SoNHoRS, du studio d`essai de la RTF au GRM : Solfège de l`objet
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SoNHoRS, du studio d`essai de la RTF au GRM : Solfège de l`objet
! Source : http://sonhors.free.fr/panorama/sonhors7.htm! ! SoNHoRS, du studio d'essai de la RTF au GRM : Solfège de l'objet sonore 1 - Du studio d'essai de la RTF au GRM : Solfège de l'objet sonore" ! Après la Seconde Guerre Mondiale, la production musicale des studios construits pour la radiodiffusion jouent un rôle colossal dans l'évolution de la musique occidentale. ! ! En 1948, Pierre Schaeffer (1910-1995) invente la "Musique concrète" dans le cadre de l'art radiophonique au Studio d'Essai à la RTF (Radio Télévision Française), grâce comme le dit la légende, aux trouvailles du sillon fermé et de la cloche coupée. Ces deux expériences hasardeuses auront des répercussions énormes sur ses conceptions musicales. Le sillon fermé : Schaeffer découvre l'intérêt musical de la répétition, grâce au son généré par la rayure accidentelle d'un disque tournant à 78tours/minute emprisonnant une seconde de son. Après plusieurs répétitions, l'auditeur oublie la cause qui a engendré le son et écoute cet "objet sonore" pour lui-même. Ainsi décontextualisé, l'objet est réutilisable dans des situations différentes. La cloche coupée : il prélève par inadvertance un fragment du son produit par une cloche, après l'attaque (1), et le répète par la technique du sillon fermé, il modifie sa dynamique et remarque que le son obtenu s'apparente à celui d'une flûte ou d'un hautbois. Il constate alors un bouleversement des lois de l'acoustique, concernant le timbre. L'expression de "musique concrète" apparaît pour la première fois officiellement dans la revue "Polyphonie" en décembre 1949. Pierre Schaeffer : "Ce parti pris de composition avec des éléments prélevés sur le donné sonore expérimental, je le nomme, par construction, Musique Concrète, pour bien marquer la dépendance où nous nous trouvons, non plus à l'égard d'abstractions sonores préconçues, mais bien des fragments sonores existant concrètement, et considérés comme des objets sonores définis et entiers ».! "Le matériau de la musique concrète est le son, à l'état natif, tel que le fournit la nature, le fixent les machines, le transforment leurs manipulations" (2). La musique concrète repose sur un matériel sonore préexistant constitué de sons enregistrés devant un microphone : bruit ou son instrumental. Ils sont ensuite modifiés, manipulés, transformés, juxtaposés en studio. De "support mémoire" la bande magnétique devient "moyen de création". Pour mener à bien ses expériences, Pierre Schaeffer sera amené à créer lui-même ses propres outils, comme le Phonogène : appareil à bande magnétique réalisé et breveté en 1951. Cet appareil permet d'intervenir sur la vitesse de la bande ou transposition. Le Phonogène existe en deux versions, le Phonogène Chromatique (à clavier) et le Phonogène à coulisse. ! ! En 1951, le Centre d'Études Radiophoniques CER devient GRMC (Groupe de Recherche de Musique Concrète) pour mener à bien ses recherches sur la perception des "Objets sonores", puis en 1958, le GRMC deviend le GRM (Groupe de Recherches Musicales). L'année 1951 est également celle de l'arrivée des tout premiers magnétophones en Europe. Pierre Schaeffer, ingénieur et musicien au Club d'essai de la Radio Télévision Française où il réalise des bruitages et ambiances divers, comprend très rapidement que la manipulation des sons et les éléments de prise de sons peuvent susciter un art nouveau. Il s'intéresse surtout à leur valeur sonore, dégagée de la cause ou de l'instrument qui les produit. "Etude au chemin de fer" (1948), composée à partir d'enregistrements de locomotives à vapeur, utilise en fait un tourne-disques et non un magnétophone, permettant le collage d'enregistrements, les variations de vitesse, l'effet rayures en continu et des enregistrements inversés. La musique concrète ne peut être réalisée qu'en studio, la composition devient un acte physique, portant sur des objets sonores concrets, elle offre aux musiciens un champ d'investigation nouveau, complètement indépendantdes règles traditionnelles de la musique occidentale. Pierre Schaeffer : "J'invitais les compositeurs et les auditeurs à remettre en cause l'opposition primaire entre son et bruit en découvrant la musicalité potentielle de sons habituellement considérés comme bruits aussi bien qu'en repérant, dans le son prétendu pur, le bruitage implicite : grain du violon ou de la voix, présence dans une note de piano du choc répercuté sur la table d'harmonie, foisonnement complexe des cymbales etc. On fera bien de se souvenir qu'il ne s'agit pas d'imperfections regrettables : ces prétendues impuretés font partie même du donné musical". Pour comprendre le travail de Schaeffer, il faut prendre conscience de l'importance de la radio en 1948 : les programmes dramatiques, les romans d'aventure, la musique et les journaux d'information, sont tous radiophoniques. Le 20 juin 1948 (3) à 21 H 00, cinq études de musique concrète, réalisées sur disques souples, sont diffusées sur la chaîne de Radio-Paris, lors d'un programme nommé "Concert de Bruits" : Etude "déconcertant" ou Etude aux tourniquets, Etude "imposée" ou Etude aux chemins de fer, Etude "concertante" ou Etude pour orchestre, Etude "composée" ou Etude au piano, Etude "pathétique" ou Etude aux casseroles. Suite aux réactions positives des auditeurs, Schaeffer reçoit l'appui de l'administration française pour créer un studio à la (RTF), avec l'aide d'un certain Pierre Henry et de Jacques Poullin. La collaboration entre Schaeffer et Henry donne naissance à la fameuse : "Symphonie pour un homme seul"(4) (1950) qui est la première œuvre de musique concrète donnée en concert en France le 18 mars 1950. Le développement de cette musique à Paris est contemporain du sérialisme de Boulez et de Barraqué, mais les deux forces n'ont guère de contact. Après un bref passage au GRM, en 1952, Pierre Boulez déclare : "Je n'ai pas d'attirance pour le marché aux puces des sons". Il réalisera pourtant en 1955, une magnifique pièce électroacoustique "symphonie mécanique", pour le film éponyme de Jean Mitry.! ! En 1958, Pierre Henry , l'autre grand artisan de la musique concrète aux côtés de Pierre Schaeffer quitte la RTF pour former son propre studio indépendant : APSOME. Dans son Studio privé de musique électroacoustique, il constitue une incroyable sonothèque recensant plus de 50 000 sons (sons de cordes de piano, sons de voix par laryngophone, sons de forme artificielle dits "ovale"...). Parmi ses travaux les plus intéressants, dont certains fortement imprégnés d'une atmosphère lyrique et tragique : "Voile d'Orphée" (1953), "Haut-Voltage" (1956), "Variations pour une porte et un soupir" (1963), "Apocalypse de Jean" (1968), "Futuristie" (hommage à Russsolo et Marinetti en 1975), "Dieu" (1977), sans oublier les jerks électroniques de "Messe pour le temps présent" en 1967 avec Michel Colombier destinés aux ballets de Maurice Béjart ! Vendu à 300 000 exemplaires, ce disque permet une intrusion de la musique concrète auprès du grand public, et une certaine sensibilisation. Pierre Henry composera également des pièces de musique concrète pour les films de Jean Grémillon et Jean Claude Sée. En 1982, il crée le studio SON/RE sous l'égide du Ministère de la Culture. Pierre Henry demeure aujourd'hui encore un disciple très actif de la musique concrète et son plus fervent défenseur. Pierre Henry : "C'est la résurgence des sons enfouis depuis l'enfance qui seule permet la création. Je ne tiens pas à ce que ma musique soit analysée, je tiens à ce qu'elle soit reçus brute, comme elle est". "Le principe de la musique concrète est la variation. Une cellule se transforme en une autre cellule, puis interviennent les combinaisons, les associations, et les nombreuses possibilités de mélanges, de polyphonies (...) La "musique concrète" vient de la photographie, du cinéma" ! ! Pierre Schaeffer quitte le GRM en 1966, peu après la sortie de son essai "Traité des objets musicaux" dans lequel il répertorie les sons de sa création selon leur morphologie. Il se consacre alors à l'audiovisuel et la communication à l'ORTF. François Bayle prend les commandes du GRM et y compose des œuvres d'une extrême richesse poétique : "L'oiseau chanteur", "Espaces inhabitables" ou encore "Jeïta ou le murmure des eaux". Ces années sont notamment liées au développement des tous nouveaux synthétiseurs. Les studios du GRM comptent aujourd'hui plus de 1200 oeuvres à leur actif et voient passer plusieurs générations de compositeurs dont : Pierre Henry, François-Bernard Mâche, Philippe Carson, Jacques Lejeune, Denis Dufour, Jean Etienne Marie, Luc Ferrari et la musique anecdotique ("Hétérozygote" - 1964, "Presque rien n°1, le lever du jour au bord de la mer" - 1970 "Symphonie pour un paysage de printemps" - 1973), Ivo Malec, Guy Reibel, Bernard Parmegiani ("La table des matières" - 1979, "De Natura Sonorum" - 1975), Edgardo Canton, N'Guyen Van Tuong, François Bayle, Michel Chion, Gilles Racot, Francis Dohmont, Robert Cohen Solal (5), Allain Gaussin, Christian Zanési, Jean Schwarz, Philippe Mion... La musique concrète, devient musique électro-acoustique et, de nos jours, musique acousmatique "musique des sons invisibles" selon l'expression de François Bayle : sa spécificité est d'avoir comme support unique la bande remplacée plus tard par l'ordinateur. La musique acousmatique est celle des hauts-parleurs, l'auditeur doit faire lui-même le travail de recomposition.! (1) L'intensité du son se divise en quatre étapes successives: 1. l'attaque, 2. le decay (chute du son juste après l'attaque), 3. le sustain (maintien), 4. le release (extinction) (2) Préface inaugurale de Serge Moreux - Premier concert de bruits, mars 1950 (3) à la même époque (1948) ont lieu les premières études sur bande de Louis & Bebe Barron aux Etats-Unis (4) "symphonie pour un homme seul", seul dans le sens où un seul homme est au commande d'une multitude de sonorités, composant cette symphonie (5) Robert Cohen-Solal connu notamment pour avoir créé la musique des "Shadoks" de J.RouxelLa première série de 52 épisodes est diffusée sur l'ORTF (l'unique chaine de TV) en avril 1968 (6) première oeuvre du répertoire GRM, par ordinateur (Music V).! ! ! 2 - Stockhausen et le studio de musique électronique de la WDR à Cologne" ! En Allemagne, le studio de musique électronique de Cologne nait officiellement le 18 octobre 1951, le jour ou Herbert Eimert, Robert Beyer et Werner Meyer-Eppler diffusent sur les ondes de la NWDR (Nordwestdeutscher Rundfunk) une émission intitulée "Die Klangwelt der elektronische Musik" (Le monde sonore de la mu sique électronique) : une série d'expérimentations sonores effectuées grâce au Melochord d'Harald Bode et à un magnétophone AEG.! ! ! Au départ, les activités du studio se limitent (principalement sous l'impulsion d' Herbert Eimert, qui dirige seul le studio de 1951 à 1953) aux sources sonores électroniques, en relation avec une conception formaliste, issue de l'école sérielle. En 1953, Karlheinz Stockhausen revient à Cologne après avoir notamment travaillé dans le studio de musique concrète de la RadioTélévision française sous la direction de Pierre Schaeffer. Il travaille alors dans ce studio nouvellement établi à la radio ouest-allemande et le 18 octobre 1953, le premier concert de musique électronique est donné à la WDR (Westdeutscher Rundfunk) avec des œuvres de Eimert et Beyer, ainsi que deux premières études électroniques de Stockhausen : Study I et Study II. La philosophie initiale du studio de la Westdeutscher Rundfunck de Cologne était très différente de celle de Paris. Contrairement à la musique concrète, qui n'utilise que des sons captés par micro, la musique électronique utilise comme matériau de base des sons artificiels produits uniquement par des générateurs de fréquences électroniques : cette approche s'appelle l'Elektronische Musik. Les premiers disques de musique électronique sortent en 1954 chez Deutsche Grammophon. Stockhausen, insatisfait, décide de briser les barrières entre l'instrumentation conventionnelle et les sons électroniques. ! ! En 1955, il ouvre la voie à l'utilisation de l'espace acoustique dans son œuvre "Guppen", composée pour trois orchestres placés dans différentes parties d'un auditorium. Il reprendra cette idée dans le domaine électronique avec "Gesang der Jünglinge" (Chant des adolescents) en 1956, conçu pour plusieurs séries de hauts-parleurs. Stockhausen y mélange, dans un même continuum, la voix de jeune garçon (une source concrète : la voix d'un jeune garçon récitant une portion de "livre de Daniel" - Cantique des jeunes gens dans la fournaise) et des sons électroniques : c'est l'une des œuvres fondatrices de la musique électroacoustique et de la spatialisation du son (Stockhausen y expérimente des mouvements de rotation entre cinq hautsparleurs). En 1958, il compose "Kontakte" (première oeuvre "mixte" pour instruments et électronique spatialisée) dans lequel les bruits suggèrent des sonorités de percussion et de piano. Lors d'un voyage au Japon en 1966, il compose "Telemusik" avec des bruits enregistrés en Espagne, ViêtNam, Bali, Sub-Sahara, Japon et Hongrie : il module toutes ces sources sonores de telle manière que les bruits soient méconnaissables, ils apparaissent furtivement et agissent les uns sur les autres par des moyens électroniques. ! ! En 1967, il compose "Hymnen" (1) , dans lequel il traite électroniquement une quarantaine d'hymnes nationaux du monde entier. D'autres œuvres essentielles dans l'histoire de la musique électronique sortent des studios de la WDR comme "Artikulation" de Ligeti ou "Epitaph für Aikichi Kuboyama" de Eimert. Parmi les artistes importants ayant fréquenté les studios de la WDR : Gottfried Michael Koening, Mauricio Kagel, Peter Eotvös, Henri Pousseur (en 1954), Marco Stroppa, Bruno Maderna (Musica suedue Dimensioni), Ernst Krenek, Jean-Claude Eloy, York Höller, Gotfried-Michael Kœnig (dès 1954), Leopold von Knobelsdorf, Konrad Bœhmer (fondateur des studios Steim à Amsterdam en 1969), Paul Gredinger, Karel Goeyvaerts, Bengt Hambraes, Franco Evangelisti, Giselher Kiebe, Herbert Brün, György Ligeti (juxtaposition de lignes mélodiques indépendantes dans "Atmosphères" en 1961), Luciano Berio, Luc Ferrari et Roger Smalley... Gottfried Michael Koening aura une influence prépondérante sur les compositions de Stockhausen. Suite à des rapports conflictuels entre les deux presonnages, Gottfried Michael Koening partira fonder dans les années 60, l'Institut de Sonologie d'Utrecht. Selon Konrad Boehmer (qui quittera également Stockhausen pour rejoindre Koening), c'est l'esprit même du studio de Cologne qui est transféré à Utrecht !! L'école "concrète" de Paris se caractérise par une démarche expérimentale, l'école "électronique" de Cologne par une rigueur structurelle. D'abord rivales, on assiste progressivement à une fusion relative des deux approches vers le milieu des années 50, avec des œuvres comme le Voile d'Orphée de Pierre Henry, le Gesang den Jünglinge de Stockhausen, la Procession de Vergès et le Poème électronique de Varèse où sons concrets et sons électroniques sont mélangés. C'est à compter de cette période que l'on commence à parler de musique électroacoustique (association de sons enregistrés avec des micros et de sons électroniques).! ! (1) cette oeuvre est d'une importance capitale pour l'émergence d'une nouvelle scène musicale en Allemagne, vers la fin des années 60. Les groupes de Krautrock, tels que Faust, Kraftwerk, Tangerine Dream ou encore Kluster sont les premiers à utiliser des sources électroniques et électroacoustiques dans leurs compositions.! ! 3 - Studio di Fonologia, Columbia-Princeton Electronic Music Center, RCA Mark II et autres studios" ! En 1954, Luciano Berio (1925-2003) et le compositeur et chef d'orchestre Bruno Maderna décident de travailler ensemble pour explorer le potentiel de la Tape Music (manipulations de bandes magnétiques) en créant le Studio di Fonologia à la Radio Audizioni Italiane (RAI) de Milan. Les travaux les plus importants du studio sont axés sur le traitement de la voix. La pièce la plus connue de Luciano Berio est Hommage à Joyce en 1958 : Berio demande à son épouse, Cathy Berberian, de lire le chapitre 11 d'Ulysse de James Joyce, il traite alors les mots électroniquement en découpant la bande. L'intérêt particulier de ce mélange, réside dans le collage qui suggère à l'auditeur une réappropriation complète du texte d’origine.! ! Beaucoup de compositeurs sont venus travailler au "Studio di Fonologia" de Milan, comme John Cage, Niccolo Castiglioni, Aldo Clementi, Luigi Nono, André Boucourechliev, Bengt Hambraeus et Henri Pousseur qui y compose Scambi (échanges) en 1954.! ! ! ! Autres Studios :! ! • Studio privé de Louis et Bebe Barron en 1951, à New York. Ce studio accueillera le Project of Music for Magnetic Tape de John Cage, David Tudor, Earle Brown, Morton Feldman et Christian Wolf en 1952! • Studio Apelac à Bruxelles en 1958, où travailleront : Henri Pousseur, Leo Küpper et Arsène Souffriau.! • BBC Radiophonic Workshop en 1958 à Londres : Ron Grainer, Delia Derbyshire! • Studio for Experimental Music - University of Illinois - USA, 1958 - Lejaren Hiller, Herbert Brün, Kenneth Gaburo, Salvatore Martirano et la création du "Sal-Mar Construction" (un synthétiseur d'exécution de 24 canaux en temps réel), James Beauchamp et la construction en 1964 du "Harmonic Tone Generator", l'un des premiers synthétiseurs modulaires analogiques! • CSEM : Cooperative Studio for Electronic Music - 1958 (University of Michigan, Ann Arbor, USA - Fondé par Gordon Mumma et Robert Ashley! • Studio privé Gravesano de Hermann Schrechen dès 1954 en Suisse ! • NHK - Radio Nippon Horo Kyokai à Tokyo en 1955 où sont créées des oeuvres très "mathématiques", avec notamment des influences du langage musical traditionnel japonais : Toru Takemitsu (water music), Joji Yuasa, Suzuki Hiroyoshi, Kasuo Fukushima : ils forment d'ailleurs le "Jikken Kobo"(1) (atelier expérimental), Shinishi Matsushita, Toshiro Mayuzumi, Makoto Moroï, Toschi Ichiyanagi ! • Estudio de Fonologia Musical en 1958 à Buenos Aires et le CLAEM en 1963 - Fernando von Reichenbach, Jorge Antunes ! • Studio de musique électronique de l'Université de Toronto en 1959 - Otto Joachim, Gustav Ciamaga, serge Garant, Pierre Mercure, Istvan Anhalt, R. Murray Schafer ! • San Francisco Tape Music Center à San Francisco, USA en 1962 - Morton Subotnick, Pauline Oliveros, Ramon Sender, Terry Riley, Steve Reich, Anthony Martin! • Studio MOSFilm en 1957 à Moscou - Edward Artemiev, Sofia Gubaidulina, Edison Denisov, Alfred Shnitke, Oleg Buloshkin, Alexander Nemtin, Stanislav Kreitchi, Shandor Kallosh Synthétiseur ANS! • Studio Eksperymentalne de la radio polonaise à Varsovie en 1957 - Wiszniewski, Joseph Patkowski, Boguslaw Schaffer, Wladimir Kotonski, Christophe Penderecki, Eugenius Rudnik, Andrzej Dobrowolsk! • Studio de la Siemens Company en 1957 à Munich - Développement du Synthétiseur Siemens par Helmut Klein et W. Schaaf : système similaire au synthétiseur RCA - Josef Anton Riedl, Herbert Brün, Henri Pousseur, Ferdinant Kriwet, Paul Pörtner, Dieter Schnebel, Milko Kelemen...! • Philips Research Laboratories en 1956 à Eindhoven - Henk Badings, Edgard Varèse, Dick Raaijamakers (aka Kid Baltan), Tom Dissevelt ! • STEM (2) puis Instituut voor Sonologie à l'Université d'Utrecht en 1960 - G. M. Koenig, K. Boehmer, F. Weiland, Ponse, D. Raaijmakers, F. Weiland, T. Bruynel, R. Riehn [+] ! • Studio de musique électroacoustique de l'université McGill en 1964 à Montréal - Istvan Anhalt, Hugh Lecaine ! • Studio EMS à Stockholm en 1965! • Sonic Arts Union en 1966 à l'University of Brandeis aux USA - Premier studio d'enseignement de l'électronique - Mumma, Behrman, Ashley, Lucier! ! ... et un peu partout dans le monde (3). Cette période est passionnante dans l'histoire de la musique, beaucoup de compositeurs pensent que toute chose est possible, ils partagent le même but commun : créer de nouveaux genres musicaux basés sur la disponibilité de tous les sons.! Aux Etats-Unis, le 28 Octobre 1952, Vladimir Ussachevsky (1911-1990) et le compositeur Otto Luening (1900-1996) présentent en concert leur musique au MOMA (Musée d'art moderne de New-York), c'est le premier concert public de Tape music aux Etats-Unis (4) .! ! Le programme inclut les titres "Sonic Contours" d'Ussachevsky, "Low Speed", "Invention" et "Fantasy in Space" de Luening. Cette débauche d'activité entraîne en 1959, la création du Columbia-Princeton Electronic Music Center (5) et l'acquisition du synthétiseur électronique RCA Mark II, mis au point par Harry Olson et Herbert Belar, grâce à une subvention de 175 000 $ de la fondation Rockefeller. Le synthétiseur RCA est programmable par l'intermédiaire de deux claviers alpha-numériques et de papier perforé. Le modèle II contient 1750 tubes à vide de six mètres sur deux. Les synthétiseurs RCA sont l'apanage de Milton Babbitt, compositeur et professeur à l'université de Princeton, qui crée en 1964 : "Ensembles for synthesizer". Otto Luening et Vladimir Ussachevsky, les principaux instigateurs ont également travaillé avec cette machine, ainsi que Bulent Arel, Mario Davidovsky et Charles Wuorinen (né en 1938) "Time's Encomium" (1968-69).! ! ! ! Mario Davidovsky, arrivé d'Argentine en 1960, devient un des principaux compositeurs de Tape Music : Synchronisms n°5 (1969) avec bruits électroniques sur bande et des percussionnistes jouant live est un bon exemple du style de Davidovsky.! ! Le RCA II est cependant trop compliqué pour devenir commercialement viable. Dans la décennie suivante, plus de 60 compositeurs de 11 pays différents viennent au Columbia-Princeton Electronic Music Center de New-York pour y travailler. Parmi eux : Bülent Arel, Halim El-Dabh, Michiko Toyama, Mel Powell, Jacob Druckman, Charles Dodge, Ilhan Mimaroglu, Ingram Marshall ("Gambuh"), Daria Smegen, Alice Shields, Smiley et Druckman." ! Autre approche : les musiques mixtes ou Live Music associent les sons sur bande magnétique, les instruments et les voix jouées en direct : "Orphée 51" de Pierre Henry et Pierre Schaeffer pour soprano et bande (1951), "Musica su due dimensioni" de Bruno Maderna pour flûte et bande (1954), "Polygraphies polyphoniques n°1" de Jean Etienne Marie pour violons, bande et images (1957), "Kontakte" de Karlheinz Stockhausen pour piano, percussion et bande (1960), "Laborintus II" de Luciano Berio (1965), mais aussi des œuvres d'Ivo Malec, Luigi Nono et Luc Ferrari.! ! (1) premier concert public de musique électronique au Yamaha Hall de Tokyo en 1956 (2) STEM : STudio voor Electronische Muziek (jusqu'en 1967) (3) Selon une étude, il existait en 1968, 556 studios (hormis les studios privés) , et ceci dans 39 pays (4) Vladimir Ussachevsky et Otto Luening réaliseront la B.O du film King Lear d'Orson Welles en 1956 (5) fusion entre le Columbia University Electronic Music Studio de Otto Luening et Vladimir Ussachersky fondé en 1955, et le Colombia Princeton Studio de Milton Babbit! ! 4 - En dehors des studios : autres Pionniers ou Inventeurs de génie !" ! En 1949 à New-York, Louis et Bebe Barron créent leur propre petit studio afin de se consacrer aux expérimentations électroniques. Les époux Barron sont très influencés par Norbert Weiner et son travail sur la cybernétique, l'étude des mécanismes de communication et de contrôle chez les animaux, chez les hommes et dans les machines. En 1951-52, ils réalisent leur toute première oeuvre : "Heavenly Menagerie", puis créent les bandes sonores de deux courts métrages de Ian Hugo "Bells of Atlantis" en 1952 et "Jazz Of Lights" en 1954.! ! En 1952 et 1953, John Cage travaille dans le studio et avec l'aide du couple Barron, il prépare "William mix", son premier travail sur bande, véritable mozaïque sonore. Seront également conviés à la composition de l'oeuvre : son ami architecte Paul Williams et les membres de la "New York School" : David Tudor, Morton Feldman, Christian Wolff et Earl Brown. John Cage découpe les bandes composées d'une centaine de sons pré-enregistrés de la collection des Barron (600 disques), et les recolle ensuite de manière aléatoire (tirage au sort, et consultation du I-Ching). Pour John Cage, le hasard permet de réinsérer la musique dans la vie "l'art c'est la vie". ! ! Contactés par Gilds Schary, président de La MGM, Louis et Bebe Barron composent, en 1956, grâce au couplage d'oscillateurs, la bande son et les effets sonores du film fantastique de série B : Forbidden Planet. Pour la première fois, en raison de la large diffusion du film, ces nouveaux sons électroniques arrivent enfin à toucher le grand public. L'impact est considérable sur le développement de la musique électronique, même si il est vrai que l'électronique semble cantonné à l'illustration, aux bruitages des robots ou autres soucoupes volantes !! ! En 1962, les Barrons fonderont la "Society for Electro Acoustic Music" à Los Angeles. Raymond Scott (1908-1994), pianiste jazz au sein de son combo "The Raymond scott Quintette", ingénieur, compositeur et inventeur est également l'un des pionniers de la musique électronique. Dès le début des années 40, il conçoit les bandes sons et bruitages divers pour les dessins animés de la Warner Bros : "Loony Tunes", "Merrie Melodies" ("Bugs Bunny", "Daffy Duck »…).! ! En 1946, il fonde Manhattan Research Inc., le premier studio de création de musique électronique au monde. Constitué initialement d' Ondes Martenot, d'une Ondioline et d'un Orgue Hammond "modifié", il y compose au cours des années 50-60 une multitude de jingles publicitaires et de morceaux expérimentaux (B.O. des films de Jim Henson). Il compose également trois albums "Soothing Sounds for Babies" pour le "Gesell Institute of Child Development". De son travail émerge la toute puissance des technologies et cette vision utopique du progrès, si typique aux années 50-60. Raymond Scott a également créé plusieurs instruments de musiques fascinants comme le Karloff, le Bass Line Generator, le Videola ou le Clavivox (une sorte de theremin commandé par clavier) en 1956 avec l'aide de Robert Moog. L'aboutissement de ses réalisations sera l'Electronium-Scott, commencé en 1950 et terminé en 1970 (l'un des tout premiers séquenceurs) dont 4 exemplaires seront achetés par la Tamla Motown.! ! Richard Maxfield (1927-1969), compositeur, professeur, est surtout un "passeur d'influences".. De 1953 à 1955, il étudie avec Milton Babbitt et Aaron Copland à Princeton. Grâce à une bourse d'étude, il part en Europe où il rencontre successivement Pierre Boulez et Karlheinz Stockhausen et Luigi Nono puis John Cage, David Tudor et Bruno Maderna lors d'un second voyage. En 1958, Richard Maxfield participe au séminaire de John Cage à la New School for Social Research de New-York. L'année suivante, il devient, dans cette même école, le premier professeur de musique électronique aux Etats-Unis.! ! Riche de toutes ces rencontres, il a une influence considérable sur les mouvements underground new-yorkais et notamment sur le mouvement Fluxus. Il compte parmi ses élèves, un certain Georges Maciunas, mais aussi et surtout La Monte Young qui devient son principal collaborateur et le principal interprète de ses travaux. En 1959, Maxfield compose son premier morceau électronique "Sine Music (A swarm of butterflies encountered over the ocean) ».! ! Dans ses oeuvres, il utilise des instruments et procédés de traitement de la matière sonore qu'il crée lui-même, les principes de la musique concrète, des sonorités acoustiques et électroniques. Il est également l'un des pionniers américains dans la composition de musique purement électronique. Entre 1960 et 1961, Richard Maxfield est présent avec Georges Maciunas, David Tudor, Terry Riley, Terry Jennings et Dick Higgins aux concerts organisés par La Monte Young dans le loft de Yoko Ono. De 1959 à 1964, il compose plus d'une vingtaine d'oeuvres dont "Night Music" (1960), "Dromenon" (1961), "Piano concert for David Tudor" (1961) et "Toy Symphony" (1962), puis "Electronic Music" en 1967 avec David Tudor. Richard Maxfield se suicide le 27 juin 1969, à l'âge de 42 ans.! ! ! Space Age Pop, Library Music & Bizarreries Concrètes! Après des études en philosophie, art et cinéma, Tod Dockstader (né en 1932) débute en 1955 à Hollywood comme monteur image et son. En 1958, il est employé comme assistant ingénieur du son et concepteur d'effets sonores par le studio Gotham de New-York. En 1960, il crée sa première pièce de musique concrète, pendant ses temps libres, Eight Pieces dont Fellini utilise quelques extraits dans son film Satyricon. Il compose ensuite Taveling Music (1960), Luna Park (1961), Two Fragments from Apocalypse (1961), Apocalypse (1961), Drone (1962), Water Music (1963) et Quatermass en 1964, pièce de 46 minutes pour laquelle il avait accumulé 125 heures d'enregistrements sonores. En 1967, il part travailler au pavillon Air Canada de l'Expo 1967 à Montréal, où il conçoit plusieurs compositions et projections visuelles avec diapositives.! ! Malgré tous ces innombrables travaux, il n'a jamais été reconnu à sa juste valeur du fait de son parcours non académique, contrairement à ses contemporains du Colombian-Princeton-Center. Tombé dans l'oubli, il décide, en 1990, de reprendre ses travaux et se consacre au projet 'Aerial', entièrement basé sur des enregistrements d'ondes radio AM (ondes moyennes).! ! D’autres pionniers peuvent figurer dans cette liste, comme par exemple, Hugh Davies, le pionnier de la musique électronique anglaise, ou encore Daphne Oram (1925-2003) qui est la première directrice du BBC's Radiophonic Workshop en 1958, et à l'instar de Raymond Scott, crée son propre studio "Oramics Studio" dès 1959. Elle travaille essentiellement sur l'image graphique et le signal audio, technique similaire au système de papier perforé du Synthétiseur RCA. Bruce Haack et ses travaux sur bandes, ses comptines psychédéliques, le Brésilien Jorge Antunes qui en 1962, fonde le studio de recherche Chromo-Music et construit ses propres instruments électroniques ; dès 1965, ses travaux s'orientent vers l'exploration des correspondances entre le son et la couleur. Otto Joachim, l'un des pionniers de la musique électronique au Canada.! ! Peuvent également s'ajouter à cette liste : Max Brand, Leo Kupper, Joe Meek ("I hear a new world" le studio devient un instrument de musique - 1960), Attilio "Art" Mineo ("Man in space with sounds" - 1951-62), Piero Umiliani "Musica dell'era tecnologica", les productions exotica de Les Baxter et les créateurs de l'ombre de la musique d'illustration ou Library Music comme : John Baker, David Cain, Delia Derbyshire au radiophonic Workshop ; Roger Roger, Nino Nardini "Musique pour le futur", Fabio Fabor "Mr. Diabolicus, Mr. Mysterious", Eddie Warnerles, Cecil Leuter, Richard Demaria, Peter Bonello, Georges Teperino, Johanna Group, Eric Peters ; les catalogues des studios Ganaro, Chappell, IM, PIL et Southern, mais aussi : Erkki Kurenniemi, Tom Dissevelt, Dick Raaijmakers (aka Kid Baltan), Henk Badings, Pillip Werren, Arne Nordheim, Ron Geesin "A raise of eyebrows", le Belge Arsène Souffriau, Anthony King (Electric Bazaar)... ! 5 - Live Electronic Music des 60's, improvisation et performance Multimédia" ! ! ! A côté de ces courants de musiques réalisées en studio, il faut noter l'émergence de la musique électronique "live", jouée grâce à des dispositifs présents sur scène : synthétiseurs, magnétophones, ou tout autres instuments électrifiés. Les sons peuvent être captés, transformés et rediffusés en temps réel (Real-Time Live Electronic Music) ou différé lors d'un concert. L'improvisation s'invite dans les musiques électroniques, les oeuvres n'existent donc véritablement que lors de leur déroulement devant un public. Cette approche de Live Electronic Music (1) est introduite par Stockhausen avec Mikrophonie, pour tam tam, microphones et transformations du son en direct et bien avant encore par John Cage en 1939 avec Imaginary Landscape 1, qui y voit un moyen de préserver le Hasard. Pour John Cage, l'abandon de la musique sur bande pour une exécution électronique en direct est une conséquence essentielle de sa philosophie de l’indétermination. Le phénomène se développe un peu partout : en Italie, avec les groupes Musica Electronica Viva (Allan Bryant, Alvin Curran, John Phetteplace, Frederic Rzewski, Richard Teitelbaum), ou Nuova Consonanza (Evangelisti, Macchi, Morricone, Bertonichi, Brachi, Heineman, Kayn), mais aussi avec John Eaton et son synthétiseur : le Synket... Aux Etats-Unis en 1956, Robert Ashley et Gordon Mumma débutent leurs performances de Live electronic music sur commande de Milton Cohen et Harold Borkin pour le Space Theatre, puis plus tard avec le Sonic Arts groups et enfin le Sonic Arts Union (1966) d' Alvin Lucier, Gordon Mumma, Robert Ashley et David Behrman. Avant l'expérience du Sonic Arts Union, Robert Ashley et Gordon Mumma fondent avec George Cacioppo, Roger Reynolds et Donald Scavarda le Once Group, un collectif axé sur les performances multimedia.! ! ! Lors des "Once Festivals" (1961-68) à Ann Arbor, le programme inclut des cinéastes, des peintres, des sculpteurs, des acteurs de théâtre, des danseurs...). ! En 1960, Robert Ashley réalise The Fourth of July, avec bande et interprétation en temps réel, puis Public opinion descends upon the demonstrators, où le public intervient dans le contrôle d'équipement électroacoustique. Dans ces premiers travaux, la voix occupe une place prépondérante : The fox (1957), The wolfman (1964), The bottleman (1960). Gordon Mumma écrit Gestures for two pianos en 1962 (premières œuvres "cybersoniques" de Mumma et Ashley dès 1958). David Tudor : Fluorescent Sound en 1964, et surtout Rainforest en 1968, le grand classique de la performance scénique électronique. Pauline Oliveros avec sa composition en temps réel : Bye Bye Butterfly de 1965.Max Neuhaus utilise un fer à souder pour agir en temps réel sur des circuits électroniques. Ingram Marshall est également l'un des artisans de la live electronic music au début des années 70... En France : Luc Ferrari, Jean-Etienne Marie... En Allemagne : l'ensemble Feedback en 1970 (Johannes Fritsch, Peter Eötvos, Rolf Gelhaar, David Johnson, Mesias Maïguashca) ou encore le groupe créé par Stockhausen pour jouer sa propre musique électronique en temps réel (composé de Alfred Alings, Harald Boje, Peter Eötvös, Johannes Fritsch, Rolf Gehlhaar, et Aloys Kontarsky). En Angleterre : AMM fondé en 1965 (Keith Rowe, Lou Gare, Eddie Provost, Christopher Hobbs et l'expérimentateur de génie Cornelius Cardew), The Scratch Orchestra (ensemble fondé en 1969 par Cornelius Cardew, Michael Parsons et Howard Skempton), Intermodulation de Roger Smalley et Tim Souster (1969-76) puis 0db (1976), Gentle Fire (1968-76), Naked Software. Sans Oublier les activités des compositeurs "minimalistes" durant les années 60 qui permettent de rapprocher l'avant-garde "sérieuse" et la musique "populaire" : Terry Riley, La Monte Young "The Tortoise, His Dreams and Journey" dès 1964 et les collaborations avec John Cale, Tony Conrad, Angus Mc Lise et Marian Zazeela au sein du The Theatre for Eternal Music.! ! Au cours des années 60, le théâtre, la danse, le cinéma, la sculpture et la littérature se retrouvent liés dans des performances multimédia incluant les musiques électroniques. La fusion entre ces différentes disciplines artistiques s'inscrivent dans la lignée de l'expressionnisme abstrait, du pop art et du mouvement Fluxus des années 50 (2). Voici une brève énumération des plus fervents représentants des courants Multimedia, Intermedia, ou Mixed-media des années 60. Le collectif dédié à l'improvisation collective Ongaku fondé en 1958-60 à Tokyo par Takehisa Kosugi, Shuko Mizuno, Yasunao Tone, Chieko Shiomi... (the Taj Mahal Travelers) ; le Sogetsu Art Center SAC, symbole de la culture avant-gardiste japonaise des années 60, fondé par Sofu Teshigawara (performances avec John Cage en 1962 et Merce Cunningham en 1964). Aux USA : Pulsa à l'université de Yale (Boston Public Gardens Demonstration en 1968) ; USCO ("Us Company" : collectif d'artistes et d'ingénieurs : Gerd Stem, Stan Van Der Beek, Steve Durkee, Michael Callahan) ; John Cage, Lejaren Hiller, Ronald Nameth, et la performance intermedia HPSCHD (Œuvre pour 7 clavecins, 51 bandes travaillées à l'ordinateur, 7 projecteurs de films et 80 projecteurs transmettant 10 000 vues de la N.A.S.A. joué le 16 mai 1969 à l'Université d'Illinois devant 9 000 personnes) ; le Once Group (Space Theatre de Milton Cohen, Once festivals...) ; le Teatro Probalistico de Jocy De Oliveira vers la fin des années 60 ; les multiples performances multimedia au pavillon Pepsi-Cola de l'Expo 70 d'Osaka orchestrées par EAT (Experiments in Art and Technology) et enfin Vortex (1957-60) du compositeur, poète et ingénieur Henry Jacobs (Série de 100 concerts au "Morrison Planetarium" de San Francisco à la fin des années 50 en collaboration avec le cinéaste expérimental Jordan Belson et son "Cosmic Cinema", David Talcott, George Abend... Le programme inclut des compositions de Stockhausen, Berio, Ussachevsky, des musiques Balinaises et afro-cubaines).! ! ! (1) Live Electronic Music ou "musique électronique vivante". Au cours des années 70/80, on parlera de "musique interactive" (2) 1961 : premier festival Fluxus consacré à la musique et aux arts organisé par G. Maciunas et W. Vostell! 6 - Electronique & Minimalisme : de l'Ostinato à l'hypnose Dans les années 60, un mouvement essentiellement américain voit le jour : la musique minimaliste et/ou musique répétitive. L'objectif du courant minimaliste est clair : être accessible à un large public et rompre avec les excès du post-sérialisme (1). Les compositions reposent sur des ré-utilisations de sons, produites par des répétitions et des effets de retard sur bande (tapedelay), l'importance du rythme, de la tonalité et de la mélodie. La musique s'apparente à un processus graduel, avec une économie de moyens manifeste. ! ! Deux tendances concomitantes sont cependant à distinguer, d'une part un minimalisme "radical" axé sur le son continu avec d'infimes variations d'intonation (drone ou bourdon à la manière des instruments primitifs du genre bagpipe ou tambura) (voir travaux de La Monte Young et le concept de "Dream House", Tony Conrad...) et d'autre part un minimalisme "répétitif" fondé essentiellement sur la répétition de courtes figures avec également d'infimes variations (travaux de Terry Riley, Philip Glass, Steve Reich...). Les compositeurs minimalistes sont marqués par les expérience de John Cage, Erik Satie, Morton Feldman, Christian Wolff mais également parle jazz et les musiques extra-européennes (2) : l'Inde et ses Ragas, les gamelans balinais, les polyphonies des musiques pygmées et plus largement par les schémas musicaux d'Orient, d'Extrême-Orient et d'Afrique. A l'image de certaines musiques traditionnelles, les boucles sonores mélodiques provoquent chez l'auditeur un état de fascination, d'envoûtement, "tout se passe comme si le principe des répétitions n'avait d'autre but que d'hypnotiser l'auditeur afin de ramener sa perception à un état d'innocence" (3). Steve Reich étudie les percussions africaines à l'Université du Ghana. Philip Glass s'initie à la cithare avec Ravi Shankar. Le célèbre maître vocal d’Inde du nord, Pandit Prân Nath, enseigne le raga indien "Kirana" et la musique indienne à La Monte Young et Terry Riley. ! ! Avec ses effets psycho-acoustiques, Trio for Strings de La Monte Young (né en 1935) est considérée comme l'œuvre créatrice de la musique minimaliste "radicale". Terry Riley (né en 1935), est quant à lui le fondateur du courant minimaliste répétitif avec In C (en do majeur), composition de 1964.! ! Cette oeuvre absolument envoûtante est constituée de 53 formules mélodiques rythmiques d'une durée variable autour de la seule tonalité de do majeur. Chaque musicien doit jouer ces 53 formules dans un ordre pré-établi, mais il reste libre d'interpréter chaque motif autant de fois qu'il le souhaite ! Steve Reich invente la technique du "déphasage" qu'il utilisera jusqu'en 1971 : décalage progressif de boucles sonores identiques diffusées simultanément sur plusieurs bandes magnétiques. Il appliquera par la suite ce procédé, directement avec des instuments de musique. Quant à Philip Glass, outre sa première composition de 1971, Music in twelve parts, son oeuvre reste marqué par la création de véritables opéras minimalistes tels que Einstein on the Beach ou encore Satyagraha et de nombreuses musiques de films.! ! Avec Steve Reich, Philip Glass représente la tendance répétitive du minimalisme, il utilise notamment un procédé basé sur la progression additive d'une figure donnée (répétition et adjonction de figures mélodiques).! ! ! Les principaux pionniers à l'origine de ce courant sont La Monte Young, Terry Riley, Steve Reich, Philip Glass mais également John Adams, Tony Conrad et Charlemagne Palestine. Les évolutions du courant minimaliste prennent des dénominations diverses, si certains travaux peuvent clairement être regroupés sous ce terme, pour d'autres on parle alors de Maximalism (terme utilisé, au départ pour décrire les pièces avec orchestre de John Adams), Postminimalism ou encore Totalism. Parmi ces artistes les plus représentatifs : Phil Niblock, Alvin Lucier, Jon Gibson, David Borden, Michael Gordon, Meredith Monk, Mickael Nyman, Arvo Pärt, Louis Andriessen, William Duckworth, Terry Jennings, Harold Budd, Glenn Branca, le collectif Bang on a Can, Alan Licht, Rhys Chatham, Pauline Oliveros, Philip Corner, Arnold Dreyblatt, Eliane Radigue, Ellen Fullman, Bill Alvers, Tom Johnson, Richard Maxfield, Gavin Bryars... Le minimalisme est également un mouvement artistique américain de la fin des années 1960, né en réaction contre la trop grande subjectivité de l'expressionnisme abstrait. Peintures, sculptures ou installations de Sol Lewitt, Donald Judd, Richard Serra, Frank Stella, Dan Flavin, Ellsworth Kelly, Tony Smith entre autres. ! (1) l’égalité des douze sons de l’échelle sonore occidentale prônée par Schoenberg, appliquée à tous les paramètres de la musique : la hauteur, la durée, le timbre, l’intensité... (2) Steve Reich en 1970 : "La musique non occidentale en général, et en particulier les musiques africaine, indonésienne et indienne, fourniront de nouveaux modèles structuraux aux musiciens occidentaux" - (3) Daniel Caux à propos de la musique de Terry Riley! 7 - Spatialisation et image : la mise en espace des sons concrets et électroniques En 1951, les premiers magnétophones arrivent à la RTF. Jacques Poullin, ingénieur du son, conçoit différents types d'enregistreurs pour créer des effets musicaux spéciaux et développer un système de spatialisation afin de diriger les bruits vers différents hauts-parleurs à l'intérieur d'une salle de concert. Le premier concert public "spatialisé" a lieu cette même année à Paris au théâtre de l’Empire.! ! Pierre Henry utilise un "Pupitre potentiométrique de relief à quatre canaux" ou "potentiomètre d'espace" conçu par Poullin et Schaeffer, les sons se projettent dans l'espace "suivant des plans ou des trajectoires qui s'inscrivent dans la hauteur, la largeur et la profondeur" (1), “Tenant en main une bobine, l'opérateur, debout sur la scène, effectuait des gestes dans un espace matérialisé par de larges cerceaux croisés. Ces gestes, agissant sur la balance des haut-parleurs, produisaient un mouvement analogique du son dans l'espace de la salle" (2).! ! Au début des années 50, John Cage s'interroge également sur les relations entre jeu musical et données spatiales, notamment lors de la réalisation de William Mix en 1952, avec les membres du Project for Music for Magnetic Tape. Deux autres compositions d'importances seront réalisés par ce collectif entre 1950 et 1953 : Octet d'Earle Brown pour 8 bandes magnétiques, et Intersection de Morton Feldman. Dès lors, de plus en plus de compositeurs se préoccupent des divisions conventionnellement admises entre arts du temps, de l'espace et du mouvement. La notion d'espace devient une substance primordiale et initiale dans le travail de création, elle fait partie du langage des musiciens. Parmi eux, Pierre Boulez (Répons pour 5 groupes instrumentaux), Luc Ferrari, Olivier Messaien, Léo Küpper, John Chowning, Iannis Xenakis, Karlheinz Stockhausen, Steve Reich, Alvin Lucier. Stockhausen dans les années 50 : "On peut dire qu'à l'avenir la musique deviendra spatiale. Je crois que le mouvement des sons dans l'espace sera aussi important que la mélodie, l'harmonie, le rythme, la dynamique, le timbre ».! ! ! ! En 1956, lors de la première de Gesang der Jünglinge pour bande seule à la WDR, Stockhausen applique les principes de la projection spatiale en répartissant cinq groupes de hauts parleurs respectivement autour et au dessus du public. En 1969, il jouera Hymnen dans les grottes de Jeita au Liban, puis en 1972 sur le site de Persépolis : le cadre, le choix des lieux sont d'une importance primordial dans le processus de mise en espace.! ! En 1970, Stockhausen, accompagné de l'architecte Fritz Bornemann, conçoit un auditorium sphérique de 28 mètres de diamètre pour le planétarium du pavillon allemand de l'exposition universelle d'Osaka. Il y voit une architecture idéale de spatialisation du son : le son était projeté dans 55 haut-parleurs qui entouraient complètement un public de 550 auditeurs. En 1973, Christian Clozier présente le Gmebaphone et en 1974, François Bayle élabore l'Acousmonium du GRM composé de 72 projecteurs sonores.! ! Iannis Xenakis produit également plusieurs travaux d'importance : Diamorphoses (1957), Concret pH (1958), Orient-Occident musique extraite du film homonyme d'Enrico Fulchignoni (1960), Bohor (1962), ainsi que d'autres réalisations mêlant musique, architecture et spectacle visuel comme le Polytope de Persepolis en Iran (1971), le Polytope de Montréal en 1967, le Polytope de Cluny à Paris (1972), le Polytope de Mycènes (1978) ou encore le Diatope "La légende d'Eer" pour l'inauguration du Centre Georges Pompidou en 1978... Bien que connu principalement en tant que compositeur Iannis Xenakis, a un impact particulier sur l'histoire de la musique électronique, il développe notamment un système de composition qu'il nomme musique stochastique où il met en relation la musique et les mathématiques (3). ! ! En 1966, il fonde à Paris l' EMAMu (Equipe de mathématique et Acoustique Musicales) qui deviendra en 1972, le Centre de Mathématique et Automatique Musicales (CEMAMu). Il y réalisera un système de composition musicale : l'UPIC (4). Au départ ingénieur, il travaille de 1947 à 1960 comme assistant de l'architecte Le Corbusier.! En 1956, Le Corbusier construit un pavillon pour l'exposition universelle de Bruxelles (automne 1958), commandé par la compagnie hollandaise Philips. A l'intérieur du bâtiment de forme triangulaire, Le Corbusier y projette des images accompagnées de "sons organisés" diffusés dans 425 haut-parleurs. Le programme musical comprend le Poème Electronique, composition pour bande magnétique d'Edgard Varèse, en alternance avec le Concret pH, de Xenakis (composé à partir des crépitements d'un charbon de bois en train de brûler).! ! Environ 2 millions de personnes assistent à cette première présentation "grand public" d'un spectacle alliant bruit électronique et image. Lors de l'expo d'Osaka en 1970 Xenakis présente sa composition Hibiki Hana Ma au Pavillon japonais, le son était alors projeté grâce à 800 hautparleurs. Toutes ces expériences sont autant de jalons qui permettent de découvrir les propriétés du support-espace. ! (1) Selon la notice technique du programme du concert. (2) Description de François Bayle du concert de 1951, in "Musiques acousmatiques, propositions... positions," Paris, I.N.A./Buchet-Chastel, 1993 (3) Autres pionniers pour lesquels les mathématiques seront une source capitale dans la création musicale : Lejaren Hiller, Joseph Schillinger, Milton Babbitt, Michel Philippot, Pierre Badaud ou encore Pietro Grossi (4) UPIC : Unité Polyagogique Informatique du CEMAMu, dont le but est de traduire les dessins effectués sur une palette graphique en sons