
A l’arrivée dans le village associatif, j’ai
tout de suite trouvé ma place au stand
de Chrétiens & sida. Nous nous sommes
présentés.
Faire connaître l’association, distribuer
des préservatifs, être à l’écoute des
jeunes et de leur questionnement sur
la religion et le sida : cet univers m’a
aussitôt paru familier.
Pour moi qui suis concernée car je suis
séropositive depuis 17 ans, cela m’a
soulagée de constater que dans le monde
entier il y a des associations qui militent
contre le sida.
Que malgré les milliers de kilomètres
nous séparent, on se tient tous la main
pour lutter contre ce fléau qui décime
des populations. Je parle de l’Afrique
en particulier et d’autres pays qui
disposent de faibles moyens.
Au stand de Chrétiens & sida, j’ai
fait la connaissance d’un homme qui
proposait des massages. Il expliquait
que ces massages étaient pratiqués aux
personnes en fin de vie pour soulager
leurs douleurs musculaires, un des effets
à long terme de la maladie.
Je me sens très proche des gens en
général et j’étais très intéressée par sa
pratique de massage.
Attentive à ses gestes, cet homme a
vite perçu mon grand intérêt. Alors, tout
en guidant mes gestes, il m’a laissé
effectuer ce massage. Puis, il m’a passé
le relais.
Cela m’a plu et m’a prouvé qu’un
professionnel pouvait me faire entière
confiance à moi, une novice.
Je n’ai retiré que des choses positives
de ce festival. Le respect, la découverte,
plus de connaissances, l’humanité et la
solidarité. Je remercie Chrétiens & sida
de m’avoir fait partager avec eux ce
moment.
Martine QUEVERT
9
santé
;
trouvais pas dans ma famille une oreille
attentive », confie-t-elle.
« À l’association, on va m’écouter, il n’y a
pas de jugement... ils sont très tolérants,
on ne nous décourage jamais. »
allocation de la Commission
technique d’orientation et de
reclassement professionnel (Cotorep) de
son département, prend un appartement
à Saint-Yvi, près de Quimper - elle habitait
avant en llle-et-Vilaine, avec son mari et
sa fille. Depuis, elle vit entre sa maladie,
l’association - qui existe depuis treize ans
- et les séances de prévention auxquelles
elle participe.
Et Dieu ? Elle qui fut « pendant cinq ans
chez les Témoins de Jéhovah » parce
qu’elle a « cru y trouver une famille »,
explique qu’elle n’est pas « chrétienne
dans la foi » : « Ce sont les gestes
de tous les jours qui font qu’on est
chrétien. » Sa vie n’est « pas facile à
vivre tout le temps », marquée par « la
fatigue, les médicaments tous les jours,
et les effets secondaires qui minent
la vie quotidienne ». Elle ne pense pas
trop à l’avenir, au développement de la
maladie.
À Chrétiens & sida - Quimper, ils sont une
trentaine de malades à se retrouver. Une
fois par mois, ils rencontrent un prêtre. «
On réfléchit sur le pardon, le secret de la
maladie, la souffrance... »
En outre, Martine joue dans une troupe de
théâtre Horizon nouveau, émanant d’une
association pour les gens défavorisés et
cofinancée par Chrétiens & sida.
PIERRE SCHMIDT,
la Croix
(22 juin 2004)
Mais elle n’a plus aucun contact avec sa
famille, excepté sa sœur Evelyne. « Je ne
Nelson Mandela au service de
la lutte contre le sida à Bangkok
C
HALEUREUSEMENT
APPLAUDI
À
BANGKOK, l’ancien président
sudafricain Nelson Mandela
a mis jeudi sa notoriété
internationale au service de la lutte
contre le sida en abordant un thème
peu traité à l’avant-dernier jour de la
15ème Conférence sur la pandémie : la
tuberculose.
La présence charismatique de M.
Mandela, qui a provoqué une ruée de
photographes, a allégé quelque peu
le climat d’une conférence assombrie
par une polémique persistante sur la
politique antisida des États-Unis et
diverses manifestations bruyantes
contre
les
grands
laboratoires
pharmaceutiques - presque tous
américains.
10
« La tuberculose veut trop souvent dire
une peine de mort pour les malades du
sida », a dit M. Mandela, qui a lui-même
contracté la maladie lors de ses longues
années de prison à Robben Island.
Sur les 38 millions de personnes
infectées du VlH/sida sur la planète,
14 millions souffrent de tuberculose
maladie qui accélère l’emprise du virus
du VIH sur l’organisme.
M. Mandela, qui avait annoncé en juin
une réduction «significative» de ses activités pour se consacrer à sa famille et
à l’écriture, reste très impliqué dans la
lutte contre le sida qui ravage notamment l’Afrique subsaharienne et parti-
culièrement
son propre
pays,
qui
compte le
plus grand
nombre de
personnes
infectées au
monde (environ 5 millions).
I l d o i t
s’exprimer
jeudi à la
projection
d’un film sur un concert humanitaire
qui a eu lieu en décembre dernier au
Cap pour lever des fonds pour la lutte
antisida.
Ce concert faisait partie de la campagne
de Mandela baptisée 46664 -matricule
de Mandela en prison sous le régime
d’apartheid- et qui appelle tous
les gouvernements à déclarer l’état
d’urgence contre le sida.
Mercredi,
le
responsable
;
Se déplaçant avec quelque difficulté
mais s’exprimant avec force, M.
Mandela, qui aura 86 ans dimanche,
a participé à une conférence de
presse sur la tuberculose, qui s’associe
fréquemment au sida chez les malades
des pays pauvres.
« La tuberculose reste délaissée.
Aujourd’hui nous appelons le monde
à reconnaître que nous ne pouvons
pas lutter contre le sida à moins de
nous attaquer aussi à la tuberculose »,
a-t-il dit avant que la fondation de
l’Américain Bill Gates n’annonce un
plan de financement de 44,7 millions
de dollars pour aider à combattre cette
maladie opportuniste.
chiffres
« quand 8.000 personnes meurent
chaque jour du sida, la division est un
luxe que nous ne pouvons pas nous
offrir ».
« A ce stade, l’erreur la plus grave que
nous pourrions faire est de laisser la
pandémie nous diviser », avait déclaré le
représentant américain Randall Tobias,
Washington reste toutefois le premier
contributeur au monde et le président
George W. Bush a promis 15 milliards de
dollars à la lutte antisida au cours des
cinq prochaines
années. Mais ce
plan n’a vraiment
démarré qu’en
février 2004, et
très lentement.
;
américain de la lutte contre le
sida avait lancé un appel à l’unité
après que Washington eut été
accusé par l’Europe -emboîtant le pas
au président français Jacques Chiracde préférer des accords bilatéraux au
détriment des accords multilatéraux
qui permettent l’accès des malades aux
génériques bon marché dans les pays
en développement.
Le secrétaire général de l’ONU Kofl Annan
avait lui aussi critiqué les Etats-Unis
pour leur manque d’empressement à
allouer des fonds à la lutte contre le
sida.
L’ancien candidat
démocrate
à la Maison
blanche, John Kerry, avait promis un
doublement des fonds américains au
sida, à la tuberculose et au paludisme
s’il est élu en novembre, expliquant que
Washington « doit s’engager à mettre
tout le poids du leadership américain
dans la lutte contre les maladies les
plus mortelles en Afrique, y compris le
sida ».
Jeudi 15 juillet 2004,
BANGKOK (AFP)
La Journée Mondiale de la tuberculose
aura lieu le 24 mars.
Plus d’informations sur les manifestations
organisées et cette maladie en général :
- www.stoptb.org
- www.who.int/topics/tuberculosis/fr/
Onusida :
des faits et des chiffres en 2004
Rapport
À l’occasion de la journée du 1er décembre, dédiée à la lutte
contre le sida, rappelons quelques chiffres et faits importants.
L
ES
DÉP EN SES
MON DIALES
SUR
LE
été multipliées par
15, passant de 300 millions
de dollars en 1996 à un peu
moins de 5 milliards de dollars en
2003, ce total couvrant moins de la
moitié des besoins estimés pour 2005
dans les pays en développement.
Selon des estimations des coûts,
quelque 12 milliards de dollars
seront nécessaires d’ici 2005 et
20 milliards d’ici 2007, pour la
prévention et la prise en charge
dans les pays à faible et moyen
revenus.
SI DA ONT
Selon l’Organisation Mondiale de
la Santé (OMS), 9 personnes sur
10, ayant besoin d’urgence d’un
traitement du VIH, n’en bénéficient
pas. Entre 5 et 6 millions de
personnes mourront dans les pays
en développement au cours des
2 ans à venir, si elles ne sont pas
placées sous antirétroviral.
Les femmes
Les jeunes
Les femmes représentent maintenant
près de 50% des personnes infectées
dans le monde (contre 41% en 1997), et
57% en Afrique subsaharienne.
Les 15-24 ans constituent la moitié de
toutes les nouvelles infections au VIH
dans le monde.
Sur les dix millions de jeunes infectés
dans le monde : 6,2 millions vivent en
Afrique subsaharienne et 75% d’entre
eux sont des jeunes femmes.
Les orphelins
15 millions d’enfants de moins de 18 ans
dans le monde ont perdu un ou leurs
deux parents à cause du sida, dont 12
millions en Afrique sub-saharienne.
La prévention
Les programmes de prévention
atteignent moins d’une personne
11
chiffres
sur cinq parmi ceux qui en ont besoin.
En 2003, dans les pays à faible et
moyen revenus, seulement une femme
enceinte sur dix a bénéficié de services
de prévention de la transmission
mère-enfant du VIH.
Dans les pays riches, pour la première
fois depuis une décennie, on observe des
augmentations des contaminations.
Une prévention complète pourrait éviter
29 millions de nouvelles infections sur
les 45 millions prévues d’ici 2010.
Les préservatifs
L’ a p p r o v i s i o n n e m e n t a c t u e l n e
représente que 60% des besoins. D’ici
2010, 19 milliards de préservatifs seront
nécessaires pour prévenir l’infection par
le VIH et d’autres maladies sexuellement
transmissibles.
Paris, AFP
* Ressources documentaires :
- Site de l’Onusida : www.unaids.org
- Site de l’OMS : www.who.int/whr/fr
- Site de la Cité des Sciences :
www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/
science_actualites/media/4/14030/
QACTU_FLASH_FR.swf
* Dates importantes :
11 février 2005 : journée mondiale des
malades à Yaoundé.
L’ANRS lance un appel à
volontaires : ils participeront
au premier essai de vaccin
préventif contre le sida
A l’approche du 1er décembre, journée mondiale de lutte contre le
sida, l’Agence nationale de recherches sur le sida a lancé un appel
à volontaires pour participer à un nouvel essai de vaccin préventif
contre le sida. Ces volontaires participeront au premier essai
vaccinal de phase II jamais réalisé dans ce domaine en France :
‘‘l’essai ANRS VAC 18’’. Il s’agit également du premier essai de
phase II en Europe.
L
ORS DE SON DERNIER « APPEL À
volontaires », lancé en Juin 2001,
le Professeur Michel Kazatchkine,
Directeur de l’ANRS, déclarait :
« II y a urgence à mettre au point un
vaccin. L’épidémie de sida est encore loin
devant nous ». Trois ans après cet appel
qui a permis à l’ANRS de réaliser les
essais qu’elle avait annoncés (ANRS VAC
14, VAC 16 et VAC 17 -voir fiche 2), l’agence
rappelle que l’urgence est plus que jamais
d’actualité et lance un appel pour mener
son nouvel essai : ANRS VAC 18.
12
« Au dernier congrès international sur
le vaccin qui s’est tenu à Lausanne
en septembre dernier (Aids Vaccine 04),
notre « candidat-vaccin» a montré qu’il
permettait
d’obtenir
une
bonne
r é p o n s e
immunitaire
cellulaire »,
déclare le
D o c t e u r
Jean- Gérard
Guillet (Unité
445 Inserm),
respons able
du programme de recherche vaccinale
de l’Agence.
« Cela nous incite fortement à poursuivre
notre programme. ANRS VAC 18 est un essai
important car il va nous
permettre de déterminer
s’il est possible d’obtenir
une bonne réponse
immunitaire avec de
faibles
doses
d’une
préparation vaccinale »,
explique le Professeur
Michel
Kazatchkine,
Directeur de l’ANRS. « si
tel est bien le cas, les
répercussions seront
importantes pour le vaccin futur : une faible
dose permettra de vacciner davantage de
communiqué
;
personnes et à un coût moindre. Pour
les pays en développement, c’est une
donnée essentielle. »
ANRS VAC 18 est le premier essai vaccinal
contre le sida de phase II jamais réalisé
en France. Il s’agit également du premier
essai de phase II en Europe. Il nécessite
la participation de 132 volontaires. Il a
débuté en septembre 2004 : une trentaine
de volontaires membres du réseau de
l’ANRS « Volontaires pour un vaccin » vont y
participer. Une centaine de personnes sont
donc recherchées pour compléter cet effectif
et pour que l’essai puisse être mené à bien
dans les meilleurs délais. « Notre expérience
des précédents appels à volontaires montre
qu’avec nos critères de sélection, pour
recruter cent personnes, plusieurs centaines
de candidatures doivent nous parvenir.
L’ANRS y répond en envoyant un document
d’information et une fiche confidentielle à lui
retourner » explique le Professeur Yves Levy,
responsable de l’organisation des essais
vaccinaux à l’ANRS.
Le programme de
recherche de l’ANRS
PHASE I, PHASE II, PHASE III
Les essais de phase I sont menés sur des groupes de personnes séronégatives, à faible
risque d’être infectées par le VIH. Ils ont pour but d’évaluer la tolérance de l’organisme
aux préparations vaccinales et leur capacité à induire des réponses immunitaires.
C’est seulement quand un essai de phase I a montré qu’un produit est bien toléré et
induit des réponses immunitaires, dirigées contre plusieurs protéines du virus et persistantes, que le produit est évalué en phase II sur un plus grand nombre de personnes.
L’objet des essais de phase II est de déterminer les meilleures conditions d’induction de
réponses immunitaires.
L’efficacité de la préparation vaccinale à protéger contre l’infection ne peut être testée
dans un essai de phase III, mené sur des milliers de personnes, que lorsque les phases
I et II ont été concluantes.
réalisées par d’autres instituts et par les
industriels. Nous devrions disposer des
résultats des essais lancés depuis le dernier
« Appel à volontaires » et de ANRS VAC 18 - si
nous arrivons à le mener - d’ici fin 2006. Il
devrait alors nous être possible de prendre
une décision pour le lancement d’un essai
d’efficacité à large échelle de notre candidat
vaccin, en sachant que cette décision
nécessitera un consensus international. »
A ces essais réalisés en France par l’ANRS, il
convient d’en ajouter un autre qui a débuté
aux Etats-Unis en Mars dernier.
« Réalisé en collaboration entre le National
Institute of Allergy and Infectious Diseases
(NIAID) et l’ANRS, l’essai de phase l/ll HVTN
042/ANRS VAC 19 évalue chez 175 volontaires
américains la préparation vaccinale de
l’ANRS (lipopeptides + canarypox) et va
nous apporter également à l’échéance de
2006 des résultats indépendants sur notre
stratégie », ajoute-t’il.
L’ANRS a déjà réalisé quinze essais vaccinaux
de phase I depuis le lancement de son
programme de recherche, en 1992. Elle y
consacre 12% de son budget annuel.
Lancé il y a désormais 15 ans, le programme
de recherche sur le vaccin de l’ANRS repose
sur l’utilisation des lipopeptides. Les
lipopeptides sont constitués de fragments de
protéines du VIH (des peptides) et de lipides.
Les peptides sont, comme les médicaments,
synthétisés chimiquement et ne présentent
de ce fait aucun risque. Les lipides favorisent
la pénétration des peptides dans les cellules
immunitaires. Dans les essais vaccinaux, les
lipopeptides peuvent être utilisés seuls ou
couplés à des vecteurs viraux recombinants :
il s’agit de virus inoffensifs pour l’homme (le
plus fréquemment utilisé est le canarypox)
dans lesquels des gènes du VIH sont insérés.
L’injection de lipopeptides vise à induire une
réponse immunitaire de type cellulaire,
c’est-à-dire reposant sur la production de
cellules tueuses capables d’éliminer les
cellules infectées par le VIH. Ces cellules sont
appelées lymphocytes CD4 et CD8 (ou CTL).
Les essais réalisés jusque-là indiquent que
les lipopeptides sont des bons candidats
vaccins : ils montrent une bonne efficacité
en terme de réponse immunitaire cellulaire
et sont bien tolérés.
« Cette approche est celle qui a montré une
des meilleures performances jusqu’à présent
en terme de réponse cellulaire, explique le
Professeur Michel Kazatchkine. Elle s’inscrit
en synergie avec les recherches vaccinales
13
portrait
En souvenir de
Pierre Mauriès
Le groupe de Grenoble vous fait part de la mort de Pierre Mauriès,
membre fondateur et premier responsable du groupe Chrétiens &
sida de Grenoble, décédé le dimanche 12 décembre 2004 après
une courte maladie.
C
ERTA I N S PA R M I L E S
A N C I E N S D E N OT R E
association se
souviendront
sûrement de lui car,
membre actif de David et Jonathan dont
il a été président national pendant plusieurs années par la
suite, il avait par ticipé
à l’Arbresle aux premiers échanges et discussions qui devaient
aboutir à la fondation
de Chrétiens & sida en
avril 1991 et fut présent
aux assemblées générales qui suivirent.
Pierre, homme de conviction,
sensible
et
généreux, secret et
chaleureux, attentif aux autres et
par ticulièrement aux plus pauvre,
reste pour moi l’homme de la rencontre, toujours soucieux d’ouvrir
de nouveaux chemins, de favoriser
des collaborations et des échanges,
attentif aux besoins, aux soucis et
aux souffrances exprimés, et suffisamment créatif pour rechercher et
proposer des solutions nouvelles.
Engagé dès le début dans la lutte
contre le sida sur le plan personnel,
associatif et professionnel, il a été
à Grenoble et ailleurs un acteur
remarquable dans ce combat.
Ainsi, je rappellerai à titre d’exemple
la création de Libre Espace dans le
contexte dramatique des années
1984-85, avec la collaboration de
l’aumônerie de l’hôpital, de
14 Aides, de David et Jonathan et de
Relais 14, lieu
de présence
chrétienne
dans la ville.
Libre Espace,
c’était cette
demi-heure
par mois offer te à tous
ceux
que
la
maladie
concernait,
personnes
atteintes, familles, amis,
soignants, un
moment fait
de
silence,
de musique,
de lecture de
textes
dans
cet
espace
de recueillement que proposait Relais 14 dans
son sous-sol au coeur de la ville :
avec d’autres, Pierre avait su voir
et comprendre que le combat contre le sida devait mobiliser toutes
les forces humaines et spirituelles
de ceux qui y étaient engagés.
Notre prière mensuelle aujourd’hui
tire son origine et
prend sens à Libre Espace dont
nous ne manquons
pas de lire chaque
mois le texte introductif :
Parce que nous nous
sentons concernés
par le sida,
Parce que à travers la
vie, à travers la mort,
Nous cherchons ou nous avons
trouvé une dimension spirituelle
dans notre existence,
Nous sommes présentes, présents,
ensemble, ici, dans cet espace.
Faisons ensemble de ce moment un
temps de solidarité.
Faisons ensemble de cet espace un
signe d’espérance.
Après avoir beaucoup semé,
créé, construit, aimé, Pierre a
fini sa quête. Regardant derrière
nous, nous découvrons mieux ce
qu’il a appor té à notre groupe et
plus généralement à la lutte contre
le sida, regardant devant nous,
nous mesurons tout ce qu’il reste
à vivre et à faire pour poursuivre le
chemin qu’il a tracé.
Merci, Pierre. Ne nous oublie pas,
nous ne t’oublierons pas ; à Dieu.
Marie-Ange Geoffroy,
responsable du groupe de
Chrétiens & sida
de Grenoble
directeur de publication :
Jean-Louis Vildé
comité de rédaction :
Bertrand Dicale, Jacques Gradt,
Christiane Huraux, Stéphane
Lavignotte, Chris Lomon, Blaise
Noël, Jean-Marie Penet, Joseph
Templier, Marlène Tuninga
actualité
Revue de presse
Joseph Templier
réalisation : Chrystelle Trompas
n° de commission paritaire :
0 105 H 79593
imprimerie SIEP
77590 Bois le Roi
Reprise de
l’épidémie
À l’heure de
notre mort
Le courage
de parler
Quand
je
me
suis
adressé au Congrès sur
les traitements (Toulon
– Juillet 2004), j’ai fini
ma description de la
reprise de l’épidémie en
France par un souhait. Je
me suis tourné vers les
médecins, les infirmières,
les chercheurs et je leur ai
demandé d’avoir un peu
plus d’autorité.
L’idée même de la mort, de la
nôtre et de celle des autres,
nous est insupportable.
Alors, on la cache, on la
dissimule, on la masque.
Nous imaginons ainsi nous
protéger les uns les autres.
Nous nous trompons
Dans l’église d’aujourd’hui, il
y a beaucoup trop de silence.
Czelaw Milosz disait dans son
discours de réception du prix
Nobel : « Dans une pièce où
règne unanimement la conspiration du silence, une parole de vérité résonne comme
un coup de feu ».
ISSN 1267 - 8457
nous remercions
la SIEP
qui a offert
l’impression de
ce numéro de
chrétiens & sida
SIÈGE SOCIAL
30 rue Boucry - 75018 Paris
tél : 01 46 07 89 81
fax : 01 46 07 34 81
[email protected]
web : chretiens-sida.com
forum : chretiens-sida.com/forum/
GROUPES
OUEST
Quimper, Vannes, St Brieuc
NORD-EST
Charleville-Mézières,
Reims, Dunkerque, Nancy
CENTRE
Poitiers, Niort, Limoges,
Orléans, Angers
SUD / SUD-EST
Aix-en-Provence, Nîmes,
Avignon, Nice, Arles, Marseille,
Montpellier, Perpignan,
Toulouse
SUD-OUEST
Bayonne, Biarritz,
Bordeaux, St-Jean de Luz
ILE-DE-FRANCE
Paris, Seine-St-Denis,
Hauts-de-Seine, Val-de-Marne,
Yvelines, Seine-et-Marne,
Essonne
RHÔNE-ALPES
Lyon, Grenoble,
Saint-Étienne, Dijon, Chambéry
EUROPE
Belgique
Pour les adresses des groupes
ou celles des correspondants,
s’informer auprès de
l’association.
Si le sida a bénéficié
d’un état d’esprit de non
jugement louable, il est
temps que les médecins
usent de leur autorité
quand ils reçoivent des
séropositifs qui disent
qu’ils se protègent moins
ou des séronégatifs qui
admettent qu’ils prennent
des risques. Le médecin
est alors dans une position
unique de conseil et
d’écoute.
Ce silence ne nous protège
nullement. Non seulement il
ne nous protège en rien, mais
il est lui-même meurtrier.
Nous devons réapprendre à
donner sa place à la mort.
La mort est toujours un
scandale. Le passage de
la mort déchaîne toujours
l’angoisse, le déchirement,
l’incompréhension devant
l’inacceptable. Jamais on ne
s’habitue à la voir au fond
des yeux de celui ou celle
qui s’en va, et à qui on ne
peut que tenir la main avant
ce grand passage dont nous
ne connaissons rien ou
presque.
Mais il doit inter venir. Il
doit se montrer ferme.
Si les associations sont
muettes sur cette reprise
de l’épidémie, il faudra
bien que les médecins
s’engagent comme ils l’ont
fait au début de l’épidémie.
Ma rage sur la reprise de
l’épidémie ne me met pas
dans une colère froide. Je
suis engagé et ce n’est que
le début.
Être là simplement près
de lui, près d’elle. C’est
dans ces moments-là que
les choses parfois se font
beaucoup
plus
simples
qu’on ne l’imagine, quand,
dans la confiance et l’écho
d’une parole murmurée,
l’angoisse se dissipe pour
s ‘effacer, comme devant
une
surprenante
clarté
intérieure (Léon Burdin).
Didier Lestrade,
Journal de la
Démocratie Sanitaire
(Juillet-Août 2004)
Tiré de
Claude Goure,
Confidences. Bayard
(pages 187 et 190)
Fondamentalement, le
courage de parler s’enracine dans le courage
d’écouter. Osons-nous écouter ceux qui se sentent étrangers à l’Eglise ? Écoutonsnous ceux que leur vie a mis
en marge, parce qu’ils sont
divorcés, remariés ou homosexuels, ou vivant en concubinage ? Nous n’en aurons
le courage que si nous avons
écouté en silence la voix la
plus dérangeante de toutes,
celle de notre Dieu.
Si nous sommes capables de
nous tenir en silence devant
Dieu et d’entendre sa Parole, ressuscitée des morts,
alors aucun silence ne pourra nous retenir prisonniers
d’aucun tombeau.
Timothy Radcliffe,
Les sept dernières
paroles du Christ.
Cerf. (page 102)
15
parole d’évangile
Porteur de paix et homme libre
‘’ Dites : Paix à cette maison ! ‘’
‘’ Mangez et buvez ce qu’il y aura ‘’ (Luc 10, 1-12)
I
L Y A DU MONDE AUTOUR DE JÉSUS EN GALILÉE
quand, au début de sa mission,
il enseigne les matières d’être
correspondant à la volonté du Père
dont il est le messager. Il y a les Apôtres.
Et il y a des disciples séduits par son
enseignement.
C’est à soixante douze d’entre eux qu’il
demande d’aller porter la bonne parole
dans les villes environnantes. ‘’ 72 ‘’ n’est
pas un effectif dû au hasard. C’est un
nombre symbolique. Il évoque les soixante
douze nations qui, selon la Genèse,
peuplent la Terre entière. Manière, pour
Jésus, de signifier l’universalité de son
message destiné à toute civilisation et
toute culture.
Ces soixante douze missionnaires sont
choisis parmi le tout venant de ceux qui
accompagnent Jésus. Des ‘’ laïcs ‘’, diraiton aujourd’hui, investis, comme les Apôtres
du pouvoir de guérir, c’est-à-dire de venir
au secours des détresses humaines. Dans
toute rencontre, ils auront à témoigner
que Dieu s’est approché des hommes.
Mission à nous dévolue aujourd’hui.
A la manière qui convient à chaque
personnalité. A la manière surtout qui
convient à l’état d’esprit, aux centres
d’intérêt, à la sensibilité, à la culture de
celles et ceux avec qui la vie nous met en
contact. L’important est que quiconque
soit rejoint en son intime.
Jésus accompagne cet envoi d’une feuille
Oui,
de route dans laquelle je relève deux
consignes. La première : « Dans toute
rencontre, soyez des porteurs de paix. »
Que nous faut-il être pour porter la paix ?
Il nous faut tout simplement ‘’ Être ‘’.
Etty Hillesum, cette jeune fille hollandaise
qui, pendant la guerre, fait un étonnant
parcours intérieur, écrit dans son journal :
« Mon faire consistera à être. » Un tel
souci de l’être n’est pas indifférence aux
nécessités du temps. Mais, selon Mac Leod,
l’un de ses commentateurs, une quête
de stabilité intérieure, une recherche de
plénitude en réaction à l’effervescence et à
l’extrême dispersion de la vie. La militance
effrénée, l’immédiateté du geste, le
résultat à tout prix masquent le besoin de
reconnaissance qui ruine toute profondeur
et toute crédibilité. Être porteur de paix,
c’est privilégier la proximité, l’attention,
l’écoute, le service, la tendresse, bien
avant la parole ou l’action. Être artisan de
paix, c’est « être d’abord afin que le faire
devienne l’expression naturelle de ce que
nous sommes ».(1)
La deuxième consigne de Jésus est de
totale liberté. « Dans toute maison où
vous entrerez, mangez et buvez ce que
l’on vous servira ». Jésus abolit la bannière
interdisant aux Juifs de faire table
commune avec les impurs. Son disciple
se trouve libéré de toute contrainte
concernant les aliments. Dans sa mission,
il a avec quiconque, totale liberté de
rencontre et d’adaptation.
C’est en tout temps et en tout domaine
-y compris dans l’Eglise- que la pesanteur
institutionnelle et la rigueur des structures
ont vite fait d’étouffer toute spontanéité,
de tuer toute liberté d’action. Or, ce qui
importe, selon Jésus. Ce n’est pas d’être
conforme mais d’être authentique. Son
disciple devra se déterminer selon ses
constats, ses intuitions, ses convictions, sa
conscience devant l’angoisse d’un homme
de ce temps pour leur ouvrir un chemin
d’espérance. L’autonomie de pensée
et de pratique est, pour ses disciples,
enseignement de Jésus.
Deux mille ans plus tard, consigne toujours
d’actualité !
(1) cf. Mac Leod, Le souci de l’être.
La Vie – 23 sept. 2004
Joseph Templier
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