E - EQUATIONS DIFFERENTIELLES LINEAIRES D`ORDRE n A
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E - EQUATIONS DIFFERENTIELLES LINEAIRES D`ORDRE n A
E - EQUATIONS DIFFERENTIELLES LINEAIRES D’ORDRE n A COEFFICIENTS CONSTANTS Equation sans second membre On considère l’équation différentielle linéaire y (n) + a1 y (n−1) + · · · + an y = 0 . Ce qui suit permet de retrouver les solutions de cette équation en ramenant le problème à un système de n équations différentielles linéaires d’ordre 1. Si 1 ≤ i ≤ n, on notera bi = −ai et le polynôme P (X) = X n + a1 X n−1 + · · · + an sera le polynôme caractéristique de l’équation. Si l’on pose on a alors xn = y ′ =x x n−1 n .......... x′p = xp−1 .......... ′ x2 = x1 x′1 = b1 x1 + · · · + bn xn et l’on se ramène à résoudre l’équation différentielle Y′ =A·Y où A est la matrice b1 b2 . . . . . . bn 1 0 .. . 1 .. .. . . 1 0 (par convention les éléments omis sont nuls). E 2 On calcule det(A − λI) en développant ce déterminant par rapport à la première ligne. Le mineur de b1 − λ est (−λ)n−1 . On regarde comment est formé le mineur de bi : c’est le déterminant d’une matrice formée de quatre blocs Bi 0 0 Bi′ où Bi est une matrice triangulaire supérieure d’ordre i − 1 dont les éléments diagonaux sont tous égaux à 1, et où Bi′ est une matrice triangulaire inférieure d’ordre n − i dont tous les éléments diagonaux sont égaux à −λ. On a donc det Bi = 1 et det Bi′ = (−λ)n−i et le mineur cherché vaut det Bi det Bi′ = (−λ)n−i . On obtient alors n−1 det(A − λI) = (−λ) (b1 − λ) + n X (−1)i+1 (−λ)n−i bi , i=2 ce qui donne en développant det(A − λI) = (−1)n P (λ) . a0 Le polynôme caractéristique de A est donc P (X). Soit λ une racine de P . C’est donc une valeur propre de A. Déterminons le sous-espace propre associé. Si (α1 , . . . , αn ) est un vecteur propre associé à λ, il vérifie le système αn−1 − λαn = 0 ............... α1 − λα2 = 0 qui montre que le sous-espace propre est de dimension 1 et est engendré par uλ = (λn−1 , . . . , λ, 1) . Si λ1 , . . . , λr sont les valeurs propres distinctes de A est aussi le polynôme minimal de A, et que A a A1 J = A, il en résulte que le polynôme caractéristique de pour forme de Jordan .. . Ar , où Ai est une matrice triangulaire supérieure ayant comme seule valeur propre λi et dont les autres termes non nuls sont ceux situés au-dessus de la diagonale principale et qui sont tous égaux à 1. Appelons Q la matrice telle que J = Q−1 AQ . L’équation Y′ =A·Y équivaut alors à Z′ = J · Z E 3 où Z = Q−1 · Y . Le solutions de la seconde équation étant Z = exp(tJ) · X on obtient celles de la première Y = Q · exp(tJ) · X où X est une matrice colonne quelconque. On a donc exp(tA1 ) .. exp(tJ) = . et exp(tAi ) = eλi t 1 .. exp(tAr ) t2 2 t . ... .. .. . . .. .. . . .. . tmi −1 (mi −1)! .. . t2 2 t 1 où mi désigne l’ordre de Ai . Quant à Q, elle est de la forme Q = P1 . . . Pr où Pi est une matrice à n lignes et mi colonnes, dont le premier vecteur colonne est uλi , le deuxième est un antécédent du premier par l’endomorphisme de matrice Ai − λi I, le troisième un antécédent du deuxième, etc . . . La matrice Q · exp(tJ) est alors de la forme Q 1 . . . Qr où Qi est une matrice à n lignes et mi colonnes dont la dernière ligne est λt λt e i e i P12 (t) . . . eλi t Pimi (t) où Pij est un polynôme de degré j − 1 exactement. On remarque en effet que le terme de plus haut degré de Pij provient du produit de tj−1 /(j − 1)! par le n−ième coefficient de uλi qui vaut 1. Il résulte de ce qui précède que xn = y, qui est la dernière ligne du produit Q · exp(tJ) · X, est combinaison linéaire des fonctions t 7→ eλi t Pij (t) pour 1 ≤ i ≤ r et 1 ≤ j ≤ mi . E 4 Alors, par changement de base dans l’ensemble des polynômes, les fonctions t 7→ tk eλi t pour 1 ≤ i ≤ r et 0 ≤ j ≤ mi − 1, constituent une base de l’ensemble des solutions de l’équation différentielle de départ. Equation avec second membre Nous allons maintenant étudier des équations linéaires d’ordre n à coefficients constants avec second membre. Pour simplifier les notations, introduisons les polynômes de dérivation. Si l’on a P (X) = n X an−k X k , k=0 nous noterons P (d) l’opérateur différentiel, qui à toute fonction y qui est n fois dérivable associe P (d)(y) = n X an−k y (k) . k=0 Si U est un intervalle non vide de R, l’application P (d) est un morphisme de l’algèbre des fonctions n fois dérivables sur U dans l’espace des fonctions définies sur U . En particulier, puisque X(d)(y) = y ′ , on a P (d)(y ′ ) = (XP )(d)(y) . Lemme On a la relation P (d)(eλx z) = eλx P (d + λ)(z) Il suffit, en raison de la linéarité, de vérifier ceci pour P (X) = X n . On a alors, grâce à la formule de Leibniz n X n n−k (k) λx λx (n) λx P (d)(e z) = (e z) = e λ z = eλx Q(d)(z) k k=0 où n X n n−k k Q(X) = λ X = (X + λ)n = P (X + λ) , k k=0 ce qui donne le résultat. E 5 Proposition La fonction y est solution de l’équation (E) P (d)(y) = a si et seulement si z = e−λx y est solution de l’équation Q(d)(z) = e−λx a où Q(X) = P (X + λ). C’est une conséquence immédiate du lemme puisque a = P (d)(y) = P (d)(eλx z) = eλx P (d + λ)(z) . Corollaire Supposons que λ soit racine de P , et posons R(X) = P (X + λ)/X . Alors y est solution de l’équation (E) si et seulement si z = e−λx y est solution du système R(d)(u) = e−λx a z′ = u Si λ est racine de P , alors 0 est racine de P (X + λ), et P (X + λ) est divisible par X. Donc R′ (X) est un polynôme. Alors d’après la proposition, l’équation P (d + λ)(z) = R(d)(z ′ ) = e−λx a équivaut à P (d)(y) = a avec z = e−λx y , ce qui donne le corollaire. Remarque : ce corollaire donne une méthode de résolution de l’équation (E) en diminuant le degré de l’équation. Il suffit d’appliquer la méthode jusqu’à obtenir une équation de degré 1. Cependant, il existe d’autres méthodes de résolution. E 6 Méthode 1 Si y0 est la solution de l’équation homogène vérifiant les conditions initiales (n−2) y0 (0) = · · · = y0 (n−1) (0) = 0 et y0 (0) = 1 et si a est une fonction continue dans un voisinage de 0, la solution de l’équation (E) définie au voisinage de 0 et vérifiant y(0) = . . . = y (n−1) (0) = 0 est donnée par y(x) = Zx y0 (x − t)a(t) dt . 0 Montrons tout d’abord le lemme suivant : Lemme Si y0 est une fonction dérivable dans I = [ −s, s ] , et si a est continue dans I, alors la fonction y définie par Zx y(x) = y0 (x − t)a(t) dt 0 est dérivable dans I et a pour dérivée la fonction y ′ définie par ′ y (x) = y0 (0)a(x) + Zx y0′ (x − t)a(t) dt . 0 Il résulte des conditions posées que, quel que soit x0 dans I, la fonction z définie par Zx0 z(x) = y0 (x − t)a(t) dt 0 est dérivable en x0 , et donc z(x) − z(x0 ) lim = z ′ (x0 ) = x→x0 x − x0 Zx0 y0′ (x0 − t)a(t) dt . 0 D’autre part, d’après la première formule de la moyenne, il existe r compris entre x et x0 tel que Zx −1 y0 (x − t)a(t) dt = y0 (x − r)a(r) . (x − x0 ) x0 E 7 Donc, si l’on fait tendre x vers x0 , l’expression tend vers y0 (0)a(x0 ). Alors le rapport y(x) − y(x0 ) = (x − x0 )−1 x − x0 tend vers une limite qui vaut y0 (0)a(x0 ) + Zx y0 (x − t)a(t) dt + Zx0 y0′ (x0 − t)a(t) dt , x0 z(x) − z(x0 ) x − x0 0 ce que l’on désirait obtenir. On aurait pu également considérer les applications ϕ : (u, v) 7→ Zu y0 (v − t)a(t) dt et ψ : x 7→ (x, x) . 0 On a u Z ∂ϕ ∂ϕ dϕ = du + dv = y0 (v − u)a(u) du + y0′ (v − t)a(t) dt dv ∂u ∂v 0 et donc d(ϕ ◦ ψ) = y0 (x − x)a(x) + Zx 0 y0′ (x − t)a(t) dt dx . On retrouve le résultat. En appliquant ceci aux dérivées successives de y0 on a donc y (k) (x) = Zx (k) (k−1) y0 (x − t)a(t) dt + y0 (0)a(x) 0 et, compte tenu des conditions initiales, on trouve, si 0 ≤ k ≤ n − 1 y (k) (x) = Zx (k) y0 (x − t)a(t) dt 0 et y (n) (x) = Zx (n) y0 (x − t)a(t) dt + a(x) . 0 Alors P (d)(y)(x) = Zx 0 P (d)(y0 )(x − t)a(t) dt + a(x) = a(x) . E 8 Par ailleurs, si 0 ≤ k ≤ n − 1, on a y (k) (0) = 0 . Méthode 2 Notons (yi )1≤i≤n une base des solutions de l’équation homogène et soit A la matrice y1 ... yn y1′ ... yn′ A = .. .. . . (n−1) (n−1) y1 . . . yn Pour tout x, la matrice A(x) est inversible, et les solutions de l’équation (E) sont données par y= n X ci yi i=1 avec c′1 0 .. .. . ′ = A−1 . cn−1 0 ′ cn a Si la matrice A(x0 ) n’était pas inversible, il existerait une combinaison linéaire des colonnes de la matrice A(x0 ) qui serait nulle, et donc il existerait une fonction f , combinaison linéaire des yi telle que f (x0 ) = · · · = f (n−1) (x0 ) = 0 . Comme f est solution de l’équation homogène, il en résulterait que f (n) (x0 ) est nul. Mais f (k) est aussi solution de l’équation homogène et l’on en déduit par récurrence que f (k) (x0 ) est nul pour tout entier k. Enfin comme f est une fonction entière, on en déduirait que f est identiquement nulle. On aurait donc une combinaison linéaire nulle des fonction y1 ,. . . ,yn , ce qui n’est pas possible puisque ces fonctions sont linéairement indépendantes. Soit y= n X ci yi i=1 une solution où le c′i sont solutions du système donné plus haut. Si 0 ≤ k ≤ n − 1, on obtient y (k) = n X (k) ci yi i=1 et y (n) = n X i=1 (n) ci yi + n X i=1 (n−1) c′i yi E 9 d’où P (d)(y) = n X ci P (d)(yi ) + a(x) = a(x) . i=1 Donc y est bien une solution du système. De plus, comme les fonctions ci sont définies à une constante près, les solutions obtenues sont la somme d’une solution particulière de l’équation (E) et d’une solution quelconque de l’équation homogène. On obtient bien toutes les solutions de (E) ainsi. Méthode 3 Equations avec second membre de la forme a(x) = T (x)eλx où T est un polynôme de degré t. Lorsque a(x) = T (x)eλx où T est un polynôme de degré t, une solution particulière de l’équation (E) est de la forme S(x)eλx , où S est un polynôme de degré t + q, si λ est racine d’ordre q de P (X). Puisque l’équation P (d)(y) = T (x)eλx équivaut à P (d + λ)(e−λx y) = T (x) , on se ramène au cas où le second membre est un polynôme en posant y = zeλx . On peut donc supposer λ = 0 sans restreindre la généralité. Supposons pour l’instant que 0 n’est pas racine de P (X). L’opérateur P (d) est un endomorphisme de l’espace de dimension finie Ct [X]. Un élément du noyau est une solution de l’équation différentielle P (d)(y) = 0 . Puisque 0 n’est pas racine de P , les solutions de l’équation homogène ne contiennent pas de polynôme (ce sont des exponentielles). Il en résulte que P (d) est injectif, donc surjectif. Alors le polynôme T possède un antécédent de degré plus petit que t. En fait, ce degré est exactement t, car l’image d’un polynôme de degré k par P (d) est de degré inférieur ou égal à k. Donc, pour obtenir un polynôme de degré t il faut partir d’un polynôme de degré t. Si maintenant 0 est racine d’ordre q de P . Soit R(X) = P (X)/X q . Dans ce cas 0 n’est plus racine du polynôme R et l’équation R(d)(z) = T (x) a pour solution un polynôme de degré t. Mais P (d)(y) = R(d)(y (q) ) . Alors, si S est un polynôme de degré t tel que R(d)(S) = T E 10 il existe une solution de y (q) = S de degré t + q, ce qui donne le résultat. En fait, ce dernier résultat est une conséquence directe d’un résultat analogue sur les systèmes différentiels linéaires. Soit le système différentiel linéaire Y ′ = AY + B où B a tous ses termes nuls sauf l’un d’entre eux qui vaut tr eµt . Alors le système possède une solution particulière de la forme P1 (t)eµt .. . Pn (t)eµt où les Pi sont des polynômes de degré au plus r + q, le nombre q étant l’ordre de multiplicité de µ dans le polynôme minimal de A. En explicitant le résultat, le degré r + q vaut r si µ n’est pas valeur propre de A, et r + q si µ est valeur propre de A et si (X − µ)q est la plus grande puissance de X − µ divisant le polynôme minimal. Remarque : par linéarité, le résultat précédent subsiste pour des B qui sont des sommes de produits de polynômes et d’exponentielles. Le résultat est invariant par changement de base. On peut donc supposer la matrice A mise sous forme de Jordan. Par ailleurs, le produit exp((t − u)A) · B(u) ne fait intervenir qu’un seul bloc de la matrice de Jordan. On peut donc supposer que A est une matrice d’ordre q ayant une valeur propre unique λ et de la forme λ 1 .. .. . . . A= .. . 1 λ Le produit exp((t − u)A) · B(u) est alors de la forme (t − u)k /k! .. . 1 (µ−λ)u λt r , e e u 0 .. . 0 E 11 où k ≤ q − 1. Si µ > λ, une solution particulière du système est donnée par Zt exp((t − u)A) · B(u) du . −∞ Il suffit de montrer que, quels que soient k et r positifs, si l’on pose I(k, r) = eλt Zt e(µ−λ)u ur (t − u)k du −∞ alors e−µt I(k, r) est un polynôme de degré au plus r. Mais, en intégrant par parties, on trouve, si k ≥ 1 et r ≥ 1, la relation suivante, 1 [kI(k − 1, r) − rI(k, r − 1)] . µ−λ I(k, r) = Il suffit donc de vérifier la propriété pour I(0, s) et I(m, 0). Or λt I(0, s) = e Zt e(µ−λ)u us du −∞ s’intègre par parties et donne un résultat de la forme Ps (t)eµt , où Ps est un polynôme de degré s. Par changement de variable, on a aussi µt I(m, 0) = e Z∞ e(λ−µ)v v m dv 0 et ceci est de la forme αm eµt , où αm est une constante. D’où le résultat. Si µ < λ, on prend une solution particulière en intégrant de +∞ à t. La démonstration est identique. Si µ = λ, on prend comme solution particulière Zt exp((t − u)A) · B(u) du . 0 On regarde cette fois J(k, r) = Zt 0 ur (t − u)k du . E 12 Ceci s’intègre en développant par la formule du binôme et J(k, r) = k X k i=0 i (−1)i−k tr+i+1 . r+i−k+1 On trouve bien un polynôme de degré r + k + 1, donc inférieur à r + q.